La méthode « active » et ses alternatives
p. 232-247
Texte intégral
1Les perspectives d’appliquer la science de l’enfant à l’éducation ainsi que le projet politique d’émancipation de l’enfant, de remise en cause de la relation pédagogique traditionnelle que nous venons de voir, interviennent en France dans un contexte où la pédagogie officielle est très cohérente. Sans attendre les innovations issues de la biologie, elle a su s’approprier l’héritage de la philosophie sensualiste de l’éducation et le modèle de l’éducateur suisse Pestalozzi. Le rayonnement de la philosophie de Spencer aussi bien que de la recherche pédagogique américaine va créer une véritable situation de concurrence pour penser et projeter la future éducation républicaine et l’école obligatoire. Pour clarifier les débats qui s’ensuivirent, nous proposons un cheminement, qui n’est pas le seul possible, allant de la philosophie « officielle » de l’éducation aux réponses effectives à cette situation que constituent la théorie durkheimienne et la Société libre pour l’étude psychologique de l’enfant. Ceci constitue un préalable nécessaire pour situer l’apport décisif du Genevois Édouard Claparède, qui assurera véritablement la postérité de la science biologique de l’enfant.
2« La France pédagogise1 », dit avec une certaine ironie Félix Pécaut en 1882 ; en effet, la mise en place de l’enseignement public s’accompagne de l’organisation d’un enseignement pédagogique placé sous l’égide de la philosophie ; F. Pécaut, bien qu’il s’en félicite, s’inquiète d’une dérive possible de cet enseignement vers la gratuité et la pédanterie… Mais quel danger plus sérieux menace-t-il la pédagogie en tant que discipline philosophique à cette époque ? C’est bien plutôt la prédominance du point de vue spencérien, la disqualification de la philosophie en tant que réflexion sur les fins de l’éducation au profit d’une conception pragmatique de la science biologique et psychologique.
3Posons quelques repères concernant la philosophie pédagogique officielle : pour elle, l’intérêt pour la psychologie est déterminé par le souci de l’éducation morale, tandis que l’intérêt pour le développement individuel est déterminé par le souci de l’autonomie morale. Le Pr Henri Marion, auteur de nombreux manuels inspirés par ce point de vue, est d’autant plus représentatif de cette pensée officielle qu’il fut confronté aux remaniements en cours.
4Professeur de philosophie au lycée Henri-IV, Henri Marion fut chargé en 1880 de la chaire de psychologie et de morale à l’École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses, école nouvellement créée qui formait alors les premières générations de professeurs d’écoles normales d’institutrices ; de ses cours est issu le livre intitulé Leçons de psychologie appliquée à l’éducation2. De quelle psychologie s’agit-il alors ? D’une psychologie générale qui n’est pas particulièrement une psychologie de l’enfant, mais qui ambitionne de décrire le fonctionnement des facultés. Cette psychologie se situe dans la filiation de l’empirisme associationniste, illustré notamment par un ouvrage au rayonnement important à l’époque : La Science de l’éducation d’Alexander Bain3. En analysant les mécanismes de l’association des idées ou les mobiles du vouloir, A. Bain, lui non plus, ne fait pas de psychologie de l’enfant pour asseoir sa théorie de l’éducation, mais sa démarche consiste à réunir les données de psychologie générale susceptibles de se rattacher aux problèmes de l’éducation. Dans l’article « Psychologie » qu’il rédige pour la nouvelle version du Dictionnaire de pédagogie, en 1911, H. Marion, décrivant le programme des écoles normales, insiste encore sur l’idée que la psychologie est une science des faits, une science expérimentale, qui recherche les lois des phénomènes moraux, laissant à la métaphysique le questionnement sur l’origine et les destinées de l’âme. En fait, H. Marion attend de la psychologie qu’elle fonde de manière positive, c’est-à-dire indépendamment de postulats religieux, la possibilité d’une éducation morale ; la science est convoquée pour donner une assise à la « morale sans épithète » de Jules Ferry, une morale néo-kantienne, dont la clé de voûte est l’autonomie, celle de la personne morale comme celle du citoyen. Cette attente est celle de Ferdinand Buisson lui-même, qui espérait laïciser les acquis de la morale religieuse et voir les consciences régies par un spiritualisme non dogmatique4.
5En 1883, H. Marion est chargé du nouveau cours sur la science de l’éducation à la Sorbonne et prononce un discours d’ouverture de ce cours5. F. Buisson occupera ensuite cette chaire en 1896 ; à partir de 1902, c’est Durkheim qui fera son entrée dans la science de l’éducation, puisqu’il sera le suppléant de F. Buisson avant de lui succéder pleinement en 1906. Il occupera ce poste jusqu’à sa mort, en 1917. Quant à l’avenir de la science de l’éducation, il sera de permettre, comme le dit Maurice Halbwachs, l’entrée de la sociologie à la Sorbonne, par la porte étroite de la pédagogie6.
6H. Marion expose dans sa leçon inaugurale de 1883 que la « science de l’éducation », éclectique, rassemble les apports des sciences aussi bien que des doctrines de l’éducation7 : il en résulte que la science de l’éducation est constituée d’un progrès cumulatif. Il ne voit donc aucun inconvénient à rendre hommage à la psychologie contemporaine et à ses prolongements dans la science de l’enfant : les idées transformistes, dit-il, éclairent le développement psychologique du berceau de l’enfant jusqu’à Leverrier8…
7Cependant, l’harmonie de la science de l’éducation et de ces nouvelles connaissances n’est pas si immédiate que ces propos le laissent penser. H. Marion a élaboré, et il est en cela un parfait représentant des élites dirigeantes qui mettent en place l’école républicaine, sa propre conception de la pédagogie active. Rien ne dit que ce soit la même que celle des psychologues.
