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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Les gestes funéraires Sépultures individuelles et sépultures multiples Position générale des squelettes Précisions sur les gestes funéraires État de conservation du matériel ostéologique Des particularités démographiques propres au site des Fédons De l’individu à la population Recherches de liens de parenté et données sur l’état sanitaire et social Caractères ostéoscopiques particuliers Notes de bas de page Auteurs

    Saison d’une peste (avril - septembre 1590)

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    2. Des données archéologiques et anthropologiques aux interprétations

    Jean Acotto, Syvlia Bello, Corinne Bouttevin, Dominique Castex, Henri Duday, Olivier Dutour, Nathalie Moreau, Michel Panuel, Patrick Reynaud et Michel Signoli

    p. 37-62

    Texte intégral Les gestes funéraires Sépultures individuelles et sépultures multiples Position générale des squelettes Précisions sur les gestes funéraires L’usage d’épingles L’usage de ferrets Éléments de cuir et objets domestiques Matériel de parure Un linceul cousu ? État de conservation du matériel ostéologique Des particularités démographiques propres au site des Fédons Objectifs de l’analyse « paléodémographique » Méthodes d’estimation des paramètres démographiques et données brutes De l’individu à la population Schéma de mortalité archaïque et tables types de mortalité Les quotients de mortalité Le principe de minimalisation des anomalies Analyse de la composition par âge et par sexe de la population des Fédons Le recours aux sources historiques Recherches de liens de parenté et données sur l’état sanitaire et social Images sinusiennes Caractères ostéoscopiques particuliers Lésions paléopathologiques Notes de bas de page Auteurs

    Texte intégral

    1L’inhumation des victimes en temps de peste doit faire face aux différentes contraintes du phénomène épidémique (importante surmortalité en un bref intervalle de temps) responsable par ailleurs de caractéristiques que l’interprétation des données archéologiques et anthropologiques peut mettre en évidence.

    2Une attention particulière sera tout d’abord portée aux modes d’inhumations et à la reconstitution des gestes funéraires dans une approche pondérée par l’état de conservation du matériel ostéologique.

    3Dans un second temps, nous tenterons d’approcher plus finement encore le recrutement des patients de l’infirmerie en examinant les indices ostéoscopiques et paléopathologiques fournissant des informations sur les liens de parenté éventuels et l’état sanitaire de la population touchée par l’épidémie.

    Les gestes funéraires

    4L’interprétation des faits archéologiques en termes de modes d’inhumation fait appel à des modes d’analyses bien précis maintenant largement diffusés (Duday 1978, 1987a et b, 1994 ; Masset 1987 ; Duday et al., 1990). Chacune des tombes du cimetière des Fédons a ainsi fait l’objet d’une fouille minutieuse182 et d’un enregistrement rigoureux ; un tableau en annexe 2 en résume les principales caractéristiques.

    5À la régularité des formes et des comblements des sépultures répond un caractère très systématique ou uniforme des dépôts des corps. Ces faits invitent à traiter d’une manière générale les modes d’inhumation pour aborder ensuite quelques points particuliers en relation avec la forme des tombes ou les gestes funéraires.

    Sépultures individuelles et sépultures multiples

    6Tous les défunts ont été l’objet de dépôts primaires183. Les fosses sont pour la plupart individuelles (soixante-quinze sur cent une, correspondant à seize hommes, dix-neuf femmes et quarante immatures), mais il existe également vingt-six tombes multiples184 (une quadruple, quatre triples et vingt et une doubles pour un total de treize hommes, treize femmes et trente-deux immatures)185.

    7Nous avons pu mettre en évidence une nette prédominance de l’inhumation des défunts en pleine terre186. En effet, pour 84 sépultures sur 101, la décomposition des corps s’est produite en espace colmaté. Pour les autres cas, essentiellement des inhumations d’immatures, le mauvais état de conservation des os ne permet pas de conclure avec certitude à des dépôts en pleine terre. À titre d’exemple, la description détaillée du squelette de la sépulture 83 (cf. annexe 2) rend compte des observations qui permettent d’argumenter ce type de décomposition.

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    Fig. 15. Défunt disposé contre le rebord sud de la fosse (SP 17).

    8Afin de démontrer la simultanéité des dépôts au sein des tombes multiples, nous prendrons l’exemple de la sépulture 85 (fig. 11) (cf. annexe 2).

    9La répartition en plan des sépultures témoigne d’une distribution aléatoire en fonction du sexe et de l’âge des individus. Les sépultures individuelles comme les multiples contiennent indifféremment des hommes, des femmes et des enfants. Nous mentionnerons toutefois que, parmi les sépultures doubles, l’association adulte et enfant est la plus fréquente (quatorze cas)187 ; six autres sépultures doubles réunissent deux enfants, une seule associe deux adultes. Cette dernière et une des quatre sépultures triples sont les seules tombes multiples associant des adultes. Plutôt qu’une association qui tient compte des liens de parenté entre individus, nous serions enclins à voir dans ces faits un souci d’économie dans la gestion des corps par rapport à l’espace. C’est notamment ce qui apparaît à travers le fait que ces associations adultes et enfants concernent surtout de jeunes enfants (neuf ont moins de cinq ans) occupant un volume réduit dans la fosse.

    Position générale des squelettes

    10Les individus ont été inhumés sur le dos et la tête à l’est, à l’exception de deux d’entre eux qui reposent légèrement sur leur côté droit (SP 86 et SP 97-US 314), trois autres individus présentent une orientation inverse. Parmi eux, deux sont les troisièmes inhumés des fosses triples SP 85 et SP 86, où les corps se superposent tête-bêche aux premières inhumations et le troisième individu est un sujet immature (SP 59) dans une fosse individuelle.

    11L’attitude des défunts dépend de la forme de la fosse mais également de la façon dont le fossoyeur a placé les corps dans les tombes. Ainsi, il n’est pas rare de constater que les sujets déposés seuls dans une fosse ne sont pas forcément centrés mais souvent décalés ou plaqués vers un bord de la fosse (fig. 15) ou bien installés de façon oblique dans la tombe. Les membres peuvent également adopter une position fléchie sans pour autant éviter un obstacle. Pour les tombes multiples, la position des individus dépend de la présence dans une même fosse de plusieurs sujets : soit les derniers occupants ont été disposés de façon à éviter le premier inhumé et ils sont alors fléchis (SP 52, fig. 12), soit la superposition des corps a entraîné des postures particulières (SP 85, fig. 11). De même, dans la partie sud du cimetière, région du plissement naturel évoqué plus haut, la présence dans les tombes de volumineux blocs calcaires montre que les fossoyeurs ont adapté la position des corps à ces obstacles (SP 87).

    12L’étude de la position du crâne de 129 défunts188met en évidence deux positions dominantes. Dans la majorité des cas (68,2 %), le crâne s’est maintenu dans l’axe du corps, pour cinquante-deux sujets, il apparaît principalement par la face (40,3 %), pour trente-six autres, par le sommet lorsque les crânes des défunts reposaient contre l’extrémité incurvée de la fosse (27,9 %). Pour les quarante et un sujets restants (31,8 %), les crânes apparaissent pour vingt-six individus par le côté droit (20,2 %) et pour quinze autres par le côté gauche (11,6 %). Ces positions sont indépendantes du type de fosse mais également du sexe et de l’âge des défunts.

    13Les positions des membres supérieurs ont pu être déterminées pour 109 individus sur 133 (soit 82 %). Elles ont été classées en dix groupes distincts avec une nette prédominance de trois groupes (fig. 16) représentant soixante-dix-huit sujets (71,6 %) issus de tombes à inhumation simple ou multiple. Leurs membres supérieurs sont fléchis et les mains reposent sur le tronc. Parmi ces soixante-dix-huit individus, la majorité des défunts ont une main reposant sur le thorax, l’autre sur l’abdomen (G3 = trente et un cas). Viennent ensuite, les sujets dont les deux mains sont posées sur le thorax (G1 = vingt-neuf cas) ou sur l’abdomen (G2 = dix-huit cas). Ces groupes correspondent respectivement à 28,4 % ; 26,6 % et 16,5 % de la population étudiée. Les trente et un sujets restants (28,4 %) se répartissent dans sept autres groupes dont quelques-unes des positions seulement sont reproduites à plus d’une unité189. De ces observations, il se dégage que parmi les 109 cas étudiés, cinquante-sept individus ont leurs membres supérieurs disposés symétriquement et qu’il s’agit principalement de sujets inhumés seuls dans une fosse. Enfin, il apparaît que les positions dominantes — les mains reposant sur le thorax (G1), sur l’abdomen (G2) et une main sur le thorax, l’autre sur l’abdomen (G3) — se retrouvent plus fréquemment dans les tombes individuelles (cinquante et un cas contre vingt-sept) que dans les fosses multiples où les positions des corps ont nécessairement dû être adaptées à la proximité des défunts. Par ailleurs, outre la position des membres supérieurs par rapport au corps, leur superposition ou leur juxtaposition fréquentes peut être soulignée.

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    Fig. 16. Fréquence de disposition des membres supérieurs.

    14La position des membres inférieurs a été observée sur 113 défunts (soit 85 %). Ici encore, trois groupes prédominent (soixante-dix-neuf défunts, soit 70 % de la population étudiée). Les membres inférieurs peuvent être en extension, parallèles (dix individus en fosse individuelle). Un autre groupe concerne les individus dont les genoux sont convergents et les jambes parallèles (trente-deux cas dont vingt-quatre en tombes individuelles). Enfin se distingue un troisième groupe, membres inférieurs convergents et pieds superposés ou non (trente-sept cas) qui se retrouve indifféremment dans les inhumations simples ou multiples. Les trente-sept sujets restants présentent des positions nettement plus variées dont la plupart ne peuvent résulter que de la taphonomie (ex. genoux convergents et pieds divergents...) ; elles ne peuvent donc pas être prises en compte dans la discussion sur le mode de dépôt des corps.

    15L’analyse croisée de toutes ces données nous amène à conclure que les positions semblent plus ou moins codifiées. Ainsi, la disposition des défunts allongés sur le dos, orientés est-ouest, la tête à l’est, les membres supérieurs fléchis avec les mains en avant du tronc et les membres inférieurs en extension plus ou moins rapprochés, semble être la position recherchée en priorité.

    16D’autres positions, moins accoutumées, apparaissent surtout liées aux aléas d’un dépôt peut-être plus difficile ou hâtif du corps. C’est le cas des attitudes des individus des fosses triples du sud-est du cimetière (SP 85 et SP 86) qui résultent de la façon dont les fossoyeurs ont déposé les sujets dans leurs tombes ; notamment, les positions des membres supérieurs évoquent une mise en place aléatoire.

    17De plus, la taille et la forme des fosses ont pu dans certains cas avoir une incidence sur la posture des adultes et notamment sur la position des crânes. Des fosses trop courtes ont entraîné une flexion des corps ou des rachis cervicaux contraints contre le bord de la fosse.

    18Enfin, nous soulignerons que si les positions des mains en avant du thorax et les membres inférieurs en extension concernent surtout les sujets immatures, nous n’avons trouvé aucune véritable corrélation entre la position des membres, l’âge et le sexe des individus.

    Précisions sur les gestes funéraires

    19Quelques témoins archéologiques, notamment les objets, offrent l’opportunité de saisir les bribes de certaines pratiques. Aux Fédons, soixante petits objets sont répartis dans trente-trois tombes et concernent trente-six individus (cf. annexe 2) (soit 32,7 % du total des sépultures et 27 % du total des inhumés). Parmi ce matériel, trente-quatre épingles, douze ferrets et un fragment de cuir pourraient se rapporter directement à l’habillement, tandis qu’un couteau, trois bagues, quatre anneaux et trente et une perles s’associent à la parure.

    L’usage d’épingles

    20Les trente-quatre épingles ont été recueillies sur dix-huit individus (soit 13,5 % du total des individus) dont onze immatures, trois femmes et quatre hommes. Leur taille très variable est comprise entre 14 mm et 40 mm de longueur pour 0,9 mm à 1,2 mm de diamètre190. Leur tête de forme sphérique est réalisée par enroulement de la tige en bronze ; vingt-six exemplaires présentent une torsion plus ou moins importante du corps.

    21Six épingles appartiennent à une même sépulture (SP 39) ; se déclinent ensuite plusieurs cas : cinq épingles sont associées à un individu, quatre autres à deux sujets, deux autres à un squelette et enfin onze inhumations ont livré une seule épingle191. Leur localisation sur le squelette est très variable192 (fig. 17). Elles se situent principalement dans la partie supérieure du corps : à proximité de la mandibule193, au niveau du thorax, de l’abdomen et des membres supérieurs194. Quelques-unes, beaucoup plus rares, ont été retrouvées dans la partie inférieure du corps : proche de l’articulation coxofémorale195 ou au niveau des membres inférieurs196. Pour les sépultures comprenant plusieurs épingles, celles-ci sont toujours orientées de la même façon, indiquant que l’épinglage s’est toujours fait dans le même sens.

    22La position de certaines épingles ou groupes d’épingles pourrait dans certains cas se rapporter à une fonction particulière197 ; toutefois seul l’individu de la sépulture SP 45 - US 151 (fig. 17, type 2) entrerait dans le schéma d’un linceul fermé à l’aide d’épingles. Pour les autres cas, la disposition et la quantité d’épingles nous font douter de l’existence d’un linceul épinglé, sans que l’on puisse toutefois négliger la possibilité qu’elles aient été associées à d’autres moyens de fermeture tels que coutures, bandelettes, liens ou nœuds servant à resserrer les tissus. Lorsque l’épingle se situe à proximité de la mandibule, elle pourrait correspondre à la fixation d’une bande de tissu pour en faire une coiffe. Plus délicate est l’interprétation de plusieurs épingles sur le thorax de l’individu (type 3) ; s’agit-il de l’épinglage d’un sachet aux vertus prophylactiques, d’un insigne ou d’une pièce d’habillement ? En effet, bien avant d’être utilisées pour les morts, les épingles font partie de la tenue vestimentaire comme l’atteste l’iconographie de l’époque (Béguin, 1970).

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    Fig. 17. Localisation des épingles.

    L’usage de ferrets

    23Indubitablement associés à l’habillement198, des ferrets, destinés aux aiguillettes, cordons ou lacets fermant les vêtements (Egan et Pritchard, 1991), ont été découverts sur les défunts. En tout, douze exemplaires étaient associés avec certitude à huit sujets immatures199 (soit 6 % du total des individus). Ces éléments très fins, de forme conique, sont confectionnés à partir d’une mince feuille de métal cuivreux enroulée. Leurs dimensions sont assez régulières avec une longueur de 18 mm à 25 mm et un diamètre de 1 mm à 2 mm (cf. annexe 3). De même que les épingles, leur localisation, sans toutefois être identique, est variable ; elle concerne essentiellement la région du thorax (SP 28, 36, 52-US 185, 59, 68 et 71), du bassin (SP 71) et de la jambe gauche (SP 16-US 55 et SP 48-US 167), ce qui semble bien correspondre à l’usage courant de ces accessoires dans l’habillement.

