Version classiqueVersion mobile

Guerre, armées et communication

 | 
Éric Letonturier

Présentation générale. Guerre et paix : la communication s’engage

Éric Letonturier

Texte intégral

  • 1 Général prussien, C. Ph. Von Clausewitz (1780-1831) est l’auteur de l’un des traités de stratégie (...)

1La communication, pour paraphraser la célèbre phrase de Clausewitz1, ne serait-elle devenue aujourd’hui que le prolongement de la guerre par d’autres moyens ? Force serait de l’admettre dès lors que l’on convient que les nouvelles technologies de communication conduisent à une certaine militarisation de la vie civile. Ainsi, en premier lieu, de l’appel de nos Smartphone qui réussissent à nous mobiliser nuit et jour et nous (re)commandent d’agir en nous intimant de répondre instamment comme si ordres nous étaient lancés. Par ailleurs, ces appareils que Ferraris (2016) nomme des ARMI (Appareil de registration et de mobilisation d’intentionnalité), autorisent et exigent même une disponibilité sans considération des temps et des lieux ni de leur nature (privée ou publique), et offrent une mobilité inédite en étant toujours à portée, sans déconnexion durable possible. Or, disponibilité et mobilité sont de fait les principaux éléments du statut militaire, pour répondre à la mission particulière qui est assignée aux armées : combattre et faire la guerre, qui peut avoir lieu n’importe où et n’importe quand. Le principe de loyauté (à l’égard de l’État) qui régit également le soldat trouve son prolongement dans l’enregistrement, la mémoire dont sont dotés, même éteints, nos appareils : les traces qu’ils laissent des appels et messages reçus assurent ou contraignent à une fidélité constante à l’égard de nos correspondants, et forcent ainsi à une responsabilisation accrue en obligeant à donner suite, sans échappatoire possible sauf à un prix fort : celui de la désertion, de l’exclusion du champ social.

2À suivre de tels développements, on assisterait donc aujourd’hui à une extension du domaine de la guerre par les dispositions nouvelles que requièrent du plus grand nombre ces outils. Mais cette thèse, qu’on lui accorde ou pas crédit, est révélatrice d’un présupposé implicite désormais particulièrement répandu : la communication y est en effet réduite à la question de ses supports techniques, et son périmètre d’existence et d’exercice aux fonctionnalités et aux applications qu’ils offrent. Il n’y aurait donc pas de communication sans médiation, sans moyen technique. Or, l’étude du « phénomène guerre », pour reprendre l’expression de G. Bouthoul (1970), impose de renoncer à cette définition étroite, ne serait-ce déjà pour des raisons évidentes qui tiennent à son ancienneté et à son universalité. La guerre est profondément un acte de communication pour témoigner d’une intersubjectivité, d’une relation avec une altérité qui s’orientera vers la rencontre ratée, le dialogue rompu et finalement, l’affrontement armé. La guerre illustre ainsi le risque, l’horizon qui pointe, menace tout échange avec autrui, à savoir l’incommunication. Or aujourd’hui, la montée des nationalismes et la multiplication des revendications identitaires élèvent dangereusement ce risque. Aussi, pour renvoyer aux identités, aux interactions et représentations, la communication vient-elle naturellement appuyer une approche constructionniste de la guerre (Lindemann, 2008).

3Ce volume entend parcourir et rééquilibrer les différentes formes et dimensions de la communication en œuvre dans la guerre. Place sera bien sûr laissée aux médias et à l’information sans pour autant réduire la communication de guerre aux effets et enjeux propres qu’ils produisent. Place sera également donnée aux avancées techniques les plus récentes comme les drones et les robots présents sur le champ de bataille lui-même numérisé. Mais on y verra moins le signe de l’automatisation anonyme des opérations de guerre selon des procédures infographiques préfixées que la présence et le rôle accru de l’homme à travers ses interactions avec l’allié, l’ennemi, le milieu et la machine.

Droit de la guerre, communication et mémoire

4La guerre, contrairement au terrorisme par exemple, est une activité humaine, interétatique, menée au moyen des armes par des personnels engagés à cette fin, et légalement encadrée selon des termes et des étapes, allant du déclenchement des hostilités jusqu’à la fin du conflit. Cette définition, formalisée par le traité de Westphalie en 1648 et, plus tard, les conférences de La Haye, dégage des conditions et des moments qui peuvent fournir, à titre de rappel, quelques éléments pour y retrouver, même lexicalement, l’importance stratégique et la permanence institutionnelle de la communication.

Déclarer la guerre : médiation, sommation et négociations continues

5Du point de vue du droit (Nadeau et Saada, 2009), la guerre est ainsi toujours envisagée comme la solution du dernier recours. Son éclatement implique donc que tous les moyens pacifiques, c’est-à-dire ceux qui concrètement passent par la parole, à travers l’éventail des ressources diplomatiques qu’offrent les négociations, pourparlers, conciliations, arbitrages et accords, ont échoué… Combien de guerres ont ainsi été évitées par ces échanges et dialogues préalables, ainsi que par la médiation d’une tierce nation qu’impose le droit de faire la guerre (jus ad bellum) ! Par ailleurs, déclarer la guerre, sorte de monologue d’ouverture, suppose d’une part d’exprimer de manière explicite et sincère, sans motifs cachés, le casus belli, c’est-à-dire le point sur lequel porte le différend, et de formuler les revendications attendues. Cette déclaration, qui ne peut être portée que par celui dont la parole incarne l’autorité légitime et la détention des moyens de la violence afférente, implique d’autre part discussions et acceptation du législatif. L’enjeu communicationnel de cette déclaration s’illustre aussi a contrario, à double titre : d’abord dans le refus de plus en plus fréquent des Chambres qui, pour s’épargner les critiques de l’opinion publique et de la communauté internationale, laissent toute la responsabilité à l’exécutif ; ensuite dans la rareté croissante de ces déclarations au profit d’euphémismes, tel « l’usage autorisé de la force », moins légalement et socialement engageant.