8Former le citoyen est le but ultime de l’éducation « libérale » : tout individu doit devenir capable de délibérer, de décider, il doit donc se former intellectuellement et moralement pour cela. L’épanouissement et l’émancipation individuels, en ce sens, ne se séparent pas de la participation à la vie sociale, il y a au contraire complémentarité entre ces deux aspects. Il s’agit donc de créer les conditions de l’exercice de la liberté politique, l’éducation prenant son sens dans une société qui ne comporte pas de sujets, mais des citoyens, leur liberté étant l’élément fondamental du pacte social. Sur le plan de la pratique pédagogique, cela implique de renoncer aux leçons magistrales, réputées engendrer la soumission, pour privilégier l’activité de l’élève ; la liberté comme fin de l’éducation exige l’activité comme moyen, dit H. Marion.
9De telles idées constituent la base de la pédagogie dite « normale » de la troisième République, et l’on ne peut que s’étonner de voir si souvent cette pédagogie affublée du qualificatif de « traditionnelle ». Elle s’inscrivait en faux au contraire contre une tradition autoritaire, et c’est pourquoi elle trouvait dans les pédagogues successeurs de Rousseau comme Pestalozzi ou encore Froebel des modèles appréciés.
10La méthode active est d’abord intuitive ; pour Marion, elle rejoint l’éducation des sens et des leçons de choses prônée par Pestalozzi. Elle invite l’élève à penser par lui-même et est donc « libérale ». L’enfant, par ses questions, ses expériences, y est le point de départ de la mise en ordre du savoir, dans lequel il construit sa progression au lieu de recevoir passivement la pensée d’autrui. C’est pourquoi H. Marion identifie méthode libérale et méthode « active »9. H. Marion estime que tout apprentissage, en donnant à l’individu le sentiment de son pouvoir et de la valeur de son effort, doit participer à l’éducation à la liberté10.
11C’est dire que la conquête de la liberté morale ne se sépare pas de celle du savoir, de même que la liberté politique se trouve à l’horizon de cette pédagogie qui vise à rompre avec les relations autoritaires enfant-adulte et l’inculcation dogmatique. Mais il ne faut pas confondre ce « libéralisme » avec un idéal libertaire tel que nous le trouvons chez Spencer. Ce programme reste celui des Lumières, avec, en sus, la préoccupation de la formation de la personnalité. Tout en ayant comme but la liberté, la vision de l’éducation de H. Marion reste liée à un objectif de maîtrise du développement de l’individu, et, au-delà, de la société.
12La connaissance de l’enfant des psychologues, telle qu’elle se déploie dans les années 1880-1890, met elle aussi en valeur l’activité de l’élève dans le processus de son développement. Activité, cette fois, au sens de potentiel biologique, qui échappe à l’éducation. Ceci est une source de confusion en ce qui concerne la notion d’activité de l’enfant. En effet, la psychologie évolutionniste est, comme la philosophie des Lumières, une philosophie du progrès ; mais, dans ce contexte, les termes de liberté et d’autonomie n’ont pas le même sens que dans la référence néo-kantienne : l’hypothèse scientifique de la poursuite de l’évolution transforme en valeur l’ouverture au possible. Le respect d’une évolution dont on n’est pas censé maîtriser le sens, un libéralisme absolu et, pour le sujet qui nous occupe, une éducation plus libertaire que libérale (ce que E. Claparède finira par exprimer dans la formule : l’enfant au centre du système éducatif) peuvent alors constituer un projet. C’est plutôt, comme on l’a vu chez Spencer et déjà chez un certain nombre de psychologues, notamment les Américains, une critique de la pédagogie en tant que projet de maîtrise rationnelle du devenir de l’enfant qui trouverait un aliment dans la science de l’enfant. En s’intégrant dans un premier temps à la « science de l’éducation », ce composé était appelé à lui ôter sa légitimité en tant que domaine organisé par la problématique philosophique des fins de l’éducation.
13Henri Marion et ses contemporains ont-ils perçu que, à terme, l’association d’un individualisme radical et d’une argumentation scientifique mettant en avant la spontanéité du progrès individuel pouvait, tout en produisant apparemment le même discours que lui, saper les bases de la relation éducative telle qu’ils l’entendaient ?
14Ce qui caractérise l’attitude des penseurs « officiels » de la pédagogie de la troisième République est, devant ce mouvement, l’ambiguïté : les attitudes d’H. Marion et O. Gréard ou de G. Compayré sont assez révélatrices d’une tension entre le désir d’accueillir la modernité et la science, et les réticences devant les implications morales de l’évolutionnisme et les positions philosophiques qui y sont associées, même si au fond elles n’y sont pas fatalement liées. Persuadés, de leur point de vue spiritualiste, de la nécessité d’appuyer la pédagogie sur la psychologie, ils font la part belle aux idées neuves tout en émettant un certain nombre de réserves, et la philosophie de l’éducation de Spencer focalise ce doute. H. Marion sera amené à faire des réserves sur cette philosophie, qu’il commente longuement, dans les Leçons de psychologie appliquée à l’éducation, dans la mesure où il lui reproche de minimiser l’importance de l’instruction11 au profit du respect du développement spontané, dans lequel Spencer souhaite rendre le plus discret possible l’intervention de l’éducation, perçue comme une modification de la nature de l’individu.
