Etudes des groupes d’intérêt en Egypte
Aspect international et aspect particulier
p. 85-98
Texte intégral
1Le processus de représentation est considéré, dans les sciences politiques, comme un important domaine de recherche. Etant donné l’origine occidentale de cette science, qui naquit précisément aux Etats Unis d’Amérique, les chercheurs ont accordé une grande attention aux groupes d’intérêt qui témoignent de l’importance et des exigences des forces économiques et sociales dans le cadre d’un système politique donné.
2Dans cette perspective, nous pouvons constater le lien entre l’étude des groupes d’intérêt, d’une part, et le pluralisme politique et le cadre démocratique, de l’autre. Ces groupes représentent, dans la littérature occidentale, la confirmation des libertés démocratiques fondamentales, à savoir, la liberté d’opinion, la liberté d’expression et la liberté de réunion1. Leurs activités déterminent même la relation entre la société et l’Etat ou reflètent plutôt la philosophie de cette relation. Ces activités sont de nature à accroître le rôle de l’individu en ce qui concerne l’exercice de ses libertés et de ses droits et à contracter le rôle de l’Etat vis-à-vis de la société2. Donc, selon l’analyse du système, à laquelle se réfèrent la plupart de ces ouvrages, les groupes d’intérêt contribuent à la sauvegarde de l’équilibre que désire la société et garantissent la stabilité et le maintien de l’ordre3.
3Les différents ouvrages interprètent la concurrence comme étant un instrument primordial pour gouverner l’activité de la société et non pas seulement les groupes d’intérêt. La concurrence est en fait le résultat du pluralisme politique qui refuse la prédominance d’une certaine tendance sur le mouvement de la société et préconise la réaction libre entre les groupes aux fins d’organiser la lutte au sein de la société. La valeur de la concurrence dans le contexte du pluralisme politique est liée naturellement à l’importance de la négociation et de la conciliation comme étant les moyens fondamentaux d’établir les bases du jeu politique et de réaliser, en définitive, l’équilibre de la société4.
4L’analyse des groupes d’intérêt dans les ouvrages américains se trouve ainsi complétée dans le contexte des règles démocratiques stables et reconnues. La participation de ces groupes est nécessaire pour opérer tout changement de la politique générale. Ils contribuent en effet à la recherche et la discussion des nouvelles politiques, aident à faire le choix convenable et fournissent aux dirigeants politiques les informations dont ils ont besoin, agissant ainsi comme des maisons – conseils. En s’acquittant, par ailleurs, de leur tâche de représentants des intérêts de leurs membres, ces groupes ont souvent recours aux tractations et aux négociations avec d’autres groupes et avec les partis politiques5. Ils profitent bien entendu des canaux de communication adéquats, que leur assure le système démocratique, avec le pouvoir législatif et exécutif (comités et conseils consultatifs) alors que leurs budgets énormes leur permettent de financer des campagnes électorales et de soutenir les candidats qui expriment les voeux du groupe. Ils vont même jusqu’à mobiliser l’opinion publique en faveur de positions et politiques données, se servant, à cette fin, des médias d’information comme voies ouvertes entre eux et la société6.
5Les groupes d’intérêt sont liés, dans les ouvrages américains, au pluralisme politique et aux systèmes démocratiques. Leur activité vient confirmer le pluralisme politique et mettre en valeur les normes démocratiques. Le fait d’accepter la concurrence politique entre les groupes relève des règles du jeu politique qui tend, en définitive, à régler le conflit des exigences et à réaliser l’équilibre.
6Ce lien organique qui unit, dans la pensée occidentale, le pluralisme politique et la démocratie, d’une part, et les groupes d’intérêt, d’autre part, nous explique la négligence relative et l’insuffisance des études consacrées aux groupes d’intérêt dans le système du parti unique – notamment en URSS – et dans les pays du tiers-monde. L’hypothèse qui régnait, en effet, dans les pays occidentaux, jusqu’à la fin des années 60, indiquait que les régimes totalitaires marqués par l’hégémonie du parti communiste et l’absence de l’exploitation en groupe ignoraient tout des groupes d’intérêt. Leur étude a été donc négligée jusqu’au moment où certaines communications ont été publiées sur la nature spéciale de ces groupes d’intérêt au sein de ces communautés7.
7Par ailleurs, dans les pays du tiers-monde aux régimes autoritaires, les groupes d’intérêt mènent – toujours selon ces écrits – des activités restreintes et sont assujettis au pouvoir politique. C’est ainsi que les ouvrages américains se trouvent marqués par un concept spécial du rôle des groupes d’intérêt dans ces communautés, un rôle qui n’a retenu leur attention que dans une période relativement récente8.
8Finalement, une sorte de désengagement a eu lieu entre les groupes d’intérêt d’une part, et le pluralisme politique et le cadre démocratique, de l’autre ; et cette étude se propose de mettre l’accent sur le caractère particulier des groupes égyptiens dans ce domaine. L’étude portera donc sur les trois points suivants :
Les principales tendances qui ont marqué les études occidentales sur les groupes d’intérêt.
L’intérêt accru que portent les chercheurs égyptiens à l’étude des groupes d’intérêt – domaines de recherches et approches.
Les problèmes de la recherche et les résultats des études.
LES ETUDES OCCIDENTALES ET LES GROUPES D’INTERET EN EGYPTE
9Les études occidentales ont porté de l’intérêt au système politique égyptien et à son évolution depuis 1952. Parmi ces études, nombreuses et variées, plusieurs s’intéressent tout particulièrement aux groupes d’intérêt. Mais il serait utile, avant d’analyser les conclusions de ces études, de souligner le fait qu’elles sont toujours influencées par l’opinion occidentale relative au système politique égyptien. La plupart de ces études insistent en fait sur deux points principaux :
10Le premier : le rôle du leader est présenté dans ces études comme la substance du système politique égyptien et presque le seul agent actif.
