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    Plan détaillé Texte intégral La boutique comme objet d’étude privilégié pour restituer l’économie urbaine À l’échelle individuelle du lieu de métier : les transformations architecturales et fonctionnelles À l’échelle du complexe commercial : conséquences de l’évolution du parcellaire et stratégies d’investissement À l’échelle globale de la ville : paysage économique et dynamiques urbaines Notes de bas de page Auteur

    Performances économiques de l’Empire romain

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    Table des matières

    Apports des données archéologiques pour la compréhension de l’économie antique : les boutiques de la moyenne vallée du Rhône comme cas d’étude

    Marine Lépée

    p. 109-130

    Texte intégral La boutique comme objet d’étude privilégié pour restituer l’économie urbaine À l’échelle individuelle du lieu de métier : les transformations architecturales et fonctionnelles À l’échelle du complexe commercial : conséquences de l’évolution du parcellaire et stratégies d’investissement À l’échelle globale de la ville : paysage économique et dynamiques urbaines Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Aux côtés du commerce de gros et des échanges à longue distance, le commerce de détail occupe une place prépondérante au sein des mécanismes de l’économie antique. Il prend la forme d’activités de vente et de petite production à destination d’une clientèle de particuliers, intégrées aux réseaux des échanges de proximité. La mise en évidence archéologique du cadre construit et des équipements nécessaires à ces activités est riche d’enseignements : il est ainsi possible de restituer tout à la fois la diversité des pratiques commerciales et l’organisation complexe du monde du travail urbain, mais également la vitalité des investissements et la prospérité économique des sociétés anciennes. De même, en mobilisant conjointement les sources épigraphiques, il nous est permis de mieux cerner la pluralité des acteurs de la micro-économie impliqués dans ces activités (clientèle, détaillants, producteurs, propriétaires fonciers), révélateurs du dynamisme des réseaux commerciaux1. Les données concernant les espaces de production et de distribution dans les villes de Gaule romaine constituent de ce point de vue un riche vivier documentaire à exploiter2, grâce à l’exploration archéologique des centres urbains par les fouilles préventives récentes et à la reprise de vastes corpus issus des fouilles anciennes.

    2La moyenne vallée du Rhône, à l’interface entre le monde méditerranéen et les provinces septentrionales, représente un terrain propice à l’analyse du commerce en Gaule. Les données archéologiques y ont été jusqu’à présent particulièrement mobilisées dans l’objectif de restituer les échanges à longue distance, à partir des flux de marchandises et des réseaux de professionnels à leur tête. L’axe fluvial rhodanien, doublé d’un réseau terrestre très efficace mis en place par Agrippa à la fin du ier siècle avant J.-C., est en effet jalonné de centres urbains et portuaires qui sont autant de points de rupture de charge des marchandises, notamment à partir de l’époque augustéenne. Les colonies de Lugdunum et de Vienna y jouent un rôle majeur : l’une fondée en 43 avant J.-C., capitale de la province de Lyonnaise, s’implante initialement au sommet de la colline de Fourvière avant de se développer à partir de l’époque tibéro-claudienne sur une presqu’île viabilisée entre Rhône et Saône ; l’autre, capitale des Allobroges, prend la forme d’une duplex urbs de part et d’autre du Rhône, le centre monumental de la colonie se développant sur la rive gauche, complété par des îlots domestiques et commerciaux en rive droite. Leur rôle dans le transit des denrées méditerranéennes et dans l’approvisionnement des armées stationnées sur le limes rhénan a été particulièrement documenté par la diffusion du mobilier céramique3, de même que par la présence de négociants au long cours et de grandes corporations de marchands et de transporteurs, notamment à Lyon, à partir des données épigraphiques4. Mais c’est également à l’échelle locale que ces centres urbains témoignent de leur importance économique et livrent de nombreux vestiges d’édifices dédiés au commerce de détail (boutiques, ateliers, entrepôts). Les similitudes dans les traditions architecturales de ces deux colonies rhodaniennes ainsi que leur insertion dans les mêmes réseaux d’échanges en font des cas d’étude propices à une confrontation. De même, la cohérence chronologique de leur occupation permet de porter un discours sur l’évolution de la place occupée par l’architecture commerciale au sein de leur tissu urbain, ce dernier se développant essentiellement à partir de l’époque augustéenne à Lugdunum et de l’époque tibérienne à Vienna, jusqu’à la désaffectation de la ville haute lyonnaise au profit des quartiers fluviaux et la régression de l’occupation à Vienne au cours du iiie siècle. Il s’agit désormais de s’interroger sur le potentiel de l’analyse des vestiges d’édifices commerciaux découverts dans ces deux colonies, dans le cadre d’une double réflexion d’histoire économique et d’archéologie urbaine.

    La boutique comme objet d’étude privilégié pour restituer l’économie urbaine

    3Nous proposons de faire des boutiques, et des édifices commerciaux au sein desquels elles sont agencées, la porte d’entrée vers une lecture globale de l’économie urbaine des villes rhodaniennes. En effet, plus que toute autre forme architecturale, les boutiques constituent le cadre construit privilégié pour accueillir les transactions commerciales du quotidien. Elles sont une réalité omniprésente des paysages urbains et ont été jusqu’à présent au cœur d’importantes synthèses consacrées majoritairement au territoire italien, polarisées par les cités vésuviennes et Ostie5. Au-delà d’approches essentiellement planimétriques et typologiques qui avaient jusque-là dominé la réflexion, les recherches récentes se sont penchées sur l’insertion des boutiques dans le parcellaire urbain, leurs fonctions ou encore leurs modes de gestion. En Gaule, elles sont principalement évoquées dans le cadre d’études de sites6 ou sont mobilisées dans des travaux sur l’architecture domestique qu’elles complètent7.

    4Les boutiques forment des entités polyvalentes dont la fonction s’adapte aux besoins de la clientèle et, surtout, aux choix des professionnels qui s’y installent et s’y succèdent. À la fois lieux de métier et lieux de vie, elles sont dédiées avant tout à la vente, mais accueillent également des activités de production, d’entretien et de réparation, ou encore de stockage. Dans les colonies de Lyon et de Vienne, il s’agit d’une réalité archéologique particulièrement tangible (fig. 1) : il nous a été permis de recenser, à l’échelle de vingt-six sites archéologiques, près de six cents boutiques toutes phases confondues entre la deuxième moitié du ier siècle avant J.-C. et la fin du iiie siècle après J.-C.8. Agencées au sein de complexes bâtis, elles composent ainsi près de quatre-vingts édifices commerciaux construits à Lugdunum et une trentaine à Vienna. Le dialogue entre études de cas précises et mise en série d’un grand nombre de realia révèle une importante diversité dans les configurations architecturales et spatiales adoptées par les boutiques, mais également dans les métiers attestés (petite métallurgie, travail des matières dures d’origine animale, artisanat verrier, nettoyage des textiles, commerces alimentaires), afin de répondre aux besoins variés qui caractérisent ces agglomérations densément peuplées.

    Fig. 1 — Plan des colonies de Lugdunum et de Vienna avec l’emplacement des sites archéologiques présentant des boutiques.

