Actions, séquences, épreuves de transition dans les Crêtes Pré-Ardennaises (CCPA)
p. 139-147
Texte intégral
Introduction
1L’objet de ce texte est de s’interroger au travers d’un cas d’étude sur les enjeux d’une sociologie de l’énergie aujourd’hui : Que s’agit-il de suivre et de décrire ? Quels descripteurs peuvent nous aider dans cette tâche ?
2L’enjeu énergétique est actuellement marqué par la perspective d’épuisement probable, à court terme, des ressources fossiles sur lesquelles se sont adossés nos modes de vie et nos économies avec une acuité accrue depuis l’après-guerre. Il est aussi structuré par l’affirmation de l’enjeu climatique et de ses conséquences majeures en cas de poursuite des trajectoires actuelles d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Cet ensemble appelle une profonde modification de nos modes de production et de consommation énergétiques, désignée sous le terme de « transition énergétique ».
3Cette transition sera appréhendée ici comme un ensemble de propositions sociotechniques plus ou moins avancées, dont certaines sont d’ores et déjà concrétisées dans des capacités installées, tandis que d’autres font l’objet de démonstrations et de scénarios. Ces propositions peuvent également se présenter sous la forme de visions ou de récits (« narratives ») porteurs de futurs énergétiques. Dans quasiment tous les cas, ces propositions sont réifiées au travers de collectifs composés d’acteurs et d’artefacts techniques constitués en solutions disponibles ou atteignables.
4La plupart des Nouvelles Technologies de l’Énergie (NTE)1 sont concernées et font l’objet de propositions2 contrastées quant aux enjeux – notamment distributifs (e.g. captation de ressources, allocation des risques, modes de valuation, degré de centralisation, nouveaux entrants, articulation atténuation/adaptation…) – et aux échelles (locale, nationale, transnationale) de la transition énergétique qu’elles impliquent. Pour ne citer que quelques exemples illustratifs, les réseaux intelligents (e.g. utilisation en vue d’une optimisation du réseau électrique actuel versus développement de systèmes énergétiques semi-autonomes), l’éolien (e.g. grand versus petit éolien ; terrestre versus en mer ; portage privé versus portage coopératif) ou encore le solaire (e.g. systèmes semi-autonomes individualisés versus centrales solaires ou Desertec, fermes privées versus fermes coopératives…) font l’objet de tels enjeux.
5L’interrogation autour de ces enjeux appelle, d’une part (§ 1), à discuter du contenu et de la pertinence de notions telles qu’« assemblage » et « agencement » qui sont au cœur de plusieurs propositions théoriques en sociologie, visant à rendre compte des dynamiques de formation et d’évolution des collectifs sociotechniques. D’autre part (§ 2), il nous conduit à opérer un retour analytique sur un cas concret de territoire engagé depuis maintenant plusieurs années dans un processus innovant sur le plan énergétique : le territoire des Crêtes Pré-Ardennaises. Ce territoire a initié, depuis les années 1990, une dynamique forte et innovante en terme énergétique. Elle débouche aujourd’hui sur l’émergence d’un réseau d’acteurs nationaux porteur d’un modèle de développement citoyen des énergies renouvelables (EnR) – projets EnR coopératifs, acteurs coopératifs du marché de l’électricité – qui ouvre une fenêtre d’observation sur l’émergence de propositions alternatives dans le domaine de l’énergie. Enfin (§ 3), cette double analyse nous conduit à proposer la notion d’épreuve de transition comme perspective d’analyse de processus de transition énergétique. La notion de transition, qui fait bien souvent l’objet d’abords englobants et déterministes – passage d’une origine à un point d’arrivée conditionné à l’avènement de tel facteur ou au relâchement de telle contrainte – s’en trouve redéfinie comme un processus non linéaire, soutenu par la « séquentialité » des logiques de l’action qui sont au fondement de l’assemblage et de la recomposition des collectifs sociotechniques.
Approches de transition
6Si l’on adhère à une vision de la technologie comme étant irrémédiablement sociotechnique (Akrich, 1989), ces propositions soulèvent un double enjeu. D’une part, elles sont porteuses de futurs énergétiques différenciés, en termes de modes d’existence, de formes d’interaction(s), d’allocation des pouvoirs, des valeurs, des richesses et des risques. D’autre part, au-delà de leur fonction de mise en représentation et de catégorisation des possibles, elles jouent un rôle central dans l’émergence de ces derniers. Leur concrétisation appelle des processus de cadrage qui distribuent et délimitent les capacités de choix et d’action, en sorte que les phénomènes de clôture3 qui s’ensuivent ne sont ni saisissables, ni discutables sans une analyse critique des processus de déploiement qu’impliquent ces options.
7Ces quelques considérations suffisent, d’une part, à montrer que ce qui est en jeu est à la fois la construction et la distribution de richesses, de risques, mais aussi celles de capacités à orienter la transition par l’action. Ces processus doivent faire l’objet d’une analyse critique afin d’être mis en politique. D’autre part, elles clarifient le terme « transition » en soulignant qu’il s’agit d’un processus non-linéaire, non sans historicité mais marqué par des émergences aux potentialités multiples. L’analyse doit donc porter sur le contenu et les enjeux de ces propositions tout autant que sur les déplacements, transformations, bifurcations qu’elles connaissent chemin faisant ; elle doit éclairer les pratiques et les discours qui sous-tendent et autorisent (ou non) ces déplacements.
