Louis Robert
L’enseignement, l’œuvre, l’héritage
p. 237-256
Texte intégral
1Sans doute est-ce une apparente anomalie que le titre de la présente contribution, restreinte à une seule personnalité, puisque l’on s’attendrait peut-être à voir traiter dans ce volume, à côté des origines des Hautes études et des autres civilisations et champs disciplinaires, également de toute « l’Antiquité gréco-romaine » à l’École pratique des hautes études (EPHE) et au Collège de France. Mais, outre que traiter ce sujet eût sans doute demandé en réalité un volume entier, Louis Robert ne suffit-il pas à incarner à lui seul le domaine, si du moins l’on considère le xxe siècle ? Paul Veyne a affirmé : « L. Robert a été un des plus grands savants de notre époque, au sens presque sacré qu’avait le mot de savant au xixe s.1. » De son côté, Maurice Sartre, dans un récent panorama de l’histoire ancienne, définissait L. Robert comme « le plus grand historien du siècle précédent2 ». Pourtant, son nom ne figure pas au nombre des « savants de renom » de l’École pratique dans la liste qu’en donnait son site internet – du moins en 2018. Cette omission fut réparée dans le livre commémoratif qui a été publié sous la direction de M. Patrick Henriet3 et par le programme que M. Jean-Luc Fournet a composé pour la journée dont est issu le présent volume. Qu’ils en soient l’un et l’autre vivement remerciés, tant il est évident que le magistère de Louis Robert, directeur d’études pendant quarante et un ans et professeur pendant non moins que trente-cinq ans, a exercé et continue à exercer sur les hellénistes et antiquisants une autorité révérée, et dûment célébrée.
2Or, le nombre des célébrations de L. Robert, depuis les évocations par son successeur aux Hautes études Philippe Gauthier jusqu’à celles de son héritier au Collège de France M. Denis Knoepfler et aux commémorations par ses admirateurs et amis, M. Glen Bowersock à l’Institut de France et Mme Charlotte Roueché lors du doctorat honoris causa du Cent cinquantenaire de l’EPHE – pour ne citer que quelques-unes des illustrations de L. Robert4 –, ce nombre même ne rend-il pas la présente contribution superflue, voire déplacée ? C’est en effet celle d’un simple épigone, né trop tard pour avoir été l’auditeur de L. Robert, alors qu’un diadoque eût apporté sur le maître un authentique témoignage. Tâchant cependant de relever le défi lancé par l’amicale et généreuse invitation de J.-L. Fournet, et éludant ce qui a déjà été écrit ailleurs sur L. Robert, j’aborderai quelques aspects de son enseignement, de son œuvre et de son héritage, en une voie dont je sais qu’elle est aussi périlleuse qu’étroite5.
Les intitulés et les enseignements
3On ne peut évoquer le directeur d’études et le professeur que fut L. Robert sans d’abord rappeler des dates et des lieux. Né en 1904, il étudia au Lycée Louis-le-Grand, au Collège de France et à la Sorbonne, puis, à partir de 1924, à l’École normale supérieure et à l’École pratique des hautes études6. Agrégé des Lettres en 1927, il rejoignit sans délai aucun l’École française d’Athènes. De retour en 1932, il fut élu directeur d’études à la section des sciences historiques et philologiques, où en réalité il ne commença son enseignement qu’en 1933. En 1939 il fut élu professeur au Collège de France.
4L. Robert enseigna dans les deux établissements sous trois intitulés, qui illustrent l’esprit commun et la complémentarité ayant présidé à la définition de maints postes de part et d’autre de la rue Saint-Jacques.
5Rappelons d’abord que, bien qu’aucun diplôme ne fût – et toujours ne demeure –, indispensable pour être admis à enseigner aux Hautes études, L. Robert y présenta en 1932 une thèse de l’École, intitulée « Étude sur la géographie historique de l’Asie Mineure », thèse que néanmoins il paraît avoir passée sous silence dans les notices biographiques qu’il eut à produire ultérieurement, tout comme sans discontinuer il omit le titre d’« Élève diplômé de l’École7 ». Le 13 mars 1932, le jour même où sa thèse recevait un rapport favorable, la section des sciences historiques et philologiques l’élisait, en remplacement de Victor Bérard qui avait été directeur d’études en « Géographie ancienne » jusqu’à son décès en 1931, pour qu’il donnât aux Hautes études un enseignement sous l’intitulé « Géographie historique du monde grec », intitulé qu’il y conserva jusqu’à l’année 19648.
6Au Collège de France, à partir de 1939, L. Robert enseigna dans la chaire « Épigraphie et antiquités grecques », intitulé qui tient à la fois aux rapports originels de l’École pratique par rapport au Collège et à des circonstances individuelles. C’est sur le modèle de la chaire double, ici et là, nommée « Épigraphie et antiquités romaines » de Léon Renier, cofondateur des Hautes études, que l’intitulé « Épigraphie et antiquités grecques » existait de façon parallèle d’une part au Collège, inauguré en 1877 par P. Foucart, puis repris de 1927 à 1932 par M. Holleaux9, et d’autre part comme direction d’études à l’École pratique, sans discontinuité depuis 1892. C’était É. Bourguet qui, après B. Haussoullier, avait occupé à partir de 1927 la direction d’études intitulée « Épigraphie et antiquités grecques », non sans s’adjoindre rapidement P. de La Coste-Messelière comme chargé de conférences (dès 1927-1928), puis comme suppléant (à partir de 1931-1932). Or, le rapport sur la vacance ouverte par la disparition de V. Bérard montre que pour une « direction d’études relative à l’hellénisme » fut évoqué en 1932 précisément le nom de P. de La Coste-Messelière, auquel cependant fut préféré L. Robert, pour un enseignement de « Géographie historique du monde grec », comme on l’a vu10. Pour sa part, P. de La Coste-Messelière ne fut élu directeur d’études que trois mois plus tard, en juin 1932, sur la direction d’études qu’abandonnait alors É. Bourguet, nommé peu avant au Collège de France professeur de « Langue et littérature grecques ». C’est donc P. de La Coste-Messelière qui recueillit et devait conserver toute sa carrière l’intitulé « Épigraphie et antiquités grecques » des Hautes études. Cela n’empêcha pas L. Robert d’enseigner de son côté, « sur la demande qui en a été faite11 », lui aussi l’épigraphie à l’École pratique dès 1933, ainsi que peu après également la numismatique. Mais ce large enseignement des antiquités grecques eut pour cadre officiel, du moins jusqu’en 1964, une direction d’études officiellement dévolue à la seule « Géographie historique ».
7Au Collège de France, É. Bourguet, qui en 1927 avait accepté, suivant l’usage à l’époque dans le processus électoral de cet établissement, « de se présenter en seconde ligne derrière son ancien M. Holleaux » à la chaire d’Épigraphie grecque12, fut en 1932 à son tour élu professeur sous l’intitulé « Langue et littérature grecques », qu’il reprenait donc alors à la suite de M. Croiset. En 1933, après la disparition de M. Holleaux, le même É. Bourguet avança la proposition, à la place de l’intitulé « Épigraphie grecque », d’une chaire d’Archéologie grecque – proposition qui demeura sans suite13. C’est finalement en 1938, sur « le crédit devenu disponible par la retraite de notre collègue Bourguet » précisément, qu’E. Albertini proposa la recréation d’une chaire d’Épigraphie et antiquités grecques14, si bien que les décisions de 1933 et 1938 aboutirent de fait à confier l’enseignement de toutes les études grecques à une seule et même chaire – et ce pour assez longtemps15.
