1 – La structure A-1

1Cette structure, la plus importante du site, occupe tout le côté sud de la grande place. Son aspect ruiniforme à notre arrivée (fig. 7) était tel qu’on pouvait se demander s’il ne s’agissait pas d’une simple avancée de la colline. En réalité, nos fouilles prouveront que, si elle a largement profité de la pente à laquelle elle est adossée, une grande partie de la substructure a été construite de main d’homme.

2La masse de la str. A-1 est si imposante que nous avons préféré ne pas nous y attaquer immédiatement et attendre les résultats de la première campagne pour juger de l’intérêt du site. Celui-ci s’étant révélé très important, c’est en décembre 1978, au début de la deuxième campagne, que nous commencions les travaux sur la pyramide principale. Ils allaient comporter deux phases :

1. nettoyage général et dégagement des traits architecturaux : murs de soutènement, escaliers, gradins, plate-forme supérieure ;

2. fouille de la plate-forme supérieure et du bloc central de l’escalier.

3La direction de la première phase, baptisée opération Y, fut confiée à J. Cifuentes, assisté de Z. Calderón, puis à M.A. Bailey. Je me chargeai personnellement de la seconde, l’opération F.

a/ – L’opération Y (dégagement de la structure)

4Elle a nécessité l’enlèvement d’une masse considérable de pierres et de terre qui avaient glissé des gradins supérieurs. Ont été entièrement dégagés : le mur de soutènement nord et la base (6 marches) du grand escalier donnant sur la place, ainsi que les trois premiers gradins (incomplètement) et quelques traces des deux gradins supérieurs de la face nord ; le mur ouest entre la colline et l’angle du gradin supérieur, le seul conservé (par contre, le mur est, à l’endroit où il devait s’articuler avec la pente dallée de la str. A-7, est resté flou) ; l’escalier qui, partant de l’angle sud-est de la plate-forme, mène à la terrasse de A-7 (fig. 8).

5Le grand mur de soutènement nord mesure 43.20 m de longueur ; son orientation est de 112°, soit une déviation de 22° par rapport à l’est magnétique. Il est fait de galets bruts, avec un liant argileux, et apparemment n’a jamais eu de revêtement : aucune plaque d’argile durcie n’a été trouvée dans les déblais. On peut estimer à 7, peut-être 8, le nombre des gradins formant la pyramide dans son dernier stade (il y en eut plusieurs). Ce sont des gradins verticaux, hauts de 1,20 à 1,50 m séparés par des espaces horizontaux larges de 1,50 m environ ; le gradin du bas, le plus haut (1,60 m) est légèrement incliné. La hauteur totale jusqu’à la plate-forme tardive est de 9,50 m.

6La str. A-1 est dotée de deux escaliers : le plus grand, large de 10,20 m à la base, donne sur la place. Il devait compter entre 25 et 30 marches, mais seules les 6 premières sont parfaitement conservées (fig. 9) ; elles sont faites de 2 à 4 assises de galets non taillés, surmontés d’une épaisseur de dalles de caliche formant la marche proprement dite. La hauteur moyenne des marches est de 0,45 m, leur largeur de 0,35 à 0,40 m. La première fait saillie sur la place ; sans doute plus large, elle aurait perdu sa couverture de caliche. La 4ème et la 7ème marche se trouvent dans le prolongement de la partie supérieure du 1er et du 2ème gradin respectivement, c’est-à-dire que la partie horizontale de chaque gradin correspond à une marche, et qu’il y a deux marches supplémentaires pour monter d’un gradin au suivant (3 marches pour le 1er gradin, qui est plus haut).

Fig. 7 – La str. A-1 avant la fouille, vue du jeu de balle.

7À mi-hauteur de la structure, l’escalier est complètement détruit ; on retrouve cependant quelques traces des 4 marches supérieures ; à cet endroit il aurait été un peu plus étroit (8,50 m) et divisé en deux par un grand bloc central, visible sur la fig. 8. Ce bloc central, caractéristique des escaliers de la période classique dans notre région, est une sorte de caisson de pierre haut de près de 4 m à l’endroit où il se raccorde à l’escalier ; la partie supérieure était au niveau de la plate-forme. Il faut reconnaître toutefois que l’articulation du bloc central et de l’escalier reste ici assez imprécise, par suite des destructions provoquées, entre autres, par les racines de plusieurs jocotes ; et aussi parce que la partie supérieure de l’escalier a dû faire l’objet d’un remaniement au moment de la surélévation de la plate-forme.

8Le mur de soutènement nord de la str. A-1 se prolonge vers l’est, sans changer d’orientation, sur 33 m, pour former la base du grand talus dallé de la terrasse supportant la str. A-7. La jonction des gradins de la pyramide avec cette pente dallée est loin d’être nette ; peut-être A-1 a-t-elle été agrandie de ce côté, recouvrant partiellement les dalles ? Celles-ci s’interrompent vers le bas pour laisser la place à deux marches de galets, et l’on retrouve les deux marches, mais cette fois faites de dalles de tuf et de caliche, dans la partie haute, au niveau de la terrasse de la str. A-7. C’est aussi à ce niveau qu’aboutit l’escalier latéral faisant communiquer les plates-formes des str. A-1 et A-7 ; 5 marches ont été dégagées (il y en aurait 7 ou 8) sur une largeur de 5,45 m.

9La situation est moins nette sur la face ouest de la pyramide. On peut supposer qu’il existait là aussi un escalier latéral reliant les plates-formes A-1 et A-8, avec une dénivellation d’environ 4 m, mais ceci n’est pas certain, compte tenu surtout de l’isolement de l’ensemble ouest par rapport aux structures de la grande place. Pour aller du temple, c’est-à-dire de la pyramide principale, à l’ensemble d’habitation A-7-8, peut-être fallait-il descendre, par un escalier longeant la face ouest de A-1, jusqu’au passage surélevé de la str. A-2, puis de là au patio ouest, pour monter ensuite à la str. A-7 par un escalier situé sur la face nord de celle-ci.

Matériel

10Environ 5.000 tessons ont été récoltés au cours de l’opération, dont la moitié proviennent de la base du mur nord. Dans ce matériel céramique, qui date en majorité du Classique tardif mais dans lequel Préclassique et Postclassique sont aussi représentés, et le matériel lithique, nous avons sélectionné 13 objets ou “artefacts”, Y/1 à Y/13, dont la liste est donnée en annexe 1. Les plus intéressants proviennent de l’escalier et de la base du mur nord. Nous supposons qu’une ou plusieurs caches avaient été aménagées sous les marches du grand escalier ; les objets qu’elles contenaient ont été entraînés vers le bas par sa destruction. C’est ainsi que nous avons mis au jour, au centre et à la hauteur de la 8ème marche, les fragments d’un vase cylindrique et un disque de pierre stuqué et peint ; sur la 2ème marche, trois grandes lames d’obsidienne à l’extrémité retouchée en grattoir (fig. 104). Au pied du mur est et vers le haut de la grande pente dallée de la str. A-7, on note un endroit où les dalles de tuf ont été détruites pour creuser un petit puits cylindrique de 0,50 m de diamètre et 1,20 m de profondeur, qui a été ensuite comblé avec une terre noirâtre plus meuble que le remblai normal. Cette cache (?) contenait le squelette d’une mouffette (zorrillo moteado, Conepatus mesoleucus1), et un poinçon d’os (fig. 110).

Fig. 8 – La face nord de la str. A-1 après dégagement des murs et du grand escalier.

Fig. 9 – L’escalier principal de la str. A-1 et le bloc central.

b/ – L’opération F (plate-forme supérieure)

11Cette plate-forme se présente à notre arrivée comme une aire à peu près plane de vaste dimension : 15 x 38 m environ, bordée au sud par la colline. Peu de détails sont visibles en surface par suite de l’érosion et aussi de l’existence, heureusement un peu en retrait, d’une habitation avec ses dépendances. On distingue néanmoins au centre de la plate-forme les traces d’une construction à peu près carrée, de 2,80 m de côté, qui affleure la surface ; il s’agit d’un mur de galets, appareillé vers l’intérieur, formant une sorte de caisson rempli de petits galets de pierre ponce. Cette construction se trouve dans le prolongement de l’avancée que nous avons décrite, vers le haut du grand escalier, et il est probable qu’elle constitue avec elle le “bloc central” de la pyramide. Par analogie avec les sites contemporains du département d’El Quiché que nous avons fouillés, en particulier avec Los Cerritos – Chijoj (Lehmann, 1975), on peut penser que ce bloc central abrite une tombe importante.

12Après un nettoyage soigneux de la plate-forme, d’autres alignements de pierres apparaissent en surface : il s’agit de la partie supérieure de murs, dont les deux faces appareillées portent encore par endroits un revêtement d’argile lissée prouvant qu’ils étaient en superstructure. Ainsi prend forme peu à peu un édifice rectangulaire très allongé : 36,40 m, pour 5,80 m de largeur seulement ; des cloisons de pierre le divisent intérieurement en cinq pièces sensiblement carrées, de 6 x 6 m, disposées symétriquement. La pièce centrale (No. 1) est ouverte au nord vers l’escalier ; on y accédait par une ouverture de 2,80 m de largeur – donc alignée avec le bord du “caisson” central – dans le mur sud. Elle communique latéralement avec les chambres No. 2 et 4 par des ouvertures plus étroites (1,25 m). Cette chambre No. 1, qui devait constituer le sanctuaire du temple, renferme le bloc central, dont la partie supérieure servait sans doute d’autel. Il faut souligner dès à présent que la superstructure ainsi dégagée par nous avait été comblée pour surélever la plate-forme, et qu’elle correspond donc à l’avant-dernier stade de construction de la str. A-1, alors que la partie supérieure du bloc central que nous avons mise au jour dans la chambre centrale daterait, elle, du dernier stade.

13Les chambres No. 2 et 4, contiguës à la chambre centrale, présentent dans leur mur sud deux ouvertures étroites (0,80 m), sans doute des fenêtres ; elles ne communiquent pas avec les chambres latérales (No. 3 et 5), qui n’avaient, elles, qu’une ouverture, large de 1,40 m, dans l’un des angles du mur sud. Nous n’avons entièrement mis au jour que la moitié est de la superstructure : les vestiges, trouvés en surface, des murs de l’aile ouest prouvent néanmoins qu’elle était symétrique. D’autre part, les murs nord et est de l’édifice avaient été entraînés par l’érosion, nous ne savons donc pas s’ils étaient dotés eux aussi d’ouvertures (en l’occurrence de fenêtres).

14Les murs de la superstructure, larges de 40 cm, sont faits de deux épaisseurs de galets noyés dans l’argile ; ils sont conservés par endroit sur 1,10 m de hauteur. Les chambranles de l’ouverture entre la pièce centrale et la chambre No. 2 sont deux fois plus épais. Le sol de l’édifice, peu consistant, devait être d’argile ; il est simplement marqué par un niveau brun-rouge recouvert d’un remblai de talpetate jaune clair. Le temple a été entièrement comblé après qu’on ait muré ses ouvertures, au cours de la dernière phase de construction, ce qui a donc permis de surélever la plate-forme d’au moins 1,10 m (de 8,40 à 9,50 m au-dessus du niveau de la place). Le mur nord de la superstructure, qui s’était déjà peut-être effondré, a été remplacé par une rangée de grosses pierres servant d’assise au nouveau mur de soutènement. Enfin, un mur de soutènement de galets a été construit tout au long du mur sud de la superstructure, à 1,30 m vers l’extérieur ; il marque la limite de la dernière plate-forme, qui n’a peut-être jamais supporté de temple.

Fig. 10 – Plan de la str. A-1. n

Fig. 11 – Profil nord-sud de la str. A-1 montrant la superposition : a/ première phase ; b/ deuxième phase.

15Il est regrettable que ces travaux de comblement et de surélévation aient été précédés d’un “balayage” complet du sol du temple : nous n’avons trouvé aucun vestige in situ. Le matériel provenant du remblai des chambres 2 et 3 (essentiellement du talpetate) est lui-même très peu abondant : une quarantaine de tessons.

c/ – La fouille du bloc central (partie sud)

16Le caisson dont la partie supérieure est apparue dans la chambre centrale du temple mesure intérieurement 2,30 x 2,80 m ; il n’occupe donc qu’une partie (sud) du bloc central qui déborde dans l’escalier. Les murs, appareillés vers l’intérieur, sont faits de galets bruts ; le remblai contient essentiellement des galets de pierre ponce, de dimension variable, mélangés à quelques galets de rivière. Il n’y a pas de tessons.

17À 90-100 cm de profondeur, les murs s’interrompent brusquement au contact d’un sol brun-jaune clair très dur. Ce niveau, + 850 par rapport à la place, correspond au sol du temple de l’avant-dernière structure. Plus bas le remblai du caisson, moins dense, ne contient plus de pierre ponce. Le mur nord, très détérioré par les racines d’un jocote, semble avoir été volontairement détruit dans sa partie centrale, où l’on note une ouverture irrégulière, large de 1,40 m.

18Plus bas encore, au niveau + 800, le remblai est de sable et de gravier contenant des blocs de bahareque (torchis) dont certains portent des traces de baguettes. C’est à ce niveau qu’apparaissent (fig. 14) :

• dans l’angle sud-ouest, trois poteries communes, placées en position normale les unes contre les autres (F/2, 3, 4), que nous avons laissées provisoirement en place ;

• au centre et dans l’échancrure du mur nord, le squelette d’un adulte âgé (F/1), en position repliée sur le dos, face au nord. Le crâne, dont le front est appuyé contre un bloc de talpetate, présente une déformation antéro-postérieure oblique. Il n’y a pas d’offrande associée, mais on trouve un peu plus bas, sous le squelette, une dalle rectangulaire de caliche taillée, portant des incisions linéaires en forme d’échelles et une cupule (fig. 15) ; il s’agit d’un jeu mexicain, le patolli.

Fig. 12 – La plate-forme de la str. A-1 vue de la colline au sud du groupe A. On voit la moitié est de la superstructure-temple, avec ses deux chambres, et à gauche la pièce abritant le bloc central.

Fig. 13 – La chambre No. 2. Au premier plan, la porte donnant sur le bloc central.

Fig. 14 – La caisson central au niveau + 780 qui correspond au toit de la tombe 1. t : dalles de tuf taillées. F/1 : sépulture du “ vieux gardien ” ; F/5 : patolli.

19À ce niveau, le fond du caisson est encombré de grosses pierres rondes ou allongées, dans un désordre apparent, avec cependant quelques dalles de calcaire ou de tuf qui paraissent taillées. Ce remblai contient des tessons du Classique tardif et un tesson de type “Tohil Plombé”.

20À ce stade, l’existence d’une tombe dans le bloc central n’est encore qu’une hypothèse. Elle sera vérifiée bien involontairement par des pillards qui s’introduisent nuitamment dans notre fouille pour dérober les poteries laissées in situ. En reprenant le travail le lendemain, nous nous rendons compte que la partie centrale s’est affaissée (fig. 15) : on distingue par le trou béant une chambre de grande dimension, à parois en encorbellement, dont les murs sont faits de grandes dalles blanches tachées de rouge. Elle paraît intacte et vide : nos visiteurs nocturnes n’ont pas osé y descendre. Nous trouverons à proximité les fragments des 3 poteries, brisées au cours de leur extraction et dès lors sans valeur marchande : deux grands récipients à deux anses, à base plane, d’une trentaine de cm de diamètre, dont l’un a dû contenir du pigment rouge ; et une jarre rustique.

