Versión clásicaVersión móvil

Les chemins de la décolonisation de l’empire colonial français, 1936-1956

 | 
Charles-Robert Ageron

Première partie. L'Union française et les facteurs généraux de la décolonisation

Discussion

L’Union française et les facteurs généraux de la décolonisation

Texto completo

1. Les problèmes de l’information et de l’opinion

1Peut-on écrire l’histoire avec des sondages ? Le sondage est un excellent moyen d’aborder le problème de l’opinion publique. Mais le sondage ne peut être considéré seul, isolé de son contexte. Il doit faire partie d’un ensemble d’informations. Les sondages étudiés révèlent d’abord la masse d’apathiques et d’indifférents. Les Français sont assez peu intéressés par les questions coloniales, car ils sont, dit-on, casaniers et ne connaissent ni l’histoire, ni la géographie. Durant cette période toutefois, les hommes politiques ne se préoccupent guère des sondages. Mais qu’ils le veuillent ou non, ils sont obligés de tenir compte de l’opinion publique telle qu’ils croient la connaître ; elle est indispensable pour les décideurs. Ainsi, parfois, des réformes dans les colonies sont bloquées de peur de froisser l’opinion et l’électorat, qui ne s’en souciaient guère. J’ai en fin de compte appris par les sondages que les Français étaient moins casaniers et moins cartiéristes, mais plus ignorants de la géographie qu’on ne l’a dit. En 1956, pour l’Algérie, les sondages montrent une résignation de l’opinion, prête à « tout lâcher ». La classe politique l’a, semble-t-il, totalement ignoré...

2Lucile Rabearimanana :

3Cette méthodologie est inapplicable à Madagascar. Y a-t-il une influence de l’opinion de l’outre-mer sur le gouvernement français ? Et que pensaient les Français au moment de l’insurrection de Madagascar et après ?

4Charles-Robert Ageron :

51. Il n’y a pas de sondages détaillés sur Madagascar en 1947. Les Français ne connaissent rien sur cette île, pas même les noms des parlementaires du M.D.R.M.

6Faute de sondages, la question serait plutôt : quel a été l’impact des articles de presse des envoyés spéciaux aux colonies sur l’opinion publique française et sur les décideurs ? Sur ces derniers, l’impact est quasi nul. Quant à l’opinion publique française, elle était à cette époque surtout informée par les journaux (à 30 %) et par la radio (à 24 %). Elle a pu être influencée par la presse écrite ou parlée.

72. L’opinion publique des T.O.M. aurait pu être étudiée par sondage après une étude sociologique préalable. Elle ne l’a pas été. La France officielle cherchait, malgré tout, à être informée, notamment par le biais des inspecteurs des colonies et de leurs remarquables rapports (bien meilleurs que ceux des gouverneurs). Les ministres étaient donc bien informés. Quand le ministre de la F.O.M. Mitterrand a dit à Madagascar qu’elle n’aurait jamais le statut d’Etat associé, il savait fort bien que cette revendication était celle de toute l’élite malgache. Dans cette affaire, on voit bien que l’influence de l’opinion des T.O.M. est nulle, puisque le ministre de la France d’outre-mer a seulement tenu compte de l’opinion publique française ou de celle de la classe politique.

L’information sur l’Indochine

8Robert Cornevin :

9Il faut noter l’importance de la sûreté indochinoise dans l’étude des mouvements nationalistes vietnamiens. En France, les mouvements de jeunesse étaient extrêmement sensibilisés au problème colonial, comme la Ligue maritime et coloniale devenue Ligue maritime et d’outre-mer, les jeunesses de l’Empire français (pendant la guerre). Il en va de même pour les organismes missionnaires catholiques et protestants.

10Jacques Suant :

11Les questions coloniales dans tous les pays n’ont toujours intéressé qu’un petit nombre de gens, aussi bien en France qu’en Angleterre, en Hollande ou en Belgique. Le basculement qui se produit en France est dû à la participation des militaires du contingent. C’est elle qui a fait changer l’opinion publique française au sujet de l’Algérie. Ceci se voit dans les sondages. L’Indochine n’intéressait personne, car il n’y avait que des volontaires.

