Du chaud dans le froid
L’éducation populaire appliquée à la recherche
p. 275-295
Texte intégral
1Inégalité d’accès aux études, domination par la connaissance, humiliation par le savoir : le milieu de la recherche génère et subit ces violences. Une violence qui pourrait peut-être se désamorcer grâce à une approche créative de la recherche, par exemple en s’appuyant sur l’art et l’animation pour former « un processus de connaissance critique de soi, de la société, des “publics” […] conçues et co-construites puis restituées ensemble. » (Colloque international ISIAT, 2019).
2De l’École à l’Université, de frétillantes alternatives n’ont cessé d’émerger afin de neutraliser ces violences et ainsi œuvrer à l’émancipation de la recherche ainsi que de ses conditions d’utilisation, d’accessibilité et de transmission. Par exemple :
3– Certains instituteurs vont de leur propre chef mettre en place des ateliers de philosophie dès l’école primaire, affichant ainsi un engagement pour la formation critique des esprits dès le plus jeune âge : des cours d’autodéfense intellectuelle.
4– Des chercheurs vont s’engager pour favoriser la science ouverte et ainsi lutter contre la privatisation des résultats de la recherche. Il s’agit là de neutraliser les violences inhérentes aux restrictions d’accessibilité.
5– Des étudiants et enseignants vont régulièrement s’engager dans des mouvements sociaux (mouvements contre la « loi Travail » en 2016, mouvements contre la sélection à l’université en 2018 / 2019, etc.), notamment en proposant des alternatives pédagogiques lors d’occupation de facs, changeant ainsi momentanément le fonctionnement de l’institution. Cela revient à faire exister de nouvelles manières de faire dans les milieux qui ont vu naître les violences et dérives de la recherche.
6– Etc.
7Associations, collectifs et maquis universitaires embrassent alors l’éducation populaire. Une éducation qui, comme l’explique Camille Laurens, n’a pas pour dessein de singer la culture dominante afin de s’y adapter. C’est tout le contraire :
« Il s’agit moins d’une éducation du peuple conduisant à ce qu’il s’approprie les savoirs et les représentations collectives de la bourgeoisie, que d’une méthode permettant d’acquérir une analyse et une émancipation, une prise de conscience et une puissance d’action. Il s’agit moins de porter les "masques blancs" de la culture bourgeoise sur la "peau noire" du prolétariat que d’assumer pleinement la "négritude" d’une sous-culture pour mieux analyser les rapports de domination qu’elle entretient avec les autres » (Laurens, 2016, pp. 125-126).
8Dans cet article nous commencerons tout d’abord par dresser une liste non-exhaustive mais détaillée des différentes violences qui peuvent entraver le milieu de la recherche, la pédagogie, la transmission de la connaissance et ses conditions d’accès. Ensuite, nous opposerons une alternative à ces violences à travers le récit d’expérience de notre collectif d’éducation populaire, le Laboratoire des Mouvements Sociaux. Enfin, c’est en s’appuyant sur l’expérience d’une association d’éducation populaire, L’Etabli, que nous déterminerons la nature et les limites de ce type d’alternative.
Les dérives de la recherche : entre violences, cultisme et marchandisation
Violence et dérives sécuritaires du langage de la recherche
9Une première violence serait celle du langage : il est des disciplines qui se drapent d’un langage de terreur, de mots pareils à des objets célestes, éthérés, inaccessibles. Lorsque la recherche devient à ce point ésotérique et obscure, Baudouin Jurdant y voit « un ésotérisme résultant non pas d’une volonté de secret faisant appel à un camouflage artificiel mais d’une nécessité interne à l’activité scientifique elle-même » Jurdant, 2009, p. 173). Mais si la mise en place d’un jargon est en effet parfois indispensable pour pouvoir qualifier les choses, le langage peut tout de même être artificiellement complexifié simplement pour appuyer le caractère scientifique d’une discipline. Lorsque les sociologues Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron évoquaient le langage si particulier de leur science, ils mettaient en avant sa fonction protectrice/sécuritaire : le but de ce langage ne serait pas tant de trouver les mots justes que d’être en rupture avec des mots faux. Ces sociologues craignaient en effet qu’aucune distinction ne soit faite entre la sociologie scientifique et la sociologie spontanée (courante, amateur) :
« […] à tous les moments d’un travail de recherche il faut sans cesse remettre à la question les idées sur lesquelles on pense, les mots qu’on emploie pour penser, etc. C’est parce que la tache de rupture et de construction est une tâche qui en sociologie est toujours à recommencer contre les infiltrations de la sociologie spontanée qui passent par le langage. Ce langage étant ici l’instrument de cette infiltration de la sociologie spontanée dans le discours savant » (Passeron, 1967, vidéo).
10On peut éventuellement comprendre cette attitude sécuritaire dont l’objectif serait de protéger la rigueur et l’intégrité d’une science. Mais à chaque mesure sécuritaire, on a de plus en plus de mal à évoluer sur ces terrains sur lesquels les obstacles fleurissent : barrières jargonneuses, mines linguistiques, tranchées techniques. Protéger une science de la sorte c’est aussi la rendre moins accessible qu’elle ne pourrait l’être.