    Lyon : 1) Clos du Verbe Incarné ; 2) Pseudo-sanctuaire de Cybèle ; 3) Hôpital de Fourvière ; 4) Clos de la Solitude ; 5) Antiquaille ; 6) odéon ; 7) rue des Farges ; 8) rue Auguste-Comte ; 9) montée de la Grande Côte ; 10) place Valmy ; 11) Charavay.

    Vienne : 12) Jardins de Cybèle ; 13) rue de Bourgogne ; 14) place Camille-Jouffray ; 15) Nymphéas D ; 16) rue Garon ; 17) les Petits Jardins ; 18) le Bourg ; 19) rue Trénel ; 20) Maison des Dieux Océan ; 21) Petite Fullonica ; 22) Petits Entrepôts ; 23) Bâtiment commercial ; 24) Marché ; 25) Grande Fullonica ; 26) Triangle artisanal ; 27) Maison aux Colonnes.

    Crédits : Fonds de carte : Atlas topographique de Lyon, cartographie M. Lenoble, SRA Rhône-Alpes ; Atlas topographique de Vienne, PAO C. Marcelin, B. Helly / DAO M. Lépée.

    5Il existe toutefois des limites inhérentes à la nature des vestiges de telles infrastructures urbaines, plus spécialement en Gaule romaine, qui doivent être prises en considération dans le cadre du protocole méthodologique préalable à une telle étude. Ainsi, les matériaux de construction employés dans les boutiques à Lyon et à Vienne sont généralement de nature périssable, tout comme dans l’architecture domestique des mêmes sites. Les élévations en terre et en bois ne sont bien souvent pas conservées, de même que certains aménagements architecturaux ou équipements de vente, qui constituent pourtant ailleurs dans le monde romain des éléments indispensables à la reconnaissance de ces locaux commerciaux9. Traditionnellement, ceux-ci disposent en effet d’une large ouverture sur la rue matérialisée par un seuil à rainure longitudinale, déterminant ainsi un double système de fermeture spécifique : d’un côté, une porte latérale repérée par une trace de crapaudine dans le seuil et permettant un accès restreint ; de l’autre, le long de la majeure partie du seuil, une rainure permettant d’y glisser des planches s’encastrant les unes dans les autres. Le corpus lyonnais et viennois n’en présente aucun exemplaire conservé en place, nous laissant supposer que les occurrences en bois, majoritairement attestées et dont seuls les négatifs subsistent bien souvent, étaient en mesure de proposer un système de glissière similaire10. De même, les comptoirs maçonnés, équipements clés des lieux de métier, servant à la présentation des marchandises et dont la configuration la plus reconnue est celle propre aux commerces alimentaires, font globalement défaut dans le corpus étudié. Ils devaient plutôt prendre la forme de tables ou d’établis en matériaux périssables, qui n’ont parfois laissé que des négatifs (trous de piquet). Enfin, l’analyse fonctionnelle des espaces doit également s’adapter à la faiblesse quantitative des aménagements et des mobiliers retrouvés in situ. Les marchandises vendues sont rarement conservées car les locaux ont tendance à être nettoyés régulièrement et les stocks à suivre le vendeur lorsqu’il quitte le lieu de métier. De nombreuses activités productives traitant des matières périssables sont invisibilisées, tandis que d’autres paraissent surreprésentées, leurs déchets parvenant plus facilement jusqu’à nous, comme ceux issus de la métallurgie. Dans le corpus lyonnais et viennois, la nature des marchandises proposées à la vente a ainsi été reconnue dans soixante-quinze boutiques, soit 13 % des locaux recensés.

    6Malgré ces difficultés documentaires initiales, la mise en œuvre d’une lecture archéologique exhaustive et contextualisée des vestiges de boutiques permet de mieux cerner cet objet d’étude, en tant qu’entité architecturale et fonctionnelle. Il est alors possible d’identifier quelques grandes récurrences dans leur morphologie et leurs aménagements. Il s’agit d’espaces qui se définissent avant tout par leur accessibilité et leur visibilité par la clientèle depuis les rues. Ainsi, leur accès principal est particulièrement large, puisqu’il est compris entre 2,20 et 3,80 mètres, pour une moyenne de 3,10 mètres, et occupe dans la plupart des cas tout le mur de façade, encadré par deux montants verticaux. Par comparaison, les seuils donnant accès à des pièces annexes (arrière-boutique, pièce excavée, cour), à des boutiques mitoyennes ou à l’arrière de la parcelle domestique sont plus restreints (entre 0,80 et 2 mètres). C’est en façade également que nous repérons régulièrement l’installation de cages d’escalier menant à des appartements d’étages qui peuvent fonctionner de manière indépendante par rapport au lieu de métier au rez-de-chaussée. De même, les boutiques forment des ensembles cohérents avec les portiques ou les trottoirs qui les bordent systématiquement, à tel point que des phénomènes d’empiètement ou d’annexion de ces espaces de circulation sont parfois documentés11. La localisation des structures de travail (fosses, foyers, celliers, bassins) à l’intérieur de la boutique n’observe toutefois pas un schéma unique. Leur emplacement privilégié contre le mur arrière du local ou sous les cages d’escalier permet souvent de ménager un espace vierge de toute structure dans la partie avant du local, réservé au contact avec la clientèle (fig. 2a). Inversement, plusieurs cas lyonnais et viennois documentent des aménagements (comme des celliers ou des structures de chauffe liées à la métallurgie ou à la production de vaisselle en verre) installés à l’avant de la boutique, à l’aplomb du mur de façade (fig. 2b). Ils occupent alors une grande partie de la pièce et rendent difficilement concevables des circulations depuis la rue vers l’intérieur du lieu de métier. Il faut alors supposer que les activités de vente à proprement parler (exposition des marchandises, transactions avec les acheteurs) se reportaient dans d’autres espaces, comme des locaux mitoyens, les portiques en façade ou les cours annexes.

    Fig. 2 — Différentes configurations dans l’installation des structures de travail dans la boutique.

    a) Dans l’arrière-boutique (Lyon, rue des Farges, deuxième moitié du ier siècle) et sous la cage d’escalier (Lyon, Clos du Verbe Incarné, parcelle XIV-3, deuxième moitié du ier siècle).
    b) À l’avant du local (Lyon, Clos du Verbe Incarné, parcelle XIV-3, époque augustéenne et Sainte-Colombe, rue Trénel, deuxième moitié du ier siècle).

    Crédit : DAO M. Lépée.

    7Les données archéologiques sont également en mesure de documenter la manière dont ces entités modulaires sont agencées pour créer des complexes bâtis et multifonctionnels abritant au minimum deux boutiques, mais pouvant en regrouper plus d’une dizaine. Les corps de boutiques sont très souvent intégrés à des parcelles domestiques, dont ils forment une (ou plusieurs) façade(s), ou à des édifices publics. La construction de complexes autonomes dont le rez-de-chaussée est intégralement (ou presque) occupé par des locaux commerciaux constitue une autre réalité des villes rhodaniennes. Il s’agit essentiellement d’immeubles collectifs au sein desquels les boutiques peuvent être agencées de différentes façons au rez-de-chaussée : plusieurs nefs allongées, des cellules dos à dos ou encore des cellules associées à un espace ouvert (cour, couloir, place). À chacune de ces configurations correspondent des caractéristiques morphologiques et spatiales que l’archéologie permet de recenser et de confronter. Il est alors possible d’interroger les motivations qui ont justifié le choix de tel ou tel agencement et leur évolution, en distinguant ce qui relève d’adaptations locales à des éléments préexistants (poids des habitudes constructives et de la topographie urbaine notamment), d’une part, ou de choix économiques répondant à des stratégies d’investissement de la part des propriétaires de ces complexes, d’autre part. La difficulté à reconnaître, à partir des seules données archéologiques, l’identité des propriétaires et leur changement au cours du temps reste toutefois prégnante.