21La tombe 1 est une chambre rectangulaire de 1,63 x 2,36 m, de grand axe sensiblement est-ouest, comme celui de la pyramide A-1. Les murs sont faits de grandes dalles de tuf rectangulaires, dont le grand axe est généralement vertical (mais horizontal sur le mur nord), bien ajustées, dont la partie supérieure se prolonge par un mur de galets à liant d’argile pour atteindre une hauteur verticale d’environ 1,40 m ; au-dessus commence, sur chacun des quatre côtés, une paroi en encorbellement faite de blocs calcaires allongés dont chaque rangée déborde légèrement la précédente ; les pierres d’angle sont placées obliquement, et le toit s’élève ainsi jusqu’à une sorte de clef de voûte, située à 2 m au-dessus du sol de la tombe, et pour laquelle de minces dalles de schiste mauve ont été utilisées de préférence aux blocs calcaires massifs des parois. Celles-ci sont maintenues en place par un amoncellement de pierres en désordre, mais à partir du niveau de la “clef de voûte”, le remblai de sable, puis de pierre ponce a sans doute pour but d’alléger au maximum le poids reposant sur le toit de la tombe.

22Sur chacune des dalles qui forment les parois intérieures de la chambre s’étale une grosse tache d’ocre rouge, circulaire ou formant une traînée verticale. Les murs est et ouest sont faits de chacun 3 dalles verticales portant des traînées rouges ou des taches plus ou moins circulaires, avec des éclaboussures de pigment vers le bas. Les deux autres parois sont un peu différentes : le mur nord est fait de deux dalles de tuf de 1,20 m placées longitudinalement, sur lesquelles reposent trois dalles plus petites portant sept tâches rouges circulaires. Les trois dalles verticales constituant le mur sud sont doublées de deux autres dont l’une, de tuf, est tachée, alors que l’autre, d’une pierre brune ressemblant à du grès, ne l’est pas.

Fig. 15 – Le caisson central avant l’ouverture de la tombe. On remarque le mur nord, dont le centre est détruit ; le bloc de caliche gravé (patolli) ; et la cavité qui s’est ouverte fortuitement dans le toit de la tombe.

23Dans l’angle sud-est s’ouvre l’entrée de la tombe, recoin profond de 0,50 m, couvert d’un linteau de pierre, et fermé par deux dalles de tuf accolées servant de porte. Vers le sud, au-delà de cette sorte d’antichambre, nous avons mis au jour un couloir, limité par des murs de galets ; la base est constituée par le sol même de la colline, qui est de talpetate, et il s’enfonce pour disparaître bientôt dans le remblai au-delà des limites du bloc central. L’accès à la tombe restait donc possible grâce à ce couloir, qui devait déboucher dans la partie arrière de la plate-forme du temple.

24Le sol de la tombe, quand nous y avons pénétré, était recouvert d’une couche de 25 cm de sable brun, qui avait dû s’infiltrer par les interstices du toit. Ce sol est fait, comme les murs, de grandes dalles de tuf presque jointives, reposant sur un remblai de sable fin, au-dessus de la pente naturelle de talpetate.

25La tombe était vide. Les seuls objets trouvés sur le sol sont :

• non loin du centre, un encensoir à manche tubulaire creux (F/7, fig. 98) contenant un peu de charbon. Le manche est orienté vers le nord ;

• cinq fragments d’un disque de pierre d’environ
  12 cm de diamètre et six plaquettes polyédriques de pyrite, qui devaient être incrustées sur ce disque (F/6) ; celui-ci porte des traces jaunâtres provenant sans doute d’une gomme végétale servant à fixer les plaquettes ;

• au centre du mur nord, des traces de cendre et un grand fragment de vase à côtes de melon, stuqué et peint en rose (F/8) ;

• enfin, quelques tessons communs à l’est de l’encensoir.

Fig. 16 La tombe 1. a/ angle nord-ouest. A noter la technique de construction du toit en fausse voûte, chacun des murs étant en encorbellement ; b/ l’intérieur de la tombe : angle sud-est et porte ; c/ l’intérieur du bloc central et l’entrée de la tombe (le linteau a été laissé en place). On voit l’amorce du couloir qui donnait accès à la tombe.

26Bien que nous n’ayons trouvé aucun ossement au niveau du sol (il y avait de menus restes osseux dans la couche de sable, mais ils peuvent provenir du squelette placé au-dessus de la tombe), ces vestiges semblent prouver que la tombe a bien été occupée au Classique tardif, ultérieurement vidée de son contenu, puis définitivement scellée après une dernière cérémonie dont l’encensoir à manche est le témoin.

Fig. 17 – Plan de la tombe 1, avec le matériel trouvé au niveau du sol dallé.

d/ – La fouille du bloc central (partie nord)

27La fouille précédente nous a montré que le bloc central est fait en réalité de deux parties, chacune de plan à peu près carré. L’une, au sud, correspond à la tombe 1. L’autre, au nord, constitue l’avancée du bloc sur l’escalier ; nous avons mis au jour sa base, au niveau + 570 – celui du sol de la tombe – et le mur qui limite le “caisson” au nord, jusqu’au niveau + 770 (celui du toit de la tombe et du squelette F/1). La partie haute a disparu. La base du mur est doublée d’une marche de 90 cm de hauteur.

28Le remblai de cette partie du bloc central est fait de grosses pierres et de terre argilo-sableuse. Nous avons découvert, entre les niveaux + 750 et 770, plusieurs poteries plus ou moins complètes, qui ont été écrasées entre les pierres du remblai. Ce sont :

• deux vases cylindriques stuqués à décor polychrome (F/16 et 19, fig. 90) ;

• un vase cylindrique brun à anse taché de rouge hématite et contenant un petit bol rouge à fond plat (F/10 et 11 fig. 86) ;

• quatre petits bols rouges identiques au précédent, et une ollita (F/15, 20 et 12) ;

• un encensoir tripode dont l’un des pieds servait de support (F/17, fig. 98) ; cette poterie, rouge sur crème, très fine, est de style mixtèque ;

• un petit vase blanc à décor négatif (F/13, fig.
  95).

29Ces poteries sont parfois associées, ou contenues les unes dans les autres. Ainsi le vase cylindrique F/10 contient, outre le bol F/11, des fragments du vase F/13, un coquillage gastéropode à double perforation, et de menus ossements d’animal. On note encore : un coquillage perforé et une lame d’obsidienne dans le vase stuqué F/19 ; une lame d’obsidienne près des bols F/15 ; les fragments d’un encensoir à manche du même type que celui de la tombe ; deux métatarsiens humains vers le centre.

30La base du bloc central ne contient plus d’offrandes ; nous n’y avons trouvé qu’un fragment de perle de spondyle (F/24) et deux morceaux d’une grande molette très aplatie (F/23) vers le niveau + 600.

e/ – Le matériel du bloc central

31La liste des objets classés est donnée en annexe 2. La fouille du bloc central a livré en outre une faible quantité de tessons (674) dont la grande majorité date du Classique tardif, le reste du Préclassique. Le Postclassique ancien n’est représenté que par un seul tesson, de type “Tohil Plombé”, au niveau du squelette F/1, et par l’encensoir de type mixtèque.

f/ – Conclusion sur la str. A-1

32La structure principale du centre cérémoniel est une pyramide à gradins construite sur le flanc de la colline. Son grand escalier donnant sur la place, qu’elle dominait de près de 10 m, est divisé dans sa partie supérieure par un bloc central, haut d’environ 4 m, qui contient une tombe voûtée. La structure A-1 était reliée à la str. A-7 (et peut-être aussi à la str. A-8) par un escalier latéral.

33Il y eut deux phases de construction. Durant la première, la plate-forme était plus basse de 1 m et supportait un édifice de pierre étroit et long divisé en cinq chambres, sans doute le temple principal. La chambre centrale, dans laquelle se trouve la partie arrière du bloc central (correspondant à la tombe) devait être le “saint-des-saints”, le sanctuaire du temple. Les chambres latérales n’étaient pas organisées pour servir de logement permanent ; on peut supposer qu’elles servaient aussi au culte, ou qu’elles abritaient provisoirement les prêtres ou les participants à quelque cérémonie importante.

34La tombe du bloc central date de cette phase. Elle a été construite de telle façon que l’on pouvait y accéder par une porte et un couloir qui devait aboutir en arrière de la plate-forme. Bien que nous ayons trouvé la tombe vide, certains indices nous permettent de penser qu’un personnage important y a été inhumé, accompagné des offrandes habituelles de cette période : vase stuqué et peint, disque incrusté de pyrite, etc. La tombe aurait été violée par la suite, vidée de son contenu et définitivement scellée.

35La deuxième phase de construction peut avoir été consécutive soit à l’inhumation du haut personnage, soit au viol ultérieur de sa tombe (nous penchons pour cette dernière hypothèse). Durant cette phase, on procède au comblement de la superstructure et à la construction de nouveaux murs de soutènement de façon à surélever l’ensemble de la plate-forme de plus de 1 m. Le bloc central est lui-même surélevé par des murs de pierre formant un caisson rempli de pierre ponce dont la partie supérieure sert d’autel dans le sanctuaire du nouveau temple (nous n’avons cependant aucune preuve que ce dernier n’ait jamais été construit).

36Reste le problème de la sépulture F/1 et du matériel découvert dans la partie supérieure du bloc central. Datent-ils de la première phase, ou de la seconde ? Bien que la première hypothèse semble plus logique, puisqu’ils se trouvent sous le sol du temple ancien, nous penchons encore une fois pour la seconde. La présence de matériel datant du Postclassique dans la partie nord du bloc central (l’encensoir de type mixtèque) et aussi dans le remblai au-dessus de la tombe (tesson “Plombé”) nous incline à penser que le bloc central n’a pas été simplement surélevé, mais que, au-dessus du niveau du toit de la tombe, sa partie supérieure a été presque entièrement remaniée, peut-être en profitant d’un effondrement de l’avancée. C’est alors qu’auraient été déposés dans le remblai les offrandes de la partie nord, et au-dessus de la tombe la pierre-patolli et le vieillard de la sépulture F/1, qui serait comme le gardien de la tombe. Par contre, les poteries mises au jour dans l’angle sud-ouest, ou au moins l’une d’elles, auraient contenu le pigment rouge ayant servi à badigeonner les murs de la tombe ; elles dateraient donc de la première phase.

37Cette interprétation nous est dictée par le fait que le viol des tombes et l’introduction dans la région des types nouveaux de poterie, tels que le “Tohil Plombé”, nous paraissent associés à un ensemble d’“innovations” qui dateraient du Classique terminal ou du Postclassique ancien. Les deux phases de construction de la str. A-1 révéleraient alors un changement culturel très important. Mais cette hypothèse devra être confirmée par la suite de nos fouilles.

Fig. 18 – La str. A-2 en cours de fouille.

2 – La structure A-2

38Nous avons vu que cette pyramide, avec les deux “ailes” qui la prolongent au nord et au sud, sépare complètement la grande place et le patio ouest (fig. 18). La str. A-2, de plan rectangulaire, mesure 13,20 x 15,60 m ; sa plate-forme, étroite, domine de 5,60 m la place, mais de 4 m seulement le patio ouest, compte tenu de la différence de niveau des deux places. Elle est entièrement construite en galets de rivière bruts, aussi son état de conservation est-il médiocre. Il est probable qu’elle s’élevait en cinq gradins d’environ 1m de hauteur jusqu’à la plate-forme du sommet ; celle-ci paraît trop exiguë – 2 x 8 m environ – pour avoir supporté une superstructure.

39La face ouest n’a livré aucune trace d’un escalier ; le mur de soutènement sur cette face est légèrement plus long que le mur est (16,65 m). L’unique escalier, large de 5,10 m, est donc sur la face est et donne sur la place ; sa disposition est la même que celle de l’escalier de la str. A-1, c’est-à-dire que certaines marches ne sont que le prolongement des parties horizontales des gradins, entre lesquels il y a 2 ou 3 marches intermédiaires ; de plus, la première marche, très basse, est en saillie sur la place. Le nombre total des marches devait être d’une quinzaine ; seules les 5 marches du bas sont conservées. La str. A-2 est orientée 18° à l’est du nord magnétique.

40Le “passage” surélevé qui constitue l’aile sud de la str. A-2 et qui relie celle-ci aux str. A-1 et A-8 se présente comme un plan horizontal, large de 3 m, au sommet de deux plans inclinés recouverts de dalles. Ces pentes ne sont pas continuées. On trouve en effet, en partant de la place (fig. 20) :

• deux marches hautes d’une cinquantaine de centimètres, larges de 35 cm, faites d’une dalle de tuf verticale et d’une dalle de caliche horizontale ;

• un plan incliné à 30°, long de 4 m, fait d’un dallage de tuf qui se termine vers le haut par une dernière marche identique à celle du bas.

41Du côté ouest, vers le patio, la disposition est la même, mais la pente est évidemment plus courte et il y a une seule marche, au lieu de deux, dans la partie basse. Le dallage n’est conservé que dans sa partie nord, au contact de la str. A-2. Plus au sud, on voit qu’il recouvrait un talus incliné plus ancien, pavé de galets (fig. 22). Nous n’avons pas trouvé trace d’un tel talus sur la face est ; il correspond peut-être à une première phase de construction du “passage” surélevé.

42Ce passage a une longueur totale de 15,60 m, exactement celle de la façade nord de la str. A-2. Il vient buter contre la face sud de celle-ci sans qu’il y ait trace d’un escalier latéral. À l’autre extrémité, il se raccorde à un escalier (dont nous n’avons pu dégager que les premières marches) qui monte dans l’intervalle compris entre les substructures de A-1 et A-8 et devait permettre d’accéder au temple principal, peut-être aussi à l’habitation A-8. De plus, nous avons dégagé les trois premières marches, faites de dalles de tuf, d’un petit escalier descendant du passage vers l’angle sud-ouest de la place ; il devait y avoir un escalier symétrique descendant vers le patio ouest. Ainsi, le passage surélevé pouvait être atteint en partant de la grande place, du patio ouest, ou en descendant de la str. A-1 par sa face ouest.

43Au nord de la str. A-2, le passage surélevé reliant cette structure à l’angle de la str. A-3 devait être identique au passage sud, mais plus court (7,80 m : exactement la moitié de la longueur de la façade est de A-2, ou du passage sud). Il a presque entièrement disparu, mais la petite partie conservée, au contact de A-2, prouve que la disposition – deux marches dans le bas, plan incliné, une marche dans le haut – et la hauteur de ce passage étaient les mêmes que celles du passage sud. Il reste que nous comprenons mal comment pouvait se terminer le passage au nord ; un escalier le faisait peut-être communiquer avec l’escalier latéral de la str. A-3.

