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5. Début’NET, Démo’NET, Débug’NET, la médiathèque Marguerite-Duras joue le numérique sur toute la gamme


Texte intégral

1Depuis l’ouverture de la médiathèque Marguerite-Duras1 le 12 juin 2010, les ateliers informatiques ne cessent de se diversifier en fonction de l’évolution des technologies, des demandes et des besoins des usagers. La palette des offres numériques s’est élargie et s’ancre dans un contexte social, celui de la cité, où les espaces multimédias initialement créés dans le réseau parisien et tout d’abord animés par des animateurs multimédias se sont transformés en espaces numériques à part entière dédiés à l’initiation informatique, à la culture numérique et à la formation tout au long de la vie. Des bibliothécaires (au sens générique du terme comme il faudra l’entendre par la suite) aux profils spécifiques de type « Médiation numérique » accompagnent dorénavant les usagers dans ces nouvelles pratiques.

2La bibliothèque est donc devenue un lieu où se manifeste un besoin d’insertion sociale, professionnelle, et d’inclusion numérique ; la vocation initiale des ateliers informatiques de réduire la fracture numérique s’est muée en une offre numérique plurielle qui répond à une nécessité de formation tout au long de la vie. En fonction de leurs centres d’intérêt, les usagers s’approprient chacun à leur manière les différentes formes de médiation numérique pour en retirer les éléments qui les intéressent.

Des espaces multimédias aux espaces numériques

3En 2010, je constatais déjà dans mon projet personnel professionnel2 (PPP) intitulé « Les ateliers multimédias à la médiathèque Marguerite-Yourcenar (Ville de Paris) : perspectives d’évolutions » la dimension sociétale des ateliers informatiques dans les bibliothèques de lecture publique.

4Les notions de formation (permanente) et d’éducation sont relayées dans les textes et chartes professionnels et légitiment la place des ateliers informatiques en bibliothèque. Le règlement des bibliothèques de la Ville de Paris3 est conforme à ces recommandations.

5Proposer aux usagers une offre numérique plurielle s’insère donc dans une logique de médiation numérique conforme aux missions des bibliothèques de lecture publique. Anne Hidalgo, maire de la Ville de Paris, a d’ailleurs inscrit parmi les priorités de sa mandature les pratiques numériques au service des citoyens.

6Force est de constater que sans médiation, il est difficile voire impossible pour certains publics de s’approprier seuls les outils informatiques et les nouveaux usages numériques, même si certaines personnes ont la chance d’avoir du matériel à leur disposition.

7Les ateliers multimédias pensés initialement pour réduire la fracture numérique ont donc vu leur spectre s’élargir à une notion d’« impératif numérique4 », telle que la définit le sociologue Michel Wieviorka car l’inclusion numérique est devenue un enjeu majeur dans notre société.

8Il n’y a plus d’« animateurs multimédias » à proprement parler dans les bibliothèques de la Ville de Paris. Les fiches de postes ont évolué et mentionnent dorénavant clairement les postes profilés « Médiation numérique ». De la même manière on ne parle plus d’ateliers multimédias mais d’ateliers informatiques, numériques, de formations au numérique.

9Initialement, la Ville de Paris avait créé des espaces multimédias et recruté des animateurs multimédias pour vulgariser ces thématiques alors nouvelles dans les bibliothèques ; puis les compétences des bibliothécaires se sont étoffées ; ils se sont approprié cette nouvelle facette de leur métier et le recrutement spécifique d’animateurs multimédias n’a plus été nécessaire. Action culturelle, médiation numérique s’agrègent dans les profils de postes dans une logique de services aux publics.

10Des publics diversifiés aux objectifs différents bénéficient de ces services : personnes en recherche d’emploi, actifs, inactifs, retraités ; certaines cherchent à acquérir une culture numérique et sont dans une dynamique d’empowerment ; pour d’autres, la question de l’inclusion numérique est cruciale pour ne pas rester en marge de la société.

La médiathèque au sein du réseau des bibliothèques de prêt

11Faire partie d’un réseau important est indéniablement une force mais il en résulte aussi quelques freins.