11C’est ainsi que la violence passe par le langage. Une violence que les enfants de Barbiana119 ont éprouvé : dans les années 60, rejetés et humiliés par l’école, ces jeunes trouvèrent refuge auprès de l’éducateur Lorenzo Milani dans l’école expérimentale de Barbiana. De leurs rages naquit une lettre, adressée à leur ancienne maîtresse qui les avait recalés :
« À Barbiana j’avais appris que les règles de l’écriture sont : Avoir quelque chose à dire et qui soit utile à tout le monde ou du moins à beaucoup de gens. Savoir à qui on écrit. Rassembler tout ce qui peut servir. Trouver une logique pour mettre de l’ordre dans tout ça. Éliminer tous les mots qui ne servent pas. Éliminer tous les mots dont on n’a pas l’habitude de se servir en parlant. Ne pas se fixer de limites de temps » (Les enfants de Barbiana, 1968, p. 28).
12Cette attitude linguistique, c’est du pragmatisme, du bon sens. Une méthode incontestablement adaptée à la communication courante mais qui peut en revanche se révéler incompatible avec certains pans de la recherche. Cette attitude de simplification systématique ne doit pas être disqualifiée pour autant. Cette philosophie pourrait au contraire servir d’arbitre et ainsi sans cesse planer au-dessus de la recherche pour la tenir sous son joug et la rappeler à l’ordre si besoin afin de prévenir toute complexification non nécessaire, soit toute dérive sécuritaire. L’idée est de ne pas accepter ou valider une norme de façon automatique, quand bien même celle-ci ferait, littéralement, autorité. Un esprit critique commanderait au contraire de systématiquement questionner la pertinence d’un langage en s’interrogeant sur ses objectifs et ses effets.
Violences des modalités du transfert des connaissances
13Une deuxième violence systémique serait celle des modalités du transfert des connaissances. Nous pourrions diviser cette violence en deux parties : une partie endogène (interne), c’est-à-dire une violence qui dépend directement des institutions, et une partie exogène (externe), soit une violence qui ne dépend pas directement des institutions, mais qui s’applique aux agents qui les composent.
14Cette violence endogène liée aux modalités de transfert des connaissances passe avant tout par l’ensemble des rituels et prérequis nécessaires pour accéder aux connaissances dans les lieux prévus à cet effet. Les portes de la plupart des bibliothèques ont beau être ouvertes à tous, elles ne s’adressent avant tout qu’aux personnes habituées à lire régulièrement et à venir se promener dans de tels bâtiments. Le dédale des couloirs d’une bibliothèque d’une grande ville peut faire fuir plus d’un usager peu averti qui, s’il ne sort pas du bâtiment, peut être amené à se rabattre sur des produits culturels qu’il connaît déjà, sans que sa venue dans le lieu puisse lui ouvrir de nouveaux horizons de connaissances. Dans bien des musées, le même problème survient avec une violence symbolique liée à l’architecture et à la géographie de ces lieux. Quasi exclusivement situés dans les centres-villes, ce sont des lieux de savoirs conçus par et pour une certaine bourgeoisie culturelle, ostracisant de fait une large frange des populations. Des périphéries où l’offre culturelle, et de facto la culture scientifique, ne sont pas ou peu représentées.
15Pour atténuer ces violences, on compte bien souvent sur l’animation et la médiation scientifique. Mais au même titre que l’art, ces interventions sociales ne sont à l’abri d’aucune maladresse. C’est ainsi qu’une violence discursive peut tout de même être exercée par les dispositifs de la médiation scientifique, notamment par la vulgarisation :
« Au plan des effets sociaux, elle [la vulgarisation scientifique] produit le mythe de la scientificité en opposant deux mondes déphasés l’un par rapport à l’autre : celui de la science et celui du quotidien. Ce qui a pour effet de contrer les effets recherchés, au lieu d’un rapprochement et d’un partage entre les scientifiques et le public, l’écart cognitif se creuse encore plus profondément par un renforcement symbolique : la science provient d’un ailleurs d’où origine le "vrai" et d’un temps "pur", détaché du vécu conflictuel quotidien. Savants et publics évoluent dans des espaces-temps différents : ils peuvent se croiser mais non se rencontrer. La vulgarisation orchestre le croisement mais interdit la rencontre » (Schiele, 1983, p. 166).
16En voulant rapprocher scientifiques et non-scientifiques, la médiation des sciences participe à produire l’effet strictement inverse, en accentuant le fossé séparant les deux populations.
17Pour l’université, la violence est d’autant plus symbolique que les cours principaux ayant lieu en amphithéâtres peuvent être déroutants pour le nouvel étudiant tout juste sorti du lycée. Il existe également des dérives institutionnelles. Si ces dérives ne sont pas universelles, elles ne sont pas exceptionnelles non plus. Dans certaines filières de droit par exemple, on peut ainsi observer des situations où certains enseignants désertent les TD au profit des CM pour des raisons économiques (1 heure de CM équivalant à 1,5 heures de TD120 et adoptent ensuite une conduite qui se caractérise par un détachement total de l’enseignant, qui n’a qu’à lire son cours durant le créneau horaire prévu, les échanges avec les étudiants étant réservés aux heures de travaux dirigés. Le summum étant atteint lorsque ce même enseignant renvoie les étudiants à l’achat de son livre dont l’acquisition est indispensable à la préparation de l’évaluation.
