Introduction

1Depuis le début des années 2000, les actions et dispositifs de « formation à l’entrepreneuriat ou à l’esprit d’entreprendre » des étudiants se sont développés au sein de l’enseignement supérieur, soutenus par une politique volontariste du ministère (Cf. contribution de S. Favreau et H. Robic dans cet ouvrage). Les différents plans nationaux qui se sont succédé accordent, au-delà de l’objectif de sensibilisation, de formation et de soutien aux étudiants porteurs de projet, une attention particulière aux territoires, à leur dynamique et leurs identités (Champy Remoussenard, 2023). Ainsi, en 2010, le plan étudiant entrepreneur crée les Pôles entreprenariat étudiant, devenus en 2014 les Pôles pour l’Innovation, le transfert et l’entrepreneuriat (PEPITE). En 2019, un rapport d’évaluation de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (Meige et al., 2019) salue le bien-fondé du dispositif PEPITE mais recommande de le consolider sur l’ensemble du territoire afin de permettre son « passage à l’échelle ». Suite à quoi, le plan « L’esprit d’entreprendre » de 2019 définit quatre objectifs : multiplier les formations à l’entreprenariat afin de sensibiliser 100 % des étudiants, soutenir et valoriser la conduite de projets entrepreneuriaux pendant les études, reconnaitre les compétences entrepreneuriales des étudiants et faire monter en puissance l’encadrement et l’ouverture des PEPITE sur le monde économique et la recherche. Ce dernier objectif passe, notamment, par une augmentation du budget alloué aux PEPITE, la formation de ses chargés de mission et la structuration dans chaque Université d’un réseau d’enseignants référents dont l’engagement doit être valorisé.

2L’esprit d’initiative et d’entreprendre est défini comme une des huit compétences clé pour l’éducation et la formation tout au long de la vie de l’Union européenne. Elle doit permettre aux jeunes de « passer des idées aux actes » et les aider à créer leur activité mais aussi, plus généralement, à développer créativité, autonomie, innovation, prise de risque, etc., capacités utiles pour trouver un emploi et évoluer tout au long de sa vie sociale et professionnelle. Pour ses promoteurs, l’éducation à l’esprit d’entreprendre offre des perspectives séduisantes d’émancipation et de professionnalisation à même de répondre aux besoins d’innovation de l’économie tout en répondant au désir des étudiants de créer une activité en accord avec leur projet. C’est aussi favoriser l’émergence d’un « entrepreneuriat engagé » qui permet à davantage de jeunes en quête de sens dans leur travail de saisir les opportunités inhérentes aux crises – sanitaire, écologique, économique – actuelles (Lethielleux, 2022). Et c’est un fait que ces formations se développent d’autant mieux qu’elles sont une réponse au souhait de nombreux jeunes de s’installer à leur compte. Plus d’un jeune français de moins de 35 ans sur deux (59 %) se dit tenté par le statut d’indépendant (IFOP, 2018) et 40 % des jeunes européens de 15-24 ans pensent qu’ils peuvent le devenir dans les cinq ans à venir (OCDE/UE, 2012). Cependant, si le régime d’autoentrepreneur créé en 2019 a favorisé l’accès des jeunes au statut d’indépendant, il s’accompagne souvent de précarité et d’instabilité professionnelle (Vivant, 2014).

3Bien que l’attente sociale, quant aux effets concrets de ces actions visant à développer l’esprit d’entreprendre des étudiants, soit grande, il existe très peu de travaux d’évaluation, notamment quantitatifs sur les « comportements entrepreneuriaux » des jeunes (Brenet & Lameta, 2020 ; Champy Remoussenard, 2021). Grâce aux données de l’enquête Génération 2010 du Céreq, uniques à ce jour, Béduwé & Robert (2021) ont pu étudier les trajectoires professionnelles de jeunes ayant bénéficié de ces formations pendant leurs études. Elles montrent qu’avoir participé à un dispositif de formation à l’entrepreneuriat en dernière année de master augmente l’accès au statut d’indépendant ou le fait d’envisager ce statut à terme, voire a un effet positif sur la rémunération des jeunes salariés. Il s’agissait pourtant d’une génération d’étudiants n’ayant pas encore bénéficié des plans de soutien à l’entrepreneuriat des années 2010. De nouveaux travaux empiriques sont nécessaires pour continuer à documenter ces questions de recherche : ces formations permettent-elles aux jeunes de se lancer dans une activité indépendante ? Ces compétences entrepreneuriales sont-elles valorisables sur le marché du travail et reconnues par les employeurs intéressés ? Comment les Universités mettent-elles en place ces formations, pour quels étudiants et avec quels effets ?