44Les travaux réalisés sur la str. A-2 et ses deux ailes ont comporté les phases suivantes :

1. – dégagement des murs et des escaliers (opération Q) ;

2. – fouille stratigraphique de la partie centrale de la pyramide (opération X) ;

3. – fouille de la partie est sous l’escalier (opération B).

a/ – Dégagement des éléments architecturaux

45A notre arrivée, les flancs de la str. A-1 sont recouverts de pierres provenant de l’affaissement des bords de la plate-forme et des gradins ; les murs de soutènement sont entièrement cachés à la base par des déblais sur une hauteur atteignant 2 m. Aucun détail architectural n’est visible. De plus, des arbres ont poussé sur la structure, dont la partie nord-ouest a été largement amputée par une fouille sauvage.

46Le dégagement du mur de soutènement de la face est, conservé sur plus de 1 m de hauteur, permet de localiser l’escalier rentrant, les deux gradins inférieurs, et la jonction avec les ailes nord et sud. Le nombre des gradins – 5 ou 6 – restera douteux et l’existence d’un escalier sur la face ouest, très détruite, bien que peu probable, n’est pas absolument exclue.

47Le matériel récolté durant ce travail est assez abondant (plus de 1.000 tessons), mais provient presque uniquement de l’angle sud-est de la str. A-2 et du début de l’aile sud. C’est le seul endroit du site où le matériel préclassique soit plus abondant que le matériel classique : 53% contre 45%. Les tessons plus tardifs (supports moulés, “Plombé”...), peu nombreux, proviennent surtout du nord-est et du sud-ouest de la pyramide.

48Au pied de l’escalier avait été enterré, comme offrande dédicatoire, un vase cylindrique tripode stuqué.

Fig. 19 – Plan de la str. A-2.

Fig. 20 – Profil de la str. A-2 et du passage surélevé sud.

Fig. 21 – La jonction du mur sud de la str. A-2 avec le passage surélevé sud. a/ du côté de la grande place ; b/ du côté du patio ouest.

49Au pied du mur ouest de l’aile sud, nous avons mis au jour quatre molettes, entières, disposées parallèlement au mur.

b/ – Fouille au centre de la str. A-2 (opération X) et sous l’escalier (opération B)

50La fouille de la pyramide A-2, qui visait à rechercher d’éventuelles superpositions et à établir une séquence céramique, a été faite en trois temps. L’opération X était entreprise en avril 1978 sous forme d’une excavation de 2 x 3 m couvrant la plus grande partie de la plate-forme supérieure, mais légèrement décalée vers le sud (par erreur). Cette fouille, confiée à R. Grignon, progressivement élargie vers l’est et vers l’ouest, avait atteint à la fin de la campagne le niveau + 330, le niveau de départ étant + 550, hauteur de la pyramide. Son intérêt évident, prouvé par la mise au jour de niveaux stratigraphiques nets et de sépultures, nous incitait à poursuivre ce travail durant la campagne suivante, après avoir ouvert la fouille vers les deux places pour permettre l’écoulement des eaux pendant la saison des pluies.

51Le travail reprenait en décembre de la même année, toujours sous la direction de R. Grignon assistée d’E. Lemus. La fouille était d’abord agrandie de 1 m vers le nord pour mieux couvrir la plate-forme supérieure. La surface ainsi fouillée, de 4 x 8 m, était réduite à 4 x 4 m à partir du niveau + 250, puis à 2 x 2 m à partir de + 150. En janvier 1979, nous décidions de l’arrêter à 140 cm au-dessous du niveau de la place. La profondeur totale de la fouille était donc proche de 7 m.

52Malgré l’excellente stratigraphie obtenue, il paraissait intéressant d’agrandir la fouille vers l’est, pour suivre en direction de l’escalier les différents sols mis au jour et rechercher d’autres sépultures. Ce fut le but de l’opération B, confiée à Z. Calderón puis à G. del Cid. La première attaqua l’escalier par la base, en débordant de 2 m sur la place et en s’enfonçant de 2,50 m dans la substructure, ce qui, en surface, correspond au niveau + 200 de l’escalier. Cette fouille, B-1, fut abaissée elle aussi de 140 cm sous le niveau de la place. G. del Cid fut ensuite chargé de la relier à la fouille centrale en l’élargissant de 1 m de chaque côté (opération B-2).

53L’ensemble de ces trois opérations, portant à peu près sur la largeur de l’escalier tardif, nous donne une idée assez complète de l’évolution de la structure A-2 et de la période qui a précédé sa construction. Malheureusement, cette vision est moins nette dans la fouille B, par suite de la complexité de la stratigraphie, encore accentuée par l’existence de nombreuses sépultures, et la quasi-absence de données pour l’opération B-1.

54L’étude du matériel céramique, confiée à Marion P. Hatch, portera uniquement sur le matériel de la fouille centrale X, récolté en position stratigraphique sûre.

Fig. 22 – L’escalier de la str. A-2.

Fig. 23 – La str. A-2 et le passage surélevé reliant cette structure à l’ensemble sud.

Fig. 24 – Profil ouest-est des fouilles X et B dans la str. s A-2, montrant l’emplacement des sépultures.

Déroulement de la fouille. Niveau E (+ 550 à + 470)

55La plate-forme étroite est encombrée de galets ; nulle part le sol n’est visible, le remblai est fait de blocs de talpetate mêlés à de la terre sablonneuse blanche et à des galets. Peu de matériel. À + 470 apparaît un sol mince d’argile rouge durcie reposant sur une couche plus noire. Ce sol s’enfonce vers l’est, où apparaît en limite de la fouille un amas de pierres qui semble se poursuivre vers le bas.

Niveau D (+ 470 à + 200)

56Le remblai hétérogène est fait apparemment de quatre remplissages successifs. Il est à base de terre sablonneuse brun foncé, jaune ou grise, avec des galets et des blocs de talpetate. Vers + 400, on note dans la partie ouest une couche irrégulière mais à peu près horizontale de sable blanc homogène, qui pourrait correspondre à un niveau d’occupation. Nous préférons néanmoins considérer cette couche D comme correspondant à une seule période.

Fig. 25 – La fouille centrale X aux niveaux + 350 et + 450 : sépulture X/1 et cache.

57En limite est de la fouille X, l’amas de pierres qui affleurait au niveau E se révèle être un véritable mur de galets, haut de 70 cm, orienté nord-sud, sans doute destiné à soutenir l’escalier tardif. Vers la base, un petit bol tripode noir (X/15) a été écrasé sous les pierres.

58Immédiatement sous le sol E, au niveau + 450, apparaît au centre un squelette d’adulte (X/1) en décubitus dorsal, axe du corps est-ouest (tête à l’est). Les bras sont allongés ; il y a quelques pierres près du crâne et sur le côté gauche, mais pas d’offrande (fig. 25). Plusieurs objets vont être mis au jour non loin de cette sépulture, un peu plus bas et vers le sud : un petit bol tripode (X/3), un encensoir à effigie humaine incomplet et brisé (X/4), deux bols tripodes (X/6 et 7), l’un recouvrant l’autre, et les fragments d’un grand récipient à fond plat et anses, peut-être un encensoir simple (X/5). Plus qu’à la sépulture X/1, cette “cache” pourrait être associée aux sépultures X/8 ou X/9, que nous devions mettre au jour un peu plus bas. Les poteries sont typiques du Classique tardif.

59En agrandissant la fouille de 1 m vers le nord, une autre sépulture, X/12, a été découverte, au même niveau et à 1 m seulement de la première : il s’agit d’un adulte jeune, dans la même position, et comme X/1 placé exactement sur l’axe nord-sud de la pyramide. Il n’y a pas d’offrande ; un petit disque de jade perforé sous la mandibule devait servir de pendentif.

60Deux autres sépultures vont être mises au jour, un peu plus bas (+ 330 à + 350) et décalées vers le sud par rapport aux deux premières. X/8 et X/9 sont des squelettes très incomplets : crâne et os longs, non en connexion, pourraient indiquer des sépultures secondaires. Il n’y a pas d’offrande, mais deux objets intéressants sont apparus à ce niveau : un sceau cylindrique (X/10) et un morceau de stuc à face plane, très dur, indiquant que cette technique était déjà connue, bien qu’apparemment non utilisée dans l’architecture.

61Au niveau + 200 apparaît un beau sol d’argile rougeâtre, sans doute durcie au feu, qui s’abaisse vers le nord (dans la fouille B) pour former deux gradins à l’endroit où devait être l’escalier de la structure ancienne donnant sur la place. La couche D, d’après le matériel céramique assez abondant qu’elle contient, daterait du Classique tardif ; comprise, dans la fouille X, entre les niveaux + 470 et + 200, elle englobe, dans la fouille B, toute la partie du monticule se trouvant au-dessus des deux gradins. Les sépultures qui en proviennent sont donc contemporaines des précédentes, comme le confirme d’ailleurs le mobilier qui les accompagne. On distingue sur la paroi nord de la fouille un mur de galets nettement incliné, sur 1,60 m de hauteur, qui ne peut être que le gradin supérieur de l’avant-dernière construction.

62Cinq sépultures ont été dégagées à ce niveau de la fouille B.

63La sépulture B/2 (niveau + 150) presque en surface, est réduite à un crâne incomplet sans autres ossements.

64B/17 (niveau + 350, au sud-ouest de la fouille B) est le squelette d’un adulte très détérioré, sans doute en décubitus dorsal, axe sud-nord. Une grosse pierre recouvre le bas des jambes ; sur le côté droit, plusieurs poteries brisées, dont un bol à base annulaire et décor intérieur rouge sur orange (B/18, fig. 87).

65B/19 (niveau + 300, au-dessous de B/17) est un adulte âgé, en décubitus dorsal mais tête au nord, axe du corps nord-sud. De grosses pierres en demi-cercle entourent le crâne et le côté gauche du squelette. Il y a quelques fragments de poteries brisées à hauteur des genoux. Un cristal de roche trouvé entre B/19 et B/17 peut être associé à l’une ou l’autre sépulture.

66B/21 (niveau + 250, sous la précédente) est le squelette d’un adulte âgé en position accroupie face à l’est ; le crâne est tombé entre les jambes, qui sont appuyées contre deux gros galets. Quatre objets d’os finement travaillés (B/22), brisés et incomplets, étaient placés contre les jambes et sous le crâne du mort. Ils seront décrits plus loin (fig. 111 et 112).

67La sépulture B/31, dont seul le crâne a été dégagé car le reste du corps se trouve dans la paroi sud de la fouille, date probablement elle aussi du Classique : elle semble se trouver (au niveau + 100) au-dessus du sol, très détérioré à cet endroit, qui sépare les couches D, classique, et C, plus ancienne.

Niveau C (+ 200 à + 100)

68Cette couche relativement homogène de terre sablonneuse, allant du gris au jaune, mêlée de gravier et de galets abondants, se termine vers le bas par une couche mince, plus claire, qui pourrait être un sol, car des pierres, des charbons et plusieurs petits objets ont été trouvés à ce niveau. Plus bas il y a un changement net du remblai qui devient brun clair, sans gravier, et contient d’abondantes traces de charbon.

69Vers l’est, ce “pseudo-sol” + 100 est moins net, puis se perd complètement. La couche C n’a pas livré de sépulture vers le centre de la fouille (op. X), mais on peut lui rattacher les sépultures B/24 à 32 qui sont apparues dans la fouille B au même niveau.

70B/24 est un adulte âgé en décubitus dorsal, orienté ouest-est. Les bras sont allongés contre le corps ; il y a plusieurs pierres alignées sur le côté droit, et une plus grande sous le crâne. À l’arrière de celui-ci, l’offrande consiste en un bol tétrapode noir à décor incisé de style protoclassique, recouvrant un bol noir plus petit, cannelé et incisé (B/25 et 26, fig. 82). Deux perles vertes sont des éléments de collier : l’une, de jade, sous le menton du mort, l’autre, micacée. La sépulture B/24 se trouve au niveau + 130.

71Un peu plus bas (+ 100 à + 125) nous dégageons deux autres squelettes, B/29 et B/30, appuyés l’un contre l’autre. La partie supérieure du plus grand (B/29) se perd dans la paroi nord de la fouille ; il est en décubitus dorsal et orienté nord-sud. Le plus petit, B/30, a la tête à hauteur du bassin du précédent ; il est en position repliée sur le dos. Entre les deux squelettes, on a placé un petit vase à quatre anses et une perle de pierre verte.

72Enfin, B/32 n’est représenté dans notre fouille que par son crâne, le reste du squelette étant dans la paroi sud.

73D’après le style du mobilier de la sépulture B/24, et également de celui de la sépulture B/34, trouvée à un niveau inférieur, nous pensons que la couche C correspond à la période Protoclassique ou Classique ancien.

Niveau B (+ 100 à +60)

74Le remblai brun clair repose, au niveau + 60, sur un très beau sol d’argile durcie de 2 cm d’épaisseur. Ce sol s’abaisse régulièrement vers l’est, puis disparaît dans les limites de la fouille B. On trouve de nombreuses traces de charbon en surface, et vers le centre de la fouille X une dépression circulaire en forme de cuvette, de 90 cm de diamètre, qui devait être soit un foyer, soit plutôt une sorte de cuve encastrée dans le sol pour la préparation du nixtamal : le fond est rempli d’un produit blanchâtre solidifié, chaux ou cendre. Ce dispositif est connu dans plusieurs sites du département d’El Quiché, en particulier à Zacualpa, (Wauchope, 1948 : 87) durant le Classique tardif. Il serait ici plus ancien. Les traces d’un foyer ont aussi été mises au jour contre la paroi ouest de la fouille. Le charbon recueilli a donné une date C-14 de 490 ± 90 avant J.C. (GIF 4916) qui correspond au Préclassique moyen.

Fig. 26 – La fouille centrale de la str. A-2. a/ la sépulture X/1 ; b/ la paroi sud de la fouille X montrant la stratigraphie et les différents sols des niveaux préclassiques et classiques ; c/ sépultures pré et protoclassiques sous l’escalier ; d/ la sépulture multiple B/6-7-8.

75Le sol du niveau + 60 semble avoir été restauré dans la partie est, où l’on note la superposition de deux sols distants d’une vingtaine de centimètres.

76Toutes les sépultures découvertes dans la couche B proviennent de la fouille sous l’escalier (op. B), et leur mobilier confirme la datation précédente. L’une d’elles, cependant, B/34, se trouvait entre les deux sols des niveaux + 60 et + 100, exactement à la limite des fouilles X et B. Découverte fortuitement par le géologue E. Wiesner, qui remarqua une légère saillie dans la paroi de notre excavation centrale – c’était le tenon zoomorphe de l’une des poteries – nous dûmes retirer d’abord celles-ci, qui risquaient d’être dérobées, avant d’aborder la sépulture par le côté est quand la fouille B arriva à son niveau.

77B/34 est la sépulture la plus riche que nous ayons mise au jour dans la str. A-2. Bien que dans un niveau préclassique daté, son mobilier prouve qu’elle est en fait plus tardive : Protoclassique ou Classique ancien. Il s’agit donc d’une sépulture intrusive dans la couche B, à travers le sol du niveau + 100. Le squelette, en décubitus dorsal, tête au sud, est celui d’un adulte jeune auquel on avait mis une perle de jade allongée dans la bouche ; près du cou, deux valves de coquillage, dont une face est revêtue de stuc peint en rose et en vert, avec une partie centrale saillante, étaient des ornements d’oreille (fig. 110). Sur la hanche droite du corps avait été déposée une plaque carrée, de 13 cm. de côté, formée d’un support de stuc épais dans lequel sont incrustées des plaquettes carrées de pyrite noire (fig. 108). Il y avait aussi, le long du corps, une quarantaine de petits morceaux de fer spéculaire.

