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    Plan détaillé Texte intégral Le rôle des écrits dans les initiatives de lobbyingLe cas de la « charte de la diversité » Les chartes sont des « discours d’engagement » But de l’ouvragePour écrire, il faut discuter : une approche anthropologique de la communicationThèse défendue

    La fabrique de l'éthique

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Introduction

    p. 13-21

    Texte intégral Le rôle des écrits dans les initiatives de lobbyingLe cas de la « charte de la diversité » Les chartes sont des « discours d’engagement » But de l’ouvragePour écrire, il faut discuter : une approche anthropologique de la communicationThèse défendue

    Texte intégral

    Le rôle des écrits dans les initiatives de lobbying

    1Pour faire valoir leur point de vue et peser sur les mécanismes de cohésion et de régulation sociale, les chefs d’entreprises ont tendance à se regrouper, à produire des textes de diverses natures : recommandations, rapports publics, déclarations d’engagements ou encore des chartes et des codes éthiques. Par ces divers écrits, les chefs d’entreprises entendent démontrer leur capacité à s’autosaisir d’une question sociale donnée, mais ils peuvent aussi chercher à influencer les gouvernants, de manière à ce que ces derniers accomplissent certains dispositifs réglementaires favorables pour les entreprises.

    2Une organisation de lobbying d’entreprises privées est une association volontaire d’acteurs d’entreprises qui produisent des études à caractère opérationnel et génèrent des idées, des analyses, des propositions et des recommandations sur des problèmes politiques. Leurs activités visent principalement à l’élaboration de diagnostics opérationnels sur un problème politique donné qui les concernent, d’essais, de notes de synthèses, d’organisations de réunions d’information formelles ou informelles, de conférences et de colloques auxquels participent les décideurs politiques (Wever De Gann, Desmoulins, 2005).

    3Grâce à ces diagnostics et recommandations, les acteurs attribuent à un problème politique une causalité en cohérence avec les intérêts des entreprises. Ces divers textes produits par les acteurs suggèrent une nouvelle vision théorique du problème considéré en s’appuyant sur une critique de la façon dont celui-ci a été jusqu’à présent traité. Grâce à leurs initiatives, les acteurs d’entreprises objectivent une question sociale et cherchent à l’inscrire dans l’agenda politique. Dans le cas de la lutte contre les discriminations, la charte de la diversité est un « instrument de lobbying ».

    Le cas de la « charte de la diversité »

    4Le projet de cet ouvrage est de retracer la genèse d’une action de lobbying menée par une trentaine de dirigeants d’entreprises du CAC 40 sur le sujet de la promotion de la diversité. Cette initiative a consisté en la production d’une « charte de la diversité ». Cette charte, initiée par Yazid Sabeg et Laurence Méhaignerie sous les commandes de Claude Bébéar, est un document dans lequel les chefs d’entreprises déclarent s’engager à promouvoir la diversité ethnique en leur sein, et donc en filigrane, à combattre les formes de discriminations qui pourraient s’y développer. Cette charte a été signée pour la première fois par trente-cinq dirigeants du CAC40 en octobre 2004. En mai 2008, près de deux mille entreprises l’avaient signée.

    5Cette charte peut être considérée, au départ, comme une opération de lobbying menée par les chefs d’entreprises privées (Sabeg, Bébéar, Méhaignerie), dans la mesure où les argumentaires qui l’accompagnaient, qu’il s’agisse des rapports publics qui recommandaient sa production (Bébéar, 2004, Sabeg, Méhaignerie, 2004) ou des écrits spécifiques qui justifiaient son bien fondé (argumentaires, dossiers de presse, etc.), contenaient un certain nombre de critiques de l’action publique en la matière. Dans leurs rapports, Yazid Sabeg, Laurence Méhaignerie et Claude Bébéar dénonçaient notamment la rigidité de la loi de 1978 sur l’informatique et les libertés en tant qu’elle démotivait, selon eux, les entreprises à s’engager sur ce sujet, les empêchant ainsi d’améliorer leurs pratiques. Ces trois personnalités militaient en faveur d’une autorisation de l’établissement de statistiques ethniques au sein des entreprises, alors que cette mesure est à l’heure actuelle interdite par la loi. Le rapport de Yazid Sabeg et Laurence Méhagnerie, auteurs de la charte, contenait même un plaidoyer en faveur de la discrimination positive, plaidoyer qui, devant la résistance des entreprises engagées dans la négociation du texte sur ce sujet, fut progressivement abandonné.

