Annexes
p. 383-520
Note de l’éditeur
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Texte intégral
Les sites fortifiés
1Nota bene : Les sites fortifiés sont regroupés par civitates, les mieux documentés étant exposés en premier. Certains sites, initialement retenus à l’inventaire et finalement retirés font tout de même l’objet d’une notice.
Annexe 1 : Les sites fortifiés des Riedones
2Le plateau d’“Orange” à Vieux-Vy-sur-Couesnon (35) est formé de la confluence du Couesnon et de l’Aleron qu’il surplomb d’environ 50 m de haut. Ce promontoire, approximativement trapézoïdal, qui culmine à plus de 75 m NGF, est naturellement défendu à l’est et au nord-est par des abrupts. Le flanc sud/sud-ouest de l’éperon, le plus vulnérable, est barré par un talus, conservé entre 6 m et 10 m de haut sur une largeur d’environ 20 m, associé à un fossé extérieur qui présente un aspect très irrégulier au sud-ouest – jusqu’à 30 m de large d’ouverture (fig. 1). D’anciennes coupes transversales pratiquées pour l’accès à l’intérieur de la fortification ont livré quelques éléments vitrifiés qui pourraient témoigner de l’incendie d’au moins un état de ce système de barrage. Au sud, le talus est doublé, sur environ 135 m, par une seconde élévation moins imposante – de 4 m à 5 m de haut, pour une emprise au sol de 10 m. Un talus de 5 m de haut et 30 m de large ferme l’extrémité nord du promontoire. Le site est prolongé vers le sud-ouest par un second enclos fermé par un talus de 5 m de haut également associé à un fossé (de 7 m de large à l’ouverture). Ces vestiges sont connus depuis le xixe siècle par les érudits qui arpentent le promontoire1. On doit les descriptions les plus complètes à A. Millon2, puis à R. Vandenbroucque3 qui mènent des prospections afin de préciser la topographie du site et les dimensions des fortifications. Cependant, l’“oppidum d’Orange” ne fait l’objet d’aucune intervention archéologique. C’est pourquoi, seule la découverte, à l’intérieur du site, d’un lot d’une trentaine de monnaies gauloises4 – dont 9 ont pu être étudiées (7 statères riedones, 1 statère coriosolite et 1 statère vénète) – permet aujourd’hui de proposer un état à La Tène finale. En effet, les prospections du xxe siècle signalent des vestiges (tegulae, monnaies romaines, céramiques et fers de lance mérovingiens) qui renvoient essentiellement à des occupations plus tardives. Les différentes lignes de défense suggèrent au moins deux états de construction, avec une phase probable au Moyen Âge. En effet, la présence au sud/sud-est de l’éperon d’un tertre (10 m de haut pour environ 50 m de diamètre), de murs maçonnés, d’une chapelle et de sarcophage évoque une occupation médiévale.
Fig. 1. Vue du N-O du rempart extérieur de l’oppidum d’Orange à Vieux-Vy-sur-Couesnon, Ille-et-Vilaine (Cl. J. Remy, 2014).

3Le contexte de découverte des monnaies gauloises (du début du xxe siècle) – qui étaient associées à des ossements et crânes humains ––, ajouté aux traces laissées par un burin sur sept statères, suggère l’existence d’un lieu à vocation rituelle à l’intérieur du promontoire fortifié à La Tène finale5. Le réexamen de l’un des statères par P. Abollivier, dans le cadre de sa thèse de doctorat, l’invite à attribuer ces monnaies au début du ier s. a.C.6.
Annexe 2 : Les sites fortifiés des Coriosolites
Le site de Saint-Malo (35)
4Au sud de l’enceinte médiévale de Saint-Malo, à l’embouchure de la rivière de la Rance, la “Cité d’Alet” forme une presqu’île de 14 ha. Le promontoire rocheux, défendu sur la majorité de son pourtour par des falaises, à une altitude moyenne de 20 m NGF, est surtout réputé pour son fort, édifié par Vauban. Les premières découvertes datées de la période romaine remontent à l’époque de sa construction en 1759. Mais, les traces d’une occupation romaine sur le promontoire sont réellement identifiées à partir du xixe siècle, où l’on mentionne également la mise au jour de monnaies gauloises provenant de la cité7. Les fouilles méthodiques, pratiquées par A. Dos entre 1964 et 1971, concernent majoritairement les vestiges romains, néanmoins les premiers témoins de la fin de l’âge du Fer (céramiques et monnaies notamment) sont exhumés à cette période. Toutefois, il faut attendre les campagnes de fouilles de L. Langouët, menées entre 1972 et 1978 autour de l’ancienne cathédrale du xe siècle d’Alet, pour mettre en évidence la présence d’une agglomération gauloise.
5Le choix d’intégrer le promontoire d’Alet à l’étude des sites fortifiés résulte de ses caractéristiques topographiques qui laissent envisager l’existence d’un système défensif au niveau de l’isthme bien qu’aucun témoin archéologique ne puisse appuyer cette hypothèse. Il est d’ailleurs peu probable de voir un jour ce doute levé, car ce secteur est actuellement trop urbanisé et occupé par des quartiers d’habitations. Il faut préciser que l’isthme qui sépare le site du continent a été récemment élargi par des travaux de terrassement. Le choix même d’implantation de cette langue de terre dont l’accès devait être naturellement limité présente un caractère défensif.
6L’ensemble des opérations menées sur le promontoire (environ 3000 m²), contraintes par le caractère urbain des vestiges romains, atteste d’une dense occupation de La Tène finale, dans divers secteurs totalisant une surface d’au moins 4 ha8. Des structures d’habitats ont pu être identifiées sans qu’aucun plan de bâtiment n’ait pu être restitué9. Des activités domestiques (tissage, consommation et transformation des céréales, foyer...), de boucherie (concernant principalement des animaux d’élevages), de pêche et de métallurgie (du bronze) ont été appréhendées dans les environs de l’ancienne cathédrale. De nombreuses monnaies (51 recueillies anciennement, lors de fouilles, ou à l’occasion de prospections), des bijoux ou des éléments de parures (fibules, bracelets et bagues en bronze, bracelets en lignite, perles) témoignent d’une population aisée, typique des habitats aristocratiques ou des contextes d’agglomérations. De plus, dans la zone de la cathédrale, un atelier monétaire semble s’être développé. Le site est également envisagé comme étant un centre de production céramique. Cette proposition repose sur la découverte d’un lissoir en dolérite et sur la nature de l’argile de décomposition du substrat d’Alet apparue, lors des fouilles, identique à la pâte des céramiques grossières locales10.
7Les fouilles d’Alet ont également mis en évidence des échanges commerciaux trans-Manche avec le territoire durotrige, à travers la présence d’un type de céramique fine à cordons qui semble avoir été exportée d’Alet vers Hengistbury Head dans l’actuel Dorset en Angleterre11. Ces échanges sont confortés par des importations de statères coriosolites, exhumés sur le même site durotrige et datés de la période de la conquête12.
Le site d’Erquy (22)
8Le cap d’Erquy (22) est un éperon littoral de grès rose qui s’avance dans la Manche. Protégé au nord, à l’ouest et au sud par des falaises abruptes qui plonge dans la mer, le promontoire s’élève en moyenne autour de 50 m NGF. Le troisième côté est protégé par un rempart d’environ 590 m de long, qui ferme une surface de 35 ha. Il est doublé dans la partie centrale (sur environ 320 m de long) par un second talus en pierre parementé (distant de 5 m à 6 m du précédent), associé à un fossé. Cet ensemble a fait l’objet d’un sondage en 1968, offrant une datation radiocarbone des restes d’une poutre contenue dans le talus principal, soit 320 ± 110 a.C., c’est-à-dire La Tène ancienne/moyenne à La Tène finale13. La seconde ligne de défense n’a livré aucun élément de datation. Il est simplement suggéré qu’elle corresponde à un état inachevé, destiné à doubler l’autre barrage. Il convient de rester prudent avec la datation de ce promontoire puisqu’elle repose sur une seule analyse radiocarbone. À l’intérieur du camp, sur la partie méridionale de la falaise, trois dépôts coquilliers, composés d’une majorité de moules et de patelles, ont livré des tessons protohistoriques ou romains. Ils constituent les seuls éléments de connaissance sur l’occupation interne de cet éperon barré, de nature indéterminée. Ajoutons qu’un rempart édifié vraisemblablement au premier âge du Fer14 barre le même promontoire d’une superficie réduite à 15 ha15.
Annexe 3 : Les sites fortifiés des Osismes
Le site de Ploulec’h (22)
9Le promontoire granitique du “Yaudet” à Ploulec’h (22) surplombe l’estuaire du Léguer, à près de 900 m de son ouverture sur la Baie de Lannion. Il est constitué de deux plateaux séparés d’une combe peu profonde, appelée vallée centrale, qui se développe d’est en ouest et domine la baie de la Vierge. Le plateau supérieur au sud culmine à 61 m NGF, défendu par des pentes abruptes, tandis que le plateau inférieur, au nord, s’élève à 42 m, entouré de pentes plus douces. Enfin, au sud-est, le promontoire domine la vallée qui débouche sur l’anse de Pont Roux et au sommet de laquelle s’implante un rempart de barrage qui clos une surface de 5,2 ha.
10Ce rempart de barrage ou rempart traversier, édifié à La Tène finale, comprend trois états de fortifications successifs qui aboutissent à l’édification d’un talus massif (type Fécamp) de sable granitique. À La Tène, ce rempart connaît un accès, nommé “Porte terrestre orientale”, très probablement situé à son extrémité est. On remarquera que les trois états du rempart de barrage possèdent une qualité défensive renforcée à chaque réaménagement. Par ailleurs, un rempart périphérique longe le pourtour du promontoire sur environ 800 m de long. Il est caractérisé par deux phases de construction correspondant aux deux premiers états du rempart traversier. Il forme à l’origine une terrasse, de 5 m à 6 m de large, implantée en rupture de pente et équipée d’un parement en façade. Il est doublé dans son deuxième état par un parement de 2 m de large, atteignant 2 m à 4 m de haut et possède une ouverture, localisée dans l’angle nord-ouest du promontoire (la “Porte maritime” édifiée à La Tène finale).
11En dehors de campagnes de sondages, réalisées ponctuellement sur l’ensemble du promontoire et sur les lignes de défense, le plateau supérieur fit l’objet d’une attention particulière durant les douze campagnes qui ont permis de cumuler quatre grandes aires de fouilles16, totalisant environ 2000 m². Ce qui fait du “Yaudet”, l’un des sites fortifiés du nord-ouest de la Gaule les mieux documentés pour la fin de l’âge du Fer, tant pour les systèmes de défense17 que pour les installations internes. Ainsi, l’occupation du promontoire se développe sans discontinuité entre La Tène finale et le iiie s. p.C. Elle subit de fortes érosions dues aux différentes installations qui se succèdent sur le promontoire : constructions de l’époque romaine, puis pratique de l’agriculture au Moyen Âge18. Ajoutons que les occupations successives le long du rempart de barrage ont été, à chaque réaménagement de la fortification, endommagées par la récupération des matériaux utilisés pour la construction de l’enceinte. Pour ces raisons, l’habitat de La Tène finale au “Yaudet” est mieux représenté par ces vestiges mobiliers que par les restes de construction.
12Néanmoins, des aménagements ont été identifiés sur l’ensemble du promontoire : sur les deux plateaux et dans la vallée centrale qui les sépare.
13Deux phases d’occupation à La Tène finale ont été mises en évidence sur le plateau supérieur. La première – que l’on situe après la construction du premier état du rempart traversier – est caractérisée par une série de trous d’ancrage de poteau – aucun plan n’a pu être identifié –, un four, ainsi qu’un ou deux greniers. La seconde phase d’occupation – qui fait suite à l’édification du second état du rempart– est matérialisée par quatre greniers, les vestiges de deux à trois bâtiments, par des trous d’ancrage de poteaux épars, des foyers et débris d’occupation domestique (ossements d’animaux, coquillages, céramiques), ainsi que quelques tronçons de murs en pierres sèches. Notons que les fouilles ont mis en évidence la présence de carrières au contact du rempart de barrage pour l’extraction de matériaux utiles à la construction des différentes fortifications, qui ont largement contribuées à l’érosion du site.
14Dans la vallée centrale, les sondages ont permis d’identifier deux zones aménagées en terrasses sur lesquelles s’installent des niveaux de La Tène finale, identifiés par la présence de séries de trous d’ancrage de poteaux et d’un abondant mobilier daté du milieu du ier s. a.C. au début du ier siècle.
15Enfin, sur le plateau inférieur, les vestiges de La Tène finale sont beaucoup plus ténus (un trou de calage de poteau et une dépression). Ajoutons que des niveaux d’occupations antérieurs à l’aménagement du rempart périphérique, c’est-à-dire antérieurs à La Tène finale ont été repérés (au moins un bâtiment en pierres sèches).
Le site de Huelgoat (29)
16Le “Camp d’Artus” à Huelgoat (29) est implanté sur une éminence au sud du massif montagneux des monts d’Arrée, culminant à 228 m NGF. Il est encadré par deux voies romaines, distant d’environ 2 km de celle qui relie Carhaix à Morlaix. La colline est bordée au sud par la rivière d’Argent et à l’est par un affluent, le ruisseau du Pont Pasquion qui coule à 50 m en contrebas. À l’ouest, une pente moins abrupte aboutit sur le ruisseau de Kervao. L’état de conservation des fortifications qui protègent le site attire la curiosité de divers érudits dans le courant du xixe siècle19, puis il fait l’objet d’une description et d’un plan schématique par Paul du Chatellier, en 1907. Quelques années plus tard (1938), Sir M. Wheeler entreprend des fouilles et engage la réalisation d’un plan complet et précis du site, conçu par une équipe dirigée par M. Dudley Waterman et M. Timothy Crosthwait. Ces sondages constituent, encore à ce jour, les seules interventions archéologiques pratiquées sur le promontoire.
17Celui-ci est fermé sur 30 ha par une grande enceinte de contour (doublée d’un fossé), sondée dans sa partie méridionale et nord-occidentale. Elle est caractérisée par une architecture de type murus gallicus, constituée d’un parement avant qui bloque un remblai maintenu par une grille de poutres, fixées par des fiches en fer. Une rampe en terre stabilise l’arrière de l’ouvrage. Au nord du promontoire, un système de barrage, qui vient se raccorder au premier rempart, réduit l’espace fortifié à 4 ha. D’après les observations de l’équipe de M. Wheeler, cette construction de 6 m de large correspond à une seconde phase de construction, dont l’architecture apparaît très différente de celle du rempart de contour20. En effet, elle est marquée par un double parement et aucun élément de poutrage n’a été mis en évidence. Par ailleurs, l’extrémité du promontoire a été réoccupé, les remparts, conservés sur 5 m à 15 m de hauteur, ont été réhaussés voir réaménagés21. Quelques assises d’un parement arrière ont été identifiées sur ce nouvel ouvrage. Aucun mobilier n’a été recueilli lors de la fouille de cette seconde construction, mais il est possible qu’elle corresponde à une réoccupation médiévale du promontoire. En effet, un tertre implanté à l’extrémité nord du promontoire, généralement interprété comme une motte castrale, fonctionne vraisemblablement avec les restes d’un ensemble de talus/fossé localisé moins de 50 m plus au sud (basse-cour ?). Cependant, précisons que cette hypothèse repose sur la découverte d’un unique tesson, ramassé dans le sondage pratiqué à travers ce vallum et attribué par M. Wheeler au début de l’époque médiévale22.
18Au moins deux portes entrantes, aménagées dans le rempart de contour du “camp d’Artus”, ont été reconnues. La première, de 2,70 m de large, s’ouvre à l’est à hauteur de la petite enceinte, la seconde (de 2,8 m à 4,2 m de large) est localisée au sud-est. Leur dégagement a montré des traces de porches.
19Quelques traces d’occupation – deux trous d’ancrage de poteaux et un foyer –, ainsi que des couches archéologiques contenant du mobilier de La Tène finale (céramique et amphore de type Dressel 1) ont été dégagées en divers points du promontoire à l’occasion de onze sondages réalisés par l’équipe de M. Wheeler. Ces éléments ne sont cependant pas suffisants pour permettre d’engager une discussion sur l’organisation interne du site à la fin de l’âge du Fer et sa(es) fonction(s). D’autre part, les prospections menées dans la seconde moitié du xxe siècle ont principalement livré des monnaies de l’époque romaine (en argent).
20En prévision d’aménagements de la forêt domaniale d’Huelgoat, un relevé LIDAR est réalisé en 2009, en accord avec l’ONF. Un plan, précisant la complexité des systèmes de défense de la pointe septentrionale du promontoire, a été obtenu à l’issue de cette étude. Les données, traitées par le SRA de Bretagne, ont été vérifiées sur le terrain par des prospections23. D’après ce relevé, une enceinte semi-circulaire adossée à un système de talus/fossé, qui barre d’est en ouest l’intérieur de la petite enceinte de 4 ha, semble structurer l’espace de cette partie du site. Néanmoins, à l’heure actuelle, ces aménagements ne sont pas datés et ne peuvent donc pas être attribués à l’époque laténienne.
Le site de “Kercaradec” (Quimper, 29)
21La colline de “Kercaradec” (29), qui culmine à 91 m NGF, est longée à l’ouest et au sud-ouest par la rivière de Keriner, affluent de l’Odet dont le cours actuel est distant de 1,90 km du promontoire. La fortification est implantée sur le haut d’une colline, aux portes de la commune actuelle de Quimper, côté sud-ouest de la ville, entre le passage de deux anciennes voies provenant de Quimper. L’une orientée vers le nord-ouest aboutit à Douarnenez, l’autre en direction du sud-ouest, passe à Saint-Jean-Trolimon. La colline est ceinte, sur une surface d’un peu plus de 2 ha, par un rempart de contour renforcé par une voire deux lignes d’un système de talus/fossés. Hormis une courte description que l’on doit à P. du Chatellier24, l’état des connaissances de ce site repose essentiellement sur les investigations menées en 1938 par Leslie Scott et Sir M. Wheeler.
22À cette époque, ils réalisent une tranchée afin d’observer l’architecture du rempart principal (rempart interne), qu’ils ne parviennent malheureusement pas à dater. Un tesson de La Tène finale, recueilli dans la première couche de comblement du fossé qui lui est associé, constitue le seul élément de datation. À l’est, une entrée de ce rempart a également été sondée, révélant deux phases d’aménagements. Une seconde entrée pourrait être matérialisée au nord par une interruption de la fortification.
23Le rempart interne est doublé sur la majorité de son pourtour par un talus, sauf au nord/ nord-ouest du camp, où la fortification est renforcée par deux autres talus de 5 m à 6 m de large, composés des matériaux issus du creusement des fossés attenants. Les sondages n’ont pas livré suffisamment d’indices pour affirmer si les différents éléments du système défensif sont contemporains.
24Cinq petits sondages complémentaires, réalisés à l’intérieur de la fortification lors de la même campagne (de 1938), n’ont révélé que de rares vestiges d’occupation localisés dans la partie occidentale de l’enceinte : des éléments de torchis, de la céramique, des charbons de bois et des balles de frondes piégés dans une dépression25. De nombreuses balles de fronde ont également été découvertes au pied du rempart interne et d’autres sont signalées ailleurs sur le site. Le réexamen du mobilier céramique exhumé, a permis une attribution au ier s. a.C.26. Quelques éléments datés du Hallstatt final indiquent une possible occupation du site à la fin du premier âge du Fer.
25Enfin, il faut signaler sur la même commune la présence d’un autre promontoire barré d’un fossé à “Keradennec”, localisé sur la rive gauche de l’Odet, à moins de 5 km de distance de “Kercaradec”. L’occupation du site à La Tène finale n’ayant pas pu être clairement identifiée, celui-ci n’a pas été pris en compte dans le cadre de cette étude27.