8L’élection au début de 1939 au Collège de France, pour laquelle accepta d’être proposé « pour un classement en seconde ligne16 » également un autre « Athénien » et « Delphien », R. Flacelière, aîné et collaborateur de L. Robert et de tout temps resté son ami, offrit en définitive au jeune élu, âgé seulement de 35 ans, la possibilité d’y enseigner sous l’intitulé même, « Épigraphie et antiquités grecques », dont, à l’École pratique, l’avait privé l’élection de P. de La Coste-Messelière. C’est seulement en 1964 que le départ de ce dernier laissa L. Robert prendre enfin aux Hautes études, et jusqu’à son propre départ en retraite en 1974, l’intitulé élargi « Épigraphie grecque et géographie historique du monde hellénique », sans que, naturellement, cette modification changeât quoi que ce soit à ses enseignements dans les deux établissements. On voit donc que les successions d’intitulés et les choix individuels à l’École pratique et au Collège de France dans le domaine des études grecques, particulièrement dans les années 1927-1939, apparaissent a posteriori comme ayant réalisé moins un « passage des disciplines » qu’une habile répartition, pour la reconduction des mêmes disciplines, entre des personnalités prises, suivant d’ailleurs les précédents illustres de P. Foucart et B. Haussoullier, dans une lignée restreinte d’« Athéniens » et « Delphiens17 ».
9La teneur et le style respectifs des enseignements de L. Robert de part et d’autre de la rue Saint-Jacques sont aisés à restituer, grâce à la série exhaustive de ses rapports sur les conférences et sur les cours, au témoignage d’anciens auditeurs et aux déclarations de l’enseignant lui-même, entre autres dans sa correspondance adressée à G. Klaffenbach18.
10L. Robert aimait professer. Il n’a pas ménagé son temps pour l’enseignement, qui était « systématique, suivi et absorbant19 », et d’autant plus prenant que L. Robert donnait à l’École pratique deux conférences, enseignant là 2 h à 2 h 30 chaque semaine, et au Collège deux séries parallèles d’une quinzaine de cours annuels.
11Entre les deux enseignements, la différence tient moins aux sujets traités ici et là par L. Robert qu’au style et à la méthode, illustrant l’esprit dans lequel l’École pratique fut fondée à l’initiative et sous la houlette de professeurs du Collège, qui souvent y donnèrent pour ainsi dire les travaux pratiques complétant leurs cours20. Les Hautes études étaient le lieu où L. Robert formait aux « tâtonnements du déchiffrement21 » et à la constitution du document comme source philologique et historique. Pour ce faire, il expliquait de grandes séries de documents, avant tout monnaies et inscriptions, qu’il aimait à présenter d’une part dans les publications imprimées22. D’autre part, pour la numismatique grecque, que L. Robert fut le premier à enseigner presque sans interruption aux Hautes études jusqu’à la création d’une direction d’études expressément affectée à cette discipline, il apportait non seulement photographies, mais aussi moulages, voire des monnaies elles-mêmes23.
12Quant à l’épigraphie, L. Robert recourait non seulement aux estampages24, mais également aux inscriptions elles-mêmes, dans les séances régulièrement données au Louvre avec J. Robert25. L’enseignement de l’édition épigraphique se traduisait par des exercices d’établissement ou de traduction éprouvants pour les auditeurs, lesquels devaient étudier les inscriptions, non pas sur photocopies même après l’arrivée de cette technique, mais en allant les copier dans des éditions imparfaites, que le maître utilisait ensuite comme repoussoirs ; d’autres fois, on utilisait des textes nouvellement complétés ou au contraire des textes intacts qui étaient cependant mutilés à dessein pour les besoins de l’enseignement26. On voit que le maître avait le sens de la pédagogie, non moins d’ailleurs que le goût des conseils pratiques, allant ainsi jusqu’à expliquer longuement dans sa conférence la conduite qu’un savant voyageur avait intérêt à tenir face à un molosse rencontré sur le terrain. Quant aux sujets et aux textes traités aux Hautes études, le programme était assez souple. Souvent L. Robert donnait des séances en lien avec les recherches et les questions des auditeurs, dont il surveillait d’un œil vigilant l’attention et l’assiduité27.
13Au Collège de France les cours se déroulaient ex cathedra et sur un ton moins libre28. De la teneur de cet enseignement L. Robert a écrit : « le professeur choisit parmi ses découvertes non point celles qui seraient à exposer, mais celles qui, partant d’une difficulté, doivent être prouvées ; car l’enseignement n’a pas sa plus grande vertu quand il expose et qu’il raconte, mais quand il prouve et qu’il réfute29. » L. Robert passait au crible des cours ses démonstrations et ses publications à venir, articles ou livres entiers30, et ce dans tous les domaines des « antiquités », terme qu’il défendait comme recouvrant « tout ce qui concernait la vie des Anciens31 ». Ses deux enseignements réalisaient assurément, pour l’Antiquité gréco-romaine, le mot d’ordre « docet omnia ».
L’œuvre et l’héritage
14Cette universalité fut celle-là même de l’œuvre écrite de L. Robert, dont on rappellera d’abord, pour les non-antiquisants, quelques traits. L’œuvre compte une trentaine de livres et 450 articles, soit environ 20 000 pages imprimées32. Parmi ces titres, quelque soixante-dix ont pour cosignataire Jeanne Vanseveren, l’une des premières élèves de L. Robert aux Hautes études, devenue son épouse, la compagne de ses voyages et la collaboratrice qui partagea tous ses travaux33. Il faut notamment citer les 42 livraisons successives du Bulletin épigraphique (de 1938 à 1984 ; environ 4 700 p.)34, où J. et L. Robert analysaient et critiquaient annuellement les publications relatives à l’épigraphie grecque, quelquefois il est vrai en des termes si sévères que leurs jugements étaient par avance redoutés. De son côté, L. Robert donna également de maints livres des comptes rendus si développés, jusqu’à quelquefois la taille d’un livre lui-même – originalité de son œuvre critique – que l’on dispose ainsi aujourd’hui à la fois de la « copie » due à des savants de valeur diverse et du « corrigé » par le maître des maîtres : autant de diptyques dont les épigones privés de l’enseignement oral de L. Robert peuvent comparer les deux panneaux pour bénéficier de son magistère au plus haut niveau.
15L’universalité de l’œuvre est illustrée par les aires géographiques et périodes que L. Robert explora et par les domaines où il déploya son érudition et établit la méthode : c’est toute la Méditerranée, la Mer Noire, l’Anatolie ; tout l’hellénisme, de l’époque archaïque à Byzance ; ce sont la littérature, la langue, l’histoire des institutions, la topographie, la faune et la flore, l’histoire de l’exploration de l’Orient ; ce sont la papyrologie, la numismatique, l’archéologie, la géographie historique, l’épigraphie. Parmi les sujets que son génie illumina, citons l’interprétation des épigrammes, les rapports entre Grecs et indigènes, les relations entre cités, Rois et Romains, l’histoire des concours et des cultes, et encore l’unité tout comme les évolutions institutionnelles et sociales d’une civilisation que l’on peut appeler hellénistico-romaine.
16Cette énumération n’est qu’un pâle reflet de la profusion et de la profondeur de l’œuvre, dont le génie consista à confronter et à combiner les sources. L’un des traits marquants est l’exhaustivité. Un antiquisant, et particulièrement un historien de la Grèce antique, a la possibilité, à la différence des spécialistes des périodes ultérieures qui ont souvent pléthore de documents, d’étudier toutes les sources sur le sujet qu’il choisit de traiter, quelle qu’en soit la diversité. Possibilité, l’exhaustivité est également un impératif, que l’œuvre de Robert a maintes fois réalisé.