8En supposant que la transition énergétique peut être abordée comme un processus de changement sociotechnique (changement/orientation de configuration sociotechnique), cette partie examine les propositions théoriques permettant d’analyser les enjeux de cette transition. Nous distinguons globalement deux types d’approches – les approches par les systèmes et les approches par les processus et les réseaux – dont nous discutons la potentialité à rendre compte des enjeux de recomposition, d’émergence, d’individuation qui sous-tendent la fabrique de cette transition.
Approches par les systèmes
9Les premiers développements de l’économie évolutionniste depuis les années 1970 ont été relatifs au changement technologique sur de longues périodes (Dosi, 1982 ; Nelson et Winter, 1982, 1977). Ces analyses ont mis l’accent sur le rôle des inerties socio-institutionnelles – les fameux « lock-in » – dans l’orientation et la sélection des technologies. Elles ont proposé une perspective axée sur la sélection progressive de « sentiers » ou « trajectoires » technologiques, guidées par des processus de sélection analogues à des principes évolutionnistes. Les technologies, en se développant, reconfigurent leur environnement, réalignant les pratiques, les savoirs et les intérêts des acteurs autour de l’option et de la configuration qu’elles représentent. Cet alignement autour des options sélectionnées est source de multiples investissements – constitutions de réseaux d’acteurs, apprentissages et acquisitions de savoir-faire, formulations et cadrages de problèmes, adoption de politiques publiques, engagement de coûts irrécouvrables – à l’origine de verrouillages institutionnels et technologiques.
10Les technologies ont donc progressivement été représentées comme des systèmes sociotechniques composés de pratiques, de savoirs, de coalitions d’acteurs et d’institutions interdépendants. Ces systèmes acquièrent une stabilité et une résistance au changement du fait de l’interdépendance de leurs composantes : les acteurs, les institutions et l’économie en place finissent par dépendre des sentiers technologiques sélectionnés (Nelson and Winter, 1982 ; Arthur, 1989 ; Freeman, 1984). Cette vue a été prolongée par deux types de développements, tous deux approchant la technologie comme un système mais selon des perspectives radicalement différentes.
11Les premières assimilent le « système » à une articulation complexe d’entités interdépendantes, prises dans des dynamiques complexes faites de liens d’influence et d’effets en retour. Un exemple correspond aux analyses de systèmes d’innovation (nationaux, techniques régionaux) (Lundvall, 1992 ; Bergek, Jacobsson et al., 2008). Bien qu’elles s’intéressent aux processus d’innovation, ces approches assimilent le système d’innovation à une articulation complexe d’entités en interrelations. Ainsi, les relations et les équilibres peuvent se déplacer au gré des processus, mais les entités concernées par l’analyse préexistent à cette dernière. L’analyse ne porte pas sur leur émergence, mais sur leurs relations, leurs interactions et impacts sur l’innovation. Leur limite est dès lors leur possible capacité à rendre compte des processus d’émergence et d’individuation évoqués plus haut et qui sont au cœur de la transition énergétique.
Approches par les processus et les réseaux
12Le second type d’approche des systèmes sociotechniques émerge à partir des années 1980. Il s’inscrit dans le prolongement de travaux de sociologie des sciences sur la construction des faits scientifiques (Latour, Woolgar, 1979), dont il transporte la méthode sur l’analyse des technologies. Elle aborde ce qu’elle désigne comme un système sociotechnique dans une perspective de processus, s’intéressant avant toute chose à l’émergence de la technologie (Akrich, 1989) et aux enjeux d’innovation (Akrich, Callon, Latour, 2002a, 2002b). Les développements qui vont nourrir cette perspective sont nombreux4. Ils rencontrent la notion de système sociotechnique et de trajectoire plus qu’ils n’en émanent5. En effet, l’analyse du système met ici l’accent sur le processus par lequel l’innovation ou la technologie, en émergeant, constituent un réseau d’acteurs dont l’alignement – autour et en rapport avec la technologie – recompose ce qui est usuellement considéré comme l’environnement de la technologie (e.g. Law, 1991 ; McKenzie and Spinardi, 1988). Au fil de deux décennies, ces analyses convergeront en un courant d’analyse sociologique des enjeux technologiques et d’innovation : la sociologie acteur-réseau dont le courant français est constitué par la sociologie de la traduction (Akrich et al. 2006). La notion de système sociotechnique y est progressivement remplacée par celle d’assemblage ou d’agencement afin de mieux problématiser le statut et le rôle de l’individu dans les processus de composition de collectifs sociotechniques. Plusieurs de ces notions, plus ou moins explicitement inspirées de l’agencement Deleuzien (Deleuze & Guattari, 1980), sont actuellement proposées (Callon, 2008 ; Latour, 2005 ; De Landa, 2006)6 qui mettent l’accent sur des dimensions différentes des processus de composition du social.
