Version classiqueVersion mobile

Le livre technique avant le xxe siècle

 | 
Liliane Hilaire-Pérez
, 
Valérie Nègre
, 
Delphine Spicq
, 
et al.

Quatrième partie - Formalisation des pratiques et discours visuels

Un manuel d’ornements et son influence : les Éléments d’orfèvrerie de Pierre Germain (1748-1900)

A book of ornaments and its influence : the Éléments d’orfèvrerie by Pierre Germain (1748-1900)

Hélène Cavalié

Résumé

En 1748, Pierre Germain dit le Romain (1703-1783), maître chez l’orfèvre du roi Jacques Roëttiers, publie le plus copieux recueil pédagogique réalisé alors pour son art. Réimprimé plusieurs fois, repris notamment dans l’Encyclopédie, l’ouvrage est collectionné dans la profession et chez les amateurs. Il est copié dès sa publication par les orfèvres provinciaux mais aussi dans les cours européennes étrangère s’inspirant de la mode parisienne (Londres, Turin), puis encore par vagues successives jusqu’au début du xxe siècle (notamment par les maisons parisiennes Odiot, Aucoc et Cardeilhac). L’article étudie sa genèse, ses sources d’inspiration, ses possesseurs et son influence durant cent cinquante ans.

Texte intégral

Introduction

1Le développement de l'imprimerie et de la gravure sur cuir permit au xviie siècle de faire connaître des œuvres prestigieuses dans plusieurs disciplines et notamment pour les arts décoratifs. Il manquait encore quelques décennies pour songer à éditer des livres de modèles déstinés aux jeunes apprentis, ancêtres de nos manuels illustrés d'apprentissage technique. Chez les orfèvres, un livre fait date, les Éléments d'orfèvrerie. En novembre 1747, le Mercure de France annonce la sortie d’un recueil de modèles d’orfèvrerie dû à un nouveau maître artisan, Pierre Germain dit le Romain (Villeneuve-lès-Avignon, 1703 – Paris, 1783). Cette démarche peu courante mérite qu’on s’y attarde, qu’on plonge aux origines de ce recueil, dans la vie de son auteur, dans les étapes de sa réalisation et de sa diffusion, avant d’en mesurer le succès et l’influence durable.

Aux origines du recueil

2Dans la profession, si les contrats d’apprentissage stipulent que les maîtres ne cachent rien à leurs apprentis et leur enseignent tout leur art, les orfèvres sont d’ordinaire jaloux de leurs dessins et ne souhaitent pas les divulguer.

  • 1 Hernmark C., Weigert R.-A., Les relations artistiques entre la France et la Suède, 1693-1718 : Nic (...)
  • 2 Montaiglon A. de, Procès-verbaux de l’Académie royale de peinture et sculpture, 1648-1793, Paris, (...)
  • 3 Légaré G., Livre des ouvrages d’orfèvrerie…, Paris, 1663, 12 pl.
  • 4 Meissonnier J. A., Recueil des œuvres de Meissonnier, s.d.
  • 5 Germain P., Éléments d’orfèvrerie, 1748, p. [3].

3En témoigne un ambassadeur suédois à la cour : « La chose la plus malaisée, c’est de tirer des dessins des mains des ouvriers [ici un orfèvre], mesme quand c’est pour en faire executer par un autre1. » François Thomas Germain intente un procès à Fessard en 1761 pour avoir diffusé à son compte une gravure des girandoles d’or ciselées par son père pour le roi en 17482. Dans la discipline, sont parus quelques recueils d’ornements mais rarement des ouvrages volumineux. D’ailleurs ils reproduisent en général des objets achevés pour en garder la mémoire ou pour les faire connaître. C’est le cas de ceux de Gilles Légaré en 16633 ou de Juste-Aurèle Meissonnier au début du xviiie siècle4. Il n’est pas sûr que ces pièces complexes aient pour but initial d’être copiées. En cela diffèrent les modernes Éléments d’orfèvrerie de Pierre Germain, qui offrent en 1748 une œuvre pédagogique. Il présente des objets avec plans, coupes, agrandissement possible au carreau (procédé que l’on trouve davantage chez les peintres, maîtres verriers et lissiers) et précise comment utiliser son ouvrage dans un Avis au lecteur : « La dernière feuille de la seconde partie indiquera la manière de dessiner de petit en grand dans la juste proportion par le moyen des carreaux ou de l’échelle. Cette même feüille donne aussi tous les plans des morceaux contenus dans chaque livre…5 »

  • 6 Chez Thomas Germain (au moins de 1726 à 1729), à Rome (1729-1733), chez Jacques Roëttiers (1733-17 (...)
  • 7 BM d’Avignon, ms 1298, f. 118r-118v. Édition intégrale dans H. Cavalié, « Pierre Germain dit le Ro (...)
  • 8 BM d’Avignon, ms 1300, f. 167r-168v, 7 sept. 1734.
  • 9 Germain P., Éléments d’orfèvrerie, 1748, p. [3].

4Pour lui, né hors du sérail des orfèvres, formé dans plusieurs ateliers royaux et à Rome6, et devenu maître à un âge mûr, en 1744, quand d’autres le deviennent jeunes et sans tant d’efforts, l’étude et le dessin sont une exigence de travail. Il prodiguait ce conseil à un cousin, l’architecte avignonnais François Franque (1710-1793) le 24 mai 1726 : « […] Vous rendre habille homme, seule choze aujourd’huy après Dieu digne d’attention, et qu’on ne peut aquérir qu’avec la patience et l’aplication, le dessein, l’ame de tout, dont sans luy il n’y a goust ni connescence7. » Huit ans plus tard, Pierre Germain écrit à son oncle J.-B. Franque, d’un jeune homme qu’il forme : « J’employeray tous mes soins à luy donner le gout orfeuverique auquel entre nous beaucoup d’orfèvre non pas8. » Ceci préfigure son souhait exprimé dans les Éléments d’orfèvrerie : « J’espere que je ne seray pas desaprouvé d’avoir voulu par cet ouvrage seconder les bonnes dispositions des jeunes gens pour lesquels seuls je l’ay composé9. » L’orfèvre publie encore un petit Livre d’ornemens en 1751 (10 pl.) à l’époque où il travaille encore pour l’orfèvre du roi Jacques Roëttiers (1707-1784). Il n’en publiera jamais plus par la suite. Il tiendra boutique, aura des apprentis et n’aura sans doute plus ce temps à consacrer à une publication.

La confection de l’ouvrage

  • 10 La Grande Encyclopédie, inventaire raisonné des Sciences, des Lettres et des Arts par une société (...)
  • 11 BM d’Avignon, ms 1298, f.125r126v, - 128r-129v, 158r-159v.
  • 12 Fuhring P., Bimbenet-Privat M., Kugel A., Orfèvrerie française. Lacollection Jourdan-Barry, Paris, (...)
  • 13 Un chez Lucien Goldschmidt à New York en 1983 (Francini A., Livre d’architecture contenant plusieu (...)

