Quelles sont les relations entre le passé professionnel des salariés et les conditions d’emploi et de travail actuelles ?
p. 253-268
Note de l’auteur
Les opinions n’engagent que les auteurs et non l’institution à laquelle ils appartiennent.
Plan détaillé
Texte intégral
Introduction
1La crise sanitaire a rendu plus visible les aspirations de certains salariés à changer d’emploi pour améliorer leurs conditions de travail (Amossé et al., 2021 ; Coutrot, 2022). Si ces questions ont été réactivées, elles se posaient déjà avant 2020 (Melnik-Olive & Stephanus, 2019 ; Stephanus & Vero, 2022). Les tendances récentes attestent d’une nette montée des démissions (Dares, 2022) mais tous les salariés ne sont pas sur un pied d’égalité face aux opportunités de mobilités. Les personnes qui ont connu des parcours instables ou précaires dans le passé risquent de connaître des mobilités subies, de ne pas pouvoir choisir leur emploi et d’accéder à des postes où les conditions de travail seront plus dégradées qu’ailleurs. D’autres disposeront de marges de manœuvre pour se reconvertir et/ou améliorer leurs conditions de travail.
2L’objectif de cet article sera de questionner les liens qui peuvent exister entre les trajectoires professionnelles passés et les conditions d’emploi et de travail actuelles de ces salariés. Pour ce faire, une typologie de ces trajectoires a été construite permettant de différencier cinq grands types de parcours. Nous mobilisons la théorie de la segmentation pour interpréter ces parcours et les associer aux différents segments du marché du travail (Amossé et al. 2011). Toutefois, la question des liens entre la segmentation du marché du travail et les conditions de travail est peu souvent posée directement dans les approches segmentationnistes. Les travaux fondateurs de Doeringer et Piore (1971), dans leur version dualiste, prenaient certes déjà en compte les conditions de travail mais sans leur donner un véritable pouvoir explicatif, l’argumentation étant surtout axée sur la complémentarité entre les modes de gestion de l’emploi par les entreprises du secteur primaire et secondaire, les conditions de travail différenciées en découlent. Des théories plus récentes, moins univoques dans le mécanisme causal de la segmentation, ont établi des liens entre la segmentation, les conditions de travail et la qualité de l’emploi entendue au sens large (Kalleberg, 2011 ; Osterman, 2018 ; Muñoz de Bustillo et al., 2011). Des travaux sur l’organisation des marchés professionnels font aussi explicitement référence au rôle des conditions de travail comme principe même de fonctionnement de ces marchés : les conditions de travail font ainsi système avec le type de mobilité chez les ouvriers de métier itinérants (Cornu, 1986) ou chez les informaticiens (Fondeur & Sauviat, 2003).
3Les conditions de travail ressenties par les individus expriment certains aspects de l’organisation du travail mise en place par l’entreprise, comme la façon dont le travail est contrôlé, l’autonomie dont les salariés disposent, le travail ou non en flux tendu ou encore les différentes formes de flexibilité (polyvalence, rotation des tâches…). Le pouvoir de segmentation des entreprises provient de leurs logiques internes liées à leurs choix économiques, leur secteur d’activité, à la taille de leur marché ou à leur position dans la chaîne de valeur notamment (Bruyère & Lizé, 2020). Une attention particulière sera accordée au type d’organisation du travail dans l’entreprise car la qualité des conditions de travail dépend du type de flexibilité du travail qui peut être imposée aux salariés. En se situant dans le prolongement de ces questionnements théoriques et empiriques, cet article vise à mieux identifier les associations possibles entre la segmentation sur le marché du travail et les conditions de travail. L’originalité de notre approche est de pouvoir placer les trajectoires longues des individus dans le contexte de l’entreprise où ils travaillent, certains aspects des modes de gestion de l’emploi par les entreprises pouvant être approchés avec l’enquête Defis du Céreq1.
4Après avoir présenté notre problématique et nos hypothèses dans une première partie, la typologie des trajectoires professionnelles construite sur longue période sera exposée dans une deuxième partie. Les résultats de nos estimations qui visent à mettre en relation les parcours des salariés avec les conditions de travail et d’emploi dans le contexte de l’entreprise feront l’objet d’une troisième partie.