11Le second : les éléments personnels et non officiels se trouvent, dans la plupart de ces études occidentales, à la base de toute synthèse des relations politiques.
12Bien qu’elle soit particulièrement correcte, cette opinion ne peut expliquer la nature du système politique égyptien ; elle semble même incapable de discuter la problématique de la relation entre la société et l’Etat. C’est une opinion fondée sur des suppositions dans son analyse ou son explication des réactions concernant le processus de représentation des intérêts, car le système politique égyptien est beaucoup plus compliqué et plus imbriqué que la personne du chef d’Etat et les relations de l’élite non officielle qui l’entoure.
13L’observation précédente est d’autant plus importante qu’elle influence nettement les chercheurs occidentaux – les Américains en particulier – qui sont intéressés à étudier les groupes d’intérêt en Egypte. Quelque apprécié que soit leur effort dans ce domaine, ces chercheurs ont fondé leur analyse sur des suppositions puisées dans la culture politique occidentale à laquelle ils appartiennent. Par conséquent, cette analyse a souvent été insuffisante, voire incapable de donner une explication intégrée du processus de représentation des intérêts en Egypte.
14Une autre observation importante qu’il faut noter, à ce propos, concerne les difficultés qui entravent l’étude des groupes d’intérêt. Ce genre d’études exige de nombreuses données et informations précises sur la nature de ces groupes, leur appartenance sociale et économique, les sources d’influence et de puissance du groupe, les mécanismes qui les soutiennent ainsi que la nature de ses relations avec le pouvoir politique aussi bien au niveau officiel que non officiel et autres informations qui ne sauraient être obtenues sans prendre connaissance de rapports et procès-verbaux de réunions et sans procéder à des rencontres personnelles ; ce qui est souvent difficile pour le chercheur, notamment pour celui qui appartient à une culture différente. Il serait également utile de trouver à sa disposition plusieurs études sur des groupes différents et variés du point de vue nature et activités car la possibilité d’une étude comparée aide souvent à obtenir une analyse claire et honnête.
15Telles sont les difficultés auxquelles est confronté le chercheur dans son étude des groupes d’intérêt, difficultés susceptibles de marquer certainement les résultats obtenus. Encore une difficulté à surmonter, le cadre politique dans lequel agit le chercheur. En fait, la nature même des systèmes politiques dans les pays du tiers-monde – systèmes autoritaires pour la plupart de ces pays – a toujours un impact négatif sur la possibilité de recherche concernant cette question ambiguë. L’ordre politique interdit parfois l’accès aux données et informations relatives aux groupes d’intérêt et, parfois, il le permet mais avec beaucoup de difficultés. On ne peut nier toutefois que la liberté académique assurée par le régime politique égyptien au cours des années 1970, ait nettement facilité la tâche du chercheur désireux d’aborder ces sujets. Le pluralisme politique, comme nous le constaterons plus tard, d’une part, a eu son influence sur l’efficacité des groupes d’intérêt et, d’autre part, a permis à la recherche scientifique de se développer dans ce domaine.
16L’ensemble des observations précédentes peuvent nous expliquer les tendances et les résultats des études concernant les groupes d’intérêt en Egypte.
17Les études occidentales concernant les groupes d’intérêt en Egypte sont marquées par une orientation primordiale vers les syndicats professionnels, en particulier l’ordre des avocats9 et le syndicat des ingénieurs10, ou généralement, vers les syndicats professionnels en Egypte au cours d’une période de temps définie11. Vers le milieu de la décennie 1980, et après l’adoption de la politique d’ouverture économique, d’autres chercheurs ont porté leur intérêt aux groupes d’intérêt au caractère économique tels que les chambres de commerce et les hommes d’affaires12.
18La plupart des études, observe-t-on, se sont intéressées principalement aux alliances officieuses au sein de l’élite égyptienne, études que facilitait particulièrement la présence des organisations syndicales. Selon ces études, le système politique égyptien se caractérise par le manque d’institutionnalisation et la prédominance des relations personnelles ou du concept de "bande". Cette opinion émane de la nature même de la culture politique de ces chercheurs, laquelle se dresse comme un obstacle devant l’action collective organisée. Cette opinion a fait l’objet d’une ferme opposition de la part des chercheurs, occidentaux et égyptiens, qui y voient la perpétuation de la vision traditionnelle des orientalistes13. Cette méthode d’analyse a été maintenue même dans les récentes études portant sur les groupes à caractère économique. En discutant, par exemple des hommes d’affaires, le chercheur évoque les trafiquants de devises comme étant un groupe d’intérêt qui influence la politique économique ; en d’autres termes, il traite dans le même contexte le rôle des groupes d’hommes d’affaires et celui des trafiquants de devises sur le marché noir, un groupe illicite. Or nous savons tous que les groupes d’hommes d’affaires qui se sont formés en Egypte dans la période d’ouverture économique se caractérisent par un haut degré d’institutionnalisation et d’organisation.
19La plupart des ouvrages insistent donc sur le manque d’institutionnalisation dans les groupes d’intérêt et sur les relations officieuses qui règnent dans ces groupes (à l’exception de l’étude de Reid) tout en mettant l’accent sur leur efficacité restreinte et leur influence nettement limitée en ce qui concerne l’élaboration des politiques. Les groupes d’intérêt demeurent toutefois un domaine fertile pour l’étude des changements politiques et sociaux.