17La passion d’une connaissance exhaustive conduisit L. Robert à visiter, examiner ou étudier de façon approfondie, de pair avec J. Robert après la Seconde Guerre mondiale, un nombre de régions, de cités, de sites archéologiques antiques, principalement en Grèce et en Turquie, comme sans doute aucun autre savant n’en avait étudié jusqu’à lui35. D’autre part, L. Robert fut, comme il est naturel chez un historien exhaustif, également un inventeur et un éditeur d’innombrables sources : il publia quantité de monnaies et plus encore d’inscriptions nouvelles, particulièrement pour l’Asie Mineure, dont il avait très tôt compris combien elle était – et demeure – un réservoir de sources inédites.
18Dans le domaine de l’épigraphie grecque, que son œuvre a servie plus que toute autre, L. Robert fut « le plus grand spécialiste qui ait jamais existé », a-t-on affirmé36. C’est ce qui lui valut d’être appelé « épigraphiste », étiquette à laquelle pourtant il ne se serait pas laissé réduire, tout comme il s’insurgeait contre le cloisonnement des disciplines, et la séparation par exemple entre les « numismates » et les « historiens37 ».
19La conception, l’écriture et l’enseignement d’une histoire exhaustive avaient en effet pour but et eurent pour résultat le désenclavement de disciplines qui auparavant pouvaient passer pour en être de simples « auxiliaires ». C’est d’une part l’onomastique : après F. Bechtel, qui avait fait l’histoire des anthroponymes grecs, L. Robert fit « l’histoire par les noms », montrant comment tirer du kaléidoscope anthroponymique du monde grec maintes informations sur l’histoire des cultes et des cultures38. C’est d’autre part la numismatique : tout en procédant lui-même à la publication de monnaies, en dressant au besoin des catalogues – et non pas en l’occurrence des corpus –, L. Robert utilisa les monnaies comme sources pour écrire, non pas « l’histoire numismatique », c’est-à-dire « l’histoire des ateliers avec leur organisation et leur production », mais après W. Waddington et T. Reinach, « l’histoire par les monnaies39 ». Aux émissions archaïques et classiques, aux monnayages d’or et d’argent, aux émissions royales, à l’étude des coins et de la métrologie, L. Robert préférait les émissions hellénistiques et impériales, les monnayages de bronze, l’étude des circulations régionales et locales, les types et les légendes monétaires et l’établissement de « monographies numismatiques », pour ce que cela apportait à l’histoire et à la géographie de chaque cité et de chaque province. Ces préférences affirmées, dont se sont en partie éloignées la numismatique et l’histoire monétaire et financière pratiquées par ses successeurs, expliquent que l’œuvre en ce domaine de L. Robert ne soit désormais qu’assez peu souvent mentionnée dans les dictionnaires, Handbooks et synthèses sur la monnaie et la numismatique antiques, qui font aujourd’hui porter l’attention avant tout sur les caractéristiques techniques, la monétarisation et l’histoire économique à plus large échelle.
20L. Robert fut-il le plus savant des érudits hellénistes et le plus prolifique des philologues et historiens « positivistes », à la façon du xixe siècle, comme pourraient le laisser penser à la fois son goût pour l’évocation de quelques devanciers (J. A. Letronne, P. Foucart, F. Imhoof-Blumer, T. Reinach) et certaines appréciations de ses contemporains ou de ses lecteurs40 ?
21Examinons le rapport de L. Robert à l’« archéologie ». On a cru en effet devoir regretter chez lui un intérêt limité pour cette discipline41. Ce serait cependant méconnaître l’idée, fort large, qu’il se faisait de la discipline, à laquelle ressortissaient selon lui « tous les monuments que le sol nous fournit42 ». Ce serait également réduire l’archéologie à la fouille, que d’ailleurs lui-même pratiqua pendant plus d’une décennie, entouré d’une équipe restreinte qu’il dirigea à Amyzon en Carie et à Claros en Ionie. Tout en se justifiant en 1967 de ne pas faire « de l’exposé de ces fouilles la matière de [son] enseignement », L. Robert démontrait dans un cours de 1968 avec quelle acuité il définissait la portée de la fouille suivant les périodes respectives de l’occupation d’un site43. Mais il est vrai qu’à la même époque, L. Robert affichait son scepticisme par rapport aux subtilités de la fouille stratigraphique, et son dédain du « criblage des déblais44 ». Il réprouvait aussi le déguisement de l’archéologie « sous le masque » des sciences exactes, et il exprimait sa réticence par rapport au traitement mécanisé par microfiches ou ordinateur45. Or, c’était l’époque où P. Courbin, d’abord à l’École française d’Athènes dirigée par G. Daux, développait l’application de la fouille stratigraphique, puis, devenu en 1960 directeur d’études à la VIe section de l’École pratique, allait se faire le chantre de cette méthode, puis créer en novembre 1967 un « Bureau d’études des méthodes archéologiques46 ». L. Robert et P. Courbin en vinrent à croiser le fer par publications interposées47. De son côté, L. Robert, contre cette archéologie qu’il disait « triste », défendait, dans une conférence de 1968, une archéologie appelée « humaniste », c’est-à-dire l’interprétation des objets sortis de terre unie à celle des textes48.
22Qu’elle se fondât ou non sur des fouilles, l’archéologie entendue au sens de L. Robert imprègne assurément un domaine dans lequel son œuvre fut des plus novatrices, et où il avait montré sa capacité à susciter de nouvelles questions, dans ce que l’on peut appeler, même s’il n’eût pas employé pareils termes, un nouveau cadre épistémologique. C’était la création de la géographie historique de l’Antiquité grecque, dont le mérite lui revient. Certes, il y avait bien la tradition, en partie commune aux Hautes études et au Collège de France, de la géographie historique d’abord fondée sur les textes, de E. Desjardins à A. Longnon et à son prédécesseur aux Hautes études V. Bérard49, puis celle de R. Dion. Mais c’est L. Robert qui introduisit dans l’histoire grecque la géographie. Ce qu’il appelait la « géographie humaine rétrospective » se fondait sur la contemplation des paysages, la géologie, la botanique, la cartographie, la toponymie, le recensement des vestiges et des ressources de toutes époques, la lecture des voyageurs anciens, l’étude de la vie paysanne, destinés à caractériser tous les sites, fouillés ou non, à retracer les voies de communication, à peupler et définir le territoire extra-urbain. C’était faire la « part du milieu » à la façon de la géographie de P. Vidal de la Blache, et de fait écrire l’histoire dans la « longue durée », perception qui était bien celle de L. Robert, sans qu’il se réclamât pour autant de l’école des Annales.
23L’intuition novatrice consistant à considérer tout document antique non seulement dans son cadre civique et dans son ensemble régional ou provincial, mais aussi dans son milieu géographique, explique aussi la transformation que L. Robert a imprimée à la façon de publier monnaies et inscriptions. À l’édition des monnaies par catalogues de musées et à celle des inscriptions par voyage ou par site, qui depuis le xixe siècle suivait le fil ancien de la découverte topographique et archéologique, L. Robert a substitué, à la faveur de voyages qu’il appelait « historiques », leur publication dans le cadre à la fois physique, humain et institutionnel de la cité50.
