Quelles données pour analyser les conséquences sociales de la crise sanitaire de la Covid-19 ?
L’expérience de PanelVico
p. 305-315
Texte intégral
Introduction
1De très nombreuses personnes ont pu être affectées par les conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire du Covid-19 et des confinements. Mais l’ont-elles toutes été de la même façon, et à quel point ces bouleversements ont-ils affecté leurs trajectoires biographiques (professionnelles, familiales, résidentielles…) ? Pour répondre à ces questions, les sciences sociales se sont largement mobilisées. Elles ont dû faire face et continuent d’être confrontées à un certain nombre de difficultés méthodologiques spécifiques, d’une part en raison des entraves des accès aux terrains d’enquête, et d’autre part du fait des difficultés à élaborer et maintenir des dispositifs de collecte de données longitudinales permettant de comparer les situations économiques, professionnelles, résidentielles et conjugales des individus avant, pendant et jusqu’à plusieurs années après la fin de la pandémie et des mesures prises pour la combattre. Certaines se sont concentrées sur une fenêtre temporelle d’observation : c’est le cas à court terme de l’enquête COCONEL (coronavirus et confinement), qui a porté sur les premières semaines du confinement, et à moyen terme de l’enquête Acemo Covid de la Dares, supplément spécial Covid de l’enquête récurrente Acemo, qui a observé en avril 2020, 2021 et 2022 les effets de la crise sur les conditions d’emploi dans les entreprises. D’autres se sont d’emblée donné comme objectif le suivi longitudinal de leurs enquêtés : CoCo (Coping with Covid, CDSP, OSC) qui permet, grâce à sept vagues d’enquête longitudinale (via le dispositif ELIPSS), entre avril et novembre 2020, de saisir les variations de court terme induites par les dynamiques de confinements et déconfinements au cours de cette année 2020 si particulière ; ou encore EpiCov, menée par l’Inserm et la Drees, dont le quatrième volet a été achevé en décembre 2022.
2PanelVico occupe une place singulière dans ce foisonnement d’enquêtes aux dispositifs variés portant sur le confinement, la crise sanitaire et leurs conséquences économiques, sociales et épidémiologiques. Rassemblant « à chaud », dès mars 2020, des chercheurs et chercheuses d’institutions et horizons thématiques variés, sans appui financier particulier dans un premier temps, l’enquête a d’abord procédé à la mise en commun de compétences afin de construire une enquête ad hoc diffusée sans plan d’échantillonnage, selon une logique de boule de neige et en comptant sur l’écho de relais médiatiques. Les financements (programmes de recherche « La vie en confinement », ANR Vico, 2020-2022, puis « Observer les conséquences sociales de la crise sanitaire sur le long terme », ANR PanelVico, 2023-2027) ont, dans un second temps, permis de transformer en panel plusieurs milliers de personnes résidant en France métropolitaine, recrutées du moment du premier confinement du printemps 2020 (Mariot, Mercklé & Perdoncin, 2021). Au-delà du moment de la crise sanitaire et de ses résonances sur trois ou quatre semestres, cette vaste enquête vise ainsi à rendre compte, dans la durée, d’une part des effets de la crise sanitaire sur l’évolution des formes de la sociabilité, des dynamiques des relations sociales et des manifestations du lien social (Grossetti et al., 2023), et d’autre part des articulations entre ces évolutions et les conséquences observables dans trois domaines essentiels de la vie sociale :
les conditions de travail et les relations professionnelles (Cardon, Machut & Perdoncin, 2023) ;
la vie familiale, les pratiques culturelles et les usages numériques (Figeac et al., 2022) ;
et enfin les vulnérabilités, les parcours de vie et les rapports à l’incertitude, à l’avenir, à l’autorité et à l’État (Boulakia & Mariot, 2023).
3Le dispositif d’enquête mis en place a trois caractéristiques. D’abord, il porte sur un échantillon de grande taille (N = 16 224 pour la première vague d’enquête) de la population ordinaire résidant en France métropolitaine, recruté pendant le premier confinement en France grâce à la diffusion d’un questionnaire en ligne par une diversité de canaux. Ensuite, il comporte plusieurs vagues successives d’enquêtes par questionnaire, au cours desquelles les répondant·es de la première vague qui avaient laissé une adresse e-mail (N = 5448) ont été interrogé·es pendant les trois confinements et vont continuer de l’être jusqu’en 2027. Enfin, il articule des approches quantitatives et qualitatives puisqu’il s’appuie également sur plusieurs vagues d’entretiens semi-directifs, réalisées entre novembre 2020 et fin 2022 (N = 292), auprès des personnes ayant laissé une adresse e-mail ou un numéro de téléphone (N = 5461), les suivantes étant programmées dans les trois prochaines années.