Le site de Ploudaniel (29)
26L’éperon barré de “Castel-Penledan” est localisé au centre du Plateau de Léon, au nord-ouest de la commune de Ploudaniel (29). Culminant à 60 m NGF, il domine la confluence de deux cours d’eau dont le fleuve de l’Aber Wrac’h qui coule 25 m en contrebas, le long du flanc nord de l’éperon. Protégé par des pentes naturelles sur trois côtés, à l’est, il est séparé du reste du plateau par deux barrages distants de 80 m. Connu depuis le début du xxe siècle28, ce petit site fortifié de 3 ha fit l’objet d’un recensement et de prospections effectuées dans le cadre d’une maîtrise puis d’un DEA sur les sites fortifiés du Finistère, par P. Maguer29, qui engagera ensuite des sondages programmés en 1995 et 1997.
27Le rempart externe, complété par un parapet de contour, s’élève parfois encore sur 3 m de hauteur et s’étend sur 7 m à 8 m de large à la base. Un sondage dans une section mal conservée au sud-est, a révélé une structure constituée de remblais retenus par un double parement avant, pour laquelle ne subsiste que quatre assises30 (fig. 2). Un accès est aménagé au centre du barrage. Le rempart interne, lui, est associé à un fossé externe de 5 m à 6 m de large. L’entrée est matérialisée par une ouverture à aile rentrante au sud, avec un retour d’environ 20 m de long.
Fig. 2. Vue en coupe du rempart extérieur de “Castel Penledan” à Ploudaniel dans le Finistère (Maguer 1997, 9, Cl. 3).

28Les deux remparts qui barrent ce promontoire ont été ponctuellement relevés en coupe, mais aucun élément de datation ne permet réellement de les rattacher à une occupation du site. Cependant, notons que les types architecturaux reconnus ne sont pas étrangers à ce que l’on observe pour la fin de La Tène moyenne et La Tène finale : entrée avec aile rentrante pour le rempart interne, système de parements en gradin pour le parapet de contour – proche de l’architecture relevée par M. Wheeler sur le site de “Kercaradec” à Quimper (29).
29Les sondages réalisés en 1995 à l’intérieur de l’éperon barré – totalisant 650 m² – n’ont pas permis d’identifier le moindre plan de bâtiment néanmoins, la nature des vestiges suggère la présence d’une occupation domestique (trous d’ancrage de poteau, foyers et fosse de combustion). Si ces structures sont rarement associées à du mobilier datant, au moins deux d’entre elles (fosses de combustion) ont livré des tessons attribuables à la fin de La Tène moyenne ou à La Tène finale31.
Le site de Landunvez (29)
30En poursuivant plus à l’ouest, à l’une des extrémités de la péninsule bretonne, rattachée à la commune de Landunvez (29), l’Île d’Yoc’h, cernée par la Manche, pointe à plus de 500 m de la côte. Au large de la commune d’Argenton, l’île s’élève à 20 m d’altitude en moyenne. Actuellement accessible à pied sec lors de marées d’un coefficient supérieur à 90, on estime qu’elle était reliée par un cordon au continent à la fin de l’âge du Fer, le niveau de la mer étant probablement 2 m plus bas qu’aujourd’hui32. À la suite de la découverte fortuite de quelques tessons de céramique de La Tène finale en 1978, une visite de reconnaissance est organisée sur l’île, en 1982, par des archéologues de la Direction des Antiquités de Bretagne (P. Galliou et J.‑P. Le Bihan), qui identifient dans la partie nord de l’île, un rempart encore conservé sur 80 m de long, sur le bord de côte. Sur les 7,5 ha que couvre l’île, 420 m² seront explorés entre 1987 et 1990, dans le cadre de sondages et de fouilles programmées (sous la direction de M.‑Y. Daire). Ces opérations permettent de dégager cinq bâtiments révélant la présence d’un petit habitat groupé daté du début du ier s. a.C. au milieu du ier siècle, qui devait exploiter toute la surface de l’île si l’on en croit les découvertes de mobiliers céramiques et d’augets à sels dispersés un peu partout.
31Ainsi, deux bâtiments quadrangulaires, de 25 m² à 30 m² de surface interne, ont été reconnus. L’un correspondant à un atelier de bouilleurs de sel, équipé de deux cuves parementées de galets marins montés à l’argile (pour l’étanchéité) et de deux foyers, où ont été recueillis des fragments d’augets et des éléments de briquetages. M.-Y. Daire suppose que ce bâtiment a pu servir, dans un second temps, d’habitation. Une fosse-dépotoir a été reconnue à l’extérieur du second bâtiment, interprété comme un habitat du fait de l’abondant mobilier domestique qu’il a livré. Un troisième édifice se caractérise par une aire empierrée carrée de 3 m de côté, tandis que le quatrième se distingue par de gros blocs granitiques plantés qui délimitent un espace subcirculaire de 15 m² (surface interne). La cinquième structure présente une architecture proche, équipée d’un foyer. Ces trois derniers bâtiments peuvent avoir abrité des activités agricoles – bergerie ou autre ? – ou artisanales – séchage/fumage de poisson33. Ajoutons que la reconnaissance par sondages ou par prospections d’anomalies magnétiques, détectées lors d’une prospection géophysique menée au sud-ouest de l’île, a mis en évidence la présence d’un probable atelier de saunier et d’un four domestique piriforme de La Tène finale34.
32Le rempart, reconnu en prospection, correspond à un imposant talus, de 5/6 m de hauteur, constitué de galets marins, de blocs de granite, de sable et d’humus35. Sa proximité avec les bâtiments de La Tène finale autorise à y voir une fortification de l’âge du Fer bien qu’il n’ait pas livré d’éléments datants. On peut supposer qu’il s’étendait, à l’origine, tout le long de la côte est, celle qui fait face au continent, sur environ 450 m de long, permettant de contrôler les accès au continent et préservant l’île d’éventuelles intrusions.
Le site de Plougasnou (29)
33En longeant la côte du Trégor, au nord de Morlaix, sur la commune de Plougasnou (29), l’étroite “Pointe de Primel”, barrée par une succession de talus sur 3,95 ha, s’avance dans la Manche. Située à l’extrémité ouest de la baie de Morlaix, elle domine l’anse de Diben. À l’extrémité de la pointe, le “Rocher de Primel” est isolé par une fissure naturelle. L’éperon est remarqué par Sir M. Wheeler, dans la première moitié du xxe siècle, qui n’en fait qu’un rapide relevé36. En effet, seules des prospections pédestres documentent l’occupation de ce promontoire granitique dont l’aspect naturellement défensif a été exploité jusqu’à la période moderne.
34Les talus, formés d’après l’observation d’une coupe d’argile et de galets, ne sont pas datés. Néanmoins, la découverte d’un fragment de Dressel 1 suppose un possible état fortifié à La Tène finale. Plus largement, une occupation de l’âge du Fer est attestée par de la céramique, de possibles vestiges d’un bâtiment, mais également des indices d’activités domestiques non datés caractérisés par des restes de coquillage et de foyers37. Ces informations seront reprises par la suite sans qu’aucune intervention archéologique ne vienne préciser la nature de l’occupation à la fin de l’âge du Fer38.
Le site de Beuzec-Cap-Sizun (29)
35À l’extrémité occidentale de la péninsule bretonne, à quelques kilomètres en amont de la Pointe du Raz, le promontoire granitique de “Castel-Coz” à Beuzec-Cap-Sizun (29) s’avance dans la baie de Douarnenez. Trois ensembles de talus et fossés barrent l’extrémité de l’éperon qui se développe sur 1,20 ha. Il est protégé sur une grande partie de son pourtour par un alignement de blocs fichés dans le sol. Les fortifications, qui ne sont pas datées, sont caractérisées par deux talus conservés sur 2 m et 10 m de hauteur et pour la plus interne, par un mur de 1,25 m de large au centre duquel une porte est aménagée. Ces ouvrages sont complétés à l’extérieur par deux lignes de défense, appelées “chevaux de frise”, correspondant à des pierres dressées que M. Wheeler propose d’attribuer au Néolithique39.
36En 1869, R.-F. Le Men pratique des fouilles à l’intérieur de ce retranchement, mettant ainsi au jour six bâtiments. Ils sont décrits comme des constructions excavées majoritairement quadrangulaires (une seule est semi-circulaire), de 5 m de long par 3 m de large40.
37Une importante quantité de mobilier y est recueillie, révélant une occupation discontinue du Néolithique au Moyen Âge41. Une partie de ce mobilier, conservé au musée de Guénolé à Penmarc’h (29), est étudié par M. Wheeler qui présente des planches de céramiques du second âge du Fer, qui seront réexaminées par M.-Y Daire42. D’après P.-M. Duval, les bâtiments ont livré une majorité de mobiliers datés de La Tène finale43.
38Parmi les objets découverts au xixe siècle, l’archiviste mentionne une vingtaine de meules dormantes, une grande quantité d’éléments lithiques (molettes, pilons, galets aménagés, pierres à aiguiser, hache polie, pierres de fronde), des fusaïoles en terre cuite, des éléments de parure (anneau de verre blanc, perle de verre bleu, grain de collier en bronze), une épée en bronze, des couteaux de fer et une serpe. À l’instar de la céramique, certains de ces éléments sont probablement associés à l’occupation de la fin de l’âge du Fer44. La découverte d’une monnaie gauloise en or à l’intérieur de l’éperon confirme l’attribution d’un état à La Tène finale45.
Annexe 4 : Les sites fortifiés des Vénètes
Le site de Saint-Pierre-Quiberon (56)
39Au centre du territoire vénète, au nord du golfe du Morbihan, la presqu’île de Quiberon s’avance dans l’Océan Atlantique, fermant ainsi la baie de Quiberon. L’éperon de “Beg-en-Aud”, sur la commune de Saint-Pierre-Quiberon (56), est situé au nord-ouest de la presqu’île. Aussi appelée “Camp des Romains”, cette pointe est protégée sur trois côtés par des abrupts qui surplombent d’environ 15 m de haut l’Océan. Côté continent, le promontoire est défendu par un imposant talus de 3 m à 5 m de haut, conservé sur 40 m de long et jusqu’à 30 m de large. Associé à un fossé de 30 m à 35 m de large à l’ouverture – dont le profil est visible sur le bord de la falaise nord (fig. 3) –, en grande partie comblé, il a fait l’objet de deux campagnes de sondages entre 1868 et 1869 par l’Abbé Collet, vicaire de Quiberon et membre de la Société Polymathique du Morbihan, dont les conséquences ont été destructrices. En effet, celui-ci interprète l’ouvrage comme un tumulus dont il cherche à atteindre la chambre funéraire en pratiquant une percée sur le sommet du rempart46. Néanmoins, ces fouilles livrent des informations quant à sa stratigraphie, constituée d’une couche de pierres entassées reposant sur le sol géologique. À ce niveau, des restes de poutres en chêne entrecroisées, fixées par de grands clous en fer à tête carrée (20/25m de long), ont été observés. Un parement de 4 m de large aurait également été identifié au sein de cet amas de pierres. Sur le dessus, une couche de 1,50 m de “vase”, puis un amoncellement de pierres sont repérés sous la terre végétale47. Ces observations et la taille imposante de l’ouvrage suggèrent plusieurs états de constructions, dont au moins deux caractérisés par un possible murus gallicus ou un type s’en approchant et un talus massif le recouvrant. Un second talus interne n’est aujourd’hui plus conservé en élévation.
Fig. 3. Vue du nord du rempart de barrage et du fossé attenant de l’éperon de “Beg-en-Aud” à Saint-Pierre-Quiberon (Cl. J. Remy, 2015).

40Aucune fouille ni aucun sondage n’a été pratiqué à l’intérieur du site d’une superficie de 2,5 ha, mais on remarque la présence de structures en micro-reliefs (possibles bâtiments ?) à la surface desquelles a été recueilli récemment de la céramique laténienne (J. Remy, prospection, février 2015). Les diverses prospections menées sur ce site, très touristique, ont permis de recueillir de la céramique La Tène moyenne à Pour exemple, en 1990, J. Hyvert réalise un relevé topographique de l’éperon et découvre un vase de La Tène finale. Ces indications chronologiques coïncident avec les fragments de Dressel 1A découvert à l’intérieur du rempart lors du sondage pratiqué au xixe siècle et la découverte fortuite, en 1961, d’une monnaie gauloise attribuée aux Pictons48. En dehors de la céramique, quelques éléments mobiliers attestent d’une occupation de ce promontoire, mais ne suffisent pas à trancher quant à sa fonction (peson de filet, fer de lance, boucle de cuivre).
41Enfin, des découvertes fortuites réalisées dès le xixe siècle et des fouilles de sauvetages ponctuelles dans le courant du xxe siècle, permettent de cartographier un ensemble d’indices d’habitats ou de sépultures de l’âge du Fer, voire de La Tène finale, en périphérie de l’éperon fortifié de “Beg en Aud”. Ils suggèrent une forte présence sur la presqu’île de Quiberon à l’âge du Fer, dont la nature est difficile à percevoir (habitats dispersés ou habitats groupés ?). Ces découvertes provenant soit de fouilles anciennes, de prospections pédestres ou de découvertes fortuites, il est difficile d’aller plus loin dans l’interprétation, d’autant que la datation est souvent peu précise (cf. notice 5623424 AH, dossier communal du SRA de Bretagne).
Le site de Plouhinec (56)
42À l’est de la ville actuelle de Lorient, le promontoire de “Mané-Coh-Castel” à Plouhinec (56), près du “Vieux Passage”, est implanté sur la rive droite de la rivière d’Étel, culminant à 13 m NGF. Cet éperon d’un peu plus d’un hectare (1,3 ha) barré à l’ouest par un talus, domine le cours de l’Étel d’environ 10 m de haut, installé à 3 km de son embouchure dans l’océan Atlantique. Il apparaît dans les inventaires du xixe siècle49, souvent décrit comme une fortification romaine, mais il faut attendre les recherches sur les sites de hauteur fortifiés entreprises par l’équipe de Sir M. Wheeler dans le courant du xxe siècle pour obtenir les premiers éléments de datation. En 1939, lors d’une campagne de sondage réalisée à l’intérieur de la fortification par M. Threipland, aucun niveau archéologique en place n’est mis en évidence, néanmoins de la céramique de la première moitié du ier s. a.C. (La Tène D1b/La Tène D2a) y est recueillie – céramique tournée, vases graphités et vases à cordons50. Malheureusement, la fortification n’étant pas sondée, de fait, l’architecture du talus, conservé jusqu’à 2,50 m de haut, ne sera pas documentée. Il sera ensuite détruit sur environ 40 m de long par des travaux agricoles. Vers 1962-1963, de nombreux restes céramiques sont recueillis par G. Bernier (professeur au lycée de Lorient), au moment de la construction d’une maison individuelle au contact du talus, mais ceux-ci ne sont pas étudiés ni récupérés par la Circonscription des Antiquités préhistoriques de Bretagne (Archives, SRA de Bretagne). Enfin, en 1989, il fait l’objet d’un inventaire dans le cadre du mémoire de maîtrise de M.‑L. Hervé, qui livre un plan réactualisé des vestiges encore en élévation51. Elle propose de localiser l’accès au site au nord, à l’emplacement d’une interruption du talus.
Le site de Groix (56)
43Au large des côtes morbihannaises, on compte de nombreuses îles, dont certaines ont été occupées à la fin de l’âge du Fer. Au sud-ouest de l’île de Groix, la “Pointe de Kervédan” s’avance dans l’océan Atlantique, le surplombant actuellement de plus de 20 m de haut. Ce petit promontoire, surnommé “Camp de César”, implanté à environ 33 m NGF, est fermé par un système de talus/fossés multiples qui cloisonnent une surface de moins d’un hectare – 0,8 ha. À l’est, ce système s’interrompt sur une vallée marécageuse, correspondant à un ancien lit de rivière. Les fortifications n’ont pas échappé aux érudits du xixe siècle qui en proposent des descriptions52. Par la suite, le site est intégré à l’expédition, dirigée par M. Wheeler, qui vise l’exploration des sites fortifiés du nord de la France. C’est dans ce cadre que L. M. Threipland organise une campagne de sondage en 1939 et dresse le premier plan du “Camp de César”53. Des fragments de céramique du ier s. a.C. sont alors recueillis à l’intérieur de l’éperon, permettant de proposer au moins un état d’occupation du site fortifié à la fin de l’âge du Fer. Néanmoins, la densité des lignes de barrage suggère que la Pointe de “Kervédan” ait été occupée à plusieurs reprises. Un fragment d’amphore (Drag. 37) et de céramique sigillée indiquent d’ailleurs une fréquentation à l’époque romaine54.
44Le système de barrage est composé d’un talus externe de 77 m de long associé à un fossé et séparé d’un ensemble de trois talus et deux fossés (dont le rempart interne), distants de 40 m. Dans cet intervalle de 40 m, trois autres lignes de défense aujourd’hui détruites ont été repérées par l’équipe de L. M. Threipland, qui réalisa une grande coupe transversale de l’ensemble du système de barrage. Trois périodes de construction de ces différentes fortifications ont été envisagées par l’archéologue, néanmoins aucun mobilier ne permet réellement de dater l’une ou l’autre des lignes de défense. Toutefois, l’architecture du rempart interne n’est pas sans rappeler des modèles connus pour l’âge du Fer (cf. chap. II, p. 93, SA 147). Une ouverture de 4,30 m matérialise actuellement l’accès à l’intérieur du camp. En 1989, M.-L. Hervé reprend les données issues des fouilles de L. M. Threipland et complète le plan en détaillant les dimensions des vestiges encore en élévation55. Si une occupation de La Tène finale est reconnue à l’intérieur du camp, la chronologie des systèmes défensifs ne peut être avancée.
Le site de Sauzon (56)
45Belle-Île-en-Mer compte plusieurs éperons barrés – d’une superficie inférieure à 1 ha –56, dont nous ne retiendrons que la “Pointe du Vieux Château”, sur la commune de Sauzon (56), au nord/ nord-ouest de l’île, puisqu’il est le seul a avoir livré des éléments de datation de La Tène finale.
46Ce promontoire de 10 ha, aussi appelé pointe de “Coh-Castel”, barré par un ensemble de quatre talus associés à des fossés, surplombe actuellement de plus de 30 m l’océan Atlantique. Il est l’un des six sites fortifiés qui ont été sondés par L. M. Threipland en 1939. Les fouilles du début xxe siècle et des prospections livrent de la céramique des iie et ier s. a.C. à l’intérieur du site, mais aucune datation précise ne peut être sérieusement avancée pour les fortifications. Notons que le talus le plus interne, beaucoup plus imposant que les autres (5 m de haut et jusqu’à 25 m de large), présente de multiples états de construction, d’après la coupe transversale effectuée au début du xxe siècle57. Il est percé par deux ouvertures, dont on ne sait si elles sont d’origine. D’après le rapport de L. M. Threipland, repris par Sir M. Wheeler, le rempart interne présenterait un dernier état médiéval, qui semble réaménagé à l’est par un tertre, alors interprété comme une motte castrale58. L’état, supposé dater de l’âge du Fer, est muni d’un parement interne en pierres sèches. La façade opposée n’a pas été dégagée.
47En 1961, la fouille est réamorcée par G. Bernier qui ne fournit malheureusement aucun rapport ni documentation de fouille. Quelques années plus tard (1969), un statère armoricain est découvert sur la pointe, lors d’une prospection réalisée par R. Bertrand59. La documentation disponible sur ce site fait l’objet d’un réexamen et de prospections, en 1988 par O. Kayser et M. Batt (Dossier communal, SRA de Bretagne), puis en 1989 par M.-L. Hervé60.