1. Existe-t-il des liens entre les conditions d’emploi et de travail et les trajectoires passées ?
5Selon nos hypothèses, il existe un lien entre les conditions de travail dans les emplois occupés et les trajectoires passées des individus. Certains travaux empiriques corroborent ces hypothèses. Coutrot (2019) a montré que si les individus changent d’emploi, alors leurs conditions de travail peuvent s’améliorer, notamment pour ceux qui ont eu un parcours discontinu. Sur le marché secondaire, si les mobilités peuvent être un moyen pour améliorer la situation vis-à-vis des conditions de travail, encore faut-il que ces personnes puissent valoriser leurs mouvements sur le marché du travail. Or, en la matière, les inégalités selon les catégories socioprofessionnelles s’avèrent être particulièrement fortes, au détriment des salariés les moins qualifiés (Stéphanus & Vero, 2022). En ce sens, l’étude de Mette (2018) montre que si un individu a connu un parcours difficile, marqué par des aléas ou de la précarité, il aura moins de chances de pouvoir choisir son emploi et risque plus d’accepter ceux qui se présentent par défaut, avec de moins bonnes conditions de travail. Les effets négatifs du chômage et des conditions de travail difficiles s’amplifient ainsi mutuellement selon cet auteur.
6Les trajectoires professionnelles sont susceptibles de jouer sur le risque de travailler « sous pression », risque qui a particulièrement augmenté sur la période récente (Algava et al. 2014). La forte intensité du travail peut concerner différentes professions, souvent les ouvriers ou les employés (cadence des machines ou de la chaîne, normes techniques, demande du client, contrôle de la hiérarchie) et également les cadres pour d’autres motifs (obligé d’interrompre une tâche pour en accomplir une autre imprévue, devoir penser à trop de choses à la fois). Des parcours marqués par des contextes économiques difficiles tels que des licenciements et des restructurations (Melnik-Olive & Stéphanus, 2019) peuvent aussi exposer les salariés à des conditions de travail dégradées par la suite. D’autres travaux sur les conditions de travail ont montré que la précarité de l’emploi (contrat court, sous-emploi, risque de perdre son emploi) s’accompagne souvent de conditions de travail défavorables (Rouxel, 2009). D’autres mécanismes cumulatifs qui renforcent la segmentation du marché du travail se retrouvent dans les possibilités (ou non) d’accès à des formations et à un contexte de travail apprenant, l’un renforçant les possibilités d’accès à l’autre (Fournier et al., 2017).
7Enfin, au moment du recrutement, les entreprises ont un pouvoir de segmentation et de valorisation des attributs des candidats (de Larquier & Rieucau, 2020). Les expériences professionnelles passées peuvent être valorisées, c’est souvent le cas sur les marchés professionnels, ou au contraire être connotées négativement.
2. Identification des trajectoires professionnelles passées
2.1. Étude des trajectoires sur longue période dans le contexte de l’entreprise
8Dans l’enquête Defis du Céreq, des salariés ont été interrogés sur une durée de 5 ans (de 2015 à 2019) et les 4 500 entreprises qui les employaient en décembre 2013 ont été enquêtées en 2015. Nous exploitons la vague 1 de cette enquête (16 126 salariés enquêtés), les conditions de travail et d’emploi sont observées en 2015 ou en 2013 lorsque le salarié a quitté l’entreprise qui l’employait en 2013, elles seront considérées ici comme les « conditions actuelles ». L’analyse des trajectoires des salariés porte sur leur carrière entière, il s’agit donc de trajectoires longues et rétrospectives. Les individus en cours d’études ou ayant terminé leur formation initiale depuis moins de 5 ans ont été exclus car les variables n’ont pas beaucoup de sens pour les débutants.
2.2. Construction de la typologie des trajectoires professionnelles
9Compte tenu de notre problématique, les variables explicatives retenues cherchent à identifier le segment du marché du travail qui caractérise la carrière du salarié. À partir d’une analyse en correspondances multiples sur 11 variables relatives au passé professionnel des individus suivie d’une classification ascendante hiérarchique, une typologie en cinq classes a été construite. Ces variables sont les suivantes :
10Depuis la fin des études jusqu’à l’entrée dans l’entreprise dans laquelle est le salarié en 2013, l’individu a eu :
au moins une période d’emploi d’un an ou plus ;
au moins une période d’emplois courts (moins d’un an) ;
au moins une période de chômage d’un an ou plus ;
une période d’un an ou plus sans travailler pour s’occuper du foyer ou reprendre des études ;
a eu un emploi en intérim, CDD ou un emploi aidé ;
a connu une démission ;
a connu une rupture de contrat / licenciement.
11Depuis la fin des études jusque janvier 2014 :
au moins 4 métiers ont été exercés ;
le salaire a augmenté ;
le niveau de responsabilité professionnelle a augmenté ;
le délai d’arrivée dans l’entreprise dans laquelle est le salarié en 2013 est inférieur à 5 ans.
12À grands traits, les 5 classes se caractérisent de la façon suivante (graphique 1 pour les variables actives, graphique 2 pour les variables illustratives).
Les trajectoires situées sur des marchés primaires (24 % des individus) regroupent des salariés stables, ayant connu un accès rapide à l’emploi actuel après la fin des études. Ils ont évolué positivement en termes de progression de salaire et de responsabilité. Les salariés âgés de moins de 30 ans, fortement diplômés (bac+5), avec une ancienneté plus élevée dans l’entreprise, cadres ou profession intermédiaire de la santé et du travail social sont surreprésentés.