4Nous proposons, dans cette communication, de discuter les difficultés auxquelles la réalisation de ces enquêtes a été confrontée et les façons dont les équipes de recherche des trois laboratoires impliqués (PACTE à Grenoble, LEST à Aix-Marseille et LISST à Toulouse) se sont efforcées de les résoudre. Dans une première partie, nous discuterons des contraintes spécifiques liées à la réalisation « à chaud » des premières vagues de l’enquête pendant les confinements de 2020 et 2021, leurs effets sur les techniques d’échantillonnage et d’administration des questionnaires retenues, et les effets de celles-ci sur les données collectées et leur analyse (Joubert et al., 2023), avec une attention particulière sur les perturbations de la sociabilité et des relations interpersonnelles pendant la crise sanitaire. Dans une deuxième partie, nous examinerons les enjeux liés à la pérennisation, au-delà de la fin de la crise sanitaire, d’un dispositif d’enquête qui évolue, avec cette fois une attention particulière à la gestion de panel : suivi des répondants, attrition, rafraîchissement… La troisième partie sera consacrée aux enjeux spécifiques liés au recours aux « méthodes mixtes » et à l’émergence de processus d’analyse itératifs entre les données et les analyses quantitatives et qualitatives, avec une attention portée sur les modalités d’articulation (temporalités, registres, sélection des enquêtés…) des différentes vagues d’enquêtes.
1. Enquêter « à chaud » sur la crise sanitaire
5L’enquête « La vie en confinement » est née de la nécessité, ressentie par un petit groupe de chercheurs, de documenter le moment historique que toutes et tous vivions en mars 2020. L’enquête porte sur le cœur social de l’événement : l’obligation, deux mois durant, de restreindre drastiquement nos libertés d’aller et venir, de travailler auprès de ses collègues, de se réunir entre amis ou en famille, de contribuer aux affaires communes. Elle vise à objectiver sociologiquement les choix réalisés (décider un lieu de confinement, respecter ou non les règles de sortie, adopter ou non les gestes barrière, changer ou non d’interlocuteurs) et leurs effets très concrets sur nos relations à autrui, sur la définition même des liens sociaux et politiques entre concitoyen·nes et envers les autorités publiques.
6Le confinement posait des questions inédites que nous n’étions pas seuls – on l’a vu – à chercher à observer. Confinés nous-mêmes, sans appuis institutionnels et avec des moyens limités, il ne nous était pas possible de disposer d’un échantillon tiré au sort de façon rigoureuse, ni évidemment de nous rendre au domicile des enquêtés. Quatre modes de diffusion de l’invitation à remplir le questionnaire ont été combinés :
Premier effet « boule de neige » à partir des réseaux personnels des chercheurs et chercheuses membres de l’équipe.
Second effet « boule de neige » à partir des réseaux familiaux et amicaux des étudiant·es des facultés françaises de sociologie (avec l’aide active d’une soixantaine de collègues enseignant·es, chercheurs et chercheuses en sociologie et sciences sociales dans toute la France).
Lien relayé en ligne sur des pages personnelles ou des groupes Facebook, choisis de façon à atteindre des personnes dont il est habituellement plus difficile d’obtenir les réponses à de telles enquêtes (notamment des pages collectives de militant·es « Gilets jaunes », ou d’artisan·es du BTP).
Relais médiatiques : plus de 30 % des réponses ont été obtenues grâce à la publication du lien d’invitation sur les versions papier et/ou numériques de titres de la presse quotidienne régionale, parmi lesquels La Provence, Corse Matin, Sud-Ouest, La Montagne, La Voix du Nord ou encore Ouest France.
7En termes strictement quantitatifs, la combinaison de ces modes de diffusion a été une réussite puisque 16 224 personnes ont rempli l’intégralité du questionnaire, ce qui était bien au-delà de nos espérances. Cette taille présente des avantages : d’abord, elle permet de documenter un plus grand nombre de « vies en confinement » ; ensuite elle permet d’étudier finement et précisément les conditions de confinement de groupes sociaux ou de profils minoritaires (par exemple les soignant·es ou encore les étudiant·es, qui sont respectivement 603 et 1 576 parmi les 16 224 répondant·es). Cela dit, le caractère « sauvage » ou « accidentel » de la construction de l’échantillon produit d’inévitables biais d’échantillonnage. Il manque un nombre important d’ouvrier·es (4 % au lieu des 17 % attendus d’après l’enquête emploi de l’Insee), de non-bachelier·es (12 % au lieu de 47 %) d’hommes (27 % au lieu de 49 %), de répondant·es qui ne se classent pas politiquement à gauche (59 % au lieu de 71 % d’après les résultats du panel ELIPSS), de personnes âgées de 65 ans et plus (13 % au lieu de 25 % attendus d’après l’enquête emploi de l’Insee). Ces distorsions ne doivent pas surprendre au regard des particularités du dispositif d’enquête : il s’agit d’un questionnaire sociologique dont le format, d’allure administrative ou scolaire, a pu apparaître trop aride, voire rébarbatif, aux ouvriers et ouvrières et aux moins diplômé·es – qui sont aussi plus souvent des hommes que des femmes. Ensuite, le thème de l’enquête, qui porte en bonne part sur la sociabilité et les liens personnels, a pu accentuer encore la participation des femmes, plus souvent en charge des tâches relationnelles au sein des couples et des ménages. Enfin, le questionnaire devait être rempli en ligne, ce qui suppose de disposer d’un accès à internet, plus rare chez les plus de 70 ans.