Le site d’Arzano (29)
48À l’extrémité occidentale du territoire vénète, le “Camp de Saint-Adrien”, petit éperon barré de 1,2 ha, est formé d’un méandre de la rivière de l’Ellé qu’il domine de 20 m de haut. Localisé sur la commune d’Arzano (29), l’espace enclos, qui culmine à 25 m NGF, à peine, est dominé par le plateau qui se développe à l’est autour de 90 m NGF. La rivière de l’Ellé poursuit son cours en direction de l’actuelle ville de Quimperlé, à environ 4 km, où elle conflue avec celle de l’Isole pour former la ria Laïta. Au milieu du xxe siècle, était visible un système de trois talus/fossés successifs barrant l’éperon, avec une probable entrée matérialisée à l’est par une ouverture du talus extérieur. Ces trois aménagements ne sont pas datés et il n’est pas exclu qu’ils correspondent à plusieurs états de mise en défense de l’éperon. En 1978, des travaux d’enrésinement endommagent le site, mais permettent également la mise au jour de céramiques de La Tène finale à l’intérieur de l’enceinte (Projet de préservation du site, dossier communal, SRA de Bretagne). Le site est redécouvert en 1981 lors d’une prospection systématique menée par D. Tanguy et effectuée dans le cadre d’un mémoire universitaire61. Du mobilier de La Tène finale est à nouveau recueilli en prospection, près du talus interne (notamment des fragments d’amphore Dressel 1A). Notons que D. Tanguy engage des fouilles dès 1988, à environ 1 km de distance, plus à l’est, où il met au jour les vestiges d’un habitat de La Tène finale sur le lieu-dit “Kerangoarec” (29002017 AH). Ils sont caractérisés par quelques sections de fossés et des traces d’une activité artisanale – foyers, tuyère –62. Cet habitat semble en partie installé au contact d’un site funéraire probablement plus ancien : sépulture en “tombelle” – structure en encorbellement protégeant un caveau ou une fosse (Information orale, D. Tanguy).
Le site de Peaule (56)
49À la frontière entre le territoire vénète et le territoire namnète, le promontoire du “Château” à Peaule (56), culminant à 59 m NGF, est installé à l’ouest de la confluence de la rivière de l’Étier et du fleuve de la Vilaine. Le rempart, qui est presque continu sur tout le pourtour du promontoire, surplombe les deux cours d’eau de 20 m à 35 m de haut.
50Ce site, qui avait fait l’objet d’un relevé en 1861 par l’abbé Piederrière, est uniquement mentionné dans l’inventaire de L. Marsillé comme un camp de l’époque romaine63. Il n’a été redécouvert que très récemment, en 2008, lors d’une prospection-inventaire organisée par le Céram (Centre d’études et de recherches archéologiques du Morbihan)64. Les prospections, y compris aériennes, se poursuivent sur le site afin d’établir un plan et de cartographier les talus conservés en élévation65. Au total, un lot d’une dizaine de tessons de La Tène finale et de rares fragments d’amphores italiques sont recueillis, permettant de supposer l’existence d’au moins un état d’occupation du site à la fin de l’âge du Fer66. En effet, il n’est pas exclu que le système de fortification, assez complexe, soit attribuable à diverses périodes. Une visite récente du site offre l’opportunité de constater l’agencement des systèmes défensifs observés en 2009 (J. Remy, 2015). Ainsi, le promontoire est protégé par un large rempart de contour de 3 m de haut pour 10 m de large, qui se dédouble à la rupture de pente qui file en direction du nord, jusqu’à l’Étier. Peu avant ce dédoublement, le rempart est renforcé par trois talus sur environ 20 m de long. Une coupe du rempart, réalisée par un agriculteur à l’occasion de l’aménagement d’un chemin, a révélé au moins deux états de construction dont l’un est constitué d’un parement avant et d’un blocage en terre avec une rampe à l’arrière (Dossier communal, SRA de Bretagne) (fig. 4). Avant la rupture de pente, le talus forme un embranchement vers l’est qui ferme la partie haute de l’éperon. Le rempart se poursuit le long du flanc sud de l’éperon, où il est arasé. Près du hameau du “Château”, un mur en pierres sèches (blocs de granite) a été reconnu le long de cet axe. Ces différents éléments de fortifications n’ont pas encore pu être datés.
Fig. 4. Coupe du rempart de contour du promontoire du “Château” à Peaule (56), réalisée sur la partie occidentale de son tracé pour l’aménagement d’un chemin (Cl. J. Remy, 2015).

Le site d’Arzon (56)
51Au nord-ouest de la presqu’île de Rhuys sur la commune d’Arzon, la Pointe de Saint-Nicolas s’avance à l’intérieur du golfe du Morbihan, face à l’Île aux Moines. Au xixe siècle les érudits mentionnent la présence d’un imposant rempart de terre et de pierre qui barre une petite “langue de terre” au nord du lieu-dit “Pen-Castel”, protégeant une surface d’un peu plus de 2 ha du continent67. Le rempart atteignait alors 10 m de haut, doublé à l’extérieur par un fossé large de 16 m68. Au centre de l’aménagement, une ouverture de 6 m de large permettant l’accès à l’extrémité de la pointe, correspond vraisemblablement à l’entrée d’origine puisque le rempart se poursuit jusqu’en bords de falaise de part en part de l’isthme de 80 m de long. Il s’élève encore de 5 m de haut depuis l’intérieur du retranchement, en partie arasé sur ses flancs extérieurs pour le comblement volontaire du fossé au milieu du xixe siècle69. Les limites du cadastre napoléonien (1827) suggèrent l’existence d’un second barrage dont il ne subsisterait aucune trace et qui passerait la superficie enclose à 4 ha. Néanmoins, cette hypothèse relève d’une observation qui n’est, aujourd’hui, appuyée par aucun argument sérieux.
52L’architecture du rempart et la datation de ce système de défense ne sont pas connues, toutefois, l’arasement du talus, vers 1840, a permis la découverte d’une “urne en terre cuite contenant des os incinérés” que l’on peut supposer dater de l’époque romaine70. Elle aurait donc été enfouie dans l’ouvrage préexistant supposant une origine plus ancienne du talus. Mais la datation de l’urne cinéraire, qui ne nous est pas parvenue, ne peut être vérifiée. Par conséquent, cet indice chronologique est peu fiable. La tradition littéraire et orale, ainsi que des fouilles pratiquées en 1887, sous la direction d’un certain M. Bassac, attestent une dense occupation à l’intérieur de la fortification. Des vestiges de constructions pourraient correspondre à une chapelle moderne, d’autres à un couvent de templiers71. La présence de fragments de terre cuite et de céramiques de l’époque romaine est assurée depuis le xixe siècle et par des prospections plus récentes signalées en 200872 (dossier communal, SRA de Bretagne). Enfin, le réexamen, en 2015, du mobilier issu des fouilles du xixe siècle (conservé au musée de Vannes), dans le cadre d’un mémoire de master sur les sites fortifiés du Morbihan (Y. Dufay-Garel, sous la dir. V. Defente, Université de Rennes 2), a permis d’identifier des tessons de céramiques de La Tène finale. Aussi d’autres fragments attribués à cette période ont été recueillis lors d’une prospection pédestre menée la même année par Y. Dufay-Garel73. Finalement, ces indices confirment une occupation de la pointe de Saint-Nicolas à la fin du second âge du Fer et si la chronologie du rempart n’est pas définie, on peut tout de même supposer un état gaulois.
Annexe 5 : Les sites fortifiés des Aulerques Diablintes
53Deux sites fortifiés d’importante superficie se répartissent sur le territoire des Aulerques Diablintes à la fin du second âge du Fer : Entrammes vers le sud et Moulay un peu excentré au nord.
Le site de Moulay (53)
54L’oppidum de Moulay (53) situé à 3 km au sud de la ville de Mayenne, est installé sur un plateau protégé par des falaises, découpées par les vallées de la Mayenne et de son affluent l’Aron au sud-ouest, sud-est et au nord qui peuvent atteindre plus de 20 m de hauteur. L’éperon, formé par la confluence de ces deux rivières, est fermé à son extrémité par un imposant rempart, dit “rempart du bourg”, qui isole une surface de 12 ha (fig. 5). Au nord-est et à l’est le terrain est plat et ouvert sur environ 380 m de long. Un nouveau système de barrage de 1200 m de long, au lieu-dit du “Petit Mesnil”, limite cet espace, conférant une superficie enclose de 135 ha. Le rocher naturel est constitué de granite et de schistes granitisés, parfois recouvert d’une strate de décomposition de ces roches, telles que des arènes granitiques, des argiles et des lœss. Le point culminant du site, localisé au nord-est de l’enceinte principale non loin du rempart de barrage, pointe à 137 m NGF.
Fig. 5. Vue du N-O du rempart interne de Moulay (53), coupé par la route qui dessert au nord le bourg (Cl. J. Remy, 2010).

55Depuis le xixe siècle, on trouve des mentions de la fortification du bourg, qui marque encore nettement la topographie. L’ouvrage est tantôt assimilé à un talus médiéval du xie siècle74, tantôt comme un poste d’observation romain75. L’origine laténienne de l’occupation de cet éperon est révélée au début des années 1970, période durant laquelle un lotissement est aménagé. La surveillance de ces travaux entraîne la découverte des premiers vestiges, un “moulin à bras complet de la Tène III”76. Ainsi, en 1972, la construction de maisons individuelles entame une partie du rempart, qui fait alors l’objet de sondages ponctuels. Le percement de la voie d’accès nord à travers le talus permet à J. Naveau d’en relever une coupe. Les fouilles qui touchent aussi l’intérieur de l’enceinte se poursuivent jusqu’en 1975 au gré de la mise en place du lotissement. La révision du mobilier issu de ces opérations indique une occupation du bourg dès la fin du ve et le début du ive s. a.C.77, dont la nature n’est pas caractérisée (fortifiée ou non ?). De la céramique de La Tène finale atteste également une phase d’occupation contemporaine de celle de l’enceinte du “Petit Mesnil”78. Si aucun indice sérieux ne permet de caler chronologiquement les différentes phases d’édification du rempart du bourg, il est tentant d’envisager un état au second âge du Fer.
56Le barrage du “Petit Mesnil” n’est identifié qu’en 2004 (dir. A. Valais, INRAP), à l’occasion d’un diagnostic mené dans le cadre d’un projet de déviation de la route nationale 162, qui vise le contournement des communes de Moulay et de Mayenne. La découverte des premiers vestiges d’une occupation laténienne dans l’emprise de ce rempart entraîne la fouille du plus vaste site fortifié de notre zone d’étude – et le deuxième plus grand du nord-ouest de la Gaule après le “Camp du Castellier” à Saint-Désir dans le Calvados (160 ha) –, entre septembre 2009 et juin 2011, sur une superficie de 9,5 ha (dir. E. Le Goff, INRAP).
57À peu près au centre de l’enceinte principale de Moulay, la fouille met en évidence un enclos de forme à peu près carrée, de 31 m de côté, soit d’environ 900 m² de surface, dont les fossés peu profonds ont fonctionné ouverts. Celui-ci est interprété comme un sanctuaire, édifié dans la seconde moitié du iiie s. a.C. (présence d’un fer de lance et d’un lot de céramique datés de La Tène C1). Dans ses environs un réseau fossoyé ainsi qu’un groupe de bâtiments, qui présentent visiblement une orientation identique, ont été reconnus. Cette observation permet de proposer l’attribution de ces vestiges à une même phase d’occupation, préexistante à la trame implantée à La Tène finale, bien qu’ils n’aient pas livré de mobilier datant.
58L’enclos est définitivement comblé durant La Tène finale, probablement dès La Tène D1, puisque plusieurs éléments métalliques (armement, attaches de ceinture) sont attribués à cette période, probablement concomitamment à l’implantation de la nouvelle trame (cf. chap. II, p. 204, SA 147).
59L’occupation principale du site se développe vraisemblablement à la fin du iie s. a.C. (dans le courant de La Tène D1) jusqu’au milieu du ier s. a.C. Le tracé routier qui a conditionné l’opération archéologique s’étend du sud au nord sur 1430 m de long, offrant une bande d’exploration d’environ 50 m de large à travers l’enceinte du “Petit Mesnil”. Si une occupation a été reconnue sur l’ensemble de l’emprise de fouille, les aménagements se concentrent plus particulièrement dans trois secteurs identifiés comme des quartiers à vocation spécifiques. Ainsi, au sud un quartier résidentiel a été fouillé sur 10 520 m². Plusieurs parcelles ou îlots (1136 m² à 1912 m²), délimités par des fossés peu profonds, organisent cet espace. Ils accueillent généralement un ou deux bâtiments d’habitation (de 31 m² à 41 m²), parfois accompagnés de structures annexes tels que des greniers sur quatre poteaux porteurs. On notera qu’un bâtiment, localisé à peu près au centre de cette zone, probablement voué à l’habitation, se démarque des autres par sa surface enclose (près de 60 m²) et son architecture, caractérisée par un ancrage au sol plus important ponctué de 16 poteaux régulièrement implantés (poteaux porteurs et poteaux de la cloison non déportée). Sa singularité permet d’évoquer une construction publique ou communautaire, ou la résidence d’individus plus aisés. En effet, la découverte de fragments de vaisselle en lignite et d’un bracelet en verre dans ses environs se distingue de l’indigence du mobilier recueilli à l’intérieur de “l’oppidum du Mesnil”.
60Le second secteur résidentiel, identifié au nord sur une surface plus réduite, apparaît moins structuré avec une plus forte densité d’aménagements. Une certaine logique dans l’organisation des 18 bâtiments reconnus a pu être perçue. En effet, des greniers ou structures annexes semblent se regrouper autour d’un bâtiment de gabarit plus important, associé également à une ou plusieurs fosses (petites fosses et larges fosses quadrangulaires) et parfois à un puits79. La nature des mobiliers, provenant des plus imposants bâtiments, atteste de leur vocation domestique, tandis que les fosses (fosses ateliers ? greniers ?) semblent dévolues à des activités artisanales dont la nature et l’intensité sont moins bien cernées. Du moins, la présence de battitures dans certaines fosses témoigne d’une activité métallurgique à proximité. Ce quartier répond donc à diverses vocations, résidentielles et artisanales80.
61Dans la partie centrale, se développe un troisième secteur interprété comme un quartier artisanal. Il s’agit de la zone ayant livré le plus de mobilier (et notamment toutes les monnaies) – dont la proportion reste faible en regard des contextes d’agglomérations habituels – et où ont été recueillis des déchets de forge ou de métallurgie du fer (battitures, scories). L’organisation spatiale de ce secteur diffère des deux précédemment décris puisqu’elle est constituée de parcelles plus vastes (2000 m² à 3500 m²) et plus densément bâties. C’est aussi le seul endroit où ont été mises en évidence de grandes fosses destinées au stockage (fosses quadrangulaires de 1 m à 2 m de profondeur) et/ou à de possibles activités artisanales (forge ?). Un espace vierge de 1000 m², repéré au sein de ce quartier, a été interprété comme une place publique. L’argument selon lequel il pourrait “exprimer symboliquement la mémoire de l’ancien lieu de culte et de son espace public adjacent” n’est pas pleinement convaincant, au vu des faibles correspondances qui apparaissent à la superposition des plans81. L’observation du plan masse des structures, suggère que d’autres espaces aient pu jouer un rôle d’esplanade, comme au sud-ouest du quartier artisanal où une zone libre de toutes constructions (sur 4600 m²) est en partie comprise dans l’emprise de fouille.
62Entre ces espaces bâtis, d’autres se révèlent vierges ou presque (possibles greniers ou annexes de taille réduite). Ils sont délimités en plusieurs parcelles plus ou moins étendues et accueillent parfois des puits. Les études palynologiques réalisées à partir d’échantillons provenant des fossés évoquent principalement des activités agropastorales (culture, élevage) et de céréaliculture (aires de battage, stockage des céréales ou culture) dans une atmosphère fortement anthropisée82. La fouille a aussi mis en évidence deux zones humides impropres à la construction – au nord du secteur résidentiel méridional et au nord du quartier artisanal.
63Les 135 ha de surface sont protégés par le rempart du “Petit Mesnil”, qui a pu être décapé sur 160 m de long, fouillé sur 115 m, soit environ 10 % de son tracé total estimé83. Il est édifié selon les caractéristiques d’un type mixte associant un poutrage interne fixé par des fiches en fer – typique des muri gallici – et des poteaux frontaux – de type Pfostenschlitzmauer (fig. 6). D’après la datation dendrochronologique effectuée sur un échantillon, prélevé sur un des poteaux de la façade, celui-ci serait édifié à la fin de La Tène D184, période de développement de l’occupation principale dans l’enceinte du “Petit Mesnil”.
Fig. 6. Un poteau de la façade extérieure du rempart du Mesnil à Moulay, en partie conservé (Le Goff 2015, vol. 3, 275, fig. 485).

64Le site de Moulay connaît donc une installation précoce à l’extrémité du plateau, à la fin du ve ou au début du ive s. a.C. – dans le courant de La Tène ancienne. La chronologie du rempart du bourg n’est pas suffisamment bien établie pour certifier la fortification de l’éperon de 12 ha à cette période. Une occupation, dont la nature et l’ampleur restent difficiles à déterminer, se développe sur le plateau à environ 500 m de distance du rempart du bourg au début de La Tène moyenne. Puis, les différents aménagements de “l’oppidum du Mesnil” se mettent en place, selon une trame différente, au début de La Tène finale, au moment de la construction du rempart du “Petit Mesnil”. L’extrémité de l’éperon, au niveau du bourg, est également occupée durant cette période, où l’on peut supposer sa fortification. Il n’est actuellement pas possible d’évaluer l’authenticité du hiatus chronologique constaté entre ces deux phases d’aménagements. Enfin, le plateau est visiblement abandonné avant la période augustéenne, aux alentours de 30/20 a.C. Cet abandon résulterait certainement d’une désertion progressive puisque la fouille n’a pas montré de traces d’une destruction brutale.
Le site d’Entrammes (53)
65Le site du “Port du Salut” à Entrammes (53), est formé d’une pénéplaine dont l’altitude ne dépasse pas 90 m NGF, naturellement défendue au sud, sud-est et nord-ouest par des abrupts, alors qu’à l’ouest les pentes qui descendent vers la Mayenne sont douces et qu’au nord-est le paysage ne marque aucun dénivelé. En 1853, L.-J. Morin de la Beauluère (érudit et historien) est le premier à mentionner l’existence d’un site à la confluence de la Mayenne et de la Jouanne. Il indique la présence d’un talus doublé d’un fossé qui vient barrer l’éperon, au nord, au niveau du lieu-dit “Le Tour”. Au xixe siècle, celui-ci est assimilé aux vestiges d’une “station gallo-romaine” à l’origine du bourg actuel d’Entrammes85. Redécouvert en 1978 par J. Naveau, on le désignera dès lors comme les restes du rempart de l’“oppidum d’Entrammes”, couvrant une superficie d’environ 65 ha.
66En 1910, l’Abbé Angot reconnaissait déjà l’existence d’un large fossé comblé, plus au sud, au lieu-dit du “Châteliers”86. À nouveau reconnu en 1978, par C. Lambert et J. Rioufreyt (archéologues amateurs) lors d’un survol aérien, celui-ci ceinture le site de confluence sur une surface moins importante, réduite à 55 ha, si l’on considère qu’il prend part à la fortification de l’âge du Fer. En effet, ces aménagements ne sont pas datés. Seul le fossé associé au rempart principal a pu être appréhendé lors d’un sondage préventif, sans toutefois pouvoir être daté87. Ajoutons que le sommet des versants de la Jouanne au sud et sud-est sont surmontés de murs en pierres sèches (parapets), de datation inconnue.
67Dans l’espace enclos du “Port du Salut”, bien que les vestiges exhumés soient rares et que le rempart n’ait jamais été réellement daté, trois interventions ont révélé une occupation de La Tène finale à l’intérieur de l’enceinte (1978, 2004, 2007). Si l’attribution chronologique de ces vestiges est souvent peu précise, on peut considérer une implantation humaine à La Tène D et peut-être un peu avant, dès le iie s. a.C. (La Tène C2-D1a).