78Les quatre poteries constituant l’offrande céramique étaient placées sous les tibias et les pieds du mort, trois d’entre elles superposées. Il s’agit d’un grand bol tétrapode brun à décor modelé, qui contient un bol stuqué et peint en rouge et vert, contenant lui-même un vase-support orange en forme de sablier. La dernière poterie est un bol à tenon et décor modelé, stuqué et peint en noir, rouge, rose et vert, représentant sans doute un coati (X/34 à 37, fig. 81). L’ensemble de ce mobilier, comme sa disposition “entassée”, nous rappelle très précisément les offrandes de la grotte de la Lagunita (Ichon 1977 : 15), datée d’environ 400 ap. J.C. Plutôt que vraiment protoclassique, la sépulture B/34 daterait donc du Classique ancien.

79Une autre sépulture, B/42, située plus bas (– 25) et vers la place, serait-elle aussi protoclassique. Les os sont en désordre et la position ne peut être déterminée. Près de la tête, on a déposé deux poteries noires à décor incisé et supports mammiformes, et un collier de 34 perles de pierre verte.

80Les autres sépultures de la couche B sont incontestablement préclassiques. La partie sud de la fouille B a livré ici les traces d’un véritable cimetière : les corps ont été alignés, côte-à-côte, en décubitus dorsal, généralement selon un axe sud-nord, ou nord-sud. Le nombre exact des squelettes est difficile à évaluer car les os longs ont été parfois regroupés, ou poussés sur le côté (peut-être y a-t-il quelques sépultures secondaires ?).

81Pour les sépultures B/38 et B/39, une partie seulement des squelettes a été dégagée ; les crânes étaient au sud. B/40 est un amas d’os longs provenant d’au moins trois individus, et le buste d’un squelette, dont les jambes s’engagent dans la paroi sud ; il portait près du cou une perle de coquillage allongée.

Niveau A (+ 60 à – 140)

82Au-dessous du sol + 60, la stratigraphie est moins nette, car le remblai est homogène (sable brun clair, avec plus ou moins de gravier). La fouille, réduite à 2 x 2 m, a été poursuivie par niveaux artificiels de 20 cm, donnant un nombre de plus en plus réduit de tessons, mais n’atteignant pas le sol stérile.

83À – 50, la sépulture X/38 est celle d’un adulte en position repliée sur le côté droit, la tête au sud. Le bras droit est à demi étendu entre les jambes, le gauche replié, main sous le menton. On note à ce niveau un léger changement dans le remblai, avec l’apparition d’un gravier plus gros et plus abondant.

84C’est au même niveau – 50 que la fouille B a mis au jour plusieurs sépultures, à l’aplomb de l’escalier tardif.

85Le squelette B/5, incomplet, sans crâne, est accompagné de celui d’un adulte âgé, très détérioré. Sur les os longs, une ollita à 2 anses assez fruste, et près du crâne une autre ollita à 4 anses.

86La sépulture multiple B/6-7-8 est protégée du côté de la place par une rangée de gros galets plantés verticalement (fig. 26c, d). Les trois squelettes d’adultes – deux âgés, un jeune – sont exactement superposés, en décubitus dorsal, la tête au sud. Les inhumations ont été faites simultanément, et trois poteries ont été déposées sur les bras gauches et à hauteur des hanches : ollita à 4 anses, petit bol tétrapode noir contenant des traces de pigment rouge, bol hémisphérique tripode à décor incisé et peint (B/9, 10, 11, fig. 79). L’un des squelettes avait dans la bouche un ornement d’oreille en jade et un petit os d’oiseau.

87Les deux dernières sépultures sont mises au jour au niveau – 110.

88B/14 est un adulte en décubitus dorsal, tête au sud ; contre le crâne, un bol cylindrique à décor incisé et peint en zones rouges et oranges (B/13) ; le long du corps, quatre petits coquillages gastéropodes sciés et perforés. Nous avons récolté à proximité du squelette un échantillon de charbon qui a été daté de 320 ± 60 avant J.C. (GIF-4917).

89Au pied de B/14, une poche de terre friable contient des dents et des ossements ; il s’agit d’une sépulture secondaire ou perturbée, B/15, à laquelle est associée une ollita à 4 anses de type Corinthian Daub, à décor appliqué représentant une face humaine rudimentaire (B/16, fig. 80).

90Il y a encore les traces d’un autre squelette à l’ouest de la sépulture multiple, et il n’est pas impossible que d’autres sépultures eussent été découvertes si nous avions poursuivi la fouille au-delà du niveau – 110 : le sondage 5, pratiqué sur la place à faible distance, a en effet livré deux sépultures au niveau – 150.

Conclusion sur la str. A-2

91En résumé, la fouille de la str. A-2 nous a donné, pour la partie centrale tout-au-moins (opération X), une bonne séquence stratigraphique, dont les niveaux successifs sont généralement marqués par des sols d’argile durcie, ou pour le moins par un changement brusque dans la nature du remblai ; séquence confirmée par deux datations C-14, et par plus de 20 sépultures, d’adultes uniquement, réparties sur tous les niveaux et parfois accompagnées d’offrandes typiques de chaque période. Il faut cependant répéter que la situation est beaucoup moins nette dans la partie est de la fouille, sous l’escalier (opération B), et que nous avons du mal à dater certaines sépultures, ou à expliquer une position stratigraphique qui ne correspond pas au type du mobilier. Ceci est normal compte tenu du fait que nous sommes là en limite, ou même un peu en dehors des constructions qui se sont succédé pendant au moins six phases, chacune étant édifiée au-dessus de la précédente ; que, d’autre part, les sépultures successives ont été souvent perturbées, et que plusieurs sont visiblement intrusives dans un niveau plus ancien.

92Les tessons fournis par la fouille X, bien que relativement peu abondants, ont permis à Marion P. Hatch d’établir une première classification typologique (voir 2ème partie).

93L’histoire de la pyramide A-2 peut être reconstituée de la façon suivante :

1. Il y aurait un premier sol au niveau – 50, bien visible dans la partie est de la fouille, moins net au centre, bien qu’on note à ce niveau un léger changement de remblai. Au-dessous de ce sol, nous avons de – 50 à – 140 un niveau qui date du Préclassique moyen, avec deux sépultures datées, l’une par C-14 (320 av. J.C.), l’autre par une poterie de type connu (Corinthian Daub). Les sépultures mises au jour dans les deux sondages de la place à
   – 150 sont à rattacher à cette phase, ou sont encore plus anciennes.

2. Le deuxième sol, très net celui-ci, est trouvé au niveau + 50 (ces niveaux étant toujours calculés dans la fouille centrale ; ils correspondent à des niveaux plus bas dans la partie est). Il s’agit du sol d’une habitation de faible hauteur (moins de 1 m), avec une cuve à nixtamal (?) et un foyer, qui a permis de dater cette structure du Préclassique moyen.

3. Entre les niveaux – 50 et + 50, on trouve de nombreuses sépultures – en fait un véritable cimetière – dans la partie est, c’est-à-dire probablement au pied de la structure préclassique. Il n’y en a aucune dans l’intérieur même de celle-ci.

4. Il y a un troisième sol, ou plutôt un changement du remblai, au niveau + 100. La riche sépulture protoclassique trouvée juste au-dessous est probablement intrusive. L’étude de la céramique semble prouver que le niveau + 50 à + 100 est encore préclassique, plus précisément préclassique tardif.

5. Le quatrième sol est trouvé au niveau + 200. Pour la première fois on peut le suivre à l’est, où il descend vers la place en formant deux gradins de plus de 1 m de hauteur. Plusieurs sépultures de la fouille B, et la sépulture intrusive signalée plus haut, datent ce niveau + 100 + 200 du Protoclassique ou du Classique ancien.

6. Au niveau + 300, Marion P. Hatch distingue ce qu’elle appelle an old surface ; il y a effectivement un changement de remblai à ce niveau (dont la limite est irrégulière, il est vrai), qui correspond à la base du mur de galets dont nous pensons qu’il supportait le haut de l’escalier. Ce niveau + 300 marquerait la limite de l’occupation protoclassique-classique ancien, que nous serions tentés de placer plus bas, à + 200. D’autre part, les sépultures trouvées à l’est (où cette surface a disparu) datent toutes apparemment du Classique tardif.

7. Il ne fait pas de doute, par contre, que le cinquième (ou sixième ?) sol du niveau + 470 est la plate-forme supérieure d’une construction pyramidale datant du Classique tardif, période où prend forme le centre cérémoniel. Il est intéressant de noter que le gradin supérieur de cette pyramide, haut d’environ 1,50 m, était incliné en talus de forte pente. Les sépultures trouvées aussi bien au centre que dans la partie est confirment notre datation.

8. Au-dessus du niveau + 470 et jusqu’à la surface, le remblai change complètement, étant composé surtout de talpetate ; il n’y a plus de sépultures et le matériel est peu abondant. Ce niveau, qui correspond à une surélévation tardive de la pyramide, daterait du Classique tardif ou terminal.

94Nous sommes donc en présence, au moins à partir de la 4ème phase (niveau +200), d’une structure cérémonielle, dont la fonction funéraire semble héritée d’une tradition antérieure, remontant au moins au Préclassique moyen.

3 – LA STRUCTURE A-3

95La str. A-3 est un monticule bas (2,43 m), très allongé (40 m) qui ferme presque complètement la place au nord. L’étude de cette structure, confiée à R. Grignon, a comporté deux opérations : a/dégagement des murs, de l’escalier, de la plate-forme ; b/fouille stratigraphique de la partie centrale (opération T).

96a/ – Le mur de soutènement sud, donnant sur la place, est assez facilement mis au jour. Par contre, l’escalier central est en très mauvais état : les racines des arbres n’ont pas épargné cette construction rudimentaire.

97Du côté de la place, A-3 présente une succession de quatre gradins étroits, et un dernier gradin, plus bas, qui supporte la plate-forme du sommet. Vers le nord, la dénivellation d’environ 6 m a été compensée par 6 ou 7 gradins (fig. 28).

98La substructure A-3 se prolonge à l’est par une plate-forme plus basse d’environ 1 m, longue de 4.30 m. La longueur totale de l’ensemble est donc de 44 m, correspondant exactement à la largeur de la grande place.

99Un escalier central, large de 9,45 m, donne sur la place. Il a 9 marches, dont la première extérieure, puis une marche intermédiaire entre chaque gradin. Nous n’avons pas pu déterminer avec certitude l’existence d’un bloc central, car la partie supérieure de l’escalier est trop détruite. Détail de construction intéressant, les gradins successifs sont des murs parallèles allant jusqu’au sol (fig. 29 b) ; le troisième est même doté d’une petite marche à la base. S’agirait-il du mur de soutènement d’une structure plus ancienne ?

100La str. A-3, dont la plate-forme est étroite (4 m environ), communiquait avec les structures voisines par deux petits escaliers d’angle. L’escalier ouest, large de 2,15 m, est extérieur ; il n’atteint pas le niveau de la place, peut-être pour se raccorder au passage surélevé de la str. A-2 (partie malheureusement détruite).

101L’escalier est mené à la plate-forme annexe ; dans le même alignement, un petit escalier de deux ou trois marches permettait sans doute d’accéder à celle-ci par le couloir entre les str. A-3 et A-4.

b/ – La fouille centrale (opération T)

102Cette fouille, de 4 x 4 m au départ pour couvrir toute la largeur de la plate-forme, a été agrandie de 2 m dans la partie haute de l’escalier pour étudier les gradins supérieurs.

103La stratigraphie est la suivante, en partant de la surface de la plate-forme :

• une couche D de terre humique noire, d’une vingtaine de centimètres d’épaisseur ;

• une couche C (niveaux + 240 à + 150) formée essentiellement de blocs de talpetate jaune clair et de galets. Elle repose sur un sol d’argile durcie portant des traces de cendre abondantes. Un trou de poteau conique est bien visible sur la paroi est de la fouille ; rempli de terre noire, il s’enfonce de 20 cm dans le niveau de talpetate.

• la couche B (de + 150 à 0), de terre sablonneuse contenant encore quelques galets et blocs de talpetate, mais beaucoup plus homogène que la couche C, est le remblai d’une structure antérieure, dont nous avons mis au jour l’angle nord-ouest. Le mur de soutènement nord, le mieux conservé, atteint 1,50 m de hauteur ; il est à moins de 1 m du mur de la plate-forme tardive.

104Le mur ouest de la structure ancienne, A-3b, conservé seulement sur 0,30 m de hauteur, est visible sur toute la largeur de la fouille, et devait se poursuivre sous l’escalier. Cependant le troisième gradin, doté d’une marche, ne peut correspondre à cette structure, puisqu’il continue vers l’ouest.

105L’orientation du grand axe de la structure A-3b est exactement la même que celle de la structure tardive dont elle occupait la partie est : 107°, soit une déviation de 17° à l’est du nord magnétique. Elle était haute de 1,50 m, mais nous ignorons sa longueur. A la fin de la première campagne, nous ignorions surtout si une autre structure ancienne lui faisait pendant à l’ouest, ce qui paraissait logique pour fermer l’angle nord-ouest de la place.

106Nous sommes retournés sur le site en 1982 afin de vérifier ce point et plusieurs autres. Effectivement, nous avons mis au jour une plate-forme ancienne A-3b’, qui semble symétrique de la str. A-3b et dont le mur est se trouve à 4,20 m de celle-ci. La structure tardive est donc venue recouvrir deux structures anciennes construites dans le prolongement l’une de l’autre, un trait dont nous soulignerons plus loin l’importance.

107La fouille centrale (op. T) a été poursuivie jusqu’au niveau – 100, uniquement à l’extérieur de la str. A-3b (couche A). Nous avons constaté qu’il existe au-dessous de celle-ci une structure encore plus ancienne (A-3a), dont le mur de soutènement ouest est exactement à l’aplomb de celui de la str. A-3b, séparé de lui par 30 cm de terre dure.

108Le matériel très pauvre, aussi bien à ce niveau que dans le remblai de la structure intermédiaire, n’a malheureusement pas permis de dater ces différentes constructions.

c/ Conclusions sur la structure A-3

109Cette structure a connu trois phases de construction avant d’atteindre ses proportions définitives.

110Au cours de la première, une substructure au moins deux fois plus courte en occupait la partie est. Au début de la seconde, cette substructure a été surélevée – jusqu’au niveau + 150 – et une structure symétrique a été construite (à moins qu’elle n’ait déjà existé au cours de la première phase ?) dans son prolongement, de façon à fermer presque complétement la face nord de la place. L’existence de cette dernière structure, A-3b’, nous avait été suggérée par une comparaison du groupe A avec le centre cérémoniel principal du site de Los Cerritos-Chijoj, dans le département voisin du Quiché, où les deux plates-formes limitant au sud la place ont été soudées pour n’en faire plus qu’une durant la dernière phase d’occupation, qui date sans doute du Classique terminal.