8Ces biais ont été corrigés selon une méthode de redressement que nous n’aborderons pas en détail dans cette communication (Joubert et al., 2023). Mais la vaste taille de l’échantillon de cette première vague, si elle autorise le calcul de pondérations permettant – au prix d’un poids parfois très fort donné aux individus les plus rares – permet aussi, au-delà d’une logique de représentativité, de donner à voir une variété de situations de confinement. À voir et à entendre, car près de 4 000 répondant·es ont utilisé l’espace de commentaire libre proposé à la fin pour raconter leur confinement et évoquer, parfois en quelques phrases, parfois dans des textes beaucoup plus longs, leurs difficultés matérielles et leurs sentiments. Près de 5 500 personnes ayant laissé leurs coordonnées afin d’être recontactées, cette haute première vague laissait aussi ouverte la possibilité d’un suivi. Les deux ingrédients – démarche quali/quanti et suivi longitudinal des enquêtés – étaient donc réunis pour envisager la pérennisation du dispositif.
2. Passer au longitudinal : les enjeux de la pérennisation d’un dispositif d’enquêtes
9Le premier questionnaire était prévu comme unique. Or 5 448 personnes enquêtées ont laissé leurs contacts lors de cette première vague (1er confinement), ce qui a permis de les réinterroger : 3 620 d’entre elles ont répondu à une seconde vague en décembre 2020 (2e confinement), 2 987 à une troisième vague en décembre 2021 et janvier 2022 (mesures sanitaires sans confinement) et 2 043 à une quatrième vague entre juillet et décembre 2023.
10Cette pérennisation du dispositif d’enquête par la panélisation de l’échantillon initial a d’abord nécessité certaines conditions institutionnelles, au premier rang desquelles les financements. On l’a dit, la première vague avait été menée sur le temps de recherche des chercheurs et chercheuses associé·es au projet et grâce aux fonds propres de nos laboratoires respectifs (mais il ne coûtait quasiment rien de lancer un questionnaire en ligne, via la plateforme « LimeSurvey » hébergée sur le serveur d’un laboratoire). Un premier financement ANR Flash Covid-19 a été obtenu à l’été 2020, qui a permis de lancer le travail de traitement statistique de la première vague et de mener à bien la publication d’un livre à vocation grand public (Mariot, Mercklé & Perdoncin, 2021), de lancer la seconde vague au cours du second confinement de l’automne 2020, et la troisième un peu plus d’un an plus tard. Un second financement ANR, obtenu à l’été 2022, a permis de lancer le programme PanelVico (« observer les conséquences sociales de la crise sanitaire sur le long terme », 2023-2027). Ces appels à projet ANR ont été l’occasion de reposer les bases problématiques de l’enquête, de renouveler et agrandir l’équipe et de fournir des postes précaires de post-doctorat à des certains membres de l’équipe. Trois thèses de doctorat en cours de réalisation sont également financées. Ils ont aussi fait prendre à l’enquête le virage du financement sur projets et de ses difficultés : coûts de coordination important entre chercheurs et chercheuses titulaires, vite rattrapés par le « monde d’après », les sollicitations multiples et les exigences d’institutions universitaires prenant l’essentiel de leur temps ; report sur les chercheurs et chercheuses sous contrat précaires des tâches essentielles de coordination et de récolte des données, d’autant plus cruciales dès lors qu’il s’agissait de mettre en œuvre un suivi complexe des enquêté·es pour l’enquête quantitative mais aussi qualitative.
11Le passage au longitudinal suppose en effet, au-delà des dimensions institutionnelles de la recherche, d’assurer un suivi complet, fiable et homogène des sollicitations auprès du panel. Cette tâche est rendue complexe par la spécificité de l’enquête qui articule à la fois des questionnaires auto-administrés sur internet et des entretiens qualitatifs longs, ainsi que la dispersion géographique et institutionnelle de l’équipe susceptible de solliciter le panel pour conduire des entretiens qualitatifs. Dans ces conditions, il s’agit d’abord de veiller à ce que les mêmes panélistes ne soient pas sollicité·es pour plusieurs entretiens au même moment, ni dans un laps de temps trop court, à moins d’un accord explicite de leur part. Il s’agit ensuite d’assurer une équité entre les différentes équipes d’enquête par entretien dans l’accès au panel, en particulier aux profils les plus rares (pour le dire vite : les personnes ouvrières et peu ou pas diplômées). La réponse à ce double enjeu passe par la construction d’outils ad hoc correspondant aux usages des équipes de recherche mais néanmoins automatisés de façon à garantir fiabilité et réplicabilité du dispositif de suivi dans la durée. Enjeu d’autant plus fort que la continuité du suivi du panel était potentiellement compromise par le fait que la tâche incombait essentiellement – comme c’est sans doute fréquemment le cas dans les enquêtes collectives financées sur projet – à des chercheurs et chercheuses précaires en post-doctorat d’une durée limitée (entre six mois et deux ans, parfois renouvelée).