68Ainsi, les rares sondages réalisés dans la partie septentrionale (le long de la Départementale 103) ont livré des structures en creux – trous d’ancrage de poteaux, fossés et un puits ou un silo – que l’étroitesse du décapage n’a pas permis d’associer à des plans de bâtiments ou toute autre structure88. Au centre de l’enceinte du “Port du Salut” – au lieu-dit du “Champ du Devant” –, un diagnostic préventif a montré une occupation peu dense (une sablière basse et des trous d’ancrage de poteaux). Un fossé gaulois pourrait avoir appartenu à un enclos d’habitat de La Tène finale89. La découverte de plusieurs meules gauloises à l’intérieur de la fortification évoque des activités domestiques. Entre 1977 et 1978, J. Naveau (conservateur du musée de Jublains) entreprend des fouilles sur un temple de l’époque romaine implanté au centre de l’enceinte. À cette occasion, un niveau de La Tène finale y est reconnu. La forte proportion de mobilier de cette période, récolté sous le temple romain (céramiques, amphores, monnaies et meule) et sous son annexe (céramiques), pose la question d’un lieu de culte plus ancien, d’un éventuel sanctuaire de La Tène finale. L’identification d’un enclos dont l’angle est repéré lors d’un survol aérien, au sud-est du fanum, près de l’annexe vient appuyer cette hypothèse. Cependant, ces arguments sont trop minces pour conforter l’existence d’un lieu de culte gaulois.
69L’importance de ce site se mesure également à la présence d’une voie gauloise identifiée lors d’un diagnostic, sous la voie antique Le Mans-Rennes qui traverse en diagonale l’enceinte du “Port du Salut” et franchit la Mayenne au moyen d’un gué attesté depuis le xixe siècle90. Notons que certains axes du réseau fossoyé, mis en évidence en 2004, sont parallèles ou perpendiculaires à cette voie91. En ce qui concerne l’organisation du “Port du Salut”, il est actuellement impossible d’amorcer une analyse spatiale étant donné que les interventions archéologiques se résument, presque systématiquement, à des tranchées de diagnostics, à l’intérieur desquelles il est difficile de percevoir une organisation des structures ou même l’exacte orientation des fossés. Enfin, il semblerait qu’une agglomération se forme juste à l’est de la confluence de la Mayenne et de la Jouanne à la fin du iiie siècle, début du iie s. a.C. (La Tène C1b, C2 à La Tène D1a), mais nous aurons l’occasion d’y revenir (cf. infra p. 59).
Le site de Sainte-Suzanne (72)
70Nota bene : Depuis 2016, cette commune a fusionné avec d’autres pour devenir celle de Sainte-Suzanne-et-Chammes.
71Le petit éperon du “Le Tertre Ganne” à Sainte-Suzanne (72), est localisé à la frontière entre la civitates des Diablintes et celle des Cénomans. Installé à l’extrémité d’un éperon rocheux, le site est d’abord connu pour son bourg fortifié du Bas Moyen Âge dont les remparts enserrent une superficie de 3,35 ha. Les textes et les vestiges archéologiques encore bien conservés témoignent de la construction du donjon dès le xie siècle. La citadelle de Sainte-Suzanne est réutilisée à des fins militaires jusqu’à la fin du xixe siècle, bien qu’elle bénéficie de périodes de répit lorsque l’environnement politique le permet. Les flancs nord-est et sud-ouest de l’éperon sont naturellement protégés par d’importants abrupts. Le sommet de ce promontoire forme une plate-forme qui culmine à 165 m NGF. De là, le substrat descend en pente douce vers le sud pour atteindre 159 m NGF au niveau du rempart médiéval. La cité médiévale de Sainte-Suzanne domine la vallée de l’Erve d’environ 45 m.
72Dès le xixe siècle, les vestiges d’une muraille vitrifiée sont remarqués par des érudits92. Le naturaliste L. Maulny semble être le premier à dresser une description de cet aménagement, l’interprétant comme une ancienne fortification93. En 1829, M. de la Pilaie offre un rapport plus précis de la nature de l’enceinte, affirmant que le rempart médiéval est édifié sur des murs plus anciens et des portions vitrifiées94. P. Mérimée (Inspecteur général des Monuments Historiques) s’y intéressera, puisqu’il ira lui-même vérifier l’existence de ces fortifications. Des analyses chimiques sont même entreprises sur certains blocs provenant de ces ouvrages95. Cependant, il faut attendre 1977 pour que la mention d’un ouvrage défensif, supposé protohistorique, apparaisse dans la documentation archéologique. C’est à l’occasion d’une prospection aérienne que C. Lambert et J. Rioufreyt repèrent, au “Tertre Ganne”, ce qu’ils interprètent comme un éperon barré protohistorique (archives, SRA des Pays de la Loire). Pour cette raison, il fera l’objet d’une petite note dans la Carte Archéologique de la Gaule, bien qu’aucun vestige attestant d’une occupation à l’âge du Fer ne soit alors connu96. À ce jour, deux hypothèses subsistent, l’une affirmant l’existence d’une fortification protohistorique vitrifiée, qui se situerait probablement sous l’enceinte médiévale (tracé non connu), l’autre hypothèse suppose qu’il s’agit de fragments de murs vitrifiés anciens, réutilisés au Moyen Âge97. Notons que ce type de rempart est caractéristique du Hallstatt moyen/final, entre le viie et le ve s. a.C.98.
73Récemment, une opération de fouilles préventives permet de confirmer les hypothèses quant à l’origine ancienne de l’implantation sur le promontoire de Sainte-Suzanne. À l’occasion de ce chantier de 80 m², dirigé par A. Bocquet (Archéologue départementale de la Mayenne), une occupation de l’âge du Fer est alors appréhendée. La fouille effectuée à l’été 2006 s’est déroulée à l’intérieur de la fortification médiévale. Trois niveaux d’occupation (structures domestiques) de la fin du premier âge du Fer et du début du second (aux alentours du ve s. a.C.), qu’il est tentant de rapprocher à la possible existence d’un rempart vitrifié, sont alors mis en évidence. L’occupation de La Tène finale (début iie siècle au milieu du ier s. a.C.) se caractérise par une fosse (1,14 m de diamètre pour 0,40 m de profondeur) interprétée comme un dépôt mixte à objets remarquables. Elle est creusée dans le substrat et est directement au contact des niveaux médiévaux. Cette fosse est comblée par un sédiment meuble et très charbonneux, qui comportait en surface, une concentration de fragments de meules99. L’intérêt de cette structure réside dans le caractère rare des mobiliers qu’elle contenait : quatre vases, du mobilier à caractère militaire (un umbo de bouclier, un anneau passe-guide), une monnaie en argent “à la tête de Pallas”, deux perles annulaires en verre dont l’une d’un type assez rare et des outils d’artisanat (une pince, trois crampons de menuiserie). Son interprétation peut être double : dépôt secondaire rassemblant du mobilier de divers horizons (funéraire, religieux, habitat), ou dépôt à caractère rituel100. Notons qu’elle n’entretient aucune relation stratigraphique avec les premiers niveaux de l’âge du Fer, induisant un probable déplacement de l’occupation.
74L’unique fosse témoignant d’une occupation à la fin du second âge du Fer ne suffit pas pour caractériser l’occupation de l’éperon. La localisation des vestiges et la topographie du site orientent plutôt vers un site fortifié, bien qu’aucune trace de rempart de La Tène n’ait été identifiée. Cependant, si la présence d’un rempart vitrifié devait être confirmée, ainsi que son attribution au premier âge du Fer, il n’est pas exclu que le retranchement ait été réexploité à la fin de la période gauloise. En l’état, il n’est – pour l’instant – pas possible d’exclure définitivement l’hypothèse d’un habitat ouvert.
Annexe 6 : Les sites fortifiés des Aulerques Cénomans
Le site de Gesnes-le-Gandelin (72)
75Le prochain site est implanté au nord du territoire, à l’extrémité du Massif armoricain, au cœur des Alpes Mancelles. Le paysage est marqué, en bordure est de la commune de Gesnes-le-Gandelin (72), par le “Camp de Saint-Evroult”, un éperon rocheux de grès primaire qui domine largement le paysage environnant. Avec une altitude moyenne de 170 m NGF, le plateau, naturellement défendu par les vallées de deux affluents du ruisseau de Villette, est constitué au sud et à l’est de pentes suffisamment abruptes pour ne pas être, comme sur les deux autres côtés, renforcés de barrages. Au nord, un puissant rempart de 115 m de long, clos une superficie de 3,3 ha. Il est conservé sur 30 m à 40 m de large à la base et s’élève encore sur 4 m à 5 m de haut. Une dépression située en avant du talus, récemment exploitée comme carrière d’extraction pourrait correspondre au fossé. Le côté ouest est défendu par un terrassement moins imposant sur 210 m de long. Sur la moitié de sa longueur, celui-ci est interrompu sur une largeur minimum de 5 m qui matérialise probablement l’accès primitif. Remarquée dès le xixe siècle, cette fortification est d’abord envisagée comme un camp romain101, avant d’être présentée comme un “oppidum gaulois”102. Plus tard, G. Fleury concède à l’éperon barré une origine gauloise, reconnaissant également la présence d’une occupation médiévale sur les mêmes lieux103. La première opération de terrain n’est engagée qu’en 1988 par deux archéologues bénévoles (C. Lambert et J. Rioufreyt) qui, suite à des reconnaissances aériennes, procèdent à une coupe transversale dans le rempart de barrage. Trois campagnes sont alors nécessaires pour obtenir une coupe stratigraphique complète du rempart. Un état ‒ au total trois ont été reconnus104 ‒ de cet aménagement a été attribué à La Tène, sans plus de précision105. Aussi, une couche stratigraphique de La Tène a été mise en évidence au nord-ouest de la fortification, tandis qu’un sondage réalisé près de la porte, au contact du talus occidental a également livré du mobilier de La Tène finale (un potin “à la tête diabolique”, fragments d’amphore de type Dressel 1B et de céramiques). L’ensemble de ces indices concourt à admettre une occupation du promontoire à la Tène finale.
76En contrebas de l’éperon, à environ 2 km de distance du camp, une occupation de la fin de La Tène moyenne et du début de La Tène finale a été mise en évidence par une opération préventive de faible ampleur, ainsi que par des découvertes inédites issues de prospections de surface, sur la commune d’Oisseau-le-Petit, dans le périmètre d’une agglomération secondaire de l’époque romaine (cf. supra p. 67).
Le site d’Aubigné-Racan (72)
77Le sud du territoire cénoman est en partie limité par la rivière du Loir, affluent de la Sarthe, le long de laquelle est implantée la commune d’Aubigné-Racan. Au sud-ouest de celle-ci, le paysage est marqué par une butte témoin, la “Butte de Vaux”, située à l’extrémité du massif du Cherbonnais, en surplomb (d’environ 30 m) de la rivière du Loir. Une enceinte couronne le sommet de ce promontoire qui culmine à 83 m NGF. Construite en limite du plateau sommital, elle suit les courbes topographiques de la butte. Avant l’aménagement, dans les années 1970, d’une ouverture au sud, l’accès au site se faisait par un petit chemin excavé, venant de la ferme du “Vaux” à l’ouest, remontant le long du rempart au sud-ouest et aboutissant à une entrée en chicane, probablement d’origine, aménagée à l’extrémité nord de la muraille. La fortification est identifiée dès le xixe siècle, désignée comme la “station militaire des Buttes de Cherré”106, néanmoins, la littérature ancienne s’intéresse davantage à l’occupation antique d’Aubigné située au nord de la Butte, sur une basse terrasse alluvionnaire, dont l’ensemble monumental est rapidement identifié. Le camp est de nouveau signalé en 1947 par A. Bouton qui désigne “des levées de terre très caractéristiques” sur le pourtour de la “Butte de Vaux”107, puis il est qualifié d’oppidum par J. Siraudeau108. Une visite en 1973 est à l’origine de premières observations de la stratigraphie du rempart (par J. Rioufreyt), qui ne fut relevée que deux ans plus tard. À la même période, il localise un gisement néolithique à l’intérieur du camp (archives, SRA des Pays de la Loire, dossier n° 72013001) et déclare la présence de matériel néolithique et chalcolithique sur toute la surface alors en culture (parcelle 354, section O4, cadastre 1972). Il faut attendre le printemps 1975 pour que J. Rioufreyt et C. Lambert entreprennent de rafraîchir la coupe sur 10 m de long, de creuser une tranchée peu large le long de celle-ci, afin de descendre jusqu’à la base du rempart. Ils complètent ce premier travail par des campagnes de fouilles au contact du rempart durant les trois années qui suivent.
78Malgré ces investigations, la description de l’architecture du rempart reste délicate car les coupes ne sont pas complètes. Deux parements en pierres sèches séparés de 4 m par un comblement de terre et de blocs semblent former une terrasse en limite de rupture de pente. Des négatifs de poteaux ont été reconnus à l’avant du parement externe, signalant un possible renforcement au moyen de poteaux, dont le rôle architectural ne peut être précisé au vu de la faible emprise de l’intervention. Ils pourraient également correspondre à un autre état de construction. Le rempart en lui-même n’a pas livré d’éléments de datation, cependant un ancien sol, sur lequel la fortification est en partie édifiée, contenait des charbons que l’analyse radiocarbone attribue à l’âge du Fer, de manière large109. Toutefois, entre la fin des années 1970 et le début des années 1980, quelques éléments mobiliers, datés de La Tène finale, ont été ramassés en prospection de surface à l’intérieur de l’enceinte110. Précisons pour conclure qu’une occupation du site au Bronze final est avérée par la découverte des restes d’un habitat mis au jour lors des sondages pratiqués dans les années 1970.
Le site du Mans (72)
79À peu près au centre du territoire cénoman, la ville du Mans est installée sur un promontoire formé de la confluence des rivières de l’Huisne et de la Sarthe. Du fait de cette situation topographique avantageuse pour l’implantation d’une ville fortifiée, l’existence d’un oppidum installé sur la “butte du Vieux-Mans” est présumée depuis le xixe siècle. Mais jusqu’à présent, il n’existait que très peu d’indices de cette éventuelle occupation : deux monnaies et un dépôt monétaire découvert en position secondaire, près des berges de l’Huisne111. Ajoutons que les travaux du tunnel devant relier la place des Jacobins à la Sarthe entre 1870 et 1877, qui ont conduits à des fouilles, a relancé le débat. Les vestiges d’un mur sont alors interprétés comme les restes de l’enceinte gauloise112. Cependant, il n’est actuellement pas possible de confirmer ces observations. Par ailleurs, l’examen de la céramique recueillie au Mans ces trente dernières années n’a pas révélé d’éléments de La Tène finale113. Toutefois, des fouilles préventives conduites récemment aux “Jacobins”, au niveau de l’ancienne vallée de l’Isaac, ont livré quelques témoins d’une occupation précoce de la seconde moitié du ier s. a.C., difficiles à cerner notamment du fait que le substrat n’a été atteint que ponctuellement. On retiendra principalement la découverte d’un four de potier ayant livré son dernier chargement constitué uniquement de vases réalisés au tour rapide, datés de La Tène D2114. Notons qu’il est l’un des trois ateliers de potiers avérés pour la région des Pays de la Loire, avec un autre situé à Angers, présumé oppidum et un autre au “Moulin de Beaulieu” à Guérande (possible habitat groupé).
80À proximité immédiate, un sanctuaire des eaux romain, implanté au niveau du cours d’eau, est précédé de dépôts et rejets d’objets de La Tène finale et de l’époque romaine, qui permettent de supposer l’existence d’une activité cultuelle, coexistant avec une activité artisanale.
81Finalement, si ces indices ne suffisent pas encore pour assurer la présence d’un oppidum au Mans, ils relancent le débat de la présence d’une agglomération gauloise dont l’emplacement pourrait être, légèrement décalé par rapport au centre urbain antique. Celui-ci se met en place dès l’époque augustéenne sur “la butte du Vieux Mans”, se développant au Haut-Empire entre 60 ha et 80 ha115.
Le site de Duneau (72)
82Un peu plus de 20 km à l’ouest du Mans, sur le bord de la vallée de l’Huisne, la commune de Duneau, qui culmine à une centaine de mètres NGF, est installée sur un promontoire rocheux qui domine la rivière de 35 m de haut. Le site est essentiellement connu pour son occupation antique puisque le bourg actuel est à l’emplacement d’une agglomération secondaire romaine, principalement occupée entre le ier et le iiie siècle116. Le plateau, naturellement protégé sur ses côtés nord, est et ouest, est ceint sur environ 10 ha par un système défensif elliptique associant talus et fossé. Non daté, celui-ci se développe, du nord au sud, sur 440 m et, d’est en ouest, sur 320 m. Il est arbitrairement interprété comme un ouvrage médiéval depuis le xixe siècle117. Toutefois, son origine gauloise118 est envisagée dès 1982119, mais il faut attendre 2007, pour que des découvertes de la fin de La Tène viennent étayer cette hypothèse. De fait, lors d’un diagnostic archéologique, trois structures fossoyées de La Tène finale ont été appréhendées sur moins de 100 m². Précisons que le faible nombre de vestiges s’explique, au moins en partie, par l’état d’arasement du terrain dans la parcelle concernée par l’opération. Une zone d’activité artisanale a tout de même pu être identifiée, comme en témoignent des vestiges liés à la transformation du fer en objets finis et la présence d’un atelier de bronzier : possible atelier de production de fibules120. Notons qu’un contexte archéologique proche de celui-ci a déjà été remarqué au “Camp des romains” à Chênehutte-Trêves-Cunault (49). En effet, dans les deux cas, les vestiges semblent indiquer l’existence d’une agglomération antique se développant à l’intérieur d’une enceinte sans être limitée dans l’espace par cette contrainte, marquant une continuité avec l’occupation antérieure. De plus, l’enceinte de Duneau s’étend sur une superficie (10 ha) s’approchant de celle proposée pour Chênehutte.
Annexe 7 : Les sites fortifiés des Andécaves
Le site d’Angers (49)
83Poursuivons plus au sud, à 7,5 km en amont de la confluence de la Maine avec la Loire. À hauteur de la commune d’Angers (49), sur la rive gauche du Maine, un promontoire est formé de sa confluence avec le ruisseau de l’Esvière, aujourd’hui disparu. Le plateau se développe en moyenne entre 40 m et 45 m NGF, s’élevant de 20 m à 25 m au-dessus de la rivière. Dès 1977, géologues et archéologues se sont intéressés à sa topographie, démontrant son évolution depuis l’Antiquité121. On retiendra deux caractéristiques essentielles à ces recherches. Au sud de l’éperon, des carrières d’extractions médiévales sont à l’origine de l’escarpement rocheux actuel, tandis qu’à l’est, une profonde vallée, aujourd’hui colmatée, barrait initialement l’accès au plateau122. Ces pentes naturelles limitent l’emprise de l’éperon à 9,4 ha, emplacement présumé d’un oppidum depuis le début du xxe siècle123.
84L’installation humaine sur le site d’Angers semble véritablement se développer au cours du changement d’ère, dans les dernières années de l’Indépendance gauloise. Ce phénomène constitue toute la difficulté de l’appréhension du site. Effectivement, il est difficile de percevoir la nature des premiers temps de l’occupation et son rapport avec la conquête de la Gaule. L’hivernage de la VIIe légion de César124 n’est toujours pas localisé, bien que des militaria provenant du site d’Angers (au château, au Logis Barrault et rue Delaâge) soient aujourd’hui recensés. L’un d’eux (un piquet de tente), découvert au château, a d’ailleurs permis à M. Mortreau (INRAP) d’affirmer la proximité immédiate d’un campement militaire provisoire daté, au plus tard, de la période augustéenne précoce125. Un autre élément peut venir conforter l’idée d’une présence romaine (militaire) à cette époque. Il s’agit du mobilier de l’horizon 4 défini au château d’Angers, assemblage datable des années 20/10 a.C., qui est, semble-t-il, comparable à celui identifié sur les colonies romaines de Lyon et les camps du limes : sigillées du service 1a, 1b et 1c, des gobelets à parois fines, des balsamaires, des mortiers italiques, des grands plats campaniens à engobe rouge pompéien internes...126.