Fig. 27 – Plan et profil de la str. A-3.

111À Los Encuentros, la str. A-3 tardive, qui est venue coiffer les deux précédentes au cours de la troisième phase, supportait en son centre une superstructure faite de matériaux périssables. Nous avons dit que les deux structures anciennes ne peuvent être datées ; dans les couches supérieures C et D, et à l’extérieur de la str. A-3b, le matériel céramique est essentiellement du Classique tardif, avec un faible pourcentage de préclassique. Deux détails sont cependant à noter :

• la présence d’au moins un tesson tardif (support moulé) dans le remblai tardif à l’extérieur de la str. A-3b. Ceci devrait permettre de dater du Classique terminal la structure définitive ;

• d’autre part, le dégagement de la face sud a donné, non seulement du matériel datant du Classique terminal – en particulier plusieurs tessons “Tohil Plombé” et 3 lames d’obsidienne verte – mais aussi une quantité non négligeable de matériel postclassique tardif (comal à impression de natte, fond de jarre concave fait au moule, tesson de type “Fortress Blanc sur rouge”, etc.).

112C’est un cas unique dans le site, où ce matériel tardif est quasi inexistant, ce qui nous a incité à conclure que Los Encuentros était totalement abandonné au Postclassique tardif. Le cas de la str. A-3 prouverait au contraire que cette structure au moins a continué à être utilisée, encore que dans une faible mesure, au Postclassique.

Fig. 28 La face nord de la str. A-3, en gradins étagés.

4 – LA STRUCTURE A-4

113Cette structure, qui ferme l’angle nord-est de la place, était la plus abîmée à notre arrivée. Nos travaux se sont limités au dégagement du mur de soutènement sud et de l’escalier, dont les deux premières marches ont été mises au jour (il est rentrant et large d’environ 7 m) ; et à une fouille stratigraphique au centre de la plate-forme (opération G).

114A-4 est une structure basse – 1,60 m – rectangulaire. Etant située sur le rebord de la terrasse occupée par le centre cérémoniel, sa face nord présente, comme celle de la str. A-2, une série de gradins descendant vers la terrasse inférieure. La largeur de ces deux structures voisines devait être sensiblement la même (4 m) ; la longueur de A-4 est de 15 m.

L’opération G

115Ce puits stratigraphique de 2 x 2 m, profitant de la fouille clandestine, a été rapidement abaissé à 60 cm au-dessous du niveau de la place. À ce niveau est apparu un mur de galets orienté est-ouest, dont la base sera mise au jour 60 cm plus bas, sur un sol de terre durcie.

116La fouille G, arrêtée à – 140, a donc révélé l’existence d’une structure ancienne, d’orientation légèrement différente. Compte tenu de son niveau très bas, – 120 pour la base du mur, on pouvait supposer que cette structure était préclassique. Le matériel récolté ne confirme pas cette datation : le niveau le plus bas a fourni une grande quantité de tessons datant pour 90% du Classique tardif, et pour 10% du Préclassique. L’existence à ce niveau d’une structure tardive, probablement une plate-forme d’habitation, est intéressante car elle révèle un important remaniement de cette partie de la place au moment de la construction du centre cérémoniel.

117La structure A-4 tardive date de cette phase, peut-être même du Classique terminal : le matériel trouvé en surface et au pied du mur sud comprend 4 tessons “Plombés” et une tête de statuette moulée postclassique. Aucun tesson de cette période ne provient cependant du remblai du monticule ; il s’agirait donc d’une simple réutilisation de la structure au Classique terminal.

Fig. 29 – L’escalier de la str. A-3. a/ vue générale ; b/ détail de la partie centrale.

5 – LA STRUCTURE A-11

118Cette petite structure, que nous n’avons pas complètement dégagée, était située juste au nord du monticule est du jeu de balle, mais à un niveau inférieur ; elle était invisible à notre arrivée. C’est en suivant un muret apparu dans le nord du couloir du jeu de balle que nous avons mis au jour, à quelques mètres de celui-ci, l’angle sud-ouest d’une plate-forme ancienne. Les murs de soutènement sont bien conservés, atteignant par endroit 1,35 m de hauteur, soit 8 assises de galets. Nous avons dégagé entièrement le mur ouest, long de 5,75 m : il a été prolongé de 1,15 m vers le nord par un mur sommairement construit de pierres entassées. La str. A-11 était certainement rectangulaire, de grand axe est-ouest, et orientée comme le jeu de balle ; nous n’avons pas cherché à mettre au jour sa partie est.

119La str. A-11 doit être rapprochée de la str. A-4 ancienne, qui est à peu près au même niveau. Nous avons pu vérifier en effet que ces deux plates-formes datent du Classique tardif. A cet effet, un sondage de 1,5 x 1,5 m (opération W) a été fait au centre de la partie dégagée de A-11. Abaissé jusqu’au niveau – 350, il n’a livré aucun sol d’occupation : la stratigraphie est confuse et l’on trouve à tous les niveaux un mélange de tessons préclassiques et classiques, les premiers étant même paradoxalement plus abondants dans les niveaux supérieurs.

Fig. 30 – Le fouille centrale de la str. A-3 met au jour une structure ancienne A-3b.

120La str. A-11 est donc une plate-forme – sans doute d’habitation – qui date du Classique tardif, mais antérieure à la construction du centre cérémoniel. Le fait que cette structure ait été ensuite enterrée sous plus de 1 m de terre confirme l’hypothèse d’une importante remodélation de cette partie de la terrasse. Notons aussi que le matériel préclassique est particulièrement abondant autour et à l’intérieur de A-11. Nord-est et sud-ouest de la place sont les deux zones où la densité de l’occupation préclassique aurait été la plus forte.

6 – LE JEU DE BALLE (STR. A-5 ET A-6)

121Le jeu de balle, qui occupe le côté est de la place, est constitué de deux monticules parallèles, très dissemblables (les str. A-5 et A-6), délimitant un couloir ouvert au nord et au sud. La str. A-6, basse, était à peine discernable à notre arrivée. Nous nous sommes contentés de dégager partiellement ses murs de soutènement pour connaître ses dimensions générales, et la partie centrale de sa banquette intérieure.

122La str. A-5, au contraire, plus haute et d’architecture élaborée, s’est révélée d’une stratigraphie compliquée, avec des superpositions, des tombes et des caches. Nous lui avons consacré 4 mois de fouilles au total. Elle était pratiquement intacte, en dehors d’une excavation très limitée sur la plate-forme.

123Nos travaux ont comporté :

1. le dégagement des murs, escaliers, banquettes, plates-formes (opération J) ;

2. la fouille de la partie centrale de A-5, côté ouest (opération U) ;

3. la fouille de la partie centrale de A-5, côté est (opération A) ;

4. un puits stratigraphique au centre même de la plate-forme supérieure (opération H).

a/ – Dégagement des structures

124Au début des travaux, la relation de la str. A-5 avec le monticule A-6 n’est pas évidente en raison de la disproportion des deux monticules ; de plus, l’espace qui les sépare paraît trop grand pour un couloir de jeu de balle. Nous le baptisons “patio est”.

125La str. A-6 est un monticule d’environ 1,50 m de hauteur, long de 29 m, orienté 18° à l’est du nord magnétique. Sa face ouest forme deux gradins inclinés, limités par des dalles de tuf ; le plus bas borde le couloir et limite une banquette horizontale large de 3,33 m. La pente des deux gradins de tuf n’est pas la même : supérieure à 40° pour celui du couloir, elle n’est que de 25 à 30° pour le deuxième gradin qui mène à la plate-forme. Les limites de celle-ci ne sont plus visibles. La largeur totale de A-6 est de 7,63 m, dont environ 4,30 m pour la plate-forme.

126La str. A-5 se présente à notre arrivée comme un monticule rectangulaire de grand axe nord-sud, relativement haut (environ 3 m), avec une partie saillante vers la place qui pourrait être un escalier ; aucun mur n’est visible.

127Le dessin perspectif de la fig. 31b, dû à L. Guézennec, malgré quelques erreurs de détail, donne bien l’allure générale de la str. A-5 une fois dégagée. La longueur est la même que celle de A-6, mais la largeur est supérieure : 11,50 m, dont 2,90 m pour la banquette qui est ici plus étroite. L’avancée sur la place, qui a sensiblement la moitié de la longueur totale de la façade, fait saillie de 3,13 m au nord, mais seulement de 1,60 m au sud, car le mur de soutènement sud n’est pas dans l’alignement du mur nord. Cette asymétrie est due au fait que la partie sud de la str. A-5 a été élargie et dotée d’un petit escalier supplémentaire dans l’angle du saillant.

Fig. 31 – Le jeu de balle, a/ au cours du dégagement des murs, b/ reconstitution perspective (M. Guézennec).

128L’avancée ouest présente elle-même une partie centrale saillante, large de 4 m, très détruite ; c’est la base d’un escalier sortant dont les marches seront dégagées (fig. 32a).

129La plate-forme supérieure a la même longueur que l’avancée ouest, et domine de 3 m la place ; elle est large d’environ 5,50 m. Elle se prolonge au sud par une plate-forme un peu plus basse (2 m), à laquelle on accède par un petit escalier intérieur à la substructure, donnant lui aussi sur la place. La partie nord devait former une plate-forme basse symétrique, mais moins longue et sans escalier. Les murs de soutènement de galets sont assez bien conservés, parfois sur 1 m de hauteur ; les pierres d’angle sont plus massives, mais toujours brutes.

130Au cours du dégagement, un trou de poteau (au pied du mur de l’avancée) et deux objets intéressants ont été mis au jour :

• dans l’angle nord du saillant, un vase-effigie, à couvercle, représentant une divinité solaire (photo de couverture et fig. 32c, d) dont la face est orientée au nord. Le vase, peint en rouge, jaune et bleu (les couleurs sont très délavées) contient 21 lames d’obsidienne verte disposées en croix.

• au nord de la plate-forme, au milieu des galets en désordre, une boule de pierre volcanique, de15 cm. de diamètre, travaillée pour représenter une tête de mort rudimentaire. Nous découvrirons au centre de la plate-forme une boule identique, mais plus soigneusement travaillée.

Fig. 32 – La façade ouest de la str. A-5 : détails de l’architecture (a, b) et vase-effigie à couvercle contenant 21 lames d’obsidienne verte (c, d).

131La face est de la str. A-5 descendait en gradins jusqu’à la banquette limitant le couloir. Ces gradins, au nombre de trois sans doute, sont faits de galets ; les deux plus bas, seuls conservés, sont légèrement en pente. Ils ont été recouverts ultérieurement d’un dallage incliné à 30°, de grands blocs rectangulaires taillés dans le tuf, longs de 0.90 m en moyenne, et parfaitement jointifs. La base de ce dallage arrive au niveau de la banquette, qui, elle, n’était pas dallée ; vers le haut, il atteignait au moins la base de la plate-forme supérieure, grâce à 5 rangées de dalles.

Fig. 33 – L’intérieur du jeu de balle. a/ face est de la str. A-5 montrant la superposition du dallage de tuf sur les murs de galets ; b/ la banquette ouest : les deux phases de construction sont visibles dans la partie nord ; c/ le rebord de la banquette, fait de blocs de caliche.

132L’existence de deux phases de construction révélée par cette superposition – murs de galets, dallage de tuf – est confirmée au moment du dégagement des faces sud et nord.

133Au sud, le mur de soutènement tardif cache un mur de galets plus ancien dont nous avons les deux angles. La structure ancienne était plus courte de 1,50 m et moins large de 2 m du côté ouest. Vers le couloir, son mur sud forme un redan et se raccorde au gradin inférieur, de galets, de la face est. Le mur sud de la structure tardive se prolonge, lui, du côté du couloir, par des dalles de tuf verticales qui limitent la banquette.

134Au nord, la superposition est quelque peu différente (fig. 33a). La substructure ancienne n’a pas été agrandie vers le nord et vers l’ouest. Le mur de soutènement nord (de galets) se prolonge directement par les dalles verticales, ici un peu affaissées vers l’extérieur, limitant la banquette. Celle-ci recouvre les restes d’un muret en superstructure qui part de l’angle du premier gradin (fait de galets, et légèrement incliné) en direction du couloir. La partie centrale de ce muret a été détruite pour laisser libre le couloir, mais on le retrouve sous la banquette de la str. A-6, à l’est. Les implications de cette superposition sont importantes : nous devons en déduire que le jeu de balle tardif, à extrémités ouvertes et murs dallés, a été précédé d’un jeu de balle plus petit, fermé au nord et au sud (forme dite “en palangana”) et limité sur les côtés par des murs de galets inclinés constituant le premier gradin2. Cette évolution de la forme du jeu coïnciderait avec le passage de l’architecture de galets à celle de dalles de tuf et de caliche.

135Au centre du jeu de balle, une tranchée de 2 m de largeur nous a permis de tracer le profil du couloir et des banquettes (fig. 34). La profondeur du couloir est d’environ 70 cm. Les dalles de tuf qui le limitent, inclinés à 40° et longues de 80 cm, rejoignent les dalles horizontales de la banquette dont le bord est soigneusement arrondi. Nous n’avons pas trouvé de trace de dallage sur la partie plane de la banquette.

136Sur le mur de dalles incliné à 25° qui constitue la face ouest de la str. A-6 au-dessus de la banquette, on note un détail curieux (fig. 35b) : la dalle centrale manque, mais les dalles encadrantes portent une perforation circulaire de 10 à 14 cm de diamètre dans leur partie haute (celle de la dalle sud devait mordre sur la dalle centrale). Ces trous, distants de 95 cm, pouvaient servir à encastrer soit un marqueur de type particulier, soit des mâts d’étendards. Cependant, les dalles symétriques de la banquette ouest ne sont pas, elles, perforées.

137Au nord du jeu de balle, deux trous de poteaux ont été mis au jour, l’un presque au centre du couloir, l’autre au pied de la banquette est ; peu profonds (14 à 20 cm), ils ont 15 cm de diamètre.

138Signalons enfin que la base du muret fermant, selon notre interprétation, l’extrémité nord du jeu de balle ancien, réapparaît en deux endroits : à l’intérieur du couloir contre la banquette est (ce qui confirme notre hypothèse du couloir fermé) et au pied du mur ouest de la str. A-6.

139Sous le niveau du sol du couloir, d’ailleurs difficile à discerner, un autre muret part du précédent pour rejoindre, 5 m plus loin, l’angle de la str. A-11.

b/ – Fouille de la structure A-5 : face ouest (opération U)

140Cette fouille, limitée au début à un carré de 2 x 2 m dans la partie centrale de la plate-forme, devait être élargie par la suite vers la place pour englober l’escalier et les structures qu’il recouvrait.

Fig. 34 – Plan et profil du jeu de balle.

141L’opération U a mis au jour, presque en surface, plusieurs alignements de galets. Le principal, orienté dans l’axe nord-sud de la str. A-5, est la partie supérieure d’un mur de soutènement limitant une étroite plate-forme sommitale ; nous vérifierons qu’il se prolonge vers le nord et vers le sud jusqu’aux limites de la plate-forme haute. À ce mur, conservé en un endroit sur 0,95 m de hauteur, est accolé dans la partie centrale un petit bloc faisant saillie de 1 m vers l’ouest, large de 1,34 m, qui constituait une sorte d’autel tourné vers la place ; la plate-forme est d’autre part trop étroite pour avoir supporté une superstructure. Il faut souligner que ces détails architecturaux appartiennent à l’avant-dernier stade de construction de la str. A-5 : ils ont été recouverts quand la plate-forme fut élargie, dotée de l’avancée et de son escalier vers l’ouest. L’étroite plate-forme supérieure, cependant, n’aurait été que peu ou pas surélevée au cours de cette ultime transformation.