6La communication officielle de guerre se décline aussi dans les avertissements et l’obligation de lancer un ultimatum avant de lancer une attaque. Autre signal du lien continu que l’on entend maintenir avec l’ennemi tout au long du conflit : l’entente entre les États adverses sur leurs pratiques, qui doivent être comparables en termes de recrutement, d’armes utilisées et de formation des personnels. Ainsi encore de la recherche commune de moments décisifs, telles les batailles, ou d’espaces de conflit définis (au sol, aérien) qui permettront d’y mettre rapidement un terme en démarquant clairement un vainqueur. Le principe de proportionnalité fixé par le jus in bello indique de son côté la nécessaire prise en compte de l’autre et des forces dont il dispose pour régler et ajuster ses propres moyens offensifs. Plus généralement, ce droit dans la guerre qu’impulse au xvie siècle le juriste H. Grotius, développe les termes d’une éthique militaire : les règles de conduite morales et de respect de la dignité de l’adversaire se traduisent concrètement par des contacts de proximité et des traitements particuliers à l’égard de certaines populations, comme les prisonniers que l’on doit protéger ou les civils qui ne sont pas des cibles autorisées.

Silence des armes et messages de réconciliation

7Le plus récent jus post bellum, de son côté, dévoile les conditions communicationnelles pour établir et faire durer le silence des armes. Décisifs sont ici les pourparlers, armistices et traités, ainsi que le rôle des organisations tierces et des observateurs extérieurs dans les processus de négociation, de pacification et de résolution des conflits. Les arbitrages s’articulent autour d’un équilibre entre les sanctions, et les réparations et moyens de réhabilitation du pays vaincu qui doit, pour preuve de sa bonne foi, informer et rendre compte de ses actions et réformes (notamment en matière de politique d’armement).

  • 2 A fortiori quand ce dispositif se prolonge désormais sur le support numérique qui en renouvelle le (...)

8Bien qu’ils ne relèvent pas du droit de la guerre, les lieux du souvenir, les célébrations et les opérations de commémoration entrent aussi dans le dispositif de la communication post-conflit2. Ils participent en effet à la prévention de la violence et à l’entretien de la paix, à une logique pédagogique de transmission et de sensibilisation à l’altérité et à une volonté de réappropriation de l’histoire par tous. Mais, comme le rappelle ici J.-Y. Boursier, les mises en scène et en intrigue des conflits offrent des relectures et des réinterprétations diverses voire opposées des événements selon l’acteur (État ou associations) qui les prend en charge. Elles renvoient aussi à l’autre guerre qui se livre post bellum, celle des mémoires (Dalisson, 2013 ; Blanchard, Ferro et Veyrat-Masson, 2008). À l’image des supports de l’époque, même les plus anodins comme les timbres poste en circulation alors (Croix et Guyvarc’h, 2016), elles interrogent enfin sur les oublis, les silences et les absences dont témoignent ces dispositifs de communication, également écartelés entre le devoir civique de ne pas oublier et les intérêts économiques du tourisme régional. Parallèlement, l’entretien du souvenir national se nourrit de tout un matériel de documentation privé, de cette littérature pléthorique que sont les lettres (celles des poilus par exemple), carnets, témoignages et autres récits de vie… soient autant de modalités différenciées de communiquer (sur) l’intime et le privé avant, pendant et après les guerres (Cabanes et Piketti, 2009 ; Baty-Delalande et Trevisan, 2016).

Se faire entendre et (re)connaître : à l’écoute de la grande muette

9Guerre ne signifie donc pas rupture ou absence de communication entre les parties adverses et encore moins entre les innombrables anonymes entraînés dans les conflits. Reste que l’armée est souvent qualifiée de « grande muette », depuis que la Troisième République a privé les personnels en uniforme de leurs droits civiques, notamment en leur imposant un devoir de réserve. Or, le silence tient au type même de communication en cours dans les enceintes militaires, qui s’y organise principalement autour de deux pôles : l’ordre, dont la clarté, la concision et l’injonction n’appellent qu’à l’action disciplinée sans discussion ni précision ; et le secret, indispensable dès qu’il s’agit de la sûreté nationale et des intérêts de l’État, mais également sur le champ de bataille pour des raisons tactiques évidentes. Or plusieurs phénomènes complexifient désormais ce schéma.

Communiquer pour recruter

10La professionnalisation a d’abord contraint les armées à sortir de leur silence médiatique, en lançant depuis 1996 plusieurs vagues de campagnes publicitaires pour répondre à leur besoin en personnels dans des compétences pointues et très variées (Weber, 2002). Mais, à une période qui sacralise la vie et la jeunesse, comment communiquer pour une institution dont la finalité peut réclamer le sacrifice de soi, jusqu’à donner son existence au nom de la défense d’un État, d’une Nation, eux-mêmes sujets à interrogation, sinon en perte de légitimité, a fortiori avec la mondialisation ? Les choix faits au fil des slogans par l’armée de Terre sont révélateurs des difficultés et défis à surmonter. Le métier, les savoir-faire et compétences professionnelles, les matériels de guerre à haute valeur technologique et symbolique ajoutée ont été, dans un premier temps, les véhicules privilégiés de sa communication. Ce choix lui assurait une forte attractivité auprès d’une population peu diplômée et particulièrement réceptive dans un contexte de crise et de chômage… mais à un prix qui s’est avéré coûteux : elle passait totalement sous silence la réalité des conditions et des missions, ainsi que les obligations et servitudes auxquelles astreignait leur finalité si particulière et très éloignée d’un métier ordinaire.