20Dans son analyse de l’efficacité de ces groupes, Bianchi évoque le concept du "corporatisme" pour expliquer le rôle qu’ils jouent14. La nature autoritaire du régime politique, indique-t-il, permet la présence des syndicats et autres groupes mais elle limite leur indépendance et leur liberté d’action et leur enlève, en définitive, toute efficacité. Il se réfère souvent aux syndicats ouvriers comme exemple typique de ce concept. Le régime politique permet, en outre, un "modèle pluraliste" de groupes d’intérêt comme, par exemple, les groupes d’hommes d’affaires créés par la nouvelle politique économique. Donc le modèle de groupes d’intérêt qui prédomine actuellement est un modèle corporatiste mixte, d’un côté, pluraliste, de l’autre. Le premier se caractérise par une efficacité limitée et le second est plus efficace. Ce concept comporte toutefois deux aspects :
L’efficacité des groupes d’intérêt, considérée selon l’optique occidentale, implique la liberté de grève des syndicats ouvriers, leur liberté de discuter et de proposer des changements politiques et leur pouvoir d’influencer positivement la prise de décision. Mais la nature différente des groupes d’intérêt en Egypte fait que les syndicats ouvriers, bien qu’agissant dans le cadre du corporatisme, parviennent à influencer la décision politique, mais pour des raisons différentes. Avec leur énorme effectif (trois millions d’ouvriers) ils représentent une force que le décideur ne saurait ignorer. En 1975 comme en 1980, l’opposition des ouvriers aux projets de vente du secteur public a provoqué le repli du gouvernement. De même, leur attitude opposée à la "General Motors", en 1987, a obligé le gouvernement à refuser le projet15. Ce qui veut dire que bien qu’agissant dans le cadre du "corporatisme", les syndicats ouvriers d’Egypte ont été efficaces dans plusieurs cas et ont même eu recours à la grève et aux manifestations (interdites par la loi) pour sauvegarder leurs intérêts.
Bianchi interprète le modèle pluraliste des groupes d’intérêt en Egypte comme étant le reflet du désir du régime autoritaire d’alléger la coercition pour pouvoir survivre. Mais en réalité, ces groupes sont l’expression d’une nouvelle force économique et sociale liée à la politique d’ouverture économique qui, prenant conscience de ses intérêts privilégiés, a estimé nécessaire de former ses propres groupes. Le pluralisme politique restreint leur a permis d’agir en public et de prendre diverses formes légitimes et institutionnalisées. En d’autres termes, il serait difficile de justifier le modèle pluraliste des groupes d’intérêt en Egypte rien que par le besoin de survivre du régime autoritaire, car ce serait ignorer les forces économiques et sociales ainsi que les tendances de développement du système politique. Ces observations critiques mettent en question les approches, par ces études, de l’analyse des groupes d’intérêt.
21La plupart des études précédentes sont basées, en général, sur l’approche structurale et fonctionnelle dans leur analyse des groupes d’intérêt en Egypte et prêtent une grande importance aux relations officieuses. Quelques-unes optent pour une approche économique et politique, notamment les études consacrées aux groupes à caractère économique. Mais dans le contexte des changements économiques, sociaux et politiques en Egypte, il était important d’utiliser les concepts marxistes fondés sur une approche ayant trait aux classes sociales. Il faut encore noter à ce propos que l’utilisation accrue de l’approche économique et politique donnerait des résultats meilleurs. En fait la plupart des études traitent principalement des syndicats professionnels et ne portent qu’un intérêt limité aux groupes à caractère économique, omettant ainsi la dimension comparative. Or la diversité des groupes analysés – quant à la profession et l’arrière-plan social et économique de leurs membres – est de nature à enrichir les résultats de l’étude alors que la mise en valeur de la dimension comparative – non seulement sur le plan professionnel et social mais aussi sur le plan du temps – est de nature à mettre en relief l’efficacité des groupes ainsi que les différentes conceptions de cette efficacité.
22Les principaux traits des études occidentales sur les groupes d’intérêt en Egypte peuvent donc se résumer ainsi :
S’agissant de la recherche, elle est principalement orientée vers les syndicats professionnels.
S’agissant de l’approche, elle est fondée sur la méthode structurale fonctionnelle et sur l’analyse politique des relations officieuses.
L’absence de la dimension comparative et de l’analyse sociale des classes.
Les études insistent sur le manque d’institutionnalisation de la structure politique et considèrent la culture politique comme un obstacle primordial devant la réalisation de l’efficacité.
Elles surestiment la nature autoritaire du régime et le rôle que joue la personne du leader.
Elles négligent l’analyse de la nature particulière des réactions politiques qu’engendre le processus de représentation des intérêts en Egypte.
LES CARACTERISTIQUES DES ETUDES EGYPTIENNES SUR LES GROUPES D’INTERET
23Les chercheurs égyptiens ont apporté, surtout au cours des années 1980, des contributions originales aux études concernant les groupes d’intérêt en Egypte. Ces contributions, nombreuses et variées, se caractérisent par différentes approches et divers moyens de recherche. Elles mettent l’accent sur la particularité de ces groupes dans la société égyptienne et les nouvelles tendances concernant leur développement et leur évaluation au sein du système politique égyptien.