Notion, auteur | Contenu |
Assemblage (Latour) | Hétérogène (actants), couple intermédiaire/médiateur, couple action/agence (intégration du « dislocal » dans l’agence), analyse « à plat » |
Agencement (Callon) | Composition de l’agent rationnel, opérations, dimension matérielle, prothèse/habilitation, chaînes des caractéristiques, qualités, valeurs |
Assemblage (De Landa) | Ontologie, dépassement socio micro/macro (réductionnisme), extériorité des relations (propriétés/capacités), hybridation des causalités (linéaire/non linéaire), multi-scalarité, imbrication de capacités d’expression |
13L’assemblage chez Latour est une notion qui permet de déployer une sociologie symétrique au sens où toutes les entités en présence sont soumises au même traitement analytique : elles sont a priori dotées des mêmes potentialités de contribution à la composition des assemblages sociotechniques (« analyse à plat », pas d’échelles de pouvoirs ou de capacités d’action distribuées a priori par l’analyse). L’analyse met donc l’accent sur la dimension hétérogène de ces collectifs : humains et non humains en sont a priori actants7. S’ils peuvent acquérir une part active (« médiateurs ») ou bien être rendus passifs (« intermédiaires ») dans ces processus, la constitution et la distribution de la capacité collective à contribuer à l’action (« agence », l’action n’étant ici que la résultante, la part perceptible de cette agence collective) est l’objet de l’analyse. En découle le statut second du sujet de l’action dans cette analyse. Ce dernier étant en quelque sorte une émanation de la composition des assemblages qui sont le lieu de constitution de l’agence collective. La portée politique de l’analyse réside dans sa capacité à déployer une enquête sociologique qui rende compte des processus de constitution et d’allocation de cette capacité d’action, tout en élargissant l’analyse vers un « matérialisme relationnel » intégrant le rôle des artefacts dans les processus de composition sociale (e.g. Cupples, 2011 ; Bennet, 2005).
14L’agencement proposé par Michel Callon reprend une grande partie de ces dimensions mais met l’accent sur l’importance des dispositifs matériels, voire de leur spatialité, dans les mécanismes de constitution de l’acteur individué et agissant. Cette focale étant l’analyse vers une distinction entre des processus qui constituent cet acteur en l’équipant de manière à ce qu’il réponde à un cadrage et un environnement en place – la logique « prothétique » – et des processus qui visent selon une logique d’« habilitation » à modifier le cadrage et/ou l’environnement en place de manière à permettre aux actants de choisir et de constituer les modes d’actions dans lesquels ils s’engagent. Cette perspective ouvre notamment à des analyses qui éclairent la genèse et la distribution de la capacité d’action au fil des processus de constitution de la coordination de marché, par lesquels les attributs des biens se trouvent stabilisés, traduits sous la forme de caractéristiques de produits capables d’être engagés dans des processus successifs de qualification (qualité) et de valuation qui en stabilisent et en entretiennent un prix partagé.
15Manuel De Landa puise quant à lui dans l’agencement Deleuzien afin de développer une théorie (ontologie) du social, fondée sur la notion d’assemblage, ambitionnant un dépassement des réductionnismes (individualisme versus holisme). L’assemblage est une notion multi-scalaire qui permet de décrire le social à différentes échelles et dans ses processus de constitution, allant de l’individuation à la composition des organisations ou des États. Ici encore l’assemblage est hétérogène, mais au sens où il croise des modes de causalités multiples et imbriqués, des dynamiques analogues à des comportements de phases (causalités linéaires) et des dynamiques non-linéaires de rupture de phases. L’accent est mis sur ce que De Landa appelle l’extériorité des relations : les parties engagées dans un assemblage ne sont pas définies par les relations qu’elles y tissent mais conservent une capacité à se réassembler.
16Ces approches par les processus ont le grand avantage de permettre de suivre les processus d’individuation et d’assemblage autour d’objets techniques tout en rendant compte de la constitution et de la distribution des capacités d’action. Elles semblent donc bien plus à même de suivre et de rendre compte des enjeux de la transition énergétique. Reste que l’approche développée par De Landa apparaît très centrée sur un souci de représentation, presque de modélisation, du social, à la différence des deux autres approches (Callon, Latour) qui sont quant à elles centrées sur les processus même de composition des individus ou des collectifs agissants. Nous nous proposons de nous inspirer de ces approches afin de suivre l’émergence d’enjeux et de collectifs énergétiques dans les Crêtes Pré-ardennaises.