Les trajectoires de type « marché professionnel » (18 % des cas) se caractérisent par des changements d’entreprises et des démissions fréquentes sans passage par le chômage et tout en accédant à un CDI, à temps plein. L’évolution des responsabilités et des salaires a été ascendante. Les hommes, âgés de plus de 50 ans, de niveau bac+5, cadres ou contremaitres/agents de maitrise sont ici surreprésentés
Les trajectoires de stabilisation après une phase d’insertion en emplois courts (21 % des cas) occupent une position mixte du point de vue de la segmentation. Du point de vue statistique, elle est proche de la moyenne et est utilisée comme référence dans les modèles logit. Les personnes âgées de moins de 30 ans, d’un niveau bac à bac+3 et occupant des postes de technicien, d’ouvrier qualifié ou d’employé administratif d’entreprise sont surreprésentées.
Les trajectoires marquées par une alternance entre emploi et chômage (24 % des cas) se placent à mi-chemin entre un marché secondaire supérieur et un marché professionnel inférieur : elles permettent une évolution salariale et des responsabilités mais les passages par des CDD ou du chômage sont fréquents. Les salariés de niveau CAP-BEP, occupant des postes de profession intermédiaire administrative et commerciale, de technicien et d’ouvrier qualifié sont surreprésentés.
La dernière trajectoire est typique du segment secondaire (13 % des cas) avec peu ou pas d’évolution de responsabilités et des salaires avant d’entrer dans l’entreprise et des périodes de chômage et d’emplois précaires fréquentes. On trouve ici davantage de femmes, d’immigrés d’origine non européenne, de personnes non diplômées ou de niveau CAP-BEP, d’ouvriers non qualifiés, d’employés, de chauffeurs ou d’ouvriers de la manutention et du magasinage.
Graphiques 1 • Typologie des trajectoires en 5 classes. Trajectoire 1 : marché primaire
Lecture : 71 % des individus ont connu une évolution de salaire positive entre la fin de leurs études et janvier 2014, par ailleurs 7 % ont eu au moins une période d’un an d’emplois courts avant leur entrée dans l’entreprise dans laquelle ils sont en 2013.
Source : CNEFP-France compétences-Céreq, dispositif DEFIS, enquête individus, première vague.
Trajectoire 2 : marché professionnel
Trajectoire 3 : insertion après contrats courts
Trajectoire 4 : alternance emploi / chômage
Trajectoire 5 : marché secondaire
Graphiques 2 • Cinq types de trajectoire, variables illustratives. Trajectoire 1 : marché primaire
Lecture : 29 % des individus ayant suivi la trajectoire « marché primaire » ont un CAP-BEP, cette part est de 31 % pour l’ensemble des salariés. Source : CNEFP-France compétences-Céreq, dispositif DEFIS, enquête individus, première vague.
Trajectoire 2 : marché professionnel
Trajectoire 3 : insertion après contrats courts
Trajectoire 4 : alternance emploi/chômage
Trajectoire 5 : marché secondaire
3. Trajectoires professionnelles, conditions de travail et d’emploi dans le contexte de l’entreprise
3.1. Trajectoires professionnelles et organisation du travail dans l’entreprise
13Un premier groupe de variables expliquées décrivent certains aspects du mode de gestion de la main-d’œuvre par l’entreprise, elles sont issues du volet « entreprises » de l’enquête Defis. Les variables retenues sont les suivantes : les mobilités sont-elles organisées au sein de l’entreprise ? L’entreprise a-t-elle des difficultés à garder les salariés ? L’entreprise a-t-elle mis en place une politique d’aménagement des horaires de travail ? L’entreprise a-t-elle mis en place une démarche d’amélioration des conditions de travail ? Le contenu du travail est-il abordé lors des entretiens professionnels ? Les besoins de formations sont-ils évoqués lors des entretiens entre les salariés et la hiérarchie ? Une partie ou l’ensemble des salariés peuvent-ils régler eux-mêmes les incidents de travail ?
14Pour identifier les liens entre les trajectoires professionnelles passées et les modes de gestion de la main-d’œuvre par l’entreprise, plusieurs modèles logit successifs sont réalisés. Ces modèles comportent comme variables explicatives les trajectoires passées (avec comme modalité de référence la trajectoire « insertion après contrats courts ») et des variables sociodémographiques (âge, sexe croisée avec la situation familiale, niveau de diplôme, catégories sociales du père et de la mère et région de localisation2), de manière à pouvoir mettre en évidence les liens spécifiques avec les trajectoires antérieures. A priori, nous ne supposons pas de causalité mais de simples corrélations entre les trajectoires professionnelles passées et les conditions de travail et d’emploi car l’entreprise dans laquelle est le salarié en 2013/2015 peut contribuer à expliquer l’évolution de son salaire et de ses responsabilités. De plus, certaines caractéristiques inobservées peuvent expliquer à la fois la trajectoire professionnelle sur le long terme et un risque accru de subir des conditions d’emploi et de travail contraignantes.