24Cependant, malgré les avancées décisives que L. Robert imprima à la géographie des cités, des régions et des provinces, son apport en ce domaine a été discuté. On a caractérisé son approche comme « unsystematic », « romantic » et « a-historical51 ». Il est vrai que sa géographie historique d’une part eut parmi ses objectifs la localisation de toponymes, – particulièrement en Asie Mineure –, et d’autre part se nourrissait des récits de voyageurs du xviiie et du xixe siècle et des nombreux voyages qu’il effectua lui-même avec son épouse. En outre, L. Robert dissimulait mal son attachement, voire sa nostalgie envers l’Orient méditerranéen avant son urbanisation et son industrialisation, comme si un même mode de vie « ancien » – adjectif dont il use quelquefois à la place d’« antique52 » –, unissant l’homme à son milieu naturel, s’était perpétué jusqu’au xxe siècle : « jusqu’en 1960 », dit-il pour le pays turc, dont d’ailleurs il encourageait l’étude géographique53. Aussi ses tableaux insistent-ils sur les éléments durables d’un monde rural et d’une économie qu’il s’attacha à photographier, au propre et au figuré, dans leur caractère avant tout sylvicole, pastoral et agricole, et selon une vision que l’on pourrait dire « naturaliste » ou « déterministe54 » et qui a pu également contribuer à cette représentation de l’économie antique que l’on appelle « primitiviste55 ». Il est pourtant également vrai que L. Robert ne manqua pas de marquer les changements qu’avaient connus depuis l’Antiquité l’aspect physique et les espèces cultivées de tel terroir, notamment dans ses cours de 1969-197056. On a néanmoins contesté depuis quelques affirmations de L. Robert sur la culture de l’olivier dans l’Asie Mineure intérieure, dont ce passionné de l’Anatolie à la fois antique et moderne avait sans doute minimisé l’existence durant l’Antiquité en raison d’une communauté culturale supposée avec l’époque ottomane57.
25Il est remarquable que les réserves exprimées par quelques antiquisants par rapport à la géographie de L. Robert trouvent aujourd’hui un écho chez les historiens de la géographie. Ainsi, O. Orain et M.-C. Robic, dans une étude sur « La géographie au Collège de France », analysent l’élection à une chaire en 1969, après le départ de R. Dion58. C’est L. Robert qui apporta alors un soutien décisif à M. Le Lannou, l’auteur des Pâtres et paysans de la Sardaigne, chef-d’œuvre de géographie régionale teinté de déterminisme, que d’ailleurs il avait allégué dans sa conférence de 1968, vantant là, comme l’année suivante dans son rapport de présentation, l’« humanisme » de M. Le Lannou59. En faveur de ce dernier, L. Robert avançait les notions de « paysages » et de « symbiose » entre « nature » et « groupements humains », pour les opposer à la figure adverse « du spécialiste jargonnant et inféodé “à la civilisation technicienne” ». C’est en ces termes que les deux récents historiens de la géographie analysent cette présentation, soulignant pour finir « le caractère déjà très désuet de [l]a conception de la géographie » du proposant L. Robert. Il est piquant de remarquer que L. Robert lui-même avait en réalité devancé le constat de ce décalage, relevant dès 1974 que sa propre géographie historique demeurait « souverainement ignorée des géographes “de profession”60 ».
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26Un demi-siècle a passé, et trente-cinq ans depuis le décès de Louis Robert. L’homme et l’œuvre demeurent si impressionnants que certains lui vouent un « culte61 ». Est-il sacrilège de se demander quel est le legs de cette œuvre62 ?
27On a déploré « the lack of impact on “mainstream Classics” », remarquant notamment que L. Robert n’avait pas publié d’amples synthèses63. Ses archives montrent certes qu’elles furent bel et bien conçues par lui, pour rester cependant à l’état de projets, puisque jusqu’à la fin priorité fut donnée à la révélation de nouvelles sources. D’autre part, tout en ne cessant d’administrer de justes leçons de méthode, L. Robert se garda également d’exposés de pure théorie, sans doute en « esprit rétif à l’abstraction64 ». Il n’avait pas non plus de penchant pour la théorie épistémologique, veillant d’ailleurs à souligner ses dettes envers les savants du xixe siècle autant qu’à mettre en évidence ses propres innovations, sans jamais pour autant prendre la pose devant les résultats que celles-ci procuraient à sa connaissance incomparable de l’hellénisme et du monde méditerranéen65. C’est sans doute ce tempérament qui explique également son silence, du moins à l’écrit, par rapport aux analyses en termes de structures. On songe d’une part à l’œuvre de son collègue F. Braudel et à cette Méditerranée où L. Robert ne pouvait que trouver des analyses et des traits communs, dans « la distinction d’un temps géographique » et dans le tableau de « la part du milieu ». On pense d’autre part à l’étude structuraliste, par J.-P. Vernant – qui fut élu au Collège de France seulement après le départ en retraite de L. Robert –, de « la pensée religieuse » à laquelle, écrivait Pierre Vidal-Naquet, « je ne pense pas qu’il se soit jamais intéressé66 ».
28Ainsi, L. Robert, passionné qu’il était par « l’homme et son milieu » et par l’homo politicus, n’a pas recherché les conjonctures et les structures économiques, ni non plus vu dans l’homme grec un homo œconomicus67. Aujourd’hui, certes, l’histoire et la géographie humaines et économiques des cités et des territoires de la Méditerranée égéenne se trouvent profondément renouvelées grâce à l’étude des techniques et grâce aux enquêtes collectives que sont les prospections archéologiques – dont les résultats effectifs et respectifs doivent assurément être discutés. Mais on ne saurait reprocher à L. Robert de n’avoir pas connu l’archéologie du survey, d’ailleurs alors inexistante en Méditerranée égéenne.
29L. Robert fut-il un « individualiste farouche68 » ? Au directeur d’une fouille archéologique en Turquie qui lui suggérait de déléguer à de plus jeunes collègues la publication d’inscriptions, le maître avait répondu : « je ne fais confiance qu’à mon épouse69 ». Pareille collaboration, si fructueuse qu’elle fût effectivement, ne suffit cependant pas à épuiser le programme si vaste qu’il avait conçu. Ainsi, L. Robert, qui, en tant que directeur de l’Institut français d’Istanbul (de 1956 à 1964), s’était fait l’éditeur de plusieurs monographies sur la Turquie, s’abstint-il en revanche de répartir entre ses disciples la publication des corpus épigraphiques d’Asie Mineure – si bien qu’en pratique celle-ci fut en partie menée outre-Rhin70. Aussi sa propre interrogation dans sa Leçon inaugurale en 1939 rend-elle a posteriori un son étrange : « L’on doit se demander si la floraison des études épigraphiques en France – je ne crois pas qu’aucun autre pays ait autant de jeunes épigraphistes – ne permettrait pas d’organiser la publication d’autres Corpus71. »
30L. Robert, qui sut individuellement aider et entourer de conseils de jeunes savants prometteurs – jusqu’à leur confier de ses fiches, voire des dossiers entiers –, demeurait circonspect devant les thèses et les jurys72. Peu avant 1970, il en vint à pourfendre par écrit les idées d’équipe et de laboratoire. C’était l’époque, rappelons-le, où la VIe section de l’École pratique des hautes études, créée en 1947 et revendiquant dès lors la recherche collective comme une force et une originalité, se développait, avant de s’émanciper en une sœur cadette, l’EHESS, autour de nombreux laboratoires et équipes73 ; pour l’Antiquité J.-P. Vernant y fondait en 1964 le « Centre de recherches comparées sur les sociétés anciennes », P. Courbin en 1967 le « Bureau d’études des méthodes archéologiques74 ». De son côté, en 1966, L. Robert vitupérait en ces termes : « Dira-t-on […] qu’il faudrait […] “constituer une équipe”, “organiser un groupe de travail”, “créer un laboratoire et une bibliothèque” ? Il ne faut point nier que cela n’arrive un jour, si progressent d’un même pas le manque de curiosité et l’enflure organisatrice des prétentions ignorantes75. » Dans cette alliance chez L. Robert du conseil individuel et du refus du laboratoire collectif, il y a tout à la fois une fidélité et un paradoxe par rapport à l’École pratique des hautes études, créée autour du projet de « laboratoires » et de travail « en commun76 », et comptant aujourd’hui de solides équipes, unies à l’EHESS et au Collège de France.