12On l’a vu, l’échantillon initial du printemps 2020 comporte de forts biais qui ont évolué au fil des vagues successives d’enquête et du processus d’attrition (tableau 1). Seul le biais de sexe s’est légèrement corrigé par rapport à la première vague d’enquête. La proportion de femmes parmi les répondants se situe autour de 69 % parmi les personnes ayant répondu aux vagues 2 à 4, contre 72,6 % de l’échantillon initial. Cette diminution ne s’explique toutefois pas par une motivation croissante des hommes à l’enquête mais plutôt par le fait qu’ils ont plus fréquemment accepté d’être recontactés que les femmes : alors que les hommes représentent 27 % de l’échantillon de vague 1, ils sont 31 % parmi ceux ayant laissé un contact. Tous les autres biais se sont accrus. La proportion de cadres et professions intellectuelles supérieures et de retraités parmi les répondants a augmenté entre la vague 1 et la vague 4, tandis que celle des artisan·es, commerçant·es, chef·fes d’entreprise, des ouvriers et ouvrières, des élèves et étudiant·es et surtout des employé·es a diminué. Le biais lié au niveau de diplôme est celui qui s’est le plus accru, alors qu’il était déjà le plus important au départ. Les diplômé·es du supérieur représentent 77 % des répondants en vague 4, contre 69 % initialement. Enfin, la moyenne d’âge a augmenté de quatre ans et demi entre les vagues 1 et 4.
13L’articulation des modes d’enquête est ici un atout indéniable. En concentrant les efforts pour obtenir des entretiens sur certaines catégories peu représentées dans l’échantillon quantitatif, nous avons ainsi pu rencontrer plus d’hommes (36 % parmi les personnes rencontrées contre 27 % en vague 1 et 32 % en vague 4) et un peu plus d’artisan·es, commerçant·es, chef·fes d’entreprise et d’ouvriers et ouvrières. La moyenne d’âge des personnes vues en entretiens est, quant à elle, restée au niveau de l’échantillon initial, tout comme les proportions d’employé·es et d’étudiant·es. Quant au diplôme, la campagne d’entretiens a encore renforcé la surreprésentation des personnes fortement diplômées dans l’enquête.
Tableau 1 • Déformation de l’échantillon au fil des sollicitations d’enquête
| Échantillon Vico initial | Échantillon panélisé | Questionnaire vague 2 (hiver 2020) | Questionnaire vague 3 - janvier 2022 | Questionnaire vague 4 - juillet à décembre 2023 | Entretiens, hiver 2020 - mai 2022 | |
| N = 16260 | N = 5461 | N = 3620 | N = 2987 | N = 2043 | N = 292 | |
| Sexe | ||||||
| Un homme | 27 % | 31,1 % | 30,3 % | 30,3 % | 31,9 % | 36,0 % (n = 105) |
| Une femme | 72,6 % | 68,7 % | 69,4 % | 69,3 % | 67,7 % | 64,0 % (n = 187) |
| Autre définition de genre | 0,4 % | 0,3 % | 0,3 % | 0,4 % | 0,4 % | 0,0 % (n = 0) |
| Âge | Moy. : 44,6 Med. : 43,5 min-max : 18,0 - 120,0 |
Moy. : 45,2 Med. : 44,0 min-max : 18,0 - 120,0 |
Moy. : 47,1 Med. : 47,0 min-max : 18,0 - 98,0 |
Moy. : 47,2 Med. : 47,0 min-max : 18,0 - 98,0 |
Moy. : 48,8 Med. : 49,0 min-max : 18,0 - 87,0 |
Moy. : 44,8 Med. : 46 min-max : 20,0 - 81 |
| CSP | ||||||
| Agriculteur·trices | 0,3 % | 0,3 % | 0,3 % | 0,4 % | 0,4 % | - |
| Artisan·es, commerçant·es, chef·fes d'entreprise | 3,2 % | 3,5 % | 2,8 % | 2,7 % | 2,6 % | 8,0 % (n = 23) |
| Cadres et professions intellectuelles supérieures | 25,8 % | 26,8 % | 28 % | 29,8 % | 30,3 % | 29,8 % (n = 86) |
| Professions intermédiaires | 19,2 % | 19,3 % | 19,9 % | 20,4 % | 20,3 % | 18,7 % (n = 54) |
| Employé·es | 18,4 % | 16,3 % | 14,8 % | 13,7 % | 12,3 % | 18,3 % (n = 53) |
| Ouvrier·ères | 2,9 % | 2,7 % | 2,2 % | 2,0 % | 2,1 % | 3,8 % (n = 11) |
| Retraité·es | 16,5 % | 17,4 % | 20,1 % | 19,7 % | 21,2 % | 10,4 % (n = 30) |
| Élèves, étudiant·es | 9,3 % | 9,0 % | 7,3 % | 6,6 % | 5,9 % | 8,3 % (n = 24) |
| Autres inactif·ves | 4,4 % | 4,7 % | 4,7 % | 4,8 % | 4,8 % | 2,8 % (n = 8) |
| Niveau de diplôme | ||||||
| Inférieur au bac | 12,3 % | 11,1 % | 9,6 % | 9,3 % | 8,3 % | 9,2 % (n = 27) |
| Baccalauréat | 18,6 % | 16,9 % | 15,9 % | 14,8 % | 14,6 % | 16,4 % (n = 48) |
| Supérieur au bac | 69,1 % | 72 % | 74,4 % | 75,9 % | 77,1 % | 74,3 % (n = 217) |
Champ : population ordinaire résidant en France métropolitaine. Pour les vagues 2 à 4, les réponses incomplètes ont également été prises en compte.