4Pour répondre à ces questions, une collaboration entre l’Université de Lille pionnière en matière d’entrepreneuriat (Baeza et al., 2015) et le Centre d’études et de recherches sur les qualifications s’est mise en place dans le cadre du groupe de travail sur l’enseignement supérieur (GTES). Ceci a permis de collecter de nouvelles données dans un contexte territorial donné. Plusieurs questions sur les formations à l’entrepreneuriat et l’installation à son compte ont été insérées dans l’enquête du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation sur l’insertion professionnelle des diplômés d’un master en 2018 de l’Université de Lille (encadré 1). Cette enquête a été réalisée par l’observatoire de la direction des formations de l’Université de Lille en décembre 2020.

5Après avoir décrit l’historique et le contexte du développement des formations à l’entrepreneuriat à l’Université de Lille (1), nous nous intéresserons au profil des diplômés d’un master en 2018 qui se sont formés à l’entrepreneuriat (2) puis au rôle de cette formation sur leurs débuts professionnels (3).

1. Contexte entrepreneurial à l’université de Lille et données mobilisées

1.1. Les formations à l’entrepreneuriat à l’Université de Lille¹

6Pour contrer les difficultés économiques, notamment suite à la crise de 2008, la région Nord-Pas-de-Calais, « entourée des acteurs du monde politique, économique et académique a décidé d’investir massivement dans la mise en œuvre d’une culture de l’initiative économique et de l’entrepreneuriat, en identifiant des solutions concrètes » (Baeza et al., 2015). C’est à son initiative et en partenariat avec les établissements universitaires régionaux que le dispositif HubHouse s’est progressivement mis en place dès 2008 dans les 5 universités de la région. Lieu d’accueil dédié au développement de la culture entrepreneuriale et à la prise d’initiative pour les étudiants, le dispositif permet à l’université d’améliorer l’insertion professionnelle des étudiants et la Région y trouve un appui au développement économique local tourné vers la création d’entreprise et l’innovation. En janvier 2018, lors de la fusion des 3 Universités lilloises, les Hubhouse se maintiendront au sein de chaque campus.

7En 2014, les Pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat ont été mis en place par l’État dans chaque région. On compte actuellement 33 PEPITE sur le territoire français. Ces pôles s’adressent à tous les étudiants d’un territoire donné. Leur objectif est de structurer et renforcer les dispositifs existants et d’offrir des actions de sensibilisation, de formation et d’accompagnement à l’entrepreneuriat aux étudiants d’établissements qui n’avaient pas encore de services dédiés. La région Nord Pas-de-Calais, devenue Hauts-de-France en 2016, possède deux PEPITE : le PEPITE Lille Hauts-de-France qui concerne la métropole de Lille et Valenciennes, et le PEPITE A2U qui agit sur les territoires de Laon, Beauvais, Amiens et l’Université Littoral Côte d’Opale, Artois. Les PEPITE peuvent également délivrer le statut national d’étudiant entrepreneur (Le Rudulier, 2016). Ce statut, accessible sur dossier à des étudiants porteurs de projet, donne droit à diverses prestations du PEPITE (accompagnement, formation, espaces de coworking, etc.). Les effectifs d’étudiants ayant obtenu ce statut, bien qu’en augmentation, sont encore faibles (cf. contribution Favreau Robic dans ce document). Avec 348 SNEE signés en 2022, le PEPITE de la région est un PEPITE de grande ampleur.

8Dans les faits, le PEPITE Lille Hauts-de-France n’a vraiment commencé à fonctionner qu’en 2020. Jusqu’en 2021, c’est le Hubhouse de l’Université de Lille, service dédié à l’entrepreneuriat qui en assurait les missions. La promotion des diplômés de master en 2018 interrogés dans l’enquête de l’ODiF n’a donc pas vraiment bénéficié de la démarche PEPITE, beaucoup plus structurante en termes d’offre de formation et de visibilité des actions en faveur de l’entrepreneuriat.

9Les HubHouse sont des lieux d’accueil dédiés au développement de la culture entrepreneuriale et à la prise d’initiative des étudiants. Les chargés de projet tentent de repérer les étudiants qui viennent avec « une envie ou une idée » et proposent une aide pour faire émerger leur projet puis les forment et les accompagnent jusqu’à l’élaboration de leur business plan (formalisation chiffrée de leur projet). Ces chargés de projet sont les véritables « chevilles ouvrières du dispositif », car ils « ont à la fois pour mission de promouvoir l’esprit d’entreprendre à l’université et d’agir comme catalyseurs et médiateurs entre les acteurs des sphères économiques marchande et solidaire » (Baeza & Starck, 2023). Ils ont également comme mission de faire adhérer et sensibiliser les enseignants chercheurs qui ont un rôle moteur dans le projet porté par le HubHouse. Malgré des évolutions notables, certaines disciplines (sciences de gestion ou sciences et technologie) sont beaucoup plus réceptives que d’autres (droit, médecine, etc.) à ces thématiques.