Épreuves de transition dans les Crêtes Pré-Ardennaises
Une chronologie
Pays, Communauté de communes : l’énergie comme projet de territoire (1999-2007)
17L’historique du territoire d’étude des Crêtes Pré-ardennaises peut très schématiquement se résumer comme suit. En 1985, plus de 90 communes rurales localisées entre Charleville Mézières et Reims, se constituent en association de communes afin de prendre en mains leur développement territorial. En 1995, ce même ensemble se structure en Communauté de Communes : la Communauté de Communes des Crêtes Pré-Ardennaises (CCPA). Les décentralisations successives, et notamment la proposition de constituer des Pays dans le cadre de la Loi « Voynet » (1999), sont saisies comme les opportunités d’engager une réflexion collective sur un projet de territoire. La démarche de pays (2000-2001) est concertée au sein d’« ateliers du développement ». Elle fait rapidement émerger un bouillonnement de projets. Le périmètre du Pays est calé sur la CCPA, ce qui permet de faire résonner les démarches. Le développement des énergies renouvelables et notamment de l’éolien, qui bénéficie depuis 2001 de tarifs préférentiels d’achat en France, est au cœur de ces projets. Le territoire CCPA devient, dès 2003-2004, un territoire pilote de l’éolien pour l’Ademe : son schéma éolien, élaboré dès 2003, inspire le dispositif de Zone de développement éolien adopté au niveau national en 2005. En 2003-2004, la CCPA fait aussi partie d’un groupe de huit territoires expérimentaux pour les Opérations Programmées d’Améliorations Thermique et Énergétique de Bâtiments (OPATB). En 2007-2009, la Région développe un PCER et entreprend de soutenir l’élaboration d’un Plan Climat Énergie Territorial (PCET). La CCPA souscrit à cette démarche et lance en 2010 une étude de préfiguration. En 2012, elle décide de mettre en œuvre un PCET à l’échelle des Crêtes.
L’Agence locale de l’énergie, trait d’union participatif et alternatif (2008–2012)
18En 2001, l’Agence locale de l’énergie (ALE08) est créée avec le soutien de l’Union européenne et des collectivités locales (région et département). La CCPA en est l’un des membres fondateurs. La création de l’ALE est un facteur de renforcement et d’essaimage des enjeux liés à l’énergie et de la démarche participative instillée à l’occasion des ateliers du développement. L’ALE acquiert rapidement une solide expertise technique, notamment sur les questions d’audit énergétique. Alors que l’élan créatif et participatif de la démarche de Pays s’essouffle au milieu de la décennie 2000, l’ALE acquiert un rôle d’interface et de facilitateur dans le traitement des enjeux énergétiques. Sa démarche locale et participative la conduit à être partie prenante de la création d’Énergie Partagée sur la période 2008-2011. D’abord structure associative puis fonds d’investissement coopératif (société commerciale d’intérêt collectif – SCIC) à partir de 2009, Énergie Partagée a pour vocation de mettre localement en partage les projets éoliens et d’autoriser une prise de participation financière locale. Afin de pouvoir communiquer et faire des appels de fonds, Énergie Partagée doit obtenir un visa de l’Autorité des marchés financiers (AMF). La démarche est très coûteuse et exige une grande technicité. L’Ademe soutient ce projet tout en suggérant de lui donner une ampleur nationale. Dès 2012, Énergie Partagée fait un appel de fonds et récolte près de trois millions d’euros, ce qui lui permet d’envisager l’accompagnement d’une vingtaine de projets EnR citoyens en France. Cette initiative est soutenue par un réseau associatif étendu (e.g. Hespul, le CLER, la Nef, Inddigo, Vent d’Houyet, Éoliennes en Pays de Vilaine, Enercoop, Confluences, Les Amis d’Enercoop…) : le « mouvement Énergie Partagée » est né. Dans le même temps, en 2009-2010, l’ALE08 met à profit ses réseaux pour créer une structure coopérative ambitionnant de devenir acteur du marché de d’électricité. « Enercoop Ardennes Champagne » est une déclinaison territoriale puis régionale d’Enercoop nationale.
Relancer une dynamique qui s’essouffle : le Plan Climat Énergie Territorial (2012-2014)
19À partir de 2007, alors que l’élan créatif de la démarche de Pays s’essouffle, les relations entre la CCPA et le Conseil de Développement (Pays) se distendent. Une partie des membres de ce dernier le quittent. Ils fondent une association qui tente de relancer une dynamique de développement local participatif au moyen de la création de filières locales. L’expérience, faute de visée bien définie, fera bientôt long feu : ses moyens se disperseront sur des projets trop nombreux. Dans le même temps la CCPA s’interroge sur les raisons de l’épuisement de la démarche de pays. Conseillée par l’association des maires à laquelle elle a commandité un audit, elle se lance progressivement dans une démarche de Plan Climat, supposée relancer une dynamique collective, la positionner comme initiateur de projet et lui permettre d’attirer à terme des financements européens. En 2011, une étude de profil territorial d’émissions de GES est réalisée et une réflexion est engagée en direction d’un Agenda 21 ou d’un PCET. À l’automne 2012, la démarche PCET est retenue ; elle pourra éventuellement constituer une base pour l’élaboration ultérieure d’un Agenda 21. Une phase de concertation est attendue pour le printemps 2013. Au dire de l’Agence Locale de l’Énergie, le PCET devrait permettre de redéployer la dynamique énergétique en place en la territorialisant afin de prendre en compte l’enjeu climatique (circuits courts agricoles, autres GES…). Elle devrait permettre de toucher plus profondément certains secteurs sur lesquels des réflexions avaient été engagées (e.g. agriculture, consommations d’eau chaude dans les laiteries) et d’aborder des secteurs jusqu’ici non concernés par les actions locales dans le domaine de l’énergie. Par ailleurs, le plan climat devrait inciter à une logique de quantification au-delà de la définition d’actions programmatiques.