18Dans un autre registre, l’aspect symbolique valorisant pour le conférencier effectuant un cours magistral ne doit pas être laissé de côté. Il contribue à légitimer le statut de professeur et de distinguer celui-ci symboliquement de ses étudiants en créant une hiérarchisation évidente. L’emplacement même du professeur sur sa chaire, dans l’amphithéâtre, crée une violence symbolique : en étant légèrement surélevé, visible par tous les étudiants quelle que soit leur place dans l’amphithéâtre, et le seul bénéficiant d’un système de sonorisation, l’enseignant se trouve en position dominante. Un étudiant qui souhaiterait poser une question ou bien même contester un propos du professeur serait inaudible et presque invisible sur les bancs de l’amphithéâtre, tandis que l’orateur peut faire le choix de créer ou non des interactions avec son public. Légitimé par l’architecture du lieu, le « sachant » est intouchable, tandis que les « ignorants » n’ont presque comme unique choix que l’écoute et la prise de note. Cette violence symbolique renforce la sensation des étudiants d’être peu encadrés et d’être seuls face à un milieu pédagogique ressenti comme étant hors-sol, établissant une distance entre eux et les étudiants.
19La violence liée aux modalités de la transmission des connaissances est également exogène, et semble provenir avant tout du contexte social. Cette violence est donc indépendante des lieux de savoirs, accessibles bien souvent sans frais ou presque pour les usagers : bibliothèques, musées, universités, tous ces établissements disposent de tarifications sociales ou bien de gratuité totale. Dans le cas de l’éducation, des bourses sociales sont d’ailleurs mises en place pour permettre de financer les études de celles et ceux qui ne disposent que de peu de ressources financières. Cela sous-entend de facto qu’aucune discrimination sociale ne pourrait survenir et empêcher l’accès à la connaissance pour certaines classes sociales. Pourtant, en se penchant sur la réalité concrète de l’Université, il est aisé de mesurer la représentation de chaque classe sociale. Dans son édition de 2019 du rapport sur les inégalités en France, l’Observatoire des inégalités se basant sur les statistiques du ministère indique une sous-représentation des milieux populaires dans l’enseignement supérieur : « les enfants d’ouvriers représentent 12 % des étudiants […] alors que les ouvriers représentent près d’un quart de la population active » (Brunner et Maurin, 2019, pp. 74-75). Le rapport poursuit en indiquant que « les enfants d’ouvriers disparaissent au fil des études », c’est-à-dire qu’à chaque niveau successif (Licence, Master, Doctorat) la représentation des enfants d’ouvriers diminue ; elle est divisée par deux entre la licence et le doctorat, tandis que la proportion d’étudiants dont les parents sont cadres augmente à chaque niveau. Cette inégalité peut provenir en premier lieu de la nécessité pour certains étudiants d’obtenir un emploi en parallèle de leurs études, afin de les financer, ce qui concerne avant tout les étudiants issus de classes sociales les plus pauvres. Les étudiants salariés risquent donc d’avoir moins de temps à consacrer à leurs études, puisqu’ils sont forcés d’utiliser une part de leur temps en dehors de l’Université à travailler. Parfois, ils sont même dans l’impossibilité d’assister à la totalité de leurs cours, ce qui induit une difficulté supplémentaire pour réussir à valider leur année universitaire. Ainsi, selon une étude publiée dans la revue Économie et statistique, éditée par l’INSEE, « le fait de travailler diminue significativement la probabilité de réussite à l’examen » (Beffy, Fougère et Maurel, 2009, pp. 38-39). Les chercheurs détaillent : « s’ils ne travaillaient pas, les étudiants salariés auraient une probabilité plus élevée de 43 points de réussir leur année » (ibid, pp. 41-42). De même, la vie sociale et culturelle liée à l’Université (sorties culturelles, révisions collectives…) qui peut entraîner une émulation positive entre étudiants et donc une motivation à étudier davantage ainsi qu’à acquérir une méthodologie plus poussée, n’est pas accessible aux étudiants salariés. Enfin, d’après l’Observatoire national de la vie étudiante, les difficultés financières peuvent pousser certains étudiants à renoncer à des soins de santé : environ 13,5 % des étudiants en 2016 y ont renoncé pour des raisons purement financières (Belghith, Ferry, Patros et Tenret, 2017, p. 14). De même, certains vont subir des fragilités psychologiques : 84,1 % des étudiants disent avoir eu au moins une difficulté psychologique en 2016 (Ibid, p. 21). En conséquence, ils ont statistiquement davantage de risques de ne pas valider leur année.
20Cependant, ce tri social ne s’applique pas uniquement à l’enseignement supérieur. En effet, comme l’indique l’Observatoire des inégalités, les différences de niveau scolaire commencent dès le primaire et le collège. Toujours en se basant sur les données du ministère, il ressort que le niveau scolaire des élèves est corrélé directement avec le milieu social, et les taux de redoublement sont cinq fois plus élevés pour les enfants d’ouvriers que pour les enfants de cadres supérieurs (Brunner et Maurin, 2019, p. 69). L’explication de ces disparités peut se trouver dans les inégalités sociales liées à la géographie. L’Observatoire des inégalités pointe ainsi le manque de moyens consacrés à l’éducation des élèves dits « défavorisés » (c’est-à-dire dont le parent référent est issu d’une classe sociale pauvre économiquement), dont les trois quarts étudient en dehors de structures liées à l’éducation prioritaire, donc ne prenant pas en compte la situation sociale de ces élèves (Ibid, p. 162).