24Mais avant de discuter ces études, il faut mettre en lumière le cadre politique et économique dans lequel elles ont été entreprises. Au milieu des années 1970, le régime politique égyptien a adopté un système pluraliste et déclaré la politique d’ouverture économique, créant ainsi une atmosphère de liberté relative qui a permis aux groupes d’intérêt d’agir plus efficacement et a favorisé l’apparition de nouvelles forces socio-économiques dont les revendications et les intérêts gagnaient de l’importance. Citons notamment les groupes des hommes d’affaires tels que l’Association des hommes d’affaires, le Conseil égypto-américain des hommes d’affaires, la Chambre américaine de Commerce du Caire et autres. Le rôle des groupes d’intérêt s’est donc accru dans le nouveau cadre politique et économique, accompagné d’un autre phénomène important, à savoir la liberté académique qui a permis aux chercheurs égyptiens d’étudier le processus de représentation des intérêts. C’est dans cette atmosphère que se sont multipliées graduellement les études égyptiennes visant à analyser les groupes d’intérêt comme l’un des aspects de développement de l’ordre politique.
25Ces études se caractérisent notamment par la diversité et la multiplicité des champs de recherche. Les études occidentales, nous le savons déjà, se sont intéressées particulièrement aux syndicats professionnels tels que l’ordre des avocats ou des ingénieurs, alors que les études égyptiennes sont allées au-delà de ce champ limité, portant également leur intérêt aux syndicats des journalistes et des médecins16, aux clubs du corps enseignant de l’université, aux artistes17, aux syndicats des instituteurs18 ainsi qu’aux syndicats ouvriers et aux associations d’hommes d’affaires19. Les études des groupes d’intérêt se trouvent ainsi nettement diversifiées. Les syndicats professionnels ne sont plus, tout seuls, le centre de ces études qui s’intéressent désormais aux syndicats ouvriers et aux institutions d’hommes d’affaires et d’enseignants universitaires. Rappelons encore une fois que les études occidentales évoquent toujours l’axe intérieur (ou la politique intérieure) comme champ d’action des groupes d’intérêt, alors qu’en revanche, les études nationales analysent l’activité de ces groupes sur le plan extérieur (ou la politique extérieure)20. Il est nécessaire, en effet, dans le contexte d’une situation économique où l’on souffre du poids de la dette extérieure et où l’on a recours à l’étranger pour obtenir une grande partie de ses besoins fondamentaux, d’étudier le rôle des forces extérieures dans l’orientation de sa politique générale et en particulier sa politique économique et d’analyser les relations de ces groupes avec l’ordre international.
26Les approches des chercheurs égyptiens de la question des groupes d’intérêt se sont également multipliées et diversifiées. Elles ne se limitent plus à l’analyse structurale fonctionnelle mais elles s’étendent à l’économie politique dans le but d’examiner l’interaction des forces économiques et politiques au sein de la société. Elles adoptent même la méthode du système mondial qui insiste sur le rôle des facteurs extérieurs et internationaux pour expliquer les réactions politiques intérieures, comme par exemple le rôle des associations d’hommes d’affaires dans la politique étrangère égyptienne. Il faut noter encore le recours de certains chercheurs à des concepts marxistes basés sur l’analyse de classes, dans une tentative d’observer les groupes d’intérêt dans un cadre social plus large. Parmi ces études, citons notamment celle du syndicat des instituteurs en Egypte et l’analyse de ses relations avec le pouvoir. Ce syndicat groupe un demi million d’instituteurs mais son efficacité est très limitée. Il a été donc nécessaire d’examiner les facteurs socio-économiques qui caractérisent ce groupe et d’analyser sa position de classe comme facteur restrictif de son action.
27Les études égyptiennes traitent les groupes d’intérêt comme étant des organisations officielles ayant un cadre légal et organisationnel qui change avec le temps et avec le changement de tendances du régime politique. Quelques-unes de ces organisations ont gagné une indépendance limitée – les syndicats ouvriers et les chambres de commerce – mais dans ces deux cas, les études égyptiennes n’ont pas perdu de vue les exemples d’alliances officieuses entre les groupes (en particulier ceux qui représentent les intérêts des hommes d’affaires) et au sein du même groupe. Les études égyptiennes se sont donc préoccupées de la structure officielle et officieuse du processus de représentation des intérêts. Comme exemple de l’intérêt que portent les chercheurs égyptiens à cet aspect, citons l’étude des formes d’alliances officieuses entre les hommes d’affaires et certains responsables et membres de l’élite égyptienne et entre les hommes d’affaires et les principaux cadres du secteur public21, et l’étude de l’alliance entre les trafiquants de devises et certains membres du gouvernement et de l’appareil administratif égyptien22..
28Les études égyptiennes se caractérisent, en outre, par la présence claire et nette de la dimension comparatiste soit en ce qui concerne l’efficacité et l’égalité politique entre les groupes dans la représentation des intérêts, soit en ce qui concerne le facteur temps qui permet de détecter la relation entre le cadre politique et économique et l’efficacité des groupes. L’intérêt que soulève le premier point fut à l’origine de l’étude de l’inégalité des groupes d’intérêt en Egypte quant à la position – plus ou moins proche – qu’ils détiennent vis-à-vis de l’Etat et de la réaction de ce dernier à l’égard de ces groupes. C’est là d’ailleurs un trait caractéristique du processus de représentation des intérêts en Egypte. L’étude du second point a mis en lumière l’influence que subit la vitalité des groupes et les instruments qu’ils emploient dans leur représentation des intérêts du fait du changement des orientations du système politique, d’une période à l’autre de l’histoire. Bref, cette dimension comparatiste a pu révéler les orientations du changement des forces économiques et sociales en Egypte et leur liaison à de nouvelles revendications ainsi que l’apparition de forces politiques telles que le courant islamique dont le rôle s’est nettement intensifié au sein des syndicats professionnels au cours des années 1980.
