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Les bibliothèques et la transition numérique

 | 
Pascal Plantard
, 
Agnès Vigué-Camus

3e partie : Carnet de voyage

4. Quand la digital divide s’impose aux bibliothèques : une analyse américaine

Alice Robbin

Volltext

Remerciements

Je tiens à remercier mes deux collègues, le Pr Kathleen de la Peña McCook, de l’université de Floride du Sud (University of South Florida) et le Pr Emerita Jean Preer, de l’université de l’Indiana (Indiana University), pour leur relecture et leurs suggestions. Toutes les erreurs ou omissions sont de ma responsabilité.

  • 1 « Le terme “bibliothèque publique” désigne une bibliothèque qu’utilisent gratuitement tous les rési (...)
  • 2 Tout au long de ce chapitre, nous faisons référence aux populations « défavorisées ». Je me repose (...)

1Ce chapitre s’intéresse aux actions politiques majeures qui ont été menées au nom de la réduction de la fracture numérique et de la création de l’inclusion numérique, depuis les prémices en 1946 et jusqu’à leur point culminant avec la législation fédérale du début du xxie siècle. Cette législation constitue un exemple probant de la complexité des engagements juridiques, structurels et institutionnels pour réduire l’inégalité sociale par l’intermédiaire des bibliothèques publiques. On précisera ici le contexte de cette politique numérique en s’attachant à faire saisir aux lecteurs en quoi les missions des bibliothèques se construisent à la croisée des programmes promus par le gouvernement fédéral et des traditions locales collectives dans les États. Se mêlent ainsi la mission d’éducation du peuple, la vision d’un nécessaire progrès technologique et les visées démocratiques, des missions qui se déclinent différemment dans chaque État. Cette perspective suppose de réaliser une brève histoire des bibliothèques publiques locales aux États-Unis1, et de la manière dont elles obtiennent les ressources pour réduire l’inégalité sociale et économique. Comment ont-elles cherché à créer et assurer l’équité d’accès, et à donner corps à leur engagement démocratique par des programmes et des services qui améliorent les chances de s’en sortir des « défavorisées2 » de la société ?

2Après un rappel des valeurs et des convictions idéologiques sur lesquelles se fonde l’attribution de ressources aux bibliothèques publiques locales, nous présenterons une sélection d’actions politiques majeures menées au nom du progrès technologique et de la mission éducative des bibliothèques. La troisième partie décrit le contexte des initiatives des bibliothèques publiques à l’échelle des États, en s’appuyant sur l’exemple de l’État de l’Indiana.

Le contexte : valeurs et convictions idéologiques aux fondements des bibliothèques

  • 3 Jorge Schement, “Imagining fairness : Equality and equity of access in search of democracy”, in Nan (...)
  • 4 Kathleen de la Peña McCook, “Poverty, democracy, and public libraries”, in Nancy Kranich, Libraries (...)
  • 5 George S Bobinski, Carnegie libraries : Their history and impact on American public library develop (...)
  • 6 Frederick Stielow, “Reconsidering Arsenals of a Democratic Culture : Balancing symbol and practice” (...)

3Les idéaux d’inclusion, d’équité et d’égalité garantis par les documents fondateurs de la nation sont les premiers à définir le rôle des bibliothèques dans la société3. Ces idéaux sont inextricablement mêlés aux concepts de liberté, de démocratie, de gouvernance, de citoyenneté, de participation politique et d’égalité des chances invoqués par les fondateurs de la République4. La démocratie dépendait de l’éducation populaire, et les bibliothèques étaient essentielles pour diffuser la connaissance auprès des citoyens. À ce titre, le principe selon lequel les bibliothèques étaient une structure éducative fut établi assez tôt5. Au niveau local, les bibliothèques publiques « sont devenues l’affirmation civique et l’emblème d’un mode de vie démocratique les plus visibles6 ».

  • 7 Victor Ferkis, “Technology and American political thought : The hidden variable and the coming cris (...)
  • 8 Caroll W., Jr. Purcell, Technology in America : A history of individuals and ideas, 2e ed., Cambrid (...)
  • 9 George S. Bobinski, op. cit., p. 5.
  • 10 La section 8 de la Constitution des États-Unis énumère les pouvoirs de l’État fédéral. Ceux qui son (...)

4Le second fondement historique de l’engagement idéologique pour la récente « réduction de la fracture numérique » se trouve (de manière suggestive) dans la conception philosophique libérale de la relation entre technologie, valeurs et institutions politiques d’une part et entre technologie et progrès vers le bien-être intellectuel et matériel d’autre part7. Depuis le xviiie siècle et jusqu’au xxie, le point de vue dominant est que le progrès scientifique et technologique ainsi que l’innovation contribuent à augmenter le potentiel de développement de l’individu et le bien-être global de la société. L’invention (la technologie) a bâti la nation ; et avec l’énergie entrepreneuriale « est arrivé un nouvel ensemble d’institutions conçues pour stimuler, transmettre et appliquer cette nouvelle technologie8 ». Cet idéal a également stimulé la création et le développement des bibliothèques9. L’État avait un rôle interventionniste « positif » et donc approprié, non seulement pour apporter son soutien aux bibliothèques en tant qu’institution éducative, mais également pour contribuer à construire une infrastructure technique et d’information qui reposerait sur la recherche scientifique et l’innovation10.

  • 11 Kathleen de la Peña McCook, op. cit., p. 28.
  • 12 Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique, 1835/1840.

5Un troisième élément constitutif de la philosophie politique de la république et de son dessein constitutionnel reflète l’histoire de l’engagement idéologique pour une structure d’État fédérée et très décentralisée, qui a eu un effet significatif sur la création et le financement des bibliothèques publiques. L’État étant une menace pour la liberté individuelle et l’autonomie, son pouvoir devait être modéré, et même restreint, car l’État était coercitif. Comme avec la plupart des autres politiques publiques, la responsabilité de créer et de financer les bibliothèques publiques était laissée aux États et aux collectivités locales qui étaient, depuis le xixe siècle, financés par « l’imposition locale, administrés par des juridictions locales, et supervisés par des experts techniques élus ou nommés11 ». Une autre logique est à l’œuvre qui émane de la société civile. Les pouvoirs assignés « au peuple », c’est-à-dire qui ne sont pas explicitement de la responsabilité d’un gouvernement, constituent un très vaste espace politique de participation pour les citoyens individuels dans la société civile12.