12En 1954, l’opinion publique française était favorable à la guerre d’Algérie, car Mendès France était vraiment un libéral. Les choses ont changé avec l’arrivée du contingent et avec les lettres qu’il envoyait en métropole. Ce sont les parents et surtout les mères qui se sont opposées à cette guerre. Il en va de même pour les Américains au Viêt-Nam.

13Jacques Valette :

14Comment les milieux politiques français ont-ils été informés des problèmes vietnamiens et sur le Viêt-Minh à la fin de l’été 1945 ?

15Il y avait en Chine depuis 1941, des Français qui dépendaient du B.C.R.A. (le B.C.R.A. est issu en août 1942 de l’ancien B.C.R.A.M.) et il y avait en Indochine des Français qui avaient des contacts avec le Viêt-Minh. Un officier français du deuxième territoire militaire, à Cao-Bang, un Vichyste, a rencontré à plusieurs reprises des responsables politico-militaires d’un petit maquis Viêt-Minh. Pas une fois il n’a eu l’idée qu’il avait en face de lui des communistes vietnamiens.

16Le gouverneur Georges Gautier, directeur des Affaires politiques n’a pas vu passer un seul rapport de la sûreté signalant la renaissance d’un P.C. indochinois en Indochine ou en Chine. A Kunming, en Chine, il y avait des responsables français du renseignement qui ont fait une synthèse en juillet 1945 pour demander une rencontre entre une personnalité française et un représentant du Viêt-Minh et pour que la France participe aux opérations de guérilla projetées par l’O.S.S. en Indochine. Seul un Français de Chine a identifié Hô Chi Minh et la renaissance du P.C. C’était Royère, arrivé comme diplomate en Chine en 1935 et bon connaisseur de ce pays. Dès la fin de 1943, il envoya un rapport pour signaler que le Viêt-Minh n’était qu’une étiquette du P.C. indochinois et qu’Hô Chi Minh était Nguyen Ai Quôc. Ce rapport a été classé sans objet par les Gaullistes, car Royère était Vichyste. La projection de la lutte de Gaulle-Vichy et de Gaulle-Giraud a freiné la diffusion de l’information et l’analyse de la situation. Ainsi, Sainteny ignorait complètement que le Viêt-Minh était communiste. Il y a donc une sous-information remarquable des dirigeants français.

17Charles-Robert Ageron :

18Il y a une différence entre le premier semestre 1945 où les décideurs eux-mêmes sont sous-informés et la période suivante où ils sont parfaitement informés. Quant au public, seuls ou presque les anticolonialistes de principe l’informent en 1945. Les meilleures informations diffusées sur les événements de mai 1945 en Algérie et sur l’Indochine de 1945 proviennent très curieusement de la presse du Parti communiste internationaliste (trotskyste).

19Certes, en septembre 1945, de Gaulle demande des informations sur Hô Chi Minh. Dès la fin du mois, les rapports de Sainteny et de Messmer lui donnent des précisions exactes. Mais auparavant, les rapports de la D.G.E.R., dès juin 1945, sur l’Indochine sont eux aussi remarquables d’informations sur le Viêt-Minh et ses connexions communistes. Il en va de même en juillet 1945. D’ailleurs, d’août à octobre 1945, Laurentie se prononce constamment pour une négociation avec le Viêt-Minh « parce qu’il contrôle le pays ». Le personnel du ministère a donc l’air parfaitement informé.

20Jacques Valette :

21Ces textes de juin-juillet doivent être replacés dans un contexte provisoire. Il s’agissait de rencontres prévues entre Sainteny et Hô Chi Minh qui finalement n’ont pas eu lieu, car la capitulation est arrivée trop vite. Sainteny communiquait avec Paris grâce aux postes de la D.G.E.R., il est donc naturel que celle-ci soit au courant. Mais ces notes de la D.G.E.R. ne sont jamais arrivées sur le bureau de de Gaulle.

22Philippe Devillers :

23Le problème est donc de savoir si ce genre de documents parvenait aux décideurs.

24Dès mon arrivée à Saïgon en tant qu’officier et correspondant « clandestin » du Monde, en octobre 1945, le sous-directeur de la Sûreté de la ville m’a mis au courant ; il m’a montré, en novembre, ses dossiers sur le Viêt-Minh. Il y avait une série de rapports sur le P.C. indochinois datant de 1942, 1943 et 1944, sur la création du Viêt-Minh et sur ses rapports avec les Chinois. L’amiral Decoux a dû être informé. Sainteny a aussi toujours été informé sur le P.C.I. en tant qu’élément directeur du Viêt-Minh.