20Cette brève chronologie ne fait que parcourir la surface d’un processus aux linéaments profonds et complexes. Elle n’en suggère pas moins que, pour ce qui est du domaine de l’énergie, la dynamique innovante qui caractérise ce processus est sous-tendue par l’assemblage – et le désassemblage / recomposition – de collectifs qui tentent de se donner les moyens de faire exister des options sociotechniques nouvelles : projets éoliens et EnR citoyens ; modèle de kWh territorialisé, social et solidaire. L’émergence de ces assemblages est jalonnée de succès et d’échecs. L’ALE est considérée par plusieurs acteurs interrogés comme une réussite de la période des ateliers du développement qui ont contribué à son émergence. Au contraire, l’épuisement du conseil de développement (puis de l’association qui en émane), porteur d’une dynamique de projets jugée exceptionnelle durant plusieurs années, constitue une profonde source d’interrogation pour ceux qui y furent impliqués. Témoignages, archives et chronologie attestent ainsi de processus dont les enjeux se déplacent à mesure que des épreuves surviennent dans leur décours, sont surmontées ou non. Cette « séquentialité »8 des processus est à la base de l’émergence et de l’évolution des assemblages sociotechniques qui nous intéressent. Les séquences qui en résultent expriment les prises que peuvent se donner les acteurs de ces processus pour agir et développer des projets toujours redéfinis au fil de ces déplacements séquentiels. Nous proposons d’examiner plus en détails cette séquentialité de l’action en considérant l’émergence progressive d’Énergie Partagée et d’Enercoop Ardennes Champagne.
La transition en train de se faire, sérier les épreuves
Émergence d’un éolien territorialisé
21Le processus de réflexion qui aboutit à un éolien « social et solidaire » dans les Crêtes Pré-Ardennaises a été indirect. La réflexion sur l’éolien a été initiée en 2002 sur le canton d’Attigny, dans le cadre de la démarche de pays. Elle visait un exercice de hiérarchisation de sites jugés favorables au développement éolien. Ce travail réalisé avec l’aide d’un bureau d’études fut l’occasion de constituer un premier collectif : un groupe de pilotage. En octobre 2004, le Conseil de Communauté valide ce travail et approuve ce faisant les principes de concertation et de répartition des richesses qui l’accompagnent : favoriser l’investissement local (particuliers, agriculteurs…) ; protocole foncier permettant le partage des loyers issus des parcs éoliens entre propriétaires fonciers, exploitants et associations foncières ; mise en place d’une taxe professionnelle (TP) de zone9… Un comité éolien, nouveau collectif, est aussi constitué afin d’opérationnaliser ces principes et d’étendre l’approche à l’ensemble du territoire de la communauté de communes. Le travail aboutira en décembre 2006 (CCPA, 2006). À ce stade, si l’ALE existe déjà, les moyens d’opérationnalisation des principes de concertation et de partage des richesses qui ont été adoptés ne sont pas définis.
De la « découverte » de l’outil coopératif à la création d’Enercoop Champagne Ardennes
22Le portage initialement envisagé, la Société d’économie mixte (SEM) au travers de la communauté de communes, ne convient pas à cette dernière. En dépit de son approbation des principes, les élus ne souhaitent pas s’engager dans la démarche au travers d’un statut imposant un portage majoritaire par des personnes. Le recours à la coopérative comme format d’organisation collective obéit ainsi à une démarche de type pragmatique : il résout le problème soulevé par la SEM mais confère aussi une existence à l’engagement associatif sur le sujet au travers du conseil de développement :
« … malgré tout, ces sujets-là, ils étaient très portés par les acteurs associatifs, par le Pays […] c’était pas la CC forcément qui portait ça toute seule10. »
23Le problème à résoudre conduit à une exploration qui oriente vers la SCIC, la société coopérative d’intérêt collectif. Ce statut est découvert à cette occasion. Il s’impose à l’ALE comme une solution idéale, à la fois souple, ouverte, et démocratique/participative :
« Alors moi j’ai découvert ça en même temps, c’est un outil exceptionnel [rire]. Quand on veut faire justement du citoyen, du participatif, alors c’est une structure coopérative, donc un homme une voix, donc déconnexion du capital. C’est l’ouverture à tous types d’investisseurs, c’est-à-dire que aussi bien personne physique que personne morale, et publique et privée. Donc les communes, les CC, etc. peuvent investir dans des SCIC ; mais contrairement à la SEM où c’est obligé qu’elles soient majoritaires, là c’est plafonné, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent pas être à plus de 20 % dans le capital de la SCIC11. »
24Au niveau local, la SIC est plus qu’un simple statut. Son montage force à expliciter les principes et le projet qui président à sa création. Inscrits, ces derniers deviennent des points de référence pour de futures actions. La SCIC est donc, au-delà du projet en cours, une matrice d’inscription, de concrétisation et de mise en partage de valeurs :