11Les multiples effets pervers de cette stratégie du nombre ont alors conduit à réorienter les campagnes vers des savoir-être, des dispositions et valeurs attendues par l’institution, mais en privilégiant toutefois les plus à même de séduire les jeunes et liées aux promesses de la découverte et de l’accomplissement de soi. Ces dernières années, l’impératif d’un recrutement stable et de qualité a finalement conduit à un rééquilibrage, en soulignant, sous la forme d’un slogan très ramassé, le poids et le coût de la décision initiale : « Pour moi. Pour les autres. S’engager. » C’est cet acte fort, mûrement réfléchi qui s’impose, comme seul capable de sceller durablement des motivations, pleinement conscientes des efforts que réclament au quotidien l’uniforme et, à l’extrême, la présence et l’intervention sur les théâtres d’opération (Letonturier, 2011).

Paroles d’engagés : lanceurs d’alerte et milinautes

12Le mythe de la « grande muette », le rapport au silence, au secret et aux ordres qu’entretient l’institution militaire sont par ailleurs perturbés par la pratique croissante de la part d’insiders d’informer, au nom de la vérité ou de la transparence, la population d’actes délictueux ou de dysfonctionnements en son sein. Dans les pages qui suivent, S. Schehr montre que les lanceurs d’alerte contraignent politiques et militaires à se prémunir des avantages stratégiques que leurs révélations peuvent conférer à l’adversaire, à gérer les nouvelles formes de menaces qu’ils représentent, notamment pour leurs effets sur les opinions, au moyen de versions et discours alternatifs sur les événements et secrets d’une guerre passée ou en cours (Bulinge et Moinet, 2016). Par ailleurs, l’exemple des lanceurs d’alerte illustre de façon paroxystique comment la communication des faits guerriers s’organise selon les alternatives du modèle qu’Hirschman (1970) avait dégagées entre exit, voice et loyalty. Même si l’absence d’intelligence avec l’ennemi exclut une condamnation pour acte de trahison, leur prise de parole les expose néanmoins à des sanctions dont ils doivent se protéger suite aux arbitrages personnels qui les ont poussés à préférer la morale du bien commun à l’éthique du devoir militaire (de réserve).

13Ce dilemme entre, finalement, éthique de responsabilité et éthique de conviction connaît également des prolongements avec la dérégulation des flux ordinaires de la « communication de guerre » que permettent désormais les nouvelles technologies et leurs usages individuels, notamment sur les blogs, réseaux sociaux et autres forums. Dans le tableau que M. Sage brosse ici de la « kakisphère » – multiple par ses composantes, les acteurs présents et les finalités poursuivies –, la liberté d’expression inédite, les capacités de partage et de diffusion qui sont offertes au « milinaute », même en opération extérieure, ont conduit l’institution à prendre des mesures, telle l’obligation de déconnexion sur les théâtres. Ceci pour éviter que conversations, photos, vidéos, etc. ne compromettent les missions, ne mettent en danger les personnels et/ou ne diminuent l’efficacité opérationnelle, voire ne ternissent l’image des armées. À ces risques s’ajoute, ici comme ailleurs, le paradoxe propre à l’internet et au prétendu espace interactif, accessible et plus libre qu’il ouvre : celui d’une communication qui ne crée que du même et de l’entre soi, pour finalement ne produire qu’une communauté d’intérêts et d’affinités fermée sur l’extérieur.

14L’utilisation de l’outil numérique ne garantit donc pas de sortir les militaires de l’invisibilité sociale à laquelle leur statut particulier les cantonne. Il serait encore moins vecteur d’une meilleure reconnaissance qu’ils attendent du monde civil, au titre de la nature de leur engagement, si l’institution n’entreprenait pas de son côté – avec ces mêmes NTIC et autres moyens médiatiques (expositions, salons, journées portes ouvertes, etc.) – de maintenir le lien avec la nation et d’assurer leur promotion et rayonnement (Hecker et Rid, 2012).

15Cette reconnaissance attendue par la communication ramène finalement à l’identité particulière que ce groupe tire de sa mission : combattre appelle moins un droit qu’un devoir à la différence (Boëne, 1998). Plus généralement, l’attente de reconnaissance soulève aussi la question du rôle fonctionnel décisif que joue, sur le terrain ou non, la communication : elle seule peut créer de la cohésion (si chère aux militaires), et produire ce collectif à la fois un dans l’action, et multiple par la diversité des populations qui le composent ; elle seule peut faire cohabiter et surmonter l’expression de leurs revendications particulières, en termes, par exemple, de corps et de cultures d’armes, de genre, d’origine ethnique ou encore de nationalités quand il s’agit d’opérations mobilisant les armées de plusieurs pays (Letonturier, 2011).

Médiatactique de guerre

16L’idéal de transparence et de vérité d’un côté et le besoin de reconnaissance publique des dévouements d’un autre, ouvrent donc l’éventail large des prises de parole militaire possibles. La libération et la banalisation croissantes auxquelles l’enquêteur assiste en la matière (Daho, 2016), sont aussi les indicateurs des processus d’individualisation en cours dans les armées et de la réflexivité critique qui l’accompagne.