25Hô Chi Minh a ouvertement servi d’interprète à la mission de l’O.S.S. au printemps 1945, donc les Américains le connaissaient pour ce qu’il était.

26Le correspondant de l’A.F.P. en Extrême-Orient était aussi bien informé sur Hô Chi Minh. Il y a enfin Messmer qui fut parachuté le 13 août 1945 en pleine zone Viêt-Minh au Tonkin et qui, lorsqu’il est arrivé à Hanoï, a rendu compte. Il y avait donc un faisceau d’informations. Le problème est de savoir qui a fait écran ?

27Le 11 août 1947, l’ambassadeur de France à Bangkok, Monsieur Gilbert, a adressé un télégramme au Quai d’Orsay pour signaler l’ouverture de paix faite par Hô Chi Minh au gouvernement français. Mais le président Auriol n’a jamais vu ce télégramme, ni les vingt-quatre autres de l’ambassadeur Gilbert. En effet, un jour Bidault convoqua Gilbert et lui dit : « ça suffit, vous savez très très bien qu’on ne veut pas traiter avec le Viêt-Minh. Ce n’est pas la peine de nous envoyer des télégrammes sur ces ouvertures de paix ». On peut donc dire que la base savait, mais pas le sommet.

28Alain Ruscio :

29Le Viêt-Minh a porté la pratique du secret à la perfection. Certains hauts responsables du Viêt-Minh ne connaissaient même pas l’identité d’Hô Chi Minh. Dans les différents fonds d’archives, on peut noter les contradictions dans les informations françaises. Certaines étaient précises sur Hô Chi Minh et le Viêt-Minh, mais d’autres niaient les liens entre le P.C. et le Viêt-Minh. Ainsi, de Gaulle demande à d’Argenlieu le 26 septembre 1945, qui est réellement Hô Chi Minh, alors que le Viêt-Minh venait de vaincre trois semaines auparavant.

30Paul Isoart :

31A la fin du mois de septembre 1945, de Gaulle est parfaitement au courant grâce à l’Amiral d’Argenlieu. A cette époque, l’information passe.

32Quant à Royère, il avait des renseignements, mais il semblait apparemment ne pas les communiquer aux Français libres.

33Jacques Valette :

34Royère a poursuivi son enquête à l’automne 1944 et durant l’hiver 1945, grâce aux services de renseignements chinois. Il a envoyé des rapports qui se trouvent aujourd’hui à l’académie des Sciences d’outre-mer.

35R.P. Claude Lange :

36Les rapports des missions étrangères montrent que les missionnaires étrangers et le clergé vietnamien des provinces étaient particulièrement bien informés dès 1930 sur la fondation et le développement du P.C. indochinois. Ces rapports soulignent les relations entre le P.C. et le Komintern, ainsi que la pauvreté de certaines provinces vietnamiennes où le P.C. est justement actif. Les missionnaires savaient que les membres du Viêt-Minh étaient communistes, malgré la dissolution du P.C.I. en 1943. Toutefois, les catholiques vietnamiens étaient convaincus que les hommes du Viêt-Minh étaient avant tout des nationalistes. Ainsi, le 2 septembre 1945 à Hanoï, la grande majorité des prêtres vietnamiens étaient présents au meeting pour applaudir la proclamation de l’indépendance. Ce n’est qu’après que les choses ont changé.

37Jacques Suant :

38Le problème de l’information se situe ailleurs. De Gaulle était informé par la D.G.E.R., le 2e bureau et la Sûreté indochinoise. Les difficultés viennent des cabinets ministériels et de leur instabilité.

39Robert Cornevin :

40L’arrivée en 1945 en Indochine de trois autres services de renseignements a peut-être nui aux opérations de synthèse. Au départ, il n’y avait que la Sûreté indochinoise à laquelle se sont ajoutés le 2e bureau, la D.G.E.R. et la Sécurité militaire.