  • 13 L’American Library Association (ALA) (association des bibliothèques américaines) fut créée en 1876. (...)
  • 14 Andrew Carnegie est le bienfaiteur à qui l’on doit principalement la création de bibliothèques publ (...)
  • 15 Il est important de souligner que depuis son origine, la nation a vu s’affronter des conceptions co (...)
  • 16 Deborah Stone, ibid., p. 355

6La politique publique privilégie la société civile et l’activité privée (le marché) qui comprend le secteur privé à but lucratif ou non, lui-même incluant les associations professionnelles13, les entreprises, et les philanthropes et organisations philanthropiques14, ainsi que les services publics qui ne sont pas des organes d’État tels que les universités, qui prennent en charge la recherche et sont responsables de la formation des professionnels de bibliothèque15. Cependant, les paradoxes dominent au sein des politiques publiques car les conceptions du modèle de société – la cité (communauté des citoyens) ou le marché – ont évolué dans le temps, c’est-à-dire que les politiques publiques privilégient tantôt le collectif, tantôt l’individuel. C’est, observe Stone, une histoire d’équilibrage entre « aspirations normatives et moyens pragmatiques16 ».

Actions menées au nom du progrès technologique et de l’action éducative

7Des décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale jusqu’à nos jours, l’autorisation et l’affectation par l’État fédéral de fonds pour financer les bibliothèques publiques et autres types de bibliothèques n’ont cessé de fluctuer, dans le contexte de débats houleux sur le rôle de l’État fédéral. Comme toujours, le débat tourne autour de ce qui constitue « l’intérêt public ». La mobilisation politique de l’American Librairy Association (ALA) et d’autres organisations de la société civile pour réduire les inégalités d’accès à l’information a joué un rôle essentiel de soutien à l’action fédérale. L’investissement fédéral dans l’éducation et la technologie s’appuyait sur les initiatives privées d’organisations philanthropiques (des fondations) qui ont consacré des milliards de dollars à l’innovation dans le domaine éducatif, y compris la recherche et le développement des infrastructures (Bill & Melinda Gates Foundation).

Library Services Act : une loi pour financer les bibliothèques

  • 17 Congrès américain (US Congress). Sénat. Public Library Service Demonstration Bill (Projet de loi su (...)
  • 18 James W. Fry, “LSA and LSCA, 1956-1973 : A legislative history”, Library Trends, 1975, 24(1), p. 8.
  • 19 LSA, loi de 1956 sur les services de bibliothèque. Public Law [droit public] 597.

8À partir de 194617 et au cours des dix années suivantes, le Congrès organisa une série de consultations pour fournir un financement fédéral afin d’améliorer les bibliothèques publiques des États, notamment en raison de leur insuffisance ou leur non-présence dans les zones rurales. Le discours de soutien au projet de loi de 1946 reposait sur le rôle joué par les bibliothèques publiques dans la création d’une société éduquée, nécessaire à l’épanouissement de la démocratie et à la pleine participation des citoyens vivant dans les régions rurales pauvres du pays. Au fil des consultations, « il apparut clairement qu’une forme d’aide fédérale serait nécessaire18 ». Malgré une vaste opposition du Congrès, il y eut aussi une prise de conscience croissante des inégalités éducatives, d’une discrimination raciale considérable, et de changements démographiques importants. L’investissement dans la recherche et l’éducation rectifierait ces problèmes, prétendaient les partisans du projet de loi de 1946. Après dix années d’échec, les consultations aboutirent à l’adoption du Library Services Act of 195619. L’ALA joua un rôle crucial en apportant un témoignage convaincant qui rendait compte du besoin de bibliothèques publiques. Elle mobilisa également ses membres dans les États en faveur de la formation de bibliothécaires professionnels par des programmes universitaires de sciences de l’information et des bibliothèques.

  • 20 Douglas Raber, “Ideological opposition to federal library legislation : The case of the Library Ser (...)
  • 21 Ibid., p. 164.

9En contraste avec l’optimisme de l’ALA qui avait « considéré l’État comme un instrument au service des citoyens », pour les membres conservateurs du Congrès, l’autorisation et l’affectation de financement devinrent l’« épicentre symbolique d’un débat entre deux idéologies politiques très différentes et leurs conceptions du rôle adéquat de l’État dans la société civile20 ». Douglas Raber faisait observer que « même le [modeste] LSA était vu comme une pente dangereuse » et « même des bibliothécaires se méfiaient des implications bureaucratiques d’un tel programme, et certains étaient ouvertement opposés à une aide fédérale aux bibliothèques21 ». Les membres conservateurs du Congrès dénonçaient l’aide fédérale parce qu’elle représentait le « communisme » ou le « socialisme » et la perte d’un système d’entreprise libre, parce que le marché serait dirigé par l’État et parce qu’elle signifierait la fin des droits des États et des augmentations d’impôt.

  • 22 Loi de 1964 sur les services et la reconstruction des bibliothèques. Public Law [droit public] 88-2 (...)
  • 23 Loi de 1956 sur l’immigration et la nationalité.
  • 24 Public Law [droit public] 89-236.
  • 25 Conseil national de la race.
  • 26 Kathleen de la Peña McCook, “Librarians as advocates for the human rights of immigrants”, School of (...)