21Outre cette violence dans l’accessibilité aux savoirs, les modalités de transmission de connaissances peuvent également être vectrices d’idéologies questionnables. Des structures comme les CCSTI (centre de culture scientifique, technique et industrielle) ou les musées d’histoire naturelle ne sont pas des tiers-lieux neutres diffusant simplement les résultats des sciences. L’apparition et le développement des magazines et revues scientifiques (Sciences & Vie, La Recherche, etc.) ou de services entiers dédiés à la communication dans les instituts de recherche ne tiennent pas forcément ce rôle-là non plus. Romain Brette portait ainsi l’analyse suivante :
« De problème de l’information scientifique du grand public est un problème lui aussi complexe qui ne peut s’envisager en faisant abstraction du système économique et politique dans lequel la production et la diffusion des connaissances s’inscrivent. C’est, plus largement, un problème de démocratie. » (Brette, 2019)
22Qui produit les savoirs, et pour qui ? Qui diffuse les savoirs, et pourquoi ? Bien que d’apparence intangible, les réponses à ces questions fluctuent en fonction de l’organisation politique et économique des sociétés. L’exercice des sciences et de la diffusion des savoirs au sein d’un capitalisme néo-libéral n’est pas sans conséquence sur leur neutralité. Il y a une idéologie derrière la vulgarisation scientifique. Conscientisée ou non par ses agents, celle-ci infuse ensuite dans la société et ancre une vision des sciences bien particulière.
Glorification des progrès de la recherche
23Une des premières remarques relatives à cette diffusion des sciences concernerait la notion de progrès, la glorification des progrès de la recherche plus précisément. Et l’idée toujours prégnante que les sciences et techniques sont et seront la réponse aux grandes problématiques traversant nos époques. En témoigne le discours du chef de l’État français, Emmanuel Macron, aux 80 ans du CNRS :
« J’ai parfois comparé notre époque à celle des années 1930, donc je ne comparerai pas cette année à l’année d’il y a 80 ans, mais je suis sûr d’une chose, c’est que tous nos défis, aujourd’hui, ont besoin de science et de connaissances pour être relevés, les défis technologiques, les défis de capacité de la société à les relever, donc de sa propre compréhension, les défis anthropologiques qui sont les nôtres face à ces changements, le défi climatique, le défi organisationnel. Donc on a besoin de science plus que jamais. »121
24Réminiscence du positivisme d’Auguste Comte et héritière des positions scientistes des siècles précédents, cette vision des sciences et du progrès empêche toute remise en question fondamentale des institutions scientifiques. En parallèle, cette idéologie glorificatrice – des techniques plus que des sciences dans le cas suivant – se trouve également alimentée par la culture entrepreneuriale à tous les niveaux. Les géants de la Silicon Valley (Space X en tête, Google, Paypal, Facebook, etc..) investissent des sommes colossales depuis plusieurs années dans les champs technoscientifiques du transhumanisme, de l’intelligence artificielle ou de la génétique, et dont les porte-paroles trustent les champs médiatiques. On ne s’étonnera donc pas de retrouver des personnalités comme Elon Musk (SpaceX), Jeff Bezos (Amazon) ou Mark Zuckerberg (Facebook) parmi les plus influentes du monde, et dont l’influence s’étend bien au-delà de la seule sphère entrepreneuriale.
25Présenter les sciences et techniques de manière exclusivement bénéfique peut amener au conditionnement généralisé d’une société en leur faveur. Il n’est pas question ici de jugement de valeur au sujet des sciences et techniques, mais bien d’insister sur le fait que dans une société capitaliste néo-libérale – où l’essor des techniques reste une maille importante de la viabilité du système économique –, la glorification des progrès scientifiques ne peut s’appréhender indépendamment des cadres politiques et économiques gravitant autour de la recherche et de la communication scientifique. L’exemple des magazines et revues scientifiques est assez éloquent de ce point de vue-là : l’apparition et l’expansion de ce type de supports dans les années 1950 a suscité le développement d’un véritable marché économique lié à l’édition scientifique. Un marché qui aujourd’hui régit et dénature le domaine de l’édition scientifique. Et qui voit la superposition de logiques commerciales aux logiques initiales de diffusion des savoirs. Bernard Schiele observait ainsi une possible dérive de la vulgarisation qui, au final, pourrait devenir plus politique que scientifique :
« Dans cet esprit, la vulgarisation relaierait moins la science que la politique et au-delà les enjeux économiques intéressés à cette mutation. Elle ne remplirait alors que le rôle d’un appareil d’État chargé de créer un consensus social, la diffusion du savoir ne serait qu’un paravent. Ou, plus précisément, le discours sur la technologie – puisque progressivement elle prend le pas sur la science – n’aurait comme visée opératoire que la familiarisation du public avec un ensemble d’idées et de notions nécessaires à la maîtrise usuelle des objets technologiques » (Schiele, 1983, pp. 156-185).