Lecture : les hommes représentent 27 % des répondants à la vague 1 et 31,1 % des personnes ayant laissé leurs coordonnées.
14L’une des explications de la spécificité des sollicitations pour entretien sur l’évolution des biais longitudinaux est le ciblage de certaines catégories de population relativement rétives à l’enquête au cours des différentes étapes du processus conduisant à l’entretien. La sélection des candidat·es à l’entretien se faisait généralement par tirage au sort aléatoire parmi des catégories sociales ciblées selon les objectifs de recherche de la campagne d’entretiens. Par exemple, l’équipe d’Aix-en-Provence a demandé des enquêté·es ayant déclaré une certaine turbulence relationnelle (liens dégradés/renforcés/nouveaux) lors des vagues 1 et 2. D’autres collègues travaillant sur les situations de vulnérabilité souhaitaient quant à eux cibler des personnes seules ou ayant connu des ruptures professionnelles pendant le confinement en y ajoutant des critères permettant d’atténuer les biais. Généralement, toutes les équipes avaient un intérêt pour les classes populaires peu diplômées.
15Quatre étapes sont donc particulièrement importantes :
Les « équations de critères » de tirage demandées par les différentes équipes.
Le tirage au sort des panélistes dans ces catégories, dont les coordonnées sont envoyées à l’équipe prévoyant une campagne d’entretiens.
La prise de contact effective avec certain·es des panélistes tirés au sort.
L’entretien lui-même en cas de réponse favorable du panéliste.
16Le tableau 2 montre la déformation de l’échantillon au fil de ces étapes.
Tableau 2 • Caractéristiques des panélistes tiré·es au sort, sollicité·es et rencontré·es
| Ensemble de l’échantillon panélisé | Panélistes tiré·es au sort | Panélistes effectivement contacté·es ( % ligne) | Panélistes effectivement contacté·es ( % colonne) | Panélistes finalement rencontré·es, hiver 2020 – mai 2022 | |
| N = 5461 | N = 1 346 | Ensemble : 54,5 % | N = 734 | N = 292 | |
| Sexe | |||||
| Un homme | 31,1 % | 31,30 % | 55,3 % | 31,7 % (n = 233) | 36,0 % (n = 105) |
| Une femme | 68,7 % | 68,50 % | 54,2 % | 68,1 % (n = 500) | 64,0 % (n = 187) |
| Autre définition de genre | 0,3 % | 0,20 % | 33,3 % | 0,1 % (n = 1) | 0,0 % (n = 0) |
| Âge | Moy. : 45,2 Med. : 44,0 min-max : 18,0 - 120,0 |
Moy. : 43,7 Med. : 42 min-max : 18,0 - 82 |
- | Moy. : 42,3 Med. : 40 min-max : 18,0 - 81 |
Moy. : 44,8 Med. : 46 min-max : 20,0 - 81 |
| Catégorie socio-professionnelle | |||||
| Agriculteur·trices | 0,3 % | 0,3 % | - | - | - |
| Artisan·es, commerçant·es, chef·fes d'entreprise | 3,5 % | 4,7 % | 67,7 % | 5,8 % (n = 42) | 8,0 % (n = 23) |
| Cadres et professions intellectuelles supérieures | 26,8 % | 27,0 % | 50,3 % | 24,9 % (n = 181) | 29,8 % (n = 86) |
| Professions intermédiaires | 19,3 % | 16,9 % | 50,7 % | 15,7 % (n = 114) | 18,7 % (n = 54) |
| Employé·es | 16,3 % | 26,9 % | 52,2 % | 25,7 % (n = 187) | 18,3 % (n = 53) |
| Ouvrier·ères | 2,7 % | 4,4 % | 71,2 % | 5,8 % (n = 42) | 3,8 % (n = 11) |
| Retraité·es | 17,4 % | 9,8 % | 50,0 % | 8,9 % (n = 65) | 10,4 % (n = 30) |
| Élèves, étudiant·es | 9,0 % | 5,3 % | 82,9 % | 8,0 % (n = 58) | 8,3 % (n = 24) |
| Autres inactif·ives | 4,7 % | 4,9 % | 58,5 % | 5,2 % (n = 38) | 2,8 % (n = 8) |
| Niveau de diplôme | |||||
| Inférieur au bac | 11,1 % | 11,4 % | 63,6 % | 13,4 % (n = 98) | 9,2 % (n = 27) |
| Baccalauréat | 16,9 % | 17,7 % | 57,1 % | 18,6 % (n = 136) | 16,4 % (n = 48) |
| Supérieur au bac | 72,0 % | 70,9 % | 52,4 % | 68,1 % (n = 499) | 74,3 % (n = 217) |
Champ : population ordinaire résidant en France métropolitaine. Pour les vagues 2 à 4, les réponses incomplètes ont également été prises en compte.
Lecture 1ère ligne : 55,3 % des hommes dont les contacts ont été transmis ont été effectivement contactés.
Lecture 1ère ligne : 31,7 % des personnes effectivement contactées pour entretien sont des hommes.
Source : enquête PanelVico.