31S’il faut rappeler que la défiance sur l’évolution des sciences humaines se fondait chez L. Robert sur un discernement prophétique, vox clamantis in deserto, à propos du financement, de l’organisation et de la publication de la recherche, en des prises de position dont la relecture aujourd’hui est confondante par sa lucidité prémonitoire77, on ne peut dissimuler que L. Robert a ignoré, dans les années 1965-1975, plusieurs évolutions épistémologiques, en archéologie, en géographie et en histoire des religions, ainsi que dans le développement de la recherche collective et de ses moyens techniques. Les prises de position de L. Robert, auxquelles sont liées ses propres réactions à la crise universitaire de 196878, ont sans doute quelque peu contribué, de pair avec le zèle de quelques sectateurs de part et d’autre, à accroître dans le milieu helléniste parisien, des années 1970 aux années 1990, la séparation entre deux foyers, l’un considéré comme « positiviste » (EPHE IVe section et Paris-IV), l’autre se développant autour de l’anthropologie, du comparatisme et du structuralisme (EPHE Ve section et EHESS), développement qui connut un tel succès que c’est ce second foyer qui est internationalement connu, pour l’Antiquité classique, comme l’« École de Paris79 ». Il est juste de rappeler qu’il y eut de part et d’autre quelques collègues pour ne pas se retrancher derrière ce clivage, quelles que fussent leurs positions épistémologiques – ainsi que politiques. Pour ne citer ici qu’un disparu, c’est P. Vidal-Naquet qui n’hésitait pas, depuis la rue Monsieur-le-Prince, à professer par écrit son admiration envers L. Robert, à recommander son enseignement, à le faire rééditer enfin80.
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32De Robert, des Robert, nom à jamais fameux au firmament de l’hellénisme, demeure l’œuvre immense et géniale, qui plus est écrite dans une langue et animée d’un souffle tels que s’impose une nouvelle publication complète sous forme électronique, qui contribuerait aussi à l’illustration du français comme langue savante81. Que l’on ne se trompe donc pas sur la « situation » universitaire et épistémologique ici esquissée. Longtemps encore, il sera illusoire d’étudier et d’enseigner le monde gréco-romain si l’on ne s’est pas préalablement imprégné de l’œuvre de J. et L. Robert. De celle-ci on peut affirmer ce qu’il déclarait de A. Wilhelm : « Cette influence-là, la mort ne l’arrête point comme celle d’un homme ; peut-être même l’étendra-t-elle et l’approfondira-t-elle. […] Cela est indispensable pour la solidité et la variété de nos études, et ce serait la meilleure récompense de notre vieux maître pour le labeur ininterrompu d’une longue vie, qui restera toujours une des gloires fondamentales de l’épigraphie et de la science de l’antiquité82. »
Notes de bas de page
1 P. Veyne, Et dans l’éternité je ne m’ennuierai pas, Paris, A. Michel, 2014, p. 144.
2 M. Sartre, « Entretien : Maurice Sartre et le métier d’historien », Anabases, t. 13, 2011, p. 175-206, ici p. 182 (http://journals.openedition.org/anabases/1886).
3 D. Rousset, « Louis Robert », dans P. Henriet (dir.), L’École pratique des hautes études. Invention, érudition, innovation (1868-2018), Paris, Somogy, 2018, p. 393. Voir déjà « Труды Луи Робера, эллиниста и историка греческой цивилизации » (« L’œuvre de Louis Robert, helléniste et historien de la civilisation grecque », en russe), Vestnik Drevnej Istorii, t. 4, 2015, p. 172-181.
4 P. Gauthier, successivement dans Revue archéologique, I, 1986, p. 143-149, Livret 10 (1994-1995) de l’École pratique des hautes études (IVe section), p. xxv-xxxii(repris dans Memorabilia, I. Notices nécrologiques de la section des sciences historiques et philologiques, 1868-2019, textes présentés et annotés par P. Henriet, Paris, 2019, p. 773-785), et dans L. Robert, Choix d’écrits, Paris, Les Belles Lettres, 2007, p. 11-18 (avec là la liste de nombreux autres hommages) ; D. Knoepfler, Revue suisse de numismatique (SNR), t. 65, 1986, p. 265-271 et dans Apports récents des inscriptions grecques à l’histoire de l’Antiquité, Paris, Fayard, 2005, aux p. 32-42 ; G. W. Bowersock, American Journal of Archaeology, t. 90, 1986, p. 171-172, et « Louis Robert : la gloire et la joie d’une vie consacrée à l’Antiquité grecque », Comptes rendus de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 2008, p. 1557-1573 ; C. Roueché, Conférence inédite le 20 juin 2018 à l’EPHE « Le défi Robert : transformation d’une discipline ».
5 Outre les écrits allégués dans les notes suivantes et les archives du Collège de France et de l’EPHE, les pages qui suivent ont bénéficié des remarques et des témoignages de C. Dobias-Lalou, P. Ducrey, D. Feissel, S. Georgoudi, D. Knoepfler, C. Le Roy, L. Migeotte, P. Schmitt-Pantel et M. Sève, que je remercie tous chaleureusement.
6 L. Robert a rappelé comment il fut conduit à suivre les derniers cours de P. Foucart au Collège de France. À l’EPHE, les annuaires (Annuaire 1925-1926. École pratique des hautes études, section des sciences historiques et philologiques, p. 125 ; Annuaire 1926-1927. École pratique des hautes études, section des sciences historiques et philologiques, p. 109) montrent qu’il fut inscrit, en tant qu’« élève-titulaire », en 1924-1925 et en 1925-1926 aux conférences de P. Jouguet, G. Rouillard et P. Regard.
7 Voir, outre Annuaire 1932-1933. École pratique des hautes études, section des sciences historiques et philologiques, p. 104 et 105, aux Archives de l’EPHE IVe section, d’une part, dans le Registre des diplômes (Archives EPHE : 4EPHE, cote provisoire 1602/254, p. 87), la mention du Mémoire de L. Robert « Villes d’Asie Mineure. Études de géographie antique », et d’autre part, dans la série des Rapports sur les thèses (Archives EPHE : 4EPHE, cote provisoire 1602/82), le rapport du 13 mars 1932 par G. Rouillard et É. Bourguet (où sont formulées « en vue de l’impression de ce travail quelques réserves au sujet de la vivacité des termes dont use l’auteur à l’égard de ses devanciers et de la présentation de ces quatre mémoires simplement juxtaposés »). Le livre Villes d’Asie Mineure, Études de géographie antique, Paris, De Boccard, 1935, qui a repris ces mémoires (cf. p. 7), ne fait pas mention, me semble-t-il, de leur lien avec la collation d’un titre – ce qui n’est guère étonnant si l’on considère le cursus de L. Robert, qui se dispensa également de toute autre thèse.
8 Voir L. Robert, Opera minora selecta (cité ci-après OMS) IV, Amsterdam, Hakkert, 1974, p. 63-64.
9 L’intitulé de M. Holleaux fut simplement « Épigraphie grecque ». Voir L. Robert, OMS III, p. 1672 et IV, p. 63 et 366-367.