26Dans l’espace public, cette idéologie se révèle potentiellement très pernicieuse : « Tel est le but de tout conditionnement : faire aimer aux gens la destination sociale à laquelle ils ne peuvent échapper » (Huxley, 2009, p. 35).
27Il ne s’agit pas d’attribuer ce rôle-là à la diffusion des sciences en France aujourd’hui, mais bien de garder à l’esprit que toute glorification excessive des progrès scientifiques par les instances scientifiques ou assimilées (CCSTI, musées, laboratoires, etc.) provoque ce genre de conditionnement.
Le marketing de la recherche
28Suite logique de la glorification du progrès, l’apparition du marketing et du management dans le champ scientifique joue également un rôle dans les modalités de diffusion des connaissances et dans la nature même des disciplines scientifiques. Les sciences deviennent divertissantes, doivent devenir divertissantes. Elles deviennent un produit trouvant une place sur le marché du divertissement.
29C’est la deuxième remarque relative à la diffusion des connaissances scientifiques : la médiation scientifique se retrouve à suivre les mêmes logiques d’efficience que les entreprises. Combien de personnes sont touchées par notre communication ? Combien de personnes sont attendues à tel ou tel évènement ? Comment faire pour toucher encore plus de personnes ? Une forme de publicité, de promotion des sciences émerge de ces pratiques. Même si la rentabilité économique n’est pas toujours une fin en soi pour ces structures, et si les techniques de marketing employées le sont avant tout pour contrer une forme de précarité (difficultés pour trouver des financements), les modalités de diffusion des sciences s’en trouvent là encore affectées.
30Lors du congrès de l’AMCSTI122 en 2017, c’est bien une responsable communication de Décathlon qui exposa, lors d’un parcours thématique, les techniques communicationnelles et marketing de son entreprise afin d’augmenter sa clientèle :
« Afin d’appréhender ce qui est le second espace d’occupation du temps de loisir – après le domicile personnel – à savoir les centres commerciaux, le groupe visitera Décathlon village qui relève le défi de capter un flux de visiteurs et qui sera l’occasion d’illustrer comment se mène une réflexion autour de l’expérience client. »123
31L’Association des musées et centres pour le développement de la culture scientifique, technique et industrielle fait donc ici appel à une chaîne de magasins pour réfléchir son rapport au public. On voit se tisser un rapport entre la valorisation des sciences et la vente de marchandises.
32Enfin, une troisième remarque concernant la diffusion des sciences serait son incapacité à exposer les failles actuelles de la production de connaissances. Les crises systémiques traversées par les sciences sont tout bonnement absentes de l’espace public. Par exemple, pas un mot dans les médias de masse sur le monopole des maisons d’éditions concernant la production d’articles scientifiques. Pas un mot sur la baisse chronique du budget alloué à la recherche, impactant les conditions d’admissions, d’étude et de recherche des diverses populations investissant l’Université. Rien non plus sur la propagation grandissante des financements privés et les risques liés à ce basculement public/privé.
33Ces non-dits peuvent s’expliquer par le fait que la relation science/vulgarisation n’a rien d’une parfaite symbiose. Comme l’explique Bernard Schiele il s’agit au contraire d’une double dépendance :
« Deux démarches concomitantes et interdépendantes, mais spécifiques, s’interpellent l’une l’autre : la constitution du champ scientifique et celui du champ vulgarisateur. Le second, bien que présentant des propriétés distinctes et distinctives non réductibles à celles du premier, en ressort néanmoins car le champ scientifique constitue le réfèrent qui légitime la démarche vulgarisatrice. Mais en contrepartie, la pensée vulgarisatrice, véritable adjuvant de la pensée scientifique en assure la socialisation et la légitime à son tour : donc un double procès de légitimation. » (Schiele, 1983, pp. 157-158)
34Comment la médiation scientifique pourrait-elle adopter une posture critique de l’institution légitimant ses pratiques ? Le risque de déclencher sa propre disparition ne lui laisse pas d’autre choix que de conserver sa posture d’auxiliaire, éclaircissant de fait les remarques formulées précédemment. Cette difficulté à prendre du recul découle notamment de la mise sous pression des agents de la médiation, ce qui peut s’expliquer par des conditions de travail d’une grande précarité : comme le révèle le graphique, une grande proportion d’agents doit travailler avec un statut instable, sans aucune sécurité de l’emploi durable (salariés en CDD et vacataires).

Graphique 1 : Statut des médiatrices et médiateurs selon leur structure © OCIM & Universcience
35Il en résulte ainsi une absence partielle ou totale de réflexivité dans les pratiques de médiation scientifique, les agents étant constamment pris en étau entre idéologie et précarité.
Récit d’expérience : les tâtonnements du Laboratoire des Mouvements Sociaux
36Langages, dérives institutionnelles, violences symboliques, inégalités d’accès… Si l’on peut clairement identifier plusieurs problèmes inhérents à la recherche, nous avons aussi le nom d’une solution : l’éducation populaire. Une solution peu exploitée et dans laquelle on injecte peu de moyens, en témoigne le graphique précédent dans lequel l’éducation populaire apparaît comme étant le domaine le moins sécurisant pour les médiatrices et médiateurs.
37Le Laboratoire des Mouvements Sociaux est un petit collectif d’artistes et chercheurs qui essayent justement d’appliquer les logiques de l’éducation populaire à ses démarches.