    6Ainsi, au départ, cette charte était un moyen pour leurs auteurs (Yazid Sabeg, Laurence Méhaignerie et Claude Bébéar) de faire entendre une voix publique qu’ils estimaient négligée. Il s’agit là de la dimension politique de la charte : en produisant et en faisant signer 35 dirigeants d’entreprises du CAC 40 à la vue de tous, les chefs d’entreprises visaient à transformer un ensemble de pratiques d’entreprises en un outil d’affirmation collective (Loneux, 2007). La charte pouvait donc s’entendre comme l’incarnation (Cooren, 2010), à un moment donné, d’une cause à défendre, une requête adressée aux gouvernants. En d’autres termes, produire une telle charte revenait donc à emprunter, pour un temps, non seulement une ressource disponible, mais aussi un genre particulier (Miller, 1984, Orlikowski, 1994), dans le répertoire commun des formes d’expression publique (Roux, 1997 : 130). C’est ensuite l’incarner, le matérialiser en lui donnant un champ d’application et une certaine publicité. Le défi majeur auquel étaient confrontés les trois acteurs à l’origine de la charte était de constituer un mouvement massif d’entreprises autour de cette requête. Autrement dit, ils avaient besoin d’être soutenus par un grand nombre d’entreprises afin que leur requête adressée aux gouvernants puisse être reconnue comme légitime. Par exemple, si deux mille entreprises signaient la charte, il était fort probable qu’il n’y avait pas deux mille cas particuliers, mais que la réglementation générale était inadaptée et qu’il fallait la réexaminer. C’était donc la puissance du nombre qui importait, comme pour montrer qu’ils faisaient masse.

    7Une des raisons pour lesquelles nous choisissons d’étudier ce cas précis réside dans le fait que cette charte a joué un rôle important dans les réflexions menées dans le cadre du projet de loi sur l'immigration (septembre 2008). Ce texte envisageait de lever l'interdiction de recueillir des données relatives à l'origine raciale ou ethnique dans le cadre d'études sur « la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l'intégration ». Cet amendement s'inspirait directement d'une recommandation émise en mai 2007 par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), qui, à l'issue d'une série d'auditions, a proposé de modifier la loi de 1978 sur l'informatique et les libertés afin de faciliter les recherches sur la mesure de la diversité des origines des personnes, les discriminations et l'intégration, tout en protégeant les données personnelles. La CNIL écartait l'idée d'une classification ethno-raciale dans toute la statistique publique, constatant qu'il n'y avait pas de consensus sur la question. Elle estimait cependant que, dans le cadre de recherches publiques, des enquêtes sur le « ressenti des discriminations, incluant le recueil des données sur l'apparence physique des personnes », pourraient être réalisées, dès lors que le recueil de telles données serait fondé sur le volontariat et l'anonymat.

    8Par cette charte et les argumentaires qui l’accompagnent, les chefs d’entreprises s’allient pour objectiver une question sociale en lui assignant une causalité en cohérence avec leurs intérêts pratiques, leurs valeurs et leur vision du monde (Muller, Surel, 1998). Ils vont alors se rapprocher, produire une intelligibilité commune du phénomène, engager des ressources dans le but d’accéder aux agendas médiatiques et politiques pour y faire dominer leur point de vue. Il s’agit donc d’une forme de « militantisme entrepreneurial » (Loneux ; 2001) dont le but est d’affecter les mécanismes de régulation et de cohésion sociale.

    Les chartes sont des « discours d’engagement »

    9Les chartes sont des documents écrits volontaires. Elles cristallisent un effort continu de vigilance des acteurs d’entreprises, qui s’alertent sur certains problèmes sociaux ou environnementaux, et qui positionnent l’entreprise comme le sujet responsable de ses actes. De tels documents expriment donc des devoirs que s’attribue l’entreprise pour elle-même sans pour autant s’inscrire dans un régime juridique reconnu. Un discours d’engagement est donc une représentation écrite, diplomatique et politique de l’intention des acteurs.

    10Le terme « d’engagement » indique que ces discours sont des « formes d’action ». Ils ont la particularité de faire irruption dans des espaces institutionnels hybrides, mal répertoriés, dans des « no man’s land juridiques ». Ils sont une forme d’action publique qui a de particulier le fait qu’ils instituent l’espace public comme un « espace d’engagement » dans une parole donnée en public (expression empruntée à Jacques Roux ; 1997 : 112). À l’instar de ce que suggère Jacques Roux, le terme « d’engagement » n’est pas à comprendre comme une forme d’action qui impliquerait une relation de « soi à soi », du chef d’entreprise avec lui-même, comme la psychologie sociale le suggère. L’idée est plutôt de considérer l’initiative de produire une charte comme une action consistant à emprunter pour un temps une ressource disponible dans le répertoire commun des formes d’expression publique (Roux, 1997 : 130). Ainsi, un discours d’engagement, comme une charte, est un dispositif discursif et interactionnel de mobilisation, en tant qu’il engage des personnes (en l’occurrence, des chefs d’entreprises). Par « dispositif de mobilisation », il faut comprendre que le but est d’inciter les acteurs économiques et politiques à l’action.

