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    Plan détaillé Texte intégral Les définitions de l’expertise : qualité et processus Les controverses de l’expertise : détournement de la science et enjeux démocratiques Plan et méthodologie de la partie Notes de bas de page

    L’évolution du droit international de l’environnement en Méditerranée

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Introduction à la première partie

    p. 57-61

    Texte intégral Les définitions de l’expertise : qualité et processus Les controverses de l’expertise : détournement de la science et enjeux démocratiques Plan et méthodologie de la partie Notes de bas de page

    Texte intégral

    111. L’objet de cette première partie sera de porter un regard critique sur l’expertise institutionnelle des régimes méditerranéens en tant que mécanisme potentiel de traduction juridique des conclusions de l’IPBES. Mais, pour ce faire, il est tout d’abord nécessaire de déconstruire la polysémie du terme « expertise » pour mieux le comprendre. Cette notion recouvre en effet un vaste territoire conceptuel au sein duquel existent, de manière interdépendante, différentes acceptions. Pour présenter l’expertise, il faut procéder pas à pas, du général au particulier, afin de finalement établir la définition sur laquelle nous nous appuierons tout au long de cette partie. Ce faisant, nous espérons aussi nous départir des visions réductrices de l’expertise qui la limitent à une simple relation linéaire et hermétique entre savoir et pouvoir184. Nous détaillerons tout d’abord les différentes définitions de l’expertise pour ensuite évoquer les controverses que celle-ci soulève.

    Les définitions de l’expertise : qualité et processus

    112. Le sens commun de l’expertise renvoie à la notion d’expert, c’est-à-dire une personne « qui connaît très bien quelque chose par la pratique »185. L’étymologie du terme expert vient d’ailleurs du mot latin « expertus » signifiant « qui a fait l’objet d’un essai ». L’expertise serait tout d’abord la caractéristique de l’individu qualifié dans un domaine par sa pratique. Mais, cette qualification ne s’obtient pas de quelconque manière. Comme le soulignent Robert Evans et Harry Collins186, cette expertise est acquise par une démarche interactionnelle où une personne deviendra peu à peu experte par sa capacité à évoluer au sein d’une communauté qui est « juge » de son expertise. Cette communauté peut être de toute nature, et dans notre cas d’étude, il sera fréquemment question de communauté scientifique. L’expertise est donc une qualité objective, car se basant sur des réalisations tangibles, mais également subjective, car se concrétisant dans la reconnaissance d’une communauté aux règles propres187. En somme, qui est expert et qui ne l’est pas est un constat ni objectif ni immuable.

    113. Au-delà de sa définition en tant que qualité attribuée à une personne, l’expertise se comprend également comme un processus. Ici, une des définitions les plus fréquemment citées est celle proposée par Philippe Roqueplo :

    « L’expression d’une connaissance scientifique ne revêt […] valeur d’expertise que dans la mesure où elle s’articule à un processus décisionnel et c’est précisément cette articulation qui lui confère valeur d’expertise »188.

    114. Entendue ainsi, l’expertise devient un outil de la décision ; le lien avec la première définition étant ici que cet outil s’appuie sur l’expertise (comprise ici en tant que qualité) des individus y prenant part. En tant que processus, l’expertise pourra être privée, publique ou contentieuse, acquérant ainsi le qualificatif du type de décision qu’elle entend éclairer. L’expertise privée concernant les relations entre particuliers, nous ne l’aborderons pas dans le cadre de cette présentation.

    115. L’expertise contentieuse, à savoir l’expertise utilisée au cours d’un procès, est un thème qui a suscité un fort intérêt de la part de la discipline juridique, et ce pour tous les secteurs, publics comme privés, et à toutes les échelles189. En filigrane de ces études apparaissent des questions récurrentes : quelles règles encadrent l’intervention de l’expert au sein du procès ? Se substitue-t-il au juge ? Comment concilier expertise, incertitude et prise de décision ? Ces questions se retrouvent également lorsque l’on considère l’expertise publique, ou « expertise de gouvernance », à savoir l’expertise mobilisée dans le cadre de l’action publique, si bien que certains auteurs ont proposé de transférer les règles applicables à l’expertise contentieuse à ce domaine (objectivité, indépendance et contradiction)190. C’est précisément de cette expertise qu’il sera question dans la première partie de notre étude. Mais un aspect important de l’expertise reste cependant à éclaircir avant de présenter la méthodologie et le plan général de cette première partie : la nature de l’expertise. Relève-t-elle de la science ? Est-elle une activité juridique ?