29Dans le contexte de l’intérêt que portent les chercheurs égyptiens à l’étude des groupes d’intérêt, il est aussi important d’évoquer les instruments de recherche qu’ils ont utilisés. Pour collecter les données, ils ont eu recours aux rencontres personnelles avec les membres et cadres des groupes ainsi qu’aux procès-verbaux des réunions des assemblées générales et des conseils d’administration. Dans une étude consacrée à l’ordre des avocats, un chercheur a pris connaissance de plus de 500 procès-verbaux de réunions du groupe entre 1952 et 198123. Il a pu ainsi se renseigner sur les réactions véritables du groupe et sur les types de relations entre chacun de ses membres. Les chercheurs se sont servis également des rapports, des périodiques et de la correspondance émanant du groupe ainsi que des procès-verbaux des réunions de l’Assemblée du peuple afin de pouvoir évaluer la position des cadres de certains groupes au parlement et décider de la qualité de leur représentation des intérêts de leurs membres24. Ces procédés viennent s’ajouter naturellement aux moyens de recherche traditionnels – travail de bureau – qui consistent à analyser les documents des groupes, le développement de leur cadre légal et organisationnel et les reportages et articles publiés dans la presse sur leurs problèmes.
30Les rencontres personnelles et l’analyse des procès-verbaux des réunions des groupes et de l’Assemblée du peuple apparaissent donc comme de nouveaux instruments d’étude qui aident le chercheur à évaluer les tendances au développement et l’efficacité des groupes d’intérêt. C’est ainsi que les approches variées, l’importance accordée à la dimension comparatiste et la complémentarité des moyens de recherche ont pu mettre en évidence la particularité des groupes d’intérêt en Egypte et enrichir les résultats obtenus par les chercheurs.
LES PROBLEMES DE LA RECHERCHE ET LES RESULTATS LES PLUS IMPORTANTS
31Quoique variées, les précédentes études égyptiennes relatives aux groupes d’intérêt ont insisté, toutes, sur un certain nombre de sujets ou de problèmes.
32Le premier de ces problèmes de recherche concerne la nature de la relation entre la société civile et l’Etat. Il existe en effet un processus d’interaction complexe et enchevêtrée entre les deux parties. L’étude de l’ordre politique, sous cette perspective, est de nature à dépasser l’optique traditionnelle, laquelle insiste sur la personne du leader ou du dirigeant comme étant l’artisan unique de la politique générale en Egypte ou sur les relations non-officielles comme étant le contexte qui justifie cet ordre politique. C’est dans ce cadre que se développent les tentatives menées par la société civile – grâce aux groupes d’intérêt – pour acquérir une indépendance accrue. Dans le même temps, l’Etat s’efforce, grâce à divers mécanismes, de restreindre cette indépendance et de préserver sa propre puissance et son pouvoir. L’enquête entreprise sur la période 1952 – 198125 met en évidence les divers processus d’interaction entre les deux parties, l’Etat et les groupes d’intérêt alors que les monographies spécialiées sur certains groupes d’intérêt montrent la concrétisation de ces tentatives. En effet, les chambres de commerce et les syndicats ouvriers jouent un rôle important dans la prise de décision politique bien que le statut légal et organisationnel de ces groupes soit lié à l’Etat tant sur le plan financier que sur le plan administratif . Une autre étude sur les syndicats ouvriers ajoute des détails sur les méthodes de tentation et d’intimidation pratiquées par l’Etat pour contenir l’action syndicale en Egypte26. Un autre chercheur, dont l’étude est consacrée à la nature de la relation entre la société et l’Etat, discute de la représensation des intérêts entre les ouvriers, d’une part, et les hommes d’affaires de l’autre27 et s’interroge principalement sur les mécanismes d’interaction entre chacune de ces deux parties et l’Etat. L’étude affirme que malgré l’inégalité des syndicats ouvriers et des groupes d’hommes d’affaires – ces derniers jouissent d’un haut degré d’indépendance qui leur donne une certaine puissance – les syndicats ouvriers sous un autre aspect, ne manquent pas d’efficacité. En fait ces syndicats, dont les effectifs s’élèvent à trois millions de membres, ont pu empêcher la promulgation par l’Etat de plusieurs projets de loi concernant le secteur public et les projets étrangers.
33La nature de la relation entre la société civile et l’Etat représente donc un problème pour les chercheurs égyptiens étudiant les groupes d’intérêt.
34La deuxième question qui soulève l’intérêt de ces chercheurs est le rôle politique de certains syndicats, en particulier celui des syndicats professionnels. A ce propos une importante thèse de doctorat a été soumise à la section de sciences politiques de la Faculté d’Economie sur les syndicats des avocats, des journalistes et des ingénieurs dans la période de 1952 à 198128. Le chercheur a insisté notamment sur l’ordre des avocats qui, dès le début du 20ème siècle, n’a cessé de jouer un rôle important sur le plan politique national. C’est l’exemple de groupe dont les préoccupations ont dépassé les bornes de ses propres intérêts syndicaux et professionnels et se sont étendues à la cause de la démocratie et aux problèmes de la politique étrangère (notamment ceux qui concernent le conflit arabo-israélien et la cause arabe).