    But de l’ouvrage

    11Au-delà du cas spécifique de la charte de la diversité, cet ouvrage est traversé par trois interrogations principales : la première, posée d’une certaine manière en toile de fond, concerne les modalités par lesquelles des chefs d’entreprises s’organisent pour produire des discours d’engagements en matière de responsabilité sociale (chartes, codes de conduite). La seconde, porte sur les effets organisationnels entraînés par la diffusion de tels discours. De manière concrète, il s’agit de saisir les actes produits par les acteurs pour répondre de leurs engagements, la façon dont ils sont tenus de s’organiser en conséquence pour accomplir des « prestations » dont ils connaissent la nature générale au moment de l’énonciation des engagements, mais dont ils ne connaissent pas le détail. Enfin, la troisième fait surgir, comme corollaire nécessaire aux deux premières, les enjeux théoriques et méthodologiques d’une étude détaillée des écrits et des processus d’écriture pour saisir les dynamiques sociales qui se jouent dans la fabrication des discours d’engagement.

    12Comment caractériser la nature de ces discours d’engagement ? Comment les chefs d’entreprise s’organisent-ils concrètement pour façonner des chartes et codes de conduite ? Dans quelle mesure l’écrit et sa négociation participent à façonner les collectifs ? Quels sont les rapports sociaux qui se jouent dans la production et la diffusion de ces textes ?

    13Il s’agit donc de s’exercer à distinguer les activités communicationnelles qui accompagnent la mise en place d’un texte, de s’interroger sur les raisons qui amènent les chefs d’entreprises à recourir à l’écrit pour faire état de leurs engagements en matière d’éthique ou de responsabilité sociale, enfin d’éclaircir le rôle joué par les écrits dans les processus d’organisation collective. En premier lieu, nous nous intéresserons à décrire l’espace privé, ce « lieu de rodage » dans lequel des responsables d’entreprises s’organisent, discutent et écrivent dans le but ultime d’accéder aux agendas médiatiques et politiques. En second lieu, nous porterons notre attention sur la façon dont les acteurs s’organisent pour promouvoir et donner de la vitalité à leur initiative une fois que celle-ci est tombée dans le domaine public. Toute la question est alors de savoir si l’étude des écrits et du travail d’écriture permet de mieux comprendre le fonctionnement des organisations de lobbying.

    Pour écrire, il faut discuter : une approche anthropologique de la communication

    14Ainsi exposé, il s’agit d’éclairer l’organisation qui a conduit à une mise en texte. Ce qui fait sens est moins la charte que les relations qui se nouent autour de l’écrit. La production d’une charte occasionne des mises en relation, c’est à dire des moments au cours desquels des propos sont échangés, des actions sont mises en œuvre, et des textes sont écrits. Ainsi, se mettent en place des relations d’interlocution, c’est-à-dire un échange entre des acteurs médiatisés par des textes (chartes, argumentaires, dossiers de presse, etc.). Or, l’espace dans lequel est discutée la charte procède précisément de l’objectif d’écriture du texte. L’enjeu est donc de saisir théoriquement et empiriquement cette construction sociale : l’espace de discussion n’est pas donné a priori : il se construit selon des logiques de situations, à travers divers procédés (notamment des rencontres) où les acteurs se rendent mutuellement sensibles et où s’exercent des formes de sociabilité et des activités réflexives.

    15Il s’agit donc de penser à la fois le produit de l’écriture et ses effets sociaux. Il s’agit là de l’aspect communicationnel de l’écriture : celle-ci suppose des échanges pour être organisée. Elle nécessite donc l’ouverture d’un espace de communication.

    16Cette orientation théorique est proche d’une anthropologie de la communication puisqu’il s’agit d’identifier les rapports sociaux qui mènent à des pratiques d’écriture (Delcambre ; 1997), mais aussi de conceptualiser le rôle des écrits dans les relations sociales tel que l’anthropologie cognitive le suggère (Goody ; 1986), ou encore certaines recherches sur les écrits au travail (Fraenkel, Borzeix ; 2001, Pène, 1995, etc.).