15C’est que la philosophie de H. Spencer représente dans sa pureté la nouvelle conception de l’éducation, solidaire de l’idée de respect de la nature, à partir du moment où la « nature » a changé de sens et désigne un processus de progrès mû par la spontanéité du changement et le libre jeu des différences entre individus, plus qu’un ensemble de propriétés intemporelles définissant l’être humain et le distinguant des autres vivants.
16H. Marion incarne un point de vue en régression, cela malgré l’intention de modernité qu’il manifeste par son ouverture théorique, et bien qu’il se réclame de la méthode libérale, qui a pour fin la liberté individuelle.
Émile Durkheim, une alternative
17L’article « Pédagogie » du Dictionnaire de pédagogie dans sa première édition, en 1887, fut rédigé par H. Marion. Pédagogie est identifié à science de l’éducation, car, si la pratique est un art, elle a besoin, pour ne pas être aveugle, d’unescience : les procédés ne sont rien sans les raisons théoriques qui les fondent. La pédagogie ou la science de l’éducation donne donc son sens et sa légitimité à l’acte concret d’éduquer. Définissant les différentes parties de la pédagogie ainsi entendue, l’essentiel résidant pour lui dans l’éducation morale, il aboutit à cette formulation : « Loin d’être seulement la science de l’éducation morale, la pédagogie comprend donc les règles de l’éducation physique, de l’éducation intellectuelle, etc. Ni la formation du goût, ni la culture du sentiment religieux ne sont hors de son domaine, lequel embrasse toutes les questions relatives au développement de l’homme, en tant que son développement est susceptible d’être dirigé12. »
18Ceci montre à quel point, pour H. Marion comme pour beaucoup de ses contemporains, le développement, fût-ce celui de la liberté, requiert une direction, direction éclairée par la science de l’éducation. C’est précisément cette conviction que la fin du siècle va voir s’ébranler, au fur et à mesure que la science sera moins science de l’éducation que de l’enfant13. La science de l’éducation entre en crise au moment où elle devient une nouvelle discipline universitaire.
19Dans la seconde édition du Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson, c’est Émile Durkheim qui rédige l’article portant sur la pédagogie14. On peut repérer ainsi l’émergence d’une alternative à la science de l’éducation qui pose les bases d’une autre opposition possible aux tendances spontanéistes issues de la psychologie : É. Durkheim ne partage pas la vision de la pédagogie de H. Marion puisqu’il refuse de l’identifier à la science de l’éducation ; au début de L’Éducation morale15, il préfère réserver ce mot pour désigner la théorie en tant qu’elle est susceptible de guider la conduite, sans identifier la pédagogie à la théorie, ni à l’art ou pratique de l’éducation. Il n’y a pas là qu’une querelle de mots : Durkheim a une autre conception de la science de l’éducation, liée à la sociologie ; héritier de la pensée sociologique de Herbert Spencer ou d’A. Espinas, qui font déjà correspondre un système de valeur à un état social historiquement défini, Durkheim estime que chaque société sécrète son mode d’éducation. Dans une évolution où le changement est fatal mais peut prendre la direction du progrès, l’éducation évolue et la tâche du sociologue est, entre autres sujets d’étude, de comprendre ces modifications. Ceci permet d’ailleurs de saisir pourquoi la sociologie peut remplacer la science de l’éducation en tant que chaire universitaire, en dehors de toute manœuvre institutionnelle. L’idée d’une association entre éducation et société historiquement donnée apparaît dans la définition bien connue de l’éducation :
« Nous avons déterminé, chemin faisant, deux éléments ; pour qu’il y ait éducation, il faut qu’il y ait en présence une génération d’adultes et une génération de jeunes, et une action exercée des premiers sur les seconds ; il nous reste à définir la nature de cette action. […] L’éducation est l’action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l’enfant un certain nombre d’états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné16. »
20Même si une telle position peut faire penser qu’il penche parfois vers une vision réformiste, progressiste, de l’éducation, et parfois vers une rigidité réactionnaire, on ne saurait voir de contradiction dans la vision durkheimienne de l’éducation. É. Durkheim évite le « laisser-faire » au niveau de l’individu, pour mieux le retrouver à l’œuvre au niveau de la société ; la contrainte exercée sur l’individu n’est que son harmonisation à un changement supporté par la société dans son ensemble, au lieu que ce changement soit considéré comme le produit de la spontanéité du développement individuel17.
21Dans le débat épistémologique concernant la science de l’éducation, la conséquence de cette conception est un refus d’identifier science de l’éducation et pédagogie. Dans l’article du Dictionnaire de pédagogie qui se substitue à celui de H. Marion à la rubrique « Pédagogie », É. Durkheim réserve le nom de science de l’éducation à l’étude des faits sociaux relatifs à l’éducation, aux différents systèmes d’éducation effectivement réalisés, au présent ou dans l’histoire ; le terme de « pédagogie » lui-même désigne la réflexion appliquée à l’éducation, qui se donne pour tâche de répondre à des besoins urgents, et tente de dégager le mode d’éducation qui convient à une société confrontée à des changements qui interdisent la routine et la reproduction simple du passé. É. Durkheim, à cause de cet enjeu qui la distingue de la science, appelle la pédagogie une « théorie pratique18 ».