10 Archives de l’EPHE IVe section, Dossier personnel de L. Robert (cote provisoire 1602/40), « Rapport de la commission chargée de faire des propositions pour le remplacement de Victor Bérard le 13 mars 1932 » (commission composée de S. Lévi, F. Lot, J. Vendryès, J. Zeiller, É. Bourguet, I. Lévy, P. Pelliot), ultime paragraphe : « Le désintéressement de notre collègue Bourguet, qui a l’intention de remettre à la disposition de l’École son traitement, permettra d’examiner à nouveau la question de l’archéologie grecque. La commission unanime propose donc en définitive M. Louis Robert pour la succession de Victor Bérard. » L’adjectif unanime initialement écrit a été en définitive biffé.
11 OMS IV, p. 68. La lecture des Annuaires de ces années-là montre que, tandis que P. de La Coste-Messelière se cantonne dans son enseignement essentiellement à l’architecture, la topographie et l’épigraphie de Delphes, L. Robert consacre une partie de son enseignement à l’épigraphie, avant tout celle de l’Asie Mineure.
12 « Présentation des titres et travaux de Maurice Holleaux, candidat à la chaire d’Épigraphie grecque par Antoine Meillet », 1927, Archives du Collège de France, 2 AP 13, p. 74 (https://salamandre.college-de-france.fr/archives-en-ligne/ead.html?id=FR075CDF_00RAP001&c=FR075CDF_00RAP001_de-629&qid=eas1594027479250).
13 « Rapport en faveur de la création d’une chaire d’Archéologie grecque » du 8 janvier 1933 par É. Bourguet, Archives du Collège de France, Procès-verbaux des assemblées des professeurs du Collège de France, 4 AP 457-c, rapport qui s’ouvre ainsi : « Si j’avais un épigraphiste digne de succéder aux deux savants [P. Foucart et M. Holleaux] qui ont illustré la chaire aujourd’hui vacante, j’aurais été heureux de vous présenter ses titres. » La chaire fut en définitive transformée en chaire d’Histoire des religions. Sur les reconductions et les changements d’intitulés, voir le « Tableau des chaires depuis 1800 » imprimé dans l’Annuaire du Collège de France, e. g. 2013-2014, 114e année, p. 23-58.
14 « Exposé pour la création d’une chaire d’Épigraphie et antiquités grecques », 18 décembre 1938 par E. Albertini, Archives du Collège de France, Procès-verbaux des assemblées des professeurs du Collège de France, 4 AP 488, p. 1 et 14 CDF 37-H1, p. 1 (https://salamandre.college-de-france.fr/archives-en-ligne/ead.html?id=FR075CDF_000AP0004_2&c=FR075CDF_000AP0004_2_de-481 et https://salamandre.college-de-france.fr/archives-en-ligne/ead.html?id=FR075CDF_00RAP001&c=FR075CDF_00RAP001_de-563).
15 Point que L. Robert mit en évidence dans « L’antiquité grecque », Sciences, t. 47, 1967, Numéro spécial consacré au Collège de France, p. 145-158, ici p. 146 (= OMS IV, p. 365-366). De même, V. Perraky, dans W. Feuerhahn (dir.), La politique des chaires au Collège de France, Paris, Collège de France/Les Belles Lettres, coll. « Docet omnia », 2017, p. 277 (https://books.openedition.org/lesbelleslettres/155). Voir infra, n. 66.
16 L’expression est tirée de la « Présentation des titres et travaux de R. Flacelière, candidat à la chaire d’Épigraphie et d’antiquités grecques par E. Albertini », 1939, Procès-verbaux des assemblées des professeurs du Collège de France, 4 AP 489-l (https://salamandre.college-de-france.fr/archives-en-ligne/ark:/72507/r19790zrjz0hhk/f1?context=ead::FR075CDF_00RAP001_de-176).
17 Le jeune Athénien L. Robert avait lui aussi commencé ses travaux sur le terrain à Delphes, en étudiant les documents relatifs aux fêtes, musiciens et athlètes.
18 Les rapports sur les cours et les travaux de L. Robert parus dans les annuaires respectifs des deux institutions ont été réimprimés dans OMS IV, p. 68-364 et V, p. 1-64. Voir aussi G. Petzl, « Louis Robert », dans W. Appel (dir.), Magistri et discipuli. Kapitel zur Geschichte der Altertumswissenschaften im 20. Jahrhundert, Toruń, Wydawnictwo Uniwersytetu Mikołaja Kopernika, 2002, p. 131-139, et P. Schmitt-Pantel, « L’histoire dans la cité : le métier d’historienne », Anabases, t. 28, 2018, p. 267-300, aux p. 274-276. – La correspondance entre G. Klaffenbach et L. Robert, conservée au fonds Louis Robert de l’Académie des inscriptions et belles-lettres (Institut de France) et à la Berlin-Brandenburgische Akademie der Wissenschaften, sera publiée par les soins de K. Hallof et D. Summa.
19 Voir L. Robert, OMS IV, p. 371 ; P. Gauthier, Livret 10 (1994-1995) de l’École pratique des hautes études (IVe section), p. xxix-xxx (non repris tel quel dans le Choix d’écrits cité supra, n. 3), et D. Knoepfler, Revue suisse de numismatique, t. 65, 1986, p. 270. Le poids de la préparation des cours est clairement exprimé dans maintes lettres adressées à G. Klaffenbach.
20 L. Robert n’a que rarement enseigné sur un thème ou un domaine géographique identiques la même année dans les deux établissements ; l’exception est notée OMS IV, p. 134 et 205. De même, les deux cours du Collège traitaient le plus souvent deux sujets différents ; exception relevée OMS IV, p. 342. Une fois, L. Robert indique que « les vétérans les plus chevronnés » ont « été orientés vers les cours du Collège de France » (OMS IV, p. 157).
21 OMS IV, p. 96.
22 Pour la numismatique, la volonté de montrer les publications conduisait L. Robert à recourir à sa bibliothèque personnelle, quitte à y transporter la conférence (cf. OMS IV, p. 118 ; cf. p. 208), suivant en cela un usage initial des Hautes études.
23 OMS IV, p. 143, 177 et 212. Sur l’enseignement numismatique de L. Robert, voir l’article de D. Knoepfler déjà cité, ainsi que F. Delrieux, Bulletin de la société française de numismatique, t. 73, 2018, p. 108-113 (dans un fascicule de cette revue, p. 98-152, en entier consacré à la numismatique à l’EPHE).
24 Relevons, dans Annuaire 1933-1934. École pratique des hautes études, section des sciences historiques et philologiques, la Chronique de l’année 1932-1933, p. 73, l’information suivante : « Les cartons d’estampages d’inscriptions latines réunis par Léon Renier ont été déposés à l’École par M. le conservateur de la Bibliothèque de l’Université », et ce quelques semaines avant que L. Robert ne commence effectivement son enseignement (cf. p. 74). De toute évidence, ces cartons d’estampages sont ceux qui contenaient également les estampages et notes de P. Le Bas (voir CRAI, 2007, p. 655-656, avec la n. 26), précieuses archives pour l’épigraphie grecque dont L. Robert s’est souvent servi. Cette collection, maintenant retournée pour une grande partie à la Bibliothèque interuniversitaire de la Sorbonne, sera en détail inventoriée.
25 Séances devant les pierres au Louvre : OMS IV, p. 150, 166 et 285.
26 Voir OMS IV, p. 99, 119, 123, 142, 143, 228.
27 Voir d’une part OMS IV, p. 149, 207, 268, 334, et les résumés des conférences avec la liste des auditeurs, plus ou moins assidus ; d’autre part G. Petzl, « Louis Robert », op. cit., p. 134 ; enfin, sur la différence de style entre les conférences de L. Robert et celles de G. Le Rider aux Hautes études, cf. P. Gauthier, dans Conférence d’ouverture de M. François de Callataÿ d’histoire monétaire et financière du monde grec, Paris, EPHE, 1999, p. 26-27.