12Tout nouveau service est déployé pour l’ensemble des bibliothèques de prêt, ce qui a certes des avantages, mais il a fallu attendre fin 2015 pour proposer une bibliothèque numérique et début 2016 pour disposer de ressources numériques d’autoformation avec Toutapprendre.com5 : informatique, langues, code de la route. Ce bouquet est actuellement en test et sera évalué fin 2016 : statistiques de consultations, retour des bibliothécaires et des usagers sur la diversité de l’offre et la qualité des tutoriels vidéo. Il permet de compléter et de prolonger les ateliers informatiques et numériques.

Manque de visibilité sur l’offre numérique dans le réseau

13Par ailleurs, les profils de postes « Médiation numérique » se sont multipliés, ce qui est une bonne chose.

14Plusieurs médiathèques6 listées sur le portail des bibliothèques proposent également comme la médiathèque Marguerite-Duras des services de type médiation numérique adaptés à leurs espaces. Il peut s’agir d’ateliers numériques à part entière, de coups de pouce individuels, d’animations numériques pour les enfants. Les formes d’aide numérique sont protéiformes.

15Plusieurs médiathèques ont vu le jour ces six dernières années et certaines ont développé des spécificités : Louise-Michel (bibliothèque de proximité), Václav-Havel (jeux vidéo), Marguerite-Duras, Jacqueline-de-Romilly, Françoise-Sagan, Canopée (ateliers autour de la culture numérique, imprimante 3D). Un projet est en cours de réalisation pour le quartier de Lagny dans le 20e. Ces établissements récents font la part belle aux services aux publics en général : action culturelle et médiation numérique sous différentes formes.

16Pour autant, nous n’avons pas de vue exhaustive sur ce qui se fait précisément dans l’ensemble des bibliothèques. Pourtant, la communication en ligne via les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter, les blogs donne une visibilité accrue aux services proposés dans les bibliothèques ; mais toutes n’utilisent pas encore ces différents vecteurs pour communiquer sur leurs programmes précis.

17Côté professionnel, il serait profitable à tous les bibliothécaires de savoir plus précisément qui fait quoi, ce qui favoriserait les échanges, propositions, améliorations ; ce serait également l’occasion de mutualiser les bonnes idées !

18Côté public, une meilleure visibilité permettrait également de mieux orienter les usagers vers les bibliothèques qui proposent régulièrement des ateliers numériques (adultes, enfants). La richesse et la force du réseau proviennent justement de la diversité des initiatives ; nous ne faisons pas tous les mêmes choses, heureusement !

19Wikibib, un outil de travail interne aux bibliothèques, pourrait aussi contribuer à une meilleure information des bibliothécaires pour recenser qui fait quoi dans le réseau.

Informatique

20Les différents services informatiques de la Ville ne comprennent pas toujours les besoins des bibliothécaires. Les certes nécessaires problématiques de sécurité sont parfois un peu lourdes.

21Il est difficile de faire installer des logiciels même libres et gratuits sur les ordinateurs publics voire sur les ordinateurs des bibliothécaires. C’est un frein à la créativité, à l’expérimentation.

22L’avantage des tablettes est immense car elles permettent d’éviter les problèmes de mise à jour des navigateurs des ordinateurs ; elles sont donc utilisées dans de nombreux ateliers mais ne permettent pas toujours de remplacer les logiciels qui permettent souvent une utilisation plus fine que les applications.

Le pôle Médiation Numérique à la médiathèque

Des espaces adaptés et une équipe dédiée

23Le réseau des 57 bibliothèques de prêt de la Ville de Paris est extrêmement dense et couvre bien le territoire. La médiathèque Marguerite-Duras s’inscrit dans ce maillage qui couvre les 20 arrondissements de la capitale. Le portail de la Ville de Paris7 propose un panorama succinct et éclairant de ce réseau dynamique.