10Il existe trois niveaux d’intervention des HubHouses vis-à-vis des étudiants.

11Le niveau sensibilisation vise essentiellement à informer les étudiants sur les carrières entrepreneuriales. Dans ce cadre, les diplômés de master en 2018 à l’Université de Lille (étudiés ici) ont pu suivre lors de l’année universitaire 2017-2018, des ateliers d’information, des conférences découverte, des témoignages (par exemple, séances de 2 heures en dehors des cursus et en soirée) pour faire découvrir l’entrepreneuriat aux étudiants autour de diverses thématiques (comment trouver une idée, étapes d’une création d’entreprise, qu’est-ce qu’un business model, etc.) et qui font intervenir des professionnels et des experts. Il existait aussi des journées thématiques, sur l’entrepreneuriat féminin par exemple, des manifestations avec des témoignages, des afterworks, etc.

12Un deuxième niveau avec des formations spécifiques, plus denses, qui cherchent à développer le « potentiel » entrepreneurial de l’étudiant par l’enseignement de compétences tournées vers l’innovation et l’acquisition de soft skills propres à la prise d’initiatives (motivation, confiance en soi, adaptation à l’incertitude, identification des ressources dans l’environnement, mesure du risque, créativité, etc.) mais aussi de compétences spécifiques à la création d’une activité entrepreneuriale (business plan, problématiques de gestion financière, de RH, de règles juridiques, etc.). Ces formations étaient organisées en 2018 par un enseignant chercheur avec l’appui du Hubhouse (désormais PEPITE). À l’Université de Lille, ces formations sont dispensées lors de programmes de 25 heures environ, toujours hors cursus et transversalement aux composantes universitaires, à des étudiants qui ont déjà une idée et qui cherchent à aller plus loin dans leur projet. Des intervenants extérieurs leur exposent les modèles économiques possibles, les actions à réaliser pour monter une entreprise, les erreurs à éviter, etc. Cela représente 4 ou 5 sessions par an pour des groupes de 15 étudiants sélectionnés sur leur motivation.

13Enfin, au troisième niveau, se situent des actions d’accompagnement destinées à soutenir la création d’une activité entrepreneuriale. Elles aident les étudiants porteurs d’un projet à le développer et le concrétiser. Ces actions concernent donc un nombre d’étudiants plus restreint que les formations spécifiques. À l’Université de Lille, avec l’accord d’un responsable pédagogique de formation, il est ainsi possible pour des étudiants en master, voire en doctorat, ayant un projet entrepreneurial, d’avoir un accompagnement pendant 3 mois (mi-avril à mi-juillet). Celui-ci se fait en substitution du stage et les étudiants doivent signer une charte d’engagement. Ils travaillent quasiment à temps plein sur leur projet, seuls ou en groupe. Il y a une animation, des témoignages d’anciens étudiants devenus entrepreneurs, une mise à disposition d’un espace de co-working pour travailler, des rendez-vous individuels et collectifs avec des experts (positionnement sur le marché, aspects juridiques, comptabilité, etc.) et un suivi individualisé de chaque étudiant par un chef d’équipe du Hubhouse (désormais PEPITE).

1.2. Données mobilisées

14Les données mobilisées dans le cadre de cette étude sont celles des 2 696 répondants à l’enquête nationale d’insertion professionnelle auprès des diplômés de masters en formation initiale en juin 2018, à l’Université de Lille (cf. encadré 1). Ils ont été interrogés 30 mois après l’obtention de leur master, en décembre 2020, avec un taux de réponse de 82 %. Cette enquête a été réalisée en pleine crise sanitaire et « même si les effets de la crise se font sentir sur certains points, tels que le taux d’insertion, en baisse de 2 points par rapport à la promotion 2017 […] la qualité de l’insertion professionnelle (stabilité de l’emploi, qualification des emplois, revenu) s’est maintenue à un niveau équivalent voire légèrement supérieur à celle des promotions précédentes » (ODiF, 2021). La situation des diplômés de l’Université de Lille semble sensiblement meilleure que celle des diplômés au niveau national : le taux d’insertion est supérieur de 2 points (91 % contre 89 %) et la tendance est à la baisse sur les autres indicateurs : « Par rapport à la promotion précédente, le taux de cadre ou professions intermédiaires à 30 mois baisse d’un point en master (hors enseignement) (90 %). Le taux d’emploi à temps plein à 30 mois diminue également d’un point (94 %) pour les masters » (Yildiz, 2022).

15Pour évaluer l’impact des formations à l’entrepreneuriat sur l’insertion de ces diplômés, une question portant sur le type de formation qu’ils avaient pu suivre a été rajoutée à l’enquête (cf. encadré 1). Cette question reprend les 3 catégories distinguées ci-dessus (sensibilisation, formation, accompagnement).

