La conquête de l’Anatolie et l’expansion ottomane
p. 104-105
Texte intégral
1À l’instar de la conquête de l’Inde, celle de l’Anatolie marque une nouvelle phase d’expansion du monde islamique à partir du xie siècle (cf p. 82‑83).
2Depuis les années 1030, l’Anatolie, qui attirait par ses riches pâturages, était en proie aux raids turkmènes, mais c’est la victoire du sultan seljukide Alp Arslān sur les Byzantins à Mantzikert en 1071 qui en marque symboliquement la conquête. Les premiers émirats furent fondés dès la fin du xie siècle : Danishmendides (c. 1097‑1178) en Anatolie centrale, Mengüjekides (c. 1118‑1228) dans la vallée de l’Euphrate et Saltuqides (c. 1100‑1202) à l’est.
3Ce nouveau « Far West » était également une terre d’exil pour une branche, tombée en disgrâce, de la famille des Seljukides d’Iran. Tout d’abord au service des Byzantins, Sulaymān ibn Qutulmush s’empara ensuite de Nicée et fonda le sultanat des Seljukides de Rūm, ainsi nommé en référence au terme arabe (Rūm*) désignant les Byzantins et leur territoire. Repoussés vers 1096 autour de Konya, les Seljukides de Rūm assirent leur hégémonie sur l’Anatolie durant la seconde moitié du xiie siècle. Sous le règne de Qilij Arslān II (r. 1156‑1192), les institutions musulmanes (mosquées, madrasas* et zāwiya-s*) se multiplièrent et Konya devint un centre urbain florissant comme le reflète le riche décor de son palais. Profitant de l’éclatement de l’Empire byzantin après la prise de Constantinople par les croisés en 1204, les sultans ʿIzz al-Dīn Kaykāwūs Ier (r. 1211‑1220) et ʿAlāʹ al-Dīn Kayqubāḍ Ier (r. 1220‑1237) s’étendirent en Anatolie orientale et désenclavèrent leur territoire en prenant les ports de Sinop, Antalya et Alanya. Le sultanat était alors au cœur de routes commerciales, dont témoignent les nombreux caravansérails* qui parsemaient le territoire. La défaite face aux Mongols à Köse Dağ en 1243 mit un terme à l’expansion seljukide et entraîna l’intégration du sultanat dans l’empire ilkhanide à partir de 1277, puis sa disparition à la fin du xiiie siècle.
4Dès les années 1290, des chefs turkmènes poursuivirent la conquête et établirent des principautés autonomes, appelés beyliks, sur les marges occidentales de l’Anatolie. Parmi ces beyliks, celui des Ottomans, fondé par Osman (c. 1299‑1324) en Bithynie, était appelé à un brillant avenir. Sous le règne d’Orhan (r. 1324‑1362), les Ottomans prirent le contrôle des principales villes de la région dont Bursa, qui devint la première capitale de l’Empire, et traversèrent les Dardanelles pour s’implanter sur la rive européenne. Sous ses successeurs, les conquêtes continuèrent de manière ininterrompue, dans les Balkans, où Édirne devint la deuxième capitale, et en Anatolie. La défaite de Bayezid Ier (r. 1389‑1402) face à Tamerlan à Ankara en 1402 (cf p. 98‑99) marqua un coup d’arrêt et ouvrit une décennie de guerre civile entre ses fils. Mehmed Ier (r. 1413‑1421) parvint toutefois à rétablir l’unité de l’Empire ottoman et relança les conquêtes sur les deux rives des détroits. Le règne de son petit-fils Mehmed II (r. 1451‑1481) s’ouvrit par la conquête de Constantinople en 1453, mettant un terme définitif à un Empire byzantin millénaire. La ville, repeuplée et reconstruite à grands frais, devint alors la capitale d’un vaste empire. À la fin du xve siècle, les derniers rivaux anatoliens furent soumis et les rives de la mer Noire, devenue un « lac ottoman », furent également conquises. Aux siècles suivants l’expansion se poursuivit et l’Empire ottoman s’étendit des portes de Vienne à Bagdad et à l’Afrique du Nord.
Panneau de céramique, kiosque de Konya, c. 1170.

© New-York, Metropolitan Museum of Art, inv. 1976.245.
L’Anatolie vers 1220.

L’expansion ottomane d’Osman à Mehmed II (c.1300-1481)

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