17À l’issue du tirage au sort, les équipes disposaient d’un nombre de contacts variant selon les objectifs de 50 à 200. Ces contacts étaient ensuite utilisés jusqu’à ce que le nombre visé d’entretiens soit atteint. On peut donc observer quels profils ont été effectivement contactés par rapport à ceux qui ne l’ont pas été et lesquels ont effectivement participé à un entretien. L’effort pour rencontrer ces profils rares est perceptible puisque 71 % des ouvrier·ères, 68 % des artisan·es, commerçant·es et chef·fes d’entreprises et 64 % des non-bachelier·ères dont les contacts ont été transmis ont été effectivement sollicité·es, contre 55 % de l’ensemble. De même, les non-bacheliers et non-bachelières ont été plus fréquemment tiré·es au sort et aussi plus fréquemment sollicité·es : 64 % effectivement contactés contre 52 % des diplômés du supérieur. Mais cela n’a pas eu l’effet escompté : les bacheliers et bachelières sont aussi peu représenté·es parmi les personnes rencontrées que dans l’échantillon initial, et les non-bachelier·ères le sont encore moins (9 % versus 11 %). Seuls les ouvrier·ères sont un peu mieux représenté·es parmi les personnes rencontrées que dans le panel de départ (3,8 % contre 2,7 %). Les classes populaires échappent ici aux sollicitations des enquêteurs, qu’il s’agisse d’enquêtes par questionnaire ou par entretien. Pour cette raison, chaque tirage au sort était assorti de quotas qui visaient à ce que chaque équipe dispose d’un nombre minimum équitable de personnes de classes populaires, sachant que toutes les équipes n’ont pas réalisé leurs entretiens au même moment. Cet effort se perçoit dans le fait qu’employé·es et ouvrier·ères représentent respectivement 26,9 % et 4,4 % des personnes dont le contact a été tiré au sort et transmis à une équipe, contre 16,3 % et 2,7 % de l’échantillon panélisé.
18Panéliser un échantillon tout en combinant les méthodes d’enquête n’est donc pas trivial. Un des enseignements que l’on peut tirer de l’expérience de PanelVico est toutefois de saisir l’intérêt des campagnes d’entretien pour la pérennisation du panel quantitatif : le quali renforce le quanti. En effet, ce type de rencontre produit un lien plus fort aux enquêté·es que les questionnaires impersonnels et permet (légèrement) de niveler les inégalités de participation durable à l’enquête. En témoigne notamment la forte prévalence (quel que soit le milieu social) des personnes qui acceptent d’être recontactées après un entretien.
3. Articuler les modes d’enquête dans une perspective longitudinale
19PanelVico exemplifie ainsi l’intérêt des démarches de méthodes mixtes, notamment pour le suivi longitudinal des individus. Mais la ligne de partage entre matériaux dits « qualitatifs » ou « quantitatifs » ne passe pas nécessairement entre l’enquête par questionnaires et les entretiens. On l’a dit, la première vague et ses 16 224 répondants ont aussi permis de récolter un matériau textuel d’une grande richesse composé de plusieurs milliers de commentaires. Ceux-ci ont été utilisés de façon à incarner ou exemplifier les descriptions statistiques produites dans le premier ouvrage de synthèse issu de la vague 1 de l’enquête (Mariot, Mercklé & Perdoncin, 2021). Ils ont aussi permis de mettre en discussion les effets des « grandes variables » sur l’expérience du confinement des travailleurs sur site, en spécifiant la façon dont le maillage des relations sociales avait été mis en tension par la période du confinement (Cardon, Machut & Perdoncin, 2023).
20Au-delà de cette articulation des matériaux, la mise en œuvre de modes d’enquête mixtes permet aussi de mieux saisir, dans la durée, la façon dont les confinements ont pesé sur les relations sociales. C’est ce que montre l’enquête réalisée par l’équipe d’Aix-en-Provence, réalisée entre avril et juin 2021, entre les vagues 2 et 3 de l’enquête par questionnaires. On dispose ainsi à la fois de réalités saisies dans l’instant (à trois « présents » différents) mais aussi, dans les entretiens, d’éléments rétrospectifs sur différentes phases de la crise sanitaire et différents moments des relations, racontés par les enquêté·es. L’analyse des entretiens, portant en particulier sur des personnes précises nommées dans le questionnaire de la vague 2, permet tout d’abord d’éclairer la manière dont la situation présente au moment des questionnaires influence les réponses. En particulier, la mention dans les questionnaires de conflits anecdotiques mais récents, puis oubliés, résolus ou négligés dans les entretiens (5 mois après la vague 2) montre l’étroitesse de cette fenêtre temporelle. On le voit, par exemple, avec cet enquêté, ingénieur de 57 ans, qui avait pourtant cité cette personne dans les deux vagues de questionnaire :
Je sais plus qui j’avais cité d’autre, par contre, j’ai un trou de mémoire, j’avoue. (Vous aviez évoqué Jules, Edouard, Valérie, Benoit et Armand). Valérie, c’est qui Valérie ? Ça je vois plus. C’est mauvais signe ! Disons qu’au premier questionnement, j’ai dû prendre les gens qui étaient dans mon radar au jour J, sans trop…
21Le « radar au jour J » que mentionne cet enquêté témoigne bien des effets de contexte qui jouent sur les réponses aux questionnaires, davantage propices à la photographie d’un instant qu’à la compréhension d’une dynamique sur le temps long.