24La médiathèque Marguerite-Duras8 d’une surface de 4 200 m² répartis sur 4 niveaux dispose d’espaces ergonomiques (auditorium de 144 places, salle audiovisuelle, espace d’exposition au RDC) et de profils de postes adaptés (Action Culturelle, Médiation Numérique) qui permettent de décliner des collections, des services aux publics diversifiés et appréciés du public. Les horaires d’ouverture du mardi au dimanche (quarante heures hebdomadaires) permettent d’accueillir des publics diversifiés où chacun peut trouver sa place, un espace qui lui convient. Le public dispose par ailleurs d’une connexion wifi gratuite, de 61 ordinateurs publics en libre accès, et de 45 liseuses (prêt gratuit).

25Le pôle Médiation Numérique est constitué d’une équipe de trois personnes qui s’occupe des ateliers informatiques, des nouveaux usages du numérique et anime également les réseaux sociaux de la médiathèque. Le fonctionnement est transversal et ouvert aux collègues qui souhaitent participer ou animer des ateliers avec l’équipe Médiation Numérique.

26Les collections liées à des domaines connexes comme l’informatique, Internet, les réseaux sociaux et les nouveaux usages du numérique sont situées au deuxième étage. Ce fonds couvre différents niveaux avec des livres dédiés aux débutants et d’autres beaucoup plus pointus. Là encore, la médiation des bibliothécaires sur ces collections s’avère très utile car la plupart des débutants n’imaginent pas trouver des documents qui correspondent à leur niveau.

27Les inscriptions aux ateliers se font sur place à la médiathèque, par téléphone ou par mail. Le programme mensuel des ateliers est diffusé à la bibliothèque via des flyers, en ligne via l’infolettre de la bibliothèque, les réseaux sociaux de la médiathèque (Facebook, Twitter, blog Le carnet de Marguerite9), l’agenda en ligne10 des ateliers informatiques.

28Les plaquettes mensuelles11des ateliers mentionnent le nombre de participants, les prérequis pour suivre les ateliers d’initiation. Les Démo’NET sont ouverts aux débutants et ne nécessitent pas de prérequis particuliers.

29En 2015 : 261 personnes ont assisté aux différents ateliers informatiques et numériques ; 35 personnes ont bénéficié de RDV individuels ; 116 enfants ont assisté aux séances qui leur sont dédiées.

Complémentarité des activités entre le pôle Médiation Numérique, Infos Emploi et Lire Autrement

30L’équipe Médiation Numérique travaille de manière transversale et complémentaire avec le pôle Infos Emploi et la bibliothécaire en charge du pôle Lire Autrement.

31Le pôle Infos Emploi est constitué d’une bibliothécaire et d’une médiatrice emploi, ce qui représente une initiative unique dans le réseau. Le binôme a délimité son champ d’action au sein de la bibliothèque. Ainsi, la médiatrice emploi apporte une aide spécifique liée à la mise en forme d’un CV, d’une lettre de motivation et assure des accueils individualisés ou en petits groupes pour des personnes exclusivement en recherche d’emploi.

32Les publics se chevauchent parfois, car les personnes qui bénéficient de ce service s’inscrivent souvent aux ateliers d’initiation informatique proposés par l’équipe Médiation Numérique afin de tendre vers un début d’autonomie dans la rédaction et la mise en forme de leurs documents.

33Le pôle Lire Autrement propose aux déficients visuels des textes en gros caractères, des textes lus dans différents formats comme Daisy et une aide informatique adaptée et spécifique.

34Là encore, un travail conjoint est mené entre l’équipe Médiation Numérique et le pôle Lire Autrement lors de RDV informatiques individuels ou d’initiations à VoiceOver (logiciel de vocalisation) sur tablettes.

35Par ailleurs, les ateliers d’initiation informatique sont vite complets ; il est donc nécessaire de prévoir une alternative afin d’orienter les usagers vers d’autres structures. L’équipe Médiation Numérique tient à jour une liste de lieux ressources dans l’Est parisien afin d’orienter les usagers vers d’autres structures de type espaces publics pumériques (EPN) par exemple ; la plaquette s’intitule : « Où se former à l’informatique ? 11e, 12e, 19e et 20e arrondissements12. » Elle est distribuée au deuxième étage de la médiathèque où sont gérées les inscriptions aux ateliers informatiques et les RDV avec la médiatrice emploi.