10Le LSA fut amendé avec succès en 1962 et révisé lors du Library Services and Reconstruction Act of 196422 (LSCA). Dans les années 1960, la majorité conservatrice du parti républicain qui avait dominé le Congrès au cours des années 1940 et 1950 fut remplacée par une majorité libérale du parti démocrate. Sous la présidence de Lyndon Johnson, les années 1960 furent l’époque de « La grande société », une expansion du gouvernement fédéral dans tous les secteurs de l’économie, et tout particulièrement dans l’éducation, la santé et l’assistance sociale, avec un développement significatif des services aux populations défavorisées suite à des recherches approfondies ayant montré des situations de graves inégalités, de discrimination et de manque d’opportunités inscrites dans la durée. C’est l’adoption de l’Immigration and Nationality Act of 195623 qui allait prendre une importance particulière dans les décennies à venir, pour la nation et tout spécialement pour les bibliothèques en termes de services qu’elles allaient être appelées à fournir24. Cette loi, qui élargissait l’éligibilité à la citoyenneté, entraîna au cours des décennies suivantes la plus grande augmentation du nombre de nouveaux Américains depuis le début du xxe siècle, et conjointement une diversité raciale et ethnique de la population qui n’avait encore jamais été atteinte. La loi augmentait la pression sur les administrations à tous les niveaux en termes d’assistance sociale, et contribuait en définitive à accroître le sentiment nationaliste anti-immigrant (parfois chez d’anciens immigrants eux-mêmes !) L’ALA, elle, adopta une position activiste à la manière d’autres organisations nationales telles que le National Council of La Raza25, au nom du développement des programmes et services de bibliothèque pour la population non anglophone et pour les immigrants avec ou sans papiers26.

  • 27 James W. Fry, art. cit., p. 20.
  • 28 Peter F. Fuller, “The politics of LSCA during the Reagan and Bush Administrations : An analysis”, T (...)
  • 29 Ibid., p. 309.

11En 1970, le LSCA fut renouvelé pour cinq ans et amendé de façon à mettre l’accent sur les services destinés aux populations défavorisées des zones rurales et urbaines, à consolider les bibliothèques des grandes villes, à étendre le financement aux institutions des États et aux personnes physiquement handicapées, et à consolider l’administration des bibliothèques d’État27. Renouvellements et amendements se poursuivirent au cours des deux décennies suivantes. Trois présidents républicains – Richard Nixon, Ronald Reagan et George H. W. Bush –, philosophiquement opposés au financement des bibliothèques par l’État fédéral et au pouvoir croissant de l’État fédéral, firent leur possible pour rendre une partie du pouvoir aux États. Toutefois ces trois administrations échouèrent à mettre fin au financement fédéral des bibliothèques et de leurs services, bien que les dotations soient réduites parallèlement à la détérioration des conditions économiques au cours des années 1970 et 1980. Comme auparavant, l’ALA démontra son efficacité en tant que groupe d’intérêt. L’ALA « exerce », comme le fait observer Peter Fuller, « une influence considérable dans le domaine des politiques relatives aux bibliothèques28 ». Bien que les présidents Reagan et Bush aient échoué à supprimer le financement du LSCA et que les majorités du parti démocrate aient prévalu au cours des années 1980 et 1990, le statu quo fut maintenu car même si les bibliothèques locales restaient très populaires dans les circonscriptions des représentants au Congrès, les dotations effectives continuèrent de refléter un engagement budgétaire très modeste de la part du Congrès. L’ALA et sa base « ne pouvaient pas soutenir l’effort d’augmenter significativement les dotations du LSCA29 ».

  • 30 Robert Britt. Horwitz, The Irony of Regulatory Reform : The Deregulation of American Telecommunicat (...)

12Cependant, la philosophie politique des trois administrations républicaines monta en puissance au cours des années 1970 et 1980, pour abroger les politiques de « l’Ère progressiste » et du « New Deal » qui réglementaient les infrastructures de la nation depuis les années 1930. Le rôle de l’activité régulatrice de l’État fédéral dans de nombreux secteurs de l’économie, que l’on avait considérés comme étant de la responsabilité fédérale telle que définie par la clause sur le commerce entre États de la Constitution américaine, s’en trouva grandement affecté. La réforme de la régulation était préconisée par les économistes conservateurs partisans du libre marché qui voyaient dans « les agences de régulation de vastes bureaucraties dont l’arbitraire engendrait l’inefficacité économique et un protectionnisme artificiel30 ». Les politiques publiques menaient à la dérégulation de nombreux secteurs économiques, dont celui qui allait affecter le plus les bibliothèques : les télécommunications. Les bibliothèques étaient maintenant confrontées à un environnement de communications extrêmement complexe et fragmenté, avec peu de contrôles sur les coûts de télécommunication.

Une politique fédérale de soutien au numérique

  • 31 « C’est l’économie, idiot ».
  • 32 Département du commerce des États-Unis, 1995, 1998, 1999, 2000.

13Avec le slogan « It’s the economy, stupid31 », la relation entre le gouvernement fédéral et ceux des États changea à nouveau lorsque le président démocrate Bill Clinton fut élu en 1992 puis réélu en 1996. Ce fut une décennie de reprise économique et d’activisme du gouvernement fédéral. Les engagements historiques des bibliothèques publiques pour la réduction des inégalités d’accès à et de mise à disposition des services d’information s’alignèrent parfaitement sur les concepts de « fracture numérique » (les « connectés et non-connectés ») et d’« e-intégration » (inclusion numérique), caractérisés dans une série de rapports gouvernementaux intitulés Falling through the Net, remis entre 1995 et 200032.

  • 33 LSTA, loi de 1996 sur les services de bibliothèque et la technologie. Public Law [droit public] 104 (...)
  • 34 Le service universel est « le principe selon lequel tous les Américains devraient avoir accès aux s (...)