    Éléments de cuir et objets domestiques

    24L’inhumation habillée peut encore être suggérée par la présence d’un fragment de cuir, conservé sur une bague portée à l’auriculaire droit d’une femme (SP 87-US 319). Nous avons émis l’hypothèse d’un gant de cuir mais en l’absence d’analyse précise, nous ne pouvons pas exclure la possibilité qu’il s’agisse d’un fragment de peau humaine. Un couteau pliant en fer (sa longueur dépliée atteindrait 19 cm), à lame incurvée nettement plus courte que le manche probablement riveté, était disposé sous la partie proximale du fémur droit d’un homme (SP 83). Sa face en contact avec le fond de la fosse a conservé l’empreinte d’un tissu (fig. 18), d’origine peut-être végétale (lin ?)200, pouvant être associé à un vêtement ou une bourse.

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    Fig. 18. Couteau pliant portant une empreinte de tissu (moulage ; inv. 48, cliché C. Hussy, SRA-DRAC PACA).

    Matériel de parure

    25Au mobilier en bronze se rattachent sept bagues ou anneaux (cf. annexe 3) appartenant à six individus (soit 4,5 % du total des individus), cinq femmes et un homme.

    26Les anneaux sont portés par trois femmes, à l’auriculaire droit (SP 87-US 319), dans un cas à l’annulaire droit (SP 74) et dans un dernier cas à chaque annulaire (SP 29). Leur jonc très fin et mince présente un contour circulaire légèrement irrégulier d’un diamètre interne de 18 mm environ. Deux autres bagues, à chaton, sont aussi portées par des femmes, à l’auriculaire gauche (SP 98) et à l’annulaire droit (SP 63). Ces dernières pièces sont formées d’un anneau s’élargissant en un chaton ovalaire, orné du monogramme IHS (fig. 19), aux épaulements soulignés de trois incisions gravées201. Enfin, une troisième bague à chaton, celle-ci en alliage d’argent, était portée à l’annulaire droit par un homme (SP 83) ; elle présente un jonc s’épaississant pour former un chaton quadrangulaire, entaillé vers le milieu. Plus difficilement interprétable est le cas de l’anneau de 10 mm de diamètre, constitué de deux fils de bronze torsadés, découvert sur le bassin d’une femme (SP 08).

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    Fig. 19. Bague avec chaton (inv. 62, cliché C. Hussy, SRA-DRAC PACA).

    27Complémentaires des objets de parure, deux ensembles rassemblant des perles en ambre et en cristal de roche, facettées, ont été recueillis dans deux sépultures féminines. Dans un cas (SP 47-US 60), ces perles étaient présentes sur la main droite et dispersées au fond de la fosse (vingt-cinq perles dont deux en cristal de roche) ; dans l’autre (SP 4) elles ont été recueillies en laboratoire lors du tamisage du crâne (six perles dont une en cristal de roche). Les perles en ambre de couleur brun rougeâtre, de 5 mm à 9 mm de diamètre, présentent des traces d’usure liées aux frottements ; celles en cristal de roche sont bi-coniques et facettées, de 13 mm de long sur 5 mm à 9 mm de diamètre. Ces deux ensembles pourraient correspondre, selon leur localisation, d’une part, à un bracelet ou chapelet, et d’autre part, à un collier, parure de voile ou coiffe. La valeur prophylactique de ces matériaux ne peut être omise202 bien que ce ne soit pas l’unique cas d’utilisation de telles parures.

    Un linceul cousu ?

    28Bien que les textes attestent la pratique de l’inhumation en linceul203 cousu, en contexte d’épidémie, il est difficile d’en faire la démonstration sur le site des Fédons à partir des seules investigations d’anthropologie de terrain. Trois cas décrits en annexe 2 suggèrent cependant l’existence de telles pratiques. Ils se rapporteraient ici à des linceuls lâches tels qu’ils figurent dans l’iconographie de la fin du Moyen Âge. Ainsi, E. Mâle (1969) dans l’Art religieux de la fin du Moyen Âge en France présente un cas de linceul ample204. De même, la fouille récente d’un charnier de peste du xviiie siècle à Marseille (Signoli, 1998) a mis en évidence le caractère lâche de certains linceuls. Enfin, à la suite de D. Alexandre-Bidon (1993 : 183-206) qui relève de multiples variantes chronologiques ou régionales dans l’iconographie des linceuls, nous pouvons nous demander si le linceul ample des Fédons appartient à une particularité régionale qui perdure jusqu’au xviiie siècle, à Marseille par exemple, ou bien si, au contraire, ce caractère est plutôt à mettre en relation avec le contexte épidémique ; cette enveloppe saisissable par les pans de tissus restés libres pouvant permettre de manipuler et de déposer les défunts dans les fosses en évitant le contact du corps des pestiférés.

    N. M., H. D., D. C., P. R.

    État de conservation du matériel ostéologique

    29L’analyse des causes et des effets des processus taphonomiques, aboutissant à la constitution d’une série ostéo-archéologique à partir d’une population inhumée, est une étape incontournable dans toute étude anthropologique. L’état de conservation d’une série conditionne en effet la portée des interprétations d’ordres taphonomique, paléodémographique ou paléopathologique, qui revêtent dans le cas de la série des Fédons une valeur interprétative déterminante.

    30Sur le plan quantitatif, l’échantillon des Fédons présente un état de conservation moyen (indice de conservation anatomique ICA205 ; Dutour, 1989) de 45,64 %, ce qui revient à dire qu’en moyenne, moins de la moitié des squelettes est conservée. En revanche, l’indice de conservation moyen calculé à partir des os présents dans la collection est de 56,67 % ; ce qui signifie que les os encore présents sont, en moyenne, représentés par plus de leur moitié.

    31L’étude individuelle a permis de mettre en évidence des disparités de conservation quantitative entre les différentes catégories d’âge (Bello, 2001) : les sujets immatures sont moins bien conservés que les sujets matures (ICA moyen respectivement de 29,38 % et de 64,84 %).

    32Chez les individus immatures la valeur de l’ICA semble être en relation avec l’âge de ceux-ci : les valeurs les plus faibles étant celles des très jeunes enfants (7,02 % pour les enfants de moins de un an, 11,03 % pour les immatures âgés de 0 à 4 ans), les indices les plus élevés revenant aux adolescents (52,51 % pour les immatures âgés de 15 à 19 ans). Les différences ne sont pas significatives entre les classes d’âge de moins de 1 an et 1-4 ans, elles le deviennent par rapport à la classe d’âge 5-9 ans206 (p < 0,01) (fig. 20). Cette mauvaise conservation des enfants âgés de moins de 5 ans a déjà été attribuée dans d’autres études à la fragilité des ossements des enfants : Masset (1973), Henderson (1987), Walker et al. (1988), Dutour (1989), Guy et Masset (1997), Guy (1997). Selon Guthrie (1967), la conservation des divers segments osseux tient d’abord à leur résistance mécanique, mais celle-ci dépend de l’âge : les os jeunes, non épiphysés, riches en moelle et en tissu spongieux restent rares dans les collections ostéologiques car ils sont plus fragiles et plus sensibles aux agents de la putréfaction.

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    Fig. 20. Indices de conservation quantitative (ICA) chez les sujets immatures selon les différentes catégories d’âge et chez les sujets adultes.

    33Dans le cas des Fédons, la fragilité intrinsèque des os d’immatures se vérifie par une corrélation positive entre la profondeur d’inhumation et leur valeur moyenne d’ICA : l’augmentation des valeurs d’ICA va dans le même sens que l’augmentation des profondeurs d’inhumation pour les individus des classes d’âge 5-19 ans. À l’inverse, pour les 18 sujets de moins de 5 ans, la différence de profondeur d’enfouissement ne semble pas influencer directement la conservation, démontrant par là la fragilité propre de l’os à ce stade de maturation.

    34En ce qui concerne les individus adultes, nous avons observé une conservation différentielle significative en fonction du sexe (en faveur des sujets masculins) mais non en fonction de l’âge. La différence de valeurs entre les indices de conservation masculin et féminin rejoint les observations de certains auteurs (Walker et al., 1988 ; Masset, 1990) sur la conservation différentielle des ossements féminins, qui pourraient se conserver moins bien que les restes osseux d’individus masculins, plus robustes. La conservation des squelettes féminins les plus âgés n’est pas différente, ce qui ne va pas dans le sens d’autres études (Masset, 1990 ; Agarwal et Grynpas, 1996) qui proposent une conservation féminine plus faible pour l’âge avancé en concomitance avec la possibilité d’atteintes ostéoporotiques. Dans le cas spécifique de la collection des Fédons, cette conservation différentielle pourrait ainsi être expliquée par le faible effectif des classes d’âge « âgées » (seulement 3 hommes et 2 femmes).

    35Du point de vue qualitatif (indice de qualité osseuse, IQO207 ; Bello, 2001), la série est très mal conservée : l’indice de qualité moyen est de 26,32 % ; cela revient à dire qu’en moyenne les pièces osseuses présentent une surface corticale intacte sur seulement le quart de leur surface. Aucune différence n’est notée en fonction du sexe ou de l’âge des sujets (fig. 21). Paradoxalement, les trois immatures de moins de 1 an affichent les meilleures valeurs d’IQO. Il s’agit dans ce cas de sujets issus de tombes multiples. En dehors de ce cas spécifique, aucune corrélation entre conservation et profondeur d’enterrement n’a pu être établie, ni pour les individus immatures, ni pour les individus adultes.

    36En revanche, nous pensons pouvoir interpréter le très mauvais état de conservation qualitative de la collection comme étant la conséquence directe de l’action exercée par la couverture végétale du site. Les racines des plantes supérieures opèrent une dégradation du matériel ostéologique à la fois physique et chimique. Par ailleurs, elles s’insinuent à l’intérieur des os, où elles exercent une forte pression sur les parois causant leurs progressives fracturation et fragmentation. Le crâne en est un exemple caractéristique, les racines rentrant dans la boîte crânienne par ses orifices peuvent par la suite fragmenter le crâne en « forçant » les parois et les sutures. Au niveau des os longs, ce processus amène souvent à la désagrégation des extrémités osseuses. Les racines agissent sur la fraction minérale de l’os par augmentation de l’acidité du sol qui produit une dissolution de sa composante minérale. Cette augmentation du pH pourrait aussi être associée à une sécrétion fongique consécutive aux processus de décomposition des plantes (Grayson, 1988). Cette « root etching » (incision ; Lyman, 1996) cause une érosion progressive de la portion corticale de l’os et peut aboutir à sa complète dissolution avec perforation. Macroscopiquement, les empreintes des racines observées sur les os de la collection des Fédons donnent des formes « dendritiques » qui ont le plus souvent amené à la dissolution quasi complète de la surface corticale. Ce processus érosif, dans certains cas, a agi jusqu’à la perforation de la structure osseuse.

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    Fig. 21. Indices de conservation qualitative (IQO) chez les sujets immatures et adultes selon les différentes catégories d’âge.

    37Aucune différence n’a été observée par rapport à la profondeur d’enfouissement. Nous n’avons pas, par ailleurs, observé de processus de conservation différentielle (quantitative et qualitative) en fonction de la distribution spatiale des tombes dans le site ou du nombre d’individus inhumés dans ces tombes.

    38En résumé, nous avons pu expliquer l’existence d’une relation directe entre l’âge des sujets immatures et leur conservation par une fragilité propre de la structure osseuse. Ce processus de conservation différentiel en fonction de l’âge des individus pourrait entraîner une sous-représentation des très jeunes enfants, ce qui constitue un possible biais dans la reconstruction des structures des populations anciennes. La présence d’un manteau végétal recouvrant le site a permis d’attribuer la forte dégradation des surfaces corticales du matériel ostéologique aux effets physiques et chimiques des racines des plantes supérieures. Le mauvais état des surfaces corticales observé pour la collection des Fédons peut, à son tour, limiter les observations d’ordre paléopathologique, notamment pour l’ensemble du diagnostic des pathologies infectieuses : des différences dans les calculs de prévalence des atteintes pathologiques peuvent masquer des modes de conservation des surfaces corticales très différents.

    S. B., M. S., O. D.

    Des particularités démographiques propres au site des Fédons

    Objectifs de l’analyse « paléodémographique »

    39Si l’analyse de la composition par âge et par sexe d’une population archéologique est une étape souvent incontournable lors de l’étude de gisements funéraires, elle peut se révéler particulièrement pertinente dans une problématique aussi inhabituelle que celle du site des Fédons. En effet, l’exploitation des faits archéologiques a démontré une utilisation particulière de l’espace funéraire avec la présence de plusieurs sépultures multiples à dépôts simultanés. Par ailleurs, des données d’archives ont livré de précieuses informations en nous révélant qu’il s’agissait d’un site correspondant à des inhumations de victimes de peste. Nous avons donc des arguments différents mais complémentaires qui témoignent d’une mortalité anormale liée à un événement particulier (cf. supra p. 11). Ces résultats importants mettent en évidence un « recrutement » original et méritent donc d’être approfondis.

    40L’échantillon archéologique mis au jour dans ce type de contexte (décès de plusieurs individus dans des laps de temps très courts) peut être considéré comme le reflet « instantané » d’une population à un moment précis. Cependant, nous savons que le « coût humain » peut être très variable, tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif, selon la nature de la crise qui affecte les individus208. Donc, si l’on veut se permettre d’appréhender les mécanismes exacts de telle ou telle crise de mortalité et leurs impacts sur les populations, il apparaît alors indispensable d’exploiter au mieux les gisements funéraires liés à un contexte de crise et notamment d’analyser les distributions par âge et par sexe des individus inhumés, d’interpréter leurs éventuelles particularités et d’y associer, lorsque cela est possible, des sources écrites. De ce point de vue, le site des Fédons représente un domaine d’application tout à fait remarquable pour une analyse « paléo-démographique » susceptible de mettre en évidence des particularités propres à un type de crise.

    41Tout en restant lucide face aux difficultés liées à une telle entreprise209, mais à distance des débats actuels et des études où la paléodémographique est perçue comme une discipline permettant d’accéder à la structure démographique des populations du passé (Alesan, Malgosa et Simó, 1999 ; Bocquet-Appel, 2002 ; Buchet et Séguy, 2002 ; Hoppa et Vaupel, 2002)210, nous nous bornerons à une analyse « paléodémographique » restreinte mais précise qui privilégie une démarche archéologique avant tout orientée vers la détection des anomalies démographiques211. Cette démarche s’est d’ores et déjà révélée pertinente pour la compréhension du fonctionnement de certains ensembles funéraires, qu’il s’agisse de sites de type cimetière ou nécropole, ou bien de sépultures plurielles, témoignages de crises de mortalité (Castex, 1994 ; Murail, 1996 ; Sellier, 1996 ; Castex et Friess, 1998).

