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La construction nationale syrienne

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Stéphane Valter

Troisième partie. La gestion ambiguë des symboles historiques et patrimoniaux

Introduction

Full text

  • 1 Bertrand ВADIE, Culture et politique, op. cit., p. 73.

1La dernière partie de cette réflexion élargit la problématique liée au discours historique afin de traiter d’aspects connexes. Après avoir explicité les rapports existant entre les contraintes de la pratique du pouvoir et la mise en avant sélective de références identitaires (première partie), et après avoir réfléchi au degré d’adéquation entre une telle construction idéale de la communauté politique et le discours historique sur le passé national, qui se caractérise par une emphase particulière sur l’histoire ancienne et la recherche archéologique (deuxième partie), cette dernière partie voudrait formuler la problématique de manière synthétique avant d’ouvrir la réflexion sur certains modes d’affirmation identitaire, différents dans leur forme mais analogues dans leur principe. Toute promotion de références identitaires visant à mettre en valeur les éléments symboliques qui suggèrent une construction nationale dans laquelle le pouvoir verrait sa légitimité renforcée, cette réflexion cherchera à comprendre (au-delà de l’historiographie proprement dite) d’autres stratégies d’affirmation identitaire. Après une synthèse de la vision syrienne de l’histoire, le rappel des enjeux de l’écriture du passé, depuis l’indépendance, permettra de mieux mesurer l’importance idéologique du discours historique dans la période actuelle. L’étude thématique, selon l’importance et la récurrence, aidera à établir que la valorisation de la culture syrienne renvoie clairement à une territorialisation identitaire, la diversité étant toujours comprise dans l’unité (mais pas l’uniformité) et la continuité selon une loi évolutionniste de l’histoire qui postulerait une certaine forme d’immanence1.

2Une appréhension des rapports entre archéologie, pouvoir et société sera ensuite proposée, l’historique de la recherche archéologique en Syrie étant lié aux nombreuses fonctions de ce mode de présentation de la mémoire (symbolisme de la muséographie). L’analyse aurait par ailleurs semblé incomplète sans une orientation comparatiste : le cas irakien autorise ainsi à mieux saisir les rapports entre recherche archéologique, muséographie, discours historique, mise en place d’un rituel symbolique et enjeux politiques liés aux représentations identitaires nationales. La coexistence, souvent contradictoire, de références à la fois mésopotamiennes, arabes et islamiques sera décrite dans le cadre d’un net processus de territorialisation identitaire, semblable au cas syrien. Dans la même perspective comparatiste, le cas israélien sera abordé pour voir comment un système “démocratique” a lui aussi besoin de justificatifs historiques et crée de la sorte, à partir de certaines découvertes archéologiques, des représentations sélectives d’une identité nationale contestée (au niveau régional). Un violent conflit de légitimité existant entre la Bible et le Coran (ce dernier texte servant de justification tant religieuse que scientifique), on notera que la dévalorisation de l’identité juive et de sa profondeur historique est quasi systématique dans le discours historique syrien. Dépassant le cadre interne (frontalier) dans lequel fonctionnent les constructions historico-symboliques, l’étude des mécanismes de projection identitaire vers l’extérieur ne sera pas négligée. À travers les questions de préservation, restauration, démolition et reconstruction, la place du patrimoine (architectural, monumental, urbain, etc.) autorisera une analyse des stratégies syriennes de promotion culturelle en direction de l’étranger (dont le tourisme). La ville (Damas demeurant l’exemple urbain significatif, car centre du pouvoir politique) devra ainsi être perçue en tant que lieu de cristallisation des pratiques politico-symboliques de l’espace et du patrimoine. Enfin, promotion culturelle et projection identitaire (vers l’extérieur) seront étudiées, l’analyse conjointe du développement touristique, du mécénat culturel et des stratégies politiques permettant de comprendre comment les constructions historico-symboliques cherchent à médiatiser un faisceau particulier de références.

Notes

1 Bertrand ВADIE, Culture et politique, op. cit., p. 73.

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