35Une monographie sur le syndicat des instituteurs se propose, en outre, à propos du rôle politique des groupes d’intérêt et de la nature de la relation entre ces groupes et le pouvoir, de répondre à une question inverse : pourquoi le syndicat des instituteurs n’a-t-il pas joué un rôle primordial en Egypte malgré la nature du groupe et l’importance de ses effectifs (un demi million d’instituteurs)29 ? Cette étude se penche sur les facteurs qui déterminent la nature de ce rôle politique et, dans sa réponse à la question posée, se livre, non pas à une analyse de la relation du groupe avec le pouvoir qui témoigne d’ailleurs d’un manque d’indépendance, mais une analyse socio-économique des membres du groupe ; elle examine également l’impact de la nature même de la profession sur la formation de l’opinion du groupe et la détermination de son attitude à l’égard du pouvoir politique.
36La troisième question qui attire l’attention des chercheurs égyptiens est l’influence des changements politiques et économiques sur les groupes d’intérêt. En fait les changements opérés par la déclaration du pluralisme politique et l’adoption de la politique de liberté des forces du marché ont eu une nette influence sur les groupes d’intérêt qui jouissent désormais d’une liberté relativement plus grande dans la représentation de leurs intérêts et s’intéressent, par conséquent, à de nouveaux problèmes économiques et politiques (le système de partis politiques, la liberté d’opinion, la démocratie, la politique d’ouverture économique et ses problèmes). Sont apparues en même temps de nouvelles associations d’hommes d’affaires aux intérêts liés à la nouvelle politique économique. Ces associations ont formulé des revendications visant à consolider le secteur privé et à encourager l’investissement. Leurs préoccupations se sont étendues, bien entendu, aux questions de l’enseignement (encouragement de l’enseignement technique, création de l’université libre...) et de la main d’oeuvre (l’abandon par l’Etat de sa responsabilité en égard à l’emploi des diplômés, amendement de la loi du travail, etc.).
37Ces changements économiques et politiques occupent une partie des études égyptiennes sur les groupes d’intérêt, lesquelles s’intéressent principalement aux associations des hommes d’affaires, à l’origine de ces associations, aux caractéristiques de leurs membres, c’est-à-dire leur fortune, leur influence politique et leur domaine de travail. Elles se soucient également de mettre en évidence les alliances et les formes de solidarité entre les groupes d’hommes d’affaires ainsi que la nature de leur relation avec le pouvoir exécutif, d’une part, et le pouvoir législatif, d’autre part30.
38On peut dire finalement que les caractéristiques du processus de représentation des intérêts en Egypte représentent pour les études égyptiennes un autre problème de recherche. Ces études insistent notamment sur l’inégalité des groupes d’intérêt auprès du pouvoir et sur la nature de réaction de ce dernier à leur égard (AL-Sayyid, 1986), (QANDIL, 1989). Certes, la représentation des intérêts ne saurait, d’une manière générale, garantir l’égalité politique entre les groupes en raison de leur différente importance, mais cette inégalité est trop marquée dans la société égyptienne. C’est là une réalité d’autant plus importante qu’elle contribue inévitablement à l’intensification du déséquilibre entre les forces économiques et sociales au sein de la société.
39Telles sont les questions qui représentent, pour les chercheurs égyptiens, les principaux problèmes de recherche. Reste à savoir : Quels sont les principaux résultats de ces contributions qui soient de nature à refléter la particularité des groupes d’intérêt en Egypte ?
40Selon ces études, la relation des groupes d’intérêt avec le pouvoir exécutif est toujours plus importante que leur relation avec le pouvoir législatif. Ces groupes, indiquent les études égyptiennes, comptent dans leur action sur des facteurs liés aussi bien au pouvoir exécutif qu’au pouvoir législatif, mais c’est surtout vers le premier que se dirige l’expertise égyptienne car les groupes d’intérêt sont parfaitement conscients de la nature du régime politique égyptien où le pouvoir exécutif prédomine sur le pouvoir législatif. Aussi ont-ils recours, dans leur tentative de représentation de leurs intérêts, aux contacts officiels et non officiels avec les membres du gouvernement et les responsables politiques. Par contre, ils ne pensent jamais à établir des contacts avec le pouvoir législatif ou mobiliser leurs cadres en vue de participer aux élections parlementaires. Une étude sur la position adoptée par les groupes d’hommes d’affaires à l’égard des dernières élections à l’Assemblée du peuple met l’accent, cependant, sur le caractère particulier de l’un de ces groupes, à savoir la commission économique des hommes d’affaires d’Alexandrie (QANDIL, 1988). En fait. onze cadres de ce groupe ont pris part à la bataille électorale et ont réussi aux élections. Les procès-verbaux des réunions de l’Assemblée témoignent de l’action de ces membres en faveur des intérêts des hommes d’affaires, du renforcement du secteur privé et de la restriction du rôle de l’Etat. Mais il faut surtout souligner que les principes et slogans lancés par ces députés durant la campagne électorale se sont avérés nettement différents de leurs réalité sociale et économique et de l’opinion qu’ils formulent au sein de l’Assemblée.
41Un autre aspect particulier non moins important est la nature de la relation entre les partis politiques et les groupes d’intérêt. Nous avons déjà su, grâce aux études de l’expertise occidentale, que les groupes d’intérêt comptent, dans la défense d’une politique donnée, sur leur alliance avec l’un ou l’autre parti politique mais, dans le cas de l’expertise égyptienne, cette relation reste incertaine et confuse. Dès la proclamation du pluralisme politique en Egypte, les cadres de certains groupes d’intérêt ont tenu à affirmer leur neutralité et à écarter toute formule de communication avec les partis, comme dans le cas des syndicats ouvriers et de certains groupes d’hommes d’affaires (l’Association des hommes d’affaires égyptiens). Par ailleurs, d’autres syndicats professionnels (ordre des avocats) ont été témoins, au cours des quelques dernières années, de conflits entre les cadres du groupe. Ces conflits qui prennent source dans la crise démocratique intérieure n’ont pas manqué cependant d’être imputés à l’appartenance aux partis politiques des cadres et au transfert de la lutte partisane à l’intérieur du syndicat. En d’autres termes, la relation entre le groupe d’intérêt, en tant que tout et les partis politiques est une relation particulière ; aucune alliance précise entre les deux parties n’a été concrétisée en vue d’appuyer une politique ou une décision.