    8À partir de ce constat initial et en dépassant un simple recensement d’occurrences ou d’observations ponctuelles, nous souhaitons désormais souligner la nécessité de porter un regard diachronique et multiscalaire sur cette forme d’architecture commerciale. Quel est le potentiel de l’étude des boutiques pour la restitution du paysage commercial de Lyon et de Vienne sur le temps long et, in fine, pour la compréhension des dynamiques urbaines de ces deux colonies ? Il s’agit de s’intéresser plus particulièrement aux transformations – architecturales, fonctionnelles, spatiales – que connaissent les boutiques et, en regard, à ce qu’elles nous révèlent de l’évolution du parcellaire urbain dans lequel elles s’insèrent. Une présentation exhaustive des résultats concernant les deux colonies, à partir d’une vingtaine de sites archéologiques, dépasserait le cadre de cet article. Nous proposerons donc plutôt quelques grandes pistes méthodologiques, à partir d’exemples sélectionnés, pour chacune des trois échelles d’analyse suivantes : l’échelle de la pièce individuelle ; celle, intermédiaire, du complexe commercial formé de l’agencement d’unités fonctionnelles ; enfin, celle de la trame urbaine, de l’îlot au groupement d’îlots à la ville tout entière.

    À l’échelle individuelle du lieu de métier : les transformations architecturales et fonctionnelles

    9Dans les villes étudiées, les boutiques sont des pièces quadrangulaires généralement plus profondes que larges, d’une trentaine de mètres carrés en moyenne et largement ouvertes sur un espace de circulation. Elles fonctionnent seules ou avec des pièces annexes (arrière-boutique, sous-sol, cour). Leur cadre construit trahit souvent une grande pérennité, à travers des réfections successives et des rehaussements réguliers de leurs sols, s’adaptant au niveau de circulation des rues attenantes. Cependant, ces pièces connaissent également des modifications significatives au cours de leur occupation.

    10Il s’agit, d’une part, de transformations architecturales, qu’elles soient ponctuelles ou structurelles. Le cas lyonnais l’illustre particulièrement car il permet une véritable lecture sur le temps long de l’occupation des parcelles, contrairement à certains édifices viennois dont seuls les derniers états ont été mis au jour. Ainsi, les boutiques de la ville haute lyonnaise, sur la colline de Fourvière, connaissent certains réaménagements ponctuels ou des reconversions plus drastiques, qui semblent surtout perceptibles dans la seconde moitié du iie siècle et dans la première moitié du siècle suivant. Parmi les interventions les plus légères, nous observons l’ajout ou le déplacement de cloisonnements internes se caractérisant par des solins non fondés et des matériaux en remploi : il s’agit d’une solution économique et rapide, qui contribue alors à une nouvelle partition de l’espace et mène parfois à la création d’une arrière-boutique. D’autres évolutions significatives sont perceptibles à cette époque dans les boutiques disséminées dans les îlots domestiques du Clos du Verbe Incarné (fig. 1-1), situés au point culminant de la colline, sur le plateau de la Sarra. Les niveaux de circulation de plusieurs de ces locaux commerciaux sont ainsi recreusés afin d’ajouter un niveau de pièces en sous-sol, dans le cadre d’îlots densément occupés. Inversement, certaines boutiques perdent leur fonction commerciale au profit d’autres usages, notamment au cours de la première moitié du iiie siècle : elles sont en effet réduites ou remplacées par une pièce tournée vers le secteur résidentiel, qu’il s’agisse d’une pièce domestique, utilitaire ou dédiée aux circulations.

    11D’autre part, les boutiques peuvent connaître des transformations fonctionnelles, qu’il nous est toutefois plus difficile de percevoir par le biais des vestiges. Lorsque cela est possible, une lecture sur le temps long de l’installation des aménagements internes et de leur évolution permet d’interroger le lieu de métier non pas comme une entité figée, mais comme un cadre de travail modulable. La pérennité de certaines activités est ainsi bien attestée, comme en témoignent certaines boutiques-ateliers de métallurgie lyonnaise installées dans les îlots du Clos du Verbe Incarné entre l’époque augustéenne et le milieu du iiie siècle, ou d’autres dédiées au travail des textiles sur la rive gauche du Rhône à Vienne, sur le site de la place Camille-Jouffray (fig. 1-14), durant la deuxième moitié du iie siècle et la première moitié du iiie siècle. Cela renvoie vraisemblablement aux intérêts stratégiques des propriétaires de ces ensembles : l’investissement engagé au moment de l’installation initiale de l’activité ne nécessite qu’un faible renouvellement, puisque l’équipement reste identique (hormis réfections ponctuelles). Dans le cas des fullonicae viennoises, la permanence des équipements fixes encourage nécessairement un plus fort ancrage dans le temps et dans l’espace de l’activité, alors que les usagers du lieu de métier peuvent changer au cours du temps. La situation inverse, celle de la succession d’activités différentes dans le même local, était probablement plus courante que les vestiges ne nous le laissent penser. Seul l’exemple d’un sous-sol de boutique sur le site du Clos du Verbe Incarné évoque la succession d’activités distinctes entre l’époque flavienne et le iiie siècle (métallurgie, tabletterie, stockage pour un commerce alimentaire). L’aspect mobile et léger d’un certain nombre d’aménagements liés à la production, mais aussi à la vente, devait faciliter le réaménagement de l’espace intérieur de la boutique pour l’adapter aux besoins de son occupant et conférait également une flexibilité à l’agencement des commerces, dont la nature pouvait ainsi changer régulièrement sans que la structure architecturale de la boutique en soit modifiée.

    À l’échelle du complexe commercial : conséquences de l’évolution du parcellaire et stratégies d’investissement

    12Les boutiques ne sont pas des entités isolées : elles entretiennent des liens étroits avec les îlots dans lesquels elles s’insèrent et le réseau de rues dont elles dépendent pour leur accessibilité. Il est donc nécessaire de prendre en considération les évolutions conjointes des boutiques et du reste de la parcelle. L’environnement urbain des boutiques (forme de l’îlot, présence d’édifices mitoyens, pentes et obstacles, etc.) a en effet tendance à dicter le plan des complexes commerciaux. Dans le corpus étudié, les configurations topographiques sont variées. Les occupations étagées de la colline de Fourvière, à Lyon, encouragent le développement en hauteur des édifices commerciaux, mais également leur indépendance par rapport aux occupations mitoyennes, le mur arrière faisant office de mur de terrasse. Au contraire, la tendance des corps de boutiques à se développer sur les façades secondaires de maisons imposantes (supérieures à 1 000 mètres carrés de surface au sol), profitant d’un front de rue particulièrement long, est perceptible plus spécifiquement dans le tissu urbain de Saint-Romain-en-Gal. Un autre schéma s’adapte aux secteurs moins densément occupés que sont les espaces suburbains, où la topographie plane permet le développement sur de grandes superficies de complexes qui concentrent en moyenne davantage de boutiques, comme observé en rive droite du Rhône à Vienna. Une telle configuration encourage par ailleurs la plus forte standardisation planimétrique qu’adopte l’architecture commerciale viennoise. L’organisation autour des grandes voies d’accès à la ville sous la forme d’un parcellaire allongé proposant une étroite façade commerciale, comme dans la plaine de Vaise, en rive droite de la Saône, dans le suburbium lyonnais, constitue également une alternative : les boutiques-ateliers bénéficient alors à la fois d’un approvisionnement en matières premières et d’un débouché commercial privilégiés.