16Les étudiants ayant pu suivre plusieurs types de formation à l’entrepreneuriat, et celles-ci présentant un continuum cumulatif de savoirs, nous avons construit des catégories exclusives les unes des autres. Ainsi la catégorie « sensibilisation » contient des jeunes uniquement sensibilisés. La catégorie « compétences spécifiques » comptabilise les jeunes ayant suivi ce type de formation, qu’ils aient ou non déclaré avoir été sensibilisés. Enfin la catégorie des « accompagnés » contient des jeunes qui ont pu être sensibilisés et/ou suivre des cours pour acquérir des compétences spécifiques.

17Parmi les diplômés de master en 2018 à l’Université de Lille, 8 % ont déclaré avoir suivi une formation à l’entrepreneuriat lors de leur dernière année de master, quelle que soit sa forme (soit 222 diplômés). Ce taux de 8 % est relativement faible comparé au taux de 19 % (dont près de 5 % accompagnés à la création d’entreprise) observé au niveau national dans l’enquête Génération auprès des sortants de formation initiale en 2010 après l’obtention d’un master, soit 8 ans plus tôt. Ce résultat, surprenant compte tenu de l’évolution des politiques publiques en faveur de l’entrepreneuriat depuis 2010, reste pour l’instant inexpliqué. Cependant, et comme on le verra, beaucoup des résultats obtenus (toutes choses égales par ailleurs) dans cette enquête sont dans la continuité de ceux obtenus avec Génération, ce qui d’une certaine manière valide les résultats.

18Les étudiants se répartissent de la manière suivante au sein de nos trois catégories d’analyse :

• 44 % (soit 97 individus) ont uniquement suivi une formation de sensibilisation (découverte de l’entrepreneuriat et des carrières entrepreneuriales) ;

• 22 % (soit 47 individus) ont suivi une formation spécifique aux compétences entrepreneuriales (théorie, techniques, comportements) sans avoir bénéficié d’un accompagnement à la création d’entreprise. Pour information, 37 % des jeunes ayant suivi ce type de formation ont également déclaré avoir été sensibilisés à l’entrepreneuriat ;

• 34 % (soit 76 individus) ont bénéficié d’un accompagnement à la création d’entreprise. Parmi eux, 17 % ont également déclaré avoir été sensibilisés à l’entrepreneuriat et 14 % ont estimé avoir suivi une formation spécifique aux compétences entrepreneuriales.

19Par ailleurs, 69 % des diplômés ayant suivi une formation à l’entrepreneuriat ont obtenu des crédits ECTS par le biais de cette formation. C’est le cas de 59 % des jeunes uniquement sensibilisés, 80 % des jeunes ayant reçu une formation spécifique aux compétences entrepreneuriales et 73 % des jeunes accompagnés à la création d’entreprise. Enfin, environ 2 % ont obtenu en 2017-2018 un diplôme d’étudiant entrepreneur (D2E).

2. Le profil des diplômés de master formés à l’entrepreneuriat à l’Université de Lille

20Nous nous intéressons ici au profil des étudiants ayant suivi une formation à l’entrepreneuriat lors de leur dernière année de master à l’Université de Lille. Après une analyse descriptive de leurs caractéristiques spécifiques, nous montrons, à l’aide d’un modèle économétrique, l’effet net de chacune des caractéristiques sur la probabilité d’avoir suivi une de ces formations.

21Tous les étudiants ne sont pas autant concernés par une formation à l’entrepreneuriat (Tableau 2). Ainsi dans les masters STAPS, les diplômés sont nettement plus souvent accompagnés à la création d’entreprise que dans les autres types de spécialités. Cela semble cohérent avec le nombre relativement important de jeunes qui, comme on le verra, s’installent à leur compte à l’issue de ce type de formation, notamment en tant que coach sportif (15 % contre 4 % en moyenne). C’est également le cas, mais dans une moindre mesure, pour les spécialités de la santé, et cela peut être mis en relation avec l’exercice en profession libérale à l’issue de ces formations. La sensibilisation à l’entrepreneuriat est également plus développée dans les masters STAPS et dans ceux de sciences et technologies. À l’opposé il y a peu d’étudiants formés à l’entrepreneuriat dans les masters en sciences humaines et en droit, bien que dans le domaine du droit de nombreux métiers s’effectuent en tant qu’indépendant (avocat, etc.).

22Les hommes sont sur-représentés parmi l’ensemble des jeunes formés à l’entrepreneuriat (Tableau 3), notamment dans les actions de sensibilisation (60 %) ou de formation aux compétences entrepreneuriales (57 %). C’est moins le cas pour les modules d’accompagnement (40 % d’hommes).

