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Jean Jacquart et la Société d’histoire moderne et contemporaine de Compiègne

Résumé

Mes premiers contacts avec Jean Jacquart remontent à 1974, lorsque professeur d’histoire moderne à l’université d’Amiens, il préfaça un recueil de documents sur la préparation des États généraux de 1789, composé avec ma collègue Simone Maudet du lycée Pierre d’Ailly de Compiègne et publié par le CRDP d’Amiens. Mais c’est surtout dans le cadre des Sociétés savantes de Paris et d’Île-de-France que je retrouvai le président Jean Jacquart, lorsque j’entrepris, à partir de 1979, les démarches d’adhésion à la Fédération francilienne de la Société d’histoire moderne et contemporaine de Compiègne, créée en 1978. Son écoute bienveillante et rigoureuse permit non seulement l’intégration dans la Fédération de notre jeune société, mais aussi celle conjointe de la plus ancienne Société Historique de Compiègne, débouchant sur une fructueuse collaboration entre nos sociétés compiégnoises et le centre parisien depuis les années 1980 et 1990.


Texte intégral

1Ce n’est pas sans émotion que je me propose d’évoquer, plus de vingt ans après sa disparition, le souvenir de Jean Jacquart, qui fut pour beaucoup d’entre nous un maître, un collègue, mais aussi l’actif et chaleureux président de la Fédération des Sociétés savantes de Paris et d’Île-de-France, laquelle accueillit avec bienveillance, en 1981, la Société d’histoire moderne et contemporaine de Compiègne, dont j’avais été l’un des co-fondateurs en 1978 et que j’ai continué d’animer comme secrétaire général puis comme président jusqu’en 2019.

2Mes premiers contacts avec Jean Jacquart remontaient à 1974, à l’époque où il enseignait l’histoire moderne à l’université d’Amiens. Alors tout nouveau professeur en histoire-géographie au lycée Pierre d’Ailly de Compiègne, j’avais entamé mes premières recherches dans les archives municipales de la ville sur la période révolutionnaire. Avec ma jeune collègue Simone Maudet, devenue depuis Simone Lejeune, nous avions mis au point pour le CRDP d’Amiens, un ouvrage pédagogique présentant le cahier de doléances du tiers état de Compiègne en 1789 et des documents sur la préparation des États généraux1. Jean Jacquart, répondit bien volontiers à la demande du directeur du CRDP, de rédiger un avant-propos à notre publication, ce qui fut l’occasion d’une première rencontre et d’échanges fructueux avec lui. Quelques années plus tard, m’étant inscrit en thèse à l’Université de Paris I, où je suivais le séminaire de l’IHRF du professeur Albert Soboul, je retrouvai le professeur Jean Jacquart à la Sorbonne, où il avait entre-temps obtenu sa mutation.

3En 1978, avec le proviseur et quelques collègues du lycée d’Ailly, je pris l’initiative de créer la Société d’histoire moderne et contemporaine de Compiègne, dont les premiers travaux furent consacrés à la période révolutionnaire, mais dont le champ s’élargit bientôt à d’autres aspects de l’histoire moderne et contemporaine de la ville, qui restaient largement délaissés par la vénérable Société Historique de Compiègne, remontant au Second Empire, qui était alors surtout portée sur l’archéologie, les périodes antique et médiévale, les monuments et l’histoire de l’art de la cité. Notre société avait eu d’emblée des liens avec la Société des Études Robespierristes et sa revue Annales Historiques de la Révolution française, dont nous avions calqué le titre pour notre propre bulletin, intitulé Annales Historiques Compiégnoises2. Cependant, l’élargissement croissant du champ historique de nos recherches nous incita à nous rapprocher d’autres structures susceptibles d’accroître notre rayonnement et de faciliter les échanges avec nos consœurs régionales. Il n’existait aucun regroupement des nombreuses sociétés savantes de la Picardie ni de l’Oise3, mais comme l’essentiel du territoire de notre département avait appartenu au gouvernement d’Île-de-France et à la généralité de Paris, la Fédération des Sociétés savantes de Paris et d’Île-de-France s’était ouverte à des sociétés de l’Oise francilienne, accueillant notamment la Société Archéologique de Creil, aujourd’hui disparue, au début des années 1970. Me référant à ce précédant, je sollicitai dès 1979 l’adhésion à la Fédération de notre Société d’histoire moderne et contemporaine, une démarche qui me donna l’occasion de renouer avec Jean Jacquart, devenu l’actif président de la Fédération francilienne. Compte tenu de l’existence bien antérieure de la Société Historique de Compiègne et de notre toute récente création, l’AG de la Fédération estima d’abord devoir surseoir à notre demande pendant un an. Je mis à profit ce délai pour persuader notre consœur compiégnoise d’opérer la même démarche auprès de la Fédération, la coexistence de plusieurs sociétés dans une même ville ne m’apparaissant proscrite par aucune loi et plutôt relever d’une saine et légitime émulation. Cette procédure aboutit un an après, et les deux sociétés compiégnoises furent accueillies tour à tour dans la Fédération, qui gagna deux nouvelles et actives adhérentes dans l’Oise, rejointes par la suite par des sociétés du sud de département4.