Gagner l’opinion publique : la guerre des récits

17Mais parallèlement, rappelons que l’institution ne tire sens de son rôle et de son action sur les théâtres que de la légitimité que lui donne le soutien de la collectivité sociopolitique. L’opinion publique s’avère logiquement une variable déterminante, stratégique même, pour déclencher une guerre, décider de sa poursuite ou non, être acceptée et comprise (Royal, 2012). Dans cet ouvrage, B. Jankowski explique ainsi que la très bonne image dont bénéficient aujourd’hui les armées françaises n’empêche pas certains paramètres de peser lourdement sur le soutien de la population aux opérations extérieures. Tandis qu’un seul événement suffit parfois à les désapprouver durablement, l’adhésion demeure toujours fonction de la nature de la cause défendue, de la légitimité perçue de la présence des forces françaises, de la gravité de la menace ressentie pour les intérêts du pays, mais aussi du respect des valeurs démocratiques (Belot, 2013).

  • 3 Nous parlons ici de guerre uniquement pour les moyens qui sont mis en œuvre pour lutter contre l’É (...)

18Mais quelles garanties et conditions pour que l’opinion se fasse ? Hier, témoignages porteurs de fausses nouvelles, « simples racontars, impostures et légendes » (Bloch, 1921) ; aujourd’hui fake news, faits alternatifs et post-vérité… Par temps de guerre plus qu’en tout autre certainement, l’information, a fortiori sous l’emprise croissante de la loi du direct et de la course à l’événement ou à sa fabrication de toutes pièces, ne garantit pas la connaissance des phénomènes ni leur compréhension, tant ils sont objets de communication (Wolton, 2009). Les relations entre guerre et médias s’inscrivent dans une histoire de la longue durée (Coutau-Bégarie, 2005) que nous ne pouvons restituer ici, sinon pour seulement rappeler l’ancienneté et la centralité de la propagande, du « bourrage de crânes » et, plus généralement, de la parole manipulée (Breton, 1997), bien avant la découverte de l’imprimerie et l’arrivée des médias propres aux sociétés modernes. Déformer la réalité, en censurer des pans pour convaincre, entraîner, influencer, cacher, mentir ou tromper ; mobiliser, embrigader et enrôler, galvaniser ou intoxiquer ; sélectionner et réagencer de manière flatteuse les faits pour les justifier et les mettre en récit dans un storytelling de la victoire (Chaliand, 1992 ; Rieffel, 2005)… forment l’arsenal classique des « armes du faux » et constituent depuis toujours l’ordinaire du travail de désinformation (Huyghe, 2016). À ce tableau s’ajoute aujourd’hui, comme le montre ci-après F.-B. Huyghe, le numérique qui met à disposition une telle combinaison de ressources, d’outils et de terrains d’application, que le bouquet multimédia qu’il offre permet à celui qui sait habilement s’en servir, une force de frappe et d’amplification cognitive inégalée et une puissance de persuasion inédite. Ainsi du djihadiste, qui réticule à l’infini des stratégies de communication si dynamiques et diversifiées à l’endroit de son public acquis ou potentiel, que les moyens de lutte et l’effet des répliques et des récits alternatifs proposés par l’Occident à son discours en deviennent limités, voire inefficaces3.

Le journaliste et le militaire : des « associés-rivaux »

19Depuis la figure mythique du courageux correspondant de guerre du xixe siècle, les représentations de la guerre, pour compter autant sinon plus que les faits et alimenter des imaginaires filmiques nouveaux (Vennesson, 2005), ont exigé leur maîtrise stratégique croissante à mesure de l’apparition des innovations au fil des conflits du xxe siècle. De la presse censurée et inféodée au pouvoir politico-militaire à l’espace concurrentiel mondialisé de l’information en continu aux sensibilités diverses, en passant par l’instrumentalisation idéologique de la radio et du cinéma (Launey, 2008 ; Challéat, 2008) puis l’utilisation de moyens audiovisuels mobiles par des journalistes sur les théâtres pour la télévision (Beauregard, Canuel et Coutard, 2002), « les médias sont devenus un fait de la guerre » (Mercier, 2004, p. 108) pour au moins quatre raisons.

  • L’anticipation et la gestion des perceptions ainsi que la construction de la légitimité sont passées par une définition impérative du périmètre et des conditions du (non) visible avec des mises en scène cachant la mort, esthétisant la violence, technicisant les gestes. Dans le texte qu’on lira plus loin, B. Chéron retrace les étapes progressives de cette prise en main et de cet encadrement du travail des soldats de l’image : de la guerre d’Algérie à la réorganisation des services dédiés, ils servent un discours pacificateur qui cède peu à peu au récit épique, sans nulle réflexion plus en creux sur la guerre que seul peut porter le photojournalisme civil (Barnades, 2013).
  • Ces opérations de formatage de la réalité guerrière exigent en retour une mise en interrogation du vrai par un nécessaire travail de réflexion et de recul critique accru pour les journalistes face à ce qu’il voient et entendent, face aussi au risque, si souvent encouru, que « la presse n’aille plus vite que l’événement » (Wolton, 1991, p. 83).
  • Le pluralisme croissant de l’information et sa diffusion désormais immédiate sur tous les points du globe rendent inefficace, voire contreproductive la circulation de versions différenciées selon les destinataires et forcent à une fabrication toujours plus raffinée des images ainsi qu’à leur contrôle très en amont, à leur source.
  • Le droit à l’information suppose moins pour les militaires de censurer que d’encadrer sans interdire le travail des journalistes, notamment par un système d’accréditation. Souvent justifié au nom des besoins de la mission, de son efficacité opérationnelle et de la sécurité de tous, ce dispositif conduit à des formes de co-production des récits de guerre (Charon et Mercier, 2004 ; Gatien, 2009). Tous tirent comme « associés-rivaux » de ces relations de proximité sur le terrain, dans les limites parfois floues de l’autonomie des uns (la liberté de la presse) et de la confiance variable des autres.