142Dès le début de la fouille, plusieurs objets sont apparus à fleur de terre, entre les galets en désordre qui parsemaient la plate-forme. Ce sont, d’est en ouest :

• les fragments d’un grand bol-encensoir à fond plat et excroissances ;

• un “masque” de dieu solaire (?) détaché du flanc d’une poterie (fig. 92a) ;

• une boule de basalte de 14 cm de diamètre travaillée par piquetage pour représenter une tête de mort ; elle reposait sur le mur de galets nord-sud. Cette pièce est à rapprocher du monument 81 du site de Bilbao (Santa Lucía Cotzumalhuapa) étudié par L. Parsons (cf. Ichon et Cassier 1975 : 23, fig. 15).

• une grande jarre commune à quatre anses, placée sur le haut de l’autel et recouverte d’un gros galet dont le poids l’a partiellement brisée. Elle contenait 1.718 lames ou fragments de lames d’obsidienne noire translucide, toutes de même longueur – 7 à 9 cm – et portant deux encoches (le détail en sera donné dans le chapitre Matériel) ; et un “masque” de divinité solaire, différent du précédent, mais identifié par ses boucles d’oreilles en kin. Ce masque est coloré d’hématite spéculaire (fig. 92b).

Fig. 35 – Tranchée transversale dans le jeu de balle, a/ les banquettes, le couloir et le talus de la str. A-5 ; b/ le marqueur (?) est.

143Ces objets sont des offrandes dédicatoires déposées au sommet de l’avant-dernière plate-forme avant qu’elle ne soit recouverte pas la construction définitive.

144Au niveau + 280, la fouille est agrandie vers l’ouest, mesurant alors 4 x 2 m, puis 5 x 3 m. Le remblai de terre jaune sablonneuse et de galets contient des fragments d’os humains et animaux assez abondants, et un ornement d’oreille en jade (U/7). Un mur de galets orienté est-ouest est appuyé à l’autel : fait de pierres simplement entassées, il a dû être construit au moment de l’agrandissement de l’avant-dernière structure comme une cloison destinée à faciliter le remblaiement.

145Poursuivie vers le bas, la fouille met au jour un plan incliné à 40° entièrement recouvert de grandes dalles de tuf. Cette pente dallée, qui descend jusqu’au niveau de la place, n’atteint pas, vers le haut, le mur de galets longitudinal et l’autel : une marche haute de 70 cm, faite de 4 dalles de tuf ou de caliche superposées, devait assurer le raccord entre la pente et la base du mur de soutènement de la plate-forme. Il n’en reste que la partie centrale, contre l’autel de galets, et un peu décalée vers le sud ; nous l’avons d’abord considérée comme un autel plus ancien, mais la construction du mur transversal destiné à faciliter le remblaiement de l’avant-dernière structure prouve que l’autel de galets et le “pseudo-autel” de tuf sont contemporains : ce mur s’appuie en effet sur l’un comme sur l’autre, ainsi que sur la pente dallée.

146Celle-ci a 3,50 m de longueur ; nous ne l’avons dégagée que dans sa partie centrale, en vérifiant toutefois qu’elle continue au sud sur 3 m ; elle paraît ensuite avoir été coupée net, et il est impossible de calculer la longueur réelle de cette surface dallée, qui était certainement supérieure à 9 m.

147Dans la partie centrale, les blocs rectangulaires, dont les plus grands atteignent 1,23 m pour une largeur de 50 à 80 cm et une épaisseur de 12 cm, sont disposés en rangées dans le sens vertical (fig. 37b). Trois dalles suffisent en général à recouvrir la pente. Dans la partie basse, où les dalles ont pris une teinte rougeâtre due à une combustion superficielle, la dalle centrale est largement échancrée, peut-être pour y planter un mât. Outre le mur de galets transversal dont il a déjà été fait mention, un amoncellement de galets, s’appuyant à la pente dallée, supportait le haut de l’escalier tardif.

Fig. 36 – La fouille centrale de la str. A-5 met au jour des offrandes superficielles, a/ la plate-forme au début de l’opération U ; b/ boule de basalte en forme de tête de mort et olla contenant 1711 lames d’obsidienne ; c/ détail du contenu de la olla.

Fig. 37 – L’avant-dernière structure A-5b, façade ouest. a/ la partie supérieure de la pente dallée ; b/ détail du dallage dans l’axe ouest-est de la structure.

Fig. 38 – La structure ancienne A-5a, construite de galets ; ont été dégagés la rampe centrale et l’escalier sud.

148A la fin de la première campagne, nous avions donc mis en évidence la superposition de deux structures successives, A-5b et A-5c, aussi bien sur la face ouest que sur la face est de la str. A-5.

La structure ancienne (A-5a)

149Le premier objectif de la deuxième campagne fut de rechercher, toujours sur la face ouest de A-5, mais sous la pente dallée, d’autres superpositions éventuelles. Il était nécessaire pour cela de démonter une partie de l’escalier extérieur, ce qui nous a permis de vérifier un détail de construction déjà rencontré dans la str. A-3 : les murs des gradins successifs, dont la partie supérieure sert de marche, vont jusqu’au sol, formant comme des cloisons parallèles.

150Le démontage de la partie dallée sur 1,60 m de largeur nous montre que les dalles reposent sur une couche d’argile rouge dure, de 2 cm d’épaisseur, puis sur un remblai de sable et de petits galets contenant du charbon, de la cendre et des tessons. Au-dessous apparaît une structure plus ancienne, A-5a (fig. 38), entièrement construite en galets. La partie dégagée correspond au “bloc-escalier”, faisant saillie vers la place et composé en fait de deux petits escaliers étroits (0,75 m) de 4 ou 5 marches, bordés de rampes inclinées, et séparés par une rampe centrale plus large (1,75 m), elle aussi en talus. Un revêtement d’argile couvrait l’ensemble. Vers le haut, la plate-forme devait être à peu près au niveau de la marche de tuf de la structure ultérieure, c’est-à-dire vers + 180. Le bas des escaliers et des trois rampes forme une dernière marche continue ; elle se poursuit vers le bas en un mur vertical, sur une hauteur de 75 cm, atteignant le niveau – 100 qui, nous le verrons, est celui du toit d’une grande tombe. Par la suite, on a accolé à la base du bloc-escalier un petit gradin qui le borde entièrement et forme vers la place une saillie rectangulaire, servant sans doute d’autel au niveau du sol. Cette construction est postérieure à celle de l’escalier, mais nous pensons qu’il s’agit d’un simple aménagement de la partie basse consécutif à la construction de la tombe. Nous distinguerons donc au total trois phases seulement dans l’édification de la str. A-5. C’est évidemment durant la première qu’a été mis en place l’ensemble funéraire que nous décrirons plus loin.

151En recherchant vers le sud la limite de la structure A-5a, nous avons mis au jour son angle sud-ouest à 3,50 m de l’escalier. En supposant que la partie nord est symétrique, A-5a devait donc avoir une longueur totale de 11,50 m pour une hauteur supérieure à 1,50 m.

152La base du bloc-escalier de la str. A-5a se trouve à un niveau – 30 marqué par une couche dure de terre brun-rouge, qui correspond sans doute au niveau de la place durant cette phase ancienne. C’est l’espace compris entre A-5a et la base de l’escalier tardif, soit environ 3 x 4 m, que nous allons maintenant fouiller, en partant du niveau – 30.

153Au pied du gradin entourant la base du bloc-escalier sont mis au jour les premiers signes indiquant l’existence d’une tombe : le sol s’affaisse par endroit, et nous trouvons plusieurs fragments de disques incrustés de pyrite. L’autel saillant est démonté de façon à suivre le mur vertical qui, nous l’avons vu, s’enfonce bien au-dessous du sol – 30.

154C’est à une trentaine de centimètres sous le sol que commence un amoncellement de gros galets, mêlés de quelques blocs de tuf ou de caliche taillés, qui couvre toute la surface de la fouille. Ces pierres sont entassées de façon très lâche, et l’on trouve dans les interstices des fragments d’os humains (dents, vertèbres, bassin, os longs...) et d’objets précieux : disques incrustés de pyrite, petits pendentifs, perles de jade et de coquillage. À – 100 apparaît le toit de la tombe, composé d’une rangée de 6 grandes dalles de schiste mauve ou de caliche, orientées nord-sud, reposant sur des dalles de tuf posées transversalement. Les dalles les plus à l’est sont légèrement engagées sous la base du mur vertical de la str. A-5a, qui s’arrête à ce niveau. La longueur totale du toit de la tombe ainsi mis au jour est de 2,10 m en y incluant la dalle la plus à l’ouest, qui servait de linteau.

155Dans la partie ouest de la fouille, c’est-à-dire directement sous l’escalier tardif, et pratiquement au niveau du sol – 30, apparaît la partie supérieure d’un caisson fait de dalles de tuf verticales, dont le grand axe est orienté nord-sud ; un peu au sud, une dalle de tuf carrée recouvre une olla rustique contenant un grand couteau de silex et une pointe de lance d’obsidienne noire. Un deuxième ciste est ensuite mis au jour un peu à l’est du premier et décalé vers le nord ; il s’appuie sur une dalle de schiste verticale fermant l’entrée de la tombe. Le ciste 1 est dans l’alignement exact, selon un axe est-ouest, de l’autel ancien (str. A-5a), et de l’autel tardif du haut de la plate-forme (str. A-5c) ; par contre, le ciste 2 et la tombe sont décalés d’environ 40 cm au nord de cet axe.

156Les deux cistes étaient recouverts, comme le toit de la tombe, de gros galets en désordre, qui remplissaient aussi l’espace entre les deux caissons. Les dimensions de ces derniers sont les suivantes :

• ciste 1 : longueur 1,30 m ; largeur 0,60 m ; hauteur 0,80 m.

• ciste 2 : longueur 0.98 m ; largeur 0,54 m ; hauteur environ 0,75 m.

157Ils devaient être tous deux, à l’origine, recouverts d’un “toit” fait lui aussi de dalles de tuf ; deux de ces dalles sont encore en place sur le ciste 1. La base des cistes se trouve, à peu de choses près, au niveau du toit de la tombe (— 100).

158Dans l’angle sud-ouest du ciste 1, nous mettons au jour un squelette d’adulte en décubitus dorsal, axe ouest-est ; la tête est tournée sur le côté droit, les bras allongés. Le bas des jambes a disparu au niveau des genoux. Cette sépulture (U/15) se trouve à l’aplomb de la cache découverte au niveau de la place, et pourrait lui avoir été associée.

Fig. 39 Cistes et tombe à l’ouest de la str. A-5. a/ le haut du ciste 1 et la cache U/8 ; b/ sépulture à la verticale de la cache ; c/ toit de la tombe et ciste 1 ouvert

Fouille des deux cistes et de la tombe 2

159Cistes et tombe 2 constituent un ensemble qui daterait de la même phase de construction, antérieure à celle de la str. A-5a ; les deux cistes seraient comme des “antichambres” contenant les gardiens ou les accompagnants de la tombe. Il faut noter cependant que le ciste 2 interdit l’entrée de celle-ci ; les cistes ont donc été mis en place seulement après que la tombe ait été définitivement scellée avec son contenu.

160Les cistes ne contenaient pas de sépultures ; ils avaient été ouverts, vidés de leur contenu (comme en témoignent quelques restes osseux), puis soigneusement bourrés de gros galets plats formant jusqu’à 7 couches superposées dans le ciste 1. Ce viol des sépultures doit être rapproché de celui de la tombe 1 de la pyramide principale ; nous tenterons de l’expliquer plus loin.

161Les grandes dalles mises au jour entre les cistes et le mur ouest de la str. A-5a, toutes cassées en deux sous le poids du remblai qui les recouvre, constituent la partie supérieure de la fausse voûte en encorbellement de la tombe 2 ; nous serons obligés de les retirer pour y pénétrer par le toit.

162La partie supérieure de la tombe était vide, ce qui explique le tassement des pierres recouvrant le toit ; la partie inférieure a été peu à peu comblée d’une terre sablonneuse brun-rouge qui s’est infiltrée par les interstices. Les couches horizontales plus dures que nous avons notées à différents niveaux de ce remblai correspondent sans doute non à des sols successifs, mais à des périodes particulièrement humides.

163La tombe 2, dont la base est au niveau – 220, mesure 1,83 x 2,23 m. La base des murs est verticale, et l’encorbellement n’est vraiment marqué que dans la partie supérieure ; dans le mur sud, seule la dernière dalle est débordante, pour soutenir celle du toit. La hauteur intérieure maximale de la tombe est ainsi de 1,10 m. Les murs sont faits de blocs de tuf ou de caliche noyés dans un liant d’argile.

164La tombe ouvrait à l’ouest vers la place. Cette ouverture est encadrée de deux murs de galets, distants de 65 cm, formant piliers ; et d’une grande dalle qui est le linteau. Une marche de tuf permettait de descendre dans la tombe : elle supportait la dalle de schiste verticale servant de porte.

165Le fond de la tombe n’est pas marqué par un sol net, mais par la disposition des offrandes. Le sol de terre jaune battue ne sera trouvé que 10 cm plus bas ; il livre de nombreuses traces d’occupation domestique, en particulier des déchets de cuisine, avec une abondance de petits coquillages gastéropodes appelés jutes (pur en quiché : Pachychilus sp.). La datation C-14 obtenue (100 ± 90 ap. J.C., GIF-4918) ne correspond certainement pas à celle de la tombe, qui est beaucoup plus tardive. Elle a l’intérêt de dater un niveau de l’occupation préclassique tardive, à 2,30 m sous le sol de la place classique.

166Le contenu de la tombe permet de distinguer nettement deux zones : le fond (partie est) dans lequel sont groupés les ossements humains ; et le seuil, au pied duquel ont été déposées les poteries, 13 au total (fig. 41).

167Les ossements, en majorité des os longs, tous fracturés, ont été entassés en désordre dans la partie est de la tombe ; aucun n’est en connexion, en dehors de quelques vertèbres et d’un bassin. Il s’agit donc de la sépulture secondaire de plusieurs individus, deux sans doute, dont un adulte jeune ; l’absence des crânes et de la plupart des dents est notable.

168Les poteries sont posées sur le sol en position normale, au pied de la marche et dans l’angle sud-ouest surtout. La plupart sont des vases cylindriques stuqués3, caractéristiques du Classique tardif, allant souvent par paires (par exemple les objets U/36 et U/39, U/31 et U/38) ; on trouve aussi deux vases rouges à effigie humaine, un petit vase à côtes “Tohil Plombé”, et deux plats tripodes à supports zoomorphes moulés et décor négatif (fig. 88 et sq.). Plusieurs dents humaines ont été trouvées entre les poteries, et une dent à l’intérieur de l’un des plats tripodes.