    Les controverses de l’expertise : détournement de la science et enjeux démocratiques

    116. Certains auteurs ont vu dans l’expertise un processus transgressif191 ou aliénant192 vis-à-vis des sciences qualifiées de « classiques ». L’idée sous-jacente est ici que l’expertise serait une forme impure d’activité scientifique car elle est teintée de considérations subjectives alors que la science a pour but de recherche une connaissance objective. Nous pensons qu’une pareille vision découle in fine d’une confusion entre l’expertise et l’activité scientifique. L’expertise, car elle se situe entre science et prise de décision, ne peut être identifiée totalement ni à l’une ni à l’autre. Pour reprendre la métaphore de Deborah M. Brosnan, « de la même manière qu’œufs et lait créent une pâte en étant mélangés, droit et science créent un élément nouveau en étant réunis »193. Appréhender l’expertise à la seule lumière des sciences peut donc mener à l’égarement. Également, croire que l’expertise se veut transgressive, car mettant en jeu des valeurs et des compromis face à l’incertitude, serait ignorer que l’activité de recherche scientifique a elle aussi recours à de telles pratiques194. Pour autant, dénoncer une vision angéliste de la science ne remet pas en cause ses particularités vis-à-vis d’autres activités ni son importance dans le développement du droit de l’environnement. Concernant ses particularités, Serge Gutwirth, en s’appuyant sur plusieurs travaux de sociologie et d’anthropologie des sciences, souligne que les productions de l’activité scientifique sont systématiquement « mises à l’épreuve » au sein des réseaux scientifiques195. Par exemple, les résultats d’une étude pourront être réutilisés par d’autres scientifiques à l’appui de leurs propres recherches. Ce faisant, la robustesse d’un résultat sera continuellement évaluée jusqu’à ce qu’il ne soit finalement plus remis en cause196. L’énoncé scientifique, bien que résultant d’une activité ne pouvant être soustraite à son environnement social, politique ou juridique, acquiert une particularité et une autorité vis-à-vis des autres discours par sa résistance à ces mises à l’épreuve. C’est cette même autorité qui a permis à plusieurs groupes scientifiques de mettre à l’agenda international des problématiques comme les organismes génétiquement modifiés197, la déplétion de la couche d’ozone198 ou encore les changements climatiques199.

    117. Pour une part importante de la doctrine, les véritables controverses de l’expertise ne résident pas dans sa nature scientifique ou juridique, mais dans les questions qu’elle soulève vis-à-vis de l’exercice du pouvoir200. L’enjeu essentiel est ici de déterminer les conditions d’une expertise respectant les principes démocratiques. Il ne s’agit plus de déterminer la nature exacte de l’activité experte, mais plutôt de s’interroger sur les conditions nécessaires pour une plus large participation aux processus d’expertise et un meilleur contrôle de ces derniers.

    118. Bien que porteuse de controverses, l’expertise reste néanmoins un impératif pour garantir la légitimité et l’efficacité du droit lorsque celui-ci a à réguler des domaines éminemment scientifiques et techniques201. Déconstruire l’expertise ne lui ôte pas son rôle moteur ; cette déconstruction permet de mieux l’interroger afin de s’assurer qu’elle contribue autant que possible à la légitimité et à l’efficacité du droit.

    Plan et méthodologie de la partie

    119. Ces éléments ainsi posés, il nous est possible à présent d’étudier l’expertise en Méditerranée. Pour ce faire, nous tenterons de déterminer l’ensemble des procédures et processus qui concourent à sa réalisation et sa réception par les décideurs de la région. Nous avons pour ambition d’ouvrir « la boîte noire »202 de l’expertise méditerranéenne afin de mieux comprendre les facteurs qui pourront jouer sur la transcription des conclusions de la Plateforme en normes juridiques.

    120. Bien entendu, en nous attachant à l’étude des documents officiels produits par les régimes environnementaux méditerranéens, nous ne pourrons pas voir l’expertise « telle qu’elle se fait »203, mais seulement telle qu’elle est présentée. Cette méthodologie a néanmoins deux avantages. Premièrement, elle permet de porter un regard critique sur la transparence de l’expertise méditerranéenne. Deuxièmement, elle fixe une référence utile pour d’autres analyses qui auraient pour vocation à confronter la réalité de terrain des régimes méditerranéens à l’image que ceux-ci renvoient.