20Les armées ont donc très tôt pressenti et anticipé le rôle et la place que la communication était appelés à jouer de façon aussi exponentielle que stratégique lors des conflits. Elles ont su répondre à ce nouvel enjeu en s’intégrant de diverses manières au jeu médiatique montant. L’histoire de l’institution militaire croisée à celle de l’information d’État, révèle qu’elles ont été parmi les premières à se doter de structures officielles dédiées (le SIRPA puis la DICoD) et à développer de véritables politiques en la matière, sous des dénominations changeantes selon les époques (« relations publiques », « communication », « action psychologique », etc.), et à l’interface d’objectifs et de logiques d’origines multiples (Ollivier-Yaniv, 2000).

  • 4 Lors de la première guerre du Golfe, les journalistes sont en pool et ont un accès limité et diffé (...)

21Un autre indicateur réside dans la professionnalisation des actions de communication à plusieurs niveaux : élaboration de plans de communication et points presse réguliers ; recrutement et formation d’officiers presse et communication rompus aux techniques du media training ; formalisation des relations avec le monde civil et médiatique au moyen de porte-paroles officiels, mais aussi de guides pratiques offrant à tout militaire un cadre de codification de l’expression, des gestes et des contenus (autorisés) ; diffusion d’éléments de langage a fortiori en périodes de crise et de conflits ; fourniture aux journalistes de dossiers de presse et de reportages prêts à l’emploi ; et enfin stages d’aguerrissement et prise en charge logistique des journalistes initialement en pool, puis embedded pour couvrir au plus près les événements4. Les « murmures de la grande muette » (Forcade, 1999) sous la Troisième République s’orchestrent donc désormais selon une partition d’instruments médiatiques qui en assurent l’écho pour des impacts d’audience toujours bien calculés…

Machines de guerre à communiquer

22S’informer de l’état des forces en présence pour décider en connaissance, engager des manœuvres (Malis, 2009) et coordonner les actions ; se renseigner pour anticiper, couper les transmissions, cacher et se camoufler, (dé)coder pour (dé)brouiller, surveiller et espionner l’ennemi pour s’emparer de ses données et protéger les siennes ; créer de l’incertitude et de la peur, faire silence ou du bruit, déformer la réalité pour le déstabiliser, l’immobiliser ; faire croire, leurrer l’adversaire, détourner son attention pour le tromper et le confondre… Telles sont là quelques unes des ressources classiques dont la communication dispose et qu’elle décline sur le terrain sous forme de tactiques pour préparer et conduire la guerre. Au combat, la ruse et l’intelligence spécifique qu’elle mobilise – et dont Hermès, dieu de la communication, usa bien souvent – suppléent utilement à la force du poing et des armes (Holeindre, 2017).

23Les nouvelles technologies de la communication développent et modifient incontestablement, en quantité et qualité, ces moyens et ressources disponibles en les déplaçant désormais sur les réseaux et (cyber) espaces (Huyghe, 2001 ; Ventre, 2011). Mais elles ne sauraient pour autant réduire l’analyse et la compréhension de la guerre à ces supports électronico-informatiques. Dans le vaste tableau qu’il brosse ici de l’actuelle domination du paradigme technologique de la guerre, D. Ventre souligne d’ailleurs le rôle actif que joue l’emploi du terme « information » au détriment de celui de « communication », plutôt réservé, semble-t-il, aux stratégies et usages qui, souvent moins aisément contrôlables par une supervision simplement technique, appellent des répliques narratives plus élaborées. Deux thèses particulièrement tenaces témoignent de la force d’attraction qu’exerce ce déterminisme technique.

Numériser n’est pas communiquer

  • 5 Command, Control, Communications, Computers, Intelligence, Surveillance, Target, Acquisition and R (...)

24La première thèse s’articule autour de la guerre électronique, comme seule forme et unique horizon de tout conflit. Or, l’information a toujours été un enjeu décisif de la guerre, et cette dernière se mène fatalement à la fois par, pour et contre l’information, qu’elle se présente sous forme de données informatiques ou pas. De plus, si aucune cyber-guerre n’a encore eu lieu d’une part, elle ne dispose d’aucune autonomie stratégique d’autre part. Une cyberattaque n’est finalement que la continuation de modes d’action traditionnels à l’aide des moyens nouveaux dont on dispose (Rid, 2011), une arme mobilisable parmi celles utilisées sur l’espace ordinaire et bien réel des théâtres. Autre variante de cette thèse : celle, liée au fameux concept américain C4ISTAR5, voulant que la numérisation du champ de bataille et son pilotage à distance par un commandement interarmées – à l’aide des données fournies sur place grâce à des capteurs humains et matériels et aux satellites –, signeraient la disparition du champ de bataille au profit d’une guerre dématérialisée, menée par écrans interposés, sans front en somme.