« Le Laboratoire des Mouvements Sociaux est un collectif qui a pour vocation l’étude, l’analyse et l’expérimentation des phénomènes sociaux et politiques. De facture universitaire, il travaille à la croisée des arts et des sciences sociales afin d’œuvrer à la production et à la diffusion des savoirs. Pour mener à bien ses actions, le Laboratoire adopte plusieurs stratégies de médiation scientifique : il opte notamment pour une approche transdisciplinaire afin de mettre en valeur des données scientifiques ou techniques (sociologie, sciences politiques, économie, droit) avec le concours de pratiques et dispositifs artistiques (design, scénographie, installation, son, écriture, etc.). »124
38Le laboratoire s’inscrit ainsi dans une logique d’éducation populaire et citoyenne, visant à créer et partager des savoirs pour le plus grand nombre : se saisir d’expériences et de sciences, les valoriser au moyen de l’art et provoquer leur confrontation avec une variété de personnes afin de faire vivre le débat et la réflexion sur des enjeux sociétaux.
39Le fer de lance du collectif est une exposition immersive : une installation son et lumière qui a pour objectif d’offrir au grand public une grille de lecture claire et limpide des enjeux créatifs dans un mouvement social. L’exposition immersive fait ainsi voyager le visiteur dans le temps et l’espace, à la découverte de créations qui ont été déterminantes dans leurs mouvements respectifs. Concrètement, la scénographie introduit le visiteur dans l’appartement de Camille. Vieux baroudeur attachant, Camille a exploré des dizaines de mouvements sociaux dans le monde entier, d’hier à aujourd’hui. Mobilier, décoration, tout est fait pour immerger le visiteur non pas dans une salle d’exposition mais chez Camille, dans son petit salon. Son petit salon, il est chargé. Chargé de mémoire et de souvenirs. Camille va ainsi narrer une série d’histoires à ses visiteurs tout en se déplaçant dans le salon et en attirant l’attention sur des éléments particuliers. Et à chaque fois que Camille veut attirer l’attention du visiteur sur un élément de la salle, une lumière éclaire la partie concernée. Sur le plan technique, l’acteur qui joue Camille n’est pas présent : sa voix est spatialisée, c’est à dire répartie alternativement entre huit enceintes, donnant ainsi l’impression au visiteur que Camille se déplace dans la pièce. Si Camille est un personnage fictif, tous les faits qu’il narre se sont réellement produits. Amoureux des sciences humaines, il aime mettre ces évènements en liaison avec des travaux de recherche.
40Allier des savoirs théoriques à des expériences personnelles c’est tout le principe d’une conférence gesticulée. La différence étant que dans cette exposition, Camille le narrateur est un personnage fictif. C’est donc ni plus ni moins qu’une créature de Frankenstein de l’éducation populaire, un être hybride, créé sur mesure : la bouillante témérité de l’entarteur belge Noël Godin, la glaçante verve du sociologue Pierre Bourdieu et bien sûr la voix de velours du comédien Marc Depond. Ainsi, si le collectif du Laboratoire des Mouvements Sociaux n’avait pas les moyens expérienciels ou intellectuels pour produire une conférence gesticulée, il a pu donner naissance au personnage de Camille. Il allie ce que certains acteurs de l’éducation populaire appellent les savoirs froids (savoirs basés sur la science et la recherche universitaire) et les savoirs chauds (savoirs basés sur l’expérience et le vécu).
41Explicitement, le discours de l’exposition offre ainsi une sélection d’éléments théoriques permettant de repenser les mouvements sociaux. Implicitement, elle peut inviter à repenser la société, les façons de faire, les manières de voir ; elle peut promouvoir certains aspects de la démocratie ou chanter les bienfaits de l’insurrection. C’est donc une œuvre à révolter, soit pour reprendre la pensée de Jacques Rancière une œuvre potentiellement pétrie de contradictions, inutile, et qui ne parviendra jamais à opérer le moindre changement : les messages que portent l’art ne sont pas systématiquement évidents et leur compréhension n’est jamais automatique. L’artiste et le public, l’émetteur et le récepteur, ils sont tous faillibles.
« On suppose que l’art nous rend révoltés en nous montrant des choses révoltantes, qu’il nous mobilise par le fait de se mouvoir hors de l’atelier ou du musée et qu’il nous transforme en opposants au système dominant en se niant lui-même comme élément de ce système. On pose toujours comme évident le passage de la cause à l’effet, de l’intention au résultat, sauf à supposer l’artiste inhabile ou le destinataire incorrigible » (Rancière, 2008, p. 57).
42Par exemple, l’exposition peut très bien inspirer et révolter mais dispenser des savoirs oubliables que la méthode de transmission, si atypique soit-elle, ne permettra pas de graver durablement dans la mémoire des participants. De même, certaines notions pourraient très bien être transmises maladroitement et ainsi heurter le visiteur sans le convaincre.
43Art et Recherche constituent en effet un triptyque incomplet pour lequel on ne saurait faire l’économie de l’Animation. Par « animation », on peut entendre « médiation », « mise en dialogue », « politique », bref quelques remous humains : l’ensemble des interactions, discussions ou mises en action qui permettent d’influer sur la façon dont les individus vont se saisir (ou non) de certains savoirs.