169Outre les poteries, une grande quantité de petits objets plus ou moins précieux avaient été disposés dans la tombe, et jusque sur les squelettes. Ils comprennent des fragments de disques de pyrite (dont un complet, U/57) ; une trentaine de petites perles de pierre verte, des lames d’obsidienne (dont une verte près de la porte), un bel élément de collier allongé, en jade, un ornement d’oreille en argile ; enfin, un petit fragment de plaque d’or à décor repoussé. Cette dernière découverte, s’ajoutant à celle de plusieurs poteries d’importation, confirme la date tardive de la tombe, que l’on peut situer au Classique terminal ou au Postclassique ancien.

170Contrairement à ce que nous avons pensé d’abord, il semblerait que la tombe 2 n’ait pas été pillée ; l’ouverture en était en effet bloquée par le ciste 2. L’une des caractéristiques du pillage des tombes ou des cistes, tel que nous le définissons pour cette période, est qu’il s’accompagne généralement de l’enlèvement ou de la dispersion des offrandes après qu’elles aient été brisées. Nous nous trouvons donc confrontés à un dilemme : la tombe 2 ne peut avoir été construite qu’avant l’érection de la str. A-5a, la plus ancienne. Elle contient néanmoins un mobilier qui peut difficilement apparaître avant la phase la plus tardive (A-5c).

171Pour résumer les résultats de l’opération U sur la face ouest de A-5, elle nous a permis de mettre au jour trois phases de construction successives, et une tombe qui date de la plus ancienne, bien qu’elle contienne un mobilier caractéristique d’une époque tardive (vers 1000 ap. J.C.). Les styles architecturaux diffèrent profondément d’une phase à l’autre, avec en particulier une succession :

1. substructure de galets, escaliers centraux ;

2. substructure de dalles inclinées, pas d’escalier ;

3. substructure de galets, escaliers (central et latéral).

Fig. 40 – La tombe 2. a/ profil ouest-est et vue frontale de la porte ; b/ les deux cistes ouverts, et le toit de la tombe ; c/ la tombe 2 ouverte.

172Il est intéressant de les comparer maintenant à ceux obtenus sur la face est de la même structure, grâce à l’opération A.

Fig. 41 – Plan de la tombe 2.

c/ – Fouille de la str. A-5, face est (opération A)

173Une fois nettoyé le dallage de tuf incliné, qui est conservé jusqu’au gradin supportant la plate-forme, et tracées les limites de notre tranchée, large de 2 m, nous avons enlevé les dalles pour mettre au jour la structure antérieure, construite de galets, dont la face est est une succession de trois gradins, légèrement inclinés. Dans la partie centrale de la fouille, le gradin inférieur a été détruit et son emplacement est occupé par un amoncellement désordonné de gros galets et de blocs de tuf et de caliche taillés. Cet amas cache la partie supérieure d’une tombe, la 3ème mise au jour, construite de façon plus fruste que la tombe 2, en superposant des rangées de gros galets débordants pour constituer une fausse voûte rudimentaire. Le toit de cette tombe a dû s’effondrer, ou n’a jamais été mis en place ; il a été remplacé par l’amas de pierres reposant directement sur le remblai de terre sablonneuse qui a rempli la tombe (il n’est pas exclu cependant que la tombe ait été violée, en y pénétrant par le toit).

174L’entrée de la tombe se trouve sur la face est, à l’aplomb de la dernière dalle inclinée ; elle donne donc sur l’intérieur de la banquette. Elle est constituée de deux murs de galets supportant une dalle calcaire servant de linteau, et d’une dalle de tuf verticale bloquant l’ouverture.

175La tombe 3 est une chambre à peu près carrée (1,36 x 1,38 m) dont le sol est entièrement recouvert de dalles de tuf soigneusement taillées et ajustées. Le niveau de ce sol est de – 110, et la hauteur maximale de la voûte, avant sa destruction, devait être de 1,10 m à 1,20 m.

176On trouve d’abord dans le remblai de la tombe quelques fragments osseux, dont certains humains, une petite perle de jade, quelques tessons et lames d’obsidienne, et une dalle peut-être tombée du toit. Les poteries apparaissent au niveau – 90 ; les squelettes un peu plus bas dans l’angle sud-ouest. Quelques gros galets sont mêlés aux ossements et au mobilier (fig. 43). Il s’agit encore d’une sépulture secondaire : un adulte âgé dont le squelette est presque complet, et dont le crâne présente une déformation antéro-postérieure droite ; et un autre adulte, de plus petite taille, qui n’est représenté que par un tibia et deux fémurs. Le mobilier comprend trois poteries : un vase rouge à piédestal et deux bols tripodes à supports moulés, l’un recouvrant l’autre (A/6, 8 et 11, fig. 94) ; et une quinzaine de minuscules perles bleu-vert de microline. Près du crâne a été déposé un vase “Plombé” à effigie, incomplet, dont nous avons trouvé un morceau au-dessus de la tombe, sous le dallage.

177La fouille de la banquette ouest du jeu de balle, dans le prolongement et jusqu’au niveau du sol de la tombe 3, n’a livré que des tessons, classiques et préclassiques, et quelques fragments d’os longs et de crânes humains.

178En résumé, la fouille de la face est de la str. A-5 confirme l’existence de deux superpositions, celles qui avaient déjà été notées au moment du dégagement des murs : une structure ancienne à gradins, faite de galets ; et une structure tardive, en dallage incliné, qui est venue la recouvrir. La tombe 3, extérieure à la première et dont le toit était au niveau de la base du premier gradin, ne date pas de cette phase, mais bien de la seconde. On peut se demander toutefois dans quelles circonstances son toit a été détruit, et pourquoi cette ouverture (accidentelle ?) a été utilisée, plutôt que la porte donnant dans la banquette, pour introduire au moins l’une des poteries, le vase “Plombé”.

Fig. 42 – Mise au jour de la tombe 3, sous le dallage de la face est de la str. A-5. Au premier plan, la banquette ouest.

d/ – Fouille centrale de la plate-forme (opération H)

179Cette fouille a été entreprise dans la partie de la plate-forme supérieure qui n’avait été touchée ni par l’opération U, ni par l’opération A, pour essayer de raccorder les résultats obtenus sur les faces latérales, en particulier les phases successives de construction observées, trois à l’ouest et deux seulement à l’est.

180A faible profondeur, nous avons mis au jour une cache, qui correspond au dernier stade de construction de la str. A-5 (fig. 45). Cette petite “chambre”, de grand axe ouest-est, mesure intérieurement 0,80 x 1,40 m et est profonde de 1 m. Le sol dallé se trouve au niveau + 150. Elle est soigneusement construite de blocs de tuf taillés formant les murs latéraux ; le mur est, sur lequel s’appuie le dallage incliné de la structure tardive, est renforcé à l’intérieur par un mur de galets.

181L’entrée de la cache est sur le côté ouest : trois marches de tuf, et sur le “seuil” une dalle de schiste vert perforée en son centre.

182La cache renferme plusieurs objets groupés contre la paroi est : deux grands bols-encensoirs à excroissances, dont l’un contient un grand couteau d’obsidienne portant des traces d’hématite ; une olla incomplète ayant contenu du pigment rouge ; trois blocs de bahareque, peints en rouge et modelés (ils semblent représenter une main ou un pied et pourraient provenir d’une sculpture d’argile de grande dimension) ; enfin, une pierre calcaire de forme irrégulière, peinte en rouge, plusieurs galets, et une lame d’obsidienne.

183Le remblai de la cache contient un nombre exceptionnellement élevé de lames d’obsidienne noire translucide (18 lames et 3 éclats), outre les petits coquillages jutes, et les fragments osseux habituels.

Fig. 43 – La tombe 3, ouverte.

Fig. 44 – La tombe 3 : profil et plan.

Fig. 45 – Plan et profil de la str. A-5.

184Le gradin supérieur de la structure ancienne (de galets) a été échancré pour loger le mur est de la cache, ce qui confirme la date tardive de celle-ci.

185La poursuite de la fouille centrale montre qu’il existe, au niveau + 150 (celui du sol de la cache 1), un changement dans la nature du remblai qui pourrait correspondre à une ancienne surface d’occupation ; le niveau, sub horizontal mais avec une pente légère vers le sud, de terre argilo-sableuse brun-rouge (alors que le remblai supérieur est plus clair et plus sablonneux) se raccorderait au deuxième gradin de la face est de la structure ancienne. Le sol est couvert de cendre. Dans l’angle sud-ouest de la fouille, nous mettons au jour un crâne humain fragmentaire portant des traces de pigment rouge, en particulier sur les orbites. Plus bas dans la même couche brun-rouge, sur un lit de cendre et de charbon, un grand récipient commun (apaste) contient encore du charbon, des petites pierres brûlées, 139 tessons classiques et préclassiques et 11 lames d’obsidienne. Le contenu de cette cache daterait la première structure de 660 ± 60 ap. J.C. (GIF – 5292).

186Entre les niveaux + 90 et – 20 (nous arrêtons la fouille à ce niveau), apparaissent plusieurs murs de galets qui correspondent au moins, semble-t-il, à trois plates-formes d’habitation : l’angle nord-ouest d’une str. A-12 orientée vers le nord magnétique ; un grand mur nord-sud longeant la paroi ouest de la fouille (A-13) ; enfin un autre mur, perpendiculaire à ce dernier, dans le sud de la fouille (A-14).

187Aucune de ces trois structures ne peut être mise en relation avec la phase ancienne de la str. A-5 ; il s’agirait de plates-formes d’habitation, datant du Classique d’après le matériel récolté, qui auraient été recouvertes pour la construction de la première structure cérémonielle A-5a.

188En résumé, la fouille H a mis en évidence trois niveaux d’occupation : dans le bas (niveaux – 20 à + 90), plusieurs plates-formes basses – moins de 1 m – qui ont les caractéristiques de plates-formes d’habitation ; au niveau intermédiaire + 150, un sol qui nous paraît se raccorder, à l’ouest comme à l’est, aux murs de galets de la structure ancienne A-5a ; enfin, au niveau supérieur, une cache importante, construite dans le remblai de la dernière (ou avant-dernière) structure.

e/ – Conclusions sur la str. A-5 et le jeu de balle

189L’ensemble des données obtenues par nos opérations U, A et H, est d’interprétation difficile pour plusieurs raisons : la dissymétrie entre les faces est et ouest, dont l’une indique au moins trois phases de construction, l’autre deux seulement ; la discordance entre l’emplacement des tombes et leur contenu ; enfin, seules des fouilles plus complètes permettraient d’établir les limites des structures successives et leur articulation. Nous reconnaissons donc que la fouille A-5 pose plus de problèmes qu’elle n’en résout ; ce qui importe est de bien poser ces problèmes et de voir si leur solution ne réside pas dans l’évolution des autres structures du groupe A. La str. A-5, ou plus précisément le jeu de balle, doit être remis dans le contexte général du centre cérémoniel.

190La str. A-5 a été édifiée au-dessus d’un sol d’occupation datant du Préclassique tardif, et a recouvert plusieurs plates-formes d’habitation qui remontent probablement au Classique (moyen ou tardif). Il est certain que les stades successifs de A-5, qui sont au nombre de trois, datent tous du Classique tardif ou du Classique terminal.

La structure ancienne A-5a

191Cette structure primitive a été construite en relation directe avec la tombe 2 et les deux cistes de la face ouest. Une vaste fosse a d’abord été creusée, atteignant le niveau d’habitat préclassique, à 2 m de profondeur. Une fois terminée la construction de la tombe 2, on a procédé à celle de la substructure, dont le mur ouest est à l’aplomb de la paroi est de la tombe. Le niveau de la terrasse étant alors de 30 cm plus bas que le niveau actuel, il a fallu recouvrir le toit de la tombe de près de 1 m de remblai composé d’abord d’un amoncellement de gros galets, puis de terre sablonneuse. Il est difficile de dire si la tombe était alors déjà occupée, ou si elle est restée accessible pour y introduire par la suite un ou plusieurs personnages importants. Le fait est que, si l’on admet que l’installation des deux cistes a été faite au même moment, il faut en conclure que la tombe était déjà occupée et scellée, puisque le ciste 2 empêchait désormais d’y accéder. Admettons donc comme hypothèse de travail que les restes des deux occupants de la tombe, retirés au préalable d’une sépulture provisoire, ont été placés dans la tombe, avec les offrandes appropriées ; que la tombe a ensuite été fermée, et que les deux cistes construits en face de la porte ont reçu chacun leur occupant, remplissant peut-être le rôle d’accompagnants, ou de gardiens de la tombe.

192La str. A-5a est construite de galets ; les murs devaient être entièrement recouverts d’un revêtement d’argile durcie. Le plan est rectangulaire, la longueur probable de 11,50 m, la hauteur de 1,80 m. La largeur de la plate-forme était d’au moins 4 m, mais la disposition de sa face est restée douteuse ; peut-être n’atteignait-elle pas de ce côté les murs en gradins de la structure ultérieure ?

La structure intermédiaire A-5b

193Au cours de cette seconde phase, la structure primitive va être considérablement agrandie vers le nord et vers le sud pour atteindre 25 m de longueur, surélevée de 1 m, et sans doute élargie vers l’est : nous pensons en effet que les gradins de la face est, dont les deux plus bas sont inclinés, datent de cette phase. L’axe est-ouest et l’orientation de la str. A-5a ont été conservés. Le bloc-escalier ancien a été recouvert d’un dallage très soigné de grandes dalles de tuf, incliné à 40°, dont la partie supérieure forme un gradin, fait également de blocs de tuf et de caliche. Par contre, la plate-forme supérieure est limitée par des murs de galets, formant vers la place une avancée – sans doute un autel – contenant une offrande dédicatoire essentiellement formée de lames d’obsidienne. Cette plate-forme se prolonge latéralement par des plates-formes plus basses, qui doivent être accessibles par un ou deux escaliers ; il n’y a pas, en effet, d’escalier sur le dallage incliné de la partie centrale.

194C’est à cette phase que correspond le jeu de balle fermé, ce qui implique la construction de la str. A-6. Le court est fermé au nord et au sud par deux murs qui s’appuient aux extrémités du gradin incliné.

195Aucune tombe, aucune cache (sauf peut-être le grand bol plein de cendre trouvé au centre) ne sont à rattacher à cette phase intermédiaire.

La structure tardive A-5c

196Le jeu de balle prend sa forme définitive. La substructure n’est que très faiblement surélevée, mais elle est allongée de 1 m vers le sud, de 1,50 m vers l’ouest, et dotée d’une avancée, d’un escalier central vers la place, et d’un petit escalier menant à la plate-forme sud. Cet ensemble recouvre complètement la pente dallée, la marche de tuf et l’autel de galets de la structure intermédiaire.

197Sur la face est, les gradins de galets sont recouverts d’un dallage incliné tout-à-fait comparable à celui qui vient d’être masqué à l’ouest. Une banquette est construite, haute de 0,70 m, de même longueur que la substructure (sauf peut-être au nord, où elle ne dépasse pas l’ancien mur de galets incliné) ; elle est limitée vers le couloir par des dalles fortement inclinées, à ses extrémités par des dalles verticales.

