La reprise des mondes chrétiens
La Première Croisade
p. 80-81
Texte intégral
1Au niveau géopolitique, en Occident comme en Orient, divers événements encouragèrent les Latins à lutter contre l’Islam par les armes.
2Au nord de la péninsule Ibérique, les chrétiens commencèrent à conquérir des terres, ce qu’au xixe siècle on appela la Reconquista (cf p. 78‑79), terme sous-entendant que les territoires musulmans avaient précédemment appartenu aux conquérants, les Rois catholiques (royaume de Castille-León et d’Aragon), alors qu’avant les musulmans, c’étaient les Wisigoths qui peuplaient la Péninsule.
3Dans le même temps, en Anatolie, l’avancée des Turcs seljukides menaçait l’Empire byzantin (cf p. 84‑85).
4De fait, l’aide que les chrétiens occidentaux pensaient apporter aux Byzantins était intéressée : après le grand schisme de 1054 séparant les Églises* d’Orient et d’Occident, il s’agissait d’établir des enclaves catholiques en Terre Sainte. De plus, un intérêt économique était en jeu : les républiques maritimes italiennes de Gênes et Venise avaient vu leurs routes commerciales vers l’Orient coupées par les Seljukides et il convenait de rétablir ce commerce international lucratif.
5Le but officiel des croisades était de reprendre aux musulmans Jérusalem, ville sainte abritant le Saint-Sépulcre, le tombeau du Christ. Lors du concile* de Clermont-Ferrand en 1095, le pape Urbain II exhorta les chrétiens à conquérir Jérusalem. Les Latins revêtirent alors la tunique blanche marquée de la croix rouge du Christ, « croisée », et, en 1096, deux groupes partirent d’Allemagne et descendirent le Danube vers Constantinople dans le but de rejoindre la Palestine. Ils marchèrent jusqu’à Nicée, tenue par les Turcs, mais mal armés, non expérimentés, ils furent immédiatement défaits.
6En août 1096, des dizaines de milliers de personnes partirent de plusieurs régions de France et d’Italie méridionale ; on les appelait « les Francs ». Après la prise de Nicée et de Dorylée, puis d’Antioche (1098), assiégée, prise puis pillée, ainsi que d’Édesse, les croisés se mirent en route vers Jérusalem qu’ils assiégèrent en 1099.
7Pendant les préparatifs du siège, le calife fatimide, qui avait pris Jérusalem aux Seljukides, envoya une ambassade aux croisés afin de négocier, mais ces derniers exigèrent une reddition sans condition, ce que les musulmans refusèrent. Les croisés, infiniment plus nombreux que les musulmans défendant la ville, l’assiégèrent durant 40 jours, au bout desquels ils y entrèrent, massacrèrent les habitants et pillèrent leurs richesses.
8À la suite de cette Première Croisade, les Francs établirent les États Latins d’Orient : principauté d’Antioche (Bohémond de Tarente), comté d’Édesse (Baudouin de Boulogne), royaume de Jérusalem (Godefroy de Bouillon, puis son frère Baudouin) et comté de Tripoli (prise, plus tard, en 1109 par Bertrand de Saint Gilles, fils de Raymond). Par la suite, les républiques maritimes italiennes (Amalfi, Gênes, Pise et Venise) purent profiter à nouveau des routes commerciales (cf p. 262‑263).
« Le siège de Nicée », Les Estoires d’Outremer de Guillaume de Tyr (xiiie siècle).

© Paris, BnF, ms. Français 2630, fol. 22v.
Un témoin de la prise de Jérusalem : Raymond d’Agiles
« Parmi les Sarrazins, les uns étaient frappés de mort, ce qui était pour eux le sort le plus doux ; d’autres percés de flèches se voyaient forcés de s’élancer du haut des tours ; d’autres encore, après avoir longuement souffert, étaient livrés aux flammes, et consumés par elles. On voyait dans les rues et sur les places de la ville des monceaux de têtes, de mains et de pieds. Les hommes de pied et les chevaliers ne marchaient de tous côtés qu’à travers les cadavres. […] Dans le temple et dans le portique de Salomon, on marchait à cheval dans le sang jusqu’aux genoux du cavalier. »
Raymond d’Agiles, Histoire des Francs qui ont pris Jérusalem, p. 379.
La croisade « des barons » (août 1096‑1099).

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