    42Grâce à des caractéristiques suffisamment bien définies, le site des Fédons doit permettre de fournir des premiers résultats en termes d’interprétation : l’échantillon archéologique peut-il être considéré comme relevant d’une « démographie naturelle » ou peut-on le rattacher à un phénomène de sélection des inhumés (un « recrutement » particulier du cimetière) et/ou à un épisode spécifique de crise de mortalité liée à la peste ? Il est bien évident que la nature de la crise ayant affecté la population des Fédons doit nous faire supposer une constitution a priori non naturelle212 mais il faut cependant garder présent à l’esprit que, outre le facteur épidémique, d’autres mécanismes peuvent intervenir dans la répartition des décès selon l’âge et le sexe.

    43Les objectifs de cette étude ainsi posés, nous nous attacherons, dans un premier temps, à définir les caractéristiques démographiques propres à chaque individu. Selon la catégorie d’âge étudiée, enfants, adolescents ou adultes, nous verrons que les méthodes utilisées sont de valeurs diverses et doivent être utilisées avec précaution. Les données individuelles seront ensuite exploitées afin de cerner au mieux la composition par âge et par sexe de la population ; des réajustements seront alors indispensables afin de résoudre certaines difficultés méthodologiques. À partir de là, et par référence aux données issues de la démographie historique, nous tenterons de repérer d’éventuels écarts par rapport à une population vivante théorique et, dans cette dernière hypothèse, nous chercherons à les interpréter. Ensuite, nous comparerons nos résultats à des études de démographie historique pour tenter de mettre en évidence des critères de « recrutement » spécifiques à une épidémie telle que la peste. Ces données seront par ailleurs confrontées à différentes séries ostéologiques de victimes de peste (cf. infrap. 72).

    Méthodes d’estimation des paramètres démographiques et données brutes

    44Notre premier travail a consisté à fournir les données brutes, concernant le stade de maturité, l’estimation du sexe des adultes et l’estimation de l’âge au décès des adultes et des sujets immatures (annexe 4).

    45La conservation des ossements, relativement correcte, nous a permis dans un premier temps de trancher aisément entre les statuts immatures et adultes. L’estimation du sexe des adultes a pu être effectuée avec une relative sécurité213 à partir des observations portant sur le bassin ou au moins une partie de celui-ci (Bruzek, 1991 ; Bruzek, Castex et Majo, 1995). De plus grandes difficultés ont été rencontrées dans l’estimation de l’âge au décès des adultes, véritable obstacle à l’heure actuelle pour toute étude paléoanthropologique (Cox, 2000 ; Jackes, 2000). En effet, l’âge des adultes, fondé sur des critères de vieillissement progressif du squelette, est très difficile à apprécier (Bocquet-Appel et Masset, 1982 ; Iscan, 1989 ; Saunders, Fitzgerald, Rogers, Dudar, McKillop, 1992 ; Ubelaker, 2000) ; les méthodes sont nombreuses mais de valeurs diverses (Buchet et Seguy, 2002), et bon nombre d’entre elles ont révélé de bien piètres résultats avec une marge d’erreur très importante dès lors qu’on les appliquait à des populations d’âge et de sexe connus (Rougé, 1993 ; Key, Aiello et Mollesson, 1994 ; Broqua, 1998 ; Schmitt, 2001).

    46Dans un premier temps, nous avions privilégié en tant que marqueur d’âge le degré de synostose des sutures crâniennes (Masset, 1982) ainsi que plusieurs critères morphologiques comme ceux de la surface auriculaire de l’ilium (Lovejoy et al., 1985) et de la facette symphysaire du pubis (Brooks et Suchey, 1990). L’état de conservation des ossements, variable d’un sujet à l’autre, ne nous a pas permis d’utiliser un même marqueur pour tous les sujets. Pour certains d’entre eux, l’observation simultanée de plusieurs indicateurs nous a conduits à envisager deux, voire trois classes d’âge décennales successives. La marge d’incertitude étant considérable, nous avons finalement choisi de distribuer tous les individus adultes selon deux grandes classes d’âges : d’une part, les individus de moins de 30 ans, classe généralement bien cernée puisqu’elle correspond à la phase de disparition des dernières traces d’immaturité (point sternal de la clavicule et crête iliaque) (Owings-Webb et Suchey, 1985)214 facilement repérables sur le squelette et, d’autre part, les individus de plus de 30 ans215.

    47L’estimation de l’âge au décès des sujets immatures s’est avérée moins délicate. Bien qu’elle ne tienne que très rarement compte des incertitudes méthodologiques et ne propose pas de véritable intervalle de confiance à 95 % (Sellier, Bruzek, Tillier 1997), elle est généralement plus précise que celle des adultes car elle repose sur l’observation de processus de croissance assez peu variables d’un individu à l’autre. Pour tous les sujets immatures qui possédaient un maxillaire et/ou une mandibule, l’âge au décès a été estimé d’après le schéma dentaire proposé par Ubelaker (1978). Ces estimations ont pu être complétées par des mesures effectuées sur plusieurs éléments du squelette (dans le meilleur des cas, trois mesures de diaphyses d’os longs ont été cotées systématiquement) en se référant selon le stade de maturité des individus aux tableaux de Fazekas et Kosa (1978), Stloukal et Hanakova (1978) et Sundick (1978). Pour les individus les plus âgés, nous avons également tenu compte des données fournies par le développement du squelette post-crânien (Birkner, 1980)216.

    48Des 133 individus constituant la population inhumée, 61 sont des adultes et 72 des immatures ; parmi ces derniers, un seul, un grand adolescent, a pu être considéré comme typiquement féminin. Pour les 61 adultes, nous avons obtenu 32 femmes et 29 hommes.

    De l’individu à la population

    Schéma de mortalité archaïque et tables types de mortalité

    49Afin de détecter et d’interpréter d’éventuelles particularités démographiques pour la population des Fédons, que ce soit dans la distribution des sexes et/ou la répartition de l’âge au décès, nous avons cherché à confronter nos données à un modèle théorique217. Cette démarche implique tout d’abord la reconnaissance de l’hypothèse fondamentale selon laquelle il existe un schéma de mortalité archaïque (Masset, 1975 ; Bocquet-Appel et Masset, 1982)218.

    50Ce sont des modèles théoriques, les tables types de mortalité, qui constituent actuellement nos meilleures références et fournissent la possibilité de détecter d’éventuelles anomalies dans les gisements archéologiques219. Les tables types de mortalité théoriques que nous avons choisi d’utiliser sont les tables types de Ledermann (1969). Bien qu’elles partagent avec d’autres d’importantes limitations théoriques (aucune ne concerne des populations antérieures à la révolution industrielle et à la transition démographique, avant la fin de xviiie siècle pour l’Europe occidentale, par exemple), elles présentent des avantages incontestables220 et restent donc actuellement le « moins mauvais outil » disponible221.

    51Ainsi si les tables types de mortalité, et tout particulièrement celles de Ledermann, apparaissent comme un outil précieux et commode pour les anthropologues, en tant qu’élément fondamental de comparaison et de discussion dans l’étude des populations archéologiques, elles demanderaient à être complétées par des informations issues de populations plus anciennes222.

    Les quotients de mortalité

    52Nous raisonnerons sur les quotients de mortalité (aQx) des tables de Ledermann (1969), fondamentaux pour juger de la mortalité des individus223, et nous utiliserons comme indication d’entrée à ces tables de mortalité théorique, l’espérance de vie à la naissance, sachant que ce paramètre se situe entre 20 et 40 ans pour les populations préjennériennes connues224, aussi défavorisées ou favorisées soient-elles (Masset, 1975 ; Sellier 1989 ; Sellier, 1996).

    53Les quotients de mortalité sont donc l’élément essentiel de discussion pour une comparaison entre une mortalité théorique naturelle et les caractéristiques démographiques de notre population archéologique. Ce n’est qu’à partir de cette confrontation que nous pourrons déceler et discuter d’éventuelles anomalies dans les distributions paléodémographiques (sélection, crises de mortalité...).

    Le principe de minimalisation des anomalies

    54Afin de discuter de la distribution globale des âges au décès des sujets immatures, nous avons cherché à les répartir en classes quinquennales (sauf les deux premières classes respectivement de 1 an et 4 ans) et en âges révolus, conformément aux tables de mortalité de Ledermann (1969). A priori simple, cette répartition n’est pas sans poser de problèmes. En effet, que ce soit d’après le stade de maturation dentaire ou à partir des longueurs diaphysaires des os longs (cf. supra), les estimations de l’âge sont toujours données sous forme d’âge moyen assorti d’une erreur standard225 ; par conséquent, si l’on veut tenir compte de l’intervalle d’âge proposé pour chaque individu, on se heurte inévitablement, à un problème méthodologique car les méthodes utilisées conduisent à des difficultés de répartition des individus dans une classe bien précise (Castex, 1994 ; Sellier, 1996 ; Sellier et al., 1995)226.

    55Notre objectif étant, rappelons-le, de détecter de la manière la plus rigoureuse possible, d’éventuelles anomalies dans le recrutement des individus des Fédons, nous avons tenu à prendre en compte ces incertitudes méthodologiques227. Ainsi certains individus ont pu être, sans trop d’ambiguïté, attribués à une classe d’âge bien précise (ceux pour lesquels l’intervalle d’âge donné par les méthodes correspond à une classe démographique et une seule), d’autres se sont inscrits dans deux classes successives. Cela nous a conduits à examiner, non pas une seule répartition, mais plusieurs répartitions susceptibles de se produire. Parmi toutes ces combinaisons potentielles, nous avons ensuite recherché, selon le principe de « minimalisation » des anomalies (Sellier 1996), la distribution la plus proche de celle d’une population naturelle228 de manière à ne retenir que les anomalies irréductibles. L’application de ce principe permet ainsi de se consacrer à la détection d’anomalies qui, si elles existent, ne peuvent être que de véritables anomalies, indépendantes en partie de problèmes méthodologiques, et que l’on peut alors tenter de chiffrer et d’interpréter (Sellier, 1996)229

    Analyse de la composition par âge et par sexe de la population des Fédons

    56Compte tenu des difficultés d’estimation de l’âge des sujets adultes énoncées précédemment, notre analyse reposera essentiellement sur les classes d’âge des non-adultes. Aux Fédons, sur 72 sujets immatures, 57 ont pu être répartis sans ambiguïté dans une classe d’âge, les 15 autres pouvaient appartenir à deux intervalles successifs (fig. 22). Compte tenu des nombreuses possibilités de répartition par âge des sujets immatures (216 possibilités de répartition)230, nous avons utilisé un traitement informatique des données (Sellier et al., 1995) permettant d’obtenir rapidement les distributions des sujets immatures selon plusieurs combinaisons. Afin de cerner la distribution la plus normale » possible, nous nous sommes alors référée à plusieurs critères choisis dans les tables de Ledermann (1969) : premièrement, la valeur et la relation des divers quotients de mortalité (aQx) pour chaque tranche d’âge ; deuxièmement, les valeurs les plus démographiquement vraisemblables pour le rapport de l’effectif des enfants décédés entre 5 et 9 ans sur celui des enfants décédés entre 10 et 14 ans, et le rapport de l’effectif des enfants décédés entre 5 et 14 ans sur celui des adultes décédés après l’âge de 20 ans, encore appelé indice de juvénilité (Bocquet et Masset, 1977).

    57Ces critères ont été choisis pour des espérances de vie à la naissance comprises entre 20 et 40 ans (cf. supra). Nous avons ensuite examiné les conséquences des différentes possibilités de classement sur les valeurs des quotients de mortalité et les rapports des effectifs des décès tels qu’ils viennent d’être définis, et avons discuté la plus ou moins grande probabilité qu’ont les diverses combinaisons de faire apparaître des critères corrects.

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    Fig. 22. Distribution des âges au décès des sujets immatures, répartition en classes d’âge en années révolues et dans les interclasses (caractères gras).

    58Nous avons pu ainsi comparer la distribution et les résultats obtenus à partir de l’âge moyen à ceux obtenus dans le cas de la combinaison la plus pertinente selon nos objectifs, c’est-à-dire la plus proche d’une distribution naturelle (combinaison 1), et la plus éloignée (combinaison 2) (fig. 23).

    59Il apparaît que quelles que soient l’espérance de vie considérée231 et la combinaison choisie, il existe des biais importants entre notre population des Fédons et une mortalité naturelle donnée par les valeurs théoriques de Ledermann (1969). Cependant, ces biais ne s’expriment pas tous dans le même sens. Le quotient de mortalité infantile, qui concerne la tranche des 0-1 an, se révèle très faible comparé à ce qu’il devrait être dans le cadre d’une mortalité naturelle. Il reste constant quelle que soit la combinaison considérée et traduit donc, dans tous les cas, un très net déficit des enfants en bas âge. Le quotient de mortalité de 1 à 4 ans montre lui aussi une insuffisance d’effectif mais à un moindre degré que le précédent ; il apparaît toutefois correct, bien que dans les valeurs basses, pour la combinaison 1. À l’inverse, les calculs des quotients de mortalité suivants (5Q5, 5Q10, 5Q15) font apparaître des biais qui révèlent un sureffectif très net de ces classes d’âge et l’on ne retrouve pas la relation attendue entre ces trois classes d’âge avec un minimum situé dans la classe des 10-14 ans. Pour la combinaison 2, la relation entre les trois quotients est inversée. Le rapport entre les classes d’âge indique donc une population « non naturelle » pour les non-adultes.

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    Fig. 23. Valeurs des quotients de mortalité et des rapports des effectifs des décès : les trois distributions des Fédons comparées aux tables-types de Ledermann (1969) pour e (0) = 30 ans. Les signes (+) et (-) associés au terme biais qualifient le sur ou sous effectif des individus dans une classe d’âge.

    60Seuls les quotients de mortalité avant 15 ans (15Q0) et avant 20 ans (20Q0) sont corrects (entre 458,6 ‰ et 496,2 ‰ pour 15Q0 ; 541,4 ‰ pour 20Q0), ils prouvent une proportion de non-adultes par rapport aux adultes tout à fait vraisemblable. Ce n’est donc pas la proportion immatures/adultes qui constitue une anomalie mais plutôt la nette disproportion des classes d’âge non-adultes entre elles ; c’est ce qu’exprime le rapport des D(5-9)/D(10-14) relativement bas (1,31 pour la meilleure combinaison alors qu’il est normalement proche de 2 dans le cas de populations préjennériennes) et l’indice de juvénilité [D(5-14)/D(20 et +)] désignant un effectif des adultes anormalement faible, par rapport à l’effectif des 5-14 ans (sa valeur se situe entre 0,61 et 0,77 selon la combinaison considérée). Il est intéressant de remarquer que la distribution présentant le moins d’anomalies (combinaison 1) a une plus forte probabilité (3,05 %) que celle obtenue à partir de l’âge moyen (1,53 %) ou celle considérée comme la plus mauvaise (0,76 %).