Fig. 46 – Vue aérienne du groupe A. les str. A-1 et A-7 n’ont pas encore été dégagées.

198À l’est du couloir, la str. A-6 subit les modifications correspondantes, c’est-à-dire qu’on recouvre de dalles sa face ouest, et qu’on lui accole une banquette symétrique de la banquette de la str. A-5.

199C’est à ces transformations qu’il faut associer la construction de la tombe 3 et de la cache. La tombe 3 est creusée au centre de la face est, au pied du gradin de galets incliné (qui est détruit à cet effet), avant la mise en place de la pente dallée et de la banquette. La porte donne à l’intérieur de celle-ci. Comme pour la tombe 2, nous ne pouvons affirmer que la tombe 3 ait été occupée dès sa construction. La situation est très semblable dans les deux tombes : enterrements secondaires incomplets, mobilier tardif. Mais un détail notable de la seconde est la destruction du toit, qui pourrait être accidentelle, mais aussi impliquer une réouverture ou un “viol”. Nous penchons pour la première hypothèse : la fausse voûte assez fruste faite de gros galets, se serait effondrée au cours des travaux. Au lieu de la reconstruire, on aurait jugé plus sûr de combler la tombe, après y avoir déposé ses occupants et les offrandes, et d’amasser au lieu du toit des pierres en désordre, recouvertes par le remblai.

200De cette phase également datent la cache 1, aménagée dans le remblai de la plate-forme, et peut-être le viol des deux cistes de la face ouest. En ce qui concerne ces derniers, il n’est pas fortuit que l’escalier tardif ait été construit exactement à l’aplomb du ciste 1. Ceci implique que les cistes ont été mis au jour, afin de les vider de leur contenu et de les remplir de galets ; on a aussi placé à l’extérieur et contre le ciste 1 la sépulture U/15 ; puis, sans avoir apparemment ouvert la tombe 2, on a remblayé l’ensemble, au-dessus duquel a été construit l’escalier sortant sur la place. Au pied de l’escalier, une dalle placée en surface, et recouvrant une offrande, à la verticale de la sépulture U/15, indiquait l’emplacement de celle-ci.

201Cette reconstitution des étapes successives de la str. A-5 est évidemment discutable. Si l’on admet l’existence de trois étapes principales (nous en avons compté jusqu’à 5 au cours de la fouille), l’évolution la plus logique serait la suivante :

1. – A-5 a : structure entièrement faite de galets. Escaliers à l’ouest. Gradins inclinés à l’est, dont le plus bas forme banquette d’un jeu de balle fermé “en palangana ". Tombe 2 et cistes. Datation : 650 ap. J.C. (début du Classique tardif).

2. – A-5b : structure entièrement recouverte de dalles inclinées. Modification du jeu de balle, à couloir ouvert. Construction de la tombe 3, des banquettes, de la cache 1. Datation : Classique tardif (700-900 ap. J.C. ?).

3. – A-5c : la face est n’est pas modifiée. Par contre, la face ouest est considérablement agrandie et dotée d’une avancée et d’un escalier vers la place. On a auparavant découvert et vidé les deux cistes. Datation : Classique terminal (900-1100 ap. J.C.).

202Les données de nos fouilles ne confirment pas, cependant, cette image simpliste. Dans la même structure auraient coexisté une face en dallage incliné et l’autre face en gradins de galets, ce dispositif de la phase A-5b étant inversé dans la suivante.

203Enfin, le problème de la datation des tombes reste posé dans les deux cas. En effet, les tombes 2 et 3, malgré leurs traits communs, ne peuvent être datées de la même phase : la première est certainement plus ancienne. Si l’on admet la datation de 650 ap. J.C. pour la str. A-5a, ce serait aussi celle de la tombe 2 ; or, le matériel qu’elle contient – céramique, métal – ne peut correspondre au début du Classique tardif, mais bien à la fin de cette période, au plus tôt vers 900 ap. J.C. Faut-il alors admettre (comme il est possible de le faire pour la tombe 3) que la tombe 2 a été rouverte et “réoccupée” en même temps que les cistes étaient vidés (leurs occupants étant éventuellement transférés dans la tombe...?).

204Nous retiendrons de cette discussion un fait quasi certain : le viol des deux cistes a eu lieu à l’occasion de l’ultime transformation de la str. A-5. L’évolution du jeu de balle est aussi un trait important, mais que l’on peut rattacher ici à la dernière ou l’avant-dernière phase.

7 – LA STRUCTURE A-7

205La fouille de cette structure a été dirigée par M.A. Bailey, assisté de H. Martínez. Elle a comporté deux phases : dégagement des murs et nettoyage de la plate-forme, et fouille centrale (opération C).

206Cette plate-forme rectangulaire (7 x 14,25 m) repose sur un énorme soubassement de 5,20 m de hauteur, en grande partie artificiel, mais qui a utilisé, comme la pyramide A-1, la forme naturelle de la colline, ici de pente moins forte. Vers la place, ou plus exactement le jeu de balle, cette terrasse s’abaisse en un plan incliné qui devait être entièrement revêtu de grandes dalles de tuf, sur une surface supérieure à 400 m². La pente se termine par une marche et un mur de soutènement bas, fait de galets, qui prolonge celui de la pyramide A-1 sur une longueur de 33 m. Il n’y a aucune indication de l’existence d’un escalier sur cette face.

207Sur la face ouest, la jonction de la terrasse avec la pyramide A-1 est assez imprécise, sauf dans les parties basse et haute ; la pente dallée se termine ici par deux marches faites de blocs de pierre taillée : tuf pour la partie verticale, caliche pour la partie horizontale (technique utilisée pour les deux “ailes” de la str. A-1). Ces deux marches se poursuivent sur toute la longueur du plan incliné, qui est double de celle de la plate-forme A-7 proprement dite ; il existe donc entre celle-ci et la str. A-1 une sorte de terre-plein assez vaste, surélevé de 5 m au-dessus de la place.

Fig. 47 – La cache centrale de la str. A-5. a/ vue face à l’est ; b/ profil ouest-est.

Fig. 48 – La plate-forme de la str. A-7 : autel central, murs de superstructure parallèles et petit escalier (?).

208Sur la face est le mur de soutènement, fait de galets, s’adapte à la pente pour disparaître au bout d’une vingtaine de mètres, remplacé, un peu en retrait, par le mur du deuxième gradin, qui atteint, lui, l’angle sud-est de la terrasse.

Fig. 49 – La tombe 4. a/ dalle de tuf couvrant la tombe ; b/ vue oblique de la tombe après enlèvement de la dalle du toit ; c/ la tombe vidée de son remblai ; d/ détail du mobilier.

209La str. A-7 est bordée vers le nord, sur toute sa longueur, d’une plate-forme étroite (1,50 m) formant une sorte de gradin intermédiaire entre les deux marches de tuf et la plate-forme du sommet ; de ce terre-plein, un petit bloc (escalier d’une ou deux marches ?) mène à la plate-forme (fig. 48).

210La surface de la plate-forme, nettoyée de la couche d’humus qui recouvre un sol de terre jaunâtre peu net, révèle plusieurs détails remarquables. Deux murs de galets, parallèles et à faible distance du mur de soutènement sud, sont conservés sur environ 2 m de longueur. Leur face appareillée est vers le nord. Au pied du mur extérieur, on a enterré un vase cylindrique incomplet, qui devait être stuqué et peint, et porter un décor appliqué aujourd’hui disparu. Toujours dans l’axe de la plate-forme, bien qu’un peu décalé vers le sud, un petit autel carré, fait de galets, se trouve à peu près au centre de la plate-forme.

211Ces vestiges semblent indiquer l’existence, sur la plate-forme A-7, d’une superstructure de pierre, analogue à celle de la str. A-1, dont nous aurions partiellement mis au jour le mur sud et peut-être celui d’une banquette intérieure. Le fait que cet édifice n’ait pas été comblé et recouvert, comme le temple de A-1, expliquerait sa disparition presque totale.

La fouille centrale (opération C)

212Faite au centre exact de la plate-forme, elle a dû être agrandie vers le sud, en détruisant l’autel, par suite de la découverte de la tombe 4, à 60 cm de profondeur. À ce niveau, une grande dalle de tuf est mise au jour ; elle repose sur une rangée de galets dessinant la forme ovale de la tombe. Les dimensions de celle-ci sont de 0,85 x 1,15 m, grand axe nord-sud. L’ouverture est au nord, barrée par une dalle de schiste mauve qui s’est inclinée vers l’intérieur sous le poids d’un blocage de pierres.

213Les murs de la tombe 4 sont faits de galets en rangées débordantes formant un encorbellement sommaire. Cette fausse voûte s’est révélée trop instable pour être complétée vers le haut, où elle a été remplacée par la dalle de tuf (détail à rapprocher de la destruction du toit de la tombe 3).

214La tombe, profonde de 80 à 90 cm, est remplie de sable gris mélangé de gravier. Ce remblai contient quelques fragments osseux, une perle de jade et deux petites perles grises, ce qui prouverait que la tombe a été volontairement comblée avant d’être refermée. Ceci implique un remplissage par le haut, grâce à la dalle de tuf amovible, alors que la porte nord était déjà condamnée. Nous verrons plus loin les conclusions qu’on peut tirer de cette observation.

215La tombe 4 contient trois squelettes d’adultes, apparemment en connexion (fig. 49) : il s’agit de sépultures primaires. Les corps ont été placés dans la partie sud, appuyés au mur de la tombe. Le squelette C/15 est celui d’un adulte jeune couché sur le dos en position repliée ; l’axe du corps est nord-sud, la tête a roulé sur le côté droit. L’avant-bras droit est engagé sous les jambes, le bras gauche replié, main sur l’épaule. Les os sont en bon état ; on observe plusieurs caries du collet sur les molaires, et une déformation artificielle du crâne. Les deux autres squelettes sont incomplets (l’absence de dents, en particulier, est notable) et visiblement plus anciens si l’on en juge par l’état de leurs ossements. Ces deux adultes âgés auraient été placés en position repliée, accroupis face à la paroi : les crânes sont tombés vers l’arrière. Certains os ont été dispersés (sacrum et vertèbres du squelette ouest, entre autres).

216Le mobilier occupe la partie nord de la tombe, près de la porte. Il comprend six poteries (C/3 à 8), toutes typiquement tardives : trois vases “Tohil Plombé” (dont un zoomorphe), un vase tripode rouge en forme de “lampe de cheminée”, un bol tripode rouge à supports moulés, et un petit vase “Orange Fin” contenant six objets, perles ou pendentifs de jade, de pierre verte micacée ou de pierre grise. Il y avait, au-dessus des squelettes, encore quelques offrandes : un pendentif ovale de jade, un bâtonnet de stéatite à incision circulaire, etc.

217La fouille stratigraphique poursuivie au nord de la tombe jusqu’à 3 m de profondeur, n’a révélé aucune superposition ; elle prouve que cette partie du soubassement de la str. A-7 est entièrement artificielle. Le remblai, de sable et de galets entassés, contient des tessons assez abondants (environ 1000), qui datent essentiellement du Classique tardif, avec très peu de préclassique.

Conclusion sur la str. A-7

218Cette structure, soubassement et plate-forme, a été construite en une seule fois, en profitant de la pente naturelle et en s’appuyant à l’ouest sur les gradins de la pyramide A-1. Elle n’était accessible que par le haut, grâce à l’escalier latéral descendant de la plate-forme de cette pyramide.

219La plate-forme de A-7 supportait sans doute une construction de pierre (ou partiellement de pierre) avec banquette (?) et autel central, dont la fonction était certainement cérémonielle, car nous n’avons trouvé aucune trace d’organisation domestique. Le grand espace réservé entre les str. A-1 et A-7, et l’immense plan incliné recouvert de dalles blanches devaient avoir une signification esthétique et cérémonielle importante dans l’ensemble du groupe A : on accédait en effet à la grande place en passant entre la str. A-7 et le jeu de balle.

220Bien que nous n’ayons pas mis au jour de superposition indiquant plusieurs phases de construction, le contenu de la tombe 4 pourrait bien indiquer l’existence de deux phases, tout-au-moins sur le plan funéraire. En effet, l’état des ossements prouve que les trois corps n’ont pas été déposés en même temps dans la tombe : dans un premier temps, on aurait enterré les deux adultes âgés, en utilisant l’ouverture normale, c’est-à-dire la porte nord. Dans un deuxième temps, la tombe aurait été rouverte par le haut, pour y déposer l’adulte jeune, et peut-être aussi les offrandes, puis comblée et refermée par la dalle de tuf. Quoi qu’il en soit, nous pouvons dire que la str. A-7 date du Classique tardif et que la tombe 4, au moins dans un dernier stade, est du Classique terminal.

Fig. 50 – Plan et profil de la str. A-7.

8 – LES PUITS STRATIGRAPHIQUES

221Outre les sondages de C. Ericastilla en 1977, qui n’avaient pas fourni de matériel, nous avons effectué deux puits stratigraphiques de 2 x 2 m dans la grande place.

222L’emplacement du premier (opération S) a été choisi à proximité de l’angle sud-est de la str. A-2, zone qui avait livré une grande quantité de tessons préclassiques au cours du dégagement de l’aile sud de A-2. La fouille a été abaissée jusqu’au niveau – 240 sans donner une stratigraphie nette. Si le matériel est abondant – plus de 2000 tessons – il est aussi peu caractéristique, et apparemment mélangé puisqu’on trouve du préclassique dans les couches supérieures, et du classique tardif, et même du postclassique jusqu’à – 200 (l’hypothèse d’une erreur de marquage n’est pas exclue). Toutefois, le niveau – 125 à – 150 paraît important, d’une part par la diminution brutale du nombre de tessons, d’autre part par la présence de deux sépultures d’adultes à même le sol. L’un des individus, en décubitus dorsal, a les jambes légèrement pliées sur le côté gauche ; la tête repose sur le côté droit, l’axe du corps est sud-nord. Du deuxième individu nous n’avons dégagé qu’un tibia et un pied en connexion. Le niveau des squelettes correspond bien à celui des sépultures les plus basses mises au jour sous l’escalier de la pyramide A-2 ; nous pensons qu’elles sont, comme ces dernières, préclassiques ; l’état des ossements, très concrétionnés, semble le confirmer.

223Le puits V a été fait au centre de la place, légèrement décalé vers l’est par rapport à celui de C. Ericastilla. Il a été abaissé jusqu’à – 260. Comme pour le précédent, la stratigraphie est floue et le matériel peu abondant : 963 tessons. On trouve jusqu’au niveau – 200 du classique tardif ; le préclassique, qui apparaît dès la surface, devient un peu plus abondant à partir de – 100. À ce niveau, une grande quantité de pierres, entassées sur 1 m de hauteur, pourrait résulter de l’effondrement d’une construction. Au niveau – 175 à – 200 sont apparus sur deux parois de la fouille des ossements humains concrétionnés ; les squelettes n’ont pas été entièrement dégagés. L’aspect des os est tout-à-fait comparable à celui des squelettes du puits S, et l’on peut supposer qu’ils sont contemporains. Nous aurions donc, entre 1,50 m et 2 m sous la grande place, un niveau de sépultures qui pourraient correspondre à des enterrements à même le sol, pratiqués au Préclassique tardif, probablement sous les habitations.