5De la publication de 1748 résulte « le volume le plus intéressant que l’on puisse consulter sur l’orfèvrerie française du xviiie siècle » suivant les termes de la Grande Encyclopédie, inventaire raisonné des Sciences, des Lettres et des Arts de Lamirault10. L’ouvrage est le fruit d’années à se soucier de dessins et d’estampes. Son goût est sans doute né jeune homme, lorsque Pierre Germain se chargeait d’achats d’estampes à Paris pour son oncle J. -B. Franque et quelques artistes et amateurs avignonnais, notamment chez Mariette qui gravait l’Architecture françoise. Il cherchait manuels et gravures de monuments : Les Curiosités de Paris et de la France, La Géométrie de Leclerc, les Éléments d’Euclide ou encore le château de Richelieu11. Peter Fuhring a proposé d’attribuer à l’orfèvre un ex-libris portant un motif du Livre d’ornemens et la devise « PG Pulchra tenaciter collegi »12. On le trouve sur des ouvrages d’architecture et d’ornements13. En 1734, Pierre Germain mentionne dans sa correspondance des dessins qu’il tente de faire revenir d’Avignon à Paris. Sont-ce les prémices d’un ouvrage ?

  • 14 BM d’Avignon, ms1300, f. 145r-146v (6 jan. 1734,) 167r-168v (7 sept.), 185r186v - (29 déc.).

[6 janvier 1734] vous auriés la bonté de le chargé de mes desseins que mon frere a entre les mains ; vous y joindriés, si la choze estet possible, les cartels que M. Michel a gravé. Mrs Germain et Rœtier par la relation que je leurs en ay fait son gros de lé voir ». [7 sept. 1734] « Si je n’usés pas du droit de represaillie j’engageray mon beau frere de prendre mes dessains chez mon frere pour me les envoyer avec, desquels je conte de tirer des idées ou de coriger les miennes14.

La parution

Des sorties échelonnées

  • 15 BnF, MF21997/2936, f. 164r, Registre des privilèges et permissions simples de la Librairie, 1738-1 (...)
  • 16 BnF, MF 21959, Registre des privilèges accordés aux auteurs et libraires, 1748-1752, p. 13-14.
  • 17 BM de Caen, C1881/1-2 ; Bibliothèque Forney, Res756 ; BnF, Arsenal, Est494 ; Cleveland museum of A (...)
  • 18 BnF, Estampes, Le-54 ; Louvre, coll. Rütschi, OA1882, dans son état originel, non relié, en cahier (...)
  • 19 Bibliothèque de l’ENSBA, LES1206.
  • 20 BnF, Manuscrits, fonds Rothschild, supplément-2436 et Arsenal, Est494 ; Louvre, OA1882 ; Bibliothè (...)

6La publication d’un livre technique exige le choix d’un imprimeur spécialisé (dont le nom ne figure pas dans la première impression), de graveurs (ici J. J. Pasquier et Baquoy pour les pl. 32-41, 43-44) et un prix onéreux, 12 livres pour chaque partie. L’ouvrage annoncé par entrefilet dans le Mercure de France avec une sortie échelonnée en deux parties en janvier et juillet 1748 est présenté à la Librairie le 26 juin15. Approuvé par Coypel, il reçoit en juillet un privilège général d’imprimer avec monopole pour douze ans16. Mais l’auteur ne semble guère avoir attendu pour écouler la première partie : certains volumes se vendent sans mention de privilège (six ont été retrouvés17), d’autres portent la formule « avec privilège du roi » manuscrite et la signature « PGermain » (onze repérés18). Plus rares sont ceux qui portent un privilège imprimé (un seul vu19). En revanche, l’essentiel sinon tous les exemplaires de la seconde partie sont publiés après réception du privilège, gravé sur la page de titre20.

  • 21 AN, MC, lxxvi, 410, 31 mars 1768, vente du fonds Chereau, f. 13r.
  • 22 BM de Lyon, Rés-Est-132301 (vol. 2) et Rés-Est-103801 ; Bibliothèque de l’Institut, Bernier 4 189 (...)
  • 23 BnF, Estampes, Le-54.
  • 24 Bibliothèque de l’Institut, Bernier 4 189 ; Williamstown, Clark Art Institut, NK7198G.

7Malgré la date immuable de 1748 portée sur tous les exemplaires, des changements typographiques sur la page de titre et sur plusieurs planches prouvent qu’il y eut des réimpressions successives : chez Geneviève Marguerite Chereau (active entre 1755 et 1768), puis chez son fils, Jacques François (1742-1794). Celle-ci a acquis l’ouvrage du « fonds Bonnard » (vraisemblablement Nicolas III Bonnart, éditeur d’estampes et graveur rue St-Jacques, à L’Aigle Noir entre 1754 et 1759) avant de le revendre à son fils le 31 mars 176821. Dans son stock, les deux volumes de Germain sont alors estimés à 600 livres. S’agit-il d’exemplaires ou des cuivres ? Des exemplaires tardifs au nom de la veuve ont une page de titre complétée de la mention « Se Vendent/A Paris chez L’Auteur place du Carousel/A L’Orfevrerie du ROY/et chés la Ve. de F. Chereau rue S. Jacques aux 2 Piliers d’or »22. Les cuivres d’impression semblent dans un premier temps les mêmes : on y trouve les mêmes erreurs de pagination (pl. 51-52, imprimées 15 et 2523). Mais un exemplaire postérieur de la veuve Chereau a été corrigé24, ce qui peut suggérer qu’elle en a fait modifier ou refaire. D’autres planches présentent aussi des ajouts : un titre courant sur chaque planche, des signatures en bas (A1, B2…), ainsi que la mention « à Paris ches J. F. Chereau rue S. Jacques » ou « à Paris chés J. Fr. Chereau rue S. Jacques » sur certaines (pl. 2, 9, 13, 23, 24, 31, 36, 46, 53, 59, 73, 79, 85, 92, 95). À l’époque où sont réimprimés les Éléments d’orfèvrerie, la date a largement excédé la durée du premier privilège et Pierre Germain ne réside plus place du Carrousel où des exemplaires sont promis à la vente.

  • 25 Réf. dues à P. Fuhring : Catalogüe des estampes provenantes des fonds de Planches des sieurs Gerar (...)
  • 26 AN, MC, lxvi, 681, 5 juin 1787, vente du fonds Chereau à F.É. Joubert, f. 5r, 20r-v.
  • 27 L’art du peintre, doreur, vernisseur, ouvrage nécessaire aux amateurs et propriétaires qui veulent (...)
  • 28 Extrait de l’inventaire des meubles et effets du Sr Simon Jude François Délézenne, décédé à Lille (...)
  • 29 Catalogue des différens objets de curiosités dans les sciences et les arts, qui composent le cabin (...)
  • 30 A catalogue of the entire libraries of the Rev. Mr Joseph Spence, author of Polymetis, & c., of Wi (...)
  • 31 A catalogue of a very large and valuable collection of books ; containing an extraordinary number (...)
  • 32 Catalogue d’une superbe collection de livres de piété, jurisprudence, sciences et arts, belles let (...)
  • 33 Catalogue d’une riche et précieuse collection de livres, estampes en feuilles et encadrées, livres (...)