85Si l’on accepte l’idée de l’hivernage de l’armée romaine sur le site d’Angers, il est maintenant possible d’assurer une présence humaine antérieure à cette installation. Mais le caractère très exigu des diagnostics archéologiques entrepris dans l’ancien centre de la ville limite encore la définition de sa nature et de son ampleur. Si pour certains l’existence d’un oppidum ceinturé “par un puissant rempart de terre à poutrage de bois ”127 est probable sur le promontoire d’Angers, l’examen des résultats offerts, au moins par l’archéologie préventive, ne permet pas d’être aussi affirmatif. En effet, plusieurs indices signalent l’existence d’une fortification ou d’un système de terrasse “pré-romain”128. À l’intérieur du château médiéval et au sud de la zone de fouille, une accumulation de dépôts de plus d’un mètre d’épaisseur, contrastant avec les quelques 0,22 m conservés au nord, suggèrent la présence d’un obstacle artificiel contemporain aux sédiments, orienté parallèlement au vallon de l’Esvière et venant retenir la sédimentation. À cela s’ajoute la mise en évidence, sur le bord du promontoire, d’un talus rocheux vertical d’un peu plus d’un mètre de haut aménagé dans le substrat, associé à trois possibles négatifs de poutrages129. De plus, si certains pensent que l’implantation se cantonne au centre-ville d’Angers, les indices archéologiques semblent néanmoins se développer bien au-delà – découverte d’amphores, dépôt de La Chalouère130. En définitive, il est, pour l’heure et dans l’attente de nouvelles interventions préventives, difficile de définir la nature et l’ampleur de l’occupation à La Tène finale à Angers.
86Cependant, certains éléments vont dans le sens d’un habitat groupé, dont l’espace apparaît organisé et structuré, au niveau du centre-ville d’Angers. Premièrement, la fouille du Jardin du Quadrilatère, menée dans l’enceinte du château médiéval entre 1992 et 1997 (qui représente 2000 m² de fouille), a livré plusieurs phases d’occupations successives et continues – de 120/100 à 10 a.C. – dont les unités d’habitations reprennent sensiblement les mêmes orientations, mises en place durant La Tène. D’autre part, la spécialisation des espaces caractéristique d’une organisation urbaine a été mise en évidence : un secteur d’artisanat (métallurgie) et un secteur voué à “des activités en plein air” – signalé par des enclos, ainsi que par des dépôts –, tous deux séparés par une hypothétique rue qui apparaît comme une limite forte de l’espace131. Deuxièmement, les fouilles du musée des beaux-arts d’Angers (menées de 1999 à 2001) – au Logis Barrault – ont livré les vestiges de la fin de La Tène finale d’un habitat sur solin et sablières basses, mal conservées, organisé vraisemblablement selon une trame orthogonale qui perdure durant la période augustéenne (plus d’un demi-siècle). Notons que ces vestiges sont localisés juste au niveau de l’ancienne vallée orientée sud-sud-ouest/nord-nord-est, censée délimitée l’oppidum.
87D’autre part, d’étroits sondages ont parfois permis de valider la présence gauloise sans qu’il soit possible de préciser la nature des vestiges. Une phase d’occupation de La Tène D2b (50/20 a.C.), correspondant vraisemblablement à des restes d’habitat, est mise au jour rue des Filles-Dieu132. Aussi, sous la Maison du Tourisme, des niveaux gaulois stratifiés de la fin de l’Indépendance ont été identifiés entre 1979 et 1980 – des vestiges d’habitat ou plus probablement d’un atelier d’artisan133. Une activité potière, datée d’environ 40/30 a.C., a également été mise en évidence rue Delaâge, en 1974, à l’extérieur de l’éperon primitif134.
88L’occupation gauloise précède l’émergence d’une agglomération romaine dont la trame se met en place à la période tibérienne. La ville se développe pour atteindre environ 80 ha et devient la capitale de la cité des Andes.
Le site de Mûrs-Érigné (49)
89À quelques kilomètres au sud d’Angers, un petit éperon surplombe la rivière de l’Aubance, installé à environ 6 km en amont de la confluence avec Le Louët (affluent de la Loire). Distant de seulement 3 km du cours actuel de la Loire, le site des “Humelles”, à Mûrs-Érigné, est implanté, à environ 20 m NGF, à l’extrémité d’un promontoire rocheux de forme longue et relativement étroite, limité par des versants aux pentes douces, mis à part à l’ouest où la pente est légèrement plus accentuée. La fortification du second âge du Fer, aujourd’hui totalement arasée, individualise un espace de 3,5 ha du reste du plateau se développant au sud. Celle-ci est appréhendée en 1999, à l’occasion d’une évaluation de sauvetage (dirigée par E. Le Goff, AFAN), réalisée en amont de la construction de l’A87 reliant Angers (49) à Mortagne-sur-Sèvre (85). La fouille, menée la même année, éclaire sur une occupation qui s’étend de la fin du iiie siècle ou du début du iie s. a.C. à la fin de La Tène finale135. Durant cette période, le système de barrage fait l’objet de trois phases d’aménagement, avec un premier état correspondant à un simple fossé rectiligne interrompu sur environ 10 m de large à l’est, signalant probablement une entrée latérale. La seconde phase voit l’aménagement d’un fossé un peu plus imposant, de 1 m de profondeur pour 4,5 m de largeur, associé à un talus de 10 m de large, qui pourrait avoir été complété par une palissade. Celui-ci est équipé d’une entrée – peut-être sous la forme d’un porche –, mais il également marqué par une interruption du fossé à plus de 30 m du bord du versant. Cette faiblesse dans la fortification reste difficilement interprétable. Enfin, dans une dernière phase, le fossé est monumentalisé, s’ouvrant sur environ 6 m de largeur pour une profondeur de 3 m au maximum. Se développant sur 225 m de long, il est associé à un talus d’environ 9 m de large, constitué des matériaux d’extraction du fossé, qui voit une interruption de 5 m pour l’aménagement de l’entrée. Le site est également équipé d’un parapet de contour. Celui est démantelé à la fin de la période gauloise ou au début de l’époque romaine, période durant laquelle le fossé sert de dépotoir.
90L’occupation est caractérisée, dans le courant de La Tène, par un ensemble de fossés (de 2 m à 2,50 m de largeur conservés sur le sommet du promontoire) s’organisant parallèlement et perpendiculairement au fossé de barrage, à l’intérieur du retranchement. Ils ne sont pas tous contemporains et témoignent de différentes phases d’occupations. Immédiatement en arrière du fossé de défense ont été mises en évidence deux zones de concentration de trous d’ancrage de poteaux, qui indiquent l’existence d’aménagement sur poteaux plantés, témoignant d’une occupation assez dense dans ces secteurs. Néanmoins, l’organisation des structures indique qu’elles ne sont pas toutes contemporaines. Fouillé sur près d’un tiers de sa superficie, la fonction ou le statut du site reste cependant obscur du fait de l’absence de mobilier spécifique, qui viendrait renforcer le caractère monumental du système de barrage et l’intérêt de sa position géographique si proche de la Loire.
Le site de Chênehutte-Trêves-Cunault (49)
91Nota bene : Depuis 2016, cette commune a fusionné avec d’autres pour devenir celle de Gesnes-Val-de-Loire.
92Plus en amont de la Loire, à environ 8 km de Saumur, le “Camp des Romains” sur la commune de Chênehutte-Trêves-Cunault est installé sur la rive gauche du fleuve, à l’extrémité d’un plateau qui culmine à 78 m NGF. Défendu au nord et nord-est par des abrupts qui dominent la Loire, le site est limité au sud par le ravin du ruisseau de La Fontaine de l’Enfer. À l’ouest, le promontoire est protégé par un large talus artificiel de 252 m de long qui referme un polygone irrégulier de 7,5 ha. Le talus, encore haut de 3 m en 1987, mesure 32 m de large à sa base136. La première mention de ce site défensif remonte à la seconde moitié du xviie siècle137. L’archiviste C. Port précisera, par la suite, les mesures de la fortification138. Ainsi, en 1911 O. Desmazières ne fait que reprendre les indications de ces prédécesseurs dans son Inventaire des camps, enceintes, buttes, mottes, et retranchements anhistoriques du Maine-et-Loire139. Plusieurs campagnes de sondages seront menées à l’intérieur et à l’extérieur de l’enceinte, au début du xxe siècle par le colonel Picard puis par P. Dain, entre 1964 et 1968. La découverte de vestiges carolingiens (bâtiment et sarcophages), mais surtout romains est complétée par des prospections pédestres et aériennes depuis 1976 jusque dans les années 1990 (G. Boisbouvier, J.‑P. Bouvet et A. Braguier). Ces interventions mettent en évidence la présence d’une agglomération romaine “s’organisant autour de deux axes se coupant à angle droit”140, dont l’extension s’affranchit de la limite du rempart. L’occupation laténienne n’est appréhendée qu’en 1984, lors d’un sondage restreint (13,5 m²) réalisé à l’intérieur de l’enceinte. Trois fossés, un foyer ainsi qu’un sol damé sont alors datés de l’extrême fin de La Tène finale, c’est-à-dire entre 50 et 20 a.C.141. L’importance de cette occupation est suggérée par des mobiliers métalliques ramassés en surface au xixe siècle : épée, pendeloques et bracelets de l’époque gauloise, ainsi que 19 monnaies142.
93Le rempart n’a jamais fait l’objet de fouille, son attribution à La Tène finale n’est donc que supposée. Seule une coupe accidentelle a pu renseigner de l’existence d’un parement externe constitué de blocs de grès. Le profil d’un fossé associé au talus était encore perceptible au début du xxe siècle143. L’entrée, reconnue par photographie aérienne, est localisée dans l’angle sud-ouest.
94Le sondage réalisé en 1984, à l’intérieur de la fortification, a livré du mobilier suggérant la présence d’installations néolithiques et de l’âge du Bronze final IIIb144. Enfin, des sarcophages témoignent d’une occupation qui perdure jusqu’au viiie siècle145.
Le site de Châtelais (49)
95Nota bene : Depuis 2016, cette commune a fusionné avec d’autres pour devenir celle de Segré-en-Anjou Bleu.
96Au nord-ouest de la civitates des Andécaves, à la limite avec le territoire namnète, la fortification de “Saint Julien” est installée sur une cluse, dominant la rivière de l’Oudon, à 1200 m du bourg actuel de Châtelais (49). En raison de sa position géographique, la fortification est parfois attribuée aux Namnètes et il reste difficile actuellement de trancher sur cette question.
97Le plateau, formé de grès armoricain, culmine à environ 80 m d’altitude. La plus ancienne mention de ce site le désigne comme un oppidum celtique146, dont les éléments défensifs seront décrits pour la première fois en 1911147. En 1977 et 1978, elle fera l’objet de reconnaissances aériennes par A. Braguier et G. Boisbouvier, puis par C. Lambert et J. Rioufreyt, avant d’être intégrée comme une enceinte de La Tène finale par J. P. Bouvet dans son mémoire de Maîtrise148. J.-C. Meuret dresse le premier plan du site149, qui sera précisé à l’issue d’une prospection pédestre150.
98De fait, l’éperon de “Saint Julien”, naturellement protégé au nord et à l’est par des abrupts de 40 m de haut, est fermé à l’ouest par un système de double fossé/talus se développant sur environ 600 m de long. Actuellement, les talus sont peu élevés, atteignant 0,80 m à 1,50 m de haut, les fossés montrant une ouverture de 6,60 m à 9 m de large. Des murs se développant le long du fossé interne ont pu être identifiés en prospection. De plus, il semblerait que le quatrième côté (méridional) ait été, lui aussi, défendu par un ensemble talus/fossé, qui limitait la surface interne à 25 ha et dont il ne reste qu’un faible talus duquel émerge de gros blocs de grès (fig. 7). Au nord, le plateau trop géométrique pour être naturel a sans doute été aménagé en terrasse. Sur ce côté a été identifié un aménagement en creux, ouvert sur l’Oudon et remontant vers le haut du plateau. Il pourrait s’agir d’un accès, d’un ancien chemin creux qu’aucun élément ne permet de dater.
Fig. 7. Vue (sans échelle) du sud d’une portion du talus méridional du promontoire de “Saint-Julien” à Châtelais en Maine-et-Loire (Cl. J. Remy, 2013).

99Effectivement, les indices d’une présence gauloise à l’intérieur de la fortification se limitent à des meules et des monnaies gauloises découvertes en 1855 et conservées au Musée d’Angers. Si la topographie et la superficie, déjà conséquente, peuvent évoquer un site fortifié du second âge du Fer, aucune opération archéologique n’est venue confirmer l’attribution de cette fortification.
Annexe 8 : Les sites fortifiés des Namnètes
Le site du Pouliguen (44)
100La pointe de “Penchâteau” est située au débouché de la Loire, à une quinzaine de kilomètres au nord de l’estuaire. L’éperon rocheux, qui s’avance dans l’océan Atlantique, limite l’ouest de la Baie du Pouliguen (44). Quatre systèmes de talus/fossé limitent l’espace à 7 ha au minimum. Ces lignes de barrage, irrégulièrement conservées, ont été remarquées dès le xixe siècle par un médecin nantais, J. Foulon, qui en dresse une description, qui sera reprise, à sa suite, par d’autres érudits151. C’est l’un des rares sites fortifiés des Pays de la Loire, avec Vue, que Sir M. Wheeler visite. Il le place parmi les oppida celtiques152, mais son ouvrage est ignoré des écrivains locaux qui désignent longtemps “Penchâteau” comme un camp gallo-romain.
101Dès 1966, mais surtout à partir de la seconde moitié de la décennie suivante, deux archéologues bénévoles, M. et M.-H. Rouzeau, effectuent une surveillance des travaux mis en œuvre sur la pointe (parking, assainissement...). Ce qui les conduit à réaliser des opérations de sauvetage et quelques sondages complémentaires de faible ampleur (32 m² au total) à l’intérieur du camp, entre 1977 et 1982. L’inscription sur l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques, en 1979, permet le gel de la plupart des terrains situés au niveau du rempart et à l’intérieur du camp protohistorique, qui deviennent inconstructibles. Cette protection a été nécessaire pour stopper l’aménagement de la pointe, d’autant plus que le site avait déjà subi des dommages avec la construction d’un blockhaus durant la seconde Guerre Mondiale. Ainsi, en 1987 de nouveaux sondages de sauvetage sont entrepris par C. Soyer, à l’intérieur du site où est identifiée une couche d’occupation en place, associée à des structures organisées (notamment des trous d’ancrage de poteaux). Deux phases semblent se distinguer, la première étant attribuée à la transition entre le premier et le second âge du Fer, la seconde à une phase récente de La Tène sans plus de précision153. L’occupation est confirmée en 1991, lors d’un diagnostic dirigé par L. Laporte (AFAN). À cette occasion, une surface de plus de 3 ha, représentant les seules zones encore vierges d’aménagement urbain, est évaluée. Malheureusement, l’intervention ne suffit pas à affiner la datation des vestiges interceptés à l’intérieur du site154.
102La datation du système de barrage est plus complexe. Effectivement, les cinq lignes défensives correspondent visiblement à des états successifs de fortifications, s’échelonnant du premier âge du Fer à l’époque médiévale, voire moderne. Ainsi, les deux lignes les plus internes ont été attribuées au plus tard à une phase ancienne de La Tène, avec une probable phase au Hallstatt ancien155. Les deux suivantes, qui ont été mal datées, pourraient être plus tardives (La Tène moyenne ou finale ?), avec un dernier état de la troisième ligne caractérisée par un talus massif de terre atteignant 40 m de large au sol156. Le fossé qui lui est associé n’est définitivement comblé qu’à l’époque médiévale, voire plus tard. La ligne la plus externe n’a pas été sondée et n’est donc pas datée.
Annexe 9 : Les autres sites fortifiés : chez les Ambiliates ?
Le site de Vue (44)
103Au nord du Pays de Retz, la commune de Vue est implantée à la limite sud de l’estuaire de la Loire sur une île, constituée d’un double promontoire peu élevé (entre 10 m et 14 m NGF). L’île est ceinturée de marais situés à 2 m NGF, qu’on estime avoir été plus humides durant l’âge du Fer157 (fig. 8). Cette zone marécageuse est irriguée par la rivière de l’Acheneau (émissaire du lac de Grandlieu) qui vient se jeter dans la Loire. Des découvertes provenant de la rivière, notamment une monnaie gauloise et de la céramique protohistorique, constituent les témoins d’une occupation gauloise des bords de l’Acheneau et certainement de l’usage de la rivière comme voie de communication à cette période158. Ce site est reconnu dès 1932 comme l’oppidum des Namnètes, à la suite de découvertes importantes réalisées dans la seconde moitié du xixe siècle159. En effet, après 1868, M. Jaguelin, notaire à Vue, met au jour dans sa propriété un agencement de blocs de pierre associés à des “poutrelles entrecroisées et de longues fiches en fer”160. Aucun plan n’est dressé et les descriptions d’érudits, non contemporaines des découvertes, ne précisent pas l’emplacement exact de cet ouvrage alors interprété comme un murus gallicus à l’image de ceux décrits par César. Seules quelques fiches en fer semblent avoir été préservées et déposées au musée archéologique de Nantes161. Aussi, L. Maître indique qu’un fossé de “10 mètres d’ouverture et 3 mètres de fond plat, creusé en avant de la muraille”, aurait livré des morceaux d’amphores162. Mais l’auteur n’est pas assez précis et ne nous apprend pas si la fortification a été découverte au même emplacement. Par la suite, les chercheurs reprennent les informations synthétisées par L. Maître 163et P. de Lisle du Dreneuc164. Cependant, seul L. Maître mentionne la découverte d’un fossé lors de la construction de “la maison de la Poste”165.
Fig. 8. Cl. aérien de l’île de Vue en hiver (en direction de l’est), cernée par ses marais inondés (Cl. transmis en 2011 par monsieur P. Mussat, qui était alors médecin généraliste à Vue.).

104Dans le cadre d’une prospection thématique, l’examen des matrices des propriétés foncières conservées aux archives départementales permet à S. Étienne (AFAN) de localiser, en 1997, la parcelle où le rempart fut découvert au xixe siècle166. En 2011, les sondages manuels programmés, réalisés dans le cadre d’un mémoire de master 1 (J. Remy, dir. M. Monteil, Université de Rennes 2), ne suffisent pas à intercepter le tracé de la fortification. Cependant une occupation de La Tène finale (La Tène D1 voire La Tène D2), mais aussi de la transition entre La Tène moyenne et finale y est mise en évidence167. L’année suivante un diagnostic préventif confirme l’occupation de La Tène finale168 et justifie une fouille préventive, opérée par l’INRAP en 2014 sur près de 4 ha (dir. G. Guillier).
105Cette intervention valide les observations du xixe siècle qui mentionnaient l’existence d’un rempart et d’une douve. En effet, deux enceintes limitent l’accès à l’est de l’île. La première correspond à un rempart à poutrage horizontal dont le tracé total n’est pas connu, mais dont on peut supposer qu’elle clôt une surface de 12 ha (cf. fig. 52, SA 147). Cet aménagement est doublé d’un fossé extérieur peu profond, de 10 m de large. Le barrage extérieur, qui semble limiter 25 ha, correspond à un fossé qui se développe sur 7 m à 11 m de large. La portion reconnue atteint 1,50/1,60 m de profondeur. Il est doublé à l’intérieur d’un autre fossé – de 2,50 m de large pour 0,90 m de profondeur – distant d’environ 5 m. Une palissade, ancrée 6 m en arrière, complète le dispositif. Les deux systèmes de fortifications sont datés de La Tène finale. L’antériorité de l’enceinte intérieure sur l’enceinte extérieure est supposée mais cela n’a pu être démontrée par la fouille.
106À l’intérieur de l’enceinte de 12 ha deux secteurs ont pu être individualisés dans l’emprise de la fouille. Le premier, à quelques mètres de distance du rempart, a livré une série de vingt-et-un bâtiments élevés sur quatre poteaux porteurs (pas nécessairement tous contemporains), interprétés comme des greniers. Ils s’organisent globalement en deux rangées, selon un même axe, libérant un espace de circulation central.
107Le deuxième secteur est séparé du premier par un espace peu bâti (possible cour ?), occupé par seulement deux ou trois bâtiments de 5 m² à 13 m² 169.