    17En ce sens, le terme « d’anthropologie de la communication » est intéressant puisqu’il a été forgé pour rendre compte, dans une description unitaire, des aspects nombreux et apparemment étrangers comme la logique de l’écriture, la forme et la signification du contenu (sémio-pragmatique), la forme matérielle de l’objet, le processus de production, et la dynamique des échanges entre les acteurs. Plus généralement, il s’agit de concilier l’analyse des textes à celle du processus et de ses dynamiques sociales. Deux angles d’approches des chartes seront donc proposés.

    18Le premier angle d’approche est centré sur l’analyse du cadre relationnel que constitue la charte. En effet, des interactions sont engendrées par les pratiques d’écriture d’une charte. La particularité de ces interactions est de donner lieu à un écrit (une charte) lequel renvoie à un processus. Il s’agit donc d’un objet qui matérialise les échanges entre les acteurs. Cela signifie qu’il n’y a pas seulement des interactions entre les individus, lesquelles seraient figées sur le plan institutionnel ; il y a un objet matériel produit en plus de l’interaction entre les acteurs. Le caractère éphémère de la confrontation langagière est alors dépassé. Ainsi, l’enjeu est de comprendre comment des responsables d’entreprise élaborent des cadres de communication parmi les différentes figures de l’action (accords, déclarations, chartes, etc.) et selon quelles modalités organisationnelles. Or, ces dimensions sont appréhendées à travers la médiation textuelle, laquelle donne lieu à un jeu social complexe. Une telle analyse pourrait ainsi contribuer à mieux décrire les cadres relationnels existants entre les firmes.

    19Le second angle d’analyse se situe à un niveau « macro-social ». La charte est considérée comme le support de la prise de parole des acteurs. Elle s’inscrit dans un espace traversé par un nombre limité de discours qui correspondent à des façons différentes de donner du sens à la question sociale traitée (Delforce, Noyer, 1999). En tout état de cause, l’ensemble de cette production discursive constitue une formulation intelligible du projet d’implication des entreprises. Elle est donc une manière de labelliser le problème dans un sens particulier. La charte correspond ainsi à une mise en discours d’une problématique dans un espace public. Autrement dit, elle est une forme pratique et communicationnelle qui participe à inscrire une question sociale dans l’agenda médiatique et l’agenda politique. L’enjeu consistera alors à décrire comment ce type de discours a été élaboré et dans quelle mesure la charte de la diversité, par exemple, contribue à façonner une nouvelle vision du problème des discriminations.

    Thèse défendue

    20Ces deux angles d’approche sont au service de la thèse suivante : parce qu’elles favorisent les contacts et les rencontres, les chartes ont une force d’objectivation et d’agrégation indéniable. Mais par nature, les chartes sont équivoques, souples, mouvantes. Elles sont malléables et se recomposent suivant les exigences de leurs interlocuteurs. Ainsi, a priori, l’avantage d’une structure relationnelle souple de type « charte » réside dans sa capacité à faire varier ses formes, de telle sorte que les acteurs puissent répondre aux changements extérieurs, c’est-à-dire que l’organisation interne puisse évoluer pour répondre de façon adaptée à la mobilité des besoins et des situations. Les chartes offrent sans égale cette possibilité de changements rapides contrairement aux cadres d’expression plus étroits, car plus normés, des relations sociales (négociation collective). Dans le cas des chartes, les formes ont tendance à changer rapidement car aucune règle formelle ne régit la façon dont les acteurs se doivent de coopérer. Cela a pour conséquence majeure de donner une organisation assez peu conservatrice.

    21Les chartes sont des cadres d’expression élastiques. L’élasticité consiste à donner libre cours à un large champ des possibles y compris lorsque les intérêts sont parallèles ou antagonistes (Simmel, 2003). Dans le cas des chartes, ses membres y sont très mobiles, tout comme leurs stratégies, de façon à ce que les acteurs puissent conserver une force d’action y compris lorsque le milieu varie. Aucune situation problématique n’est définitivement fixée, les formes sont variables, les intérêts se déplacent, etc. La souplesse des chartes et leur labilité s’apprécient notamment dans la possibilité qu’elles offrent aux acteurs de pouvoir réagir à toute circonstance particulière susceptible de saper sa base. Ainsi, les acteurs peuvent se mouvoir très rapidement en de nouvelles formes (label, accord interprofessionnel, etc.) parce que l’organisation n’a pas de forme définie et tangible.