22Une des difficultés récurrentes des enquêtes longitudinales, malgré l’expérience accumulée et les précautions prises, reste l’importance des conséquences pour les données de changements parfois mineurs dans les protocoles de questionnement. Modifier une question ou une liste d’items, améliorer ou préciser une démarche, ajouter une méthode, avec les meilleures intentions du monde, peuvent introduire des écarts dans les résultats et des difficultés d’analyse. Par exemple, dans le questionnaire de la vague 2 ont été ajoutés des « générateurs de noms » permettant, à partir de (quasiment) la même question, d’identifier des personnes précises par leur prénom, avec qui les relations ont été dégradées, là où, dans la vague 1, la question était simplement la déclaration de dégradations, une liste de rôles relationnels (avec la famille, les voisins, les collègues…) et une liste de raisons de cette dégradation.
23En croisant les résultats de ces deux vagues d’enquêtes, on peut constater (tableau 3) que les résultats ne sont pas vraiment congruents.
Tableau 3 • Croisement des déclarations de relations dégradées en vague 1 et des citations de prénoms en vague 2
| Nombre d’alters* cités en vague 2 comme « relations dégradées depuis le début de la crise sanitaire » | Total | |||||
| Aucun | Un | Deux | Trois | |||
| A déclaré avoir eu des relations dégradées pendant le premier confinement, vague 1 | Oui | 49 % | 15 % | 16 % | 21 % | 100 % (500) |
| Non | 61 % | 11 % | 12 % | 16 % | 100 % (2 295) | |
| Total | 59 % | 11 % | 13 % | 17 % | 100 % (2 795) | |
* Voir note (1) en bas de page.
Champ : répondant·es en vague 2 ayant renseigné la question sur la dégradation des relations en vague 1.
Lecture : 49 % des enquêté·es ayant déclaré une dégradation relationnelle en vague 1 ne citent aucun alter comme relation dégradée depuis le début de la crise sanitaire en vague 2.
Source : enquête PanelVico.
24En particulier, la moitié des enquêtés qui avaient déclaré une dégradation de certaines relations en vague 1 n’ont indiqué aucun prénom en vague 2. Plusieurs explications sont possibles : les dégradations sont intervenues entre les deux vagues, ou la personne n’a plus la même opinion sur ces dégradations, ou encore elle se montre plus réticente à mentionner des prénoms. Ce premier constat nous oblige d’emblée à tenir compte de chaque temporalité et à réfléchir aux effets des outils d’enquête.
25Par la suite, l’équipe d’Aix-en-Provence a conduit des entretiens dans lesquels étaient posées des questions ouvertes sur les relations dégradées avec la famille, les voisins, les collègues, etc., cette fois pour des réponses ouvertes. L’analyse conjointe de ces données a permis d’ajouter à la base des prénoms identifiés dans la vague 2 les prénoms mentionnés en entretien. On compte ainsi 267 nouveaux alters1 qui n’avaient pas été mentionnés en vague 1 (en tant que catégorie) ni nommés en vague 2 mais ont été cités dans l’entretien. Ces ajouts sont parfois en nombre important (jusqu’à 9 alters). Les rôles relationnels les plus « ajoutés » dans les entretiens sont ceux de conjoint (+7 %, 22 cas), de frère ou sœur (+6 %), fils ou fille (+5 %).
26Il s’agit donc de la famille proche et parfois cohabitante, qu’il est moralement plus difficile de déclarer comme relations dégradées et qui ont été relativement « invisibilisées » dans les questionnaires. Il s’agit aussi de voisin·es (+ 6 %) dont la fréquentation est pour partie contrainte, ou bien de liens plus faibles issus d’activités associatives (+5 %). Les rôles, en revanche plus spontanément évoqués dans les questionnaires, sont surtout, très massivement, les ami·es (+17 %) et les collègues (+9 %), relations plus électives, possiblement mises à distance et relativement moins porteuses de normes relationnelles. Les analyses de ces matériaux complexes, emboîtés, étirés sur des temporalités diverses et des méthodes contrastées, montrent à la fois l’intérêt et la difficulté des analyses longitudinales (Bidart et al., 2024).
Conclusion
27À l’heure où nous achevons la rédaction de cette communication, un nouveau défi s’ouvre : relancer l’enquête statistique en rafraîchissant l’échantillon du panel. Le caractère fortement intégré d’une enquête répétée au long cours sur une même population a produit d’indéniables effets de connaissance en permettant de croiser témoignages à chaud et caractéristiques sociales des individus, entretiens biographiques et analyses statistiques des relations sociales et des conditions de vie durant les différents épisodes de la crise. Mais ces avantages ont un revers : la surspécialisation d’un petit groupe de « superenquêté·es », dont la propension à répondre à nos sollicitations répétées témoigne nécessairement de caractéristiques sociales spécifiques. La panélisation de l’enquête se fait ainsi au prix d’une baisse de la diversité des profils et des situations sociales observées, au risque de fournir un miroir de plus en plus déformant au regard sociologique.
