Préface
Texte intégral
1Mesdames et Messieurs les Professeurs,
Chers collègues,
Chers amis du Collège de France,
Mesdames, Messieurs,
2C’est un grand plaisir pour moi de vous accueillir pour la leçon inaugurale de Christian Gollier, qui inaugure également la chaire annuelle « Avenir commun durable ». Cette chaire a été créée dans le cadre de l’initiative du même nom lancée en 2021 par des professeurs du Collège de France. Consacrée aux enjeux de la transition environnementale et énergétique, elle accueillera chaque année des experts internationaux pour mettre en lumière l’actualité de la recherche dans ce domaine. La chaire bénéficie du soutien de la fondation du Collège de France et de ses grands mécènes Covéa et TotalEnergies.
3La question de la transition écologique, voire d’un monde qui soit encore vivable dans quelques décennies, est une des préoccupations majeures de l’humanité. La dernière Conference of the Parties, COP 26, a été interprétée par certains comme un échec. Les larmes aux yeux, le président britannique de la COP, Alok Sharma, s’est dit « profondément désolé » par des changements de dernière minute qui donnent à la déclaration finale la forme d’une seule déclaration d’intention. Boris Johnson, hôte de la COP 26, expliquant qu’il était « minuit moins une sur l’horloge de l’apocalypse », a commenté le résultat final par la phrase : « Ma joie est teintée de déception. »
4Face à ce bilan mitigé, on peut soit se contenter d’exprimer ses sentiments, soit adopter un langage apocalyptique ou alors, et c’est le but de l’initiative « Avenir commun durable » et de la chaire annuelle qui l’accompagne, entamer une réflexion scientifique sur ces questions.
5Sur le plan scientifique, une réflexion sur le changement climatique et la transition écologique doit aussi impliquer les sciences humaines et sociales. Sur le plan historique, on peut observer que nos sociétés ont connu des bouleversements climatiques importants dans le passé, comme des périodes de sécheresse au Proche-Orient ancien au premier millénaire avant l’ère chrétienne, ou le petit âge glaciaire qui a affecté l’Europe au xviie siècle. Les sciences de l’Antiquité et les sciences des religions nous rendent attentifs au fait que l’humanité a eu très tôt conscience de la fragilité du monde dans lequel elle vivait.
6Le mythe du Déluge, que l’on trouve non seulement dans le Proche-Orient ancien et dans la Bible, mais aussi en Inde et en Chine, ou encore dans certaines civilisations de l’Amérique latine, le montre clairement. Malgré leurs différences, ces récits insistent sur l’effondrement d’un premier monde – pour des raisons diverses : surpopulation, méchanceté des hommes, colères divines, etc. –, sans doute aussi dans le but de rendre attentifs les humains au fait que le monde dans lequel nous vivons peut à tout moment être frappé par une catastrophe.
7Nos sociétés ont pris conscience que nous devons changer beaucoup de choses pour affronter et limiter le changement climatique qui, désormais, est inéluctable. Ces changements ont évidemment aussi une composante économique importante et font apparaître des inégalités évidentes, comme le révèle, entre autres, la discussion autour du prix du carbone. Dans une perspective de croissance, réduire le pouvoir d’achat aujourd’hui pour améliorer l’avenir peut poser problème.
8C’est justement à cause de l’importance du facteur économique que la chaire Avenir commun durable sera ce soir inaugurée par un économiste, Christian Gollier. Ses recherches s’étendent des domaines de l’économie de l’incertain à l’économie de l’environnement en passant par la finance, la consommation, l’assurance et l’analyse des coûts-bénéfices, avec un intérêt particulier pour les effets à long terme. À l’origine de la Toulouse School of Economics avec Jean Tirole en 2007, il en est le directeur depuis 2009. Il a publié plus d’une centaine d’articles dans des revues scientifiques internationales ainsi que plusieurs livres sur le risque, dont The Economics of Risk and Time (MIT Press, 2001), qui a remporté le Paul A. Samuelson Award l’année de sa parution. En 2012, il a publié chez Princeton University Press un livre intitulé Pricing the Planet’s Future. Son récent ouvrage grand public, Le Climat après la fin du mois (PUF, 2019), traite de l’importance d’agir face au changement climatique et a connu un grand succès en France.
9Christian Gollier est l’un des auteurs des quatrième et cinquième rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur le changement climatique (en 2007 et 2013). Ce groupe a reçu en 2007 le prix Nobel de la paix pour ses efforts visant à renforcer et à diffuser les connaissances sur les changements climatiques d’origine humaine et à jeter les bases des mesures nécessaires pour contrer de tels changements. Christian Gollier conseille régulièrement plusieurs gouvernements (France, Royaume-Uni, États-Unis, Norvège notamment) sur leur politique d’évaluation des investissements publics. Il est président de l’Association européenne des économistes de l’environnement.
10Cette leçon inaugurale, qui ouvre son enseignement au Collège de France, s’intitule Entre fin de mois et fin du monde : économie de nos responsabilités envers l'humanité.
11Cher Christian Gollier, nous nous réjouissons de vous entendre et je vous laisse la parole.
Auteur
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Thomas Römer
Administrateur du Collège de France
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