« […] ce qui s’est passé, dans la Communauté de communes des Crêtes, c’est qu’on a dit : “On va créer une société d’investissement dans les énergies renouvelables, on a travaillé, maintenant on va faire une SCIC. — Ouais, c’est génial, super, ça me convient bien”. Et puis de fil en aiguille, on fait une SCIC pour investir dans les moyens de production, mais pourquoi on fait ça ? Parce qu’on veut être dans la logique : “on a des ressources, on a des besoins, on exploite ces ressources pour nos besoins”. Donc il faut qu’on puisse vendre nos productions aux consommateurs du territoire. Donc ça a été mis dans l’objet12. »
25Ainsi, mises en partage et inscrites, ces valeurs acquièrent une capacité d’expression renouvelée au fil des objets techniques et des réseaux, renouvelant par là même les collectifs qui les ont portées à existence :
« Alors, au départ, on avait poussé… enfin, on avait rien poussé du tout, vu que la dynamique, c’était l’éolien. Alors l’éolien, ça fait quoi ? Ça fait de l’électricité. Donc on a mis dans les statuts que la SCIC avait aussi dans ses projets, dans ses perspectives, de vendre directement à des consommateurs ses productions. Donc vendre de la chaleur et de l’électricité. À partir du moment où vous créez une SCIC qui vend de l’électricité à des consommateurs, issue de producteurs dans lesquels elle a… voilà, enfin, de production locale, etc., bah, finalement, vous ré-inventez Enercoop national, en local13. »
26Explicitation, inscription, partage et mise en réseau de ces valeurs mettent, en 2008, l’ALE en capacité de convaincre les élus de créer la première coopérative locale de vente d’électricité renouvelable :
« […] alors moi j’expliquais ça à nos élus locaux et Enercoop national ils connaissaient pas hein ! Eux ils avançaient avec la logique et tout, enfin voilà, on travaillait, c’était… on prend un bout de la ficelle de la pelote, on débobine et puis papapapapa… on arrive au bout. Alors, ça, ça a été difficile. C’est-à-dire que je leur ai… je leur ai fait comprendre qu’on était en train de créer la première coopérative locale d’Enercoop national. Et alors là, ils disent : Bah, nous… enfin… nous on vend pas de l’électricité. Et je dis : mais si, vous allez le faire ! Vous allez le faire, c’est dans l’objet, c’est dans notre projet, etc. Et de fil en aiguille, on s’est rendu compte que c’était ça qu’on était en train de faire. Et on l’a marqué en s’appelant Enercoop. »
27D’abord à vocation territoriale (SCIC Enercoop Ardennes, créée en 2009), cette coopérative de vente d’électricité produite par les projets éoliens de la CCPA, est dotée en 2010, par son Conseil d’Administration, d’un rayonnement régional. La dénomination Enercoop Ardennes-Champagne emporte l’adhésion des administrateurs, désireux de conserver la « marque de naissance » de la SCIC14.
De l’association au fonds d’investissement « Énergie partagée »
28Selon des logiques analogues, déplaçant les assemblages au fil de leur problématisation/résolution, la dynamique de structuration d’Enercoop locale va impulser la création d’« Énergie partagée », afin de contribuer à la décentralisation de la production et de la consommation d’énergie. Les Crêtes prennent pour cela modèle sur Ecopower en Belgique :
« […] dans les statuts d’Enercoop national, il est dit […] qu’il y avait une perspective d’essaimage du modèle Enercoop et que quand Enercoop aurait une taille suffisante, l’idée ce serait de… bah, voilà de décentraliser tout ça. On le voit bien, d’ailleurs, c’est une réflexion menée par Ecopower hein, les collègues de Belgique là, qui sont une grosse structure coopérative de fourniture d’électricité, ils sont en train de se dire qu’ils sont trop nombreux, trop gros et ils se demandent s’il vont pas sépa… enfin, scinder un peu tout ça quoi15. »
29Destinée à soutenir les projets participatifs et coopératifs de production d’électricité renouvelables, l’association Énergie partagée se heurte rapidement à l’impossibilité légale, en France, de communiquer sur les investissements concernés en l’absence de visa de l’Autorité des marchés financiers. Grâce au soutien financier de l’Ademe, l’association entreprend la procédure d’agrément par l’AMF, qu’elle obtient en 2011. Le fonds d’investissement « Énergie partagée » est créé. Il a vocation nationale, pour des raisons de coût et sur demande de l’Ademe :
« […] en 2008 un programme Ademe nous avait permis de créer la coopérative locale et à un moment donné l’Ademe a dit : “bon on butte sur cette histoire de communication, cet agrément coûte super cher, organisez-vous et on cofinancera cette démarche de demande d’agrément, mais on ne va pas financer une demande d’agrément pour chaque projet… trouvez une solution et on vous finance une fois pour toutes…” »
30À la confluence de ces deux organisations, elles-mêmes parties prenantes d’un réseau d’acteurs plus vaste à l’échelle française et européenne, c’est bien la création d’un kilowattheure (kWh) partagé qui se joue. Un kWh partagé qui doit également présenter la garantie de son origine renouvelable pour pouvoir se poser en réelle alternative au kWh EDF.