8L’ouvrage se vend encore durant quelques décennies chez J. F. Chereau (comme l’attestent ses catalogues de 1770 et 177825 et son fonds de commerce en 178726), puis chez François Étienne Joubert, acquéreur du fonds, qui détient à cette date neuf exemplaires brochés du premier volume sur papier quart de raisin achetés 11 livres 5 sols ainsi que les cuivres des cent planches du recueil et des dix planches du Livre d’ornemens achetés au poids avec d’autres. Le recueil se trouve aussi en vente chez Watin entre 1773 et 1802, qui le signale dans son Art du peintre, doreur, vernisseur, entre 1773 et 180227. L’ouvrage vieillissant, son prix baisse au fil du temps. J. F. Chereau ne vend plus chaque partie des Éléments d’orfèvrerie 12 livres comme indiqué sur le titre, mais 12 livres le tout, d’après ses catalogues de libraire de 1770 à 1778. Watin, quant à lui, brade chaque partie à 1 livre 4 sols entre 1773 et 1793, puis à 1 Franc 20 en 1802. Aux enchères, le premier volume se vend 3 livres 5 sols et le second 2 livres 15 sols lors de la vente de la bibliothèque de Simon Jude François Délézenne en 1779 à Lille28. Et lors de celle du marquis de Ménars en 178229, les deux parties reliées ensemble en veau sont vendues 5 livres 14 sols. La vente d’exemplaires d’occasion à l’étranger indique un certain succès de l’œuvre hors des frontières : à Londres deux recueils complets sont estimés aux enchères 15 sols chacun chez Benjamin White en 176930, deux parties de 50 planches sont estimées en 1785 7 sols 6 deniers chacune chez Thomas Payne & Son, à Castle Street31. On trouve encore des exemplaires aux enchères en 1812 à Bruxelles32 ou en 1813 à Gand33.

Reprises des planches dans d’autres ouvrages

  • 34 Yale Center for Bristish Art, Rare books L18.4. Clifford H., Silver in London. The Parker and Wake (...)

9Le succès de l’ouvrage se mesure aussi à l’apparition de copies ou reprises : en 1757, une partie des modèles est gravée à nouveau à Londres dans Divers elegant designs for the use of goldsmiths, chasers, carvers & c. curiously engraved by Chatelan & c from the drawings of Messrs Germain Meissonnier signr. Cattarello & c., publié par Robert Clee34. À l’exception de quatre planches, tirées du Livre de légumes et des Œuvres de Meissonnier, et de Gravelot, toutes sont des copies inversées des Éléments d’orfèvrerie. Catarello quant à lui présente des modèles de cheminées rococo.

10Les modèles sont ensuite vulgarisés hors du monde artistique dans les planches de l’Encyclopédie de Diderot parues de 1762 à 1772. Toutes les gravures de vaisselle montée illustrant le métier d’orfèvre-grossier et signées « Lucotte delineavit, Benard fecit » (7 pl. et 63 fig.) proviennent des Éléments d’orfèvrerie (mais inversées), les autres planches illustrant l’orfèvre bijoutier et joaillier, metteur en ordre étant presque intégralement copiées du Livre de desseins de jouaillerie et bijouterie inventés par Maria et gravés par Babel. La seule part d’invention se résume à la confection de deux objets : une croix et un chandelier d’autel (pl. II, fig. 3 et III, fig. 1), amalgamant respectivement les pl. 27 et 32, et 28-29 des Éléments d’orfèvrerie.

11L’édition de L’Encyclopédie favorisa-t-elle des réimpressions de l’ouvrage chez les Chereau à cette époque ? Ce qui est certain, c’est que l’impact de L’Encyclopedie fut moindre chez les orfèvres que le recueil original puisque le choix des objets copiés et le sens des motifs est toujours identique aux modèles de Pierre Germain.

Possesseurs

  • 35 Citons un ex-libris aux armes des Caze de la Bove [Bibliothèque des Arts décoratifs, Réserve JH49] (...)
  • 36 Castel Y.-P., Dufief-Moiriez D., Rioult J.-J. et alii, Les orfèvres de Basse-Bretagne. Dictionnair (...)
  • 37 TIB/UB Hannover. Ex-libris sur un recueil de 1786 d’ap. les Éléments d’orfèvrerie, avec 26 pl. don (...)
  • 38 BM de Reims, MM453 ; Los Angeles, Getty Research Institute, 83B1287.

12Qui acquiert ce genre de recueil de modèles ? Des bibliophiles et orfèvres35. Parmi ces derniers, on trouve Benjamin Febvrier, orfèvre à Landerneau en Bretagne de 1718 à 179536, Jean Loque, spécialisé dans les œuvres religieuses à Paris (fin xviiie – début du xixe siècle)37 et Pierre Joseph Jacques Tiberghien, orfèvre bibliophile renommé à Gand († 1810). Quelques exemplaires retrouvés pourraient avoir appartenu à des confrères, notamment ceux qui contiennent des dessins reliés avec l’ouvrage : l’exemplaire de Jean Loque en possède quatre, un recueil du Getty contient un dessin de soupière et celui de la bibliothèque municipale de Reims deux dessins non identifiés et un dessin copié de Pierre Germain à l’arrière d’une planche gravée38. Sont-ce des projets de Pierre Germain, d’un illustre confrère ou du disciple qui posséda le livre ?

Le recueil

Construction, didactique et style

  • 39 Modèles de Roëttiers : flambeaux à nœud pl. 70, à faune et faunesse pl. 71, à satyre pl. 72, pot à (...)

13Le recueil est une œuvre construite. Divisé en deux parties publiées d’abord séparément, l’ouvrage doit être néanmoins considéré comme un tout : il contient une seule table, au début de la première partie, et une seule planche de plans en fin de seconde partie. La première partie, comportant 50 planches, est consacrée à l’orfèvrerie religieuse ; la seconde à l’orfèvrerie civile comprend 43 planches de Pierre Germain et 7 de Jacques Roëttiers « de quelques morceaux d’orfevrerie qu’il execute actuelement pour Monseigneur le Dauphin »39. Ce choix de faire figurer son maître et orfèvre du roi doit avoir des buts précis. Ajouter un intérêt à l’ouvrage pour des orfèvres friands de modèles parisiens, notamment à l’étranger ? Faire valoir un projet princier incertain pour Roëttiers ? Assoir une reconnaissance, suggérer un rôle clé chez Roëttiers et s’en distinguer ? Ou encore s’assurer une clientèle future ?

14Le livre a une seule ambition : enseigner et décliner les formes et les contours. Cette ambition est placée en exergue de l’Avis au lecteur. L’ouvrage entier est donc construit comme un livre d’exercices didactiques où chaque objet, assez simple sur la première planche, s’enrichit et superpose les ornements jusqu’à donner l’objet le plus rocaille et le plus complexe à réaliser. Chaque ornement s’y trouve enseigné par étape. L’orfèvre achève presque toujours une série par un objet moulé, fondu et ciselé, avec des jeux de plus en plus savants entre surfaces unies et amaties. Les planches de calices (pl. 19-23) ou d’ostensoirs (pl. 34-38) représentent assez bien le degré de difficulté ajouté d’un objet à l’autre.