Panorama de l’offre numérique à la médiathèque

36À l’ouverture, la médiathèque13proposait uniquement des ateliers d’initiation informatique. Depuis, l’offre s’est diversifiée pour répondre aux évolutions technologiques et aux besoins des usagers.

Début’NET : ce sont des ateliers d’initiation informatique d’une heure trente conduits par un bibliothécaire qui accueillent 4 participants maximum.

37Ces ateliers comprennent : Je découvre l’ordinateur, Je découvre le traitement de texte (niveaux 1 et 2) sur Writer, J’apprends à faire des recherches sur le Web (niveaux 1 et 2), Je gère mes fichiers, mes dossiers, Je découvre les fonctions du tableur (niveaux 1 et 2) avec Calc.

38Ces ateliers continuent à être proposés tous les mois car certains usagers ont toujours besoin de la médiation des bibliothécaires pour débuter.

39Le programme mensuel est complété par les Démo’NET.

Démo’NET : ce sont des présentations d’une heure trente conduites par deux bibliothécaires qui accueillent jusqu’à 12 participants. Les usagers peuvent venir avec leur tablette, smartphone ou portable.

40Ce type d’atelier met en avant la culture numérique dans des domaines pratiques comme suivre l’actualité sur Internet, préparer ses vacances avec Internet, faire ses démarches administratives en ligne, cuisiner avec Internet, télécharger des livres numériques sur sa liseuse ou sa tablette.

41Ces ateliers permettent aussi de faire découvrir le fonctionnement des réseaux sociaux : Facebook, Twitter, Tumblr, blogs.

42Les bibliothécaires présentent également les services hébergés sur le nouveau portail des bibliothèques mis en ligne en avril 2016 : catalogue (apprendre à chercher et à réserver des documents), ressources numériques (Philharmonie, Bibliothèque Numérique, Toutapprendre.com).

Débug’NET (SOS informatiques)

43Il s’agit d’un rendez-vous individuel de trente minutes qui permet de répondre à des questions courtes et ciblées.

44Les questions qui reviennent le plus souvent ont trait aux boîtes mail : fonctions de base et avancées ; les usagers veulent aussi apprendre à télécharger des logiciels, trouver des informations pertinentes et fiables sur le Web, transférer des fichiers d’un périphérique à un autre, mieux appréhender les réseaux sociaux.

45Les ateliers d’initiation Début’NET ont été mis en place en septembre 2010 ; les présentations de type Démo’NET en septembre 2011 ; les SOS informatiques en janvier 2012.

Séances pour les enfants

46Ces séances sont animées par deux bibliothécaires ; elles ont lieu sans inscription préalable le mercredi après-midi de 16 heures à 17 heures une à deux fois par mois. Elles sont donc à destination des enfants qui se trouvent à ce moment dans la bibliothèque.

47Les bibliothécaires présentent des jeux ludo-éducatifs sur les ordinateurs : dessin en ligne, création musicale, avatars, BD, flipbooks ou des jeux sur tablettes : Machinarium, Blind Legend, Monument Valley.

Numok

48La 1re édition du festival Numok14a eu lieu en octobre 2015 dans les bibliothèques du réseau parisien. Il met en avant le numérique comme vecteur de partage, de jeu et de découverte, à travers des thématiques comme la culture du libre, les big data, les biens communs, l’impression 3D, la musique assistée par ordinateur, la géolocalisation, le light painting, la réalité augmentée.

49Le pôle Médiation numérique a proposé un programme à destination de tous les publics, adultes et enfants, qui comprenait et des conférences et des ateliers comme Scratch, Webmaker, Makey Makey, 3D Slash que nous allons détailler par la suite.

Comment les usagers s’approprient ces offres numériques multiples ?