14Avec le redressement de l’économie survinrent une vague nouvelle et plus importante de financement fédéral pour les bibliothèques, ainsi que de nouvelles initiatives pour réduire les inégalités économiques et sociales et investir dans le développement d’une infrastructure nationale d’information et de communication. Le LSCA fut abrogé et remplacé par le Library Services and Technology Act of 199633, qui prévoyait cinq années de subventions obligatoires étroitement définies, gérées par les bibliothèques d’État. L’un des principes les plus importants énoncés dans cette loi était l’extension de « l’objectif traditionnel de service universel pour y inclure un accès accru tant aux télécommunications qu’aux services avancés […] pour les consommateurs vivant dans des zones rurales et insulaires et pour les consommateurs à faible niveau de revenus34 ». Tous les types de bibliothèques pouvaient être financés, ce qui élargissait l’aide aux bibliothèques des écoles, des établissements secondaires, des universités et aux bibliothèques spéciales. La législation encourageait les réseaux de partage de ressources électroniques afin de connecter les fournisseurs et les consommateurs de services de bibliothèque aux ressources, et orientait particulièrement les services de bibliothèque à destination des populations mal desservies ou défavorisées des collectivités urbaines et rurales, y compris les personnes handicapées et les familles pauvres.

  • 35 Loi de 1996 sur les télécommunications. Public Law [droit public] 104-104.
  • 36 Roger Richman, “Local government, federalism, and the telecommunications revolution”, State and Loc (...)

15L’époque ne vit cependant pas disparaître la philosophie du libéralisme économique ; elle était désormais enracinée dans l’agenda politique, quel que soit le parti politique majoritaire au Congrès ou détenant la présidence. Les instincts pragmatiques qui privilégiaient le marché par rapport à la collectivité prévalurent. Davantage de dérégulations furent introduites dans le secteur des télécommunications avec l’adoption du Telecommunications Act of 199635. Son but explicite était d’ouvrir tous les marchés de la télécommunication à la concurrence en ôtant les barrières à l’entrée de nouveaux concurrents et en accélérant le déploiement du secteur privé par la dérégulation36. L’intention était d’imposer la légitimité de l’État fédéral à agir dans l’intérêt de la nation en régulant les télécommunications (service téléphonique) dans un domaine traditionnellement réservé aux collectivités locales et aux États. Le Congrès fit appel au secteur privé pour fournir un service universel et un accès aux télécommunications avancées aux écoles, aux services de santé et aux bibliothèques à des prix réduits, et pour améliorer la distribution et encourager le développement des télécommunications et des technologies de l’information dans le domaine éducatif à travers des partenariats public-privé.

  • 37 Jorge Schement, op. cit., p. 17.
  • 38 John Carlo Bertot, Paul T. Jaeger, Lesley A. Langa, et Charles R. McClure, “Public access computing (...)
  • 39 Paul Krugman, “Remembrance of booms past”, The New York Times, 23 mai 2016. [En ligne] < http://www (...)
  • 40 Leslie Kaufman, “Survey finds rising reliance on libraries as a gateway to the Web”, The New York T (...)
  • 41 Voir les valeurs centrales (« Core Values ») de l’ALA sur <www.ala.org/aboutala/>.
  • 42 Ian Chant, “Gates Foundation prepares to exit library ecosystem”, Library Journal, 22 mai 2014. [En (...)
  • 43 Kathryn Zikuhr, Lee Rainie, Kristen Purcell et Maeve Duggan, How Americans Value Public Libraries i (...)

16L’émergence de l’Internet renoua avec l’optimisme selon lequel « les technologies de l’information et des communications [seraient] le principal outil politique permettant à tous les citoyens de participer aux activités économiques, politiques et sociales fondamentales à une société démocratique qui soit aussi une société bonne37 ». Les agences gouvernementales lancèrent des initiatives afin de mettre en place un e-government, créant des sites internet publics et commençant à donner accès à l’information aux citoyens via Internet, ce qui amena également les bibliothèques publiques à fournir des services d’information sur ce modèle de e-government38. Les entreprises investirent massivement dans les technologies de l’information et leur infrastructure informatique39. Avec cette augmentation importante du financement fédéral, les bibliothèques publiques, en réponse aux exigences des usagers, émergèrent pour devenir au xxie siècle une « porte d’accès au Web40 » pour la population locale, ce qui renforçait l’engagement des bibliothèques publiques pour un accès équitable à l’information, aux services de bibliothèque, à la culture et à la diversité41. La fondation Bill & Melinda Gates entreprit des initiatives pour financer la technologie informatique dans des milliers d’écoles et de bibliothèques publiques, un programme qui commença dans les années 1990 et se poursuivit jusqu’en 201442. La considérable injection de fonds par la fondation Gates fut suivie d’autres fondations privées. L’Institute for Museum and Library Services (IMLS ; institut des services de musée et de bibliothèque), l’ALA et diverses fondations accordèrent des bourses de recherche universitaires et des subventions à des programmes dans le domaine des sciences de l’information et des bibliothèques. Des enquêtes nationales réalisées par le Pew Research Center au cours des décennies suivantes démontrèrent un soutien très important aux bibliothèques publiques locales de la part des habitants concernés43. Le soutien des populations locales était critique pour déterminer si la bibliothèque pouvait continuer à moderniser sa technologie informatique et son infrastructure de télécommunications, et à proposer des programmes et des services d’aide aux membres défavorisés de la population.

  • 44 Public Law [droit public] 94-462.
  • 45 Public Law [droit public] 107-347.

17L’IMLS, nouvelle agence fédérale indépendante créée par le Museum and Library Services Act of 199644, fut nommé responsable de la gestion du LSTA (cette responsabilité relevait auparavant du département de l’Éducation des États-Unis). L’E-Government Act of 200245 promouvait les procédures et services administratifs électroniques, et chargeait l’IMLS de travailler à améliorer l’accès à l’information et aux services administratifs par Internet. L’IMLS serait habilité de nouveau et réformé au cours des décennies suivantes.

L’inclusion numérique au sein d’une politique néolibérale

  • 46 Cela ne signifie pas que toutes les bibliothèques du pays furent malmenées dans les urnes (Goldberg (...)
  • 47 Robert C. Ward, “The outsourcing of public library management : An analysis of the application of N (...)