15Si la majorité des objets montés figure dans l’ouvrage, au moins en plan, Pierre Germain n’offre pas un catalogue exhaustif : on n’y trouve ainsi aucun coquetier, mouchettes, taste-vin… Plats et batterie de cuisine (réchaud, chocolatière, cafetière, pot à lait et boule à thé, pl. 51-52) ne font l’objet que de simples plans, car ce type d’objet, sauf exception ou commande princière, ne requiert aucune inventivité spécifique. L’enseignement porte en revanche sur quelques objets ayant aussi un rôle d’apparat.

16La construction du recueil permet une recherche aisée : en plus d’une table, les objets sont ordonnés par usage : religieux et civil. Dans cette partie par exemple, sont déclinés le service de table puis la toilette. Cette dernière est elle-même ordonnée du général au particulier : la première planche figure les formes de tout ce qui compose une toilette simple. Chaque objet est ensuite décliné : vergette, gobelet, gantière, flambeau, boîtes à poudre et à mouches, coffres à racine et à bijoux, pot à pâte, carré et son dessus, cuvette, brosse à peigne, pot à eau et miroir.

17Pierre Germain ne s’attache pas seulement aux objets, aux formes et aux contours, il décline les ornements qui rehausseront leur éclat : il faut être attentif aux détails (anses, graines de couvercles, prises, socles et piédouches…). En dépit de ressemblances, rares sont les éléments répétés plusieurs fois. En découpant les différentes parties des objets, on pourrait former un véritable dictionnaire d’ornements. L’orfèvre décline des dizaines de possibilités de la plus simple à la plus élaborée : anses torsadées, tressées ou à enroulement, bases et pieds (jamais à pattes d’animaux), médaillons d’armoiries, becs, etc. Il fournit une grande variété et liberté de formes. Il offre aussi des jeux sur les matières.

18Ce qui ressort de ces planches, c’est un grand éclectisme, mais maîtrisé, didactique et construit et des formes dans l’ensemble encore sages et raisonnables que souvent seul l’ornement rend rocaille ou tortueux. Certains ornements sont placés pour leur utilité : ainsi satyres, dieux et animaux ne sont ciselés que sur les becs d’aiguière, les fûts et bases de flambeaux sur les anses et nœuds. Ils ont une fonction décorative indéniable mais viennent aussi renforcer des endroits fragiles. Tout est pris en compte dans cet ouvrage didactique. L’ouvrage possède un trait spécifique : Pierre Germain n’introduit jamais d’humain sinon quelques têtes d’amours ou anges dans les œuvres religieuses. Là réside la grande différence avec Jacques Roëttiers qui donne à voir dieux et personnages mythologiques (Ariane, Bacchus, Hercule enfant, amours, satyres et nymphes). Les ornements proposés par Pierre Germain sont à la portée d’un maître, non d’un orfèvre du roi seul.

  • 40 Cavalié H., « Deux Éléments retrouvés de la toilette de la princesse des Asturies », La Revue de l (...)

19De l’œuvre ciselée de Pierre Germain, bien peu d’objets subsistent aujourd’hui, et bien peu de l’ambition de ce recueil (si ce n’est un élément d’une toilette de la princesse des Asturies40, et quelques flambeaux dont une paire au Louvre). Dans ses dessins comme dans son œuvre retrouvée néanmoins, l’orfèvre s’inscrit dans la création et bien peu dans la répétition, à la différence de la plupart de ses confrères, ayant une spécialité (cuillers, flambeaux, etc.). L’estampe laisse donc à voir l’âme et le génie créateur d’un orfèvre, qui reste pour l’exécution tributaire de sa clientèle et de biens propres modestes.

Sources d’inspiration

20Il demeure difficile de mesurer la part de créativité dans l’œuvre et la part de copie ou d’influence. La superposition de matières spongieuses, rocailleuses, appliquées sur un objet de forme classique rappellent le style de Thomas Germain, tout comme les prises en forme de fruits, mais Pierre Germain n’utilise pas les animaux favoris de ce maître, généralement représentés dans les terrines où on les consomme (bélier, sanglier, poissons, oiseaux, crustacés, etc.).

  • 41 Les catalogues ne détaillant pas les poinçons de l’objet, absents par ailleurs sur le couvercle, i (...)

21Certains dessins sont inspirés de modèles existant dans les années 1740. C’est ce que laisserait supposer le saupoudroir à coquilles et dauphin de la pl. 66 dont on retrouverait un modèle en partie au poinçon de Claude Charvet datant de 173841. À supposer que l’objet soit parfaitement d’époque, Pierre Germain revisita-t-il un modèle existant ? Fournit-il un modèle à l’orfèvre ? Charvet aurait-il travaillé avec Pierre Germain ou chez un maître commun ?

  • 42 Vente Christie, Catalogue of old English and foreign…, Londres, 7 juil. 1926.

22Il existe des sources d’inspirations et de proximités indéniables entre l’œuvre dessinée de Pierre Germain et celle de Roëttiers pour qui il travaille depuis quinze ans. Les prises en forme de chou-fleur et chou (pl. 80, 77) des Éléments d’orfèvrerie sont semblables à celles que Roëttiers cisèle pour les terrines et pots à oille du comte Berkeley en 1735-173842 (fig. 1).

  • 43 Nocq H., Alfassa P., Guerin J., L’orfèvrerie civile française du xvie au début du xixe siècle, Par (...)

23Un huilier de 1739-174043, dont le poinçon de maître, partiellement effacé, a été quelquefois attribué à Jacques Roëttiers, peut aussi être rapproché de la pl. 57 et laisse supposer des inspirations communes. Il présente la même forme en bateau posée sur un piédouche mais quelques différences ornementales. Pierre Germain remplace les canaux par deux possibilités différentes mais toujours traitées entièrement en amati. Il ajoute aussi un vocabulaire rocaille avec deux coquilles.

  • 44 Vente Fraysse & associés, Collection Édouard Cochet. Boîtes d’argent et de vermeil. France xviiie  (...)

24Un moutardier parisien de Joseph Bellanger de 1742 présente quant à lui une forme semblable au modèle 58 des Éléments d’orfèvrerie44 : balustre à côtes pincées, anse moulurée, piédouche circulaire chantourné. Le modèle uni, sans décor, sinon une moulure sur le bec et l’anse, ne donne lieu à aucune fantaisie. Pierre Germain l’anime d’un décor dans ses Éléments d’orfèvrerie. Pierre Germain a bien revisité des modèles existant en leur donnant de nouveaux contours par la ciselure, ce qui correspond au but annoncé dans l’Avis de ses Éléments d’orfèvrerie : « se former des principes sur les differens genres d’orfevrerie et sur la diversité des contours ».

Fig. 1. Sources d’inspiration ? Saupoudroir attr. à C. Charvet, 1738 ?, collection particulière et Éléments d’orfèvrerie, pl. 66 ; J. Roëttiers, terrine et pot à oille des Berkeley, 1735-1738, collection particulière, et pl. 77 et 80 ; porte-huilier anonyme, 1739-1740, collection particulière, et pl. 57 ; J. Bellanger, moutardier, 1742, ex coll. Cochet, et pl. 58.