    61Les courbes des quotients de mortalité, pour une espérance de vie à la naissance de 30 ans (fig. 24), permettent de mieux visualiser les différences entre les trois distributions : elles portent essentiellement sur la valeur plus forte, donc plus acceptable, du quotient de mortalité des 1-4 ans pour la combinaison 1 comparée aux deux autres et sur une moindre surreprésentation des 10-14 ans, toujours pour la combinaison 1 (qui est dans ce cas proche de la combinaison obtenue à partir de l’âge moyen mais très éloignée de la combinaison 2).

    62Nous avons ensuite cherché à établir la représentativité des adultes de moins de 30 ans sur l’ensemble de la population adulte, l’imperfection des méthodes d’estimation de l’âge ne nous permettant pas de dépasser ce seuil de discussion. Sur la base de nos estimations (21 individus de moins de 30 ans, et 33 de plus de 30 ans) (fig. 25), le rapport obtenu est de 38,8 %, valeur excessivement forte comparée à ce qu’elle devrait être dans le cadre d’une mortalité archaïque (ce rapport évolue de 18 à 10 % pour des espérances de vie à la naissance comprises respectivement entre 20 et 40 ans). Cela révèle une mortalité des adultes non naturelle en raison d’une trop grande fréquence d’adultes jeunes. Effectivement, le quotient de mortalité concernant la tranche des 20-29 ans contraste nettement avec ce que l’on est en droit d’attendre d’une population théorique (fig. 24).

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    Fig. 24. Courbes de quotients de mortalité des sujets immatures et de la première classe d’âge adulte. Les Fédons comparé aux tables-types de Ledermann (1969).

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    Fig. 25. Distribution des âges au décès des adultes, sexes séparés.

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    Fig. 26. Mortalité en fonction du sexe selon les deux grandes classes d’âge adulte (entre 20 et 29 ans et supérieure à 30 ans).

    63Aux Fédons, la répartition des sexes s’est révélée conforme à celle d’une démographie naturelle avec un taux de masculinité232 de 47,5 %, taux statistiquement équivalent à un taux théorique de 50 %. L’analyse de la répartition de l’âge au décès de la population adulte en fonction du sexe nous a également permis de mettre en évidence une autre anomalie importante (fig. 26) : une nette surreprésentation des adultes jeunes liée à une forte mortalité féminine dans cette classe d’âge. Nous pouvons écarter l’éventualité d’un problème méthodologique car la surreprésentation des femmes concerne la seule classe adulte véritablement fiable. Nous pouvons également signaler que la répartition des sexes et des âges à l’intérieur du cimetière ne révèle aucune concentration particulière.

    64Ainsi les données brutes concernant l’âge des sujets immatures obtenues pour la population des Fédons fournissent des résultats qui, malgré nos efforts pour les minimiser, présentent quelques anomalies irréductibles. Les anomalies les plus flagrantes concernent la très nette sous-représentation des enfants de la classe 0-1 an et à l’inverse le sureffectif des enfants des classes 5-9, 10-14 et 15-19 ans, ainsi que celle des adultes jeunes. Ces particularités démographiques peuvent-elles être la conséquence d’une épidémie de peste ?

    Le recours aux sources historiques

    65Pour tenter de répondre aux interrogations suscitées par ces données paléodémographiques, les résultats obtenus ont été confrontés à des études de démographie historique. Pour le moment, ces confrontations ne peuvent être proposées qu’entre séries chronologiquement et géographiquement différentes de la nôtre mais, en l’absence de référence précise pour la période qui nous concerne, nous n’avons guère d’autre choix.

    66Pour des crises de mortalité connues, les études de démographie historique initiées par Mallet en 1835 pour la peste de Genève au xviie siècle puis par Hollingsworth et Hollingsworth en 1971 pour la peste de Londres en 1603, reprises par Biraben en 1975, se sont révélées de précieux témoignages permettant d’apprécier des différences dans la gravité de la crise en fonction du sexe et de l’âge.

    67Pour Londres, l’estimation de la mortalité par peste durant les six mois de l’année 1603 a été obtenue en retranchant les décès observés en temps normal dans les mêmes six mois au cours des années précédentes au nombre complet des décès au cours des six mois que dura la peste (Hollingsworth et Hollingsworth, 1971). À partir des effectifs bruts des décès fournis par les auteurs, nous avons alors calculé les quotients de mortalité par cause pour chaque tranche d’âge (Pressat, 1985) ; les données provenant des registres nous ont permis d’examiner la répartition des adultes que nous avons regroupés par classes décennales, ce que nous pouvons difficilement réaliser actuellement au-delà de 30 ans dans le cadre d’étude de séries archéologiques. À Londres (fig. 27), la distribution des quotients de mortalité par tranche d’âge se révèle complètement perturbée par rapport à celle d’une mortalité normale : en effet, on observe un faible quotient de mortalité infantile avec à l’inverse une surmortalité nette des jeunes enfants, des adolescents et des adultes en temps d’épidémie. On note les mêmes tendances pour la paroisse Saint-Jean à Bayeux lors de la peste de 1626-1627 (El Kordi, 1970) avec des décalages importants dans les effectifs et les rapports entre classes d’âge en période d’épidémie ; les variations observées sont les mêmes que celles obtenues pour les Fédons.

    68Mallet (1835) lors de son étude sur la peste de Genève a cherché à comparer l’impact de la peste et celui du choléra qui a sévi à Paris en 1832 en comparant les décès relatifs aux deux épidémies (fig. 27). Là encore, le calcul et la comparaison des quotients de mortalité par cause font apparaître des différences importantes quant à l’impact démographiques de ces deux fléaux : on note la même évolution de la mortalité que celle observée à Londres, la peste, faible dans le bas âge, devient progressivement de plus en plus virulente de l’enfance à l’adolescence et sévit de toute sa force dans l’âge adulte pour s’effacer devant la vieillesse alors que le choléra, au contraire, faible dans l’enfance et l’adolescence, devient de plus en plus important à l’âge adulte et sévit de toute sa force pour les classes les plus âgées (différences déjà mises en évidence par Biraben 1975. Ces résultats sont confirmés par d’autres études concernant des épidémies de choléra (Faron, 1997).

    69Bien que d’un point de vue médical aucune discrimination n’existe, les rares documents dont nous disposons révèlent des données contradictoires en fonction du sexe. Fréquemment, nous pouvons observer des différences entre les sexes pouvant être liées à l’exposition ou à la sensibilité face à la maladie. Rares sont les études d’archives qui, comme à Saint-Rémy-de-Provence pour la peste de 1721, ne montrent aucune inégalité des sexes face à l’épidémie (Biraben, 1975). Les femmes peuvent être surreprésentées comme pour plusieurs paroisses de Lyon pour la peste de 1346-1348 (Lucenet, 1985), phénomène pouvant être lié à l’immigration rurale (Biraben, 1975), ou sous-représentées comme pour les paroisses de Paris pour la peste du xive siècle (Lucenet, 1985) et de Londres pour les pestes de 1603 et 1625 (Biraben, 1975).

    D. C.

    Recherches de liens de parenté et données sur l’état sanitaire et social

    70Certaines observations ou données ostéologiques, qu’elles soient classiques ou inhabituelles, peuvent constituer de précieux indicateurs quant à l’établissement de relations de parenté entre les individus inhumés dans un cimetière. Les inhumations multiples (adultes et enfants) du cimetière des Fédons constituent un objet d’étude particulièrement adapté à la recherche de liens de parenté. Parmi les indicateurs ostéologiques, l’étude de la morphologie sinusienne a été proposée comme un bon marqueur de liens familiaux ; à côté de caractères ostéoscopiques particuliers, variations anatomiques plus connues sous le nom de caractères discrets (au sens étymologique ou mathématique du terme). Enfin, la paléopathologie, en complément des textes et au-delà de la description casuistique, permet de témoigner d’un contexte sanitaire et social qui a pu faire le lit du processus épidémique et conditionner sa gravité.

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    Fig. 27. Courbes des quotients de mortalité par cause pour différentes épidémies (réalisation P. Sellier et D. Castex). Données extraites de Hollingsworth et Hollingsworth (1971) et Mallet (1835).

    Images sinusiennes

    71Dans sa publication princeps, Szilvàssy (1986) a montré que la forme des cavités sinusiennes se transmettait, pour tout ou partie, de parents à enfants : dès lors, il peut être supposé que l’analyse comparative de radiographies d’individus inhumés en un même lieu permettrait de mettre en évidence l’existence d’éventuels liens de parenté.

    72La recherche des liens familiaux constituant la problématique principale de notre travail, dans un premier temps, nous avons « éliminé » les sépultures individuelles de notre étude, pour ne retenir que les cinquante-huit squelettes issus des vingt-six sépultures multiples (21 sépultures doubles, 4 tombes triples et une quadruple) que comprenait ce site. Dans un second temps, nous avons porté notre attention sur des regroupements de sépultures individuelles qui, de par leur position dans le cimetière et les caractères paléodémographiques des individus inhumés, pouvaient évoquer la possibilité de rapprochements familiaux. Quatre ensembles spatiaux ont été retenus : au nord-est, les sépultures SP 19, 22, 25 et 17 ; au nord-ouest, les sépultures SP 7, 9, 29, 10, 13, 28 et 32 ; à l’ouest, les sépultures SP 66, 67 et 68 ; au sud, les sépultures SP 94 et 98.

    73Szilvàssy (1986) a étudié la morphologie et, accessoirement, la taille des images radiologiques des cavités sinusiennes de la face à partir d’un échantillon autrichien. À partir de radiographies prises en incidences de Blondeau, il a analysé les images obtenues, les a mesurées, comparées et classifiées. Outre les cavités sinusiennes maxillaires et frontales, les clichés radiographiques permet-taient d’observer les cavités orbitaires et les fosses nasales.

    74De cette étude, J. Szilvàssy a pu conclure que les formes des cavités sinusiennes peuvent se réduire, pour chaque groupe de sinus, à quatre types principaux, assimilables à des formes simples, inégalement réparties sur l’ensemble de la population. Ces formes sinusiennes se transmettent en totalité, ou en partie, de parents à enfants (étude statistique sur 100 familles). Pour les sinus frontaux, dont il a également étudié la taille, les subdivisant en 4 catégories (petit, moyen, grand, très grand), cette caractéristique morphométrique se transmet également. En application pratique, Szilvàssy présente plusieurs cas archéologiques de tombes à caractère plus ou moins familial, où cette méthode permet de confirmer les liens de parenté supposés.

    75La réalisation pratique de notre étude a débuté par une sélection des pièces osseuses. Certaines ont dû être remontées. Nous avons éliminé de notre échantillon les pièces pour lesquelles cette opération de collage aurait pu entraîner une modification de la morphologie des cavités sinusiennes.

    76Le protocole radiographique que nous avons utilisé est le même que celui décrit par Blondeau233 (Klossek et al., 1993 ; Foucart et al., 1996). Les clichés ont été lus de façon à les classer, par assimilation, dans l’une des quatre grandes catégories morphologiques précédemment décrites. Les images ont été ensuite comparées, éventuellement à l’aide d’un calque (notamment pour les sinus de différentes tailles). La superposition donnant alors une image en « courbes de niveaux ». L’étude comparative a été faite entre les individus d’une même sépulture et entre les sujets inhumés séparément, mais « regroupés » dans le cadre de cette étude.

    77Le premier constat que nous ayons pu faire concerne la relative rareté des pièces osseuses radiologiquement exploitables. Sur soixante-huit individus, seulement huit sujets ont pu être inclus à notre étude (soit 11,7 %). Sur vingt-neuf immatures, âgés de moins de 12 ans, seulement trois présentaient des sinus radiographiables et un seul a été exploitable. Par ailleurs, nous avons constaté une différence dans la représentativité des éléments osseux retenus pour cette étude. Les sinus frontaux sont les éléments les mieux conservés, les sinus maxillaires sont plus altérés et les cadres orbitaires comme les fosses nasales sont souvent disloqués.

    78Au total, pour cette étude, se sont avérés exploitables trois sépultures « multiples » sur les vingt-trois précédemment retenues et un regroupement (groupe nord-ouest) sur les quatre que nous avions sélectionnés au départ. Les sépultures suivantes ont pu être analysées (voir tableau ci-après).

    79En fait, peu de sépultures multiples ont pu être exploitées (3 sur 23). Ce résultat tient à la rareté relative du matériel osseux. En effet, le massif facial est une région anatomique fragile, assemblage d’éléments osseux multiples, souvent de faible épaisseur avec des poutres d’os compact de renforcement. Ainsi des sinus frontaux, protégés par la glabelle et les rebords orbitaires ; des sinus maxillaires, protégés partiellement par les malaires ; et les piliers des maxillaires étaient mieux conservés à l’opposé des cadres orbitaires et des fosses nasales, structures de jonction composites. Cette fragilité est davantage marquée chez l’enfant où, de surcroît, le développement des cavités sinusiennes est variable, plus ou moins tardif, rendant parfois les clichés radiographiques non interprétables. Ainsi, seuls trois enfants avaient des sinus radiologiquement exploitables.

    80Les types de base proposés par Szilvàssy ont bien répondu à l’ensemble des clichés obtenus234. D’après les similitudes des images des cavités sinusiennes retrouvées, nous pouvons avancer l’hypothèse selon laquelle les occupants des trois tombes retenues présentaient entre eux des liens de parenté :

    • sépulture SP 52, un homme et une femme présentent les mêmes sinus maxillaires ;

    • sépulture SP 65, un homme et une femme présentent les mêmes sinus frontaux et maxillaires ;

    • sépulture SP 72, deux immatures de 5-9 ans et de 15-19 présentent les mêmes sinus frontaux.

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    81Sur les regroupements de plusieurs tombes individuelles que nous avions établis à partir de leur emplacement et de leur composition, nous avons pu analyser le groupe nord-ouest, regroupant sept individus, dont deux seulement étaient radiographiables, un homme et une femme matures, aux mêmes sinus frontaux permettant de supposer un lien de filiation.

    82En conclusion, cette méthode de recherche de similitudes morphologiques des images radiographiques des cavités sinusiennes entre plusieurs individus est d’application relativement simple, mais reste de portée limitée par l’état de conservation des pièces osseuses dont on peut disposer. Elle aide néanmoins à établir l’existence de liens de parenté tels ceux que nous avons retrouvés dans l’étude de ce cimetière de pestiférés, confirmant les décès simultanés ou proches dans le temps de membres d’une même famille inhumés dans une même fosse ou dans un même groupe de tombes.