    13L’agencement des boutiques réagit particulièrement à l’évolution du parcellaire du fait de leur disposition en façade, « absorbant » ainsi les conséquences des dynamiques urbaines. À Lyon, dans la ville haute, la construction de nouveaux édifices monumentaux peut entraîner des conséquences importantes sur l’évolution des édifices commerciaux. Ainsi, la construction du sanctuaire du Verbe Incarné, dit « du culte impérial municipal », à partir du milieu du ier siècle conduit à l’élargissement des rues attenantes et à une reconstruction des façades d’îlot, désormais reculées12 : les étroits édifices commerciaux et artisanaux à étage(s) deviennent alors la norme en bordure de rue et s’adaptent à la densité d’occupation au sol en se développant en hauteur, tout en réservant les rez-de-chaussée aux occupations économiques. L’îlot septentrional du Clos du Verbe Incarné illustre bien cette évolution. La superficie occupée par les boutiques est en progression constante, sans heurts, passant de 621 mètres carrés durant l’époque augustéenne à 1 084 mètres carrés lors de la dernière occupation de l’îlot (+ 74,5 %), tandis que les espaces dédiés à l’habitat se font plus rares au rez-de-chaussée au fur et à mesure des reconstructions (- 67 %). Ce sont les évolutions repérées entre la première moitié et la deuxième moitié du ier siècle qui sont particulièrement significatives : alors que la surface au sol de l’îlot diminue de 15 % en raison des remodelages urbains évoqués précédemment, la surface habitable au rez-de-chaussée diminue de 61 %, tandis qu’en regard l’espace au sol consacré au commerce se développe de 58 % (670 à 1 056 mètres carrés). À l’échelle de la colonie, nous observons en effet un développement important des étages dans l’architecture domestique et commerciale à partir de l’époque claudienne : près de 90 % des boutiques lyonnaises de la première moitié du iie siècle disposent ainsi d’étages avérés ou supposés par les vestiges (d’après l’ajout de cages d’escalier en façade ou de massifs maçonnés renforçant les murs de refend), contre 56 % des locaux de la première moitié du ier siècle. Ce phénomène révèle ainsi, aux côtés d’autres indices (occupation des espaces interstitiels, création de sous-sols, cloisonnements accrus pour créer davantage d’unités différentes au sein du même complexe, etc.), la pression foncière que connaît la ville haute et le besoin de créer de nouveaux espaces commerciaux au rez-de-chaussée, suite aux évolutions de la trame urbaine. Enfin, notons que la construction d’édifices monumentaux au sein de la trame urbaine explique dans plusieurs cas la disparition de complexes de boutiques, comme en témoigne l’aménagement des thermes de la rue des Farges (fig. 1-7) au milieu du ier siècle, de l’édifice dit « Pseudo-sanctuaire de Cybèle » (fig. 1-2) dans les années 10 de notre ère ou de l’odéon (fig. 1-6) à la fin du ier siècle.

    14Par ailleurs, les complexes bâtis formés par le regroupement de boutiques constituent des propriétés urbaines qui sont autant des objets d’investissement que des sources d’enrichissement : des choix économiques président donc non seulement à leur construction et à leurs réaménagements, mais également à leurs modes de gestion. Ces choix conditionnent in fine la forme qui sera donnée aux boutiques (superficie et nombre de locaux au sein d’un même complexe notamment) et leur localisation, fondée sur le principe d’attractivité, puisque de ces deux paramètres dépend en grande partie la rentabilité des activités qui s’y tiennent. Les sources juridiques nous éclairent sur les différentes stratégies d’investissement des élites dans le commerce de détail13. En théorie, la boutique peut être placée en gestion directe (le propriétaire gère les activités commerciales lui-même, éventuellement aux côtés des autres membres de sa familia) ou indirecte (en y plaçant un agent intermédiaire de statut servile) : le propriétaire récupère alors le profit de la vente. Les rares cas d’accès direct entre une boutique et une propriété domestique qui se développe à l’arrière (par exemple à Vienne, en façade de la Maison aux Pierres Dorées [fig. 1-20], ou à Lyon, sur le site de l’Hôpital de Fourvière [fig. 1-3]) semblent ainsi révéler l’investissement économique d’un propriétaire commun. Au contraire, le propriétaire et l’homme de métier peuvent être des individus distincts, uniquement liés par une relation de propriétaire-locataire. La gestion locative par un propriétaire ne s’impliquant pas directement dans l’activité commerciale est une réalité foncière du monde romain14 qui ne devait pas être étrangère aux centres urbains de la vallée du Rhône. Nous notons ainsi la modularité récurrente des unités et l’association avec un espace habitable dans la boutique ou à l’étage, ou encore la systématisation de certains équipements hydrauliques individuels comme les évacuations : ces différents aspects pourraient faciliter le découpage en ensembles cohérents au sein de complexes commerciaux propices à la mise en location. Ces considérations restent toutefois particulièrement délicates à mobiliser à partir de la seule documentation archéologique, d’autant plus en Gaule romaine : en l’absence de contrats de location attestant des normes juridiques en vigueur sur le marché de l’immobilier local, mais également d’indications plus précises sur l’identité même des propriétaires des unités domestiques associées aux boutiques et sur leur statut, il demeure difficile de pouvoir faire le lien entre les lieux de métier et le propriétaire des complexes dans lesquels ces unités de production et de vente s’insèrent.