Cent cinquante ans d’influence

25L’ouvrage eut une certaine renommée en province et à l’étranger durant plusieurs décennies où il fut copié, les modes pouvant y arriver et perdurer avec un certain décalage. La complexité des modèles nécessita de bons orfèvres et des heures de travail pour un commanditaire appréciant une facture parisienne.

  • 45 Musée des hospices civils de Lyon, orfèvrerie 66. Chalabi M.-A., Jaze-Charvolin M.-R., L’orfèvreri (...)

26En province, les premières copies retrouvées sont des burettes de l’orfèvre lyonnais Frédéric Ier Nesme (reçu maître en 1749 – † ap. 1787), copiées en 1756 de la pl. 1645. Mais outre une certaine raideur dans l’adaptation des plis ciselés, quelques modifications ont été apportées par Frédéric Nesme, dans l’ajout de couvercles et l’adaptation du pied.

  • 46 Brault-Lerch S., Les orfèvres de Franche-Comté et de la principauté de Montbéliard du Moyen Âge au(...)
  • 47 Vente Paris, Drouot, 28 nov. 1969, lot 82 (l’ensemble de l’iconographie ayant inspiré ou été inspi (...)
  • 48 Victoria & Albert Museum, Print Room, EO64a, pl. 14816.75 (estampe d’H. Boullemier publiée par Ban (...)

27On trouve en 1759 une copie de meilleure qualité, un moutardier (pl. 58) chez Joseph Opinel à Dole46, conservé au Metropolitan Museum. Ce modèle inspira peut-être plus librement encore en 1764 Pierre Ignace Joachim Thiébaud, orfèvre à Salins47. Fut-ce par le biais des réalisations de Joseph Opinel ? On y trouve les mêmes lignes et contours à côtes pincées sur la panse, un bec et une graine de couvercle assez semblables, mais une anse différente et un décor non plus ciselé mais gravé (fig. 2). Quelques décennies plus tard, la fabrique d’Odiot à Gandais adapte quant à elle la soupière de Jacques Roëttiers (pl. 81) dans un style néoclassique48.

Fig. 2. Copies provinciales. Buire pl. 16, copiée par F. Nesme, 1756, Musée des hospices civils de Lyon ; moutardier pl. 58 copié par J. Opinel, 1759, Metropolitan Museum.

  • 49 Le Corbeiller C., « A tale of two cities », Cleveland studies in the history of art, août 2003, p. (...)
  • 50 Mallé L., I dipinti del Museo d’Arte antica, catalogo, Turin, 1963, p. 156.

28Le recueil influence aussi les orfèvres des cours étrangères : en Piémont et surtout en Angleterre. À Turin, le Palazzo Madama conserve un portrait à mi-hauteur d’Andrea Boucheron, orfèvre du roi de Sardaigne devant une étagère remplie d’objets directement copiés des Éléments d’orfèvrerie49 : à gauche sont disposés des modèles de Pierre Germain (moutardier pl. 59 ; saupoudroir pl. 63) et à droite de Jacques Roëttiers (lambeau pl. 71 ; pot à oille pl. 78). L’orfèvre tient par ailleurs dans les mains un dessin de girandole qui n’est autre que la pl. 72 de Jacques Roëttiers. Sur la table, en partie cachés, un diplôme et un sceau sur lacs de soie verte dans sa boîte laissent apparaître le nom tronqué du roi « [Car] lo Emanuele ». Le tableau donné en 1914 par une descendante, Marianne Boucheron, porte au dos l’inscription traduisible par : « Andrea Boucheron mort en 1761 à 69 ans50 ». L’identification de l’orfèvre semblerait donc incontestable (fig. 3).

Fig. 3. Portrait anonyme d’Andrea Boucheron avec des modèles des Éléments d’orfèvrerie, v. 1750, Turin, Palazzo Madama.

  • 51 BnF, Manuscrits, NAF12054/6.743.

29Andrea Boucheron passa plusieurs mois de sa jeunesse à Paris en 1728 où il fréquenta Thomas Germain, qui fut témoin à son mariage avec la fille de l’orfèvre dijonnais Martin Brunot, Marie51. Sa production est empreinte de style français. Si le portrait le représente bien, nous ne savons dans quel but il se serait fait peindre devant les modèles d’un autre. Est-ce pour montrer une affinité ou relation spéciale avec la prestigieuse orfèvrerie parisienne, avec Jacques Roëttiers ou Pierre Germain, ou croit-il lui aussi comme le marquis de Paulmy que les modèles sont de Thomas Germain et veut-il mettre en valeur sa relation avec l’orfèvre du roi ?

30Son fils, Giovanni Battista Boucheron (1745-1815), directeur des orfèvreries royales de Piémont à partir de 1775, s’inspira lui aussi du recueil. En témoigne un dessin signé de « coquemar ou pot à l’eau exécuté en vermeil pour S.A.R. Monseigneur le duc de Savoie », qui serait daté de1768, et reprend deux modèle de buire de Pierre Germain (le corps pl. 18, l’anse pl. 17) (fig. 4).

Fig. 4. G. B. Boucheron, dessin de pot à eau inspiré des Éléments d’orfèvrerie, pl. 17-18, v. 1768 ?, 42,5 x 30,5 cm, Turin, Palazzo Madama, no 2630 DS.

  • 52 Oman C.C., English Silversmiths’ work civil and domestic. An introduction, Londres, 1965, no 143-1 (...)

31En Angleterre, parmi les orfèvres utilisant les modèles, citons en premier Thomas Heming (1722-1801), principal orfèvre du roi d’Angleterre de 1760 à 1782, formé chez le huguenot d’origine française Peter Archambo. Sur sa carte-adresse52, sont représentés quatre objets ou parties d’objets des Éléments d’orfèvrerie : un couvercle de terrine de Roëttiers (pl. 81), un vase amputé d’une anse et devenu aiguière (pl. 13), une burette (pl. 3) et une cuvette transformée en porte-huilier (pl. 5) (fig. 5).

  • 53 Lightbown R.W., French Silver. Victoria and Albert Museum Catalogues, Londres, 1978, p. 74-75 (ill (...)

32Les emprunts sont également visibles dans son œuvre, à commencer par une aiguière de 1766 pour la toilette de la princesse Caroline Mathilde, sœur du roi Georges III, lors de son mariage avec Christian VII de Danemark, inspirée de la pl. 3 et conservée au Kunstindustrimuseet à Copenhague. On y retrouve la même forme générale, cependant l’orfèvre a apporté des modifications à l’anse, au col et au rebord, et ajouté une guirlande à la panse. Un seau à rafraîchir datant de 1774-1775 copie quant à lui la pl. 73, avec un médaillon central moins imposant53. Ailleurs, l’influence de Pierre Germain reste plus diffuse chez Thomas Heming qui se nourrit de sources éclectiques et mêlées.

Fig. 5. Carte-adresse de Thomas Heming inspiré de modèles de Pierre Germain.

  • 54 Vente Christie’s.

33À la même époque, l’atelier de John Ier Parker et Edward Wakelin copie aussi le recueil, comme l’atteste une soupière de 1761-177354 inspirée de la pl. 80. Cette fois, seul le décor est repris de Pierre Germain et plaqué sur une autre forme de terrine, plus sobre.