31Ainsi, à chaque blocage rencontré par les acteurs de l’ALE dans leur démarche participative (en matière de renouvelables), c’est aussi une clarification des enjeux et des objectifs qui s’opère. Elle force l’explicitation, l’inscription et la mise en partage de valeurs et de qualités, qui en se déployant derechef relancent le processus. Dans le même temps, chacune des solutions retenues face aux blocages constitue une matrice qui recompose la capacité d’expression des assemblages en place et l’espace de leurs possibles. C’est en ce sens que ces épreuves successives, de par leur déroulement et leur dénouement, participent d’une épreuve de transition dont ni les parties prenantes ni l’issue ne sont jamais prédéterminées, et dont la trajectoire se caractérise par sa séquentialité.
32Cette épreuve de transition prend particulièrement sens si l’on considère les chaînes de qualités et de valeurs élaborées au gré des séquences d’actions qui scandent les processus observés.
Épreuves de transition
« Est réel ce qui résiste dans l’épreuve »
Bruno Latour
33Par épreuve de transition, nous désignons ici un processus d’enquête, d’exploration et d’expérimentation collective, adossé à une configuration spatiale et temporelle particulière, dans laquelle la problématisation des enjeux de transition énergétique peut être portée par un assemblage spécifique, et porteuse de nouveaux assemblages.
34L’épreuve de transition est donc, d’une part, rendue possible par des assemblages qui offrent aux collectifs des prises pour l’action et la problématisation des enjeux de transition énergétique. Elle se donne ainsi à analyser comme un travail de (re)composition des qualités et des valeurs, qui préside à la définition d’un certain mode d’existence de la transition énergétique. D’autre part, ce format est pris dans des visées de projet en constante redéfinition parce qu’elles sont sujettes à déplacements au fil des épreuves. Les épreuves permettent donc de retracer de manière processuelle les recompositions de moyen ou long terme, au travers des agencements/assemblages qui font exister cette transition énergétique en train de se faire.
35L’épreuve de transition, n’obéit donc que partiellement aux définitions classiques d’épreuve (pour une bonne synthèse, voir Linhardt et Moreau de Bellaing, 2005). Cette notion nous paraît cependant heuristique en ce qu’elle permet d’articuler et de retracer de manière processuelle une logique d’action en situation s’inscrivant dans la durée. En s’inscrivant ainsi dans la durée, l’épreuve de transition équivaut à tester et faire la preuve de la capacité à durer d’un mode d’existence émergent de transition.
36Analyser une épreuve de transition implique par conséquent de reconstituer la série des épreuves par lesquelles une proposition de transition est concrétisée dans et par l’agencement ou l’assemblage étudié. Cette série d’épreuves reconfigure et réactualise, par relances, reprises et strates successives, ledit agencement, ne serait-ce qu’en termes d’actants et d’acteurs concernés. Le mode de transition proposé se dote progressivement d’une consistance supplémentaire, qui contribue à le durcir, à le rendre robuste, endurant et opératoire.
37Spécifiques au cas, ces épreuves successives qui façonnent l’épreuve de transition revêtent le plus souvent des formes « classiques » d’épreuves telles que décrites par la sociologie pragmatique (Boltanski, 1990, Boltanski et Thévenot, 1991 ; Callon, 1984 ; Latour, 1995, 2001). Dans le cas de la CCPA, l’outil coopératif conjugue ainsi des épreuves de type politique et économique, engageant d’un côté légitimité et citoyenneté « démocratique » (un coopérateur = une voix) et, de l’autre, « ré-humanisation » et relocalisation de l’économie via des dispositifs proches de l’économie sociale et solidaire.
38L’approche par la notion d’épreuve de transition offre dès lors un outil analytique pour comprendre des transitions énergétiques en train de se faire, c’est-à-dire qui prennent place dans des configurations spatiales et temporelles offrant une prise pour l’action et la problématisation ; qui sont portées par des agencements ou assemblages en constant remaniement ; et qui façonnent des modes d’existence de la transition énergétique dont les déplacements construisent une possibilité de durée.
39Bien loin d’une version « téléologique », l’épreuve de transition se conçoit ainsi davantage sur un mode pragmatique, comme un travail de composition à la fois situé et séquencé d’un mode d’existence de la transition énergétique.
Conclusion
40Le cas des Crêtes Pré-Ardennaises, encore en cours d’étude, nous est rapidement apparu comme un cas très innovant, à la fois sur le plan local et en termes de portée nationale. À plusieurs reprises, au cours du passé, les processus initiés sur ce territoire se sont en effet avérés constituer des propositions, des options voire des alternatives énergétiques cohérentes et opératoires, portées par des collectifs et des agencements multi-acteurs et multi-réseaux, et dont les résultats ont parfois été repris et adaptés à l’échelle nationale par les acteurs institutionnels tels que l’Ademe ou des organisations militantes (Enercoop local).
41Il constitue par ailleurs un cas particulièrement éclairant pour saisir les modalités d ‘ émergence in situ d’une proposition de transition énergétique et du travail de composition collectif dont elle fait pas à pas l’objet. Saisir cette proposition de transition appelle des cadres d’analyse mettant l’accent sur l’émergence de collectifs et d’entités au fil de cette transition, plutôt que sur des cadres considérant que les acteurs et relations à la base de la transition sont en place.