    22Cette thèse invite à une réflexion critique sur l’évolution des formes des relations sociales. En effet, la forme des chartes contraste manifestement avec les formes classiques des relations professionnelles. Ces dernières instaurent une stabilisation des thèmes de discussion. En outre, elles fixent les règles de la confrontation, les critères pour désigner les personnes habilitées à produire la règle, et instaurent un rapport même minimal à la pratique argumentative (Dupont, 1998 ?). Ces contraintes jugées parfois comme bridant la créativité potentielle des acteurs tendent à se dissoudre au profit de formes où l’éthique devient situationniste et le droit flexible. En hypothèse finale, nous dirons que l’émergence des chartes est symptomatique de la constitution de formes précaires par lesquelles l’engagement social devient situationniste et le droit adaptable en fonction des contraintes de concurrence économique.

    23En même temps, pour nuancer cette position, l’émergence des chartes correspond aussi à une multiplication des lieux de concertation et est susceptible d’élargir le cercle des personnes concernées par un problème au lieu de s’en tenir aux seuls mécanismes conventionnels prévus à cet effet, à savoir la chaîne de commandement ou la représentation syndicale. L’enjeu de ces espaces de paroles pourrait être, d’une part, d’organiser de nouveaux savoirs en reliant les personnes aux contextes d’objets qui les environnent et, d’autre part, de permettre à de nouveaux types de porte-parole d’émerger au sein des institutions (Maesschalck, 2004).

    24Ces différents niveaux d’interprétation illustrent la nécessité de puiser dans différentes disciplines pour construire une approche communicationnelle, d’articuler les dimensions macro, méso et micro, et d’apprécier la multi-dimensionnalité des phénomènes de communication (Miège, 2004 : 228).

    25Cette étude sera étayée par l’analyse d’un cas concret : celui de la charte de la diversité dans les entreprises. Après avoir situé plus généralement ce mouvement de l’éthique et de la RSE sur le plan sociopolitique (chapitre 1), nous isolerons le cas de la charte de la diversité où nous présenterons ses caractéristiques générales (chapitre 2). Nous proposerons ensuite une approche anthropologique de la communication pour l’étudier (Chapitre 3). Il conviendra alors de mesurer les implications méthodologiques d’un tel projet (chapitre 4), pour ensuite mettre en œuvre concrètement cette démarche (chapitres 5, 6 et 7). Nous conclurons ce travail autour de deux hypothèses : la première consiste à se demander si les chartes sont des formes de promesse énoncées par les acteurs économiques, alors que la seconde pointe quelques questions éthiques et critiques posées par le développement des chartes.

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    Ce livre est cité par

    • (2015) L’égalité sous conditions. DOI: 10.3917/scpo.senac.2015.01.0203
    • Huët, Romain. Cooren, François. (2012) Les formations sociales et les processus de leur délitement. Communication. DOI: 10.4000/communication.3484
    • Roginsky, Sandrine. Lambotte, François. (2014) Entre ombre et lumière, analyse communicationnelle de la construction identitaire de l’ONG Finance Watch. Communication et organisation. DOI: 10.4000/communicationorganisation.4572
    • Razouk, Siham. (2016) L’expression des promesses des entreprises confrontées à la souffrance au travail : entre nouvelles formes et défis communicationnels. Revue française des sciences de l’information et de la communication. DOI: 10.4000/rfsic.2360
    • Errecart, Amaia. Catellani, Andrea. (2020) Acteurs et discours de la « responsabilité sociétale de l'entreprise » : entre dynamiques sociales et médiations sémiotiques et langagières. Semen. DOI: 10.4000/semen.13938
    • Catellani, Andrea. Errecart, Amaia. (2017) Dialogisme et figures de l’autre dans les rapports sur la « Responsabilité sociétale des entreprises » : exploration discursive et sémiotique. Mots. DOI: 10.4000/mots.22782

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    Format

    Huët, R. (2012). Introduction. In La fabrique de l’éthique (1‑). CNRS Éditions. https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.22350
    Huët, Romain. « Introduction ». In La fabrique de l’éthique. Paris: CNRS Éditions, 2012. https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.22350.
    Huët, Romain. « Introduction ». La fabrique de l’éthique, CNRS Éditions, 2012, https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.22350.

    Référence numérique du livre

    Format

    Huët, R. (2012). La fabrique de l’éthique (1‑). CNRS Éditions. https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.22332
    Huët, Romain. La fabrique de l’éthique. Paris: CNRS Éditions, 2012. https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.22332.
    Huët, Romain. La fabrique de l’éthique. CNRS Éditions, 2012, https://doi.org/10.4000/books.editionscnrs.22332.
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