15Les résultats du tableau 1 montrent une certaine cohérence entre les carrières de long terme et la gestion de la main-d'œuvre par les entreprises, sans toutefois aucun déterminisme et sans faire ressortir de liens systématiques3.
16Les salariés ayant connu une trajectoire de type « marché professionnel » ont plus de chances de travailler dans une entreprise qui n’organise pas les mobilités en interne, qui a des difficultés à garder ses salariés et qui n’évoque pas les besoins de formation lors des entretiens professionnels. Il est probable que ces entreprises anticipent les démissions de leurs salariés et que leur mode de gestion de l’emploi soit axé prioritairement sur les mobilités externes. Les personnes qui ont connu une trajectoire marquée par une alternance emploi/chômage ont également moins de chances de travailler dans une entreprise qui cherche à garder ses salariés. Ces entreprises se particularisent par l’absence de politique d’amélioration des conditions de travail et notamment de démarches pour aménager les horaires de travail. Ceux qui ont connu une trajectoire de type « marché secondaire » risquent aussi de travailler dans des entreprises qui n’organisent pas les mobilités, qui ont des difficultés à garder leurs salariés et qui ne développent pas de politiques d’amélioration des conditions de travail. De surcroît, la question du contenu du travail a moins de chances d’être abordée dans les entretiens professionnels.
Tableau 1 • Trajectoire professionnelles, gestion de la main d’œuvre et des conditions de travail par l’entreprise, modèles logit
Pratiques des entreprises en 2013-2015 | |||||||
Trajectoires professionnelles antérieures à 2013 | Organisation des mobilités au sein de l’entreprise | Difficulté à garder les salariés | Politique d’aménagement des horaires de travail | Démarche d’amélioration des conditions de travail | Contenu du travail abordé lors des entretiens professionnels | Besoins de formations évoqués lors des entretiens entre les salariés et la hiérarchie | Une partie ou l’ensemble des salariés peuvent régler eux-mêmes les incidents de travail |
Marché primaire | (0,99) | (1,05) | (0,91) | (1,05) | (0,93) | (0,90) | (0,97) |
Marché professionnel | 0,78*** | 1,34*** | 0,88*** | (0,88) | (0,93) | 0,87* | (0,96) |
Insertion après contrats courts | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. |
Alternance emploi/chômage | 0,80*** | 1,41*** | 0,86*** | 0,86*** | (0,99) | (0,88) | ns |
Marché secondaire | 0,86** | 1,47*** | 0,79*** | 0,79*** | 0,73*** | 0,66*** | 0,79*** |
Lecture : les individus ayant suivi une trajectoire de type « marché professionnel » ont une probabilité relative de 0,88 d’être en 2013 dans une entreprise qui organise la mobilité au sein de l’entreprise, par rapport à ceux qui ont suivi une trajectoire de type « insertion après contrats courts » (modalité de référence).
Les résultats sont issus de modèles logit prenant comme autres facteurs explicatifs le niveau de diplôme, le sexe croisé avec la situation familiale, la localisation, la catégorie sociale du père et de la mère et la région de localisation.
Source : CNEFP-France compétences-Céreq, dispositif Defis, enquête entreprises et enquête individus, première vague.
Encadré 1 • Quels sont les liens avec les formes d’organisation du travail dans les entreprises ?
Afin de mieux comprendre les formes d’organisation du travail dans les entreprises qui emploient les salariés en 2013, une typologie 6 classes a été construite (ACM et CAH). Des travaux empiriques sur les modèles socioproductifs d’entreprise ont été mobilisés pour caractériser les types d’organisation du travail de notre typologie (Amossé & Coutrot, 2008 ; Signoretto, 2021) ainsi que d’autres travaux qui interrogent les liens entre les formes d’organisation du travail dans les entreprises et les trajectoires professionnelles (Sigot & Vero, 2014).
Les variables relatives aux formes d’organisation du travail dans l’entreprise sont issues du volet « entreprises » de l’enquête Defis. Il s’agit de l’autonomie dans la résolution des problèmes (autonomie de l'ensemble des salariés ? Autonomie d'une partie des salariés ? Pas d'autonomie des salariés ?), de la façon dont s'exerce le contrôle du travail (contrôle permanent ? Contrôle intermittent ? Contrôle occasionnel ?), de l’autocontrôle des salariés ? De l’existence de groupe de travail autonome ? De l’utilisation de méthodes formalisées dans la résolution des problèmes ? L’entreprise utilise-t-elle une démarche qualité ? De la description précise des tâches (pour l'ensemble des salariés ? Pour une partie des salariés ? Pas de description des tâches), de la polyvalence des salariés ? Du système de rotation des tâches ? De la gestion en flux tendu ?