50La question se pose car les motivations des usagers qui assistent aux différents types d’ateliers sont légitimement différentes.

Ateliers d’initiation : Début’NET

51Leur objectif initial de réduire la fracture numérique est toujours d’actualité. Même si cette expression semble galvaudée, apprendre à utiliser le clavier d’un ordinateur ou celui virtuel d’une tablette demeure le préalable à toute velléité d’objectifs ultérieurs, qu’il s’agisse de réserver des billets de train en ligne ou de télécharger des livres numériques.

52De plus, il arrive souvent que lors d’ateliers comme la recherche sur Internet ou l’initiation au tableur avec CALC les participants n’avancent pas au même rythme, car le groupe n’a pas toujours un niveau homogène. Ainsi, il arrive souvent que des usagers s’entraident pendant que le bibliothécaire aide un autre participant.

Zoom usager : Paul, 85 ans

Les éléments suivants qui concernent des usagers ont été recueillis lors d’entretiens téléphoniques en suivant une grille de questions15.

Paul est un habitué et un fidèle de la médiathèque qui lui permet de garder des liens sociaux ; en effet, il vient quasiment tous les jours afin de ne pas rester seul chez lui. Il profite de tous les services offerts : expositions, conférences et ateliers !

Il a suivi le parcours classique du débutant lié aux ateliers d’initiation, mais également plusieurs présentations Démo’NET pour découvrir les nouveaux services (prêt de liseuses, Bibliothèque Numérique). Ce qui l’intéresse avant tout, c’est de pouvoir se débrouiller avec sa messagerie électronique pour correspondre avec ses amis. Les recherches sur Internet le passionnent également : le Web est pour lui une encyclopédie vivante qui l’aide à assouvir sa passion de l’Histoire. Il était important pour lui d’apprendre à faire des recherches sur Internet pour décrypter les résultats et évaluer la nature, la fiabilité des flux d’informations à sa disposition grâce à Internet. Sa curiosité ne faiblit pas et il envisage de demander un RDV individuel à l’occasion de son changement de smartphone afin d’en explorer toutes les fonctionnalités.

Présentations de nouveaux usages du numérique : Démo’NET

53Culture numérique, inclusion numérique et formation tout au long de la vie sont à l’œuvre dans les Démo’NET : ces séances d’une heure trente se découpent en une heure de présentation et trente minutes de pratique, de questions, d’échanges entre bibliothécaires et usagers, entre usagers eux-mêmes.

54Sont abordés dans ces séances des sujets diversifiés liés à l’actualité numérique, à la culture « geek » qui interrogent le grand public et posent donc question aux usagers comme lire la presse sur Internet, télécharger des livres numériques, écouter ou télécharger de la musique en ligne. Ces présentations sont utiles pour les usagers car elles leur permettent de délimiter ce qui est gratuit ou payant, légal ou pas, de comprendre les spécificités des droits d’auteur et des licences libres de droit.

55Les distinguos afférents aux différentes catégories socioprofessionnelles qui fréquentent les ateliers ne sont pas de mise ici : en effet, un niveau d’étude élevé n’est pas toujours la garantie de pouvoir tout apprendre tout seul. Savoir envoyer un mail avec des PJ ne garantit pas qu’un usager pourra s’autoformer sur ces sujets. Certains oui, mais d’autres auront besoin de l’aide, de la médiation que peuvent apporter les bibliothécaires.

56Par ailleurs, la notion d’inclusion numérique apparaît clairement dans des présentations comme « Préparer ses vacances sur Internet » : en effet, difficile de nos jours de préparer un voyage, voire un simple week-end en faisant l’économie de recherches de locations, ou de réservations en ligne ! On peut vivre et se débrouiller sans, certes, mais avec le sentiment confus de passer à côté d’usages bien pratiques sous réserve qu’on ait les clés pour y accéder.

57Cette tendance ne s’infléchira pas quand on considère l’obligation qui sera bientôt faite à tout citoyen de déclarer en ligne ses revenus. On voit mal comment une frange de la population y parviendra seule, d’où l’importance de la médiation numérique.