  • 55 Los Angeles, Getty Research Institute, 83B1287-3.

34L’influence du recueil et du style Louis XV perdura tout au long du xixe siècle, notamment à la toute fin avec une vague néo-rococo dans les commandes de luxe telles que les toilettes ou les pièces maîtresses de table. À cette époque, en 1884, le collectionneur Paul Eudel reprenant la présentation, le titre et la typographie du recueil, fait graver les objets de sa collection sous le nom 60 planches d’orfèvrerie de la collection Paul Eudel, pour faire suite aux Éléments d’orfèvrerie composés par Pierre Germain. Trois ans plus tard, Pierre Germain est exhumé par les recherches de Germain Bapst, dans Études sur l’orfèvrerie française au xviiie siècle, les Germain orfèvres-sculpteurs du Roy. La réimpression en fac-similé des Éléments d’orfèvrerie à Paris chez Rouveyre, d’après un exemplaire de la Bibliothèque nationale, et à Francfort-sur-Main chez Baer vers 1888-1889 n’est certainement pas un hasard ni sans redonner de l'influence aux modèles. La maison d’orfèvrerie A. Risler & Carré acquiert par exemple une réédition55.

Fig. 6. Éléments d’orfèvrerie, moutardier et pot à oille, pl. 58 et 77 ayant inspiré un dessin de verseuse, chez Odiot, s. d.

35De cette époque, la maison Odiot conserve des dessins inspirés des Éléments d’orfèvrerie, dont on ne sait s’ils furent ciselés ou restèrent à l’état de projet. Une saucière rocaille adaptée de la pl. 55 perd son anse et retrouve son équilibre grâce à l’ajout d’une couronne fermée, peut-être pour quelque famille régnante. Deux boîtes sont également copiées avec de menus changements (pl. 92 et 95). Une verseuse se plaît à amalgamer deux modèles d’un service de Pierre Germain composé d’un moutardier et d’un pot à oille assortis : on y retrouve le bec du premier (pl. 58), la prise, les pieds et la panse du second (pl. 77) (fig. 6).

  • 56 Vente Habsburg Feldman, Genève, 15 nov. 1989, lot 292.
  • 57 Vente Sotheby’s, Important English and continental silver including La Machine d’argent by Françoi (...)
  • 58 Vente étude de Provence, Marseille. Gazette de l’hôtel de Drouot, déc. 2004, no 43, p. 197.
  • 59 Vente Christie’s, Fine Silver, Londres, 23 nov. 1999, lot 38.
  • 60 Vente Couturier Nicolay, Bijoux, objets de vitrine, argenterie ancienne…, Paris, Drouot, 18 mai 19 (...)

36Une autre dynastie parisienne, les Aucoc, adapte surtout les modèles les plus mouvementés et typiques du style rocaille, donnant à voir plusieurs épaisseurs ou peaux d’argent, à commencer par une aiguière d’Aîné Aucoc, pour une toilette réalisée avec Charles-Nicolas Odiot en 184256 et copiée de la pl. 98 du recueil. Ce modèle est encore décliné par la maison dans les années 189057. D’autres planches sont aussi source d’inspiration comme le moutardier de la pl. 6158. Les pl. 55 et 93 ont quant à elles inspiré plus librement la confection d’une jardinière59. On retrouve encore des copies chez les Cardeilhac60, par exemple des salières copiées de la pl. 56 (fig. 7).

Fig. 7. Éléments d’orfèvrerie, moutardier, aiguière et saucière, pl. 61, 98 et 56 ayant inspiré Aucoc, XIXe siècle, collection particulière, et Cardeilhac, s. d., collection particulière.

Conclusion

37L’influence des Éléments d’orfèvrerie, limitée par le nombre des recueils en circulation, fut efficace aux périodes luxueuses, ornementales, appréciant la générosité du baroque. Elle décline donc au xxe siècle, simplifiant les lignes et ornements qui sont précisément l’âme des modèles. L’ouvrage demeure depuis lors par sa rareté, le nombre des planches, un objet de collection dans les bibliothèques des maisons d’orfèvrerie, chez les antiquaires et collectionneurs avertis et fort heureusement rarement découpé, le sujet se prêtant peu à orner des murs. Sa longévité a été formidable, probablement la plus belle offerte à un recueil de cet art, parce que ce ne fut pas un catalogue d’œuvres extraordinaires et virtuoses mais le manuel pédagogique d’un orfèvre qui passa près de trente ans au service d’ateliers, à développer et acquérir son talent et à vouloir le transmettre.

Notes

1 Hernmark C., Weigert R.-A., Les relations artistiques entre la France et la Suède, 1693-1718 : Nicodème Tessin le jeune et Daniel Cronström, correspondance (extraits), Stockholm, Nationalmuseum, 1964, p. 127.

2 Montaiglon A. de, Procès-verbaux de l’Académie royale de peinture et sculpture, 1648-1793, Paris, Baur, 1886, t. vii, p. 171-172 ; Fuhring P., « Les deux girandoles d’or de Louis XV, chef-d’œuvre du rococo », Revue de l’art, 1992, no 95, p. 52-60 ; Perrin C., François Thomas Germain : orfèvre des rois, Saint-Rémy-En-l’Eau, Monelle Hayot, 1993, p. 59, p. 268, note 151.

3 Légaré G., Livre des ouvrages d’orfèvrerie…, Paris, 1663, 12 pl.

4 Meissonnier J. A., Recueil des œuvres de Meissonnier, s.d.

5 Germain P., Éléments d’orfèvrerie, 1748, p. [3].

6 Chez Thomas Germain (au moins de 1726 à 1729), à Rome (1729-1733), chez Jacques Roëttiers (1733-1736) et enfin officiellement apprenti par privilège des galeries du Louvre chez Nicolas Besnier (1736-1744).

7 BM d’Avignon, ms 1298, f. 118r-118v. Édition intégrale dans H. Cavalié, « Pierre Germain dit le Romain. Une vie à l’ombre des orfèvres du roi », thèse de doctorat, Paris-iv Sorbonne, 2011, t. v.

8 BM d’Avignon, ms 1300, f. 167r-168v, 7 sept. 1734.

9 Germain P., Éléments d’orfèvrerie, 1748, p. [3].

10 La Grande Encyclopédie, inventaire raisonné des Sciences, des Lettres et des Arts par une société de savants et de gens de lettres, Paris, H. Lamirault et Cie, s.d., t. xviii, p. 847.

11 BM d’Avignon, ms 1298, f.125r126v, - 128r-129v, 158r-159v.

12 Fuhring P., Bimbenet-Privat M., Kugel A., Orfèvrerie française. Lacollection Jourdan-Barry, Paris, J. Kugel, 2005, t. I, fig. 2 ; t. II, no 271.

13 Un chez Lucien Goldschmidt à New York en 1983 (Francini A., Livre d’architecture contenant plusieurs portiques, Paris, M. Tavernier, 1631,) quatre à la bibliothèque de l’Institut national d’histoirede l’art (4 Res205, F°Est142 4 Est120, 4 Est700), deux au Metropolitan Museum (49.69.16, 666152).

