Aménagement urbain à Damas
Les actions de Nūr al-Dīn et Tankiz
p. 140-141
Texte intégral
1Réunifiant le Bilād al-Shām* dans le contexte de la réaction musulmane aux croisades, l’émir* zenguide Nūr al-Dīn s’établit à Damas en 1154 et ne cessa jusqu’à sa mort, en 1174, d’aménager sa nouvelle capitale, symbole de sa souveraineté politique et étendard de sa piété sunnite*. Tandis que l’enceinte fortifiée et ses portes, endommagées par un séisme en 1157, furent reconstruites et renforcées (cf p. 156‑157), l’édification, au sud de la citadelle, du Dār al-ʿAdl*, nouvelle institution où s’exprimait la justice du souverain, accentua un peu plus encore la militarisation de l’espace urbain.
2Dans la citadelle, bâtie au siècle précédent, Nūr al- Dīn fit construire la seconde grande mosquée ( jāmiʿ*) de la ville ; seule la mosquée des Omeyyades, qu’il fit aussi restaurer, accueillait jusque-là les fidèles pour la prière communautaire du vendredi. Désireux de renforcer le sunnisme*, son activité édilitaire fut largement consacrée au domaine religieux, fondant plusieurs mosquées (masjid-s*) et institutions d’enseignement à l’intérieur de la ville. Durant son règne, le nombre de madrasas* doubla à Damas, passant de onze à vingt- deux. Parmi elles, la grande madrasa funéraire al-Nūriyya, située au sud-ouest de la mosquée des Omeyyades, fut dotée d’un riche waqf* incluant notamment le hammam bâti à proximité, au cœur des souks. Enfin, il dota la ville d’un second hôpital, le Bīmaristān al- Nūrī, renommé jusqu’à la fin du Moyen Âge pour la qualité des soins qui y étaient prodigués.
3Durant les dernières décennies du xiiie siècle, la lutte contre les Mongols (cf p. 296‑297) et les croisés au Bilād al-Shām mobilisa l’essentiel des moyens humains et financiers du sultanat mamluk.
Activité édilitaire des élites militaires à Damas sous Nūr al- Dīn.

4Occupée et fortement endommagée par les Mongols, en 1260 et 1300, la ville ne se transforma qu’à la faveur d’une paix qui, au début du xive siècle, ouvrit une ère de prospérité économique et de stabilité politique favorisant un aménagement urbain sans précédent depuis l’époque de Nūr al-Dīn. À l’instar du Caire (cf p. 138‑139), sous le troisième règne du sultan al-Nāṣir Muḥammad (1310‑1341), Damas connut alors d’importants travaux, dans et hors les murs, sous l’impulsion du vice- sultan Tankiz qui gouverna la ville de 1312 à 1339.
5L’inauguration de sa mosquée, en 1318, son premier projet urbanistique d’ampleur, contribua à l’aménagement du faubourg ouest de Taḥt al- Qalʿa. Entre 1327 et 1330, les travaux de rénovation entrepris sous ses ordres redonnèrent à la mosquée des Omeyyades tout son lustre en même temps qu’ils associaient le nom de Tankiz au prestige de l’édifice. En 1328, la construction d’un somptueux palais, le Dār al- Dhahab, dans le quartier d’al- Khaḍrā’, emplacement du palais des gouverneurs (dār al-imāra*) à l’époque omeyyade, est sans doute à l’origine des importants travaux d’élargissement de voies de circulation et des marchés entrepris au cœur de la cité comme à sa périphérie entre 1329 et 1335. Une telle mainmise sur la ville, bien que longtemps encouragée par le sultan lui-même, ne pouvait que susciter la méfiance et entraîner sa disgrâce et son exécution en 1339.
6Il laissait alors à Damas quantité d’édifices religieux, de bâtiments commerciaux et de biens immobiliers constitués en waqf, comme en témoigne la liste de ses propriétés confisquées et vendues post-mortem.
Investissements et travaux d’urbanisme de l’émir Tankiz à Damas.


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