Classe 1 : organisation du travail formalisée
Cette forme d’organisation du travail associe une autonomie des salariés dans la résolution des problèmes avec un fort contrôle du travail, des méthodes formalisées, une description précise des tâches et une soumission à une démarche qualité. Cette organisation se situe à cheval entre plusieurs types de modèles.
Classe 2 : organisation du travail en autonomie
Les contraintes de travail sont ici plus faibles qu’ailleurs (pas de flux tendu, autocontrôle des salariés). Cette configuration offre une forte autonomie dans le travail, notamment dans la résolution des problèmes où les initiatives peuvent venir des salariés, ils ont aussi des marges de manœuvre dans la définition des tâches. Les salariés ne sont pas contraints à une démarche qualité, ni à des systèmes de rotation des tâches ce qui peut être le signe d’une forte spécialisation « métier ».
Classe 3 : organisation taylorienne
Cette organisation du travail met en place un ensemble de contraintes et de règles qui limitent l’autonomie et les possibilités d’action des salariés. Ils effectuent des tâches précises, en flux tendu et sous contrôle permanent. La faible qualification des salariés, souvent non diplômés, laisse supposer qu’ils sont facilement interchangeables. Cette configuration va de pair avec une gestion des ressources humaines qui privilégie une certaine forme de flexibilité interne du travail en imposant une polyvalence et une rotation des tâches.
Classe 4 : organisation en lean production
Cette forme d’organisation du travail se caractérise par un modèle de production en flux tendu, une recherche de réduction des coûts et du gaspillage tout en assurant un haut niveau de qualité (Lorenz & Valeyre, 2005). Les méthodes de résolution des problèmes sont formalisées et l’organisation associe une faible autonomie avec un autocontrôle des salariés. Cette organisation est aussi marquée par des contraintes de rythme et une implication des salariés dans le travail par la mise en place de groupes de travail autonome. La stratégie RH de ces entreprises s’inscrit dans une recherche de flexibilité interne du travail via la polyvalence et la rotation des tâches.
Classe 5 : organisation en structure simple
Cette configuration (Mintzberg, 1982) s’apparente à une forme d’organisation du travail traditionnelle qui se caractérise par une absence d’autonomie accordée aux salariés et un contrôle permanent du travail. Le travail en équipe, la polyvalence ou la gestion de la qualité sont peu ou pas diffusés.
Classe 6 : organisation du travail intermédiaire
Cette configuration se caractérise par une autonomie partielle dans la résolution des problèmes, un contrôle travail intermittent, un autocontrôle dans la moyenne et une description partielle des tâches.
Tableau 2 • Les formes d’organisation du travail, variables actives de la typologie
Formes d'organisation du travail | Autonomie de l'ensemble des salariés | Autonomie d'une partie des salariés | Pas d'autonomie des salariés | Contrôle permanent | Contrôle intermittent | Contrôle occasionnel | Autocontrôle des salariés | Groupe de travail autonome |
Organisation formalisée | 72 | 26 | 2 | 74 | 25 | 1 | 98 | 63 |
Organisation en autonomie | 69 | 15 | 15 | 50 | 12 | 38 | 80 | 49 |
Organisation taylorienne | 37 | 7 | 56 | 86 | 4 | 11 | 35 | 80 |
Lean production | 60 | 40 | 1 | 70 | 20 | 10 | 96 | 91 |
Organisation en structure simple | 25 | 40 | 35 | 77 | 17 | 6 | 42 | 29 |
Organisation intermédiaire | 0 | 100 | 0 | 0 | 100 | 0 | 74 | 47 |
Ensemble | 49 | 32 | 20 | 65 | 22 | 13 | 70 | 58 |
Lecture : dans 72 % des entreprises avec une « organisation du travail formalisée », l’ensemble des salariés ont une autonomie dans la gestion des incidents relatifs à la production ou à la marche du service.
Source : CNEFP-France compétences-Céreq, dispositif Defis, enquête entreprises.