    J. A., M. P., M. S., O. D.

    Caractères ostéoscopiques particuliers

    83L’étude des caractères discrets demeure pour l’instant une des principales voies de recherche235 permettant d’apprécier d’éventuelles relations de parenté ou de fournir des éléments d’appréciation des conditions de vie des individus décédés et leurs spécificités (contraintes fonctionnelles, pathologiques...). Il est en effet admis que certaines variations anatomiques, appelées caractères discrets, sont susceptibles de mettre en évidence des liens de parenté biologique entre les défunts. Depuis les premières études descriptives du siècle dernier, ces caractères ont fait l’objet d’une multitude de travaux. Des recherches réalisées dans des situations connues (individus d’âge, de sexe et de degré de parenté connus ; populations dont le degré de relation génétique avait été établi à partir des marqueurs immunologiques) ont permis de montrer qu’en dehors de quelques caractères dont le déterminisme génétique était loin d’être négligeable, la plupart feraient intervenir un mécanisme plus complexe et seraient fonction d’un pool génétique, d’un environnement particulier ainsi que d’une interaction également particulière entre génotype et environnement (Berry, 1978 ; Saunders, 1978).

    84Nous avons donc cherché à individualiser au sein du cimetière des Fédons certains sous-groupes d’individus possédant en commun un ou plusieurs de ces caractères et recherché des similitudes entre ces données biologiques et des sous-ensembles archéologiques, les plus pertinents étant les sépultures multiples (voie de recherche d’apparentement déjà privilégiée, cf. supra p. 53) et les sépultures situées à proximité immédiate.

    85Nous ne signalerons que les caractères présents chez plus d’un individu et privilégierons ceux qui, au regard de la recherche en ce domaine (Saunders, 1978 ; Hauser et al., 1989 ; Crubézy, 1986, 1988 et 1992), nous paraissent les plus pertinents pour caractériser un groupe social ou discuter de l’existence de secteurs familiaux. Nous avons retenu sept caractères discrets crâniens et un post-crânien.

    86Nous avons observé quatre localisations d’os wormiens qui portent sur la face exocrânienne. Les os les plus fréquents sont ceux de la lambdoïde (4 hommes, 3 femmes et 1 individu immature). Viennent ensuite les osselets sur la sagittale et la lambdoïde (2 hommes et 2 femmes), puis ceux de la sagittale (2 femmes) et de la coronale (1 femme et 1 sujet immature). Enfin nous trouvons l’association coronale et lambdoïde (1 femme) et l’association coronale et sagittale (1 sujet immature). Ces os sont deux fois plus fréquents chez les femmes que chez les hommes mais la différence n’est pas significative car peu de crânes sont suffisamment bien conservés.

    87Les données anthropologiques actuelles concernant ces caractères font état d’une grande complexité et leur développement, leur origine et leur cause sont toujours très discutés. Du fait de leur fréquence, nous pouvons observer quelques regroupements mais leur signification demeure incertaine.

    88Quatre individus seulement sur 44 (9 % des individus) possèdent un canal condylien antérieur subdivisé par un ou plusieurs spiculés osseux, appelé canal hypoglosse bipartite. Certaines études ont suggéré la possibilité d’une bonne héritabilité (notamment chez certains animaux), pour d’autres il pourrait correspondre à des phénomènes induits par l’alimentation. Aucun regroupement n’a été observé.

    89L’agénésie de la troisième molaire, tant au niveau du maxillaire que de la mandibule, n’a été observée que chez les adultes. Elles sont plus fréquentes chez les femmes (9 cas sur 23, soit environ 39 %) et concernent le plus souvent à la fois le maxillaire et la mandibule (8 cas contre 1 seulement pour la mandibule). Chez les hommes, elle est plus rare (4 cas sur 15 observables), soit environ 26 %, et concerne uniquement le maxillaire (2 cas), la mandibule (1 cas) ou les deux (1 cas). L’écart hommes-femmes s’amenuise dès lors que l’on considère les individus ne possédant que la mandibule avec 8 cas sur 16 pour les hommes (50 %) et 2 cas sur 8 pour les femmes (soit 25 %). Aucun résultat significatif n’a été obtenu dans les sépultures multiples.

    90Ce caractère a fait l’objet d’une multitude de travaux, et il semble maintenant admis qu’il soit lié à plusieurs phénomènes, environnementaux ou génétiques, pouvant agir simultanément. Nous n’avons retrouvé aucun regroupement entre individus d’une même sépulture multiple et entre individus de tombes adjacentes.

    91Trois individus seulement sur 42 (environ 7 %) possèdent un tubercule de Carabelli. Il s’agit d’un petit tubercule situé sur la face mésio-linguale des premières molaires supérieures permanentes. Les données relatives à ce caractère s’accordent à montrer de fortes variations inter-populationnelles. Aux Fédons, il est présent chez une femme et deux jeunes adolescents (10-14 ans) mais les tombes ne sont pas à proximité.

    92La suture métopique, reliant les deux hémifrontaux, peut quelquefois persister après l’âge physiologique de synostose, qui est proche de deux ans. Bien que certains cas familiaux soient reconnus, l’héritabilité de ce caractère est actuellement contestée et plusieurs travaux suggèrent une étroite interaction entre facteurs génétiques, environnementaux et pathologiques. Ce caractère est relativement fréquent sur le gisement des Fédons car il a été observé sur 11 individus sur 31 (environ 35,5 %). Il est plus fréquent chez les hommes (7 cas sur 12, soit 58,3 %) que chez les femmes (3 cas sur 18, soit 16,6 %) mais rare chez les sujets jeunes (seuls les individus à partir de la classe 5-9 ans sont pris en compte) avec un seul cas sur 11 observables (9 %). Nous avons pu noter la présence de deux sépultures proches (SP 21 et SP 18).

    93Le sillon mylo-hyoïdien de la mandibule peut être recouvert en partie, plus rarement en totalité, par l’ossification du ligament sphéno-mandibulaire. Il en résulte une formation osseuse, plus ou moins étendue, appelée pont mylo-hyoïdien. Plusieurs études réalisées sur ce caractère lui attribuent un bon déterminisme génétique. Il concerne 7 individus sur 76 (environ 9 %), dont 3 hommes, 3 femmes et un sujet immature. Un regroupement intéressant a été observé dans le quart sud-ouest du cimetière : 3 sépultures individuelles (SP 94, SP 96 et SP 98) renfermant deux femmes et un homme.

    94Le torus mandibulaire, renflement plus ou moins développé de la face linguale de la mandibule, situé le plus souvent au niveau des prémolaires, est présent sur 2 individus sur 70 (2,8 %). On accorde à ce caractère un certain déterminisme génétique. Une femme et un sujet immature sont concernés mais les tombes sont éloignées l’une de l’autre.

    95La perforation olécrânienne se manifeste, dans la plupart des cas, sous la forme d’une large perforation de la lame osseuse dans la partie distale de l’humérus. Si certaines études ont suggéré un bon déterminisme génétique, d’autres ont montré que ce caractère pouvait être lié à certains phénomènes mécaniques et fonctionnels complexes. Aux Fédons, quatorze cas on été recensés sur soixante et un individus (soit 22, 9 %). Elle est présente sur six hommes, sept femmes et un grand adolescent. Cinq cas sont bilatéraux et quatre unilatéraux (3 femmes et 1 homme dont 2 à gauche et 2 à droite). Il n’apparaît pas de véritable regroupement mais deux zones semblent assez bien marquées : l’une se situe dans la limite sud du cimetière (SP 89, 97 et 98) et l’autre, plus large, dans la partie nord (deux hommes de la tombe quadruple centrale ainsi que les SP 17, 18, 21, 27 et 31).

    96Sur la base de huit caractères étudiés, peu de regroupements ont été observés : un hypothétique, validé sur la base d’un seul caractère dont le déterminisme est complexe (cas de la suture métopique), un autre plus intéressant, fondé sur un seul caractère (pont mylo-hyoïdien), mais pour lequel un déterminisme génétique semble probable.

    97Quelques caractères auxquels on attribue un bon déterminisme génétique sont présents dans la série des Fédons (canal hypoglosse bipartite, torus mandibulaire) mais aucune autre association probante n’a pu être mise en évidence. La recherche de concentrations de caractères discrets, au sein des sépultures multiples, ne nous permet pas d’établir de liens « familiaux » entre les individus. Les associations définies à partir des images sinusiennes n’ont pas été confirmées.

    98En revanche, la haute fréquence de la perforation olécrânienne permet d’envisager des contraintes particulières propres aux individus de ce site, bien qu’il ne soit pas possible dans l’état actuel de nos connaissances de déterminer les activités mises en cause. Ces cas nous renvoient à l’étude paléopathologique.

    99Ainsi des liens de parenté ont-ils été décelés dans les sépultures multiples, mais également chez des individus inhumés en sépultures individuelles, abordées plus rarement dans le cadre de ces deux études. Il est frappant de constater que les trois sépultures multiples qui ont livré des images sinusiennes exploitables présentent chacune au moins deux sujets ayant peut-être des liens de parenté biologique. Le même constat a été fait pour les deux seuls sujets exploitables, parmi sept autres issus de sépultures individuelles, appartenant au secteur nord-ouest du cimetière. Si on accorde une valeur statistique à ces données, il faudrait admettre que les inhumations multiples regroupent essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, des individus issus d’une même famille biologique. Les caractères ostéoscopiques invitent, quant à eux, à des conclusions nuancées.

    100Des résultats aussi contrastés invitent à beaucoup de prudence et, pour le moins, à quelques interrogations méthodologiques. Les archives évoquent le transfert à l’infirmerie de plusieurs membres infectés d’une même famille ; ce qui est parfaitement en accord avec les données biologiques évoquées ici. Mais, à moins d’admettre que des zones du cimetière ou des sépultures multiples ont été d’emblée réservées à des familles ou encore que les membres d’une même famille décèdent dans un même laps de temps, le mode de constitution du cimetière, où les individus sont sans doute inhumés très rapidement après leur décès, s’accorde assez mal avec le regroupement systématique de plusieurs individus d’une même famille dans une même tombe. Ce cas a pu sans doute se produire, comme devait également fort logiquement se succéder de très près le décès des membres d’une même famille ayant sans doute contracté le bacille à peu d’intervalle, mais il ne peut être établi que le regroupement familial soit une pratique systématique aux Fédons.

    D. C.

    Lésions paléopathologiques

    101Ne seront présentées ici que les altérations présentant une valeur informative sur le contexte particulier d’une épidémie de peste présumée, c’est-à-dire les éléments paléopathologiques permettant de caractériser l’état sanitaire pré-épidémique de la population exhumée ainsi que ceux reflétant son contexte social et professionnel236 Nous renvoyons le lecteur à l’annexe 5 pour la description détaillée de l’ensemble des cas paléopathologiques.

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    Fig. 28. Répartition topographique, par classes d’âge d’individus sexués, des lésions ostéoarticulaires de type arthrosique.

    102Comme l’étude de la conservation osseuse l’a montré, l’inhumation en terrain agricole soumet le matériel ostéo-archéologique à des dégradations post-mortem considérables, induisant un paramètre réducteur dans l’exhaustivité de l’inventaire des lésions. Ainsi, le taux de destruction global des articulations du squelette appendiculaire est de 52,5 %, celui de la colonne vertébrale de 40,5 %, celui des sites abarticulaires atteignant une proportion de 76 %. Par ailleurs, comme il a été mentionné plus haut, les surfaces corticales sont très altérées, ce qui limite les observations relatives à la pathologie infectieuse.

    103La pathologie dégénérative relevée montre une fréquence relativement élevée d’atteintes de sites articulaires actuellement peu touchés et qui témoignent de conditions de vie laborieuses (fig. 28). Ainsi, pour l’arthrose de l’épaule, elle concerne 11 individus sur 60 et privilégie les sujets de plus de trente ans de sexe masculin (9/11). Cette localisation, actuellement très rare237, s’observe plus fréquemment dans les populations anciennes aux conditions de vie physiquement plus dures (Peyron, 1987 : 15), où les sollicitations mécaniques occasionnées par des gestes répétés influencent l’apparition de l’arthrose. De même, l’arthrose du coude concerne trois sujets matures (2 hommes, 1 femme). L’arthrose primaire étant extrêmement rare pour cette région anatomique (Palfi, 1992 : 218), l’étiologie privilégie essentiellement le rôle des micro-traumatismes d’origine professionnelle. Dans les populations contemporaines, elle se rencontre plus fréquemment chez les travailleurs manuels (Chevrot et al., 1980 : 10). Pour le poignet, quatre hommes et une femme adultes matures sont concernés. Cette localisation, en l’absence d’autres lésions, est à mettre en relation avec une cause microtraumatique liée à des activités professionnelles micro-traumatisantes. Les autres localisations observées dans cette série (hanche, genoux) sont peu informatives sur le niveau d’activité de la population, car fortement liées à des facteurs d’âge. Cependant, des études ont montré une fréquence plus élevée de la coxarthrose (arthrose de la hanche) chez les agriculteurs (Peyron, 1987 : 15) et de la gonarthrose chez les travailleurs de force (Hagberg et al., 1995 : 113-115). Les atteintes vertébrales, détaillées en annexe, n’apportent pas d’indications particulières quant à un surmenage rachidien manifeste. Sur 38 individus étudiables, 25 colonnes sont concernées par une arthrose intersomatique (fig. 29, 30, 31 et 32), et vingt-deux par une arthrose interapophysaire. Les lésions sévères, quelle que soit leur forme topographique, sont majoritaires. Elles affectent autant d’hommes que de femmes et concernent préférentiellement des sujets âgés. Ce, à l’exception toutefois de la jeune femme SP 85-US 308 atteinte d’une arthrose sévère du rachis thoracique secondaire à un tassement vertébral consécutif à un traumatisme.

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    Fig. 29. Arthrose intersomatique des cervicales.

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    Fig. 30. Répartition, par classes d’âge d’individus sexués, des atteintes de type arthrosiques relevées sur 228 articulations intersomatiques du rachis cervical.

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    Fig. 31. Répartition, par stades, des atteintes de type arthrose relevées sur 494 articulations intersomatiques du rachis thoracique.

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    Fig. 32. Répartition par stades des atteintes de type arthrosique relevées sur 190 articulations intersomatiques du rachis lombaire.