    15À nouveau, ce sont les mutations architecturales que connaissent certains complexes commerciaux rhodaniens qui semblent confirmer qu’ils font l’objet d’investissements de la part de leurs propriétaires. En premier lieu, le souci de pérenniser le cadre construit des boutiques et leurs moyens de production en témoigne aisément : les réfections successives apportées aux complexes commerciaux, parfois indépendamment du reste du bâti dans lequel ils s’insèrent, les agrandissements, en démultipliant le nombre de cellules, en déplaçant le mur de façade ou en empiétant sur les espaces de circulation attenants, ou encore les reconstructions successives de certains équipements constituent autant de marques de confiance dans la rentabilité de ces unités foncières et de la volonté d’investir sur le long terme. En outre, certaines reconstructions structurelles ne touchent pas toujours les ensembles bâtis de manière uniforme, révélant une possible fragmentation de la propriété. Le cas du vaste complexe viennois de la rue Trénel (fig. 1-19) est particulièrement parlant à cet égard (fig. 3a) : au sein de l’aile méridionale de cette vaste place commerciale restituée sur plus de 8 000 mètres carrés, seules quatre des neuf cellules initiales connaissent à la fin du ier siècle une reconstruction de leur mur de façade et une nouvelle organisation des circulations et des cloisonnements, qui amènent à doubler le nombre de cellules et à les doter d’appartements et d’un portique transformé en galerie. Ces changements ont trop de conséquences sur le fonctionnement de ce complexe autonome pour supposer qu’il s’agisse d’interventions ponctuelles des locataires. À Saint-Romain-en-Gal, la parcelle des Dieux Océan (fig. 1-20) et l’évolution des occupations domestiques et commerciales qu’elle abrite sont également éclairantes du point de vue de l’association de deux façades commerciales et des logiques économiques sous-tendues (fig. 3b)15. Durant la première moitié du ier siècle, la Maison aux Pierres Dorées ne dispose que d’une seule façade sur rue et la privilégie donc pour développer un corps de boutiques, peut-être en gestion directe d’après l’accès ménagé entre un des locaux et la maison. Durant la deuxième moitié du ier siècle, le propriétaire de la Maison au Vestibule à Colonnes étend la parcelle vers le nord et annexe une maison mitoyenne dotée d’une autre façade sur rue conçue dès l’origine pour abriter un édifice commercial : il délaisse le potentiel économique de sa façade « principale » au profit de sa façade « secondaire », peut-être exploitée sous la forme d’une mise en location. Cette décision va de pair avec le développement d’appartements indépendants à l’étage des boutiques du Bâtiment commercial (fig. 1-23) à cette époque, ce qui confirme une recherche de profit accrue de la part du propriétaire à travers les revenus locatifs. Notons par ailleurs que les stratégies du propriétaire évoluent au début du iie siècle vers une plus forte intégration du corps de boutiques à la parcelle domestique d’après plusieurs observations concordantes (ouverture dans le mur arrière d’une des boutiques, passage d’un tuyau d’adduction en direction du bassin du péristyle, fermeture du portique qui devient une galerie entourant l’édifice), témoignant peut-être d’une reprise de la gestion directe par le propriétaire de ces commerces. Enfin, à partir du milieu du iie siècle, l’édifice économique est remplacé par une maison à péristyle qui en reprend le cadre périmétral, le parcellaire résidentiel étant alors privilégié au détriment de l’occupation commerciale. Cependant, la lecture des vestiges archéologiques n’est pas en mesure de révéler à quel point ces investissements résultent d’actions de propriétaires successifs au gré des rachats des entités construites.

    Fig. 3 — Évolution architecturale de quelques complexes commerciaux.

    a) Sainte-Colombe, rue Trénel, entre la deuxième moitié du ier siècle et la première moitié du iie siècle ; b) Saint-Romain-en-Gal, parcelle des Dieux Océan et du Bâtiment commercial, entre les années 20 de notre ère et le milieu du iie siècle.

    Crédit : DAO M. Lépée.

    À l’échelle globale de la ville : paysage économique et dynamiques urbaines

    16L’exploration archéologique des centres urbains lyonnais et viennois nous permet de replacer les boutiques dans le contexte plus vaste du tissu urbain et de ses circulations. Grâce à l’analyse architecturale et fonctionnelle, nous pouvons ainsi proposer des cartographies du paysage commercial entre le ier siècle avant J.-C. et le iiie siècle après J.-C., bien sûr tributaires de l’état des données archéologiques et qui doivent nécessairement être complétées par la distribution des ateliers et des entrepôts. Du point de vue spatial, même si la concentration d’une partie des activités productives est bien attestée en contexte suburbain, nous observons une grande dispersion des activités commerciales et productives à Lyon et à Vienne au sein d’îlots aux fonctions mixtes, remettant en question la notion de quartier ou de secteur spécialisé16. À Lyon, le cas des activités métallurgiques est particulièrement révélateur de ce double phénomène, entre concentration d’une partie des activités en périphérie (suburbium méridional du quartier de Trion, plaine de Vaise au nord) et dispersion dans des boutiques-ateliers en plein cœur urbain (Clos du Verbe Incarné [fig. 1-1], rue des Farges [fig. 1-7]). À Vienne, les officines liées au travail des textiles, qu’elles soient d’ampleur restreinte (Petits Jardins [fig. 1-17], Petite Fullonica [fig. 1-21]) ou plus grande (place Camille-Jouffray, Grande Fullonica [fig. 1-25]), sont mêlées aux occupations domestiques, en bordure de voies importantes. La recherche de clientèle détermine en grande partie la localisation des commerces, quelle que soit leur nature. En effet, les propriétaires des lieux de métier doivent s’assurer d’investir, au moment de leur construction ou de leur rachat, dans des unités rentables et donc que la clientèle soit suffisamment nombreuse pour dégager des bénéfices : en cela, l’emplacement des commerces, dont découle leur potentiel de visibilité et d’accessibilité, constitue un enjeu majeur. Nous constatons ainsi régulièrement l’installation des boutiques dans des zones nodales du tissu urbain, susceptibles de devenir des zones de chalandise pérennes. C’est le cas à proximité de carrefours de rues, des points d’accès et de sortie du cœur urbain ou encore des édifices publics monumentaux jouant le rôle de pôles d’attractivité (comme le sanctuaire du Verbe Incarné ou les thermes publics de la rue des Farges à Lyon, le forum ou les horrea de Vienne). Aucune véritable lecture diachronique ne peut toutefois être proposée quant à une quelconque évolution de la localisation des boutiques dans la ville ou de la répartition des types d’activités au cours du temps, tant les données sont lacunaires du point de vue spatial et chronologique dans les deux colonies et, par conséquent, les biais trop importants.

    17Du point de vue chronologique, les dynamiques de construction et de reconstruction des complexes commerciaux qui peuvent être mises en évidence témoignent de certaines phases durant lesquelles l’investissement est particulièrement marqué. C’est le cas, par exemple, dans la colonie lyonnaise (fig. 4) à l’époque augustéenne, qui constitue la phase de son occupation où le plus de boutiques sont construites (cinquante-cinq boutiques pour dix-sept nouveaux complexes), tandis que les reconstructions sont essentiellement reconnues durant la deuxième moitié du ier siècle, en conséquence des transformations que connaît la trame urbaine de la ville haute, évoquées précédemment. À partir du iie siècle, nous observons une chute dans le nombre de complexes commerciaux reconstruits, bien que les réaménagements ponctuels perdurent. À cette chute correspond inversement une hausse des cas d’abandon ou de reconversion jusqu’au siècle suivant. À Vienne, le panorama des occupations commerciales souffre de données plus lacunaires : la deuxième moitié du ier siècle constitue toutefois une phase d’essor certain (fig. 4), notamment avec l’instauration de vastes places commerciales réunissant plusieurs dizaines de boutiques sur la rive droite du Rhône (commune actuelle de Sainte-Colombe), tandis que le iie siècle représente encore une période de fleurissement constructif. Le dynamisme de la construction urbaine dans les deux villes étudiées, dont témoignent la densité d’occupation des îlots résidentiels et l’importance de la parure monumentale, devait encourager les investissements dans l’architecture commerciale. Le développement de ces cités portuaires et des échanges à longue distance place Lyon et Vienne au cœur de réseaux régionaux et extrarégionaux, et favorise les mouvements d’argent ainsi que la mobilité des marchandises et des hommes : l’ensemble de ces facteurs avait pour objectif de permettre un afflux de clientèle potentielle et de capitaux propices à l’essor des complexes commerciaux et productifs.