25Les nombreux exemples qu’A. Thiéblemont tire d’opérations extérieures récentes illustrent pourtant ici l’inverse, à savoir l’épaisseur inédite qu’y prend toujours le réel et la densité des expériences vécues dont participent aussi les nouveaux moyens de communication à disposition. Leur omniprésence intensifie en effet le quotidien de la vie sur les théâtres, par les astuces, l’inventivité et l’esprit de débrouille, par les formes de solidarité, d’entregent et d’échange de services que leurs contraintes, défaillances et limites techniques appellent sans cesse des soldats. Plus encore aimerait-on dire : la guerre se définit moins par ces moyens de communication que comme un acte de communication en soi, pour être une expérience de très haute intensité émotionnelle et sensorielle (Munier et Letonturier, 2016). Comme relation à soi, à l’autre, ami ou ennemi, à un milieu ambiant et à des objets-machines, combattre engage, affecte tous les sens, les aiguise ou les annihile (Audoin-Rouzeau, 2008 ; Goya, 2014) jusqu’à en faire parfois des armes mortelles (Volclerc, 2011).

Game of drones : l’homme aux commandes

26Accordant, elle aussi, à la technique embarquée un rôle déterminant sur les conditions et l’issue du combat, la seconde thèse s’enroule autour de la disparition programmée de l’homme des théâtres d’opération. D’abord parce que les nouveaux équipements, tel le système Félin (Fantassin à équipements et liaisons intégrés) aujourd’hui opérationnel, augurent de l’avènement d’un combattant d’un genre nouveau : le soldat, encore être de chair et de sang, laisserait bientôt place à un « hoplite numérique » (Chareyron, 2011), à un hybride, à la fois homme et machine, par les différentes prothèses dont on le doterait pour en améliorer et en augmenter les capacités et les performances physiques et mentales. Or, la problématique de l’humain augmenté, dont les enjeux se déclinent dans d’autres domaines (Kleinpeter, 2013), prend ici une tournure singulière qui réaffirme la guerre comme phénomène humain : en fait, ces systèmes de communication ne signent pas la mort de l’homme, mais créent surtout un humain paradoxal sinon impossible, car affectivement insensible mais en même temps, doté d’une sensorialité hyper-développée. Cette figure inédite conforte tout en la défiant l’importance qu’occupe pour l’homme en guerre l’éthique militaire… qui invite déjà à une augmentation mais sans moyen technique : se forcer à être plus que soi sans être, dans son rapport à l’autre, en dehors de l’humanité (Letonturier, 2014).

  • 6 Reaper (pour General Atomics MQ-9 Reaper soit « la faucheuse » en français) : nom donné à un drone (...)
  • 7 Par exemple, en juillet 2015, la lettre ouverte signée par des intellectuels mondialement connus ( (...)
  • 8 L’histoire de l’armement montre que l’action à distance est le trait de bien des armes, des progrè (...)

27Toujours selon cette seconde thèse, le champ de bataille serait par ailleurs investi par une armée nouvelle, faite de robots et de drones (popularisés par les reapers de l’armée américaine6). Sans âme ni cœur, ils organiseraient de manière systématique et efficace cette « chasse à l’homme » qui serait la finalité réelle et la vraie qualification à donner à toute guerre (Chamayou, 2013). Cette « robolution » en cours dans les armées, pour réactiver de vieilles craintes science-fictionnelles (« syndrome Terminator ») ou réveiller des convictions antimilitaristes d’un autre âge, a suscité polémiques, mobilisations7, et points de vue idéologiques ou caricaturaux à force d’approximations et de confusions (Jeangène Vilmer, 2013 ; 2014). Il importe en effet de ne pas réduire l’objet à un seul (l’élimination ciblée comme ce fut le cas par les Israéliens puis les Américains contre les chefs d’Al-Qaïda et les membres des réseaux Taliban) des nombreux usages qu’il autorise d’une part ; et de ne pas assimiler autonomie et automation d’autre part. Les drones (Zubeldia, 2012) dont le maniement tant technique que stratégique dépend et oblige une forte présence humaine, ne sauraient être confondus avec les systèmes d’armes létaux autonomes qui, qualifiés de « robots-tueurs », n’existent pas (Entraygues, 2017). Par ailleurs, la force des drones ne tient pas à leur prétendue action à distance, au fait de pouvoir tuer sans crainte de l’être et donc d’abaisser potentiellement le seuil de déclenchement des guerres8. En effet, ils reformulent avant tout les conditions du « gouvernement du ciel » (Hippler, 2014) par leur présence permanente et l’information continue qu’ils recueillent.

28Dans le sillage des travaux qu’il mène et coordonne (Danet, Hanon et Boisboissel, 2012 ; Doaré, Danet et Boisboissel, 2015), D. Danet revient ici sur ce débat pour en clarifier salutairement les termes et relever les différents obstacles (technique, doctrinal, économique, opérationnel…) qui empêchent un développement anarchique de la robotisation sur le champ de bataille et la perte de contrôle sur ses applications. À chaque argument revient toujours le rôle majeur sinon accru de l’homme face à cette activité de guerre qui est uniquement la sienne, propre à sa condition. Car « le danger est évidemment d’écarter l’homme du champ de bataille » (Yakovleff, 2012) et donc la communication, technique ou non, qui est consubstantielle à son existence et qu’exacerbe l’homme en guerre en mettant en tension ce fonds commun qu’il partage avec autrui et sa singularité qui l’en sépare en même temps. Même les cubicle warriors – ces informaticiens qui pilotent les drones depuis l’étranger à des milliers de kilomètres des opérations – souffrent du syndrome de stress post-traumatique… La « guerre Playstation » n’est donc pas pour demain…

Bibliographie

Références bibliographiques

Audouin-Rouzeau, Stéphane, Combattre. Une anthropologie historique de la guerre moderne ( xixexxie siècle), Paris, Seuil, 2008.