58Les Démo’NET permettent également aux bibliothécaires de présenter les nouveaux services proposés par la Ville de Paris : liseuses, Bibliothèque Numérique, autoformation avec Toutapprendre.com16 : informatique, langues, code de la route.

59Un phénomène d’entraide est observé lors d’ateliers Démo’NET comme « Que faire avec une tablette ». À l’issue de la présentation (une heure), deux groupes sont constitués (trente minutes), un avec des tablettes sous Android, un autre avec des tablettes sous iOS. Pendant que les deux bibliothécaires passent d’un groupe à l’autre, les usagers en fonction de leurs connaissances même parfois peu étoffées s’entraident néanmoins mutuellement.

Zoom usager : Raymonde 75 ans17

Raymonde est une usagère assidue de la médiathèque et des ateliers informatiques et numériques !

Elle s’intéresse à tout ce qui a trait à la culture numérique. En effet, elle souhaite s’adapter aux évolutions technologiques et veut être capable d’installer un antivirus sur son ordinateur, de télécharger des logiciels libres, d’utiliser l’assistant vocal sur sa tablette et pouvoir déclarer en ligne ses revenus. La médiation apportée par les bibliothécaires lui a permis de prendre confiance en elle, de prendre des initiatives, et lui a conféré une certaine autonomie. Elle vient régulièrement consulter des livres en informatique pour se perfectionner et s’informer.

60Assistent donc à ces Démo’NET des usagers aux profils très différents, qui vont du grand débutant à l’usager plus « aguerri » mais malgré tout démuni face à tous ces nouveaux services et usages en ligne qui ne cessent d’évoluer et de muter.

Les « liens d’E-Moi » participent aussi de cet éveil, de cette sensibilisation à la culture numérique. Cette sélection mensuelle de sites, d’applications fait l’objet d’un article sur un sujet donné comme « Suivre l’actualité sur Internet » sur le blog de la médiathèque18. Elle permet souvent de prolonger un Démo’NET.

61La bibliothèque apparaît ici comme un lieu d’inclusion numérique, de coconstruction d’une culture numérique (entraide, mélange de générations) qui permet de s’insérer socialement voire professionnellement dans certains cas ; elle permet de repousser les frontières, les limites de l’exclusion numérique.

62Au-delà de l’objectif initial de réduire la fracture numérique et de se débrouiller a minima, les différentes formes de médiation numérique reflètent de manière plus générale les besoins de formation tout au long de la vie.

Les séances pour les enfants

63Elles sont coanimées par le pôle Médiation Numérique et la section Jeunesse.

64L’optique retenue est de proposer des jeux ludo-éducatifs sur ordinateur ou sur tablette qui privilégient un aspect participatif, l’entraide.

65Machinarium ou Monument Valley sont des jeux vidéo projetés sur écran où il faut résoudre des énigmes ; ils font appel à la logique, à l’observation. Les enfants s’entraident et l’intelligence collective est alors une force indéniable.

66Blind Legend quant à lui est un jeu original adapté aux déficients visuels ; les joueurs sont guidés uniquement par les sons pour se déplacer, rien n’apparaît à l’écran. Lors de ces séances, les adultes qui accompagnent les enfants se prennent souvent au jeu et participent à cette expérience sonore.

67Ce type de jeux favorise donc l’entraide, le mélange de générations enfants et adultes.

Festival numérique : Numok

68Ce festival numérique est axé sur le partage, la programmation informatique et véhicule une nouvelle forme de médiation numérique. À la médiathèque Duras, il a représenté une forme de synthèse intergénérationnelle où les tandems adultes/enfants ont très bien fonctionné.

69Enfants et adultes ont travaillé ensemble lors des ateliers Scratch par exemple ; c’est un logiciel de programmation informatique qui permet de créer de façon ludique un programme informatique en déplaçant des « briques » ; le résultat est visible aussitôt sur l’interface.