18Depuis les années 1990 et jusqu’à une bonne partie de la seconde décennie du xxie siècle, « réduire les impôts » devint le mantra incessamment répété par les politiciens aux niveaux fédéral, des États et des collectivités locales. Les recettes intergouvernementales en provenance de l’État fédéral diminuèrent, et ce refus d’augmenter les impôts eut d’énormes conséquences sur la construction de l’infrastructure nationale d’information et sur le financement des ressources éducatives et culturelles aux niveaux des États et des collectivités locales. Le pays fut témoin d’un affaiblissement significatif de l’engagement de l’État fédéral à réduire l’inégalité sociale. Les référendums pour augmenter les dépenses des collectivités locales et des États obtinrent souvent des résultats négatifs, ce qui affecta le financement des bibliothèques publiques locales46. Des bibliothèques publiques fermèrent dans tout le pays et beaucoup d’autres furent obligées de réduire leurs horaires d’ouverture, leurs services et leur personnel. Quant à la pression politique pour améliorer leur efficacité et diminuer leurs coûts, elle conduisit bon nombre de bibliothèques publiques à sous-traiter leurs activités traditionnelles au secteur privé à but lucratif47.

19Les bibliothèques dépendaient d’initiatives public-privé pour développer leur rôle en général, et pour financer la connexion Internet et la formation numérique des populations défavorisées en particulier (Département du commerce des États-Unis, n.d.). Au fil du temps, la définition des populations « défavorisées » évolua avec leur démographie, entraînant une pression politique pour inclure de nouvelles populations éligibles à l’inclusion numérique et à de nouveaux programmes et services de bibliothèque.

  • 48 Eduardo Porter, “As jobs vanish, forgetting what government is for”, The New York Times, 10 mai 201 (...)
  • 49 Commission fédérale des communications, États-Unis, 2010.

20Ces changements faisaient écho à l’évolution d’une philosophie politique devenue dominante aux États-Unis. Ce fut une période de suprématie du néolibéralisme, où l’on dépendait des marchés (des intérêts des entreprises du secteur privé) plus que de l’État. Ce fut une période de « discrédit des politiques d’État interventionnistes » et de « partis pris politiques contre l’État » : la confiance en l’État était sérieusement ébranlée, et la croyance selon laquelle l’État était incapable de répondre aux besoins des citoyens était largement répandue48. Au cours de cette période, les administrations à tous les niveaux du système fédéral furent témoins d’une compression substantielle de leur financement et d’un déclin de l’investissement en capital humain, social et matériel. Un « déficit d’accès au haut débit » estimé en 2010 à plus de 25 milliards USD (dollars actuels) laissa plus de 7 millions de personnes non desservies pour cause de « manque de fonds49 ». La prise de décisions passa des mains du gouvernement fédéral de Washington DC à celles des collectivités locales où, prétend-on, a lieu la « vraie » gouvernance et où les citoyens ordinaires participent à leur propre gouvernement, selon la représentation conservatrice de la mise en œuvre des politiques publiques.

  • 50 Cecilia Kang, “Unemployed Detroit residents are trapped by a digital divide”, The New York Times, 2 (...)
  • 51 Teresa Kroeger, “College degrees are not the solution to stagnating wages or inequality”, Working E (...)
  • 52 Drew Desilver, “5 Facts about economic inequality. FactTank : News in the Numbers”, Washington, DC, (...)
  • 53 David Brooks, “The fragmented society”, The New York Times, 20 mai 2016. [En ligne] < http://www.ny (...)

21Ce fut aussi une période de transformation stimulée par la mondialisation et les avancées technologiques, qui firent disparaître des millions d’emplois dans les secteurs de l’industrie et de la production, entraînant un taux de chômage élevé sur de nombreux territoires. Alors que de jeunes gens sans diplôme universitaire pouvaient auparavant trouver des emplois et gagner décemment leur vie, ils ne peuvent plus désormais assumer la charge financière d’un accès Internet haut débit, ce qui est pourtant indispensable pour trouver du travail50. Ils ne sont donc pas préparés à s’insérer dans une économie de la connaissance portée par la technologie51. Dans cette période de transition, les États-Unis doivent faire face à leur plus haut niveau d’inégalité économique depuis les années 192052, à une concentration accrue de la richesse et à davantage de pauvreté53.

Focus sur un exemple local, un déficit dans l’infrastructure de communication : l’impact sur les bibliothèques

  • 54 Peter Wehner, “The indelible stain of Donald Trump”, The New York Times, 10 juin 2016. [En ligne]   (...)

22Comme dans tous les autres États, la culture politique de l’Indiana régit le financement des bibliothèques de l’Indiana. Pendant presque toute son histoire, l’Indiana a professé une « philosophie conservatrice de présence limitée de l’État et de liberté économique permettant la prospérité54 ». Une conséquence est que l’infrastructure d’État a toujours été et continue à être significativement sous-financée en raison de ce parti pris idéologique, et de l’antipathie de ses citoyens à l’égard de la participation de l’État fédéral dans les affaires locales et de l’État, qui impliquerait davantage d’impôts et de régulation.

  • 55 Bibliothèque de l’État de l’Indiana, 2015.
  • 56 Agence budgétaire de l’État de l’Indiana, 2015.
  • 57 Voir Institute for Museum and Library Services (Institut des services de musée et de bibliothèque), (...)

23Comme les autres bibliothèques d’État du pays, la bibliothèque d’État de l’Indiana (Indiana State Library) dépend du financement du LSTA, redistribué par l’intermédiaire de subventions concurrentielles aux bibliothèques locales de l’Indiana dans le but de « mieux répondre aux besoins technologiques de leur population locale, ou de tester et d’implémenter des technologies innovantes » avec des projets qui « améliorent l’accès wifi et/ou Internet, augmentent les compétences informatiques et de maîtrise de l’information des immigrants numériques, et accroissent la participation au partage de ressources dans tout l’État55 » . Le budget de la bibliothèque d’État pour 2016 est d’environ 7,6 millions de dollars, soit approximativement 2,5 % du budget de l’État56 . Les dotations fédérales de l’IMLS pour l’État sont restées assez stables, malgré la diminution du budget de l’IMLS57. Toutefois, le pourcentage de fonds fédéraux dans le budget de la bibliothèque d’État a significativement augmenté. Il représente actuellement 41 % en 2016, une augmentation considérable par rapport aux 17 % de 2002, par exemple.