42Ayant ainsi analysé la relation des groupes d’intérêt avec les partis politiques, les études ont également mis en évidence l’entrée de forces politiques telles que le courant islamique dans le champ d’activité syndicale31. Ce phénomène s’est manifesté graduellement, avec le commencement de la décennie 1980, au sein de quelques syndicats professionnels, en particulier les syndicats des médecins, des ingénieurs et des avocats ainsi que les clubs du corps enseignant. Il faut noter, jusque là, l’absence du courant islamique – en tant que force politique – des syndicats ouvriers et des groupes d’hommes d’affaires, un phénomène dû à la nature des membres de ces groupes et leur étroite liaison avec les problèmes politiques et économiques.
43Il est clair, cependant, que l’absence d’un cadre ou parti légitime représentant les forces islamiques a poussé ces dernières à l’action dans d’autres domaines tels que l’activité syndicale. Les chercheurs mettent l’accent, à ce propos, sur le succès de ce courant aux élections des conseils des syndicats et sur son pouvoir de mobilisation des partisans grâce à une action strictement organisée et liée aux problèmes fondamentaux des membres du syndicat ainsi qu’au changement de la nature même de l’activité syndicale qui prend, en partie, un cachet islamique mis en valeur par des conférences et séminaires et par des projets à caractère islamique.
44Le dernier des résultats importants obtenus par les études égyptiennes sur les groupes d’intérêt a trait aux orientations de l’ordre économique international et des super-puissances. Certains réactions concernant les groupes d’intérêt en Egypte se sont manifestées, en effet, dans le cadre de l’aclion en faveur de l’internationalisation du capitalisme et de la consolidation du processus de privatisation. Quelques-uns de ces groupes – comme les groupes d’hommes d’affaires – ont des intérêts liés à ceux de ces forces et cette communauté d’intérêt s’est répercutée sur l’action de ces groupes et leurs rapports avec l’étranger. A noter que certains de ces groupes, comme la Chambre américaine de commerce au Caire et le Conseil égypto-américain ont été établis avec l’assistance primordiale des Etats-Unis d’Amérique ; ce qui justifie le rôle que jouent ces groupes dans le domaine de la politique étrangère égyptienne. Ce rôle a été d’ailleurs mis en évidence lors des négociations sur l’assistance économique américaine à l’Egypte. Ces groupes – qui représentent en effet la façade du capitalisme égyptien – ont joué un rôle dans les négociations avec Washington sur le volume de l’assistance. Ce résultat est d’autant plus important qu’il souligne la particularité du rôle que jouent parfois les groupes d’intérêt et la nature de leur relation avec les forces extérieures32.
*
45L’étude des groupes d’intérêt en Egypte telle qu’entreprise par les chercheurs égyptiens indique que les tendances et domaines de recherche diffèrent de ceux que traitent les études occidentales. Elle fait état de réactions en ce qui concerne le processus de représentation des intérêts et précise que l’inclusion des groupes d’intérêt dans des concepts ou des formules théoriques rigides ne saurait aboutir à des résultats corrects. L’efficacité de ces groupes varie, en effet, d’une période à l’autre et selon les questions politiques abordées. Il est donc utile d’étudier ces groupes en tant qu’organisations ou institutions tout en gardant de négliger les alliances officieuses au sein même des groupes ou avec les responsables politiques. L’étude des groupes d’intérêt en Egypte a donc mis en évidence l’interaction profonde entre la société civile et l’Etat, interaction qui témoigne des tendances de l’évolution du système politique égyptien ainsi que du changement de la situation économique et sociale et de la pression des exigences. La multiplicité et diversité des études consacrées à ces groupes ainsi que la complémentarité des approches de recherche sont de nature, en définitive, à offrir une contribution à la théorie des groupes dans les pays du tiers-monde.
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Notes de bas de page
1 – Voir : – Berry (Jeffry M.), The Interest Group Society, Boston, Little, Brown and company, 1984 ; Gicler (Allan J.) et Loomis (Burdett A.), Interest Group Politics, Washington, D.C., Gongressional Quarterly inc. 1986) ; Lipson (Lesli), The Great Issues of Politics : An Introduction to Political Science, N.J. Prentice Hall inc, 1985.
2 – Voir : Keane (John) (ed.). Civil Society and the State, New York, Verso, 1988 ; Migal (Joel S.) Strong Societies and Weak States, State Society Relation and State Capabilities in the Third World, New Jersey, Princeton University Press, 1988 ; Stepan (Alfred), The State and Society, Peru in Perspective, Princeton, Princeton University Press, 1978.
3 – Growth (Alexander J.), Comparative Politics, a Distributive Approach, New York, The Macmillian Company, 1978, p. 120. Sharkansky (Ira), The Politcy Predicament, Marking and Implementing Public Policy, San Francisco, W.H., Freedon & Company, 1978, pp. 265-267.
4 – Mitchell & Mitchell, Politics, Problems and Out Comes, Chicago, Rand McNally & Company, 1971, p. 438-443. Truman (David), The Governmental Process, New York, Knopf Alfred, 1951, p. 157. Sharkansky, op.cit, p. 236.