Éducation populaire, art et animation : l’éducation populaire, une solution miracle ?
44L’éducation populaire dispose aujourd’hui d’une façade institutionnelle propre, enjouée et pleine de promesses. Mais il ne s’agit que d’une façade dès lors que, dans la pratique, les idées de l’éducation populaire ne parviennent pas à s’imposer dans les politiques publiques.
45« Pour ne pas reproduire indéfiniment la violence des rapports sociaux quels qu’ils soient, il nous faut écrire une politique publique d’éducation populaire qui garantira l’existence des maquisard.e.s, leurs tâtonnements et leur rôle de contre-pouvoir. » (Mesnil, Morvan, Storaï, 2015, p. 14).
46Ces maquisards, ce sont notamment des artistes qui œuvrent d’une autre façon, des animateurs qui animent différemment, des chercheurs qui cherchent autrement. S’il est des universités populaires pour qui l’éducation populaire est une étrangère, c’est dans l’ordre des choses que l’on trouve dans certaines universités d’État des viviers de résistance qui tendent vers un renouveau de la recherche et de la transmission des savoirs.
47Désireuse de proposer une belle alternative à l’Université et à sa violence, l’Université Populaire de Bordeaux a rencontré bien des soucis dans sa genèse. Deux de ses fondateurs, Hugo Fourcade et Sid Khattry, racontent cela dans leur conférence gesticulée « Tu sais les savoirs c’est pas pour moi » dans laquelle ils racontent la création d’une université populaire. Ce spectacle illustre les espoirs et les combats de l’éducation populaire mais aussi ses limites et ses échecs (les citations suivantes sont issues de la conférence gesticulée)125.
48Au tout début, ils racontent avoir organisé des cours du soir gratuits et en dehors de l’Université. Par exemple, une séance « Langage et pouvoir » organisée dans un centre social. Pour ce faire, ils ont fait venir une linguiste, visiblement un peu stressée car pas vraiment habituée à conférencer dans des centres sociaux. Elle commença par se présenter durant cinq minutes : « Je suis enseignante chercheuse sémioticienne à l’Université Bordeaux III, j’ai réalisé ma thèse sur les principes de sémiotique partagée chez Michel Foucault et Gilles Deleuze, je suis rédactrice en chef de telles revues Elle se lança ensuite dans son exposé : blizzard opaque, les organisateurs ne comprirent pas un mot et a priori la plupart des gens dans la salle non plus. Un homme entra alors dans le centre social, il s’arrêta et il écouta… Il fit alors l’impensable : il leva la main et dit « Excuses-moi, j’ai absolument rien compris à ce que vous racontes depuis le début ». Trois choses se produisirent alors : trois dames studieuses l’invitèrent assez sèchement au silence ; l’organisateur, affable, l’invita à poser ses questions à la fin de la conférence, et enfin la sémioticienne, tremblante, lui indiqua que ce n’était pas à son tour de parler et qu’il ne devait pas lui couper la parole. Débonnaire, le barbu acquiesça, resta encore deux minutes puis quitta la salle.
49La conférence se poursuivit et vint le moment des échanges avec le public : après un silence pesant, un homme prit finalement la parole : « Ce n’est pas une question c’est une remarque. D’abord je voudrais vous remercier, madame, pour l’exposé brillant que vous venez de nous faire. Je me suis moi-même pas mal intéressé à la question […] et j’aimerais revenir sur un point qui pour moi me parait fondamental : c’est la place de Roland Barthes dans cette controverse. » La sémioticienne et l’homme échangèrent alors sur le sujet durant quinze minutes, allant jusqu’à citer une note de page, connue par cœur, d’un ouvrage de Barthes. Le public était pétrifié par un tel déchaînement d’érudition. « Pas d’autres questions ? » enchaîna l’organisateur. Non, pas d’autres questions.
50L’organisateur clôtura la séance. En sortant, il se retrouva nez à nez avec Jean-Pierre, qu’il ne connaissait pas mais qui venait d’assister à la séance. Il lui dit « Tu vois, moi, les savoirs c’est pas fait pour moi. Moi je bosse dans le bâtiment en fait, j’ai arrêté l’école à seize ans et quand je vois ça, je me dis que c’est pas plus mal en fait. Elle c’est une intellectuelle, moi je suis pas intellectuel. ».
51Les organisateurs racontent : « Cette conversation m’a tué surplace. », « Échec. ».
« Nous on a arrêté de croire que le savoir était émancipateur par nature. Des fois il sert précisément à l’inverse. Il sert à faire taire, à déposséder, à dominer. C’est pas par hasard que certains pensent qu’ils ne savent rien, que réfléchir c’est pas pour eux. Ceux qui se pensent crétins, idiots ou cancres. […] Depuis on fait autrement tout en continuant à se poser plein de questions. »
52L’université populaire de Bordeaux a cependant perduré avec le tâtonnement comme mot d’ordre et autant de bénévoles que d’idées sur ce que devrait être l’éducation populaire. Loin d’être une solution miracle, l’éducation populaire s’affirme plutôt comme étant un effort perpétuel vers la recherche du meilleur, en essayant, en se trompant, en repensant, en construisant…
Conclusion
53Au vu des violences constatées dans les milieux de la recherche et des espoirs posés par l’éducation populaire (libre accès, travail de la forme, etc.), on pourrait voir se dessiner une liste de mesures plus ou moins concrètes qui permettraient une circulation plus équitable de la recherche :
Environnement de recherche : même en adoptant les meilleures pratiques, si l’environnement est malsain et favorise les rapports de domination, cela ne servira à rien. Comme l’évoque Jacques Rancière, ce serait se leurrer que de penser que l’art ou l’esthétisation vont tout solutionner. Mais ce genre de dynamique permet au moins de neutraliser quelques violences.