22Certes, É. Durkheim ne nie pas qu’il puisse y avoir un progrès de la rationalité et ne réduit pas l’éducation à l’inculcation de contraintes ; ainsi, dans le domaine moral, il envisage d’éduquer les jeunes aux raisons profondes des contraintes morales, partant du principe qu’ils n’ont plus aujourd’hui besoin des « mythes » qui servaient autrefois à les transmettre19. Cependant, là encore, l’homme du xviiie siècle a bien disparu. La stabilité de la nature humaine, la perspective de son développement comme adéquation à un optimum de ses virtualités pouvaient tout aussi bien que les mythes de Durkheim fonder un idéal moral et un projet d’éducation. Mais, au xixe siècle finissant, il n’en est plus ainsi.
23Résumons la marche de ce changement : on peut dire qu’il y eut tout d’abord la pédagogie définie comme art, à la manière de Rousseau. Ce dernier désignait par là, à la manière aristotélicienne, un savoir-faire accompagné de raison. H. Marion définit la science de l’éducation comme la pédagogie, entendue au sens théorique et pas comme savoir-faire pratique ; elle comprend les connaissances nécessaires à cette pratique, aussi bien scientifiques que philosophiques (article « pédagogie » du dictionnaire de 1887)20.
24É. Durkheim dans « nature et méthode de la pédagogie », déclare que cette dernière est « une certaine manière de réfléchir aux choses de l’éducation » ; alors que l’éducation est avant tout une pratique, qui est universelle et peut être aveugle, la pédagogie est donc bien une forme de théorie. Cependant, il ne l’identifie pas à la science de l’éducation. En effet, cette dernière doit s’appliquer à la connaissance des systèmes d’éducation passés ou présents ; les pratiques éducatives sont des faits sociaux qui imposent aux individus la force de la contrainte sociale, et c’est pourquoi ils relèvent d’une étude objective. En revanche la pédagogie devra désigner la recherche d’un devoir-être, que l’étude objective des différents systèmes ne comporte plus, contrairement à ce qui se passait chez H. Marion ou G. Compayré. É. Durkheim note que tous les grands pédagogues ont appelé au changement et se sont insurgés contre les pratiques de leurs contemporains21. La pédagogie est donc intermédiaire entre l’art et la science, et est constituée de « combinaisons d’idées » propres à diriger la pratique. Il y voit l’auxiliaire de l’adaptation de l’éducation aux changements sociaux, son accompagnement nécessaire dès lors que la tradition ne suffit plus22.
25Cette réflexion peut inclure les sciences comme la psychologie aussi bien que la « science de l’éducation », au sens limité de connaissance des systèmes réels d’éducation, passés et présents, que lui accorde Durkheim par rapport à ses prédécesseurs. Cependant, un autre mouvement tempère cet équilibre. La critique de l’éducation, comme aspect historiquement récurrent de la pédagogie au sens où l’entend Durkheim, sera assumé dorénavant par la psychologie de l’enfant, devenue partie essentielle et hégémonique de la science de l’enfant.
26Aux questions : quelle éducation pour le présent ? Comment penser le changement des modes d’éducation ? Quel rapport à l’enfance va instituer le projet d’instruction publique ? Quelle est l’articulation entre éducation et société ? On a finalement trois types de réponses en termes de progrès :
l’éducation doit poursuivre l’autonomie individuelle au sens kantien, le progrès résultant de plus de rationalité et de responsabilité ; ceci serait la version la plus traditionnelle sur le plan de la philosophie politique, celle des républicains des débuts de la troisième République ;
si le progrès existe non dans les individus, mais à l’échelle du changement des sociétés, l’individu doit subir la contrainte afférente à l’équilibre social et s’intégrer dans le tout ; ceci serait la version durkheimienne et sociologique d’une relation réciproque de l’éducation à l’état social ;
le changement des sociétés est commandé par le libre jeu des différences individuelles et l’expression du fonds propre de l’individu. Ceci est la version qui s’impose dans l’éducation par le biais de la psychologie de l’enfant.
La Société libre pour l’étude psychologique de l’enfant ; de Ferdinand Buisson à Alfred Binet
27Une initiative importante pour intégrer les apports de la psychologie de l’enfant dans le domaine de l’éducation fut représentée par la Société libre pour l’étude psychologique de l’enfant (SLPEPE), fondée en 1899 par Ferdinand Buisson. Attentif à l’innovation pédagogique dans le monde, comme le montrent les rapports sur les Expositions universelles dont il est l’auteur, Ferdinand Buisson ne voulait pas que la France demeure en reste par rapport à l’Allemagne et aux États-Unis. Il y a dans cette fondation un parti pris de modernité, et il est permis de penser que les effets de cet acte volontariste dépassèrent les intentions du directeur de l’Enseignement primaire qui mit en place l’école laïque.
28Alfred Binet, l’inventeur de la mesure de l’intelligence, succéda à Ferdinand Buisson à la présidence de la SLPEPE en 1902, et peut donc passer pour en assumer l’héritage moral. En réalité, il y a beaucoup plus que cela dans ce changement. Pour l’apprécier, il faudrait pouvoir traiter de l’œuvre d’A. Binet, et le faire comme elle le mérite excéderait les limites du présent travail. Nous nous bornerons à quelques rappels, afin de situer A. Binet dans le contexte intellectuel et institutionnel du début du siècle.