    121. Nous nous intéresserons tout d’abord à l’institutionnalisation204 de l’expertise (titre 1). En examinant les façons dont l’expertise est générée et reçue au sein des différents régimes méditerranéens, nous tâcherons de mettre en exergue les particularités de la région dans ce domaine, tout en soulignant les diverses lacunes pouvant l’affecter. Ces particularités et lacunes sont autant d’éléments à prendre en considération si l’on souhaite comprendre les mécanismes d’évolution de ces régimes face à des éléments scientifiques et techniques nouveaux, par exemple les conclusions de l’IPBES.

    122. Nous nous intéresserons ensuite aux différentes façons dont les processus d’expertise méditerranéens se sont décloisonnés au cours des dernières années (titre 2). Ce décloisonnement se traduit tant par une ouverture de l’expertise aux acteurs extérieurs, notamment les ONG, que par une coordination croissante entre les régimes. En étudiant les mécanismes et les effets de ce décloisonnement, nous tenterons de déterminer si celui-ci contribue à garantir un traitement effectif et cohérent des conclusions de la Plateforme205. Nous verrons que si la coordination entre les régimes se révèle effective et efficace, l’implication des ONG dans l’expertise est quant à elle inégale.

    123. À travers cette démarche, nous espérons changer de focale en étudiant non pas l’impact de l’expertise sur le droit, mais l’influence du droit sur la construction de l’expertise et sa réception206. Ces questions sont liées, car si le droit conditionne l’activité experte et que celle-ci influence le droit, alors, par le truchement de l’expertise, le droit pose certaines conditions de sa propre évolution.

    Notes de bas de page

    184 On retrouve une telle vision des rapports entre science et droit (savoir et pouvoir) dans des ouvrages fréquemment cités, par exemple G. Ripert, Les forces créatrices du droit, LGDJ, Paris, 1994 (reproduction de l’édition de 1955), 431 p.

    185 Dictionnaire Larousse en ligne, consulté le 15/01/2018

    186 R. Evans, H. Collins, « Expertise: from attribute to attribution and back again? », in E. Hackett, O. Amsterdamska, M. Lynch et al. (dir.), The Handbook of science and technology studies, 3e éd., MIT Press, Cambridge, 2007, 1065 p., p. 609-630, p. 620, « The basic idea is simple—knowledge is acquired by socialization, so expertise is acquired through a prolonged period of interaction within the relevant community and is revealed through the quality of those interactions ».

    187 Pour reprendre l’expression de Pierre Benoit Joly, « un expert n’est donc pas indépendant de la communauté à laquelle il appartient et qui implique des attachements cognitifs, matériels, sociaux et économiques. Le travail de démarcation, essentiel pour asseoir la crédibilité de l’expertise, est d’une extrême fragilité ». P.-B. Joly, « La fabrique de l’expertise scientifique : contribution des STS », Hermès, La Revue, vol. 64, n° 3, 2012, p. 22-28, p. 23.

    188 P. Roqueplo, « L’expertise scientifique, consensus ou conflit ? », in J. Theys, B. Kalaora (dir.), La terre outragée. Les experts sont formels !, Éditions Autrement, Paris, 1992, 270 p., p. 157-169, p. 162. Philippe Roqueplo élabore davantage son analyse dans un ouvrage dédié, P. Roqueplo, Entre savoir et décision, l’expertise scientifique, INRA Éditions, Paris, 1997, 111 p.

    189 La liste des études sur l’expertise devant le juge est longue et les références suivantes ne prétendent pas à l’exhaustivité. O. Leclerc, Le juge et l’expert : contribution à l’étude des rapports entre droit et science, LGDJ, Paris, 2005, 471 p. ; E. Truilhé-Marengo (dir), La relation juge-expert dans les contentieux sanitaires et environnementaux, La Documentation française, Paris, 2011, 394 p. ; D. Peat, « The use of court-appointed expert by the International Court of Justice », The Bristish Yearbook of International Law, vol. 84, n° 1, 2014, p. 271-303. On citera également l’étude de Sheila Jasanoff qui fait figure de référence sur la question : S. Jasanoff, Science at the bar Law, science and technology in America, Harvard University Press, Cambridge, 1995, 285 p. Cet ouvrage a été partiellement traduit dans S. Jasanoff, O. Leclerc, Le droit et la science en action, Dalloz, Paris, 2013, 210 p.