    Fig. 4 — Évolution du nombre de complexes commerciaux construits ou reconstruits, d’une part, abandonnés ou reconvertis, d’autre part, à Lyon et à Vienne entre la fin du ier siècle avant J.-C. et la fin du iiie siècle de notre ère.

    Crédit : M. Lépée.

    18Les phénomènes d’abandon ou de reconversion des édifices économiques coïncident avec les mutations urbaines que connaissent les deux colonies. Le déclin des boutiques concorde en général avec celui de la trame urbaine et avec la réduction de son extension. À Lyon, la plupart des complexes commerciaux sont abandonnés entre la fin du iie siècle et la fin du iiie siècle (fig. 4), ce qui se confond avec l’évolution générale de la trame urbaine de la ville haute qui est progressivement délaissée au profit des quartiers fluviaux17. La faiblesse des investissements dans la construction ou la reconstruction d’édifices privés comme publics, la désaffectation de certains d’entre eux, tout comme la baisse des effectifs monétaires en circulation reconnus dans le secteur à cette époque vont dans le même sens. Une synthèse récente y voit les conséquences de la bataille de Lyon de 197 après J.-C. qui a affaibli durablement le développement urbain de la colonie18. Notons toutefois que seul le site du Clos du Verbe Incarné atteste encore, durant la deuxième moitié du iiie siècle, un certain dynamisme dans les réaménagements de ses îlots domestiques et commerciaux (décloisonnement, nouvelle organisation de la façade, ajout de cages d’escalier, reconversion partielle en pièce domestique). Il nous faut également rappeler que quelques autres complexes commerciaux témoignent d’un abandon plus précoce dans la colonie, à la suite d’incendies (dès le début du iie siècle sur la presqu’île, rue Auguste-Comte [fig. 1-8], ou au milieu du iie siècle dans le secteur de Vaise, place Valmy [fig. 1-10], au profit d’une nécropole) ou en raison de la construction d’édifices monumentaux (cf. supra). À Vienne, l’abandon progressif de la plupart des édifices commerciaux de la rive droite est perceptible durant la première moitié du iiie siècle (fig. 4), toute la moitié sud des faubourgs étant dévastée par un incendie dans les premières décennies du siècle. En rive gauche, les quartiers sud et la zone des entrepôts sont également désaffectés et rapidement occupés par une nécropole. Toutefois, à l’échelle de certains complexes commerciaux, cela reste une période encore active en termes de reconstructions, que ce soit en rive gauche plus proche du centre (place Camille-Jouffray [fig. 1-14]) ou en rive droite (Maison aux Colonnes [fig. 1-27]) : des investissements perdurent donc, mais restent très circonscrits. Cette dernière maison se caractérise notamment par une importante phase de réfection de sa façade commerciale précisément à cette époque, en lien avec les thermes voisins.

    *

    19Nous avons tenté d’esquisser ici quelques pistes de réflexion qui forment le fil conducteur d’une synthèse en cours sur le commerce de détail dans la moyenne vallée du Rhône. Nous souhaitons souligner à quel point une (re)lecture archéologique des boutiques lyonnaises et viennoises, en contexte et en réseau, permet de dépasser les biais documentaires et la relative pauvreté des sources sur certains aspects, pour insister sur leur rôle majeur dans les rouages de l’économie urbaine. Comme ailleurs dans le monde romain, les boutiques sont tout autant des entités construites et fonctionnelles que des objets d’investissement, et c’est l’attention portée à leurs dynamiques évolutives sur le temps long qui nous le révèle particulièrement. L’étude consciencieuse de leur cadre construit, de leurs liens avec le parcellaire urbain et des traces laissées par les activités qu’elles ont abritées permet d’aller au-delà de l’idée d’une architecture uniforme et figée, pour mettre en lumière, au contraire, la diversité et les variations (de formes, de fonctions, d’ampleur, etc.) que les édifices commerciaux connaissent dans le temps et dans l’espace : grâce aux cas lyonnais et viennois, nous avons ainsi pu évoquer des adaptations aussi bien à l’environnement urbain, aux évolutions démographiques qu’aux phases de développement ou de déclin des investissements dans l’architecture commerciale.

    20Au-delà des cas rhodaniens, les données archéologiques concernant les boutiques en Gaule romaine sont désormais nombreuses et permettent de reconnaître concrètement leur poids dans le paysage commercial urbain, grâce à leur quantification et à leur spatialisation. C’est en multipliant les synthèses régionales à partir d’une documentation de terrain de qualité, propice au nécessaire croisement des critères architecturaux et des découvertes de mobiliers, que le potentiel d’une telle approche pourra se déployer.

    Notes de bas de page

    1Cf. N. Tran, « Dominus tabernae ». Le statut de travail des artisans et des commerçants de l’Occident romain (ier siècle av. J.-C.-iiie siècle ap. J.-C.), Rome, École française de Rome, 2013.

    2Cf. P. Chardron-Picault (dir.), Aspects de l’artisanat en milieu urbain : Gaule et Occident romain, Dijon, Artehis Éditions, 2010, https://doi.org/10.4000/books.artehis.9069 ; S. Fontaine, S. Satre et A. Tekki (dir.), La Ville au quotidien. Regards croisés sur l’habitat et l’artisanat antiques. Afrique du Nord, Gaule et Italie, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2011.

    3Cf. A. Desbat et S. Martin-Kilcher, « Les amphores sur l’axe du Rhône-Rhin à l’époque d’Auguste », in : Amphores romaines et histoire économique. Dix ans de recherche, Rome, Publications de l’École française de Rome, 1989, p. 339-365 ; A. Tchernia, Les Romains et le commerce, Naples, Publications du Centre Jean Bérard, 2011, p. 146-151.

    4Cf. F. Bérard, « Les corporations de transport fluvial à Lyon à l’époque romaine », in M. Dondin-Payre et N. Tran (dir.), « Collegia ». Le phénomène associatif dans l’Occident romain, Bordeaux, Ausonius, 2012, p. 135-154, https://doi.org/10.4000/books.ausonius.15948.

    5Pour ne citer que les études les plus récentes : N. Monteix, Les Lieux de métier. Boutiques et ateliers d’Herculanum, Rome, Publications du Centre Jean Bérard/Publications de l’École française de Rome, 2010, https://doi.org/10.4000/books.pcjb.4975 ; J. Schoevaert, Les Boutiques d’Ostie. L’économie urbaine au quotidien (ier s. av. J.-C.-ve s. ap. J.-C.), Rome, Publications de l’École française de Rome, 2018, https://doi.org/10.4000/books.efr.33750 ; S. Ellis, The Roman Retail Revolution. The Socio-Economic World of the Taberna, Oxford, Oxford University Press, 2018.