28Rafraîchir le panel c’est ainsi d’abord en augmenter la taille tout en s’efforçant de réduire les biais liés au biais d’échantillonnage initiaux, à l’attrition et à la sélection de cas par les chercheurs. L’objectif est alors de recruter un nombre important – entre 3 000 et 5 000 – de nouveaux panélistes susceptibles de répondre à plusieurs vagues d’enquête par questionnaires et par entretiens pendant quatre ans, et appartenant autant que possible à des catégories de la population pour l’instant insuffisamment représentées : des hommes, faiblement diplômés, appartenant aux classes populaires, des personnes âgées… Plusieurs modes de rafraîchissement sont explorés : par la presse quotidienne régionale, qui avait été un vecteur déterminant de diffusion du premier questionnaire, au printemps 2020 ; par l’achat de fichiers de contacts mail via plusieurs sociétés spécialisées ; par des contacts ad hoc via les réseaux sociaux ou des contacts noués sur le terrain (instituts de travail social, syndicats, entreprises…). Enfin, au-delà du seul rafraîchissement du panel, un travail constant et systématique de gestion et d’animation du panel est nécessaire. On pense évidemment à l’importance cruciale des relances (Cornilleau & Duwez, 2021), mais aussi à des tâches que l’on devra assurer dans les années à venir : envoi de vœux de bonne année, alimentation du carnet Hypothèses (https://vico.hypotheses.org), envoi de résultats aux enquêtés et d’une newsletter régulière, ou encore animation de comptes sur les réseaux sociaux en ligne.
29Cette augmentation quantitative de la population du panel sera complétée par l’ajout de modules thématiques dans les questionnaires qui permettront de cibler maintenant le recueil d’informations sur les effets des confinements à plus long terme, voire irréversibles (vulnérabilités, usages numériques, télétravail…). D’autres enquêtes qualitatives viendront compléter les matériaux sur ces mêmes thématiques par des entretiens réitérés auprès des « superenquêté·es » du panel mais aussi par des monographies d’entreprises, des observations et des entretiens menés auprès d’autres populations. La dimension « multiméthodes » et dynamique de ce panel continue donc de motiver les opérations de recherche à venir.
30Il est impossible de savoir, à ce stade, quels seront les résultats de cette démarche pluridimensionnelle. Il faudra évaluer a posteriori les intérêts et les limites de ces techniques non probabilistes de construction de panel. Au-delà de son intérêt méthodologique ou épistémologique pour la recherche en sciences sociales, PanelVico constitue un outil inédit et précieux pour les chercheurs intéressés par les effets des crises sur les conditions sociales de la vie collective. Conçue et menée dans une période marquée par les effets « à chaud », puis par des impacts différés et à plus long terme de la crise sanitaire de la Covid-19, l’enquête permettra aussi de documenter, jusqu’en 2027, les emboîtements de crises successives et les turbulences liées aux mobilisations sociales de grande ampleur (comme la longue séquence gréviste en opposition à la réforme des retraites de l’hiver et du printemps 2022), à la crise inflationniste, nourrie notamment par la montée des périls à l’échelle internationale, à l’accroissement des inégalités sociales et à des échéances électorales nationales et internationales à fort enjeu.
Bibliographie
Bidart, C., Bozouls, L., Joubert, L., Klüger, E., Perez, P. & Tucci, I. (2024, à paraître). Imbriquer les méthodes pour comprendre la dégradation des relations interpersonnelles en temps de crise. Revue française de sociologie.
Boulakia, T. & Mariot, N. (2023). L’Attestation. Une expérience d’obéissance de masse, printemps 2020. Paris : Anamosa.
Cardon, V., Machut, A. & Perdoncin, A. (2023). L’expérience du confinement des travailleurs sur site à l’intersection du travail et du hors-travail. Genre, conditions de travail et relations sociales. Sociologie, 14(2), 175-197.
Cornilleau, A. & Duwez, E. (2021). Elipss, un dispositif inédit d’enquêtes pour la recherche en sciences sociales. Dans E. Duwez & P. Mercklé (dir.). Un panel français. L’Étude longitudinale par Internet pour les sciences sociales (Elipss) (p.15-44). Paris : Ined Éditions.
Figeac, J., Favre, G., Bideau, L., Rives, L., Béliard, A.-S. & Joubert, L. (2022). Les effets secondaires de la crise sanitaire sur les sociabilités médiatisées des Français. Réseaux, 234(4), 165-194.
Grossetti, M., Favre, G., Figeac, J & Launay, L. (2023). Les perturbations des relations interpersonnelles durant la pandémie de Covid-19. Sociologie, 14(2), 199-221.
Joubert, L., Lê Van Truoc, O., Mercklé, P. & Tudoux, B. (2023). Redresser les résultats d’une enquête en ligne. Un exemple à partir de l’enquête VICO. Bulletin of Sociological Methodology/Bulletin de méthodologie sociologique, 158(1), 143-166.
Mariot, N., Mercklé, P. & Perdoncin, A. (dir.). (2021). Personne ne bouge. Une enquête sur le confinement du printemps 2020. Grenoble : UGA Éditions.
Notes de bas de page
1Il s’agit des personnes que l'enquêté·e cite et qui forment son réseau relationnel.
Auteurs
-
Claire Bidart
CNRS, Lest.
-
Antoine Machut
Sciences Po Paris, Medialab.
-
Pierre Mercklé
Université Grenoble-Alpes, Pacte.
-
Anton Perdoncin
CNRS, Cens.
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