    104L’étude des enthèses permet dans certains cas de caractériser un surmenage intensif de l’appareil locomoteur dans les populations anciennes (Dutour, 1992 : 234). Sur la totalité des sites d’insertion d’un échantillon de 59 individus adultes238, 41 individus présentent au moins une pathologie insertionnelle du membre supérieur. Parmi ces 41 sujets, 27 sont des individus de plus de 30 ans et 14 sont des adultes. La répartition sexuelle est en faveur des hommes de plus de 30 ans.

    105La tubérosité bicipitale (TB) est le site le plus fréquemment atteint avec trente-quatre sites remodelés sur cinquante-cinq conservés, répartis sur vingt-deux individus (6 adultes jeunes, 16 adultes matures), essentiellement des hommes. Le surmenage de la tubérosité bicipitale est fréquent chez les travailleurs de force soulevant des poids lourds ou maintenant longtemps une position du coude à demi-fléchie et dans toute occupation sollicitant les mouvements de supination (Commandre, 1977 : 105).

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    Fig. 33. Face antérieure des humérus gauche et droit présentant une bilatéralisation de MGP avec prédominance du côté gauche et une unilatéralisation de MGR sur ce même côté.

    106L’olécrâne (MTB) est le siège de l’insertion du muscle triceps brachial se situant sur la face postérieure de l’ulna. Son remaniement a été observé sur quatre sites, répartis entre trois individus de plus de 30 ans (1 femme, 2 hommes). Un seul d’entre eux montre une atteinte symétrique certaine. Ce muscle est essentiellement un muscle extenseur de l’avant-bras sur le bras. La formation d’un éperon olécrânien peut être due à des microtraumatismes d’origine professionnelle (forgeron, faucheur, etc., Commandre, 1977 : 103).

    107La tubérosité ulnaire (TU) est le point d’ancrage du muscle brachial antérieur. La moitié des insertions observées est le siège d’une pathologie. On dénombre 21 sites remodelés, répartis sur 15 individus (11 adultes de plus de 30 ans et 4 adultes jeunes). Aucune différenciation sexuelle n’est affirmée. Dans la moitié des cas, l’atteinte est symétrique. Dans les cas contraires, la prédominance s’effectue en faveur du bras droit, mais le caractère typiquement féminin d’unilatéralité gauche s’affirme. Dix individus de l’échantillon associent l’atteinte des tubérosités ulnaires et bicipitales, dont trois de manière symétrique et sept asymétrique, avec à nouveau un cas d’unilatéralité gauche chez une femme. La corrélation des deux topographies lésionnelles s’explique par la sollicitation de ces deux muscles au cours de la flexion de l’avant-bras (Bonnel et al., 1991 : 118).

    108Insertion des ligaments costo-claviculaire (LCC), des muscles grand pectoral (MGP) et grand rond (GR) : on dénombre vingt-six enthésiopathies du ligament costo-claviculaire, répartis sur vingt individus (14 adultes de plus de 30 ans, 6 adultes de moins de 30 ans). Le caractère masculin de cette pathologie insertionnelle est affirmé : la moitié des hommes, jeunes ou matures, sont atteints contre un cinquième des femmes. La symétrie des lésions est attestée chez cinq sujets (fig. 33). Les femmes ne sont concernées que par des atteintes unilatérales, droites ou gauches, et la prédominance du côté gauche apparaît comme un trait spécifiquement féminin, avec notamment le cas du sujet féminin jeune SP 85-US 308 qui associe sur le côté gauche des atteintes de la tubérosité bicipitale à une insertion en creux de la fosse du rhomboïde.

    109La pathologie insertionnelle du muscle grand pectoral se retrouve sur vingt-sept sites répartis entre dix-sept sujets (14 individus de plus de 30 ans et 3 adultes jeunes). Le caractère masculin est de nouveau affirmé et un quart des jeunes hommes sont touchés. La bilatéralité est présente dans la moitié de l’échantillon, la prédominance du côté gauche étant encore un trait féminin.

    110Pour le grand rond, on dénombre quatre sites répartis sur quatre individus, dont deux femmes de moins de 30 ans et deux hommes matures. Les atteintes n’ont été relevées que sur le côté droit.

    111L’étiologie générale de ces trois insertions n’est pas encore identifiée de manière formelle. Le remaniement de ces enthèses peut résulter d’un processus de croissance en relation avec le développement de la force musculaire. Certains auteurs ont observé que l’enthésiopathie de ces trois sites était très fréquente dans la période de l’enfance et culminait pendant l’adolescence (Saunders, 1978 ; Castex, 1994).

    112Insertion du ligament conoïde (TC) : le tubercule conoïde est l’enthèse d’un des ligaments stabilisateurs de la clavicule. Peu fréquent dans notre collection en raison de la détérioration des os, l’aspect remanié de l’insertion est visible sur cinq sites répartis entre trois individus matures (2 hommes et 1 femme). L’association de cette atteinte enthésiophytique avec un équivalent mineur d’arthrose est attestée pour chacun des trois individus. Ce caractère est « certainement dû à des activités occupationnelles diverses, dont le portage sur un terrain prédisposé... » (Crubézy, 1988 : 327).

    113Insertion du muscle deltoïde (MD) : l’enthèse de ce muscle apparaît comme une ostéophytose périostée localisée sur l’humérus. Le remodelage de la tubérosité deltoïdienne concerne dix sites répartis sur sept individus, dont un seul est âgé de moins de 30 ans. Les atteintes touchent la moitié des sites conservés. Trois cas montrent une atteinte symétrique. L’unilatéralité gauche, observée sur deux sujets féminins, pourrait à nouveau apparaître comme une caractéristique sexuelle. L’étiologie de cette pathologie insertionnelle a été mise en évidence par Commandre (1977 : 67) qui souligne que « la deltoïdite paraît être l’apanage des lanceurs à propulsion latérale, mais ils n’en ont pas l’exclusivité ».

    114La colonne vertébrale : l’ossification d’un des quatre ligaments jaunes concerne 18 individus sur un total de 38 squelettes axiaux. La majorité des atteintes se rencontre chez les adultes matures de sexe masculin. Quel que soit l’âge ou le sexe du porteur, la moitié des atteintes se concentre sur les segments inférieurs du rachis thoracique (fig. 34). La partie basse du rachis thoracique possède une mobilité très proche du rachis lombaire et les contraintes mécaniques sont maximales entre T9 et T11. Selon les termes de Lagier, cette « pathologie manifestement liée aux conditions d’insertion ligamentaire » peut « même refléter une instabilité discovertébrale du segment moteur correspondant » (Lagier, 1992 : 45). Un cas de spondylolyse de la cinquième lombaire a été mis en évidence sur le rachis de l’individu SP 70-US 246. De nombreuses causes interviennent dans la pathogénie de la lyse isthmique, tels que des facteurs extrinsèques d’hypersollicitation mécanique (Crubézy, 1988 : 114), des contraintes physiologiques (Loyot et al., 1976 : 119) et un facteur génétique avec une incidence parentale (Lokietek, 1989 : 128).

    115Parmi les cas de pathologie constitutionnelle, on peut relever trois cas de fermeture incomplète de l’arc postérieur : un cas concerne le rachis cervical (SP 45-US 150 ; SP 21-US 72 ; SP 41-US 137) et deux autres le sacrum (SP 46-US 155 ; SP 52-US 183). Ces anomalies architecturales peuvent correspondre aux « marqueurs osseux de la malnutrition au cours de la croissance » (Mafart, 1989 : 73) révélant un régime alimentaire carentiel, déséquilibré ou déficitaire, depuis le stade fœtal.

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    Fig. 34. Topographie préférentielle des insertions enthésiophytiques du rachis thoracique et lombaire.

    116Nous avons également pu observer des séquelles de rachitisme sur deux individus (SP 48-US 166 ; SP 83-US 298). Ces ensembles sont à interpréter comme des séquelles modérées de rachitisme carentiel, probablement communes. Ce type de pathologie doit être mis en relation, pour cette époque, soit avec des carences alimentaires (aliments dépourvus de vitamine D, régime alimentaire pauvre en calcium, consommation de céréales non triées), soit avec une carence solaire, les deux facteurs étant fréquemment associés et pouvant témoigner de conditions de vie difficiles.

    117L’étude paléopathologique de cette série a révélé par ailleurs trois cas d’atteintes d’origine infectieuse. Pour deux d’entre elles, une infection à Mycobacterium tuberculosis nous semble pouvoir être retenue (analyse ADN en cours).

    118Cinq cas de pathologie traumatique ont été mis en évidence. Ils concernent le crâne, le gril costal, le rachis, le poignet et l’avant-bras. Dans deux cas, ces atteintes sont d’un intérêt mineur (fractures consolidées d’une côte et d’un scaphoïde). En revanche, trois cas présentent des lésions plus originales ;

    • Le sujet SP 52-US 183 témoigne de séquelles post-traumatiques au niveau du radius droit. Il s’agit d’une localisation relativement fréquente, survenant principalement lors d’une chute sur la main.

    • L’individu SP 85-US 308, présente un tassement de deux vertèbres thoraciques. Le cliché radiographique montre qu’il s’agit d’une lésion secondaire à un traumatisme (Sbihi, 1999).

    • Le squelette SP 92 présente, au niveau du pariétal droit, une embarrure crânienne consolidée. L’instrument contondant à l’origine de ce traumatisme crânien est un objet lourd, peut-être triangulaire. Le caractère de l’embarrure semble indiquer qu’il possédait un faible tranchant ou bien qu’il y a eu une protection interposée qui aurait atténué l’effet tranchant de l’arme (casque ?). Sur le plan clinique, il est possible que cette embarrure avec éperon intracrânien ait été suivie d’une comitialité séquellaire (épilepsie temporale, Signoli et al., 2000).

    119Dans la majorité des phénomènes dégénératifs étudiés, le facteur microtraumatique est fréquemment mis en cause, révélant une implication importante des individus inhumés dans des activités répétitives et contraignantes, au cours de leur existence. Si la prévalence de ces lésions porte sur les hommes, les femmes n’en sont pas exemptes et les pathologies sévères de certains adultes jeunes suggèrent une participation physique précoce aux tâches communautaires. À l’exclusion des épiphénomènes, on constate que les hommes développent plus largement une arthrose ou une enthésiopathie du squelette périaxial, ce qui, dans une certaine mesure, peut être mis sur le compte de l’âge moyen, plus élevé, de la population masculine. En revanche, les femmes sont impliquées très jeunes dans une dégénérescence cartilagineuse de la colonne vertébrale.

    120Ces lésions ou microtraumatismes reflètent pour une grande part l’activité de cette population basée sur des gestes répétitifs et parfois traumatisants des travaux des champs ou du petit artisanat. La localisation anatomique et l’intensité de ces atteintes, parfois différenciées entre hommes et femmes, pourraient, dans certains cas, être l’expression de la différenciation des tâches de chaque sexe (forge, filage...).

    C. B., M. S., M. P., O. D.

    Notes de bas de page

    182 À titre d’exemple, nous mentionnerons le soin apporté à la consolidation systématique, sur le terrain, des os coxaux des adultes et des mandibules des sujets immatures afin d’optimiser les résultats des analyses post-fouille, et tout particulièrement l’analyse démographique.

    183 Les tombes sont le lieu de dépôt définitif des défunts peu de temps après leur mort comme l’atteste la présence, en connexion plus ou moins stricte, des éléments osseux (ceux des mains, notamment) reliés entre eux par des connexions anatomiques peu résistantes.

    184 Les termes de sépulture multiple (double, triple et au-delà) correspondent au dépôt ou à l’accumulation simultanée de plusieurs individus au cours d’une même opération (Leclerc et Tarrête, 1988).

    185 Dans cette partie, nous sommes amenés, d’ores et déjà, à préciser le stade de maturité, le sexe et l’âge au décès des individus de manière à pouvoir les confronter aux faits archéologiques. Une analyse plus détaillée des paramètres démographiques fait l’objet du chapitre « Particularités démographiques propres au site des Fédons », p. 46.

    186 Quarante-huit sujets immatures n’ont pu être classés avec certitude dans cette catégorie, soit parce qu’ils ne présentaient pas d’argument discriminant pour déterminer un espace de décomposition des corps (14 cas), soit parce que la mauvaise conservation des ossements a interdit toute observation (34 cas).

    187 Huit sépultures doubles concernent l’association d’une femme et d’un enfant, et six l’association d’un homme et d’un enfant.

    188 Seuls 4 sujets dont les crânes étaient à l’état d’esquilles ont été exclus.

    189 Huit individus ont les mains posées sur le bassin (G4) ou à côté du bassin car les membres supérieurs sont en abduction (G11 = deux cas), six individus ont une main sur le bassin et l’autre sur l’abdomen (G5), quatre autres ont une main sur le thorax et l’autre sur le bassin (G6), huit individus ont un membre supérieur fléchi très à l’écart du tronc alors que son contro-latéral est en adduction la main sur l’abdomen (G8).

    190 En fonction de leur dimension, elles peuvent se répartir en deux groupes : vingt-huit exemplaires ne dépassant pas 28 mm de long et 5 exemplaires étant de 37 à 40 mm de long.

    191 II faut signaler que les sédiments n’ont pas été tamisés.

    192 Il s’agit de positions trouvées à la fouille. Nous sommes tout à fait conscients qu’il y ait pu y avoir une certaine mobilité du mobilier pendant la liquéfaction des parties molles. De plus, deux épingles, associées aux sépultures 45, US 151 et 39, trouvées dans la partie supérieure du comblement des fosses n’ont pu être positionnées.

    193 Une épingle unique pour deux femmes adultes, SP 23 et SP 31, et un nourrisson, SP 46-US 156.

    194 Une épingle pour SP 06, SP 43, SP 67, SP 84, SP 96 et SP 99 (quatre enfants et deux hommes) ; deux pour SP 47 et SP 79 (deux enfants) ; trois pour SP 45 et SP 85 (un enfant et un homme) ; quatre pour SP 87 (un enfant) ; six pour SP 39 (une femme).

    195 Deux épingles pour SP 85 (un homme).

    196 Une épingle pour SP 16, SP 48 et SP 80 (deux enfants et un homme).

    197 Aucune distinction n’a pu être faite en fonction de la taille des épingles.

    198 Cette série de ferrets, attestés dans des niveaux d’habitats dès le xiiie siècle, sont particulièrement bien représentés au cours du xvie siècle, sur le site Du Vuache (Démians d’Archimbaud, 1980 : 515-516, fig. 478 ; Raynaud 1992 : 97-99, fig. 104, 107 et 108).

    199 Trois autres ferrets ont été retrouvés dans le comblement de fosse de deux sujets adultes féminins (SP 51-US 181 et 97) et d’une adolescente de 15-19 ans (SP 47, US 162). Nous ne pouvons donc pas conclure avec certitude que ces ferrets étaient associés aux sépultures.