  • 58 Culllen McCarty, “Fiber gigabit broadband : The quiet energizer for Indiana economic development an (...)
  • 59 Bob Warburton, “Indianapolis approves $ 58 million in bonds for libraries”, Library Journal, 13 nov (...)

24Bien que les intérêts commerciaux de l’Indiana soient en faveur du développement de l’infrastructure haut débit58, le refus du parlement d’État d’investir dans une infrastructure de télécommunications empêche les citoyens d’une grande partie de l’État – en dehors des plus grandes zones urbaines – d’avoir un accès quelconque ou abordable à une connexion haut débit. Les nombreuses personnes ayant besoin de trouver des renseignements liés à l’emploi uniquement publiés sur Internet n’ont pas de connexion. Bien que le Congrès ait chargé l’US Federal Communications Commission (FCC, Commission fédérale des États-Unis pour les communications) de garantir « les mécanismes les plus efficaces et efficients pour assurer l’accès haut débit à tous les habitants des États-Unis » (American Recovery and Investment Act of 2009), les fournisseurs de télécommunications du secteur privé font preuve d’une résistance remarquable à investir ou étendre le haut débit ou les technologies de réseau aux régions et habitations non ou mal desservies dans tout l’État, car le retour sur investissement a été jugé insuffisant ou non-existant. En l’absence de perspective de soutien financier de l’État, plusieurs collectivités locales – avec un engagement fort de la part du maire et du conseil municipal – ont proposé que la collectivité construise une infrastructure haut débit pour connecter chaque logement et entreprise de la ville59.

  • 60 Ned Baugh, Lisa, Champelli, Penny Gillie et al. Looking ahead : A report from the Monroe County Pub (...)
  • 61 Bob Warburton, art. cit.

25Ces situations de fracture et d’exclusion numériques soulignent l’importance et la valeur cruciales des bibliothèques publiques pour la population, particulièrement dans les endroits où il s’agit de la seule institution à offrir des programmes et des services pour accéder à l’information et pour former des citoyens aux compétences numériques. Sans engagement de l’État pour réaliser ces investissements, le rôle des subventions fédérales devient essentiel à l’amélioration de la qualité de la vie des citoyens de l’État de l’Indiana. Là où les associations professionnelles au niveau local et de l’État, les bibliothèques et le secteur privé ont réussi à mobiliser leurs soutiens, les bibliothèques locales et d’État ont pu maintenir leurs programmes et services. Quant aux bibliothèques publiques dont les employés et responsables sont très motivés, telles que la bibliothèque publique du comté de Monroe60 et la bibliothèque publique d’Indianapolis61, elles sont des agents d’innovation très actifs. Elles ont étendu des programmes d’aide sociale pour les personnes mal desservies, défavorisées, et les nouveaux arrivants, elles ont consacré des fonds à l’amélioration de l’infrastructure physique, et elles se sont lancées au service de la collectivité dans des initiatives public-privé qui renforcent la mission culturelle et éducative des bibliothèques. Dans le même temps, toutefois, la concurrence pour obtenir des ressources et les normes et valeurs de la collectivité requièrent des professionnels de bibliothèque qu’ils s’impliquent continuellement dans des activités politiques qui créent et cimentent des relations sur le territoire ; ils doivent toujours avancer avec prudence pour ne pas dépasser les limites institutionnelles de leur mandat.

Anmerkungen

1 « Le terme “bibliothèque publique” désigne une bibliothèque qu’utilisent gratuitement tous les résidents d’une ville ou d’une région, et qui est financée totalement ou en partie par des fonds publics. » Telle est la définition officielle d’une bibliothèque publique. Source: Library Services Act of 1956, Public Law [droit public] 597, US Statutes at Large 70 (1956): 293, codified at US Code 20 (1996), § 9131. Les bibliothèques publiques peuvent être au service d’une ville, d’un district, d’une région ou d’un État, en fonction de leur statut.

2 Tout au long de ce chapitre, nous faisons référence aux populations « défavorisées ». Je me repose sur Braverman (Paula Braveman, “What are health disparities and health equity ? We need to be clear. Nursing in 3D : Diversity, disparities, and social determinants”, Public Health Reports, 2014, suppl. 2, 129, pp. 5-8. [En ligne] < http://www.publichealthreports.org/issueopen.cfm?articleID=3074 >) pour la définition de « défavorisé », qui comprend des handicaps économiques, sociaux et environnementaux. Le gouvernement fédéral établit un critère pour déterminer les personnes économiquement défavorisées. Se reporter aux publications de l’US Census Bureau (Bureau de recensement des États-Unis) sur l’inégalité des revenus et la pauvreté aux États-Unis. [En ligne] < http://www.census.gov/library/publications/2015/demo/p60-252.html >.

3 Jorge Schement, “Imagining fairness : Equality and equity of access in search of democracy”, in Nancy Kranich, Libraries and democracy : The cornerstones of liberty, Chicago, American Library Association, pp. 15-27.

4 Kathleen de la Peña McCook, “Poverty, democracy, and public libraries”, in Nancy Kranich, Libraries and Democracy : The Cornerstones of Liberty, Chicago, American Library Association, 2001, pp. 28-46.

5 George S Bobinski, Carnegie libraries : Their history and impact on American public library development, Chicago, American Library Association, 1969, p. 4.

6 Frederick Stielow, “Reconsidering Arsenals of a Democratic Culture : Balancing symbol and practice”, in Nancy Kranich, Libraries and democracy : The cornerstones of liberty, Chicago, American Library Association, 2001, p. 12.