    190 M.-A. Hermitte, « L’expertise scientifique à finalité politique, réflexion sur l’organisation et la responsabilité des experts », Justices : Revue Générale de Droit Processuel, vol. 8, 1997, p. 79-103.

    191 P. Roqueplo, Entre savoir et décision, l’expertise scientifique, op. cit., p. 35-50.

    192 E. Naim-Gesbert, Les dimensions scientifiques du droit de l’environnement. Contribution à l’étude des rapports de la science et du droit, Bruylant, Bruxelles, 1999, 808 p., p. 641-644 ; E. Naim-Gesbert, « Droit, expertise et société du risque », Revue du Droit Public, janvier 2007, n° 1, p. 33-41, p. 36, « L’expertise est une forme d’aliénation de la science classique ».

    193 Traduction de l’auteur. Phrase originale: « in the way that eggs and milk make batter when mixed, so too science and law create something new when put together ». D. Brosnan, « Science, law and the environment: the making of a modern discipline », Environmental Law, vol. 37, n° 4, 2007, p. 987-1006, p. 989.

    194 Voir S. Jasanoff (dir.), States of knowledge: The co-production of science and the social order, Routledge, Londres, 2004, 317 p. ; B. Latour, La science en action. Introduction à la sociologie des sciences, La Découverte, Paris, 2005, 663 p. Sur l’influence des valeurs, dans le développement scientifique et l’importance de leur prise en compte par le juriste voir également E. Biber, « Which science? Whose science? How scientific disciplines can shape environmental law », The University of Chicago Law Review, vol. 97, n° 2, 2012, p. 471-552.

    195 S. Gutwirth, « Sciences et droit de l’environnement : quel dialogue ? », in F. Ost, S. Gutwirth (dir.), Quel avenir pour le droit de l’environnement ?, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis Bruxelles, Bruxelles, 1996, 487 p., p. 21-42, p. 28.

    196 Ou jusqu’à ce que des faits nouveaux renversent la validité des résultats, provoquant ainsi un changement de paradigme comme le décrit Thomas Kuhn. T. Kuhn, La structure des révolutions scientifiques, Flammarion, Paris, 1983, 284 p.

    197 Avec la conférence d’Asilomar tenue en 1975.

    198 Avec l’influence des travaux publiés sur cette question par Frank Sherwood Rowland et Mario Molina. Ces deux scientifiques furent récompensés par le prix Nobel pour leurs recherches.

    199 Avec, entre autres, la première conférence mondiale sur le climat tenue en 1979.

    200 Ce que n’ont pas manqué de souligner de nombreux auteurs. Voir D. Kennedy, « Challenging expert rule: the politics of global governance », Sydney Law Review, vol. 27, n° 1, 2005, p. 5-28. Bien que ne se référant pas à l’expertise comme processus, mais plutôt comme qualité des individus façonnant la gouvernance mondiale, David Kennedy illustre néanmoins l’importance fondamentale d’encadrer l’activité de tels individus afin de garantir leur légitimité vis-à-vis des impératifs démocratiques. On citera également S. Jasanoff, « (No ?) accounting for expertise », Science and Public Policy, vol. 30, n° 3, 2003, p. 157-162. Dans cet article, Sheila Jasanoff voit l’expertise comme une délégation d’autorité qui, afin de garantir les droits de délégants, devrait obéir à des règles précises de transparence et d’ouverture.

    201 V. Lasserre, Le nouvel ordre juridique. Le droit de la gouvernance, Lexis Nexis, Paris, 2015, 369 p., p. 69 et s. Plus précisément, l’auteur voit dans l’expertise une source de sécurité juridique.

    202 B. Latour, La science en action, op. cit., Introduction, p. 21-55.

    203 Pour reprendre l’expression popularisée par M. Callon, B. Latour (dir.), La science telle qu’elle se fait. Anthologie de la sociologie des sciences de langue anglaise, La Découverte, Paris, 1990, 390 p.

    204 Le terme institution connaît plusieurs définitions selon que l’on se situe dans une discipline ou un autre. Nous entendons ici le terme institution comme « l’ensemble des mécanismes et structures juridiques encadrant les conduites au sein d’une collectivité ». G. Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, PUF, Paris, 2007, 986 p., p. 499, entrée « institution ».