29Rappelons que les premiers tests d’intelligence ont été élaborés par Binet et Simon en 1905 et 1908, et étaient destinés à recruter les élèves relevant des classes de perfectionnement, finalement créées en 1909. La Société libre pour l’étude psychologique de l’enfant est en partie à l’origine de la création de ces classes. A. Binet était depuis 1894 directeur du laboratoire de psychologie physiologique de la Sorbonne, fondé par Th. Ribot. C’est en raison de ses travaux expérimentaux dans les écoles qu’il a pu, dès la commission préparatoire, en 1904, être sollicité comme un spécialiste de la psychologie de l’enfant.
30Si l’on s’intéresse à l’œuvre d’A. Binet avant l’étape des tests d’intelligence, on doit remarquer que l’étude de l’enfant fut d’abord pour lui une préoccupation marginale. C’est en 1890 que l’on peut repérer un intérêt marqué pour son développement, auquel il consacre plusieurs articles dans la Revue philosophique. Cet intérêt se situe dans le cadre de préoccupations plus générales et qui n’ont jamais varié : il s’agit d’appliquer la méthode expérimentale à l’intelligence, aux fonctions supérieures de l’esprit, et d’autre part de cerner, par la mesure, dans une problématique inspirée de l’anthropométrie physique, les différences individuelles.
31Par ces recherches, A. Binet s’est confronté à l’observation individuelle d’enfants, mais il a renoncé par la suite à s’inscrire dans la continuité de cette tradition. En effet, il a mis au point sa propre méthode de manière totalement originale. On peut même dire que Binet n’est pas un novateur, au sein de cette période, dans le domaine de la réflexion sur les principes. En revanche, la psychologie de l’enfant a trouvé avec lui l’inventeur d’une méthode destinée à occuper le devant de la scène, grâce au succès international de l’échelle métrique de l’intelligence.
32Ce travail méthodologique est en rapport avec les besoins de l’école, ou plutôt avec le fait que l’école apparaît comme un nouveau champ de professionnalisation pour les psychologues de l’époque ; on pourrait appliquer à A. Binet le type d’analyse auquel Geneviève Paicheler a soumis les psychologues américains : sans aller jusqu’à dire que certaines connaissances n’existeraient pas sans leur inscription institutionnelle, il est certain qu’une demande d’« experts » de la part des institutions accélère la formation de certaines disciplines.
33En réalité, A. Binet est beaucoup plus préoccupé par la psychologie différentielle au sens large que par la psychologie de l’enfant : après 1890, il est remarquable qu’il étudie la « psychologie individuelle » au sens de psychologie des exceptions, des grands calculateurs ou artistes. Il poursuit en même temps des expériences sur la perception. C’est à partir de 1894 que réapparaît le souci de l’enfant, avec des études sur la mémoire visuelle, la suggestibilité, le caractère des enfants. En 1895, un article intitulé « La psychologie individuelle » paraît dans L’Année psychologique23. L’idée de « test » y apparaît ; A. Binet se livre à un inventaire et à une comparaison des premières tentatives d’établissement de questionnaires normalisés pour évaluer et comparer les performances individuelles. Il évoque Cattell, Munsterberg, Kraëpelin, etc. Il s’agit toujours, alors, d’anthropométrie des adultes et Binet déplore dans ces tentatives un manque d’audace dans le projet de mesurer les « facultés supérieures » de l’homme. En 1895 également paraît dans L’Année psychologique « La peur chez les enfants », et, en 1898, en collaboration avec V. Henri, La Fatigue intellectuelle. À ce moment, A. Binet travaille en milieu scolaire, avec le directeur d’école H. Vaschide, et se trouve en contact avec Ferdinand Buisson, ce qui en fera un spécialiste désigné lors de la création d’une commission pour l’étude des enfants anormaux, en 1904.
34La même année paraît dans la Revue philosophique24 un article sur la mesure en psychologie individuelle dans lequel, à côté du souci de mesurer la « finesse d’esprit » et « l’acuité de l’intelligence », apparaît nettement celui de déterminer des types d’intelligence. En effet, la quantification, qui consiste à exprimer par des nombres les succès des sujets aux épreuves qui leur sont proposées, vise à l’objectivité dans la comparaison entre individus. Mais la conclusion montre la valeur limitée que A. Binet accorde à cette quantification : le but n’en étant pas de produire une mesure au sens physique, mais un classement, il faudrait définir des types qualitatifs, des « familles naturelles de caractères25 ». Cette étude des différences qualitatives le conduit à étudier, en 1903, dans l’Étude expérimentale de l’intelligence, ses propres filles, dans le but de dégager leurs caractères intellectuels et leurs aptitudes ; cet ouvrage renoue, avec de grands enfants, avec la méthode monographique et avec l’observation dans le cadre familial. La réflexion de A. Binet paraît donc avoir toujours oscillé entre la recherche d’un classement hiérarchique des individus et la recherche d’une classification typologique des caractères intellectuels.