7 Victor Ferkis, “Technology and American political thought : The hidden variable and the coming crisis”, The Review of Politics, 1980, 42, p. 349-387.

Eugene F. Miller, “Democratic statecraft and technological advance : Abraham Lincoln’s reflections on “discoveries and inventions””, The Review of Politics, 2001, 63, pp. 485-515.

8 Caroll W., Jr. Purcell, Technology in America : A history of individuals and ideas, 2e ed., Cambridge, The MIT Press, 1990, p. 4.

9 George S. Bobinski, op. cit., p. 5.

10 La section 8 de la Constitution des États-Unis énumère les pouvoirs de l’État fédéral. Ceux qui sont le plus en lien avec le sujet de ce chapitre sont (1) la régulation du commerce entre États des « personnes et choses à travers les frontières des États, et toutes les formes de communication et de transport » ; (2) la protection des droits d’auteur et des brevets ; (3) la détermination des personnes pouvant obtenir la citoyenneté ; (4) la promotion de la science ; et (5) le pouvoir du Congrès d’étendre son pouvoir législatif par « tout moyen qu’il juge raisonnable ». [En ligne] < http://www.senate.gov/civics/constitution_item/constitution.htm >.

11 Kathleen de la Peña McCook, op. cit., p. 28.

12 Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique, 1835/1840.

13 L’American Library Association (ALA) (association des bibliothèques américaines) fut créée en 1876. Son bureau de Washington DC allait devenir, au cours du xxe siècle, un puissant levier d’action politique au nom des bibliothèques. Après la Seconde Guerre mondiale, en 1948, son Committee on Postwar Planning (Comité de planification d’après-guerre) proposait une législation qui employait la métaphore d’une autoroute de l’information comme fondement pour la nation (suite à la création de l’Interstate Highway System, système autoroutier inter-États) (Michele Farrell, « A brief history of national support for libraries in the United States », présenté au Congrés international 2012 de la Fédération internationale des associations et institutions de bibliothèques, Helsinki. [En ligne] < http://www.ifla.org/past-wlic/2012/140-farrell-en.pdf >).

14 Andrew Carnegie est le bienfaiteur à qui l’on doit principalement la création de bibliothèques publiques. Dès 1886 et jusqu’en 1919, lui et la Carnegie Corporation apportèrent les fonds pour construire 1 679 bibliothèques dans 1 412 villes de tous les États-Unis (George S. Bobinski, Carnegie libraries : Their history and impact on American public library development, Chicago, American Library Association, 1969, p. 3). Carnegie créa un précédent pour que la future législation finance la construction de bibliothèques, ainsi que l’accord contractuel pour la mise à disposition de fonds. Parmi les collectivités concernées, certaines durent contribuer à hauteur de 10 % du financement à perpétuité.

15 Il est important de souligner que depuis son origine, la nation a vu s’affronter des conceptions concurrentes de l’équité, de l’efficacité, du bien-être social et de ce qui constitue « l’intérêt public », c’est-à-dire comment les affaires de la nation seront dirigées et qui est éligible à la citoyenneté et à la participation à ses affaires. Les « différentes perceptions de l’équité, de la justice, de la droiture et de la vertu » sont incorporées aux décisions politiques concernant les rôles, structures et relations institutionnels (Deborah Stone, Policy paradox : The art of political decision making, 3e ed., New York, W.W. Norton & Company, 2012, p. 36).

16 Deborah Stone, ibid., p. 355

17 Congrès américain (US Congress). Sénat. Public Library Service Demonstration Bill (Projet de loi sur la démonstration du service de bibliothèque publique). S. 1920 79e Cong. 2e sess. (1946). Notez le mot « démonstration » : il a été identifié à « recherche » dans des conditions existantes (pour une discussion sur les futures implications du projet de loi, voir Gwen Gregory, « The Library Services and Technology Act : How changes from LSCA are affecting libraries », Public Libraries, 1999, 38(6), pp. 378-382).

18 James W. Fry, “LSA and LSCA, 1956-1973 : A legislative history”, Library Trends, 1975, 24(1), p. 8.

19 LSA, loi de 1956 sur les services de bibliothèque. Public Law [droit public] 597.

20 Douglas Raber, “Ideological opposition to federal library legislation : The case of the Library Services Act of 1956”, Public Libraries, 1995, 34(May/June), pp. 163 et 184.

21 Ibid., p. 164.

22 Loi de 1964 sur les services et la reconstruction des bibliothèques. Public Law [droit public] 88-269.

23 Loi de 1956 sur l’immigration et la nationalité.

24 Public Law [droit public] 89-236.

25 Conseil national de la race.

26 Kathleen de la Peña McCook, “Librarians as advocates for the human rights of immigrants”, School of Information Faculty Publications, 2007, paper 120, Tampa (FL), University of South Florida.

27 James W. Fry, art. cit., p. 20.

28 Peter F. Fuller, “The politics of LSCA during the Reagan and Bush Administrations : An analysis”, The Library Quarterly, 1994, 64(3), p. 307.

29 Ibid., p. 309.

30 Robert Britt. Horwitz, The Irony of Regulatory Reform : The Deregulation of American Telecommunications, New York, Oxford University Press, 1989, p. 6.

31 « C’est l’économie, idiot ».

32 Département du commerce des États-Unis, 1995, 1998, 1999, 2000.

33 LSTA, loi de 1996 sur les services de bibliothèque et la technologie. Public Law [droit public] 104-208.

34 Le service universel est « le principe selon lequel tous les Américains devraient avoir accès aux services de communication… [C’]est l’un des piliers de la loi qui fonda la FCC, le Communications Act of 1934 » (Commission fédérale des communications, États-Unis, 2016).

35 Loi de 1996 sur les télécommunications. Public Law [droit public] 104-104.

36 Roger Richman, “Local government, federalism, and the telecommunications revolution”, State and Local Government Review, 2002, 34(6), p. 134.