108Un peu plus à l’ouest, quatre autres constructions s’organisent visiblement autour d’un espace vide carré d’environ 40 m de côté (place ?). La principale construction, de 67 m² de superficie, qui limite cet espace à l’est, correspond soit à une habitation soit à un bâtiment à usage collectif. La rareté du mobilier n’a pas facilité l’interprétation de ce bâtiment. Il est accompagné d’un grenier, d’une structure de stockage massif et d’un autre bâtiment (de 24 à 64 m² de superficie) dont la fonction n’a pas été déterminée : atelier, annexe, grange, habitat, etc.170 ? Au centre de l’espace libre de constructions, deux imposants trous d’ancrage de poteaux pourraient avoir soutenu un possible système de portique dont l’utilisation n’est pas connue.
109Au sud de l’île fortifiée (enceinte de 12 ha), d’anciennes carrières – dont un état est contemporain de la construction du rempart – ont servi de dépotoir (déchets domestiques et artisanaux), livrant entre autres plus de 300 fragments de moules à alvéoles qui signalent la présence d’une activité métallurgique de l’or, de l’argent, ou du bronze171. Aussi, une probable carrière a été repérée lors du diagnostic, près du sommet du promontoire juste derrière le large fossé de barrage172. Un dernier bâtiment isolé est reconnu au sud-ouest de l’emprise de la fouille préventive. Enfin, ces vestiges sont datés de La Tène finale (La Tène D1 et La Tène D2), les éléments les plus anciens étant attribués à la transition avec La Tène moyenne. À l’extérieur des enceintes, aucun vestige du second âge du Fer n’a été appréhendé, indiquant que les fortifications constituent une véritable limite physique à l’installation des populations gauloises.
Le site du Fief-Sauvin (49)
110Nota bene : Depuis 2015, cette commune a fusionné avec d’autres pour devenir celle de Montrevault-sur-Èvre.
111“Le Camp de César” au Fief-Sauvin est situé sur le plateau des Mauges, à 74 m d’altitude. Il constitue l’un des nombreux promontoires qui s’élèvent au-dessus de la vallée sinueuse de l’Èvre, affluent de la Loire. Le site est installé au niveau d’un coude formé par la rivière, près du lieu-dit de “la Ségourie”. Celle-ci protège le flanc nord du promontoire qui s’incline assez brutalement vers le sud jusqu’au ruisseau de La Planche. L’éperon est défendu à l’ouest par un profond ravin naturel et fermé sur son dernier côté par un important talus de 145 m de long, qui se courbe légèrement pour épouser l’angle nord-ouest. La fortification couvre une superficie de 2,5 ha.
112Les premières recherches effectuées sur “la Ségourie”, qui remontent au xixe siècle, sont assez abondantes et s’intéressent essentiellement à l’identification de l’antique station de Segora mentionnée sur la carte de Peutinger. Tout au long des xixe et xxe siècles, le site fortifié et ses alentours font l’objet de nombreuses visites173, mais également de descriptions. Celles-ci précisent les dimensions du rempart, qui s’élève encore, à cette époque, à 5,50 m de haut et s’étend sur 21 m de large à sa base174. Un habitant de Montrevault (T. Martin) entreprend diverses prospections, collectant un abondant mobilier qui le conduit à présenter plusieurs inventaires à la société archéologique de Nantes, dès 1848175. En 1862, il fait don au Musée de l’Oratoire de Nantes de vestiges datés de l’époque romaine, dont une pointe de lance et peut-être une pointe de flèche176.
113En 1870 ou 1871, C. Leboeuf, commissaire de police à Beaupréau, fouille le sommet du rempart, dégageant des murs en pierres sèches entre lesquels il recueille de longues fiches en fer de 30 cm de long, disposées à environ 60 cm les unes des autres. 90 exemplaires sont ramassés, dont une partie est exposée au Congrès archéologique de France, à Angers en juin de la même année177. Puis C. Port réalise les premières fouilles à l’intérieur de l’enceinte dont on ne sait rien si ce n’est qu’il ne retrouve pas la trace des restes de murs dégagés cinq ans plus tôt, ni des fiches en fer que l’on venait pourtant recueillir depuis des années sur le rempart178.
114Ajoutons aux indigentes informations liées à l’architecture de ce rempart, la présence d’un muret en pierres sèches à la base du talus sur le flanc extérieur, qui est mis en évidence sur plus de 2 m de long lors d’une visite en 2010 (fig. 9). Précisons que la topographie actuelle et les photographies aériennes n’informent pas de l’existence d’un éventuel fossé à l’avant du rempart. L’accès au site se fait actuellement par une interruption du talus en limite du plateau à l’est, correspondant sans doute à un aménagement primitif.
Fig. 9. Vue du S-E du mur situé à la base du talus qui barre le promontoire du “Camp de César” au Fief-Sauvin (Cl. J. Remy, 2010).

115Les recherches et les opérations de terrain menées dans le courant du xxe siècle concernent essentiellement les vestiges de l’époque romaine identifiés à l’extérieur du camp, notamment ceux liés à la voirie 179et au temple à cella et galerie périphérique de “La Vieille Vigne”, exploré entre 1977 et 1978. Rappelons que depuis 1976 et jusqu’en 2006, la fortification sera régulièrement documentée par de nombreuses campagnes de prospections aériennes (C. Lambert et J. Rioufreyt, puis par A. Braguier, G. Boisbouvier et G. Leroux). En 1973, une carte est dressée à partir de l’observation des photographies aériennes de l’IGN, à laquelle est ajouté l’ensemble des découvertes réalisées autour de la fortification aux xixe et xxe siècles180. Par la suite, ce plan sera précisé par J.-P. Bouvet d’après les clichés issus des différentes prospections (cf. fig. 90, p. 160, SA 147). Ces campagnes de survols ne livrent aucun indice d’une occupation à l’intérieur de l’enceinte, mis à part trois fibules de type pseudo-La Tène II découvertes à l’occasion des fouilles du xixe siècle. Le mobilier de l’âge du Fer connu ne provient que des alentours du camp.
116Finalement, l’attribution de ce site à La Tène finale, repose sur la présence des fiches en fer dans la construction du rempart et des points de comparaison possibles avec celles issues d’autres oppida du nord de la Gaule. En effet, une partie des fiches ramassées au xixe siècle semblent être parvenues au musée Dobrée de Nantes et mélangées à celles provenant de Vue (44). Seize de ces fiches sont aujourd’hui conservées et ont pu être examinées181.
117Remarquons toutefois que l’on a affaire à un site de hauteur, équipé d’un rempart susceptible d’avoir connu plusieurs états de construction au vu de sa morphologie – la présence des fiches en fer suppose une construction de type murus gallicus, tandis que l’imposante élévation rappelle davantage les talus massifs de la fin de La Tène –, mais qui n’a livré aucun indice d’occupation interne. Néanmoins, la densité des vestiges de l’âge du Fer, repérés par prospections aériennes au-delà du rempart, mais également l’abondant mobilier de La Tène finale récolté sur le plateau, sont autant d’arguments qui concourent à attribuer la fortification à la fin de l’âge du Fer (cf. infra p. 73).
Le site de Bouguenais (44)
118Au sud de la Loire, un troisième site de hauteur fortifié peut être évoqué. Il s’agit de l’éperon barré de “La Sangle” à Bouguenais (44), installé en fond d’estuaire, qui domine le cours du fleuve d’environ 30 m de haut. Suite à la réalisation d’un sondage programmé en 2011, l’origine du talus qui barre une surface de 6 ha est supposée remonter à la fin de l’âge du Fer. En effet, quelques tessons (très fragmentés) de factures laténiennes sont recueillis dans le comblement du fossé associé au talus. En 2013, quelques fragments d’amphore gréco-italique sont découverts lors d’une campagne de prospection182. Cependant, la poursuite des opérations sur le promontoire (en 2014, puis en 2015) n’a pas validé l’hypothèse d’un site fortifié de La Tène finale. De fait, la fouille programmée engagée sur le rempart, depuis 2014 (dir. J. Remy), a révélé un état, vraisemblablement daté du Hallstatt final, détruit par incendie (fig. 10 et 11). Quelques indices d’aménagements postérieurs à cet état ont été perçus sur l’une des fenêtres d’explorations, mais aucun élément mobilier ne permet de les attribuer au second âge du Fer, sachant que le promontoire est réinvesti à l’époque romaine (au moins durant le Haut-Empire), puis au Moyen Âge (haut Moyen Âge). En 2014, des tranchées d’évaluations ouvertes à l’intérieur du site ont complété l’intervention sur la fortification (dir. J. Remy). Celles-ci ont principalement livré des indices d’une occupation domestique du Hallstatt moyen/final, néanmoins, quelques tessons laténiens ont été recueillis dans le comblement de deux petits fossés parcellaires183. Bien qu’ils ne soient pas mêlés à d’autres éléments antiques ou hallstattiens, la faiblesse du corpus invite à la prudence quant à la caractérisation de l’occupation laténienne184.
Fig. 10. Vue de l’est du sommet du talus de “La Sangle” à Bouguenais, après le décapage d’une portion au sud de son tracé (Cl. J. Remy, 2014).
Fig. 11. Vue d’une architecture en bois carbonisée apparue au niveau de la façade interne du rempart de Bouguenais (Cl. J. Remy, 2015).

119En 2015, une opération programmée est menée en parallèle de celle conduite sur le rempart (dir. M. Routhiau), avec pour objectif de dater un tertre, implanté en bout d’éperon, dont on présume l’édification à l’époque médiévale. À cette occasion, le fossé attenant au tertre, qui barre l’extrémité occidentale du promontoire, fait l’objet d’un sondage transversal de 20 m de long. Celui-ci s’est appuyé sur le bord oriental du fossé creusé dans le rocher naturel (gneiss), affleurant à cet endroit. L’aménagement présente un fond horizontal très irrégulier taillé dans le gneiss sur environ 3 m de profondeur. Les dépressions dans le sol géologique ont piégé un limon-argileux contenant des charbons, dont un échantillon analysé par 14C fournit une date entre 370 et 180 a.C.185 186. La couche qui recouvre le sol naturel révèle une quarantaine de tessons, datés de La Tène finale, associés à quelques fragments d’amphores italiques. Ce lot homogène indique clairement un comblement non perturbé de la fin du second âge du Fer. Le fond du présumé fossé a été dégagé sur près de 9 m de long sans qu’aucun retour n’ait pu être observé. De telles proportions pour les fossés de l’âge du Fer sont généralement réservées aux grands sites fortifiés et associées à des remparts massifs de type Fécamp187. Ainsi, les exemples connus en Europe correspondent principalement à des enceintes de 20 ha à 50 ha de superficie en moyenne, à l’exemple de l’oppidum de Châteaumeillant dans le Cher qui couvre une surface de 24 ha188 189. Seul un exemple de moins de 10 ha, Maimont dans les Vosges du Nord (4 ha), présente un fossé d’une telle ampleur (environ 12 m de large). Toutefois, si l’on tient compte de la surface que l’excavation de Bouguenais est supposée limiter, c’est-à-dire environ 1 ha, alors ces constats encouragent à nuancer l’hypothèse d’un grand fossé de l’âge du Fer, creusé à l’extrémité de l’éperon. Par ailleurs, l’idée d’un système d’accès à la plaine alluviale de la Loire peut être avancée. Effectivement, l’aménagement présente une nette inclinaison vers le sud-ouest qui débouche dans une anse protégée par les promontoires alentour. Néanmoins, il s’agit là de simples conjectures qui ne pourront être examinées qu’à la lumière d’une extension du sondage.
120Finalement, une occupation de l’éperon de “La Sangle” à La Tène finale est aujourd’hui assurée et justifie qu’il soit présenté ici. Néanmoins sa nature et son lien avec le rempart restent à déterminer. Pour l’heure, nous pouvons envisager une occupation plus circonscrite, peut-être limitée à la partie haute du promontoire dont nous ne percevons actuellement que la périphérie. Pour ces raisons, il n’est pas compté dans le corpus des 31 sites fortifiés de La Tène moyenne et finale.
Les habitats groupés ouverts
Les habitats groupés certains
Annexe 10 : Trégueux (Coriosolites)
121L’habitat groupé de “La Porte Allain” à Trégueux (22) est situé à l’extrémité nord-ouest du territoire coriosolite, implanté au sommet d’un plateau (entre 130 m et 140 m NGF), qui descend en pentes douces en direction de l’est et du nord pour rejoindre la baie de Saint-Brieuc. L’habitat s’appuie sur le bord sud du promontoire, marqué par un abrupt qui débouche sur la vallée de l’Urne. La rivière poursuit son cours sur environ 4 km avant de venir se jeter dans l’anse d’Yffigniac. La position dominante du site offre ainsi une large visibilité sur les environs.
122Entre 2009 et 2010, la fouille préventive qui a été menée – pendant un an – en prévision de la construction de la rocade d’agglomération briochine (dir. T. Allen, Oxford Archéologie), a permis d’appréhender l’habitat. La lecture de l’ensemble, facilitée par une fenêtre d’étude de 7,5 ha et une emprise linéaire se développant généralement sur 75 m à 150 m de large, a révélé trois ensembles datés de la fin de La Tène moyenne à la fin de La Tène finale (cf. fig. 82, SA 147). D’ouest en est ont été reconnus un imposant enclos quadrangulaire de plus de 0,8 ha, d’orientation nord-nord-ouest/sud-sud-est, puis, à environ 80 m de distance, un vaste bâtiment sur cour, dont l’orientation diffère légèrement (nord-ouest/sud-est). Ils sont tous deux implantés sur le point culminant du promontoire (environ 140 m NGF). Enfin, les vestiges de l’habitat groupé, à proprement parlé, se développent à 200 m de l’édifice sur cour. Voyons comment chacun de ces ensembles s’organise.
Premier ensemble : l’enclos quadrangulaire
123Premièrement, l’enclos, qui n’a pas été intégralement décapé (4500 m² fouillés), est aménagé par des côtés de 88 m à 99 m de long. Il est constitué d’un talus, associé à un fossé externe. Le talus, composé des matériaux provenant du creusement du fossé (11 m de large, 4,50/5,50 m de hauteur estimée) était encore conservé en élévation sur 30 m de long au moment de la fouille (sur 1,3 m de haut). Une porte a été reconnue au sud-est de l’enceinte. Elle est matérialisée par un rehaussement du fond du fossé – 3,60 m de profondeur – dont le creusement est beaucoup plus accentué sur cette façade (jusqu’à 5,40 m). À ce niveau, des creusements dans la paroi interne du fossé suggèrent l’existence d’un aménagement en bois pour l’accès piétonnier de 1 m à 2 m de large (pont ?). Le volume occupé par le système d’enceinte, à l’aspect défensif indéniable, limite l’espace interne à 2250 m². Signalons que les comblements des fossés de l’enceinte ont livré, près de l’entrée, de la céramique, des restes d’amphores, ainsi qu’une lingotière. De plus, dans la section de fossé située au niveau de la porte, un crâne humain et de nombreux fragments d’amphores ont été recueillis. La présence d’objets en bois conservés dans ce fossé – planches, rondins, branches, chevilles, un élément sculpté en chêne brûlé – ont été datés par radiocarbone et dendrochronologie. Les résultats permettent de situer la construction de l’enceinte à la fin du iiie s. a.C., soit à La Tène C1190.
124Trois bâtiments carrés sur sablières basses – respectivement d’environ 10 m, de 7 m et de 12 m de côté –, sont aménagés à l’intérieur de celle-ci, alignés le long de la façade nord-ouest, face à l’entrée191. Leurs orientations apparaissent toutes, à peu près, similaires (fig. 12). Le bâtiment central est associé à trois paires de trous d’ancrage de poteau disposés devant celui-ci, qui pourraient correspondre à un accès aménagé. L’intérieur des bâtiments n’a livré que peu de traces d’occupations : quelques fosses et trous d’ancrage de poteaux, dont les fonctions n’ont pu être définies. Des tronçons de rigoles repérés dans l’angle est et sur le côté sud de l’enceinte ont été interprétés comme les empreintes de deux autres petits bâtiments. À l’intérieur de l’enceinte des structures en creux (trous d’ancrage de poteau ou fosses) ont été mises en évidence mais aucun plan de bâtiment n’a véritablement pu être restitué.
Fig. 12. Plan de l’enceinte fortifiée de Trégueux (réal. J. Remy, d’après Allen et al. 2012, vol. 2, fig. 2.1.1.).

125À l’intérieur de l’enceinte, il faut également signaler la découverte d’un puits, creusé au plus tard au début de la construction de l’enceinte (iiie s. a.C.) – d’après l’analyse dendrochronologique effectuée sur les restes d’un seau – et comblé durant La Tène D, voire dès La Tène C2192. Le comblement présente une séquence riche en charbons, en amphores et en ossements brûlés, correspondant essentiellement à du porc. Un second puits, localisé dans l’enclos central de l’enceinte, est resté ouvert sur une courte durée et n’a livré que peu de mobilier. Il est encadré par quatre imposants trous d’ancrage de poteau qui ne semblent pas être liés à sa construction, mais plutôt à son fonctionnement. Du fait que celui-ci n’ait pas atteint la nappe phréatique malgré les efforts fournis pour son creusement (14 m de profondeur), deux hypothèses quant à sa fonction ont été formulées193. La première propose de l’associer à une activité cultuelle, tandis que la seconde suppose qu’il s’agisse d’un aménagement avorté. L’absence de mobilier dans son comblement tend à réfuter la première hypothèse. Cependant, l’arrêt du creusement au-dessus du niveau de la nappe phréatique semble bien volontaire puisqu’elle a été atteinte pour l’autre puits à une côte plus basse. Quelques fragments d’objets en fer mal identifiés, parmi lesquels un fragment de fibule, ne permettent pas non plus de trancher quant à la fonction de cet aménagement.
Quelle interprétation pour cette enceinte ?
126Finalement, cette enceinte, située à l’ouest d’un habitat groupé de La Tène finale, est constituée de fossés atteignant, près de l’entrée, des profondeurs record pour le nord-ouest de la Gaule, lui conférant un caractère défensif sinon ostentatoire. Il est interprété par certains comme une résidence de l’aristocratie194 195. En tout cas, l’ampleur de l’enceinte couplée à la présence de certains éléments mobiliers découverts dans les comblements des fossés, mais également à une surface interne relativement réduite (0,22 ha) renseignent sur un espace qui se démarque de manière évidente du reste de l’occupation. En effet, deux fragments d’une lingotière ayant servi à fondre un alliage ternaire (or, argent, cuivre), découvert dans les fossés d’enceinte, atteste d’une activité métallurgique remarquable196. Ajoutons la découverte d’un fragment de crâne humain et d’une tête de cheval tranchée recueillis parmi d’autres restes de faunes dans le comblement des mêmes fossés197. Les fragments d’amphores apparaissent en plus grand nombre que sur le reste du site de Trégueux (habitat groupé) – la plupart provenant du fossé d’enclos, soit 515 tessons198 –, sachant que pour les autres secteurs, certains exemplaires ont été réutilisés pour le stockage – ils n’ont donc pas nécessairement servis à la consommation de vin. De plus, l’un des puits, abandonné tôt dans La Tène finale, a livré des restes interprétés comme les rejets d’un banquet – c’est-à-dire une association d’amphores et d’os de porc brûlés dont on notera la quasi-absence de céramique.
127Il faut préciser que l’édification de l’enceinte précède visiblement l’implantation de l’habitat à l’est, mais son utilisation perdure durant toute La Tène finale. Cet espace n’a pas été construit sur un terrain vierge puisqu’une occupation du premier âge du Fer, dont la nature est mal cernée, a été identifiée. Celle-ci est matérialisée par un paléosol piégé sous le tronçon conservé du talus de l’enceinte, par la présence de céramiques éparses dans l’enceinte et immédiatement à l’est, par des trous d’ancrage de poteaux et des fosses localisées environ 70 m plus à l’ouest, mais également par plusieurs autres structures fossoyées localisées au sein de l’enceinte. Enfin, notons qu’un espace vide autour de cette enceinte semble avoir été respecté puisqu’aucune structure de La Tène finale n’a été reconnue à 100 m vers l’ouest et à 80 m vers l’est.