35Sur le plan méthodologique, la démarche de A. Binet, dans les tests qui l’ont rendu célèbre et qu’il met au point à partir de 1905, peut être interprétée comme une synthèse de tout ce que l’époque pouvait proposer en matière de mesure de l’homme. Le traitement d’un grand nombre de cas qui nécessite la mise au point d’épreuves standardisées trouve son modèle dans les enquêtes de G. Stanley Hall ; La Fatigue intellectuelle repose d’ailleurs sur cette méthode. De l’observation individuelle et de la méthode monographique, A. Binet conserve le contact direct avec les élèves testés, refusant de traiter des réponses écrites (Jean Piaget s’en souviendra dans ses protocoles d’épreuves psychologiques). La psychologie expérimentale de laboratoire fournira le modèle de la mesure quantitative des performances, et là, les recherches de mesure du mouvement de Marey ne sont pas loin ; A. Binet reprendra d’ailleurs, notamment dans ses recherches sur la suggestibilité26, un certain nombre de ses appareils. Quand à l’école, elle fournit un substitut du laboratoire lui-même. Enfin, l’anthropométrie de Broca, qui s’était à sa manière confronté au problème de la mesure de l’intelligence, fournit un modèle et une piste provisoire de travail27.
36A. Binet devient donc le spécialiste de la mesure et du traitement de l’anormalité scolaire, dans le nouveau champ d’intervention que l’école constitue pour la psychologie, mais à partir d’un parcours beaucoup plus éclectique que ses homologues américains. Son ouvrage Les Idées modernes sur les enfants28 porte d’ailleurs la marque de cet éclectisme et peut en réalité être considéré comme un manifeste : il montre que la psychologie est une arme de guerre contre l’école et la relation pédagogique « traditionnelles », la notion de tradition servant désormais à désigner toute pratique Qui ne se réfère pas en priorité à la connaissance de l’enfant.
37Dans ces conditions, ne peut-on penser que le projet initial de la SLPEPE s’est trouvé infléchi ? En effet, il est probable que dans l’esprit de F. Buisson au départ, cette société devait alimenter la réflexion pédagogique au sens où l’entendait H. Marion.
38Ce qu’il en a été en réalité transparaît dans une discussion en apparence méthodologique, mais dont les enjeux sont beaucoup plus importants, et qui révèle un point de tension entre deux manières de concevoir la prise en compte de l’individu et son épanouissement dans la pédagogie.
39Au moment de la fondation de la société, la question était de savoir si l’enquête, sur le modèle américain était préférable à l’observation individuelle de l’enfant. Le directeur d’école Boitel en fait état dans l’historique de la société présenté en 1902 :
« […] la discussion s’engagea, vive, mais toujours courtoise, entre les partisans de la méthode américaine, c’est-à-dire l’emploi de questionnaires uniformes, et ceux, au contraire, qui veulent qu’on fasse plutôt une large part à l’observation individuelle.
Avec les premiers, M. Marillier disait : “Les questionnaires uniformes nous donneront des réponses facilement comparables, et ces réponses, si elles sont nombreuses, nous permettront de conclure par des lois et des observations presque générales”.
Avec les seconds, M. Thamin, professeur de philosophie, aujourd’hui recteur de l’académie de Rennes, répliquait : “Il faut se défier des questionnaires tout préparés, parce qu’ils limitent l’initiative du maître et risquent de déformer les faits psychologiques si mouvants et si fuyants”. Il faut observer l’enfant sans cesse et ne pas “se défier du pittoresque”, car c’est en psychologie, surtout en psychologie infantile, que le pittoresque, c’est-à-dire l’individuel, est la vérité29. »
40Le directeur Boitel mentionne ensuite la volonté de conciliation de F. Buisson qui préconise de suivre les deux méthodes qu’il ne considère pas comme exclusives l’une de l’autre.
41Au-delà de la volonté de ménager les différents membres de la Société, F. Buisson pensait réellement que les deux méthodes étaient complémentaires parce qu’elles obéissaient aux mêmes principes ; en revanche, l’approche expérimentale en psychologie de l’enfant, incarnée par A. Binet, lui semblait relever d’une autre logique. Cette distinction entre deux points de vue sur l’enfant est présente dès la présentation des buts de la Société que rédige F. Buisson dans le premier numéro du Bulletin :
« Il y a deux manières de concevoir une société de ce genre : l’une essentiellement psychologique, l’autre essentiellement pédagogique.
Dans le premier cas, on se représente une société d’études savantes, se consacrant à un point spécial, un des plus délicats de la psychologie expérimentale ou scientifique. Dans le second, c’est une réunion d’éducateurs et d’éducatrices se proposant d’étudier la nature de l’enfant pour être plus sûrs de lui donner l’éducation qui lui convient. Expériences de laboratoire ou observations à l’école et dans la famille, telles sont les deux méthodes en présence. Inutile de dire qu’elles ont toutes les deux leur légitimité, et que chacune d’elles a ses règles qui ne s’appliquent pas à l’autre. Notre ambition est de rapprocher non les études, mais les personnes qui s’y livrent30. »
42F. Buisson entend donc que la réflexion pédagogique garde son autonomie dans un rapprochement qui ne soit pas une confusion avec la science psychologique, le but pratique d’éducation et le but théorique de connaissance ne se recouvrant pas. Le « point spécial » de la science et l’individu que l’éducateur doit former ne se confondent pas non plus. En 1902, il revint sur cette distinction, en disant que A. Binet, représentant de l ’« expérimentation savante », et Boitel, représentant de la « tendance pédagogique », ont tous deux leur place à la SLPEPE31…
43Les tâches semblent donc réparties entre psychologues et pédagogues : les premiers font un travail rigoureux mais dont les retombées pratiques sont aléatoires ou tout au moins différées, les seconds, confrontés à l’urgence de la pratique éducative, s’autorisent une certaine empiricité, qui n’est pas cependant un pis-aller, mais une forme d’attention particulière de l’éducateur envers l’éduqué, et à laquelle il ne doit jamais renoncer, même devant la promesse de vérité de la science. Le savant est d’ailleurs invité à considérer ces observations comme des faits dignes de sa rigueur, alors que les pédagogues sont invités à s’informer du travail du savant.