    205 Nous apportons une définition plus précise de l’effectivité et de la cohérence du traitement des conclusions de la Plateforme dans l’introduction du titre 2.

    206 Cette approche est d’ailleurs préconisée par plusieurs auteurs. Par exemple, R. Encinas de Munagorri, O. Leclerc, « Théorie du droit et expertise : conclusion prospective sur les apports de l’analyse juridique », in R. Encinas de Munagorri (dir.), Expertise et gouvernance du changement climatique, LGDJ, Paris, 2009, 239 p., p. 199-229, p. 226 ; ou encore G. Martin, « La “vérité” scientifique à l’épreuve du droit ; l’exemple du droit de l’environnement », in J. Sueur (dir.), Le faux, le droit et le juste, Bruylant, Bruxelles, 2009, 442 p., p. 15-25, p. 25.

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    184 On retrouve une telle vision des rapports entre science et droit (savoir et pouvoir) dans des ouvrages fréquemment cités, par exemple G. Ripert, Les forces créatrices du droit, LGDJ, Paris, 1994 (reproduction de l’édition de 1955), 431 p.

    185 Dictionnaire Larousse en ligne, consulté le 15/01/2018

    186 R. Evans, H. Collins, « Expertise: from attribute to attribution and back again? », in E. Hackett, O. Amsterdamska, M. Lynch et al. (dir.), The Handbook of science and technology studies, 3e éd., MIT Press, Cambridge, 2007, 1065 p., p. 609-630, p. 620, « The basic idea is simple—knowledge is acquired by socialization, so expertise is acquired through a prolonged period of interaction within the relevant community and is revealed through the quality of those interactions ».

    187 Pour reprendre l’expression de Pierre Benoit Joly, « un expert n’est donc pas indépendant de la communauté à laquelle il appartient et qui implique des attachements cognitifs, matériels, sociaux et économiques. Le travail de démarcation, essentiel pour asseoir la crédibilité de l’expertise, est d’une extrême fragilité ». P.-B. Joly, « La fabrique de l’expertise scientifique : contribution des STS », Hermès, La Revue, vol. 64, n° 3, 2012, p. 22-28, p. 23.

    188 P. Roqueplo, « L’expertise scientifique, consensus ou conflit ? », in J. Theys, B. Kalaora (dir.), La terre outragée. Les experts sont formels !, Éditions Autrement, Paris, 1992, 270 p., p. 157-169, p. 162. Philippe Roqueplo élabore davantage son analyse dans un ouvrage dédié, P. Roqueplo, Entre savoir et décision, l’expertise scientifique, INRA Éditions, Paris, 1997, 111 p.

    189 La liste des études sur l’expertise devant le juge est longue et les références suivantes ne prétendent pas à l’exhaustivité. O. Leclerc, Le juge et l’expert : contribution à l’étude des rapports entre droit et science, LGDJ, Paris, 2005, 471 p. ; E. Truilhé-Marengo (dir), La relation juge-expert dans les contentieux sanitaires et environnementaux, La Documentation française, Paris, 2011, 394 p. ; D. Peat, « The use of court-appointed expert by the International Court of Justice », The Bristish Yearbook of International Law, vol. 84, n° 1, 2014, p. 271-303. On citera également l’étude de Sheila Jasanoff qui fait figure de référence sur la question : S. Jasanoff, Science at the bar Law, science and technology in America, Harvard University Press, Cambridge, 1995, 285 p. Cet ouvrage a été partiellement traduit dans S. Jasanoff, O. Leclerc, Le droit et la science en action, Dalloz, Paris, 2013, 210 p.

    190 M.-A. Hermitte, « L’expertise scientifique à finalité politique, réflexion sur l’organisation et la responsabilité des experts », Justices : Revue Générale de Droit Processuel, vol. 8, 1997, p. 79-103.

    191 P. Roqueplo, Entre savoir et décision, l’expertise scientifique, op. cit., p. 35-50.

    192 E. Naim-Gesbert, Les dimensions scientifiques du droit de l’environnement. Contribution à l’étude des rapports de la science et du droit, Bruylant, Bruxelles, 1999, 808 p., p. 641-644 ; E. Naim-Gesbert, « Droit, expertise et société du risque », Revue du Droit Public, janvier 2007, n° 1, p. 33-41, p. 36, « L’expertise est une forme d’aliénation de la science classique ».