Tableau 2 (suite) • Les formes d’organisation du travail, variables actives de la typologie
Formes d'organisation du travail | Formalisation de la résolution des problèmes | Démarche de qualité | Description des tâches pour l'ensemble des salariés | Description des tâches pour une partie des salariés | Pas de description des tâches | Polyvalence des salariés | Système de rotation des tâches | Gestion en flux tendu |
Organisation formalisée | 77 | 68 | 74 | 24 | 2 | 85 | 20 | 14 |
Organisation en autonomie | 6 | 8 | 36 | 16 | 48 | 83 | 10 | 10 |
Organisation taylorienne | 51 | 59 | 77 | 14 | 9 | 93 | 52 | 43 |
Lean production | 64 | 61 | 71 | 18 | 11 | 99 | 67 | 69 |
Organisation en structure simple | 26 | 31 | 67 | 26 | 7 | 52 | 8 | 11 |
Organisation intermédiaire | 29 | 34 | 48 | 43 | 9 | 74 | 15 | 12 |
Ensemble | 40 | 41 | 62 | 22 | 16 | 80 | 27 | 26 |
Source : CNEFP-France compétences-Céreq, dispositif Defis, enquête entreprises.
17Les parcours professionnels des salariés peuvent-ils être associés à des formes particulières d’organisation du travail dans l’entreprise ? Pour tester cette hypothèse, un modèle logit multinomial a été appliqué, on cherche à expliquer les différentes formes d’organisation du travail (avec comme référence la forme d’organisation du travail intermédiaire) par les trajectoires passées et des variables sociodémographiques (cf. supra). Les résultats du tableau 3 confirment en partie cette hypothèse. Lorsque les trajectoires ont été de type « marché primaire » ou « marché professionnel », elles ont moins de chances d’être associées à une organisation du travail en lean production.
18Les trajectoires situées sur le segment secondaire ont moins de chances d’être associées à une organisation du travail formalisée ou en lean production (de même pour la trajectoire d’alternance emploi/chômage). Les trajectoires précaires dans le passé ne mèneraient pas vers des entreprises où l’organisation du travail est très structurée, ces résultats invitent à creuser la question éventuelle d’un sentier de dépendance de la précarité.
Tableau 3 • Trajectoires professionnelles et formes d’organisation du travail
Formes d’organisation du travail odds ratios (référence = organisation intermédiaire) | |||||
Trajectoires professionnelles antérieures | Organisation formalisée | Organisation en autonomie | Organisation taylorienne | Lean production | Organisation en structure simple |
Marché primaire | (0,87) | (0,88) | (0,88) | 0,82* | (0,99) |
Marché professionnel | (0,86) | (1,02) | (0,93) | 0,74*** | (1,14) |
Insertion après contrats courts | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. |
Alternance emploi/chômage | (0,87) | (1,16) | (0,87) | 0,74*** | (1,10) |
Marché secondaire | 0,65*** | (0,87) | (0,87) | 0,56*** | (1,09) |
*** significatif au seuil de 1 %, * significatif au seuil de 10 %, entre parenthèses : non significatif.
Lecture : pour les individus avec une trajectoire passée de type « marché secondaire », la probabilité relative de travailler dans une entreprise ayant une organisation du travail formalisée est de 0,65 par rapport à la modalité de référence (organisation du travail intermédiaire).
Résultats issus d’un modèle logit multinomial, les autres variables explicatives sont identiques au logit du tableau 1.
Source : CNEFP-France compétences-Céreq, dispositif Defis, enquête entreprises et enquête individus première vague.
3.2. Trajectoires professionnelles et conditions d’emploi dans le poste occupé
19Les variables relatives aux conditions d’emploi proviennent du volet « salariés » de l’enquête Defis, elles sont les suivantes : est-il en CDD en 2013 ? À temps partiel ? Considère-t-il ne pas être assez payé pour le travail accompli ? Ne pas avoir de chance de promotion ? Des modèles logit successifs sont réalisés (tableau 4), ils comprennent des variables explicatives de type sociodémographique (âge, sexe croisé avec la situation familiale, niveau de diplôme, catégories sociales du père et de la mère et région de localisation en 4 modalités), des variables se rapportant à l’entreprise dans laquelle est le salarié en 2013/2015 (taille et secteurs d’activité) et les trajectoires passées identifiées (avec comme modalité de référence la classe « insertion après contrats courts »).
20Les relations entre les trajectoires passées et les conditions d’emploi actuelles ressortent sur plusieurs dimensions : pour ceux ayant eu des trajectoires proches du marché secondaire, le risque d’occuper un emploi en CDD, à temps partiel, considéré comme pas assez payé ou n’offrant pas de chances de promotion est significativement plus élevé par rapport à la trajectoire mise en référence. Pour les trajectoires marquées par des alternances entre emploi/chômage, le risque d’être en CDD en 2013 est également plus fort ; en revanche, elles sont aussi associées à des chances de promotions positives, ce qui les démarquent du segment secondaire. Les trajectoires de marché professionnel sont associées à des conditions d’emploi favorables : moins de CDD et de temps partiel, travail considéré comme assez payé et avec des chances de promotion. Il en est de même mais dans une moindre mesure pour celles situées sur le marché primaire. Les types de trajectoires différenciées en termes de position sur les segments du marché du travail sont donc associés à des conditions d’emploi différentes en 2013/2015.