    200 D’après le Laboratoire de conservation, restauration et recherches. Centre archéologique du Var à Draguignan – tissu très minéralisé ; textile : non identifié ; un fragment de fil peu minéralisé (longueur 3 mm) montre des fibres qui pourraient être d’origine végétale (lin ?).
    Caractéristiques techniques- armure : toile ; lisière : néant ; réduction : en l’absence de lisière et en raison de l’état de conservation, les sens chaîne et trame ne peuvent être déterminés. Quel que soit le sens, il y a une seule chaîne et une seule trame, un bout dans chaque sens.
    – Dans un sens : 10 ou 11 fils au cm. Faible torsion Z (= de gauche à droite en montant). Diamètre actuel des fils : environ 0,7 mm.
    – Dans le sens perpendiculaire : 10 à 12 fils au cm. Faible torsion Z. Diamètre actuel des fils : environ 0,5 à 0,7 mm.

    201 Le monogramme IHS (abréviation du nom de Jésus, transcrit des manuscrits grecs du Nouveau Testament), que l’église latine a interprété Iesus Hominum Salvator, apparaît en particulier dans l’iconographie de l’ordre des Franciscains, dès le xve siècle. De telles bagues avec le même insigne religieux, mais surmonté d’une croix, sont connues aux xvie-xviie siècles dans la région, notamment dans le cimetière de Digne (Démians d’Archimbaud, 1995, 53, fig. 42).

    202 Des grains d’ambre de colliers ou de bracelets, dont la fonction dépasse la simple parure, sont fréquemment attestés dans des nécropoles du iiie au viie siècles en Normandie (Berthelot, 1995). En effet, ce matériau, formé de résine fossile de conifères réduite en poudre ou utilisée dans la parure dès le Néolithique, possède des vertus curatives et magiques mises en évidence par les sources documentaires (Berthelot, 1995 : 8-9). Ces propriétés sont aussi connues au Moyen Âge, en relation avec des contextes funéraires (Alexandre-Bidon, 1996), et à l’époque moderne, notamment au cours des épidémies de pestes (Biraben, 1975a : 60).

    203 Nous utilisons le terme linceul de façon générique afin de désigner l’enveloppe dans laquelle est enroulé le cadavre. En effet, faute de matières organiques conservées, nous ne pouvons pas connaître la nature du tissu (lin, chanvre, couverture...).

    204 Il s’agit de la pierre tombale de Jacques Germain, milieu du xve siècle (musée de Dijon). Le tissu drapé recouvrant le corps est suffisamment large pour que les deux pans de tissu se superposent complètement sur le tronc. Le tissu retombe sur le front à la manière d’une capuche.

    205 Cet indice donne une idée de la conservation anatomique après les opérations de reconstitution, ce qui quantifie la conservation générale des éléments osseux disponibles pour l’étude et est donc sensiblement différent du degré de fragmentation observé sur le terrain. Il traduit le rapport de la somme des scores de conservation (en pourcentage) attribués à chaque élément ou groupe d’éléments osseux constitutifs du squelette (44 au total) rapporté au nombre total d’os du squelette : ICA = 100 x Σ C (1, N)/N.

    206 ICA moyen = 10,39 % pour les enfants âgés de moins de 5 ans, ICA moyen = 36,19 % pour les enfants âgés de 5 à 19 ans, différence hautement significative, p < 0,001.

    207 Cet indice permet d’apprécier l’état de conservation des surfaces corticales. Il donne une idée de la conservation qualitative des éléments osseux traduisant le rapport entre la surface corticale saine et la surface corticale altérée de chaque os. Nous avons considéré 5 classes de conservation qualitative :
    – classe 1 : surface corticale complètement saine ;
    – classe 2 : surface corticale saine > à la surface corticale altérée ;
    – classe 3 : surface corticale saine = à la surface corticale altérée ;
    – classe 4 : surface corticale saine < à la surface corticale altérée ;
    – classe 5 : surface corticale complètement altérée.

    208 En témoignent plusieurs études de gisements funéraires consécutifs à des crises de nature variée, documentées ou non d’un point de vue historique ; nous n’en citerons que quelques-unes, qu’il s’agisse d’articles (Adam, Boura, Duday, 1992 ; Blaizot, 1998 ; Margerison et Knüsel, 2002 ; Bouville, 1980) ou de mémoires universitaires (Guignier, 1997 ; Hérouin, 1996 ; Marchal, 2002). On peut également se référer à plusieurs études d’archives telles que celles de Bautier (1995), Biraben (1975), Faron (1997), Hollingsworth et Hollingsworth (1971) et Mallet (1835), pour ne citer qu’eux.

    209 II semble en effet de plus en plus clairement admis que l’on ne puisse plus ignorer certains facteurs de distorsions inévitables qui touchent à la fois à la nature même de l’échantillon analysé, son origine, sa représentativité (Masset, 1987 ; Masset et Sellier, 1990 ; Sellier, 1987, 1989, 1996), et à la maigre fiabilité des estimateurs d’âge et de sexe sur le squelette humain (cf. infra p. 47).

    210 Où il apparaît que les objectifs de la paléodémographie sont posés, au sens strict de la discipline, en termes de niveau de vie de la population, de peuplement ou de mortalité générale. La plupart de ces études reposent sur une analyse globale de plusieurs sites, démarche fondamentalement différente de celle qui nous préoccupe ici.

    211 Un autre aspect de cette démarche concerne les réflexions pouvant être menées lors de la confrontation des données anthropologiques (âge et sexe) aux données archéologiques (pratiques funéraires) (cf. supra p. 37).

    212 Celle-ci ne pourra être mise en valeur que si l’on confronte notre population archéologique à une population naturelle théorique.

    213 Tous les bassins étaient bien conservés grâce à une consolidation systématique des os sur le terrain.

    214 Certaines études récentes dont celle de Kreitner et al. (1998) montrent toutefois la variabilité de ce phénomène, la fin de la maturation du squelette pouvant être plus récente.

    215 Une troisième classe sera constituée par les adultes d’âge indéterminé (> à 20 ans).

    216 Les méthodes proposées sont celles qui ont été utilisées pour l’analyse paléodémographique du rapport préliminaire (Castex, 1996).

    217 Cette confrontation apparaît comme le seul moyen de repérer des écarts par rapport à une démographie naturelle.

    218 La mortalité suit quelques lois incontournables communes à toutes les populations. On part donc d’une hypothèse fondamentale selon laquelle il existe un schéma de mortalité archaïque applicable aux populations préjennériennes avant la révolution industrielle. Ce schéma de mortalité archaïque est défini par des tables de mortalité historiques à partir desquelles ont construit des tables types de mortalité.

    219 Elles sont construites à partir d’un ensemble de tables réelles à l’échelle de tout un pays et pour des périodes variées, donc pour des niveaux de mortalité différents.

    220 Elles sont fondées sur des analyses statistiques élaborées (154 tables de base) et permettent une observation de la mortalité sur une période importante ; de plus, chaque quotient est calculé indépendamment de tous les autres et ce sont les seules tables qui permettent le calcul d’un intervalle de confiance (à 95 %) des quotients de mortalité.

    221 Deux exemples, portant sur la structure des effectifs immatures, peuvent être cités afin de montrer la fiabilité de ces tables types. Qu’il s’agisse de la noblesse anglaise du milieu du xviie siècle (Hollingsworth 1977) ou d’une population plus récente comme celle de Parana au Brésil, début xixe siècle (Henry, Pilatti Balhana 1975), où la mortalité infantile reste très importante, la structure des effectifs immatures s’inscrit dans le champ des valeurs des tables de Ledermann (1969).

    222 Certaines études sont en cours sur ce sujet (Buchet et Séguy, 2002). Cette recherche méthodologique est par ailleurs un des objectifs du projet « Gestion sociale des espaces funéraires : une approche multidisciplinaire (histoire, archéologie, anthropologie et paléodémographie) » déposé dans le cadre de la programmation quadriennale (2003-2006) de la Maison des sciences de l’Homme d’Aquitaine (responsables : I. Cartron, MC, Université Bordeaux-3, Maison de l’archéologie, et D. Castex, en collaboration avec P. Sellier, pour la partie paléodémographie).

    223 Où x désigne l’âge d’entrée dans la classe d’âge et a la durée en années de cette classe ; c’est-à-dire le rapport des décès d’une classe d’âge sur l’effectif d’une population risquant de mourir à l’entrée de cette classe d’âge. Il s’agit donc d’une probabilité de mourir, ce qui est différent du taux des décès où l’on a une proportion de décès par rapport à une population moyenne.

    224 20 ans : en deçà, une population ne peut prétendre à sa survie, les individus décédant avant l’âge de la reproduction.
    40 ans : maximum enregistré pour les empereurs Ming et la classe dirigeante de Genève (Masset, 1975).

    225 Plusieurs analyses paléodémographiques ont longtemps privilégié une répartition des individus à partir de l’âge moyen, ce qui revenait à proposer une répartition et une seule sans tenir compte de l’intervalle de l’âge donné par les méthodes utilisées.

    226 Par exemple, pour la maturation dentaire, un enfant dont l’âge dentaire est de 5 ans ± 16 mois selon Ubelaker (1978) peut appartenir à la classe 1-4 ans, mais également à la classe 5-9 ans.

    227 Compte tenu des incertitudes méthodologiques, les variations d’effectif, dans un sens ou dans l’autre (plus jeune ou plus âgé), peuvent alors modifier les rapports entre les classes d’âge, et donc les interprétations qui en découlent ; les différences observées peuvent être d’autant plus importantes que l’effectif des non-adultes est faible (Sellier et al., 1995).

    228 Toujours par référence aux tables types de Ledermann (1969).

    229 Le seul vrai problème étant que certaines anomalies peuvent ainsi passer inaperçues.

    230 En réalité, il y a 32 768 distributions, mais certaines, en termes d’effectifs, sont bien entendu redondantes.

    231 Nous avons donc fait le choix de ne présenter que les références à une espérance de vie à la naissance de 30 ans (tableau et graphique).

    232 Rapport de l’effectif des hommes sur l’effectif des hommes et celui des femmes (équivalent du sex-ratio des Anglo-Saxons).

    233 Les clichés ont été réalisés selon une incidence postéroantérieure, face contre plaque, avec un rayonnement de 65 Kv – 1,4 A et une distance focus-film de 1 mètre permettant de réduire au maximum les déformations.

    234 On peut se demander s’il n’y aurait pas intérêt à considérer, dans ce cadre :
    – les formes en « feuille »,
    – les formes en « rein » ou « globuleuse » aux contours arrondis, « curvilignes »,
    – les formes « triangulaires » ou « losangiques » constituant un groupe aux contours plus linéaires, « anguleux ».

    235 Actuellement, la paléogénétique offre de nouvelles perspectives de recherche sur les structures familiales mais elle demeure malheureusement coûteuse et fortement tributaire de la conservation du matériel osseux.

    236 Cette étude n’aurait pu se dérouler sans l’aide de nombreuses personnes, parmi lesquelles nous tenons à remercier tout particulièrement Y. Ardagna, A. Sbihi et P. Vidal.

    237 Dans un cadre plus général, les études actuelles montrent une fréquence de l’atteinte après 40 ans et une croissance régulière avec l’âge (Commandre, 1977 : 62), les contraintes mécaniques constituant une cause supplémentaire de l’altération du cartilage.

    238 Sur un ensemble de 944 enthèses, le nombre de sites conservés est de 222, soit 24 %.

    Auteurs

    • Jean Acotto
    • Syvlia Bello
    • Corinne Bouttevin
    • Dominique Castex
    • Henri Duday
    • Olivier Dutour
    • Nathalie Moreau
    • Michel Panuel
    • Patrick Reynaud
    • Michel Signoli
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    Table des matières

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    182 À titre d’exemple, nous mentionnerons le soin apporté à la consolidation systématique, sur le terrain, des os coxaux des adultes et des mandibules des sujets immatures afin d’optimiser les résultats des analyses post-fouille, et tout particulièrement l’analyse démographique.

    183 Les tombes sont le lieu de dépôt définitif des défunts peu de temps après leur mort comme l’atteste la présence, en connexion plus ou moins stricte, des éléments osseux (ceux des mains, notamment) reliés entre eux par des connexions anatomiques peu résistantes.

    184 Les termes de sépulture multiple (double, triple et au-delà) correspondent au dépôt ou à l’accumulation simultanée de plusieurs individus au cours d’une même opération (Leclerc et Tarrête, 1988).

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    186 Quarante-huit sujets immatures n’ont pu être classés avec certitude dans cette catégorie, soit parce qu’ils ne présentaient pas d’argument discriminant pour déterminer un espace de décomposition des corps (14 cas), soit parce que la mauvaise conservation des ossements a interdit toute observation (34 cas).

    187 Huit sépultures doubles concernent l’association d’une femme et d’un enfant, et six l’association d’un homme et d’un enfant.

    188 Seuls 4 sujets dont les crânes étaient à l’état d’esquilles ont été exclus.

    189 Huit individus ont les mains posées sur le bassin (G4) ou à côté du bassin car les membres supérieurs sont en abduction (G11 = deux cas), six individus ont une main sur le bassin et l’autre sur l’abdomen (G5), quatre autres ont une main sur le thorax et l’autre sur le bassin (G6), huit individus ont un membre supérieur fléchi très à l’écart du tronc alors que son contro-latéral est en adduction la main sur l’abdomen (G8).

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    192 Il s’agit de positions trouvées à la fouille. Nous sommes tout à fait conscients qu’il y ait pu y avoir une certaine mobilité du mobilier pendant la liquéfaction des parties molles. De plus, deux épingles, associées aux sépultures 45, US 151 et 39, trouvées dans la partie supérieure du comblement des fosses n’ont pu être positionnées.

    193 Une épingle unique pour deux femmes adultes, SP 23 et SP 31, et un nourrisson, SP 46-US 156.

    194 Une épingle pour SP 06, SP 43, SP 67, SP 84, SP 96 et SP 99 (quatre enfants et deux hommes) ; deux pour SP 47 et SP 79 (deux enfants) ; trois pour SP 45 et SP 85 (un enfant et un homme) ; quatre pour SP 87 (un enfant) ; six pour SP 39 (une femme).

    195 Deux épingles pour SP 85 (un homme).

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    197 Aucune distinction n’a pu être faite en fonction de la taille des épingles.

    198 Cette série de ferrets, attestés dans des niveaux d’habitats dès le xiiie siècle, sont particulièrement bien représentés au cours du xvie siècle, sur le site Du Vuache (Démians d’Archimbaud, 1980 : 515-516, fig. 478 ; Raynaud 1992 : 97-99, fig. 104, 107 et 108).

    199 Trois autres ferrets ont été retrouvés dans le comblement de fosse de deux sujets adultes féminins (SP 51-US 181 et 97) et d’une adolescente de 15-19 ans (SP 47, US 162). Nous ne pouvons donc pas conclure avec certitude que ces ferrets étaient associés aux sépultures.