    193 Traduction de l’auteur. Phrase originale: « in the way that eggs and milk make batter when mixed, so too science and law create something new when put together ». D. Brosnan, « Science, law and the environment: the making of a modern discipline », Environmental Law, vol. 37, n° 4, 2007, p. 987-1006, p. 989.

    194 Voir S. Jasanoff (dir.), States of knowledge: The co-production of science and the social order, Routledge, Londres, 2004, 317 p. ; B. Latour, La science en action. Introduction à la sociologie des sciences, La Découverte, Paris, 2005, 663 p. Sur l’influence des valeurs, dans le développement scientifique et l’importance de leur prise en compte par le juriste voir également E. Biber, « Which science? Whose science? How scientific disciplines can shape environmental law », The University of Chicago Law Review, vol. 97, n° 2, 2012, p. 471-552.

    195 S. Gutwirth, « Sciences et droit de l’environnement : quel dialogue ? », in F. Ost, S. Gutwirth (dir.), Quel avenir pour le droit de l’environnement ?, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis Bruxelles, Bruxelles, 1996, 487 p., p. 21-42, p. 28.

    196 Ou jusqu’à ce que des faits nouveaux renversent la validité des résultats, provoquant ainsi un changement de paradigme comme le décrit Thomas Kuhn. T. Kuhn, La structure des révolutions scientifiques, Flammarion, Paris, 1983, 284 p.

    197 Avec la conférence d’Asilomar tenue en 1975.

    198 Avec l’influence des travaux publiés sur cette question par Frank Sherwood Rowland et Mario Molina. Ces deux scientifiques furent récompensés par le prix Nobel pour leurs recherches.

    199 Avec, entre autres, la première conférence mondiale sur le climat tenue en 1979.

    200 Ce que n’ont pas manqué de souligner de nombreux auteurs. Voir D. Kennedy, « Challenging expert rule: the politics of global governance », Sydney Law Review, vol. 27, n° 1, 2005, p. 5-28. Bien que ne se référant pas à l’expertise comme processus, mais plutôt comme qualité des individus façonnant la gouvernance mondiale, David Kennedy illustre néanmoins l’importance fondamentale d’encadrer l’activité de tels individus afin de garantir leur légitimité vis-à-vis des impératifs démocratiques. On citera également S. Jasanoff, « (No ?) accounting for expertise », Science and Public Policy, vol. 30, n° 3, 2003, p. 157-162. Dans cet article, Sheila Jasanoff voit l’expertise comme une délégation d’autorité qui, afin de garantir les droits de délégants, devrait obéir à des règles précises de transparence et d’ouverture.

    201 V. Lasserre, Le nouvel ordre juridique. Le droit de la gouvernance, Lexis Nexis, Paris, 2015, 369 p., p. 69 et s. Plus précisément, l’auteur voit dans l’expertise une source de sécurité juridique.

    202 B. Latour, La science en action, op. cit., Introduction, p. 21-55.

    203 Pour reprendre l’expression popularisée par M. Callon, B. Latour (dir.), La science telle qu’elle se fait. Anthologie de la sociologie des sciences de langue anglaise, La Découverte, Paris, 1990, 390 p.

    204 Le terme institution connaît plusieurs définitions selon que l’on se situe dans une discipline ou un autre. Nous entendons ici le terme institution comme « l’ensemble des mécanismes et structures juridiques encadrant les conduites au sein d’une collectivité ». G. Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, PUF, Paris, 2007, 986 p., p. 499, entrée « institution ».

    205 Nous apportons une définition plus précise de l’effectivité et de la cohérence du traitement des conclusions de la Plateforme dans l’introduction du titre 2.

    206 Cette approche est d’ailleurs préconisée par plusieurs auteurs. Par exemple, R. Encinas de Munagorri, O. Leclerc, « Théorie du droit et expertise : conclusion prospective sur les apports de l’analyse juridique », in R. Encinas de Munagorri (dir.), Expertise et gouvernance du changement climatique, LGDJ, Paris, 2009, 239 p., p. 199-229, p. 226 ; ou encore G. Martin, « La “vérité” scientifique à l’épreuve du droit ; l’exemple du droit de l’environnement », in J. Sueur (dir.), Le faux, le droit et le juste, Bruylant, Bruxelles, 2009, 442 p., p. 15-25, p. 25.

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