42L’analyse adoptée met en évidence la dimension située et séquentielle des processus de transition. Elle montre que la transition n’est pas le passage d’un état A à un état B anticipé et pris dans la ligne de mire d’une logique d’action stabilisée. Les visées, les moyens et les collectifs de la transition se composent et se recomposent au cours d’un processus de transition marqué par de multiples inflexions liées à la configuration spatio-temporelle, politique et économique du territoire, ainsi qu’à l’action publique en matière de politique énergétique à l’échelle nationale. Ainsi, la transition énergétique n’est jamais un « déjà-donné-là » : elle est au contraire travaillée par des agencements en constant remaniement au gré des séquences d’action qui jalonnent les processus étudiés, et des épreuves qui les caractérisent.
43Pour saisir cette séquentialité des processus de transition et rendre compte de ce processus de construction de la durée de propositions de transition, la notion d’épreuve de transition s’avère particulièrement heuristique en ce qu’elle confère une véritable traçabilité aux processus, sans en aplanir les aspérités et en rendant compte des séries d’épreuves au principe d’une transition en train de se faire.
Notes de bas de page
1 Nous proposons d’utiliser ce terme et cet acronyme pour désigner à la fois les énergies renouvelables, la Capture et le Stockage du Carbone et les enjeux de maîtrise de la demande.
2 Le terme « proposition » est employé ici dans un sens proche de celui de Bruno Latour (1999).
3 Ou d’ouverture. Si l’on peut penser qu’il y a un grand intérêt à ouvrir les possibles, il peut aussi être important de stabiliser certaines options notamment s’il s’agit de réduire les émissions de GES à un terme proche.
4 Les principaux courants en sont : le « Social Construction of Technology (SCOT) » [Bijker, Collins, Law, Pickering, Lynch] perspective proche de celle de la construction du fait scientifique ; le « Social Shaping of Technology (SST) » [Mc Kenzie, Hard, Hughes] montrant la profonde co-construction du social et du technique ; le « Constructive Technology Assessment (CTA) » [Rip, Schot] consistant en une pratique, équipée d’outils de prévision des impacts technologiques, visant à impliquer les parties concernées par ces impacts dans l’évaluation technologique ; et la sociologie de la traduction sur laquelle nous revenons plus bas dans ce chapitre [Akrich, Callon, Latour].
5 Preuve en est des essais critiques sur cette période vis-à-vis de cette notion de trajectoire, comme par exemple l’introduction au chapitre 1 du livre de Bijker & Law intitulée « Do Technologies have trajectories ? » (Bijker & Law, 1992 : 17).
6 La terminologie nous semble secondaire ici, du fait des enjeux de traduction. La notion d’« assemblage » en anglais est en effet parfois traduite en français par « agencement » (De Landa, 2006 et 2009), celle d’« assemblage » en français par le même terme en anglais (Latour, 2005 et 2006).
7 Le terme est proposé par Latour pour englober humains et non humains dans l’analyse.
8 Le terme « séquençage » ne nous semble pas convenir ici, la dynamique séquentielle ne résultant pas ici d’une intentionnalité des acteurs.
9 « Autre avancée majeure, pour la première fois en France, semble-t-il, une Communauté de Communes à fiscalité additionnelle a décidé de jouer la carte de la solidarité intercommunale en répartissant les retombées financières de la taxe professionnelle issue des futurs parcs éoliens.
En effet, le Conseil Communautaire a voté la mise en place d’une Taxe Professionnelle de Zone (TPZ) pour tout parc éolien qui se développerait sur le territoire des 93 communes » (CCPA, 2006 : 15).
10 ALE, entretien août 2012.
11 Ibid.
12 Ibid.
13 Ibid.
14 http ://www.enercoop-ardennes-champagne.fr/index.php ?option=com_content&view=article&id=49&Itemid=73.
15 ALE, entretien août 2012.
Auteurs
Socio-économiste, directeur de recherche au Centre International de Recherche sur l’Environnement et le Développement (CIRED – CNRS). Ses recherches ont porté sur les controverses environnementales (taxation carbone énergie, écolabels de produits) ainsi que sur les politiques de l’environnement, de l’énergie et du paysage. Elles se concentrent aujourd’hui sur les enjeux sociaux, institutionnels et territoriaux de la transition énergétique De 2007 à 2011, Alain Nadaï a contribué à la rédaction du rapport du GIEC sur les énergies renouvelables (SRREN).
Politiste et sociologue des sciences et techniques au Laboratoire interdisciplinaire des énergies de demain (LIED – IED) de l’Université Paris Diderot. Ses recherches portent sur les normes environnementales, la problématisation des enjeux énergétiques et climatiques, les politiques de mise en marché des renouvelables, la domestication des énergies nouvelles et sur les controverses énergético-climatiques. Elle travaille actuellement à l’élaboration de modélisations interdisciplinaires (physique, géomatiques) basées sur une ethnographie des pratiques. Ouvrage récent : Les grands textes fondateurs de l’écologie, chez Flammarion en 2013.
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