    6Cf., par exemple : M. Mangin, Un quartier de commerçants et d’artisans d’Alesia. Contribution à l’histoire de l’habitat urbain en Gaule, Paris, Les Belles Lettres, 1981 ; P. Chardron-Picault et M. Pernot, Un quartier antique d’artisanat métallurgique à Autun. Le site du Lycée militaire, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1999, https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.45473.

    7Cf. B. Clément, « L’architecture domestique à Lugdunum », in M. Lenoble (dir.), Atlas topographique de « Lugdunum ». I. Lyon-Fourvière, Dijon, Société archéologique de l’Est (Revue archéologique de l’Est, supplément no 47), 2018, p. 495-514.

    8Données issues d’une thèse de doctorat réalisée à l’université Lumière Lyon 2, en cotutelle avec l’université de Lausanne, à l’échelle de trois agglomérations de la vallée du Rhône : M. Lépée, Commerce de détail et économie urbaine dans la Vallée du Rhône (ier s. av.-iiie s. apr. J.-C.) : les boutiques de « Lugdunum », « Vienna » et « Lousonna », thèse de doctorat (dir. M. Poux et M. Fuchs), université Lumière Lyon 2/université de Lausanne, Lyon/Lausanne, 2023.

    9Cf. N. Monteix, Les Lieux de métier, op. cit., p. 56-61 et p. 92-97 ; J. Schoevaert, Les Boutiques d’Ostie, op. cit., p. 55-62 ; S. Ellis, The Roman Retail Revolution, op. cit., p. 38-55 et p. 200-202.

    10Par exemple à Clermont-Ferrand, sur le site de la Scène nationale ou sur le site du Bourg à Sainte-Colombe, où les conditions de conservation le permettent : cf. F. Blondel, D. Martinez et J. Ollivier, « La place du bois dans l’architecture à Augustonemetum/Clermont-Ferrand : les sites de la rue Fontgiève et de la Scène nationale (ier-iiie s. apr. J.-C.) », Pallas, vol. 110, 2019, p. 51-67, https://doi.org/10.4000/pallas.17209 ; B. Clément et F. Blondel et al., « La place du bois dans l’architecture de la colonie romaine de Vienne. L’exemple du “complexe commercial A-B” à Sainte-Colombe », Pallas, vol. 110, 2019, p. 27-49, https://doi.org/10.4000/pallas.17139.

    11Cf. M. Lépée, « Les boutiques dans les colonies de Lyon et de Vienne entre le ier s. av. et le iiie s. apr. J.-C. Franchir le seuil, dépasser la frontière », Frontière·s [en ligne], vol. 1, 2019, https://doi.org/10.35562/frontieres.139.

    12Cf. A. Desbat, « Suppression ou élargissement de rues à Lugdunum au ier siècle apr. J.-C. », in P. Ballet, N. Dieudonné-Glad et C. Saliou (dir.), La Rue dans l’Antiquité. Définition, aménagement, devenir, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008, p. 231-236 ; É. Delaval et P. Thirion, « Feuille 6 : Verbe Incarné », in M. Lenoble (dir.), Atlas topographique de « Lugdunum ». I. Lyon-Fourvière, op. cit., p. 203-280.

    13Cf. J. Andreau, « Sur les choix économiques des notables romains », in J. Andreau, J. France et S. Pittia (dir.), Mentalités et choix économiques des Romains, Bordeaux, Ausonius, 2004, p. 71-85, https://doi.org/10.4000/books.ausonius.9981.

    14Cf. P. Garnsey, « Urban property investment », in M.I. Finley (dir.), Studies in Roman Property, Cambridge, Cambridge University Press, 1976, p. 123-136 ; J. Dubouloz, La Propriété immobilière à Rome et en Italie (ier-ve siècles). Organisation et transmission des « praedia urbana », Rome, École française de Rome, 2011.

    15Cf. J.-L. Prisset, L. Brissaud et O. Leblanc, « La parcelle de la maison aux Cinq Mosaïques », Gallia, vol. 51, 1994, p. 41-79, https://doi.org/10.3406/galia.1994.3091.

    16Cf. N. Monteix, « “Caius Lucretius […], marchand de couleurs de la rue du fabricant de courroies”. Réflexions critiques sur les concentrations de métiers à Rome », in A. Esposito et G.M. Sanidas (dir.), « Quartiers » artisanaux en Grèce ancienne. Une perspective méditerranéenne, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2013, p. 333-352, https://doi.org/10.4000/books.septentrion.109825 ; C. Saliou, « Artisanats et espace urbain dans le monde romain : droit et projets urbains (ier siècle av. J.-C.-vie siècle ap. J.-C.) », in A. Esposito et G. Sanidas, ibid., p. 39-53, https://doi.org/10.4000/books.septentrion.109675.

    17Cf. A. Desbat et M. Lenoble, « L’abandon précoce de la colline de Fourvière », in M. Lenoble (dir.), Atlas topographique de « Lugdunum ». I. Lyon-Fourvière, op. cit., p. 553-556. Trop peu d’attestations de boutiques sont toutefois documentées dans le secteur de la presqu’île pour proposer une lecture précise de leur évolution.

    18Cf. M. Poux, « Lugdunum au iiie siècle : déclin et recomposition », in P. Faure et M. Poux (dir.), « Lugdunum » 197. Histoire et archéologie d’une bataille romaine, à paraître.

    Auteur

    • Marine Lépée

      Membre scientifique de l’École française de Rome (section Antiquité), chercheure associée au laboratoire ArAr (UMR 5138)

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    1Cf. N. Tran, « Dominus tabernae ». Le statut de travail des artisans et des commerçants de l’Occident romain (ier siècle av. J.-C.-iiie siècle ap. J.-C.), Rome, École française de Rome, 2013.

    2Cf. P. Chardron-Picault (dir.), Aspects de l’artisanat en milieu urbain : Gaule et Occident romain, Dijon, Artehis Éditions, 2010, https://doi.org/10.4000/books.artehis.9069 ; S. Fontaine, S. Satre et A. Tekki (dir.), La Ville au quotidien. Regards croisés sur l’habitat et l’artisanat antiques. Afrique du Nord, Gaule et Italie, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2011.

    3Cf. A. Desbat et S. Martin-Kilcher, « Les amphores sur l’axe du Rhône-Rhin à l’époque d’Auguste », in : Amphores romaines et histoire économique. Dix ans de recherche, Rome, Publications de l’École française de Rome, 1989, p. 339-365 ; A. Tchernia, Les Romains et le commerce, Naples, Publications du Centre Jean Bérard, 2011, p. 146-151.

    4Cf. F. Bérard, « Les corporations de transport fluvial à Lyon à l’époque romaine », in M. Dondin-Payre et N. Tran (dir.), « Collegia ». Le phénomène associatif dans l’Occident romain, Bordeaux, Ausonius, 2012, p. 135-154, https://doi.org/10.4000/books.ausonius.15948.