23Les jeunes formés à l’entrepreneuriat sont plus souvent issus d’un milieu entrepreneurial (au moins un parent indépendant) et ont plus souvent réalisé leur master en alternance que les non-formés. À l’inverse ils sont moins nombreux à avoir un parent cadre, un autre diplôme obtenu en même temps que le master et ont moins poursuivi leurs études après l’obtention de ce dernier (Tableau 3).

24Pour tenir compte des évidentes liaisons entre ces différentes caractéristiques, on a estimé « toutes choses égales par ailleurs » la probabilité pour un étudiant d’avoir suivi une formation à l’entrepreneuriat. Pour des questions d’effectifs, les 3 types de formation à l’entrepreneuriat ont été regroupés (Tableau 4).

25Un diplômé a effectivement plus de chances d’être formé à l’entrepreneuriat, toutes choses égales par ailleurs, si au moins un de ses deux parents est indépendant. Ce résultat confirme l’importance du « capital entrepreneurial » des étudiants attirés par ces formations, déjà souligné par d’autres études (Béduwé & Robert 2021 ; Krueger et al., 2000 ; Moreau & Raveleau, 2006) et l’importance de l’acculturation entrepreneuriale dans le fait d’envisager cette forme d’activité. De même, la probabilité de suivre ce type de formation est plus élevée pour les diplômés d’un master STAPS et plus faible pour les diplômés en sciences humaines et sociales, droit, arts lettres langues que pour ceux en économie-gestion. Confirmant également les statistiques descriptives, les jeunes ayant obtenu un diplôme en 2018 en parallèle du master se sont moins souvent formés à l’entrepreneuriat et ceux ayant réalisé leur dernière année de formation en alternance y ont davantage eu recours.

26En revanche, et contrairement aux statistiques descriptives, on n’observe pas d’effet net du genre sur la probabilité d’avoir suivi une formation à l’entrepreneuriat, contrairement à ce que nous avions obtenu auprès des sortants en 2010 avec un diplôme de niveau bac+5 (Béduwé & Robert, 2021). Ce résultat pourrait être le signe que les choses évoluent, soit que les jeunes femmes hésitent moins à envisager ce type de carrière, soit que leurs attentes spécifiques sont mieux prises en compte par l’accueil dans les services dédiés à l’entrepreneuriat (ORELIG, 2022).

3. Quel impact d’une formation à l’entrepreneuriat ?

27Trois aspects de l’insertion professionnelle des jeunes en lien avec une formation à l’entrepreneuriat sont ici analysés : l’accès au statut d’indépendant, leur rémunération et leur satisfaction professionnelle.

3.1. Qui sont les jeunes installés à leur compte au 1^er décembre 2020 ?

28Sur l’ensemble des diplômés de master en 2018 à l’université de Lille, 4 % sont à leur compte au 1^er décembre 2020, soit environ deux ans et demi après l’obtention de leur master, dont près de 60 % sont autoentrepreneurs. La quasi-totalité d’entre eux (89 %) indiquent que la crise n’a joué aucun rôle dans cette installation tandis que 8,5 % déclarent que la crise a constitué une opportunité pour se lancer et 2,5 % affirment que leur installation à leur compte était une nécessité pour gagner de l’argent. Par ailleurs, la proportion d’indépendants observée en 2020, après la crise sanitaire, est identique à celle des promotions 2016 et 2017 mais inférieure à celle de 2019 où la part de diplômés à leur compte était de 5,6 %.

29Parmi les métiers exercés en tant qu’indépendants, on trouve des psychologues, des coachs sportifs, des traducteurs, des enseignants, des journalistes, des consultants, etc. Le taux de 4 % d’indépendants varie fortement selon la spécialité du master obtenu : 1 % en santé, 2 % en sciences et technologies, 3 % en économie et gestion, 4 % en droit, 5 % en sciences humaines et sociales, 12 % en arts, lettres et langues et 15 % en STAPS. Une petite moitié (45 %) des jeunes à leur compte au 1^er décembre 2020 étaient déjà indépendants au 1^er décembre 2019, ce qui montre que l’installation ne se fait pas toujours immédiatement, et très souvent après une première expérience salariée (cf. contribution Béduwé et Robert dans ce document). De plus, les indépendants sont deux fois plus nombreux à connaitre une situation de multi-activité 30 mois après l’obtention de leur master que les salariés (12 % contre 5 %).

30Afin d’estimer l’effet net des caractéristiques qui influencent la mise à son compte, en particulier avoir été formé à l’entrepreneuriat, on a procédé à des modélisations « toutes choses égales par ailleurs ». Les variables prises en compte sont les suivantes : genre, champ disciplinaire du master, origine économique et sociale, ainsi que certains éléments des parcours de formation (master en alternance, autre diplôme en parallèle du master, poursuite d’études après le master).