Tableau 4 • Trajectoires professionnelles et conditions d’emploi modèles logit
Odds-ratios | ||||
Variables | CDD en 2013 | Temps partiel | Pas assez payé pour le travail accompli | Pas de chance de promotion |
Type de trajectoire professionnelle antérieure | ||||
Marché primaire | 0,47*** | ns | 0,89*** | ns |
Marché professionnel | 0,55*** | 0,68*** | 0,72*** | 0,85** |
Insertion après contrats courts | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. |
Alternance emploi/chômage | 1,35*** | ns | ns | 0,87** |
Marché secondaire | 1,55*** | 1,82*** | 1,68*** | 1,95*** |
Lecture : les individus avec une trajectoire passé de type « marché secondaire » ont un risque d’être en CDD multiplié par 1,55 par rapport à ceux ayant suivi une trajectoire de type « insertion après emplois courts ».
Les autres variables explicatives introduites sont similaires aux modèles logit conditions de travail (tableau 5).
Source : CNEFP-France compétences-Céreq, dispositif Defis, enquête individus, première vague.
3.3. Trajectoires professionnelles et conditions de travail dans le poste occupé
21Les variables relatives aux conditions de travail issues du volet « salariés » sont nombreuses, elles ont été réunies dans des scores dont la composition est décrite dans l’encadré 2. Les cinq scores concernent : la charge horaire, le travail sous pression, le travail normé, le travail non apprenant, l’insatisfaction déclarée par le salarié sur ses conditions de travail.
Encadré 2 • scores de conditions de travail dans le poste occupé en 2013-2015, variables expliquées
1-Score de contraintes horaires-charge horaire : 1) horaires décalés ; 2) horaires irréguliers ; 3) travail de nuit ; 4) travaille plus de 45h ; 5) pas de possibilité de modifier ses horaires ;
2-Score de travail normé : 1) gestes répétitifs ; 2) applications strictes des consignes ; 3) objectifs chiffrés ; 4) travail contrôlé ;
3-Score de travail non apprenant : 1) Le travail n’implique pas de résoudre des problèmes non prévus ; 2) Le travail ne permet pas d’apprendre des choses nouvelles ;
4-Score de travail sous pression : 1) obligé de se dépêcher ; 2) difficultés de conciliation vie personnelle/vie professionnelle ;
5-Score de conditions de travail ressenties : 1) travail non intéressant ; 2) conditions de travail pénibles.
À partir de ces 5 scores, des variables binaires sont construites lorsque le score dépasse un certain seuil.
22Afin de mesurer les liens entre les conditions de travail (variables binaires construite à partir des scores) et les trajectoires professionnelles passées, plusieurs modèles logit successifs sont réalisés (tableau 5). Les variables explicatives introduites sont identiques à celles des régressions logistiques sur les conditions d’emploi (cf. supra) Le tableau 5 montre dans quelle mesure les trajectoires antérieures peuvent être associées à des conditions de travail plus ou moins favorables. Les trajectoires de type marché professionnel peuvent être associées à de meilleures conditions de travail, c’est-à-dire à un travail apprenant, moins normé et donc plus autonome, et avec des conditions considérées comme satisfaisantes. Ces personnes ont aussi plus de risques de travailler « sous pression », ce qui est l’un des modes de fonctionnement du marché professionnel (pour les cadres informatiques ou les consultants), ces emplois pouvant être de bonne qualité par ailleurs.
23Les trajectoires sur le segment secondaire ou marquées par une alternance emploi/chômage sont également aussi un peu plus associées à davantage de « travail sous pression », ce qui exprime une autre forme de pression au travail. Les trajectoires positionnées sur le segment secondaire ont un risque un peu plus élevé de fortes charges horaires, et une probabilité plus forte de travail normé ou non apprenant, avec des conditions de travail jugées difficiles. En revanche, les trajectoires marquées par une alternance emploi/chômage se particularisent car elles sont moins exposées au risque de travail normé et sont associées à davantage de travail apprenant. Il est possible qu’elles se situent sur un segment du marché du travail à mi-chemin entre le segment secondaire et un marché professionnel inférieur.
24Au-delà des trajectoires professionnelles, d’autres facteurs sont associés à des conditions de travail plus ou moins favorables : les caractéristiques de l’entreprise et les caractéristiques sociodémographiques des personnes.