44Si l’enquête est utile, pour F. Buisson, ce n’est pas parce qu’elle est une méthode parli d’autre d’investigation psychologique, susceptible de perfectionnements en vue d’être plus exacte. C’est surtout parce qu’elle incite l’enseignant à porter un regard neuf, plus attentif, sur ses élèves32, parce qu’elle est finalement une sorte de palliatif à l’impossibilité de disposer d’une quantité suffisante de monographies individuelles, même si l’on peut espérer également, comme le suggère Boitel, qu’elles mettent en évidence des lois générale. Connaître individuellement l’élève, et non l’enfant, voilà ce qui intéresse Buisson ; il espère de la science de l’enfant qu’elle permette une meilleure prise en compte de chacun avec ses particularités, mais il ne peut au fond admettre que l’école devienne le laboratoire de la connaissance de l’enfant à grande échelle.
45Il valorise donc une attitude de pédagogue plus qu’une connaissance, et cela, même si la formulation des ambitions de la nouvelle pédagogie qu’il préconise ne permet pas de distinguer au premier abord sa position de celle de A. Binet. Ainsi, lorsqu’il souhaite le respect du « libre développement mental et moral » de l’enfant, nous avons a faire à l’un de ces termes polysémiques que nous évoquions plus haut, seule une prise en compte des débats dans leur précision permet de leur accorder un sens33.
46F. Buisson, l’homme politique, reste un philosophe pédagogue, ce qui le sépare de plus en plus des pédagogues psychologues dont Binet est en l’occurrence le représentant.
47En 1905, dans le numéro même du Bulletin où A. Binet présente l’installation du laboratoire de la rue de la Grange-aux-Belles, figure un compte rendu d’une causerie de F. Buisson où il est permis de lire une inquiétude, à travers le souhait de voir la société continuer à travailler comme elle l’a toujours fait34.
48La même année, Boitel abandonne ses responsabilités au Bureau de la SLPEPE, comme si un inexorable mouvement entraînait les « pédagogues » et leur point de vue sur l’enfant loin de la psychologie, loin du dialogue avec la science que Buisson avait espéré.
49Autre signe des temps : A. Binet lui-même se livre à un enterrement symbolique de Bernard Pérez, dans les remarques peu amènes qu’il s’autorise plus tard, en 1909. Ce dernier figurait, en tant que « professeur libre », parmi les fondateurs de la Société. Disparu en 1903, il représente ce que rejette A. Binet : « Ne peut-on pas dire qu’aujourd’hui encore, bien des auteurs, parmi les plus considérables, les meilleurs, les plus intelligents, n’ont pas compris la distinction entre roman et pédagogie ? Le succès persistant des livres de Bernard Pérez, qui ont l’air d’avoir été écrits avec des racontars de bonnes d’enfants recueillis au jardin du Luxembourg, paraît bien prouver à quel point nos contemporains manquent encore, quand il s’agit des enfants, du sens du réel, du démontré et du scientifique35. »
50Le jugement exprimé par A. Binet peut paraître objectif, mais cela ne doit pas empêcher de saisir tout le sens de cette condamnation. B. Pérez, avec toute sa naïveté, représentait un état d’esprit nouveau, qui faisait se pencher les savants sur les berceaux, comme le dit J. Sully. Dans le domaine pédagogique et scolaire, F. Buisson ou même H. Marion pensaient que la connaissance de l’enfant, constituée d’observations fines, d’attention aux menus faits – possible seulement dans une relative intimité, à moins que les questionnaires ne tentent d’élargir le regard – pouvait rendre des services. C’est ce point de vue qui disparaît au profit de l’idée que la connaissance de l’enfant en général est un préalable à toute transmission. Au profit également de l’inversion des valeurs qui veut que le maître apprenne de l’enfant, et que l’enfant soit le point de départ des apprentissages.
Notes de bas de page
1 F. Pécaut, « De l’usage et de l’abus de la pédagogie », Revue pédagogique, t. I, 1882, p. 97-110, p. 97.
2 H. Marion, Leçons de psychologie appliquée à l’éducation, Paris, Armand Colin, 1888, 1re éd., 1881, 2e éd., 1882.
3 A. Bain, Education as a Science, New York, Appleton and Co, Londres, C.K. Paul, 1879 ; trad. fr. : La Science de l’éducation, Paris, Germer-Baillière, 1879, Alcan, 1890 (7e éd.).
4 Pierre Nora, pour définir cette position philosophique, rappelle le titre de l’un des ouvrages de Buisson : La Foi laïque, Paris, Hachette, 1912, in « Le Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson », Les Lieux de mémoire, dir. Pierre Nora, t. I, « La République », Paris, Gallimard, 1984, p. 362.
5 H. Marion, « Leçon d’ouverture au cours sur la science de l’éducation, faite à la Sorbonne le 6 décembre 1883 », Revue pédagogique, t. I, 1883, p. 481-502.
6 É. Durkheim, L’Évolution pédagogique en France, Paris, PUF, 2e éd., 1969 (1re éd., 1938), introduction de Maurice Halbwachs, p. 2.