4J’avais particulièrement apprécié en cette occasion l’écoute fraternelle, la grande ouverture d’esprit et le sens de l’équité du président Jacquart, qui sut apprécier nos efforts et encourager nos travaux5, conscient aussi sans doute de la nécessité de rénover sinon de dépoussiérer les sociétés savantes par l’apport de sang neuf de nouvelles générations, en particulier d’enseignants du secondaire et de jeunes chercheurs. C’était d’ailleurs l’époque où fleurissaient de nouvelles initiatives en région parisienne ou dans les départements, comme le comité de recherches historiques sur la Révolution française en Essonne6, créé par mon collègue et ami Serge Bianchi, à l’occasion de la commémoration du bicentenaire de 1789. L’accueil conjoint de nos deux sociétés compiégnoises dans la Fédération eut des effets bénéfiques, contribuant à nous rapprocher et débouchant sur de fructueuses collaborations, comme la rédaction commune, à mon initiative, d’une Histoire de Compiègne, publiée en 1987 et devenue un ouvrage de référence. Nous avons aussi organisé en commun l’accueil et le plein succès de la réunion annuelle des présidents de la Fédération, tenue à Compiègne en novembre 1992, nous donnant l’occasion de faire découvrir à Jean Jacquart et à aux amis franciliens qui purent faire le déplacement, une part de nos richesses patrimoniales. Le président Jacquart, qui tint au cours de son long mandat à rendre visite au moins une fois à toutes les sociétés adhérentes de la Fédération, revint trois ans plus tard dans notre ville prononcer une conférence devant nos sociétés : le 18 octobre 1995, il traita brillamment de « La communauté villageoise d’Ancien Régime », un de ses sujets de prédilection7.

5Jean Jacquart nous a également incités à participer aux rencontres scientifiques de la Fédération : je me souviens ainsi d’avoir communiqué au VIe colloque d’histoire régionale organisé à Versailles en avril 1989, consacré à la Révolution en Île-de-France8, aux côtés Jean-Marc Moriceau, Serge Bianchi, Annie Crépin ou Jacques Dupâquier, sous la présidence conjointe de Jean Jacquart et de Michel Vovelle.

 

6Par sa haute autorité intellectuelle, par son engagement persévérant et quotidien, grâce à ses grandes qualités humaines, son ouverture d’esprit, sa proximité et sa joviale familiarité, Jean Jacquart a su animer brillamment la Fédération pendant de nombreuses années et lui donner un appréciable rayonnement, contribuant à la confrontation stimulante des idées et au rapprochement des chercheurs, apportant du lien entre nos sociétés et leurs membres, permettant de dépasser le localisme et la routine qui guettent nos associations. De ces trois décennies de présidence familière et bienveillante de Jean Jacquart, nous gardons tous un grand et bon souvenir et nous tenons à lui exprimer notre plus vive reconnaissance.

Bibliographie

Bernet Jacques, Maudet Simone, « Compiègne en 1789. Cahier de doléances du tiers état et préparation des États généraux », Annales du CRDP d’Amiens, 1974, 85 p., avant-propos de Jean Jacquart, p. 5-6.

Bernet Jacques, « Les débuts de la Révolution vus par un clerc-séculier du Multien (1788-1792) », dans Mémoires de la Fédération de Paris et d’Île-de-France, « La Révolution en Île-de-France », tome 41, 1990, p. 33-41.

Annales Historiques Compiégnoises, no 12, automne 1980, Les orgues de Compiègne et de sa région, 102 p.

Notes de bas de page

1 J. Bernet, S. Maudet, Compiègne en 1789. Cahier de doléances du tiers état et préparation des États généraux, p. 5-6.

2 Revue trimestrielle de 1978 à 1989, devenue semestrielle depuis 1990, les Annales Historiques Compiégnoises sont arrivées à leur no 163, daté de l’automne 2021.

3 En revanche, une Fédération des sociétés de l’Aisne, créée en 1946 sous l’impulsion du préfet et des archives départementales à Laon, reste toujours en activité.

4 Dans les années 2000, adhérèrent successivement, pour une part à notre instigation, les sociétés de Senlis, du Valois, puis l’Association pour la mémoire ouvrière et industrielle du bassin creillois, ayant pris le relais de l’ancienne Société Archéologique depuis longtemps disparue.

5 Je me souviens qu’il apprécia particulièrement le no 12 spécial de notre revue, paru à l’automne 1980, consacré au répertoire des orgues de Compiègne et sa région, qui fait encore référence sur le sujet.

6 Devenu de nos jours Comité de recherches historiques sur les révolutions en Essonne, désormais adhérent de la Fédération des sociétés de Paris et d’Île-de-France.

7 Le compte-rendu de cette conférence a paru dans le no 63-64 des Annales Historiques Compiégnoises, daté du printemps 1996, p. 53.

8 Actes de ce colloque publiés en 1990, dans le tome 41 des Mémoires de la Fédération. J. Bernet, « Les débuts de la Révolution vus par un clerc-séculier du Multien (1788-1792), p. 33-41.

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