28 Voir entre autres G. Petzl, « Louis Robert », op. cit. et P. Gauthier, Livret 10, op. cit.
29 Voir L. Robert, OMS IV, p. 374 ; Villes d’Asie Mineure, Études de géographie ancienne, Paris, De Boccard, 1962 (2e éd.), p. 418.
30 Les résumés des cours au Collège de France montrent les liens étroits avec les proches publications : OMS IV, p. 106, 114, 125, 234, 258, 287 et 331 ; V, p. 6, 23, 36-37 et 52.
31 Voir L. Robert, OMS IV, p. 367.
32 Bibliographie (presque complète à la date de sa parution) dans L. Robert, Choix d’écrits, Paris, Les Belles Lettres, 2007, p. 21-69.
33 Sur Jeanne Vanseveren (épouse Robert), voir P. Gauthier, Revue des études grecques, t. 115, 2002, p. xxv ; P. Herrmann, Gnomon, t. 75, 2003, p. 190-191.
34 J. et L. Robert eurent pour les deux premières livraisons la collaboration de R. Flacelière.
35 Utile cartographie des voyages de Jeanne et Louis Robert en Turquie dans F. Delrieux, Les monnaies du Fonds Louis Robert (Académie des inscriptions et belles-lettres), Paris, AIBL, 2011 (préface G. Bowersock, avant-propos F. de Callataÿ).
36 P. Vidal-Naquet, Mémoires, II. Le trouble et la lumière 1955-1998, Paris, Éditions du Seuil, 1998, p. 163.
37 « Louis Robert, un exceptionnel épigraphiste et un immense savant », disait P. Vidal-Naquet, L’histoire est mon combat, Paris, A. Michel, 2006, p. 151. « L’épigraphiste – cet être assez mythique à mon avis – », écrivait pourtant L. Robert, OMS VI, p. 36 ; cf. aussi entre autres OMS III, p. 1693 et 1755-1758. – Sur le « numismate “pur” », cf. OMS II, p. 1048.
38 Outre plusieurs articles repris dans le Choix d’écrits et là accompagnés de renvois au reste de l’œuvre, on pourra situer l’apport de L. Robert à l’onomastique grecque grâce à O. Masson, Onomastica graeca selecta III, Genève, Droz, 2000, p. vii-viii.
39 Pour cela et ce qui suit, voir L. Robert, Villes d’Asie Mineure, Études de géographie ancienne, op. cit., p. 420-426 ; A. Dupont-Sommer et L. Robert, La déesse de Hiérapolis Castabala (Cilicie), Paris, Maisonneuve, 1964, p. 65-66 ; OMS IV, p. 207, V, p. 39-40 et VII, p. 195-196 et 223 ; Choix d’écrits, op. cit., p. 703. Pour la situation de L. Robert dans la numismatique grecque, voir e. g. P. Gauthier, dans Conférence d’ouverture de M. François de Callataÿ d’histoire monétaire et financière du monde grec, Paris, EPHE, 1999, p. 23-28 ; les références citées supra, n. 23 ; H. Nicolet-Pierre, Numismatique grecque, Paris, Armand Colin, 2002, p. 60-62.
40 Voir P. Veyne, Et dans l’éternité je ne m’ennuierai pas, op. cit. De son côté, C. Le Roy, Actes du colloque international du centenaire de L’Année Épigraphique, Paris, PUF, 1990, p. 236 a écrit : « Sa méthode de prospection est directement héritée de celle des voyageurs du xixe s. »
41 T. Corsten, dans son compte rendu du Choix d’écrits dans Bryn Mawr Classical Review 2009.01.40 : « archaeology was apparently only rarely considered helpful. »
42 OMS IV, p. 368-369.
43 OMS IV, p. 311-316.
44 OMS III, p. 1780-1783 (« Rapport sur les travaux de l’École française d’Athènes en 1964 », CRAI, 1965) ; IV, p. 285.
45 OMS III (CRAI, 1966), p. 1790, 1793 et 1795 ; CRAI, 1967, p. 2-3.
46 Voir P. Darcque, « Paul Courbin et la méthode Wheeler », Bulletin de correspondance hellénique, t. 120, 1996, p. 315-323, ici p. 318-319, citant les critiques que P. Courbin reçut de R. Martin et L. Robert (qui alors fouillaient ensemble Claros) ; Annuaire. École pratique des hautes études, section des sciences économiques et sociales 1967-1968 (1968), p. 100. – Écho de ces débats encore chez S. Cleuziou, J.-P. Demoule, A. Schnapp, A. Schnapp, « Renouveau des méthodes et théorie de l’archéologie », Annales ESC, t. 28, 1973, p. 35-51, ici p. 45.
47 P. Courbin, Annuaire. École pratique des hautes études, section des sciences économiques et sociales 1966-1967 (1967) : « La 2e conférence a porté, comme les années précédentes, sur les techniques actuelles de l’archéologie : malgré la diffusion encourageante de ces méthodes, un trop grand nombre de chantiers actuels en font tristement sentir la nécessité ; on en dirait autant de certaines extravagances publiées dans les C.R.A.I. »
48 Voir respectivement OMS III, p. 1783 et « Géographie et philologie ou la Terre et le Papier », réimprimé dans OMS IV, p. 383-403 et Choix d’écrits, op. cit., p. 157-171.
49 Voir L. Robert, « Les enquêtes de Victor Bérard, helléniste et géographe, au Proche-Orient de 1887 à 1896 », OMS V, p. 111-122.
50 Ainsi s’explique que les résultats des premières explorations menées par L. Robert en Carie (en 1932 et 1934), initialement destinés à être publiés dans la série traditionnelle des voyages épigraphiques que constituaient les Monumenta Asiae Minoris antiquae, n’y aient pas finalement trouvé place, pour former plutôt la matière entre autres de l’étude globale des cités du plateau de Tabai. Voir OMS IV, p. 132, 273, 296 et 369-370.
51 Cf. J. Ma, The Classical Review, t. 59, 2009, p. 205-208, ici p. 207, compte rendu du Choix d’écrits, qu’a contrebalancé C. P. Jones, « The legacy of Louis Robert », JRA, t. 22, 2009, p. 735-738.
52 Voir sur ce point le changement de sous-titre, de Villes d’Asie Mineure, Études de géographie antique, Paris, De Boccard, 1935 à Villes d’Asie Mineure, Études de géographie ancienne, op. cit., qui est une réimpression photographique augmentée de 200 p. La nouvelle partie présente aux p. 429-430 la justification du changement d’adjectif : « je considérerais volontiers qu’il existe pour les pays grecs “une géographie ancienne”, qui comporte deux sections successives et souvent, sinon toujours, inséparables, la géographie “antique” et la géographie “byzantine”. »
53 « La terre et le papier. À la rencontre de l’Anatolie », L’histoire, t. 62, décembre 1983, p. 88-93, repris dans le recueil La Grèce ancienne, Paris, Éditions du Seuil, 1986, p. 15-25, ici à la p. 18. Cette conception est très sensible dans X. de Planhol, De la plaine pamphylienne aux lacs pisidiens. Nomadisme et vie paysanne, Paris, Maisonneuve, 1958, étude de géographie contemporaine de la Turquie (publiée sous la direction de L. Robert à l’Institut d’Istanbul).