31La première hypothèse, en adéquation avec l’objectif premier de ces formations à l’entrepreneuriat, est que les bénéficiaires devraient être plus souvent amenés à exercer une activité non salariée dans les années qui suivent leur sortie de formation. Effectivement, parmi les jeunes en emploi en décembre 2020, 7 % des jeunes formés sont à leur compte contre 4 % des jeunes non formés. Ce taux varie selon le type de formation à l’entrepreneuriat puisque les jeunes uniquement sensibilisés sont à peine plus nombreux que les non-formés à être concernés (5 %). Les jeunes ayant suivi des formations aux compétences spécifiques et ceux accompagnés à la création d’entreprise sont en revanche 8 % en moyenne à être à leur compte en décembre 2020. Le modèle économétrique (Tableau 1 en annexe) confirme ces premières observations : avoir été formé à l’entrepreneuriat a un effet net sur la probabilité de devenir indépendant à 30 mois, résultat conforme à ce que nous avions montré avec les données nationales (Génération 2010) auprès des sortants de formation initiale en 2010 au niveau bac+5 (Béduwé & Robert, op. cit). Plus précisément, à caractéristiques égales, les jeunes formés aux compétences spécifiques et ceux accompagnés à la création d’entreprise deviennent plus souvent indépendants que les jeunes non formés. Ce constat peut être lié à la fois à une meilleure préparation de ces étudiants à être entrepreneur grâce à la formation spécifique reçue2, mais également au fait que ces formations attirent souvent, quand elles ne l’exigent pas dans le cas d’un accompagnement, des jeunes ayant déjà un projet de création d’activité (Béduwé & Robert, 2023). Il n’y a en revanche aucun effet net sur l’installation à son compte (en tous cas à 30 mois) pour les étudiants uniquement sensibilisés à l’entrepreneuriat.

32L’effet porteur d’une formation à l’entrepreneuriat se retrouve également dans le profil des indépendants : même s’ils sont loin d’avoir tous suivi une formation à l’entrepreneuriat, ils sont 14 % à avoir suivi ce type d’apprentissage contre 8 % des salariés. Les trois types de formations sont (légèrement) surreprésentés parmi les indépendants : 4,7 % sont uniquement sensibilisés, 3,5 % sont formés aux compétences et 5,8 % accompagnés à la création d’entreprise (contre respectivement 3,6 %, 1,7 % et 3 % parmi les jeunes salariés à cette date). Ces taux relativement importants de formés à l’entrepreneuriat parmi les salariés montrent que ces formations attirent bien au-delà des jeunes qui les effectuent avec un projet concret d’installation à court terme. Ils peuvent les suivre soit en pensant s’installer comme indépendants à terme, soit parce qu’ils espèrent pouvoir valoriser ces compétences en tant que salarié. Effectivement, lors de l’enquête, 23 % des jeunes qui n’étaient pas indépendants souhaitent devenir indépendant dans les 5 années suivantes3, et là encore, les jeunes formés à l’entrepreneuriat se révèlent plus attirés par ce statut (28 %) que les jeunes non formés (23 %).

33Par ailleurs, la probabilité d’être indépendant plutôt que salarié ou sans emploi est effectivement plus élevée pour les diplômés de spécialité STAPS, et à l’issue d’un master d’Arts Lettres langues. Ces derniers ont une probabilité plus forte de s’installer à leur compte alors qu’ils ont une probabilité plus faible d’avoir été formés à ce type de statut (cf. partie 2). C’est un résultat que nous avions déjà obtenu (op. cit.) : il souligne que la formation à l’entrepreneuriat est loin d’être une condition nécessaire même si elle facilite l’installation.

34De plus, la probabilité d’installation est également plus élevée, toutes choses égales par ailleurs et notamment en tenant compte d’une formation à l’entrepreneuriat, parmi les étudiants ayant au moins un parent indépendant. On constate en effet que 28 % des diplômés à leur compte ont au moins un parent indépendant contre 19 % des diplômés salariés au 1^er décembre 2020. L’installation à son compte s’avère donc plus probable lorsqu’on se sent soutenu familialement, et/ou outillé par une formation et/ou accompagné dans son projet.

35Certaines variables individuelles introduites n’ont pas d’effet à caractéristiques égales par ailleurs : le genre, le fait d’avoir au moins un parent cadre salarié, la réalisation du master en alternance, ainsi que la poursuite d’études après 2018. Ceci s’explique par l’importance du rôle joué par la spécialité de formation dans l’installation à son compte puisque, en données brutes, on observe moins d’hommes parmi les diplômés à leur compte que parmi les salariés (34 % contre 39 %) et moins d’individus ayant effectué leur master en alternance (21 % contre 30 %). À l’inverse, ils ont plus souvent des parents cadres salariés (43 % contre 39 % des salariés) et poursuivi des études en 2018, 2019 ou 2020 (22 % contre 14 %). En revanche, le fait d’être boursier ou l’obtention d’un diplôme en parallèle au master sont neutres (aussi bien dans les statistiques descriptives que dans le modèle) : les jeunes indépendants en décembre 2020 étaient aussi souvent boursiers que ceux qui sont salariés à cette date (autour de 35 %) et aussi peu nombreux (8 %) à avoir obtenu un autre diplôme que le master en 2018.

