Activité édilitaire des Mamluks au Caire
p. 138-139
Texte intégral
1Sans légitimité religieuse et arrivés au pouvoir à la faveur d’un coup d’État (cf p. 90), les Mamluks n’hésitèrent pas à endosser le rôle de promoteurs urbains caractérisant traditionnellement l’activité édilitaire des souverains musulmans.
2Combattants du jihad* contre les croisés puis les Mongols (cf p. 296‑297), ils poursuivirent au Caire l’œuvre de diffusion du sunnisme* renaissant engagée par Saladin depuis le renversement du califat chiite* fatimide en 1171 (cf p. 76‑77). Si Aybak (r. 1250‑1257), le premier sultan mamluk, fonda sa madrasa* à Fustat, cité populaire conservant encore alors une importance religieuse et commerciale, Baybars (r. 1260‑1277), quant à lui, préféra investir le cœur d’al-Qāhira : sa madrasa jouxtait celle d’al-Ṣāliḥ Ayyūb et rattachait symboliquement les premiers mamluks à leur ancien maître.
3Ce faisant, il prolongeait aussi le processus de réaménagement de Bayn al-Qaṣrayn (« Entre- les- deux-palais ») initié par ses prédécesseurs ayyubides et inaugurait la transformation poursuivie par ses successeurs de cette ancienne artère cérémonielle des califes fatimides en « mémorial du sultanat mamluk » (S. Denoix, 2000). En face d’elle, sur l’emplacement des anciens palais occidentaux fatimides, Qalāwūn (r. 1279‑1290) d’abord puis son fils Muḥammad érigèrent deux complexes architecturaux, symbolisant la monumentalisation qui gagna l’architecture religieuse des sultans mamluks. Dès lors, les édifices religieux érigés par les sultans combinèrent plusieurs fonctions : prière (mosquées), enseignement (madrasas), dévotion spirituelle (khānqāh-s*) et funéraire (turba*) ou œuvre caritative (hôpital ou maristan*).
Intérieur du complexe du sultan al-Ẓāhir Barqūq, Le Caire.

© Moh Hakem, 2016.
4Aux xive et xve siècles, les sultans continuèrent d’aménager la voie cérémonielle qu’ils empruntaient de Bāb al-Futūḥ, au nord, à Bāb Zuwayla, au sud, puis jusqu’à la citadelle, lors des nombreuses processions qu’ils donnaient à voir à leurs sujets : la partie nord fut notamment investie par Baybars II, Barqūq, et Barsbāy, la partie sud, par Shaykh et Qāytbāy et, au-delà de Bāb Zuwayla, par le sultan Shaʿbān.
5À l’extérieur d’al-Qāhira, les sultans n’hésitèrent pas non plus à marquer le paysage de leur empreinte monumentale. Que ce soit la mosquée de Baybars à al-Ḥusayniyya, au nord d'al-Qāhira ou celle d’al-Nāṣir Muḥammad, au bord du Nil, au nord de Fustat, l’activité édilitaire des sultans contribua au développement urbain de la ville et témoignait de la croissance démographique de certains quartiers. Au pied de la citadelle, dans les années 1360, le sultan Ḥasan fit bâtir un monumental complexe qui, polarisant une nouvelle zone d’urbanisation, permit d’unifier al-Qāhira et Fustat.
6Plus tardivement, au xve siècle, la constitution d’une nouvelle nécropole royale au nord-ouest d’al- Qāhira, dans le désert, concentra les investissements des sultans qui y bâtirent de superbes complexes funéraires, aujourd’hui menacés de destruction de même que, très récemment, ceux du cimetière Sud.
Les institutions religieuses fondées au Caire par les sultans mamluks (1250‑1517).

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