La Balagne contemporaine face au tourisme
p. 99-101
Texte intégral
1L’évolution du fait urbain dans la Balagne du xxe siècle est déterminée par le développement touristique à partir des années 1960. Il convient de parler de « boom touristique » au sens de l’analyse économique, c’est-à-dire une augmentation sans précédent de la fréquentation touristique conduisant à une transformation profonde du système de production1, à une augmentation du revenu disponible et à une redistribution spatiale des activités économiques.
2Va progressivement se constituer une nouvelle base économique, de type touristico-résidentiel2, à partir de laquelle d’autres activités vont pouvoir se développer, essentiellement des services marchands et non marchands. La création d’emplois induite attire de nouveaux résidents, des saisonniers mais aussi des résidents à l’année de telle sorte que la Balagne redevient attractive après des décennies de stagnation économique et de déclin démographique : sa population va doubler en 40 ans mais uniquement à partir du solde migratoire, ce qui n’est pas sans effet sur les villes mais aussi sur les villages alentour. Dans un premier temps, le choc touristique renforce l’extension urbaine littorale. Les fonctions portuaires et commerciales des deux villes évoluent : les passagers se substituent aux marchandises, les capacités d’accueil se développent, les premières résidences secondaires apparaissent. Les villages périurbains ne sont pas épargnés par ces transformations : ils deviennent des zones de chalandise ou des zones d’accueil touristiques. Lorsqu’intervient un deuxième choc touristique au début des années 2000, le littoral entre en phase de saturation. On constate que la localisation des activités et des actifs diffuse alors sur la zone rétrolittorale puis sur le piémont.
3Dans cette troisième partie sont analysées en termes quantitatifs les conséquences économiques et spatiales du basculement de la Balagne dans une économie touristique et résidentielle durant la seconde moitié du xxe siècle mais aussi les conditions qui ont favorisé ce basculement3.
4L’analyse de longue période révèle alors la mise en place d’un mécanisme paradoxal. Si les aménités paysagères et environnementales du « Jardin de la Corse » vont contribuer au développement de son attractivité touristique qui conduit à réduire les espaces et les pratiques agricoles, une forme de résilience territoriale semble s’affirmer au cours du temps à travers la revalorisation des patrimoines ruraux.
Notes de bas de page
1 En général par substitution du secteur touristique et de secteurs connexes (BTP, transports) aux activités traditionnelles.
2 Au sens donné par Laurent Davezies selon lequel le revenu macroéconomique de certaines économies régionales est généré par des activités de transfert et de consommation (régions à fort dynamisme démographique, régions touristiques, régions bénéficiant de transferts publics importants) plus que sur des activités de production traditionnelles ou à fort contenu technologique. Voir Davezies L., La République et ses territoires : La circulation invisible des richesses. La République des Idées, Paris, Editions du Seuil, 2008, 109 p.
3 Si ces évolutions quantitativement étayées sont des marqueurs forts des bouleversements qu’a subis le territoire sur un pas de temps au final assez court, elles ne doivent pas faire oublier la nécessité d’explorer plus qualitativement les transformations de la société balanine. Une telle exploration - de nature plus sociologique - n’a pu être menée ici.
Auteurs
Professeur de Science Économique, Université de Corse/UMR CNRS 6240 LISA.
Ingénieur d’études en traitement, analyse et représentation de l’information spatiale, UMR CNRS 6240 LISA.
Maître de Conférences en géographie, Université de Corse/UMR CNRS 6240 LISA.
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