36On obtient les mêmes résultats si l’on se restreint aux jeunes en emploi en décembre 2020. À la seule différence que, dans ce cas, les jeunes sont plus souvent indépendants s’ils ont poursuivi des études après le master. Cela peut s’expliquer par le fait que les jeunes qui ont poursuivi des études entre 2018 et 2020 et qui sont en emploi au 1^er décembre 2020 ont pu occuper des emplois d’indépendants (autoentrepreneurs en particulier) en parallèle de leurs études4 (Tenret, Trespeuch, Verley, 2022). Cela est cohérent avec le fait que parmi les jeunes en emploi à cette date la rémunération de ceux ayant poursuivi leurs études est inférieure à celle des jeunes ayant arrêté leurs études après l’obtention de leur master (cf. Tableau 6).

3.2. Les jeunes formés à l’entrepreneuriat ont-ils une meilleure rémunération ?

37Les formations à l’entrepreneuriat ont comme objectif, au-delà de favoriser l’installation à son compte, d’accroitre les compétences et aptitudes d’innovation et de créativité dans le but de développer l’employabilité des diplômés et/ou d’accéder à des emplois nécessitant ce type de compétences (intrapreneuriat, innovation, etc.). Ces formations peuvent apporter un signalement de ces compétences additionnelles et spécifiques et leur permettre d’accéder à des emplois où elles seront valorisées. Notre deuxième hypothèse postule donc que les compétences entrepreneuriales acquises permettent d’accéder à des emplois mieux rémunérés. La rémunération a été choisie comme indicateur car elle est la résultante d’une combinaison de caractéristiques révélant le « niveau de qualité » d’un emploi, parmi lesquelles le contrat de travail, la catégorie socio-professionnelle, le niveau de responsabilité de l’individu ainsi que ses éventuelles compétences spécifiques valorisées par l’employeur.

38Deux ans et demi après l’obtention de leur master, les jeunes formés à l’entrepreneuriat ont un taux d’emploi légèrement supérieur (93 %) à celui des non formés (91 %). Lorsqu’ils occupent des emplois de salariés, ils occupent plus souvent des emplois stables (85 % des formés sont en CDI ou fonctionnaire contre 78 % des non-formés). En termes de conditions de travail, ils perçoivent également une rémunération5 plus élevée (salaire médian de 2 200 euros contre 2 009 euros pour les non formés, si l’on se restreint aux salariés l’écart est de 2 229 euros contre 2 000 euros). Ces résultats descriptifs ne sont pas exempts d’effets de genre et de spécialités de formation, c’est pourquoi il est nécessaire de réaliser des modèles « toutes choses égales par ailleurs » pour établir l’effet net des formations à l’entrepreneuriat.

39À caractéristiques équivalentes et notamment à statut donné (indépendant ou salarié), avoir été formé à l’entrepreneuriat a un impact légèrement positif sur la rémunération perçue par les jeunes en emploi 30 mois environ après l’obtention de leur master (Tableau 2 en annexe). Cet effet n’apparait que si l’on retire de l’analyse les jeunes ayant poursuivi leurs études : ceci peut s’expliquer par le fait que, comme on l’a vu précédemment, ces jeunes qui poursuivent leurs études sont plus souvent indépendants mais il s’agit en partie d’emplois étudiants en parallèle des études et donc moins rémunérés (en plus d’une ancienneté plus faible sur le marché du travail que ceux qui ont arrêté leurs études après l’obtention du master). Les compétences détenues par les jeunes formés à l’entrepreneuriat semblent ainsi (légèrement) valorisées sur le marché du travail en permettant d’accéder à des emplois mieux rémunérés.

40Nos résultats montrent que les indépendants ont des rémunérations sensiblement équivalentes, toutes choses égales par ailleurs, à celle des salariés. On aurait pu s’attendre à ce qu’elles soient supérieures (professions libérales notamment) ou inférieures (difficultés d’installation des jeunes). Ce résultat peut tenir au calcul de rémunération retenu (cf. note de bas de page n°9) ou par la faiblesse des effectifs. Quoi qu’il en soit, il nécessiterait des investigations supplémentaires qui dépassent le cadre de cette contribution.

41Les autres variables introduites dans le modèle jouent dans le sens attendu : les hommes, les diplômés dans le secteur de la santé, les alternants6, les doubles diplômés, les salariés d’Île-de-France ont des rémunérations supérieures à la moyenne.