70Les kits Makey Makey sensibilisent aussi à la programmation en connectant une carte mémoire à un ordinateur et à des objets conducteurs. Là encore, des adultes se sont pris au jeu et ont participé aux phases de montage et de jeu aves les enfants.

71Webmaker initie au langage HTML et permet de créer des strips avec des photos et du texte. En parallèle des consignes des bibliothécaires, chacun a pu apporter ses connaissances, sa fantaisie, et son imaginaire.

72De manière plus générale, différents publics se sont mélangés lors de Numok, des habitués des ateliers ou des nouveaux usagers qui se sont intéressés au festival dans les différentes bibliothèques de la Ville de Paris. Certains fréquentaient déjà les bibliothèques, d’autres non, ou se sont inscrits à l’occasion.

73En vue de la seconde édition à venir de Numok, des contacts ont été noués avec les Voyageurs du code19 : « la maîtrise du numérique et des langages de programmation informatique est un enjeu central aujourd’hui pour que les enfants ne soient pas des consommateurs digitaux mais deviennent des citoyens du numérique éclairés et créatifs ». Ce type de partenariat permettrait de diversifier encore plus les ateliers proposés.

Zoom usager : Théo, 13 ans20

Théo, 13 ans, a particulièrement apprécié le travail à plusieurs mains pour programmer sur Scratch et créer un strip sur Webmaker ; ce sont des outils qu’il va réutiliser chez lui pour développer sa créativité, son imagination.

Bilan : une offre numérique en constante évolution à la médiathèque Duras

74En effet, la technologie, le matériel, tout comme les besoins des usagers évoluent sans cesse.

75Les initiations informatiques sont toujours proposées, car cette médiation de base reste très prisée et utile, que ce soit pour des visées professionnelles ou personnelles.

76Les présentations qui concernent la culture numérique permettent, quant à elles, aux usagers de se familiariser avec les nouveaux services en ligne ou de nouveaux usages du numérique.

77Les RDV individuels sont également toujours très appréciés et il a été décidé de faire évoluer leur forme pour que plus d’usagers encore puissent en bénéficier.

Plage d’aide numérique

78Cette plage d’une heure trente testée depuis juin 2016 propose un accueil collectif encadré par deux bibliothécaires pour répondre aux questions des usagers ; elle permet de regrouper certaines demandes qui reviennent souvent lors des RDV individuels. Elle n’a pas vocation à supplanter les ateliers d’initiation, ni les Démo’NET. Depuis que ces séances ont débuté, de nombreuses questions concernent la manière de télécharger des titres de la bibliothèque numérique21 sur des liseuses ou tablettes, ou d’accéder à Toutapprendre.com. Des questions ponctuelles comme créer des cartes heuristiques, des formulaires en ligne, utiliser Skype trouvent également leur place dans ces séances.

79L’objectif est de rationaliser certaines demandes récurrentes, d’être plus réactif encore aux demandes des usagers, de mutualiser les compétences des usagers car malgré les différences de niveaux, nous observons qu’ils peuvent s’entraider sur certains sujets.

80Cette évolution fait écho à la permanence numérique mise en place à la bibliothèque Václav-Havel depuis septembre 2015.

81Les séances pour les enfants suscitent la curiosité des enfants comme des adultes qui les accompagnent, tout comme le festival numérique Numok, qui représente une nouvelle offre dans le réseau (2e édition en octobre 2016).

Prendre en compte les besoins et demandes des usagers

82Actuellement les usagers soumettent de manière informelle leurs desiderata en termes de nouveaux ateliers soit oralement aux bibliothécaires au moment des inscriptions aux ateliers, soit à l’issue d’un atelier, ou par mail lorsqu’ils reçoivent les mémos qui leur sont adressés, ou bien par téléphone.

83Ces propositions sont examinées par l’équipe médiation numérique : il peut s’agir de demandes qui concernent de nouveaux ateliers liés à la culture numérique ou qui concernent le choix des jours ou des horaires.