Langage : la recherche a parfois besoin d’un jargon, c’est entendu. Mais il est simplement impardonnable qu’elle en abuse.
Relations : fondre les rapports de domination entre le sachant et l’apprenant.
Accessibilité socio-économique : prendre en compte les ressources financières de chacun. Cela implique par exemple de remettre en question les logiques de notation, soit prendre conscience que les notes sont fonctions du cadre de vie et du temps d’étude disponible. Le système actuel, aberrant, ne fait aucune distinction entre un étudiant sans contrainte financière et un étudiant devant livrer des repas à vélo chaque soir pendant trois heures.
Accessibilité géographique : envisager la recherche dans les périphéries et auprès des populations précaires ou extérieures à ces préoccupations. Il ne s’agit pas d’aller déverser le haut savoir sur des populations prétendument ignorantes mais plutôt de ne pas laisser la recherche s’ankyloser dans un terrain connu, il faut au contraire qu’elle aille s’augmenter de savoirs alternatifs.
Économie et représentation de la recherche : il faut préserver les savoirs d’une glorification aveugle et des logiques de marché pour éviter leur privatisation et leur mutation en marchandise.
Supports d’apprentissage et de recherche : notamment à travers l’art et l’animation, faire la part belle aux formes alternatives comme les conférences gesticulées.
54Quelques maquis universitaires et des structures d’éducation populaire œuvrent déjà dans ces sens, certes parfois très maladroitement. Ces échecs sont décevants mais les ignorer c’est mentir et refuser toute évolution. Réessayer. Repenser. Tâtonner. Le principe de l’éducation populaire, ce n’est pas de prendre la posture d’un évangéliste à la marge qui détiendrait des solutions miracles, c’est au contraire une invitation à penser et repenser nos concepts en permanence en gardant une approche critique tant de la norme que de ses alternatives. On peut critiquer le jargon sans parvenir à lui trouver une alternative universelle, on peut critiquer les institutions sans réussir à les dépasser, on peut critiquer les intellectuels sans les rejeter : un doute perpétuel vaut mieux qu’une aberration figée.
Bibliographie
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Références
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Notes de bas de page
119 L’école expérimentale de Barbiana, en Toscane, accueillait des élèves qui avaient été recalés par l’enseignement public, jugés inaptes à l’apprentissage. Au sein de cette école alternative, les élèves faisaient eux-mêmes la classe et évoluaient selon des normes éducatives différentes. « Sauvés » par cette éducation nouvelle, huit de ces élèves ont rédigé une lettre à leur ancienne maîtresse qui les avait recalés. Acide, amère et critique, cette lettre s’adresse plus généralement à tout le système de l’instruction publique officielle que ces élèves entendaient remettre en question à la lumière de leurs expériences personnelles.
120 Il nous paraît utile de préciser que ces rémunérations peuvent bien sûr varier légèrement selon les universités. Pour les enseignants-chercheurs, cela signifie concrètement qu’une heure de cours magistral correspond à effectuer une heure et demie de travaux dirigés. Ainsi, le nombre d’heures de cours obligatoire que doit effectuer un enseignant diminue plus rapidement en effectuant des cours magistraux que des travaux dirigés. L’objectif de cette rémunération est de prendre en compte un temps de préparation qui serait plus long pour les cours magistraux que pour les travaux dirigés. Pour les enseignants contractuels, la rémunération est définie par l’arrêté du 3 décembre 2010 modifiant l’arrêté du 6 novembre 1989 relatif aux taux de rémunération des heures complémentaires, et correspond à 61,35 € par heure de cours magistral et 40,91 € par heure de travaux dirigés.)
121 www.elysee.fr/emmanuel-macron/2019/11/26/80-ans-du-cnrs [consulté en 2020]
122 Association des musées et centres pour le développement de la culture scientifique, technique et industrielle.
123 Voir programme du jeudi 6 Juillet, Parcours 4 : www.amcsti.fr/fr/congres/35e-edition-congres-de-lamcsti/programme/ [consulté en 2020]
124 Nouhaud, Pierre et Zimmermann (2019), Dossier de diffusion : Mouvements sociaux – exposition immersive, Bordeaux, Laboratoire des Mouvements Sociaux.
125 Fourcade Hugo et Khattry Sid (2013), Tu sais les savoirs c’est pas pour moi, Bordeaux, L’Établi. (Conférence gesticulée) www.etabliabordeaux.fr [consulté en 2020]
Auteurs
-
Alexandre Pierre
Le Laboratoire des Mouvements Sociaux – Association d’éducation populaire.
-
Michaël Zimmermann
Le Laboratoire des Mouvements Sociaux – Association d’éducation populaire.
-
Nicolas Nouhaud
Le Laboratoire des Mouvements Sociaux – Association d’éducation populaire.
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