41Pierre Lefranc :

42En 1940-1942, en Afrique, il y eut une très grande coupure entre les pays passés à la France libre qui ont gardé une grande ouverture vers l’extérieur, et ceux restés sous le contrôle de Vichy qui ont été complètement enfermés, sans contact avec l’extérieur. Cela a entraîné une différence économique – car les pays de la France libre ont reçu de grosses quantités de matériel – et a aussi provoqué une différence de mentalité, car les pays de la France libre étaient ouverts sur l’avenir, alors que les autres étaient repliés sur le passé.

43Dans les rapports franco-américains, il ne faut pas oublier que Cordell Hull, le secrétaire au State Department, était à la tête d’une énorme association contre le colonialisme. Il y a eu aussi un affrontement entre la France catholique et les Anglo-Saxons protestants sur cette affaire coloniale.

2. Au sujet de l’élaboration de la Constitution

44Charles-Robert Ageron :

45L’intervention d’Edouard Herriot le 27 août 1946 fut, dit-on, particulièrement décisive pour expliquer l’inacceptabilité du projet d’Union française. Il obtint, chose curieuse, l’acquiescement immédiat du gouvernement. Mais s’il sort de son mutisme, c’est parce qu’il sait qu’il sera entendu. Je pense donc à un scénario parlementaire. Le 15 août 1946, le juriste du Parti radical, Paul Bastid, se prononce contre le projet d’Union française accepté par la commission de la Constitution. Le 25 août, Georges Bidault, président du Conseil, apprend que le général de Gaulle prépare une intervention fracassante. Ne voulant pas paraître moins ferme que le général, Bidault refuse lui aussi le projet d’Union française dans un discours devant l’Assemblée. Le 26 août, la presse annonce la déclaration du général pour le lendemain. C’est dans ce contexte qu’Herriot intervient, alors que la décision gouvernementale est déjà prise. Il n’a donc pas renversé l’opinion parlementaire : tout au plus, l’a-t-il confortée dans la nouvelle direction.

46Paul Isoart :

47Il y a une différence de ton entre la première et la deuxième Constituante. Les débats de la deuxième sont très tendus à cause des événements (Conférence de Fontainebleau, troubles outre-mer). Le rôle du gouvernement a donc été d’imposer la conciliation. Dans la deuxième Constituante, c’est le gouvernement qui impose la solution de compromis. Même les ministres communistes ont accepté. Pour Herriot, c’est peut-être son sens de l’opportunité parlementaire qui l’a conduit à prendre cette décision. Par contre Pierre Cot a été un des seuls à prononcer le mot d’indépendance pour les pays d’Afrique noire.

3. Au sujet de la politique d’assimilation

48Mahfoud Kaddache :

49La politique d’assimilation a été perçue par de nombreux groupes politiques des colonies, comme une voie vers la décolonisation, une voie permettant d’obtenir les mêmes droits que les Français. Il est important de noter que les valeurs culturelles forment un obstacle à l’assimilation, en particulier dans les pays d’Islam. Ceci est vrai pour le passé et pour le présent ; nous verrons pour l’avenir (en particulier pour les deuxième et troisième générations d’immigrés).

50Henri Brunschwig :

51Le problème de l’assimilation ne se pose pas au même moment que le problème de la décolonisation. L’assimilation culturelle puis politique de l’indigène à la France me parait exclure la décolonisation. Les élites assimilées passent au parti de la décolonisation lorsqu’elles sont déçues par l’attitude et par la politique de la France.

52Mahfoud Kaddache :

53Ces élites n’ont jamais renoncé au fond d’elles-mêmes à leur identité. L’assimilation était une étape vers les droits politiques, c’était un moyen et non un but.

54Guy Jacob :

55L’assimilation n’a jamais été un projet politique sérieux en France ; c’était un discours fallacieux. Mais si cela avait été sérieux, c’eut été une absurdité car on aurait eu 100 millions de citoyens français. Des décisions intéressant la métropole auraient dépendu du vote de Tombouctou ou de Djibouti. Il y eut des phénomènes d’assimilation apparente, ainsi lorsque les missionnaires s’imaginaient christianiser alors qu’ils baptisaient à tour de bras.

56Parlons par exemple de la Réunion, où la colonisation est séculaire, avec départementalisation donc assimilation politique et administrative, et avec une christianisation importante. Ces conditions étaient favorables à l’assimilation. La Réunion est une mosaïque raciale avec des groupes coupés de leurs racines. Pourtant, certains de ces groupes ont rejeté l’assimilation.