37 Jorge Schement, op. cit., p. 17.

38 John Carlo Bertot, Paul T. Jaeger, Lesley A. Langa, et Charles R. McClure, “Public access computing and Internet access in public libraries : The role of public libraries in e-government and emergency situations”, First Monday, 2006, 11(9). [En ligne] < http://uncommonculture.org/ojs/index.php/fm/article/view/1392 >.

39 Paul Krugman, “Remembrance of booms past”, The New York Times, 23 mai 2016. [En ligne] < http://www.nytimes.com/2016/05/23/opinion/remembrance-of-booms-past.html >.

40 Leslie Kaufman, “Survey finds rising reliance on libraries as a gateway to the Web”, The New York Times, 22 janvier 2013. [En ligne] < http://mediadecoder.blogs.nytimes.com/2013/01/22/pew-survey-finds-reliance-on-libraries-for-computers-and-internet/ >.

41 Voir les valeurs centrales (« Core Values ») de l’ALA sur <www.ala.org/aboutala/>.

42 Ian Chant, “Gates Foundation prepares to exit library ecosystem”, Library Journal, 22 mai 2014. [En ligne] < http://lj.libraryjournal.com/2014/05/budgets-funding/gates-foundation-prepares-to-exit-library-ecosystem/ >.

43 Kathryn Zikuhr, Lee Rainie, Kristen Purcell et Maeve Duggan, How Americans Value Public Libraries in Their Communities, Washington, DC, Pew Research Center, 11 décembre 2013. [En ligne] < http://libraries.pewinternet.org/files/legacy-pdf/PIP_Libraries%20in%20communities.pdf >.

Lee Rainie et Dana Page, Libraries and Learning. Pewinternet.org., Washington, DC, Pew Research Center, 7 avril 2016. [En ligne] < http://www.pewinternet.org/files/2016/04/PI_2016.04.07_Libraries-and-Learning_FINAL.pdf >.

44 Public Law [droit public] 94-462.

45 Public Law [droit public] 107-347.

46 Cela ne signifie pas que toutes les bibliothèques du pays furent malmenées dans les urnes (Goldberg et Brandes, 2012). Là où les populations locales apportèrent un fort soutien à l’enseignement public et à leur bibliothèque publique, un financement par « millage » (taux d’imposition prélevé sur les impôts fonciers) et par obligations pour le fonctionnement et la construction eut des résultats positifs.

47 Robert C. Ward, “The outsourcing of public library management : An analysis of the application of New Public Management theories from the principal-agent perspective”, Administration & Society, 2007, 38(6), pp. 627-648.

48 Eduardo Porter, “As jobs vanish, forgetting what government is for”, The New York Times, 10 mai 2016. [En ligne] < http://www.nytimes.com/2016/05/11/business/economy/as-jobs-vanish-forgetting-what-government-is-for.html >.

49 Commission fédérale des communications, États-Unis, 2010.

50 Cecilia Kang, “Unemployed Detroit residents are trapped by a digital divide”, The New York Times, 22 mai 2016. [En ligne] < http://www.nytimes.com/2016/05/23/technology/unemployed-detroit-residents-are-trapped-by-a-digital-divide.html >.

51 Teresa Kroeger, “College degrees are not the solution to stagnating wages or inequality”, Working Economics Blog, 3 mai 2016, Washington, DC, Economic Policy Institute. [En ligne] < http://www.epi.org/blog/college-degrees-are-not-the-solution-to-stagnating-wages-or-inequality/ >.

52 Drew Desilver, “5 Facts about economic inequality. FactTank : News in the Numbers”, Washington, DC, Pew Research Center, 7 janvier 2014. [En ligne] < http://www.pewresearch.org/fact-tank/2014/01/07/5-facts-about-economic-inequality/ >.

53 David Brooks, “The fragmented society”, The New York Times, 20 mai 2016. [En ligne] < http://www.nytimes.com/2016/05/20/opinion/the-fragmented-society.html >.

54 Peter Wehner, “The indelible stain of Donald Trump”, The New York Times, 10 juin 2016. [En ligne] < http://www.nytimes.com/2016/06/12/opinion/campaign-stops/the-indelible-stain-of-donald-trump.html >.

55 Bibliothèque de l’État de l’Indiana, 2015.

56 Agence budgétaire de l’État de l’Indiana, 2015.

57 Voir Institute for Museum and Library Services (Institut des services de musée et de bibliothèque), 2016. Part de l’État. Données sur la part de l’État : Indiana. [En ligne] < http://www.imls.gov/grants/grants-state/state-profiles/Indiana >.

58 Culllen McCarty, “Fiber gigabit broadband : The quiet energizer for Indiana economic development and recovery”, Inside Indiana Business with Gerry Dick, 20 août 2015. [En ligne] http://www.insideindianabusiness.com/contributors.asp?id=21588 >.

59 Bob Warburton, “Indianapolis approves $ 58 million in bonds for libraries”, Library Journal, 13 novembre 2014. [En ligne] < http://lj.libraryjournal.com/2014/11/budgets-funding/indianapolis-approves-58-million-in-bonds-for-libraries/ >.

Joe Hren, “Bloomington receives twelve broadband initiative responses”, WFIU News, 17 mai 2016. [En ligne] < http://indianapublicmedia.org/news/bloomington-receives-twelve-broadband-initiative-responses-99044/ >.

Harrison Wagner, “Bloomington aims for city-wide Internet access”, WFIU News, 1er mars 2016. [En ligne] < http://indianapublicmedia.org/news/bloomington-aims-citywide-internet-access-94725/ >.

60 Ned Baugh, Lisa, Champelli, Penny Gillie et al. Looking ahead : A report from the Monroe County Public Library Futures Committee. Bloomington, 2012. [En ligne] < http://mcpl.info/sites/default/files/Futures%20Committee%20Report%20FINAL%204-11-12.pdf >.

61 Bob Warburton, art. cit.

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