    200 D’après le Laboratoire de conservation, restauration et recherches. Centre archéologique du Var à Draguignan – tissu très minéralisé ; textile : non identifié ; un fragment de fil peu minéralisé (longueur 3 mm) montre des fibres qui pourraient être d’origine végétale (lin ?).
    Caractéristiques techniques- armure : toile ; lisière : néant ; réduction : en l’absence de lisière et en raison de l’état de conservation, les sens chaîne et trame ne peuvent être déterminés. Quel que soit le sens, il y a une seule chaîne et une seule trame, un bout dans chaque sens.
    – Dans un sens : 10 ou 11 fils au cm. Faible torsion Z (= de gauche à droite en montant). Diamètre actuel des fils : environ 0,7 mm.
    – Dans le sens perpendiculaire : 10 à 12 fils au cm. Faible torsion Z. Diamètre actuel des fils : environ 0,5 à 0,7 mm.

    201 Le monogramme IHS (abréviation du nom de Jésus, transcrit des manuscrits grecs du Nouveau Testament), que l’église latine a interprété Iesus Hominum Salvator, apparaît en particulier dans l’iconographie de l’ordre des Franciscains, dès le xve siècle. De telles bagues avec le même insigne religieux, mais surmonté d’une croix, sont connues aux xvie-xviie siècles dans la région, notamment dans le cimetière de Digne (Démians d’Archimbaud, 1995, 53, fig. 42).

    202 Des grains d’ambre de colliers ou de bracelets, dont la fonction dépasse la simple parure, sont fréquemment attestés dans des nécropoles du iiie au viie siècles en Normandie (Berthelot, 1995). En effet, ce matériau, formé de résine fossile de conifères réduite en poudre ou utilisée dans la parure dès le Néolithique, possède des vertus curatives et magiques mises en évidence par les sources documentaires (Berthelot, 1995 : 8-9). Ces propriétés sont aussi connues au Moyen Âge, en relation avec des contextes funéraires (Alexandre-Bidon, 1996), et à l’époque moderne, notamment au cours des épidémies de pestes (Biraben, 1975a : 60).

    203 Nous utilisons le terme linceul de façon générique afin de désigner l’enveloppe dans laquelle est enroulé le cadavre. En effet, faute de matières organiques conservées, nous ne pouvons pas connaître la nature du tissu (lin, chanvre, couverture...).

    204 Il s’agit de la pierre tombale de Jacques Germain, milieu du xve siècle (musée de Dijon). Le tissu drapé recouvrant le corps est suffisamment large pour que les deux pans de tissu se superposent complètement sur le tronc. Le tissu retombe sur le front à la manière d’une capuche.

    205 Cet indice donne une idée de la conservation anatomique après les opérations de reconstitution, ce qui quantifie la conservation générale des éléments osseux disponibles pour l’étude et est donc sensiblement différent du degré de fragmentation observé sur le terrain. Il traduit le rapport de la somme des scores de conservation (en pourcentage) attribués à chaque élément ou groupe d’éléments osseux constitutifs du squelette (44 au total) rapporté au nombre total d’os du squelette : ICA = 100 x Σ C (1, N)/N.

    206 ICA moyen = 10,39 % pour les enfants âgés de moins de 5 ans, ICA moyen = 36,19 % pour les enfants âgés de 5 à 19 ans, différence hautement significative, p < 0,001.

    207 Cet indice permet d’apprécier l’état de conservation des surfaces corticales. Il donne une idée de la conservation qualitative des éléments osseux traduisant le rapport entre la surface corticale saine et la surface corticale altérée de chaque os. Nous avons considéré 5 classes de conservation qualitative :
    – classe 1 : surface corticale complètement saine ;
    – classe 2 : surface corticale saine > à la surface corticale altérée ;
    – classe 3 : surface corticale saine = à la surface corticale altérée ;
    – classe 4 : surface corticale saine < à la surface corticale altérée ;
    – classe 5 : surface corticale complètement altérée.

    208 En témoignent plusieurs études de gisements funéraires consécutifs à des crises de nature variée, documentées ou non d’un point de vue historique ; nous n’en citerons que quelques-unes, qu’il s’agisse d’articles (Adam, Boura, Duday, 1992 ; Blaizot, 1998 ; Margerison et Knüsel, 2002 ; Bouville, 1980) ou de mémoires universitaires (Guignier, 1997 ; Hérouin, 1996 ; Marchal, 2002). On peut également se référer à plusieurs études d’archives telles que celles de Bautier (1995), Biraben (1975), Faron (1997), Hollingsworth et Hollingsworth (1971) et Mallet (1835), pour ne citer qu’eux.

    209 II semble en effet de plus en plus clairement admis que l’on ne puisse plus ignorer certains facteurs de distorsions inévitables qui touchent à la fois à la nature même de l’échantillon analysé, son origine, sa représentativité (Masset, 1987 ; Masset et Sellier, 1990 ; Sellier, 1987, 1989, 1996), et à la maigre fiabilité des estimateurs d’âge et de sexe sur le squelette humain (cf. infra p. 47).

    210 Où il apparaît que les objectifs de la paléodémographie sont posés, au sens strict de la discipline, en termes de niveau de vie de la population, de peuplement ou de mortalité générale. La plupart de ces études reposent sur une analyse globale de plusieurs sites, démarche fondamentalement différente de celle qui nous préoccupe ici.

    211 Un autre aspect de cette démarche concerne les réflexions pouvant être menées lors de la confrontation des données anthropologiques (âge et sexe) aux données archéologiques (pratiques funéraires) (cf. supra p. 37).

    212 Celle-ci ne pourra être mise en valeur que si l’on confronte notre population archéologique à une population naturelle théorique.

    213 Tous les bassins étaient bien conservés grâce à une consolidation systématique des os sur le terrain.

    214 Certaines études récentes dont celle de Kreitner et al. (1998) montrent toutefois la variabilité de ce phénomène, la fin de la maturation du squelette pouvant être plus récente.

    215 Une troisième classe sera constituée par les adultes d’âge indéterminé (> à 20 ans).

    216 Les méthodes proposées sont celles qui ont été utilisées pour l’analyse paléodémographique du rapport préliminaire (Castex, 1996).

    217 Cette confrontation apparaît comme le seul moyen de repérer des écarts par rapport à une démographie naturelle.

    218 La mortalité suit quelques lois incontournables communes à toutes les populations. On part donc d’une hypothèse fondamentale selon laquelle il existe un schéma de mortalité archaïque applicable aux populations préjennériennes avant la révolution industrielle. Ce schéma de mortalité archaïque est défini par des tables de mortalité historiques à partir desquelles ont construit des tables types de mortalité.

    219 Elles sont construites à partir d’un ensemble de tables réelles à l’échelle de tout un pays et pour des périodes variées, donc pour des niveaux de mortalité différents.

    220 Elles sont fondées sur des analyses statistiques élaborées (154 tables de base) et permettent une observation de la mortalité sur une période importante ; de plus, chaque quotient est calculé indépendamment de tous les autres et ce sont les seules tables qui permettent le calcul d’un intervalle de confiance (à 95 %) des quotients de mortalité.

    221 Deux exemples, portant sur la structure des effectifs immatures, peuvent être cités afin de montrer la fiabilité de ces tables types. Qu’il s’agisse de la noblesse anglaise du milieu du xviie siècle (Hollingsworth 1977) ou d’une population plus récente comme celle de Parana au Brésil, début xixe siècle (Henry, Pilatti Balhana 1975), où la mortalité infantile reste très importante, la structure des effectifs immatures s’inscrit dans le champ des valeurs des tables de Ledermann (1969).

    222 Certaines études sont en cours sur ce sujet (Buchet et Séguy, 2002). Cette recherche méthodologique est par ailleurs un des objectifs du projet « Gestion sociale des espaces funéraires : une approche multidisciplinaire (histoire, archéologie, anthropologie et paléodémographie) » déposé dans le cadre de la programmation quadriennale (2003-2006) de la Maison des sciences de l’Homme d’Aquitaine (responsables : I. Cartron, MC, Université Bordeaux-3, Maison de l’archéologie, et D. Castex, en collaboration avec P. Sellier, pour la partie paléodémographie).

    223 Où x désigne l’âge d’entrée dans la classe d’âge et a la durée en années de cette classe ; c’est-à-dire le rapport des décès d’une classe d’âge sur l’effectif d’une population risquant de mourir à l’entrée de cette classe d’âge. Il s’agit donc d’une probabilité de mourir, ce qui est différent du taux des décès où l’on a une proportion de décès par rapport à une population moyenne.

    224 20 ans : en deçà, une population ne peut prétendre à sa survie, les individus décédant avant l’âge de la reproduction.
    40 ans : maximum enregistré pour les empereurs Ming et la classe dirigeante de Genève (Masset, 1975).

    225 Plusieurs analyses paléodémographiques ont longtemps privilégié une répartition des individus à partir de l’âge moyen, ce qui revenait à proposer une répartition et une seule sans tenir compte de l’intervalle de l’âge donné par les méthodes utilisées.

    226 Par exemple, pour la maturation dentaire, un enfant dont l’âge dentaire est de 5 ans ± 16 mois selon Ubelaker (1978) peut appartenir à la classe 1-4 ans, mais également à la classe 5-9 ans.

    227 Compte tenu des incertitudes méthodologiques, les variations d’effectif, dans un sens ou dans l’autre (plus jeune ou plus âgé), peuvent alors modifier les rapports entre les classes d’âge, et donc les interprétations qui en découlent ; les différences observées peuvent être d’autant plus importantes que l’effectif des non-adultes est faible (Sellier et al., 1995).

    228 Toujours par référence aux tables types de Ledermann (1969).

    229 Le seul vrai problème étant que certaines anomalies peuvent ainsi passer inaperçues.

    230 En réalité, il y a 32 768 distributions, mais certaines, en termes d’effectifs, sont bien entendu redondantes.

    231 Nous avons donc fait le choix de ne présenter que les références à une espérance de vie à la naissance de 30 ans (tableau et graphique).

    232 Rapport de l’effectif des hommes sur l’effectif des hommes et celui des femmes (équivalent du sex-ratio des Anglo-Saxons).

    233 Les clichés ont été réalisés selon une incidence postéroantérieure, face contre plaque, avec un rayonnement de 65 Kv – 1,4 A et une distance focus-film de 1 mètre permettant de réduire au maximum les déformations.

    234 On peut se demander s’il n’y aurait pas intérêt à considérer, dans ce cadre :
    – les formes en « feuille »,
    – les formes en « rein » ou « globuleuse » aux contours arrondis, « curvilignes »,
    – les formes « triangulaires » ou « losangiques » constituant un groupe aux contours plus linéaires, « anguleux ».

    235 Actuellement, la paléogénétique offre de nouvelles perspectives de recherche sur les structures familiales mais elle demeure malheureusement coûteuse et fortement tributaire de la conservation du matériel osseux.

    236 Cette étude n’aurait pu se dérouler sans l’aide de nombreuses personnes, parmi lesquelles nous tenons à remercier tout particulièrement Y. Ardagna, A. Sbihi et P. Vidal.

    237 Dans un cadre plus général, les études actuelles montrent une fréquence de l’atteinte après 40 ans et une croissance régulière avec l’âge (Commandre, 1977 : 62), les contraintes mécaniques constituant une cause supplémentaire de l’altération du cartilage.

    238 Sur un ensemble de 944 enthèses, le nombre de sites conservés est de 222, soit 24 %.

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    Saison d’une peste (avril - septembre 1590)

    Ce livre est cité par

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    • Séguy, Isabelle. Buchet, Luc. (2013) INED Population Studies Handbook of Palaeodemography. DOI: 10.1007/978-3-319-01553-8_6
    • Kacki, Sacha. Tzortzis, Stéfan. Castex, Dominique. Signoli, Michel. (2019) Archéologie de la santé, anthropologie du soin. DOI: 10.3917/dec.frome.2019.01.0119
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    • Tzortzis, Stéfan. Rigeade, Catherine. (2010) Persistance et/ou transgression des pratiques funéraires en temps de peste. Études sur la mort, n° 136. DOI: 10.3917/eslm.136.0053
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    • Fornaciari, Antonio. (2017) Environmental Microbial Forensics and Archaeology of Past Pandemics. Microbiology Spectrum, 5. DOI: 10.1128/microbiolspec.EMF-0011-2016
    • Kacki, S.. Réveillas, H.. Sachau-Carcel, G.. Giuliani, R.. Blanchard, P.. Castex, D.. (2014) Réévaluation des arguments de simultanéité des dépôts de cadavres : l’exemple des sépultures plurielles de la catacombe des Saints Pierre-et-Marcellin (Rome). BMSAP, 26. DOI: 10.1007/s13219-013-0092-8
    • Castex, Dominique. Kacki, Sacha. (2016) Demographic Patterns Distinctive of Epidemic Cemeteries in Archaeological Samples. Microbiology Spectrum, 4. DOI: 10.1128/microbiolspec.PoH-0015-2015

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    Saison d’une peste (avril - septembre 1590)

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    Acotto, J., Bello, S., Bouttevin, C., Castex, D., Duday, H., Dutour, O., Moreau, N., Panuel, M., Reynaud, P., & Signoli, M. (2005). 2. Des données archéologiques et anthropologiques aux interprétations. In B. Bizot, D. Castex, P. Reynaud, & M. Signoli (éds.), Saison d’une peste (avril - septembre 1590) (1‑). CNRS Éditions. https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.8744
    Acotto, Jean, Syvlia Bello, Corinne Bouttevin, Dominique Castex, Henri Duday, Olivier Dutour, Nathalie Moreau, Michel Panuel, Patrick Reynaud, et Michel Signoli. « 2. Des données archéologiques et anthropologiques aux interprétations ». In Saison d’une peste (avril - septembre 1590), édité par Bruno Bizot, Dominique Castex, Patrick Reynaud, et Michel Signoli. Paris: CNRS Éditions, 2005. https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.8744.
    Acotto, Jean, et al. « 2. Des données archéologiques et anthropologiques aux interprétations ». Saison d’une peste (avril - septembre 1590), édité par Bruno Bizot et al., CNRS Éditions, 2005, https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.8744.

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    Bizot, B., Castex, D., Reynaud, P., & Signoli, M. (éds.). (2005). Saison d’une peste (avril - septembre 1590) (1‑). CNRS Éditions. https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.8732
    Bizot, Bruno, Dominique Castex, Patrick Reynaud, et Michel Signoli, éd. Saison d’une peste (avril - septembre 1590). Paris: CNRS Éditions, 2005. https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.8732.
    Bizot, Bruno, et al., éditeurs. Saison d’une peste (avril - septembre 1590). CNRS Éditions, 2005, https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.8732.
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