57Il faut s’interroger plus profondément sur ce que signifie l’assimilation pour l’assimilé. Il y eut beaucoup de demandes de citoyenneté par opportunisme et par nationalisme. Si on avait réellement et sincèrement proposé l’assimilation, il est vraisemblable qu’elle aurait été refusée par ceux à qui elle était proposée.

58Henri Brunschwig :

59La France a tout de même eu une politique d’assimilation, après l’abolition de l’esclavage en 1848. Il faut définir la notion de groupe. S’agit-il de groupes organisés avec des institutions qui peuvent faire écran, ou de groupes inorganisés d’éléments de même origine qui ne peuvent gêner l’assimilation de l’individu ? C’est tout le problème de l’individualisme.

60Mahfoud Kaddache :

61En Algérie, on a assisté à l’échec total de la politique d’assimilation volontaire par naturalisation après 1865. Il n’y eut que quelques centaines de demandes, et ceux-là ont été considérés par l’opinion publique comme des traîtres politiques et des apostats religieux.

62Juliette Bessis :

63Il n’y a pas de stratégie de décolonisation française, mais au contraire une stratégie de maintien. Il s’agissait de gagner du temps car dans l’esprit de beaucoup de responsables coloniaux, il n’était question que d’indissolubilité de l’Empire. Il y a un autre problème de fond : si les Etats-Unis représentent « l’impérialisme », il se trouve qu’en Afrique du Nord, les Américains ont joué un rôle important de décolonisateur. Il faut noter l’importance du Maroc et de Tanger dans la conception américaine de défense atlantique.

64Jacques Suant :

65Il faut noter aussi l’importance de la politique pétrolière des Etats-Unis et en particulier des Standards (cartel de sept compagnies pétrolières) qui ont négocié avec les Français et avec le F.L.N. algérien. En règle générale, la ligne de conduite des Etats-Unis est dictée par le libre accès aux matières premières.

66Maroun Bou Assi :

67La France avait-elle, depuis 1940, les moyens économiques et militaires de garder ses colonies ?

68Les Etats-Unis savaient très bien qu’elle ne les avait pas, c’est pour cela qu’ils ont pu jouer le rôle de « libérateur ». Ainsi, en 1943, pendant la crise libanaise, la France a dû céder devant les exigences anglaises et américaines. En Tunisie, personne n’a regretté la défaite française de 1940. Mais il ne faut pas cacher que les Orientaux ont l’habitude d’applaudir les plus forts et de rejeter les plus faibles.

69Enfin, je signale que nous avons oublié de parler de l’importance de la création d’Israël et de ses connections avec l’affaire de Suez et le problème pétrolier.

70Philippe Devillers :

71Il faut faire la liaison entre les théâtres nord-africain et indochinois. Pendant des années, un des arguments de Bidault était que si la France accordait l’indépendance aux Etats indochinois, la Tunisie et le Maroc ne manqueraient pas de s’en prévaloir. Tenir en Indochine, c’était tenir en Afrique du Nord. Les Français ont fait la liaison. D’ailleurs, un responsable de la C.I.A. a dit dans un article du Herald Tribune : « au Caire, à l’automne 1954, nous avons donné le feu vert aux nationalistes algériens : allez-y en Algérie, c’est le moyen de faire partir la France d’Indochine ». Il y a donc un lien entre les deux théâtres dans certains cerveaux américains. On peut voir aussi le rapport du général Erskine dans les papiers du Pentagone, au printemps ou à l’été 1954 : « les Français semblent s’accrocher à l’Indochine et au Viêt-Nam et semblent vouloir y rester absolument pour maintenir leur primauté au Sud Viêt-Nam et ne pas nous y laisser entrer. Nous devons changer notre attitude en Afrique du Nord et y créer assez de difficultés aux Français pour qu’ils rappellent leurs troupes d’Indochine et les renvoient en Afrique du Nord ».

Salvo indicación contraria, el texto y otros elementos (ilustraciones, archivos adicionales importados) se puede utilizar bajo licencia OpenEdition Books License.

Esta publicación digital es el resultado de un proceso automático de reconocimiento óptico de caracteres.
Buscar en OpenEdition Search

Se le redirigirá a OpenEdition Search