7 H. Marion, « Leçon d’ouverture au cours sur la science de l’éducation, faite à la Sorbonne le 6 décembre 1883 », article cité, p. 500.
8 Ibid., p. 195.
9 Voir par exemple H. Marion, « Règles fondamentales de l’enseignement libéral, la méthode active », Revue pédagogique, t. I, 1888, p. 2-19.
10 « Cette méthode active et intuitive, qu’on pourrait appeler la méthode libérale, parce qu’elle donne aux jeunes esprits l’habitude de la liberté, est la seule qui aille au but quand on se propose vraiment de donner une éducation libérale » ; H. Marion, « Le mouvement des idées pédagogiques depuis 1870 », in Recueil des monographies pédagogiques publiées à l’occasion de l’Exposition universelle de 1889, Imprimerie nationale, 1889, p. 3-85, p. 29.
11 H. Marion, Leçons de psychologie appliquée à l’éducation, Paris, Armand Colin, 1888, 1re éd., 1881.
12 H. Marion, article « Pédagogie » du Dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire, Paris, Hachette, 1887, t. II, p. 2237-2239, p. 2238.
13 Ceci est à rapprocher de la remarque de Pierre Nora, pour qui le Dictionnaire de pédagogie, et certainement plus dans sa première version, témoigne d’une mémoire « faite de durée lente, quotidienne, répétitive et disciplinaire, comme tous les gestes de l’éducation, à une époque où l’écriture n’était pas loin de s’apparenter à un travail manuel, où l’acquisition des pleins et des déliés supposait le dur apprentissage de la calligraphie, le difficile et très long arrachement au monde de l’inculture » ; op. cit., p. 373.
14 É. Durkheim, « Nature et méthode de la pédagogie », repris dans Éducation et sociologie, Paris, PUF, 4e éd., 1980, p. 69-90.
15 É. Durkheim, L’Éducation morale, Paris, PUF, 1963, p. 1.
16 É. Durkheim, « L’éducation, sa nature et son rôle », article paru dans le Dictionnaire de Ferdinand Buisson, en 1911, repris dans Éducation et sociologie, 1922, p. 51.
17 Voir par exemple J.-C. Filloux, Durkheim et l’éducation, Paris, PUF, 1994, p. 58 : « Plusieurs lectures de Durkheim sont certes possibles, autorisées par ses propres hésitations – voire ses contradictions –, entre une pédagogie de la conformité et une pédagogie attentive aux changements liés à la modernité. »
18 É. Durkheim, « Nature et méthode de la pédagogie », article cité, p. 79.
19 É. Durkheim, L’Éducation morale, Paris, PUF, 1963, p. 1.
20 Il faut ajouter l’élément suivant : Compayré dans l’article « Pédagogie » de la Grande Encyclopédie fait porter la pédagogie sur l’histoire des doctrines ; il envisage une « perennis pedagogica » que l’histoire de la pédagogie pourrait dégager : chaque doctrine, replacée dans son contexte historique et social, serait à même de mettre à jour à sa manière les virtualités de l’éducation, rendant par là-même la comparaison et le jugement, sur le plan des valeurs, posssibles. Voir Grande Encyclopédie, Paris, H. Lamirault et Cie, 1885-1901, t.26, p. 207-220.
21 É. Durkheim, « Nature et méthode de la pédagogie », article cité, p. 77.
22 « C’est que, en effet, si l’art de l’éducateur est fait, avant tout, d’instinct et d’habitudes devenues presque instinctives, il est cependant nécessaire que l’intelligence ne s’en retire pas. La réflexion ne saurait en tenir lieu, mais il ne saurait se passer de la réflexion, du moins à partir du moment où les peuples ont atteint un certain degré de civilisation » ; ibid., p. 82.
23 A. Binet, « La psychologie individuelle », L’Année psychologique, n° 11, 1895, p. 411-465.
24 A. Binet, « La mesure en psychologie individuelle », Revue philosophique, 1898, t. XLVI, p. 113-122.
25 Ibid., p. 122.
26 Voir J. Carroy, Hypnose, suggestion, psychologie, Paris, PUF, 1991.
27 Voir P. Broca, Mémoires d’anthropologie, Paris, Jean-Michel Place, 1989, préface de Claude Blanckaert, p. VII.
28 A. Binet, Les Idées modernes sur les enfants, 1911, réed. Paris, Flammarion, 1978.
29 Bulletin de la SLPEPE, n° 9, 2e année, octobre 1902, p. 206.
30 F. Buisson, « Quelques mots sur le but de la Société », Bulletin de la SLPEPE, n° 1, 15 octobre 1900, p. 2.
31 Bulletin de la SLPEPE, n° 9, 2e année, octobre 1902, p. 203.
32 « Elles habituent un grand nombre d’instituteurs et d’institutrices à l’observation désintéressée, à l’étude de leurs élèves. Il y a là une invitation pour eux à pénétrer dans la vie intime des enfants et à distinguer ces personnes en formation qu’on pourrait se laisser aller à considérer comme des numéros » ; Bulletin de la SLPEPE, n° 27, décembre 1905.
33 Voir le Bulletin de la SLPEPE, n° 9, oct 1902.
34 Bulletin de la SLPEPE, n° 27, décembre 1905, p. 19.
35 Bulletin de la SLPEPE, n° 52, février 1909, p. 69.
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