54 Cf. OMS IV, p. 168 ; V, p. 113 et 121.
55 Voir infra.
56 Voir OMS IV, p. 319 et 350 ; À travers l’Asie Mineure. Poètes et prosateurs, monnaies grecques, voyageurs et géographie, Paris, De Boccard, 1980, p. 65-66.
57 Voir S. Mitchell, « Olive cultivation in the economy of Roman Asia Minor », dans S. Mitchell, C. Katsari, Patterns in the Economy of Roman Asia Minor, Swansea, The Classical Press of Wales, 2005, p. 83-113.
58 « La géographie au Collège de France (milieu xixe-milieu xxe siècle), ou les aléas d’une inscription disciplinaire », dans W. Feuerhahn (dir.), La politique des chaires au Collège de France, Paris, Collège de France/Les Belles Lettres, coll. « Docet omnia », 2017, p. 435-480, ici aux p. 475-477 (https://books.openedition.org/lesbelleslettres/176).
59 OMS IV, p. 397, aussi Choix d’écrits, op. cit., p. 167.
60 OMS IV, p. 63.
61 Voir M. Errington, compte rendu de B. Virgilio, Le roi écrit, 2011 (en ligne) http://bmcr.brynmawr.edu/2012/2012-10-31.html.
62 Legs déjà discuté, cf. les deux articles cités supra, n. 51.
63 J. Ma, The Classical Review, op. cit., p. 207-208.
64 B. Holtzmann, « Louis Robert », Encyclopaedia Universalis, Universalia, 1986, p. 596-597 ; cf. P. Gauthier, dans L. Robert, Choix d’écrits, op. cit., p. 11.
65 Ainsi, on notera la réserve de L. Robert sur la formulation certes élogieuse, mais trop théorique à son goût, qu’il avait relevée dans un compte rendu très favorable d’un de ses ouvrages de numismatique par E. Lepore : « Les termes suivants sont peut-être un peu abstraits, mais je les crois justes : “quel che più importa è la profonda esigenza di storicizzazione integrale della ricerca numismatica” » (OMS II, p. 1048).
66 P. Vidal-Naquet, Mémoires, II, p. 164. – Sur J.-P. Vernant et L. Robert, cf. J.-P. Vernant, De la Résistance à la Grèce ancienne, Paris, EHESS, 2014, p. 65-67.
67 Ainsi s’explique sans doute le fait que L. Robert et son œuvre ne soient que rarement cités dans les synthèses et manuels d’histoire économique de la Grèce ancienne.
68 B. Holtzmann, « Louis Robert », art. cit.
69 Mot rapporté par C. Le Roy. – Sur l’« équipe » que L. Robert formait avec son épouse Jeanne, voir aussi P. Gauthier, Livret 10 (1994-1995) de l’École pratique des hautes études (IVe section), p. xxx (repris dans Memorabilia, I, op. cit., p. 780).
70 C. Le Roy, Centenaire de L’Année épigraphique, op. cit., p. 237 : « Il n’était pas toujours simple d’étudier les inscriptions grecques d’Asie Mineure à l’ombre de Louis Robert ; il est encore moins simple de le faire après lui. »
71 OMS III, p. 1692.
72 Ainsi le dossier du cocher Porphyrios confié à A. Cameron, cf. Porphyrius the Charioteer, Londres, Oxford University Press, 1973, p. v-vi, comme a bien voulu me le signaler – et je l’en remercie – M. G. W. Bowersock ; cf. « A. Cameron », Proceedings of the American Philosophical Society, t. 162, 2018, p. 305-312, à la p. 309. – Voir d’autre part OMS VI, p. 673 = Choix d’écrits, op. cit., p. 122.
73 Voir B. Mazon, Aux origines de l’École des hautes études en sciences sociales. Le rôle du mécénat américain (1920-1960), Paris, Le Cerf, 1988, p. 107-110 ; J. Revel et N. Wachtel (dir.), Une école pour les sciences sociales. De la VIe section à l’École des hautes études en sciences sociales, Paris, Le Cerf, 1996, p. 16 ; P. Henriet (dir.), L’École pratique des hautes études, op. cit., p. 124 et 136.
74 Voir J.-P. Vernant, Œuvres. Religions, rationalités, politique, Paris, Éditions du Seuil, 2007, vol. II, p. 1790, avec cette phrase : « Ni mon œuvre propre, ni ma vie, ni ma personne ne peuvent être séparées de l’équipe », qui résume un tempérament tout autre que celui de L. Robert ; d’autre part P. Vidal-Naquet, Mémoires, op. cit., vol II, p. 180 ; enfin, P. Henriet (dir.), L’École pratique des hautes études, op. cit., p. 405.
75 Documents de l’Asie Mineure méridionale, Inscriptions, monnaies et géographie (publié, remarquons-le, par le « Centre de recherches d’histoire et de philologie de la IVe section de l’École pratique des hautes études », créé peu auparavant), Genève, Droz, 1966, p. 99. Voir aussi OMS III, p. 1790 et 1795.
76 Voir e. g. V. Duruy, « Rapport à l’Empereur à l’appui de deux projets de décret relatifs aux laboratoires d’enseignement et de recherches et à la création d’une École pratique des Hautes Études » et la lettre de L. Renier du 20 janvier 1869 dans L’École pratique des hautes études. Documents pour servir à l’histoire de la section des sciences historiques et philologiques, Paris, Émile Bouillon, 1893, p. 3 et 120 ; cf. P. Henriet (dir.), L’École pratique des hautes études, op. cit., p. 82, 90, 330, 333 et 421.
77 OMS III, p. 1789-1795 ; OMS VI, p. 665-681 = Choix, op. cit., p. 115-129.
78 P. Vidal-Naquet, Mémoires, op. cit., vol. II, p. 164 : « Politiquement, il se voulait un homme de gauche. Je l’ai entendu me dire, en 1967, qu’il avait voté communiste à défaut de pouvoir voter PSU. Mais ces bons sentiments s’effondrèrent sous le choc de Mai 68. » – C. Charle et E. Telkès, dans Les professeurs du Collège de France. Dictionnaire biographique 1901-1939, Paris, Institut national de recherche pédagogique, 1988, p. 219, indiquent : « Sillonniste dans sa jeunesse, ensuite sans engagement précis. » – Échos de mai 1968 chez L. Robert, OMS IV, p. 328.
79 Voir P. Vidal-Naquet, Mémoires, op. cit., vol. II, ainsi que L’histoire est mon combat, Paris, A. Michel, 2006, p. 148-157.
80 Voir P. Vidal-Naquet, Mémoires, op. cit., vol. II, p. 163-165. C’est le même P. Vidal-Naquet qui proposa aux Belles Lettres de publier le Choix d’écrits, et cela me valut de continuer jusqu’en 2006 les stimulants échanges que j’avais débutés en 1982 lors d’un mémorable rendez-vous rue du Cherche-Midi.
81 C. Le Roy, Actes du colloque international du centenaire de L’Année Épigraphique, op. cit., p. 140 : « Je ne suis pas près d’oublier ce mot d’un collègue de Berkeley […] : “Nous avons dû apprendre le français à cause de Louis Robert”. » – Il est significatif de l’époque et la situation académique de L. Robert que son œuvre écrite ne compte presque aucune publication en anglais, et guère de sa propre initiative.
82 OMS III, p. 1755 (déjà cité par P. Gauthier, Revue archéologique, I, 1986, p. 143-149).
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Ma grande église et ma petite chapelle
150 ans d’affinités électives entre le Collège de France et l’École pratique des hautes études
Jean-Luc Fournet (dir.)
2020