84Un questionnaire en ligne a été adressé aux usagers début juillet 2016 via l’infolettre et les réseaux sociaux, afin de s’adapter au mieux aux besoins des usagers à la rentrée de septembre 2016. Il leur permettra d’émettre des propositions d’ateliers informatiques ou de présentations liées à la culture numérique que les bibliothécaires s’efforceront de prendre en compte dans la limite de leurs compétences techniques et des contraintes informatiques.

Conclusion

85Les services aux publics se sont considérablement étoffés et diversifiés ces dernières années dans le réseau parisien de lecture publique. Les bibliothécaires profilés « Médiation Numérique » apportent aux usagers une aide appréciée dans le domaine informatique et dans celui de la culture numérique. L’offre numérique plurielle de la médiathèque Duras permet de lutter contre l’exclusion numérique, de favoriser l’insertion sociale et de répondre à un besoin de formation tout au long de la vie.

86Il ne s’agit plus seulement d’apprendre à décrypter des informations, à les évaluer, mais à y accéder via de nouveaux usages numériques afin de ne pas rester sur le bord du chemin, en marge de la société. Le numérique est souvent qualifié de « troisième révolution de l’humanité après celles liées à l’écriture puis à l’imprimerie22 ». L’inclusion numérique est donc devenue un enjeu sociétal majeur tant pour les adultes que pour les enfants, comme le démontrent les multiples initiatives ludiques liées à l’apprentissage de la programmation informatique.

87Enfin, la place de la bibliothèque dans la Cité et la perception du lieu bibliothèque et de ce qu’on peut y faire, trouver ou apprendre évoluent constamment aux yeux des professionnels, des usagers, comme des institutions. La bibliothèque est aussi un espace d’entraide, de coconstruction entre usagers et bibliothécaires, entre usagers eux-mêmes, un vivier d’expériences en devenir, qui mutent et se renouvellent sans cesse, où le « vivre ensemble » trouve sa déclinaison numérique.

Notes de bas de page

1 http://mediathequemargueriteduras.wordpress.com/

2 www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/documents/49088-les-ateliers-multimedia-a-la-mediatheque-marguerite-yourcenar-ville-de-paris-perspectives-d-evolutions.pdf

3 http://api-site-cdn.paris.fr/images/125028.pdf

4 Michel Wieviorka, L’Impératif numérique, Paris, CNRS Éditions, 2013.

5 http://bibliotheques.paris.fr/Default/se-former-en-ligne.aspx

6 http://bibliotheques.paris.fr/ateliers-multimedia.aspx

7 http://www.paris.fr/services-et-infos-pratiques/culture-et-patrimoine/bibliotheques/les-bibliotheques-municipales-de-pret-2504

8 http://equipement.paris.fr/mediatheque-marguerite-duras-1752

9 https://mediathequemargueriteduras.wordpress.com/2017/03/24/la-med-num-et-ses-ateliers/

10 https://calendar.google.com/calendar/embed?src=ltgh4h23o9dtk0kda27r8itd8c@group.calendar.google.com&ctz=Europe/Paris

11 http://drive.google.com/file/d/0ByAAcDl5ZU7QWm45SlhlWGpRVXc/view ?usp =sharing

12 http://drive.google.com/file/d/0ByAAcDl5ZU7QUE9wUXpFaXRjdzg/view

13 http://mediathequemargueriteduras.flavors.me/

14 http://quefaire.paris.fr/programme/116188_numok_festival_numerique_des_bibliotheques_de_paris

15 http://drive.google.com/file/d/0B6IWoC4rIeALWVowX05lczF6NTQ/view

16 http://bibliotheques.paris.fr/Default/se-former-en-ligne.aspx

17 http://drive.google.com/file/d/0B6IWoC4rIeALWVowX05lczF6NTQ/view

18 http://mediathequemargueriteduras.wordpress.com/2016/03/24/suivrelactualitesurinternet/

19 http://voyageursducode.fr/

20 http://drive.google.com/file/d/0B6IWoC4rIeALWVowX05lczF6NTQ/view

21 http://bibliotheque-numerique.paris.fr/

22 Michel Wieviorka, L’impératif numérique, op. cit.

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