128Enfin, à l’époque augustéenne, l’entrée de l’enceinte est remplacée par une chaussée empierrée, faisant perdre à l’enclos ses capacités défensives. L’occupation prend clairement un caractère domestique avec une vocation probablement agricole.
Deuxième ensemble : le bâtiment sur cour
129À environ 80 m plus à l’est, la fouille a mis en évidence un “bâtiment sur cour”, daté de La Tène finale, d’une surface interne de 625 m². Il est protégé d’un fossé, qui dessine deux entrées à ailes rentrantes, l’une à l’est (de 9 m de large) et l’autre à l’ouest (6 m). À l’extérieur, une rangée de poteaux, parallèle au fossé, signale la présence d’une palissade. La mise en évidence de trous d’ancrage de poteaux et de tranchées, face aux entrées, matérialisent certainement l’emplacement de portes. L’ensemble de la construction atteint alors près de 2500 m² de superficie au total. Le bâtiment est caractérisé par quatre ailes, constituées chacune de trois rangées de poteaux définissant deux nefs. Elles délimitent une cour de 25 m de côté, au centre de laquelle se trouve une structure sur poteaux (probable bâtiment). Le plan de celle-ci est difficilement interprétable du fait qu’elle est en partie traversée par un fossé plus récent.
130L’architecture du bâtiment – doubles poteaux dans les angles internes, trois rangées formant des travées d’environ 5 m de large – évoque les plans de deux édifices publics de l’oppidum de Corent, que sont la place de marché – dont la galerie atteint environ 36 m de côté, ce qui est quasiment équivalent aux côtés de l’édifice de Trégueux –, ou le second état du sanctuaire (cf. fig. 86, SA 147). Cette architecture, tout à fait particulière, présente aussi de fortes similitudes avec un édifice en cours de fouille sur l’oppidum de Bibracte, daté de la seconde moitié du ier s. a.C. L’interprétation actuellement privilégiée pour ce dernier ensemble est celle d’une zone de marché, bien que peu de mobilier en ait été exhumé199. Si la fonction de marché peut être proposée à Trégueux, la rareté du mobilier mis au jour à l’intérieur de cet espace (mis à part des restes de céramiques et d’amphores) permet de douter quant à cette interprétation fonctionnelle. Enfin, le plan du bâtiment de Trégueux peut également être rapproché d’un édifice de près de 3000 m² mis au jour à Thézy-Glimont dans la Somme, dont l’architecture apparaît toutefois moins rigoureuse. Il est caractérisé par un enclos quadrangulaire à double entrée, intégrant une galerie quadriportique. À la différence de l’édifice de Trégueux, il a livré plus de 600 fragments d’armements et s’inscrit dans un vaste espace rituel de La Tène moyenne. Il est en effet localisé à quelques mètres d’un ensemble de silos et de fosses quadrangulaires dans lesquels ont été déposés des restes humains ou d’animaux. D’après les prospections aériennes effectuées autour du site, cet espace constituerait “l’aire rituelle d’un habitat groupé nettement plus vaste”, estimé à une vingtaine d’hectares200. Là encore, le mobilier recueilli à Trégueux ne permet pas de telles interprétations. Toutefois, on notera deux points communs à l’ensemble des édifices qui viennent d’être évoqués, d’une part la monumentalité des architectures et d’autre part la place qu’ils occupent au sein d’une agglomération du second âge du Fer, qu’elle soit fortifiée ou non.
131Finalement, l’architecture du bâtiment coriosolite et ses dimensions suggèrent, pour le moins, une vocation publique et pourquoi pas un lieu de rassemblement ?
Troisième ensemble : l’habitat groupé
132Les vestiges de l’habitat groupé de La Tène finale ont été identifiés 200 m plus à l’est de cet édifice (cf. fig. 83, SA 147). Celui-ci est susceptible de s’être développé progressivement autour d’un noyau originel, les constructions n’ayant probablement pas suivi une planification prédéfinie. En effet, l’inégale densité des structures suggère que l’occupation prend son origine dans un secteur (centre-nord de la zone décapée) qui se densifie avant de s’étendre en périphérie. De plus, le système fossoyé qui semble délimiter des espaces et organiser l’habitat, suit une évolution morphologique. Dans un premier temps, on observe des agencements rectangulaires ou linéaires d’assez nombreux petits fossés, par la suite, ils deviennent plus conséquents et de forme légèrement curviligne, puis ils sont remplacés par quelques larges et profonds fossés d’orientation nord/sud. Enfin, un dernier état laténien est caractérisé par des fossés linéaires formant des enclos sur la majorité du site. Pour résumer, l’habitat se développe, vers la fin du iiie siècle ou le début du iie s. a.C. (d’après des datations radiocarbones et quelques restes de céramiques), certainement d’abord sous la forme d’une occupation ouverte et dispersée, dont le secteur le plus dense est structuré par quelques fossés rectilignes201. Puis progressivement dans le courant de La Tène finale ce système fossoyé prend la forme d’espaces enclos plus vastes. À l’intérieur de ce réseau, un nuage de trous d’ancrage de poteaux et de fosses a pu être appréhendé, parmi eux 143 bâtiments ont été identifiés, incluant des greniers (au moins sept et peut-être jusqu’à trente-deux) et des habitations. Le recoupement des structures signale au moins deux phases d’activités, qui sont malheureusement mal définies et mal situées dans La Tène finale.
133La présence de six puits sur la zone fouillée, correspondant à environ 1,7 ha de l’occupation, suggère qu’ils alimentaient des “quartiers” ou secteurs de l’habitat leur conférant une certaine autonomie.
134L’activité de cet habitat aggloméré (du moins la partie appréhendée par la fouille) est principalement tournée vers l’agriculture. En effet, les traces d’artisanats sont rares. Des débris de métallurgie du fer ont été recueillis un peu partout sur l’emprise de fouille mais aucun atelier n’a clairement pu être identifié, bien que l’existence d’une forge soit supposée par la mise au jour de battitures202. Les importants lots de bracelets en verre et en lignite, dont la majorité est issue d’un secteur bien localisé, suggèrent la présence d’ateliers, à moins qu’il ne s’agisse de l’emplacement d’un habitat aisé.
135À propos du lignite, rappelons que la matière première provient du Dorset en Bretagne insulaire, ce qui atteste d’échanges maritimes et d’un commerce à longue distance avec cette région. De plus, certains bracelets en lignite sont en partie non polis supposant l’importation du produit à l’état d’objets semi-finis et surtout de l’existence d’un atelier de transformation du lignite.
136Notons également que des témoins d’une activité de saunerie (augets et plusieurs piédestaux) supposent la construction de fours à sel dans les environs. Ces éléments ne suffisent malheureusement pas pour évaluer l’intensité de cette activité. Des meules et des fusaïoles renvoient davantage à des travaux domestiques (lié au textile et à l’alimentaire).
137Il est possible que l’habitat groupé s’étende sur au moins 1 km de part et d’autre d’une voie d’orientation est/ouest, dont une portion a été fouillée à l’ouest de l’enceinte fortifiée. En effet, la fouille a montré que l’origine d’un tronçon de voie proche de la route départementale 10 pouvait remonter à La Tène finale. De plus, on suppose que le prolongement de cette dernière suivait certainement le tracé d’une ancienne voie, probablement d’origine antique, se dirigeant vers le sud-ouest jusqu’à Paule dans les Côtes-d’Armor203. Ces éléments suggèrent que l’habitat de La Tène finale se développait au moins jusqu’en bord de cette voie, soit sur environ 200 m de large, du nord au sud. D’autre part, la fouille a permis d’observer cette agglomération sur un peu plus de 300 m de long, sachant que des traces d’occupation de la fin de l’âge du Fer ont été également perçues, lors du diagnostic, immédiatement à l’est de la zone décapée, au sud-est de la chapelle Sainte-Marie, prolongeant le site de 250 m204. Selon ces estimations, il est envisageable de proposer une surface de 11 ha, dans le cas où l’habitat n’outrepasserait pas la route départementale.
138Pour finir, on regrettera le manque de précision quant à la chronologie des différents ensembles mis en évidence autour de cet habitat groupé (enceinte et bâtiment “sur cour”) et quant à la détermination des phases d’occupations durant La Tène finale.
Annexe 11 : Quimper (Osismes)
139Le site de “Kergolvez”, localisé en limite nord-ouest de l’agglomération actuelle de Quimper (29), bénéficie d’une situation topographique privilégiée en fond de vallée, répartie de part et d’autre de la rivière du Steïr dont le lit a peu évolué depuis l’époque gauloise (cf. fig. 72, SA 147). En effet, selon les études géomorphologiques conduites dans le cadre de la fouille, la morphologie du territoire occupé à l’époque gauloise est à peu près similaire à celle d’aujourd’hui205.
140Malgré l’activité archéologique précoce de la région quimpéroise – un poste d’archéologue municipal est, en effet, créé dès 1983206 –, qui concerne principalement le sud et l’ouest de la ville, l’habitat groupé de “Kergolvez” n’a été découvert que récemment, à l’occasion d’un diagnostic conduit en 2003207. En a découlé une fouille préventive de huit mois, menée sur 2,8 ha, entre 2004 et 2005. La surface traitée correspond à une zone d’échantillonnage d’une agglomération laténienne atteignant à son apogée une extension maximale de 12 à 15 ha, d’après l’apport complémentaire d’un diagnostic conduit en 2006, à l’intérieur de la boucle du Steïr208.
141De manière générale, la nature des vestiges internes – sols anciens conservés et nombreuses fosses n’offrant que peu d’éléments de chronologie relative – n’a pas permis de les rattacher à des phases d’occupation précises, bien que des évolutions et restructurations aient été perçues. De fait, le phasage du site repose essentiellement sur les principaux aménagements structurants identifiés (axes de circulation, parcellaires).
L’évolution et l’organisation de l’habitat
142Ainsi, l’occupation se développe initialement, à la fin du iiie siècle ou au début du iie s. a.C., à l’intérieur de la boucle du méandre du Steïr, en rive droite (cf. fig. 84, SA 147). Dès l’origine, l’habitat s’organise autour d’un axe viaire provenant du plateau du Guengat qui s’étend au sud-ouest. La voie aboutit sur la rivière dont le franchissement est probablement assuré par un gué – des blocs repérés dans le lit de la rivière et dans l’alignement de la voie suggèrent l’existence d’un ancien passage. Les autres aménagements s’organisent, pour la plupart, perpendiculairement ou parallèlement à cet axe, mais seuls quelques fossés délimitent des secteurs dans la partie occidentale. Deux places, matérialisées par des espaces vides de constructions, sont réparties de part et d’autre de la voie. Leurs emplacements seront conservés tout au long du fonctionnement de cette agglomération. En supposant que durant ce premier état l’ensemble de la boucle du Steïr ait été investi, l’habitat groupé a pu alors s’étendre jusqu’à 5/6 ha. De petits fossés pourraient matérialiser une limite occidentale définie à cette période.
143Dans un second temps, probablement dans la seconde moitié du iie s. a.C., l’agglomération se densifie, le gué est abandonné et remplacé par un pont. La voie est alors réaménagée par une chaussée pavée. L’occupation et son réseau de communication se développent alors sur la rive opposée qui comprend la zone du lit majeur (déjà colmaté) et la terrasse alluviale. Une voie est implantée à la limite entre ces deux espaces, de part et d’autre de laquelle les structures s’organisent. À l’ouest, elle rejoint vraisemblablement le pont, tandis qu’on suppose qu’elle dessert un ou plusieurs axes, empruntant le talweg, le vallon ou suivant les bords du Steïr, au nord, au sud et à l’est209. Au cours de l’occupation, entre la fin du iie et le ier s. a.C., des réaménagements architecturaux – les sols des bâtiments sont rehaussés – témoignent d’adaptations à des inondations répétées.
144Durant une phase tardive de l’occupation, située certainement après le premier quart du ier s. a.C., le secteur principal de l’agglomération, en rive droite du Steïr, voit la mise en place d’imposants fossés rectilignes – de 2,50 m à 4,80 m de largeur pour 1,65 m à 2,40 m de profondeur –, associés à des talus (non conservés en élévation), qui viennent limiter l’habitat au nord et à l’ouest. Offrant deux ouvertures, l’une au nord (traversée par la voie principale) et l’autre à l’ouest, ce système de démarcation, loin d’être infranchissable, revêt davantage un rôle ostentatoire que défensif. D’ailleurs, l’agglomération ne semble pas circonscrite sur la rive orientale du Steïr. En revanche, un système d’enclos accolés moins densément occupés apparaît à mesure que l’on s’éloigne de la rivière, suggérant des activités agricoles périphériques.
145La fouille a montré que la plupart des aménagements de la rive occidentale s’organisaient selon des orientations perpendiculaires ou parallèles à la voie principale, s’adaptant parfois à la topographie du terrain. De l’autre côté de la rivière, les structures répondent également à un agencement orthogonal peut-être un peu moins rigoureux210. Le plan des vestiges témoigne donc d’un agencement rationnel de l’espace supposant l’intervention d’une autorité capable de décider de l’implantation et de la structuration des aménagements. À ce propos, précisons que la majorité des bâtiments identifiés par la fouille ont été interprétés comme des ateliers ou des aires de travail, ce qui peut éventuellement expliquer la relative faiblesse du lot de parures et d’objets précieux mis au jour.
146On notera d’ailleurs qu’il s’agit de l’une des rares agglomérations comprise dans notre zone d’étude à n’avoir livré aucune monnaie. Bien que l’emprise de fouille représente moins d’un quart de la surface totale estimée de l’agglomération, elle correspond également à la deuxième plus importante après celle de Trégueux (22). Ceci-dit, le site de “La porte Allain” (Trégueux) n’a livré que cinq monnaies dont quatre proviennent de prospections menées en dehors de la zone de fouille, ce qui tend à relativiser cet étonnant constat. L’habitat groupé supposé du “Clos des Primevères” à Entrammes (53), lui non plus n’a livré aucune monnaie. Cependant, le déplacement probable de la population vers l’enceinte du “Port du Salut” (sur la même commune) au cours du iie s. a.C. pourrait expliquer cette absence (cf. supra p. 26‑27). Dans le cas de “Kergolvez” (Quimper), celle-ci trouve peut-être une explication dans la fonction, mal définie, des monnaies osismes, qui connaissent une circulation exclusive à leur territoire211.
Quelles activités sur le site de “Kergolvez” à Quimper ?
147Parmi les activités de l’agglomération mises en évidence par la fouille, on compte la production de meules avec un échantillonnage de 113 individus prélevés, représentant une grande diversité morphologique. Elles correspondent d’ailleurs au plus important lot de meules pour la région Bretagne212. L’analyse de la matière première (principalement un même type de granit) nécessaire à cette production, qui perdure tout au long de l’existence de l’agglomération, suggère la présence d’une carrière principale pour l’approvisionnement213. Sa localisation, qui n’est actuellement pas connue, apporterait certainement des éléments de réponses concernant le rapport qu’elle entretenait avec l’agglomération. Fonctionnaient-elles indépendamment, ou la carrière était-elle dirigée par une autorité installée à “Kergolvez” ? Par ailleurs, l’étude des meules prélevées sur le site suggère une activité de minoterie dépassant le cadre domestique et relevant d’une “production plus collective et centralisée durant la période laténienne à Quimper”214.
148L’activité métallurgique, elle, est représentée par le travail du fer et dans une moindre mesure par celle du bronze. Concernant l’artisanat du fer, l’analyse des déchets a révélé une production variée et intensive d’objets finis à “Kergolvez”, en certains points comparable à celles reconnues sur d’autres agglomérations artisanales de Gaule215. La matière première était vraisemblablement importée déjà épurée (ou en partie épurée) et seules les dernières étapes de la transformation du métal ont pu être identifiées, à l’image de la soudure répondant à un savoir-faire complexe. Le travail du cuir, dont les témoins sont rares, pourrait avoir été pratiqué sur le site d’après l’identification probable d’un outil spécifique (une demi-lune)216.
149La vie économique de l’agglomération se mesure également par la découverte de nombreux restes de briquetage qui permettent d’envisager “Kergolvez” comme un centre de redistribution du sel à destination des campagnes alentours ou encore de production de salaison. En l’absence d’indices supplémentaires – ajoutons simplement un vase portant des stigmates caractéristiques –, il reste difficile de valider l’une ou l’autre de ces hypothèses (voire les deux). Enfin, l’étude des amphores provenant de “Kergolvez” démontre l’important rôle commercial de cette agglomération dans le circuit commercial de la péninsule bretonne217. Sans reprendre les détails de ce travail, précisons que le lot amphorique du site de Quimper (29) et le deuxième plus important de l’Ouest de la Gaule après celui de “Saint-Symphorien” à Paule (22), sachant que ce dernier a fait l’objet d’une fouille exhaustive (contrairement au premier).
150L’occupation de “Kergolvez” se poursuit jusque vers 30/25 a.C., après quoi le site est presque totalement déserté, seul un bâtiment subsiste alors que les terrains sont mis en culture. On notera toutefois que la voie principale d’origine gauloise fonctionne jusque dans la première moitié du iie siècle. L’agglomération secondaire, implantée au début du ier s. p.C., prend le relais trois kilomètres plus au sud, sur la rive gauche de l’Odet, au pied du Mont Frugy (cf. fig. 72, SA 147).
Annexe 12 : Les Alleuds (Andécaves)
151Nota bene : Depuis 2016, cette commune a fusionné avec d’autres pour devenir celle de Brissac Loire Aubance.
152Découvert fortuitement sur la commune des Alleuds (49) au cours de l’exploitation d’une gravière, entre 1957 et 1963, le site des “Pichelots” est établi à 10 km de la rive gauche de la Loire, sur la légère pente d’un plateau peu élevé (60/65 m NGF) au regard des thalwegs environnant. Il est limité dans sa partie occidentale par le ruisseau des Sablons, distant de 1 km des vestiges et par un vallon marécageux, situé à 100 m en direction de l’est (fig. 13).
Fig. 13. Localisation de l’emprise de fouille de l’habitat groupé des Pichelots aux Alleuds (49) sous fond orographique (réal. J. Remy).

153Historiquement, la première déclaration officielle de découverte n’est délivrée qu’en 1971 par le docteur angevin M. Gruet, qui se charge avec J. Siraudeau et B. Passini de surveiller l’avancement de la carrière. Entre 1973 et 1979, l’équipe met en place, chaque année, des fouilles de sauvetages ponctuelles afin de relever des vestiges de La Tène finale. L’importance du mobilier recueilli autorise rapidement à envisager la présence d’un habitat groupé de la fin de La Tène. Une occupation datée du Néolithique est également mise en évidence à cette époque. Puis entre 1980 et 1993, des décapages extensifs des niveaux superficiels sont réalisés préalablement aux travaux de carrières, avec l’aide de l’exploitant, offrant ainsi une meilleure appréhension du site. Plus tard, deux autres opérations viendront compléter ces interventions archéologiques. En 1997, une fouille de sauvetage, dirigée par le Service départemental d’Archéologie du Conseil général du Maine-et-Loire (D. Prigent et J.‑Y. Hunot), permet notamment de dégager un enclos de 1800 m² du ier s. a.C.218. Enfin, en 2002, la dernière opération, menée par J.-P. Bouvet et R. Simon-Millot (DRAC des Pays de la Loire), complète l’étude des “Pichelots”, site fouillé sur une surface totale de 2,5 ha.