14 BM d’Avignon, ms1300, f. 145r-146v (6 jan. 1734,) 167r-168v (7 sept.), 185r186v - (29 déc.).

15 BnF, MF21997/2936, f. 164r, Registre des privilèges et permissions simples de la Librairie, 1738-1750. Fuhring P., « The print privilege in eighteenth century France, part II », Print Quarterly, vol. III, no 1, mars 1986, p. 19-33, p. 29.

16 BnF, MF 21959, Registre des privilèges accordés aux auteurs et libraires, 1748-1752, p. 13-14.

17 BM de Caen, C1881/1-2 ; Bibliothèque Forney, Res756 ; BnF, Arsenal, Est494 ; Cleveland museum of Art, Ingalls Library, NK7149. G31-1748 (portant C [um] P [rivilegio] R [egis] sur les pl.) ; New York Public library, MEM G372ge (signé par l’auteur) ; Los Angeles, Getty Research Institute, Research library, 83B1287-1.

18 BnF, Estampes, Le-54 ; Louvre, coll. Rütschi, OA1882, dans son état originel, non relié, en cahiers de 8 pl., cousus d’unourlet ; Bibliothèque des Arts décoratifs, Réserve C100 et JH49 ; Cambridge (États-Unis), Harvard University, Houghton Library, Typ 715.48.421 ; Chicago, Art Institut, Ryerson & Burnham Libraries, 739.23744G37e ; Victoria & Albert Museum, Print Room, 95D23 ; Los Angeles, Getty Research Institute, 83B1287-4 ; Philadelphia Museum, 1944-11-1 ; vente Daguin, lot 477, probablement Catalogue de la bibliothèque de feu M. E. Daguin…, Paris, 1904. Cohen H., Guides de l’Amateur de livres à gravures du xviiie siècle, 6e éd., Brueil-en-Vexin, 1973, col. 430 ; vente Pierre Berger & associés, Livres d’architecture et d’ornementation…, Paris, 23 nov. 2010, lot 20.

19 Bibliothèque de l’ENSBA, LES1206.

20 BnF, Manuscrits, fonds Rothschild, supplément-2436 et Arsenal, Est494 ; Louvre, OA1882 ; Bibliothèque des Arts décoratifs, Réserve C100 et JH49 ; Bibliothèque Forney, Res756 ; Victoria & Albert Museum, 95D23. Un ou deux ex. feraient exception mais ne sont connus que par des catalogues de vente : ventes Daguin, lot 477 et Ader Picard Tajan, Livres anciens et modernes…, Paris, Drouot, 23-24 oct. 1975.

21 AN, MC, lxxvi, 410, 31 mars 1768, vente du fonds Chereau, f. 13r.

22 BM de Lyon, Rés-Est-132301 (vol. 2) et Rés-Est-103801 ; Bibliothèque de l’Institut, Bernier 4 189 (2 vol.) ; BnF, Estampes, Le-54-4 (vol. 2) ; BM de Reims, MM453 (vol. 1) ; Los Angeles, Getty Research Institute, 83B1287-2 (vol. 1) ; Williamstown, Clark Art Institut, NK7198G477 (2 vol.) ; vente Ader Picard Tajan, Bibliothèque H. Nocq…, Paris, Drouot, 16 avril 1982 ; ouvrage non relié de M. Turisk, antiquaire Au vieux Paris.

23 BnF, Estampes, Le-54.

24 Bibliothèque de l’Institut, Bernier 4 189 ; Williamstown, Clark Art Institut, NK7198G.

25 Réf. dues à P. Fuhring : Catalogüe des estampes provenantes des fonds de Planches des sieurs Gerard, Audran, François Chereau, Fr. Poilly, Bernard Lépicié & J. Moyreau, Graveurs ordinaires du Roi…, chez J. F. Chereau…, [1770], p. 38 ; 1778, p. 39.

26 AN, MC, lxvi, 681, 5 juin 1787, vente du fonds Chereau à F.É. Joubert, f. 5r, 20r-v.

27 L’art du peintre, doreur, vernisseur, ouvrage nécessaire aux amateurs et propriétaires qui veulent décorer leur séjour, et aux Artistes… Par le cit. Watin…, 2e éd., Paris, 1773 ; 4e éd., 1793, p. 350 ; 5e éd., an X [1802], p. 357.

28 Extrait de l’inventaire des meubles et effets du Sr Simon Jude François Délézenne, décédé à Lille le 11 septembre 1778…, Lille, Jacquéz, lot 4697 et bis, p. 262. Exemplaire annoté de prix, ex coll. F. Heim (vente Lucien, Bibliothèque d’art d’un grand marchand parisien, exceptionnelle réunion de catalogues de vente…, Nogent-sur-Marne, 26-30 juillet 2005, lot 665, p. 101).

29 Catalogue des différens objets de curiosités dans les sciences et les arts, qui composent le cabinet de feu M. le marquis de Menars… Dont la vente s’en fera vers la fin de février 1782…, Paris, Basan, Joullain, lot 542, p. 109. Exemplaire annoté, ex coll. F. Heim (vente Lucien, 26-30 juillet 2005).

30 A catalogue of the entire libraries of the Rev. Mr Joseph Spence, author of Polymetis, & c., of William Duncombe, esq., translator of Horace… The sale will begin of Tuesday, the 8th of August 1769…, Londres, lots 2047, 2070.

31 A catalogue of a very large and valuable collection of books ; containing an extraordinary number of rare and curious articles, in the finest preservation, and most elegant bindings and likewise and extensive assortment of learned and useful books, including, among several others, the libraries of the late Rev. Richard Cust…, Londres, fév. 1785, lots 2366, 2398.

32 Catalogue d’une superbe collection de livres de piété, jurisprudence, sciences et arts, belles lettres, peinture, architecture, histoire naturelle, botanique, histoire, voyages, antiquités, Bruxelles, 9 nov. 1812, lot 161.

33 Catalogue d’une riche et précieuse collection de livres, estampes en feuilles et encadrées, livres d’estampes, dessins, tableaux, argenterie et bijouteries, un beau tour et ustensiles d’orfèvreries délaissés par feu Mr P. J. Tiberghien, en son vivant maître orfèvre…, Gand, p. 6, lot in-4° 12.

34 Yale Center for Bristish Art, Rare books L18.4. Clifford H., Silver in London. The Parker and Wakelin partnership, Yale University Press, 2004, p. 100-101, 165 (ill.).

35 Citons un ex-libris aux armes des Caze de la Bove [Bibliothèque des Arts décoratifs, Réserve JH49] ; un ouvrage du Mis de Paulmy qui le confond avec Thomas Germain « Germain étoit le plus fameux orfevre de Paris de son tems il est mort depuis quelques années. Son fils travaille encore ou du moins fait travailler. Ce livre est agréablement gravé » [BnF, Arsenal, ms 6285, Catalogue manuscrit de la bibliothèque du marquis de Paulmy. no 1957-5174] ; un de Pierre Adamoli (1703-1769), maître des ports, ponts et passages de Lyon ; un de Simon Jude François Délézenne (cat. de vente), un du marquis de Marigny [AN, MC, XCIX, 660 et 667, inventaire après décès, no 720, et cat. de vente, 18 mars 1782].