Tableau 5 • Trajectoires professionnelles et conditions de travail, modèles logit
Odds-ratios | |||||
Variables | Charge horaire | Travail sous pression | Travail normé | Travail non appre- nant | Insatisfait des conditions de travail |
Caractéristiques de l’entreprise | |||||
Moins de 20 salariés | 0,81*** | ns | 0,41*** | 1,19*** | 0,90** |
20 à 49 salariés | 0,87*** | ns | 0,57*** | 1,23*** | ns |
50 à 249 salariés | ns | ns | 0,79*** | 1,23*** | ns |
500 salariés ou plus | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. |
Construction | 0,63*** | 1,17* | 0,77*** | 0,74*** | 1,55*** |
Commerce | 0,73*** | 1,33*** | 1,18*** | ns | ns |
Services | 1,24*** | 1,33*** | ns | 1,18*** | ns |
Niveau de diplôme | |||||
Non diplômés | 2,03*** | 0,59*** | 4,45*** | 4,86*** | 4,37*** |
CAP-BEP | 2,11*** | 0,52*** | 3,84*** | 3,57*** | 3,74*** |
Bac | 1,82*** | 0,66*** | 3,09*** | 2,41*** | 2,47*** |
Bac+2 | 1,27*** | 0,71*** | 2,08*** | 1,60*** | 1,54*** |
Bac+3/+4 | 1,35*** | 0,85*** | 2,18*** | 1,64*** | 1,65*** |
Âge | |||||
Moins de 30 ans | 1,24*** | ns | ns | 1,17** | ns |
50 ans ou plus | 0,81*** | 0,72*** | 0,76*** | 0,87*** | ns |
De 30 à 49 ans | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. |
Situation familiale et origine géographique | |||||
Homme avec au moins 2 enfants à charge | ns | ns | ns | ns | ns |
Femme avec moins 2 enfants à charge | 0,55*** | 1,38*** | 1,49*** | 1,69*** | ns |
Femme avec au moins 2 enfants à charge | 0,56*** | 1,21*** | 1,42*** | 1,79*** | ns |
Homme avec moins de 2 enfants à charge | Ref, | Ref, | Ref, | Ref, | Ref, |
Immigré origine non européenne | 1,16* | ns | 1,93*** | 2,02*** | 1,59*** |
Français de naissance ou immigré origine européenne | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. |
Type de trajectoire professionnelle antérieure | |||||
Marché primaire | 0,81*** | ns | ns | 0,88** | ns |
Marché professionnel | ns | 1,22*** | 0,81*** | 0,68*** | 0,82*** |
Insertion après contrats courts | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. | Ref. |
Alternance emploi/chômage | ns | 1,32*** | 0,85** | 0,87** | ns |
Marché secondaire | 1,13* | 1,17* | 1,22*** | 1,79*** | 1,61*** |
Lecture : les individus avec une trajectoire passée de type « marché secondaire » ont 1,13 fois plus de risque d’avoir une charge horaire élevée par rapport à ceux ayant une trajectoire passée de type « insertion après contrats courts » (modalité de référence). Le modèle logit inclut également des variables relatives à la catégorie socio-professionnelle du père et de la mère et à la région de localisation.
Source : CNEFP-France compétences-Céreq, dispositif DEFIS, enquête individus, première vague.
Conclusion
25Nos résultats montrent qu’il existe des relations entre les trajectoires passées et des conditions d’emploi et de travail plus ou moins favorables dans le poste occupé. Certaines trajectoires professionnelles sont aussi associées à des types d’organisation du travail différenciés dans l’entreprise. La position des individus sur les segments du marché du travail telle qu’elle ressort dans leurs trajectoires longues semble donc se traduire par des inégalités durables qui sont inscrites dans la qualité du travail et de l’emploi occupé, ce qui irait dans le sens de l’hypothèse d’un sentier de dépendance de la précarité, sans déterminisme pour autant.
26La notion de trajectoire sur le long terme construite ici présente certaines limites, notamment de restituer les parcours depuis la fin des études (cinq ans après) jusqu’en 2013. Or, si le parcours est long, il s’agit alors d’un « bilan de carrière ». Nous envisageons de prolonger nos analyses sur les autres vagues de l’enquête Defis pour prendre en compte les trajectoires de court terme. Un autre prolongement possible est d’articuler le type d’organisation du travail de l’entreprise et les caractéristiques du poste occupé.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Nous faisons partie du groupe d’exploitation de l’enquête Defis du Céreq, Convention d’exploitation signée en mai 2020.
2 Les régions sont regroupées en quatre modalités : Île-de-France, régions méditerranéennes, régions du bassin parisien, autres régions.
3 Les variables utilisées sont des variables d’entreprises où les liens sont a priori moins forts qu’au niveau de l’établissement, il est en effet possible que les entreprises segmentent leurs modes de gestion de l’emploi au niveau des établissements.
Auteurs
Pôle emploi ; Direction des Statistiques, Études et Évaluation.
Centre d’économie de la Sorbonne, Université de Paris 1.
Le texte seul est utilisable sous licence Creative Commons - Attribution - Pas de Modification 4.0 International - CC BY-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
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