Barnades, Florent, « La fin du photojournalisme de guerre ? », Médium, no 34, 2013, p. 155-170.

Baty-Delalande, Hélène et Trevisan, Carine (dir.), Entrer en guerre, Paris, Hermann, 2016.

Beauregard, Claude, Canuel, Alain et Coutard, Jérôme (dir.), Les médias et la guerre, de 1914 au World Trade Center, Montréal, Éditions du Méridien, 2002.

Belot, Céline, « “Backing our Men”. Comprendre le soutien des Français et des Britanniques à leurs forces armées », Gouvernement et action publique, no 4, 2013, p. 595-619.

Bloch, Marc, Réflexions d’un historien sur les fausses nouvelles de la guerre, Paris, Éditions Allia, 1999 (1921).

Blanchard, Pascal, Ferro, Marc et Veyrat-Masson, Isabelle (dir.), « Les guerres de mémoires dans le monde », Hermès, no 52, 2008.

Boëne, Bernard, « Métier, profession et professionnalisme », in Boëne, Bernard et Dandeker, Christopher (dir.), Les Armées en Europe, Paris, La Découverte, 1998, p. 171-195.

Bouthoul, Gaston, Traité de polémologie. Sociologie des guerres, Paris, Payot, 1970 (1951).

Breton, Philippe, La parole manipulée, Paris, La Découverte, 1997.

Bulinge, Franck et Moinet, Nicolas (dir.), « Le renseignement, un monde fermé dans une société ouverte », Hermès, no 76, 2016.

Cabanes, Bruno et Piketty, Guillaume (dir.), Retour à l’intime au sortir de la guerre, Paris, Tallandier, 2009.

Chaliand, Gérard (dir.), La persuasion de masse. Guerre psychologique, guerre médiatique, Paris, Robert Laffont, 1992.

Challéat, Violaine, « Le Service cinéma des armées », 1895. Mille huit cent quatre-vingt-quinze, no 55, 2008, p. 174-180.

Chamayou, Grégoire, Théorie du drone, Paris, La Fabrique Éditions, 2013.

Chareyron, Pierre, « Hoplites numériques. Le combat d’infanterie à l’âge de l’information », Focus stratégique, no 30, 2011.

Charon, Jean-Marie et Mercier, Arnaud, Armes de communication massive. Informations de guerre en Irak : 1991-2003, Paris, CNRS Éditions, coll. « CNRS Communication », 2004.

Coutau-Bégarie, Hervé (dir.), Les médias et la guerre, Paris, Economica, 2005.

Croix, Alain et Guyvarc’h, Didier, Timbres en guerre. Les mémoires des deux conflits mondiaux, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2016.

Daho, Grégory, « Faire parler les généraux. Retour sur quelques usages des techniques d’entretien en milieux militaires », Revue ¿ Interrogations ?, no 22, juin 2016 [En ligne] : <http://www.revueinterrogations.org/Faire-parler-les-generaux-Retour,499>.

Dalisson, Rémi, Les guerres de mémoire, Paris, CNRS Éditions, 2013.

Danet, Didier, Hanon, Jean-Paul et Boisboissel (de), Gérard (dir.), La guerre robotisée, Paris, Economica, 2012.

Doaré, Ronan, Danet, Didier et Boisboissel (de), Gérard (dir.), Drones et killer robots. Faut-il les interdire ?, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015.

Entraygues, Olivier (dir.), « L’âge du drone », Polémoscopie, no 2, 2017.

Ferraris, Maurizio, Mobilisation totale, Paris, Presses universitaires de France, 2016.

Forcade, Olivier, « Les murmures de la “Grande Muette” sous la Troisième République », in Forcade, Olivier, Duhamel, Éric et Vial, Pierre (dir.), Militaires en République 1870-1962. Les officiers, le pouvoir et la vie publique en France, Paris, Publications de la Sorbonne, 1999, p. 507-520.

Gatien, Emmanuelle, « “Un peu comme la pluie”. La co-production relative de la valeur d’information en temps de guerre », Réseaux, no 157-158, 2009, p. 61-88.

Goya, Michel, Sous le feu. La mort comme hypothèse de travail, Paris, Tallandier, 2014.

Hecker, Marc et Rid, Thomas, « Les armées doivent-elles craindre les réseaux sociaux ? », Politique étrangère, no 2, 2012, p. 317-328.

Hippler, Thomas, Le gouvernement du ciel. Histoire globale des bombardements aériens, Paris, Les prairies ordinaires, 2014.

Hirschman, Albert O., Exit, voice, loyalty. Défection et prise de parole (1970), Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2011.

Holeindre, Jean-Vincent, La ruse et la force. Une autre histoire de la stratégie, Paris, Perrin, 2017.

Huyghe, François-Bernard, L’ennemi à l’ère numérique, Paris, Presses universitaires de France, 2001.

Huyghe, François-Bernard, La désinformation. Les armes du faux, Paris, A. Colin, 2015.

Jeangène Vilmer, Jean-Baptiste, « Terminator Ethics. Faut-il interdire les “robots tueurs” ? », Politique étrangère, no 4, 2014- 2015, p. 151-167.

Jeangène Vilmer, Jean-Baptiste, « Idéologie du drone », La Vie des idées, 4 décembre 2013 [En ligne] : <http://www.laviedesidees.fr/Ideologie-du-drone.html>.

