Activité édilitaire des Mamluks à Jérusalem
p. 136-137
Texte intégral
1Bien que peu importante sur les plans politique et économique, Jérusalem, tout au long de l’époque mamluke, n’en a pas moins conservé et renforcé son prestige de troisième ville sainte de l’Islam.
2La « deuxième islamisation », qui s’ouvre après la conquête de la ville par Saladin en 1187, transforma Jérusalem en centre cultuel et intellectuel sunnite. À l’image des principales cités du Bilād al-Shām*, le paysage urbain de Jérusalem se couvrit alors de fondations pieuses musulmanes.
3Entre le milieu du xiiie et le début du xvie siècle, on recense dans la ville quatre-vingt-six nouvelles institutions dédiées à l’élaboration et à la transmission du droit (madrasas*) et à l’étude des traditions du prophète Muhammad (dār al-ḥadīth*), à la diffusion des pratiques mystiques soufies* (khānqāh-s*, zāwiya-s*), à l’accueil des pèlerins musulmans et aux œuvres caritatives (ribats*). Hormis pour quelques édifices érigés par des dignitaires étrangers et leur entourage, l’activité de construction dans la ville à cette époque fut essentiellement à porter au crédit des sultans mamluks, des grands officiers de l’armée et des hauts commis de l’État, dont l’œuvre édilitaire constitua le véritable moteur des transformations de l’espace urbain qui ont donné naissance à la « vieille ville » d’aujourd’hui.
4La localisation de ces institutions religieuses, mais aussi des biens de rapport constitués en waqf* (cf p. 130‑131) qui permettaient de les financer, démontre, comme le souligne J. Loiseau, un recentrage de l’espace urbain autour du Ḥaram al-Sharīf dans lequel l’action urbanistique des sultans mamluks, – plusieurs d’entre eux s’y rendirent en pèlerinage –, se concentra volontiers, que ce soit dans le Dôme du Rocher, la mosquée al- Aqṣa ou sur l’esplanade. Ainsi, un nombre important d’institutions religieuses nouvelles bordèrent désormais directement à l’ouest et au nord le sanctuaire, et se concentrèrent le long des rues menant aux différentes entrées du côté ouest du Ḥaram (Bāb al- Nāẓir, Bāb al-Ḥadīd, Sūq al-Qaṭṭānīn et Bāb al-Silsila).
5Dans cette reconfiguration de l’espace urbain, les aménagements réalisés sur la voirie ou les édifices eux- mêmes (élévation du niveau des rues pour atteindre celui de l’esplanade ou percement de fenêtres donnant sur l’espace sacré) concouraient ainsi à associer les Mamluks à la sacralité du lieu et à s’en attribuer une part.
Madrasa al-Ashrafiyya de Jérusalem construite en 1482 sous le patronage du sultan al-Ashraf Qāytbāy.

© Ludvig14, 2015.
Activités édilitaires à Jérusalem aux xive et xve siècles.

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