3.3. Des indépendants plus satisfaits de leur emploi

42Bien que le résultat soit à confirmer, nos données montrent (paragraphe précédent) que les indépendants ont des revenus, en moyenne, et après redressement, équivalents à celui des salariés. Sachant que l’installation est un objectif important des formations à l’entrepreneuriat, on a cherché à évaluer le niveau de satisfaction professionnelle des jeunes qui ont fait le choix d’un travail non salarié. On a utilisé une variable qui demande aux jeunes s’ils sont satisfaits des missions qu’ils ont à accomplir.

43Les indépendants (formés ou non à l’entrepreneuriat) de niveau master dans l’enquête semblent avoir des situations professionnelles plutôt favorables : 98 % d’entre eux se disent satisfaits des missions qu’ils ont à accomplir dans leur emploi contre 91 % des salariés. Ce résultat se confirme à caractéristiques égales par ailleurs (Tableau 3 en annexe), et notamment à revenu donné. Malgré les difficultés inhérentes à leur statut, et notamment en termes de précarité, la satisfaction de ces jeunes renvoie à la possibilité de créer une activité qui leur convient et fasse sens pour eux.

Conclusion

44L’université de Lille est un site universitaire engagé de longue date dans l’entrepreneuriat, bien avant la création des PEPITE, grâce à un soutien important de la Région Hauts-de-France.

45Pourtant, le taux de diplômés de master en 2018 qui disent avoir été formés à l’entrepreneuriat lors de leur dernière année d’études (8 %) est nettement plus faible que celui (19 %) observé au niveau national pour les sortants de formation initiale diplômés de master 8 ans plus tôt (Béduwé & Robert, 2021). Il n’est pas aisé de déterminer les raisons de ce résultat mais la fusion des campus Lille 1, Lille 2 et Lille 3 survenue justement cette année-là et sources de réorganisations administratives n’y est peut-être pas étrangère. De fait le PEPITE et sa démarche d’offre territoriale n’ont vraiment été mis en place qu’en 2021.

46En revanche, l’évaluation de ces formations en termes d’impact sur l’insertion professionnelle des diplômés d’un master à l’université de Lille confirme et actualise certains résultats obtenus à l’échelle nationale (Béduwé, Robert, op. cit). En effet, les formations à l’entrepreneuriat sont loin d’être une condition nécessaire mais elles facilitent l’installation à leur compte des jeunes qui ont acquis des compétences spécifiques en ce sens ainsi que ceux qui ont été accompagnés dans leur création d’entreprise. Ces jeunes sont plus souvent installés à leur compte après 30 mois de vie active (à caractéristiques égales par ailleurs) et, si ce n’est pas déjà le cas, souhaitent plus fréquemment le devenir. De même, les jeunes qui viennent d’un milieu entrepreneurial (au moins un parent indépendant) sont à la fois plus nombreux à se former à l’entrepreneuriat et à s’installer ensuite à leur compte.

47On retrouve également un rôle majeur des spécialités de master dans la probabilité d’être formé puis de s’installer comme indépendant. Les diplômés de certains domaines (STAPS et arts, lettres et langues) ont une probabilité plus forte de s’installer à leur compte alors qu’ils ont une probabilité plus faible d’avoir été formés à ce type de statut. Ce constat devrait encourager les PEPITE à mettre en place des actions pour sensibiliser ces publics.

48En revanche, la situation des femmes semble avoir évolué depuis 2010 puisqu’on ne constate plus d’écart significatif avec les hommes, aussi bien dans l’accès aux formations que dans l’installation à son compte. Elles restent cependant, toujours à caractéristiques égales, moins rémunérées que les hommes. Cette réduction de l’écart entre hommes et femmes se retrouve également sur l’accès au statut national d’étudiant entrepreneur (cf. article Favreau et Robic de cet ouvrage).

49Nos analyses montrent aussi que les jeunes formés à l’entrepreneuriat accèdent, à statut donné (salarié vs. indépendant), à des rémunérations légèrement supérieures, ce qui prouverait une reconnaissance de leurs compétences entrepreneuriales.

50Enfin, les indépendants apparaissent, à caractéristiques égales par ailleurs, plus satisfaits des missions qu’ils ont à accomplir que les salariés. Cela peut s’interpréter comme le signe que ces jeunes développent une activité plus souvent porteuse de sens. C’est également un encouragement pour les chargés de formation à l’entrepreneuriat et les équipes en place au sein des Universités et des PEPITE à poursuivre leurs actions.

51Les attentes sociales quant aux possibilités pour les jeunes de créer leur propre activité dans de bonnes conditions sont importantes et le développement des différents dispositifs de formation à l’entrepreneuriat mis en place par les Universités vont dans ce sens. Leur utilité et leur impact sur les situations professionnelles de ces jeunes formés, extrêmement diverses, doit continuer à être évalué. Pour ce faire de nouvelles données sont nécessaires, tant au niveau local que national.