    5Pour ne citer que les études les plus récentes : N. Monteix, Les Lieux de métier. Boutiques et ateliers d’Herculanum, Rome, Publications du Centre Jean Bérard/Publications de l’École française de Rome, 2010, https://doi.org/10.4000/books.pcjb.4975 ; J. Schoevaert, Les Boutiques d’Ostie. L’économie urbaine au quotidien (ier s. av. J.-C.-ve s. ap. J.-C.), Rome, Publications de l’École française de Rome, 2018, https://doi.org/10.4000/books.efr.33750 ; S. Ellis, The Roman Retail Revolution. The Socio-Economic World of the Taberna, Oxford, Oxford University Press, 2018.

    6Cf., par exemple : M. Mangin, Un quartier de commerçants et d’artisans d’Alesia. Contribution à l’histoire de l’habitat urbain en Gaule, Paris, Les Belles Lettres, 1981 ; P. Chardron-Picault et M. Pernot, Un quartier antique d’artisanat métallurgique à Autun. Le site du Lycée militaire, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1999, https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.45473.

    7Cf. B. Clément, « L’architecture domestique à Lugdunum », in M. Lenoble (dir.), Atlas topographique de « Lugdunum ». I. Lyon-Fourvière, Dijon, Société archéologique de l’Est (Revue archéologique de l’Est, supplément no 47), 2018, p. 495-514.

    8Données issues d’une thèse de doctorat réalisée à l’université Lumière Lyon 2, en cotutelle avec l’université de Lausanne, à l’échelle de trois agglomérations de la vallée du Rhône : M. Lépée, Commerce de détail et économie urbaine dans la Vallée du Rhône (ier s. av.-iiie s. apr. J.-C.) : les boutiques de « Lugdunum », « Vienna » et « Lousonna », thèse de doctorat (dir. M. Poux et M. Fuchs), université Lumière Lyon 2/université de Lausanne, Lyon/Lausanne, 2023.

    9Cf. N. Monteix, Les Lieux de métier, op. cit., p. 56-61 et p. 92-97 ; J. Schoevaert, Les Boutiques d’Ostie, op. cit., p. 55-62 ; S. Ellis, The Roman Retail Revolution, op. cit., p. 38-55 et p. 200-202.

    10Par exemple à Clermont-Ferrand, sur le site de la Scène nationale ou sur le site du Bourg à Sainte-Colombe, où les conditions de conservation le permettent : cf. F. Blondel, D. Martinez et J. Ollivier, « La place du bois dans l’architecture à Augustonemetum/Clermont-Ferrand : les sites de la rue Fontgiève et de la Scène nationale (ier-iiie s. apr. J.-C.) », Pallas, vol. 110, 2019, p. 51-67, https://doi.org/10.4000/pallas.17209 ; B. Clément et F. Blondel et al., « La place du bois dans l’architecture de la colonie romaine de Vienne. L’exemple du “complexe commercial A-B” à Sainte-Colombe », Pallas, vol. 110, 2019, p. 27-49, https://doi.org/10.4000/pallas.17139.

    11Cf. M. Lépée, « Les boutiques dans les colonies de Lyon et de Vienne entre le ier s. av. et le iiie s. apr. J.-C. Franchir le seuil, dépasser la frontière », Frontière·s [en ligne], vol. 1, 2019, https://doi.org/10.35562/frontieres.139.

    12Cf. A. Desbat, « Suppression ou élargissement de rues à Lugdunum au ier siècle apr. J.-C. », in P. Ballet, N. Dieudonné-Glad et C. Saliou (dir.), La Rue dans l’Antiquité. Définition, aménagement, devenir, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008, p. 231-236 ; É. Delaval et P. Thirion, « Feuille 6 : Verbe Incarné », in M. Lenoble (dir.), Atlas topographique de « Lugdunum ». I. Lyon-Fourvière, op. cit., p. 203-280.

    13Cf. J. Andreau, « Sur les choix économiques des notables romains », in J. Andreau, J. France et S. Pittia (dir.), Mentalités et choix économiques des Romains, Bordeaux, Ausonius, 2004, p. 71-85, https://doi.org/10.4000/books.ausonius.9981.

    14Cf. P. Garnsey, « Urban property investment », in M.I. Finley (dir.), Studies in Roman Property, Cambridge, Cambridge University Press, 1976, p. 123-136 ; J. Dubouloz, La Propriété immobilière à Rome et en Italie (ier-ve siècles). Organisation et transmission des « praedia urbana », Rome, École française de Rome, 2011.

    15Cf. J.-L. Prisset, L. Brissaud et O. Leblanc, « La parcelle de la maison aux Cinq Mosaïques », Gallia, vol. 51, 1994, p. 41-79, https://doi.org/10.3406/galia.1994.3091.

    16Cf. N. Monteix, « “Caius Lucretius […], marchand de couleurs de la rue du fabricant de courroies”. Réflexions critiques sur les concentrations de métiers à Rome », in A. Esposito et G.M. Sanidas (dir.), « Quartiers » artisanaux en Grèce ancienne. Une perspective méditerranéenne, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2013, p. 333-352, https://doi.org/10.4000/books.septentrion.109825 ; C. Saliou, « Artisanats et espace urbain dans le monde romain : droit et projets urbains (ier siècle av. J.-C.-vie siècle ap. J.-C.) », in A. Esposito et G. Sanidas, ibid., p. 39-53, https://doi.org/10.4000/books.septentrion.109675.

    17Cf. A. Desbat et M. Lenoble, « L’abandon précoce de la colline de Fourvière », in M. Lenoble (dir.), Atlas topographique de « Lugdunum ». I. Lyon-Fourvière, op. cit., p. 553-556. Trop peu d’attestations de boutiques sont toutefois documentées dans le secteur de la presqu’île pour proposer une lecture précise de leur évolution.

    18Cf. M. Poux, « Lugdunum au iiie siècle : déclin et recomposition », in P. Faure et M. Poux (dir.), « Lugdunum » 197. Histoire et archéologie d’une bataille romaine, à paraître.

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    Lépée, M. (2024). Apports des données archéologiques pour la compréhension de l’économie antique : les boutiques de la moyenne vallée du Rhône comme cas d’étude. In J.-P. Brun, D. Chatzivasiliou, & W. M. Jongman (éds.), Performances économiques de l’Empire romain (1‑). Collège de France. https://doi.org/10.4000/13hti
    Lépée, Marine. « Apports des données archéologiques pour la compréhension de l’économie antique : les boutiques de la moyenne vallée du Rhône comme cas d’étude ». In Performances économiques de l’Empire romain, édité par Jean-Pierre Brun, Despina Chatzivasiliou, et Willem M. Jongman. Paris: Collège de France, 2024. https://doi.org/10.4000/13hti.
    Lépée, Marine. « Apports des données archéologiques pour la compréhension de l’économie antique : les boutiques de la moyenne vallée du Rhône comme cas d’étude ». Performances économiques de l’Empire romain, édité par Jean-Pierre Brun et al., Collège de France, 2024, https://doi.org/10.4000/13hti.

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    Brun, J.-P., Chatzivasiliou, D., & Jongman, W. M. (éds.). (2024). Performances économiques de l’Empire romain (1‑). Collège de France. https://doi.org/10.4000/13htr
    Brun, Jean-Pierre, Despina Chatzivasiliou, et Willem M. Jongman, éd. Performances économiques de l’Empire romain. Paris: Collège de France, 2024. https://doi.org/10.4000/13htr.
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