36 Castel Y.-P., Dufief-Moiriez D., Rioult J.-J. et alii, Les orfèvres de Basse-Bretagne. Dictionnaire des poinçons de l’orfèvrerie française, Rennes, 1994, p. 103-104.

37 TIB/UB Hannover. Ex-libris sur un recueil de 1786 d’ap. les Éléments d’orfèvrerie, avec 26 pl. dont 26 ill. gravées et quatre dessinées. L’ouvrage n’a pas été vu. Il pourrait s’agir de l’Encyclopédie.

38 BM de Reims, MM453 ; Los Angeles, Getty Research Institute, 83B1287.

39 Modèles de Roëttiers : flambeaux à nœud pl. 70, à faune et faunesse pl. 71, à satyre pl. 72, pot à oille pl. 78, terrine d’Hercule pl. 81, plats de terrines et de pots à oille pl. 82, surtout d’Ariane et Bacchus pl. 86. De ces projets sont seuls livrés le 17 août 1758 les pots à oille et terrines (AN, O1 3316, f. 227r, no 91 et 94).

40 Cavalié H., « Deux Éléments retrouvés de la toilette de la princesse des Asturies », La Revue de l’Art, 2008-1, no 159, p. 77-85.

41 Les catalogues ne détaillant pas les poinçons de l’objet, absents par ailleurs sur le couvercle, incitent à rester prudent sur sa confection. Vente Ader Picard Tajan, Succession d’un grand amateur, collection de bijoux anciens des xvie, xviie, xviiie et xiie siècles, objets de vitrine, orfèvrerie ancienne…, Paris, 18 avril 1983, lot 115. L’orfèvrerie civile en France aux xviie- xviiie siècles, Aix-en-Provence, 1954, no 70, p. 42.

42 Vente Christie, Catalogue of old English and foreign…, Londres, 7 juil. 1926.

43 Nocq H., Alfassa P., Guerin J., L’orfèvrerie civile française du xvie au début du xixe siècle, Paris, 1926, vol. 1, pl. xxvi, fig. b. coll. baron Pichon et André Bouilhet (cat. 351).

44 Vente Fraysse & associés, Collection Édouard Cochet. Boîtes d’argent et de vermeil. France xviiie siècle. Orfèvrerie française des xviie et xviiie siècles, Paris, 9 nov. 2011, lot 91.

45 Musée des hospices civils de Lyon, orfèvrerie 66. Chalabi M.-A., Jaze-Charvolin M.-R., L’orfèvrerie de Lyon et de Trévoux du xve au xxe siècle, Paris, Centre des Monuments nationaux, 2000, no 120, p. 270 ; Godefroy G., Les orfèvres de Lyon (1306-1791) et de Trévoux (1700-1786). Répertoire biographique, poinçons, œuvres, Paris, Picard, 1965, p. 317, no 79, pl. xvi, xxv-xxvi.

46 Brault-Lerch S., Les orfèvres de Franche-Comté et de la principauté de Montbéliard du Moyen Âge au xixe siècle, Genève, Droz, 1976, p. 60, 464-466, 1017, pl. lxxvi.

47 Vente Paris, Drouot, 28 nov. 1969, lot 82 (l’ensemble de l’iconographie ayant inspiré ou été inspiré par les Éléments d’orfèvrerie se trouve dans la thèse d’H. Cavalié).

48 Victoria & Albert Museum, Print Room, EO64a, pl. 14816.75 (estampe d’H. Boullemier publiée par Bance aîné).

49 Le Corbeiller C., « A tale of two cities », Cleveland studies in the history of art, août 2003, p. 146-155.

50 Mallé L., I dipinti del Museo d’Arte antica, catalogo, Turin, 1963, p. 156.

51 BnF, Manuscrits, NAF12054/6.743.

52 Oman C.C., English Silversmiths’ work civil and domestic. An introduction, Londres, 1965, no 143-144 (ill.).

53 Lightbown R.W., French Silver. Victoria and Albert Museum Catalogues, Londres, 1978, p. 74-75 (ill.). Une autre fois, Heming l’adapte plus librement (vente Sotheby’s ou Christie’s, Londres, 15 mai 2003).

54 Vente Christie’s.

55 Los Angeles, Getty Research Institute, 83B1287-3.

56 Vente Habsburg Feldman, Genève, 15 nov. 1989, lot 292.

57 Vente Sotheby’s, Important English and continental silver including La Machine d’argent by François Thomas Germain, New York, 20 mai 2004, lot 156.

58 Vente étude de Provence, Marseille. Gazette de l’hôtel de Drouot, déc. 2004, no 43, p. 197.

59 Vente Christie’s, Fine Silver, Londres, 23 nov. 1999, lot 38.

60 Vente Couturier Nicolay, Bijoux, objets de vitrine, argenterie ancienne…, Paris, Drouot, 18 mai 1983, lot 124.

Table des illustrations

Légende Fig. 1. Sources d’inspiration ? Saupoudroir attr. à C. Charvet, 1738 ?, collection particulière et Éléments d’orfèvrerie, pl. 66 ; J. Roëttiers, terrine et pot à oille des Berkeley, 1735-1738, collection particulière, et pl. 77 et 80 ; porte-huilier anonyme, 1739-1740, collection particulière, et pl. 57 ; J. Bellanger, moutardier, 1742, ex coll. Cochet, et pl. 58.
URL http://books.openedition.org/editionscnrs/docannexe/image/27751/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 315k
Légende Fig. 2. Copies provinciales. Buire pl. 16, copiée par F. Nesme, 1756, Musée des hospices civils de Lyon ; moutardier pl. 58 copié par J. Opinel, 1759, Metropolitan Museum.
URL http://books.openedition.org/editionscnrs/docannexe/image/27751/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 304k
Légende Fig. 3. Portrait anonyme d’Andrea Boucheron avec des modèles des Éléments d’orfèvrerie, v. 1750, Turin, Palazzo Madama.
URL http://books.openedition.org/editionscnrs/docannexe/image/27751/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 505k
Légende Fig. 4. G. B. Boucheron, dessin de pot à eau inspiré des Éléments d’orfèvrerie, pl. 17-18, v. 1768 ?, 42,5 x 30,5 cm, Turin, Palazzo Madama, no 2630 DS.
URL http://books.openedition.org/editionscnrs/docannexe/image/27751/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 574k
Légende Fig. 5. Carte-adresse de Thomas Heming inspiré de modèles de Pierre Germain.
URL http://books.openedition.org/editionscnrs/docannexe/image/27751/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 286k
Légende Fig. 6. Éléments d’orfèvrerie, moutardier et pot à oille, pl. 58 et 77 ayant inspiré un dessin de verseuse, chez Odiot, s. d.
URL http://books.openedition.org/editionscnrs/docannexe/image/27751/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 174k
Légende Fig. 7. Éléments d’orfèvrerie, moutardier, aiguière et saucière, pl. 61, 98 et 56 ayant inspiré Aucoc, XIXe siècle, collection particulière, et Cardeilhac, s. d., collection particulière.
URL http://books.openedition.org/editionscnrs/docannexe/image/27751/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 414k

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search