5 – Berry (Jeffrey M.), op.cit., pp. 46-66. Lindblom (Charles E.), The Policy – making Process, New Jersey, Prentice Hall inc., 1980, pp. 17-81.
6 – Sharkansky, op. cit, pp. 151-152.
7 – Skilling (Gordon) et Griffithis (Franklin), Interest Groups in Soviet Politics, Princeton, Princeton University Press, 1971. "Interest Groups and Communist Politics revisted", World Politics, Vol. 36, No 1, (Oct. 1983) pp. 1-27.
8 – Voir : Almond et Powell, Comparative Politics, System, Process and Policy, Boston, Little Brown and company, 1978. Capalombaro (Joseph) (ed.), Bureaucracy and Political Development, Princeton, Princeton University Press, 1963. Stephan (Alfred), op.cit, pp. 46- 73. Schmitter (Philippe C.), "Still the century of corporatism", in Pike (Frederik B.) et Stritch (Thomas) (eds.), The New Corporatism Social Political Structure in The Iberian World, University of Notre Dame Press, 1974, p. 96.
9 – Reid (Donald), "The Rise of professions and professional organizations in Modern Egypt "Comparative Studies in Society and History, vol 16, (1974), pp. 24-57.
10 – MOORE (Clement Henry), Images of Development. Egyptian Engineers in Search of Industry, Cambridge (Massachussetts) and London, M.I.T. Press, 1980.
11 – Springborg (Robert), " Professional syndicales in Egyptian politics, 1952-1970", International Journal of Middle East Studies, n° 9, (1978), pp. 275-295 ; Idem, "Patterns of Association in the Egyptian Political Elites", in Lenczowski (Georges) (ed.), Political Elites in the Middle East. Washington, American Entreprise Institute for Public Policy Research, 1975, pp. 83-108.
12 – Bianchi (Robert), "The corporatization of the Egyptian Labor Movement", The Middle East Journal, Volume 40, n° 3, (été 1986), pp. 422-444 ; Idem, "Businessmen’s Associations in Egypt and Turkey", The Annals of the American Academy of Political and Social Science, vol. 483, (Nov. 1985).
13 – Al-Sayyid (Mustafâ Kâmil), "Interest Croups Perspective and The Study of Arab Politics", Seminar on Arab Studies, Cairo, American University, 1987, pp. 3-4.
14 – Bianchi (Robert), "Interest group politics in the third world", Third World Quarterly, Avril 1986, pp. 507-531 ; Idem, "Changing Pattern of Interest Representation in Modern Egypt", Le Caire, The American University, 1987.
15 – Qandil (Amânî), "Labor and Bussiness Interest Representation in Egypt", Conference on Dynamics of States and Societies in The Middle East, Le Caire : Juin 1989.
16 – ‘Abd al . Mun’im (Ahmad Fâris), Interest Groups and Political Powers in Egypt, A Case study of Lawyers, Journalists, and Engineers syndicales during 1952 – 1981, Le Caire, Faculté d’Economie et de Science politique, Ph. D. Thesis, 1984.
17 – Voir : "Interest Groups in Egypt", in al-Taqrîr al-istrâtijî al-’arabî. Le Caire, Centre d’Etudes politiques et stratégiques d’al-Ahâm, 1988. Voir aussi même rapport 1986, 1987.
18 – Qandil (Amânî), "Interest Groups and Political Power in Egypt, A Case Study of Teachers Syndicate", Le Caire, Première conférence annuelle de science politique en Egypte, Faculté d’Economie et de Science politique, 1987.
19 – Qandil (Amânî), "Interest Groups and the Evolution of the Egypdan Political System", Le Caire, séminaire conjoint de la Faculté d’Economie et de la Chambre de commerce, 1987.
20 – Qandil (Amânî), "Interest Groups and Foreign Policy, A Case Study of Bussiness Associations in Egypt", Le Caire, Faculté d’Economie et de Science politique, 1988.
21 – Qandil (Amânî), Interest Groups and the Evolution ofop.cit, pp. 14-17.
22 – al-Sayyid (Mustafâ Kâmil), Studying Interest Groups in Egypt. Some theoritical issues. Le Caire, séminaire conjoint de la Faculté d’Economie et de la Chambre de commerce, pp. 2-3.
23 – "Abd al-Mun’im (Ahmad Paris), op.cit.
24 – Qandil (Amânî), "Interest Croups and Legislative Power. A case study of bussiness Association", In People Assembly’s Election, 1987, Le Caire, Centres d’Etudes politiques et stratégiques d’al-Ahrâm, 1988, pp. 69-89.
25 – al-Sayyid (Mustafâ Kâmil), Society and Politics in Egypt. Role of Interest Groups in the Egyptian Political System, Le Caire, Dâr al-mustaqbal al-‘arabî, 1983.
26 – ‘Abd al-Mun‘im (Ahmad Paris), "Interest Groups", in Dessouki (‘Alî El-Din Hillal) (ed.), Egyptian Political System and Challenges of the Eighties, 1982 – 1952, Le Caire, Nahdat al-charq, 1986, pp. 241-310.
27 – Qandil (Amânî), Labor and Bussiness Interest Representation..., op.cit.
28 – ‘Abd al-Mun‘im (Ahmad Fâris), Interest Groups and Political Powers..., op.cit.
29 – Qandil (Amânî), Teacher Syndicale..., op.cit.
30 – Qandil (Amânî), al-Taqrîr..., op.cit., pp. 343-358.
31 – Qandil (Amânî), "Islamic political power and Interest", Qadâyà Fikriyya, Le Caire, juillet 1987.
32 – Qandil (Amânî), Interest Croups and Foreign Policy, op.cit.
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