Kleinpeter, Édouard (dir.), L’humain augmenté, Paris, CNRS Éditions, coll. « Les Essentiels d’Hermès », 2013.

Launey, Stéphane, « Les services cinématographiques militaires français pendant la Seconde Guerre mondiale », Revue historique des armées, no 252, 2008, p. 27-40.

Letonturier, Éric, « Au-delà du “soldat-robot” : l’éthique comme augmentation », Hermès, no 68, « L’Autre n’est pas une donnée », 2014, p. 139-142.

Letonturier, Éric, « Reconnaissance, institution et identités militaire », L’Année sociologique, vol. 61, no 2, 2011, p. 323- 350.

Lindemann, Thomas, Penser la guerre. L’apport constructiviste, Paris, L’Harmattan, 2008.

Malis, Christian (dir.), Guerre et manœuvre, Paris, Économica, 2009.

Mercier, Arnaud, « Guerres et médias : permanences et mutations », Raisons politiques, no 13, février 2004, p. 97-109.

Munier, Brigitte et Letonturier, Éric (dir.), « La voie des sens », Hermès, no 74, 2016.

Nadeau, Christian et Saada, Julie, Guerre juste, guerre injuste. Histoire, théories et critiques, Paris, Presses universitaires de France, 2009.

Ollivier-Yaniv, Caroline, « Quels “professionnels” de la communication et des relations avec les médias à la Défense ? Carrière militaire et communication », Langage et société, no 94, 2000, p. 75-96.

Rid, Thomas, « Cyber War Will not Take Place », Journal of Strategic Studies, vol. 35, no 1, 2011, p. 5-32.

Rieffel, Rémy, « Les médias, acteurs des conflits internationaux ? », Que sont les médias ?, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 2005, p. 107-164.

Royal, Benoît, La guerre dans l’opinion publique, Paris, Economica, 2012.

Vennesson, Pascal (dir.), Guerres et soldats au cinéma, Paris, L’Harmattan, 2005.

Ventre, Daniel, Cyberattaque et cyberdéfense, Paris, Hermès Science Publications/Lavoisier, 2011.

Volclerc, Juliette, Le son comme arme. Les usages policiers et militaires du son, Paris, La Découverte, 2011.

Weber, Claude, « La filière communication au sein de la Défense : typologie, recrutement, formation et carrière », rapport d’étude, Les documents du C2SD, no 47, janvier 2002.

Wolton, Dominique, Informer n’est pas communiquer, Paris, CNRS Éditions, coll. « Débats », 2009.

Wolton, Dominique, War games. L’information et la guerre, Paris, Flammarion, 1991.

Yakovleff, Michel, « La robotisation du champ de bataille (1/3) : vers un nouvel écosystème du combat », Revue de Défense nationale, no 744, 2011, p. 106-111.

Zubeldia, Océane, Histoire des drones, Paris, Perrin, 2012.

Notes

1 Général prussien, C. Ph. Von Clausewitz (1780-1831) est l’auteur de l’un des traités de stratégie militaire les plus importants, De la guerre (1832) dans lequel il explique entre autres que « la guerre n’est que le prolongement de la politique par d’autres moyens ».

2 A fortiori quand ce dispositif se prolonge désormais sur le support numérique qui en renouvelle les enjeux ainsi que la connaissance et la représentation de la guerre. Voir, dans le cadre de la mission Centenaire 14-18, les rencontres du Web : « La grande guerre numérique » sur le site centenaire.org/fr.

3 Nous parlons ici de guerre uniquement pour les moyens qui sont mis en œuvre pour lutter contre l’État islamique.

4 Lors de la première guerre du Golfe, les journalistes sont en pool et ont un accès limité et différé au terrain. À partir de 2003, ils sont embedded (embarqués), c’est-à-dire directement intégrés aux unités de combat pour suivre en direct le déroulement des opérations en Irak.

5 Command, Control, Communications, Computers, Intelligence, Surveillance, Target, Acquisition and Reconnaissance.

6 Reaper (pour General Atomics MQ-9 Reaper soit « la faucheuse » en français) : nom donné à un drone de combat créé par General Atomics et utilisé par les forces armées des États-Unis en 2011 après le succès de son ancêtre, le RQ-1 Predator.

7 Par exemple, en juillet 2015, la lettre ouverte signée par des intellectuels mondialement connus (N. Chomsky, S. Hawking, S. Wozniak, etc.) pour dénoncer les dangers des « robots tueurs » et demander l’interdiction des recherches portant sur les applications militaires de l’intelligence artificielle.

8 L’histoire de l’armement montre que l’action à distance est le trait de bien des armes, des progrès qui sont faits en la matière. Pouvoir tuer sans contact physique avec l’ennemi est même l’un des indicateurs de ce qu’Elias entend par « civilisation » comme processus culturel général de mise à distance des corps.

Auteur

Sociologue et philosophe de formation, est maître de conférences à l’université Paris Descartes Sorbonne (COMUE USPC) et membre du Centre de recherche sur les liens sociaux (CERLIS, UMR 8070). Il est responsable des collections « Les Essentiels d’Hermès » et « CNRS Communication » chez CNRS Éditions. Ses domaines de recherche portent sur l’histoire et l’épistémologie des sciences sociales, la communication et la sociologie militaire. Il a notamment coordonné le numéro de L’Année sociologique « Valeurs, métier et actions : évolutions et permanences de l’institution militaire » (no 61, 2011).

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search