Activité édilitaire des élites politico-militaires à Bagdad (xie-xiie siècle)

Vanessa Van Renterghem

p. 134-135


Texte intégral

1La Bagdad médiévale, construite en briques, était soumise à de destructrices crues du Tigre ainsi qu’à des incendies et des tremblements de terre. Aux xie et xiie siècles, un certain nombre d’espaces étaient en friche, donnant à des visiteurs comme l’Andalou Ibn Jubayr (fin du xiie siècle) l’impression d’une ville en ruine. En fait, les matériaux étaient remployés pour bâtir de nouveaux édifices, et la ville était ainsi en (re)construction perpétuelle.

Activités édilitaires des élites seljukides à Bagdad au xiie siècle.

2Aux xie et xiie siècles, les Seljukides bâtirent un palais sur la rive orientale, non loin des anciens palais buyides, bientôt entouré des résidences de leurs hauts fonctionnaires. C’est à l’entourage seljukide que l’on doit la fondation des premières madrasas* de Bagdad (cf p. 200‑201) et de nombreux bâtiments abritant des groupes de mystiques, les ribats* (cf p. 194‑195), presque tous situés sur la rive orientale, en particulier au nord des quartiers califaux. Le premier sultan ­seljukide, Ṭughril Beg (r. 1038‑1163), commandita aussi des travaux sur la rive occidentale, dans le quartier du Karkh, qu’il entoura de fortifications et dota d’infrastructures, peut-être pour y confiner une population à forte composante chiite*. Les Seljukides restaurèrent ensuite l’hôpital fondé par les Buyides en bordure du Tigre.

3Au xiie siècle, les califes abbassides, ayant recouvré leurs prérogatives politiques et financières, commanditèrent de nombreux travaux publics, de la fortification des quartiers califaux à la réparation des ponts et canaux indispensables à la vie locale. Hauts fonctionnaires et princesses abbassides fondèrent de nombreux ribats et madrasas, surtout sur la rive orientale. Les civils bagdadiens intervenaient également sur la rive occidentale, moins directement investie par les califes et sultans ; les plus riches se faisaient édifier de belles résidences aristocratiques sur les berges du Tigre et fondaient des institutions, dont les waqf-s* étaient souvent financièrement plus fragiles que ceux des gouvernants. Dans l’ensemble, les fondations des xie et xiie siècles renforcèrent la tendance au développement privilégié de la rive orientale de Bagdad, où se concentraient lieux de pouvoir (palais califaux et sultaniens, bâtiments administratifs), institutions religieuses et de savoir (madrasas et ribats) et luxueuses résidences des élites politiques, civiles et militaires de l’époque.

Activités édilitaires des califes et civils bagdadiens aux xie et xiie siècles.


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