L’organisation du site
154La carrière s’est visiblement développée sur la partie occidentale de l’habitat qu’une palissade, reconnue sur 210 m de long sous la forme d’un fossé, semble limiter. À l’intérieur de l’espace enclos, l’occupation est répartie en différents secteurs (cf. fig. 85, SA 147). En effet, une bande étroite d’environ 10 m de large, située le long de la palissade, au nord de l’emprise de fouille, a livré de nombreux foyers indiquant la présence d’activités domestiques et peut être d’un secteur voué à l’habitation. En parallèle, une seconde bande plus large (de plus de 30 m), rassemblait principalement des structures de stockage (des silos) et des puits. L’occupation s’étend plus au sud, au-delà de la palissade, puisqu’un réseau fossoyé (dont deux portions d’enclos quadrangulaires) et des structures en creux (fosses, trous d’ancrage de poteau) ont été observés, se prolongeant certainement en dehors de la zone exploitée par la carrière.
155L’occupation de l’âge du Fer est également représentée par une grande quantité de trous d’ancrage de poteaux (263 dénombrés) et par des fosses dépotoirs. Malheureusement, aucun plan de bâtiment n’a pu être restitué. Cependant, certaines structures et amas de mobiliers (amas de pierre et/ou de céramiques) signalent l’existence de niveaux de sols en place (Information orale, J.-P. Bouvet). On notera aussi la découverte de petits fours domestiques sur l’espace appréhendé.
156En dépit d’obtenir un plan précis des aménagements (taille et architecture des bâtiments), l’agencement des différentes structures mises au jour (au nombre de 600) et leurs fonctions révèlent une organisation de l’espace, pouvant correspondre à un quartier spécialisé de l’agglomération. De plus, en limite d’un espace vide de construction, qui n’est pas sans évoquer une place, une autre palissade d’orientation quasiment nord/sud traverse l’est de la zone de fouille.
157L’interprétation cultuelle qui a été proposée pour l’enclos circulaire de 15 m de diamètre, localisé tout au sud de l’emprise de fouille, est difficile à démontrer. En effet, la céramique de La Tène finale recueillie dans le fossé et la fosse centrale (encadrée par deux trous d’ancrage de poteaux), ne peut constituer un argument suffisant.
158Concernant la chronologie des vestiges, le mobilier a été plus récemment réexaminé par A. Levillayer, indiquant une évolution complexe du site s’échelonnant de La Tène C2 (première moitié du iie s. a.C.) à la fin de La Tène finale avec une période d’essor à La Tène D1a, entre la seconde moitié du iie s. et le premier tiers du ier s. a.C.219. Il est donc probable que le nuage de structures reflète plusieurs phases d’occupation qui n’ont pas été définies lors des opérations de terrain. Il faut préciser que si quelques publications renseignent sur cette agglomération, M. Gruet est décédé avant d’avoir pu achever la monographie du site (toujours en préparation par J.-P. Bouvet, A. Levillayer, G. Aubin et J. Siraudeau).
Le mobilier et les activités
159Par ailleurs, l’abondance des puits, soit 39 recensés, apparaît démesurée au vu de la surface fouillée ou même de l’étendue supposée de l’habitat, soit au moins 7 ha220. Il s’agit d’un phénomène généralement réservé aux agglomérations sur lesquelles des activités métallurgiques et de productions céramiques sont attestées221. De fait, une activité répondant à d’importants besoins en eau peut être supposée aux “Pichelots”. À ce propos, les fragments de sole d’un possible four de potier soulèvent la question d’une production de céramique.
160En dehors d’une activité agricole mise en évidence par l’identification d’outils spécifiques (serpes, serpettes, faucille) et par les nombreux silos (31), témoins d’une intense production, les artisanats du fer et du bronze sont attestés par la découverte de débris de métallurgie (scories, résidus de fonte, un fond de creuset) et des plaques (retrouvées en quantité) interprétées comme de possibles semi-produits. L’examen du mobilier métallique réalisé par J.-P. Bouvet a révélé la présence de fibules en cours de fabrication (étude inédite222). Le mobilier découvert en abondance témoigne d’une population relativement aisée (nombreux éléments de parure, fibules et instrumentum). En effet, près de 100 monnaies (notamment 36 potins) et d’importants restes d’amphores italiques et gréco-italiques (200 NMI) traduisent la dynamique économique du site et ses échanges avec le monde méditerranéen223.
161Finalement, le site des Alleuds (49) révèle une certaine diversité artisanale dont l’intensité de la production ne pourrait être évaluée qu’à la lumière d’un examen approfondi des déchets métallurgiques, ou par la découverte de l’atelier de potier présumé. En effet, les études menées sur l’habitat groupé laténien de plaine de Bâle-Gasfabrik (Suisse) montrent que les activités artisanales, dont les témoins sont nombreux, n’ont pas nécessairement dépassé la production domestique224. De plus, l’importante quantité de silos indique un surplus de production certainement destiné à l’exportation. En somme, les activités économiques concourent à reconnaître aux “Pichelots” une agglomération aux fonctions à la fois artisanales et agricoles, située le long d’une ancienne voie dont l’origine antique est supposée225.
Annexe 13 : Quiberon (Vénètes)
162Au large des côtes atlantiques vénètes, la presqu’île de Quiberon (56) forme une langue rocheuse d’environ 15 km² de superficie, rattachée au continent par l’isthme de Penthièvre. Déjà évoquée au sujet de la pointe fortifiée de “Beg-en-Aud” que la commune de Saint-Pierre-Quiberon (56) abrite, elle livre en fait de nombreux indices d’occupations protohistoriques226.
163En effet, sur la commune de Quiberon (56), des découvertes fortuites dès le xixe siècle et des fouilles de sauvetages ponctuelles menées dans le courant du xxe siècle, permettent de cartographier un ensemble d’indices d’habitats ou de sépultures de l’âge du Fer voire de La Tène finale, en périphérie de l’éperon barré. Ils suggèrent une forte présence sur la presqu’île de Quiberon à l’âge du Fer, dont la nature est difficile à percevoir : habitats dispersés ou habitats groupés ? (cf. fig. 85, SA 147). L’ensemble de ces témoignages étant issus de fouilles anciennes, de prospections pédestres ou de découvertes fortuites, il est difficile d’aller plus loin dans l’interprétation de ces occupations, d’autant que la datation est souvent peu précise. Notons simplement qu’à “Kergroix”, trois gisements ont été mis au jour sur un secteur limité à environ 3 ha. À “Kerné”, des structures en pierres sèches (trois bâtiments), associées à de nombreux foyers (dix mis au jour) et plusieurs sépultures ont été fouillées en 1931227. L’abondance du mobilier (bracelets et fibules en bronze…) pourrait suggérer la présence d’un habitat groupé de La Tène finale. Les données de fouilles ne sont pas suffisamment précises pour statuer sur la nature de l’occupation qui semble perdurer à l’époque romaine et se développer sur au moins quelques centaines de mètres.
164Le site de “Goulvars”, localisé environ 6 km plus loin, à l’extrémité sud de la presqu’île est mieux documenté. Découvert en 1983, lors de l’exploitation d’une dune en carrière, il fait l’objet de quatre interventions dirigées par J. Hyvert (enseignant à Quiberon) jusqu’en 1986, cumulant 2500 m² de surface d’observations (cf. fig. 81, SA 147). Des vingt-sept bâtiments dégagés, neuf ont été interprétés comme des habitations de 16 à 25 m² de superficie, accompagnées de dépendances et de structures annexes228. Ces habitations sont toutes équipées d’un foyer central et d’une double entrée.
165Les constructions sont caractérisées par des murs à double parement en pierres sèches, parfois séparés par un comblement. Le plan général montre une certaine organisation puisque les bâtisses sont alignées selon un axe est/ouest. De plus, la fouille a révélé que plusieurs fosses et foyers sont disposés dans des espaces communs. Les restes mobiliers témoignent de diverses activités domestiques et de subsistance (pêche à pied et en mer, élevage, fabrication d’aiguilles et de textile, mouture). La production de sel et de salaisons est également supposée mais dans des proportions qu’il n’est pas possible d’évaluer : s’agit-il de productions vivrières dans un cadre domestique ou d’un artisanat plus développé destiné à l’exportation ? Quelques dizaines d’amphores de type Dressel 1 signalent des échanges au moins avec le continent. La présence d’éléments de parure témoigne d’une certaine qualité de vie des habitants.
166Au nord de la parcelle fouillée par J. Hyvert, un diagnostic pratiqué en 1987 sur 3 ha, a mis en évidence des vestiges de l’époque romaine, mais également des couches d’occupations de la fin du second âge du Fer, permettant d’étendre l’emprise de l’habitat groupé à 1 ha au minimum229. Son extension au sud est circonscrite par l’Océan actuellement distant de 150 m, tandis que sa limite occidentale n’est pas connue. Enfin, il est probable qu’il se développait davantage à l’est si l’on se fie à un sauvetage urgent réalisé en 1989, à environ 300 m de distance qui a livré des trous d’ancrage de poteaux et de la céramique du second âge du Fer (Dossier communal, SRA Pays de la Loire). L’absence de rapport pour cette opération conduite par J. Hyvert restreint l’interprétation de ces vestiges. Néanmoins, en admettant qu’ils prolongent l’habitat de La Tène finale mis en évidence à quelques parcelles d’intervalles (“Goulvars”), on peut alors réévaluer la surface minimum de l’agglomération à environ 5 ha (cf. fig. 79, SA 147).
Les habitats groupés probables
Annexe 14 : Entrammes (Aulerques Diablintes)
167En descendant la Mayenne, plus au sud du territoire diablinte, à Entrammes (53), deux opérations d’archéologie préventive ont mis en évidence, au-delà de l’espace fortifié du “Port du Salut”, des vestiges datés de la fin du iiie siècle au début du iie s. a.C. (La Tène C1b/La Tène C2 à La Tène D1a). Le site du “Clos des Primevères”, est localisé à l’ouest de la Jouanne, tandis que celui de “La Carie II”, distant d’environ 1 km, est implanté de l’autre côté du cours d’eau, à l’est de la ville antique ou de l’actuel bourg d’Entrammes. La chronologie établie permet d’associer ces sites, au moins chronologiquement. Et bien qu’aucun vestige n’ait été appréhendé entre ces lieux-dits, il est tentant de faire le parallèle, d’autant qu’ils sont tous deux installés le long de la voie gauloise puis romaine Le Mans/Rennes, qui traverse le promontoire en diagonale (cf. fig. 73, SA 147).
Le site de “La Carie II”
168Découvert lors d’un diagnostic effectué en 2004, le site de “La Carie II” fait l’objet, l’année suivante, d’une fouille préventive d’environ 5000 m² de superficie (dir. G. Guillier). Elle révèle un ensemble de structures fossoyées localisées au sud de la voie : des fosses dont certaines sont réutilisées en dépotoirs, des trous d’ancrage de poteaux dont l’organisation n’a pas permis d’identifier de plan de bâtiment et quelques limites parcellaires. Ces vestiges s’organisent selon trois phases s’échelonnant entre la fin du iiie siècle et le début du iie s. a.C. et la seconde moitié du iie s. a.C., avec une densification progressive de l’occupation (fig. 14). On notera que l’orientation des structures, qui s’étendent vraisemblablement au-delà de l’emprise de fouille, ne varie pas au cours du temps, apparaissant désaxées par rapport à la voie d’origine plus récente. En effet, le premier fonctionnement de la voie, appréhendée à l’occasion de la fouille de “La Carie”, est placé à la charnière des iie et ier s. a.C., voire dès la seconde moitié du iie s. a.C., c’est-à-dire à La Tène C2b230.
Fig. 14. Plan des vestiges gaulois de “La Carie” à Entrammes (réal. J. Remy, d’après Guillier et al. 2012, 151, fig. 5).

169Le mobilier associé atteste d’une vocation domestique des lieux (fusaïoles, plaque-foyer, peson et meules). Notons également la présence de quelques témoins d’importations représentées par dix individus d’amphores (gréco-italiques et Dressel 1A) et une unique fibule de Nauheim.
170La phase de diagnostic, menée au lieu-dit “La Carie I”, a montré que l’occupation laténienne se développait probablement aussi au nord de la voie, d’après de rares structures fossoyées dont la nature et l’organisation n’ont pu être définies231.
Le site du Clos des Primevères
171Le second site, localisé au “Clos des Primevères”, a été décapé sur une surface d’un peu plus d’un hectare en 2008 (dir. G. Guillier, INRAP). Les vestiges, distants de quelques mètres de la voie gauloise, sont répartis selon trois zones. Au nord-nord-est, une zone de stockage est matérialisée par des greniers sur poteaux ; au sud une aire d’habitat (dont l’étendue méridionale et orientale n’a pas été reconnue), est caractérisée par trois bâtiments quelques fosses et autres fossés ; et enfin au nord-ouest, des structures ténues et du mobilier suggèrent une seconde zone d’habitat qui se développerait principalement en dehors de l’emprise de fouille (cf. fig. 87, SA 147). Deux fossés, approximativement perpendiculaires au tracé de la voie, limitent ce qui correspond certainement à un cheminement desservant l’habitat méridional et la zone des greniers. À la jonction entre ces deux premières zones, un puits a été mis au jour. Si le fond n’a pas été atteint, il a permis de recueillir de nombreux éléments mobiliers, notamment des déchets qui pourraient être issus d’une activité métallurgique (fragments de paroi scorifiée).
172La zone d’habitat sud est caractérisée par neuf fosses peu profondes dont certaines comprenaient des rejets d’habitats (torchis rubéfié, céramique, meule, un lissoir, un fragment de plaque foyère) et quelques trous d’ancrage de poteaux isolés232. Aussi, dans l’angle sud-est de la fouille, trois bâtiments sur poteaux plantés, érodés et aux plans incomplets ont été identifiés. L’ensemble de ces structures a livré une centaine de tessons d’amphores correspondant à un minimum de neuf individus (gréco-italique, Dressel 1A et un type de transition entre les deux), ainsi qu’un fragment de perle en verre, daté du ier s. a.C., qui pourrait provenir d’Europe Centrale233. Enfin, un tronçon de fossé peu profond de 11 m de long, initialement plus étendu, marque une séparation entre ce secteur et celui des greniers. Cet habitat est daté de La Tène C2 et de La Tène D1a.
173On peut supposer que la troisième zone (nord-occidental) annonce la proximité d’une seconde aire d’habitat puisqu’il a livré une fosse et un puits associé à trois trous d’ancrage de poteaux interprétés comme les vestiges d’un possible système de levage de type chèvre. Un mobilier domestique peu abondant se trouvait dans le comblement de ces aménagements (céramiques, fragments de plaques-foyer, deux fragments de meules, torchis rubéfié).
174La zone nord-nord-est du site, c’est-à-dire l’aire de stockage, réunit la majorité des aménagements laténiens pour lesquels ont été reconnues trois phases successives avec de premières implantations remontant à La Tène C2 voire La Tène C1b.
175La phase 1 voit l’aménagement de sept greniers (sur quatre poteaux plantés) et un bâtiment à six poteaux, tandis que la phase 2, qui correspond probablement à la fin de La Tène moyenne, est caractérisée par un bâtiment rectangulaire à deux nefs (34 m²) et un enclos fossoyé ouvert (trois côtés). Ces éléments ont été interprétés comme les vestiges d’un petit habitat à vocation agricole de courte durée de vie. Le mobilier associé à ces phases est pauvre (torchis rubéfié et céramique principalement). Enfin, la phase 3, placée à la transition entre La Tène C2 et La Tène D1a, se distingue par l’installation de 75 greniers organisés en six rangées, toutes orientées à peu près nord-sud. Plusieurs étapes de construction ont été reconnues d’après l’agencement des structures. Ainsi, deux paires de rangées sont implantées selon des distances régulières (à 2,55 m et 3,1 m d’intervalles), pour l’aménagement de voies d’accès (gestion des stocks) et probablement pour prévenir de toute contagion en cas d’incendie. Les deux autres rangées, qui s’intercalent entre les premières, semblent avoir été ajoutées a posteriori, tout comme les quatorze greniers épars dont l’implantation apparaît opportuniste.
176Cette opération a donné lieu à une importante publication qui propose un examen critique des structures de stockage en contexte régional. Ils ont ainsi pu montrer que la proportion de greniers sur les sites ruraux traduit une forme de hiérarchie entre les sites. Cette hypothèse est d’ailleurs validée par l’interprétation propre à chaque site, établie à l’issue de la fouille par les responsables d’opérations sur la base de critères différents : “Nous pouvons estimer que nos résultats sont validés par les propositions effectuées par ailleurs et qu’ils sont représentatifs d’une hiérarchie sociale de l’habitat gaulois, d’une maîtrise foncière et des circuits commerciaux”234.
177Cette analyse est ensuite enrichie par l’étude carpologique, désormais systématiquement combinée à la démarche archéologique. Le principal acquis de celle-ci, menée sur plus de 200 échantillons issus de 60 greniers, réside dans la mise en évidence du stockage d’une espèce céréalière en particulier, puisque le blé amidonnier y est présent à 82%235. L’uniformité de ce stockage de masse montre que ces réserves ne sont pas destinées au simple approvisionnement local, qui accueillerait des ressources plus variées (légumineuses et autres variétés de céréales). Les auteurs de l’article proposent de voir un exemple de spécialisation de l’agriculture à des fins d’exploitations intensive : “Il faut donc envisager ce lieu comme un site relais des récoltes amidonnières, ce qui suppose une gestion à plus vaste échelle avec acheminement des céréales depuis un territoire dont l’ampleur nous échappe”236.
178Afin de compléter la présentation de cette partie de la commune d’Entrammes, ajoutons que l’étendue de l’occupation du iie s. a.C. se poursuit visiblement à environ 250 m du “Clos des Primevères”, puisqu’un tronçon de fossé de 10 m a été mis en évidence lors d’un sondage réalisé en 1976 sur le site de “la carrière d’Ecorcé”. Localisé à 100 m au nord de la voie, celui-ci a livré de denses rejets domestiques : plaques-foyers, charbons de bois, ossements, torchis rubéfié. La localisation de ces traces d’habitats indique qu’ils dépassent l’envergure d’un établissement rural.
Interprétation des sites répartis dans les environs de l’enceinte du “Port du Salut”
179L’ampleur du stockage au “Clos des Primevères” – dont l’étendue n’est pas connue –, sa proximité avec les vestiges de “la Carrière d’Ecorcé” et la cohérence chronologique avec “La Carie II”, soulève la question de l’existence d’un habitat groupé dont seules les extrémités orientales et occidentales auraient été appréhendées par les opérations préventives. Dans cette optique, la distance d’un kilomètre, entre les deux, suppose une agglomération étendue sur au moins 20 ha à 25 ha, ce qui n’est pas incohérent avec la connaissance que l’on a par ailleurs des agglomérations de plaine237. La seconde hypothèse, selon laquelle ces vestiges correspondent à différents pôles, ne peut être totalement exclue. Néanmoins, cette zone de stockage de masse, qui centralise une bonne part des productions agricoles de la région, confère à l’habitat environnant un rôle économique évident, caractéristique des agglomérations du iie siècle238 – bien qu’elles tirent plus généralement leur économie de l’artisanat –, qui va au-delà de l’envergure d’un habitat aristocratique239.
180De plus, la chronologie de ces sites confrontée à celle du “Port du Salut” (La Tène D1 à La Tène D2) suggère le déplacement d’un important foyer de population, d’un habitat de plaine vers un site défensif. Ce processus coïncide avec le schéma couramment admis pour les régions du Centre et de l’Est de la Gaule sur la formation des agglomérations de plaine qui précèdent le développement des agglomérations fortifiées et l’émergence des oppida240 241.
181Si cette première hypothèse est donc favorisée, on observera toutefois que les structures mises au jour sur les différents sites (le “Clos des Primevères”, la “Carrière d’Ecorcé” et “La Carie II”) n’ont pas une orientation tout à fait similaire, ce qui peut facilement s’expliquer par le développement progressif de l’habitat de l’ouest vers l’est. En effet, rappelons que le site de “La Carie II”, légèrement plus précoce que les autres, se développe vraisemblablement avant la construction de la voie, tandis qu’au “Clos des Primevères”, l’orientation des aménagements apparaît plus cohérente avec l’axe de la voie gauloise. Toutefois et dans l’hypothèse d’une agglomération regroupant ces diverses occupations, la mise en place d’une trame urbaine homogène ne peut être envisagée.
Annexe 15 : Jublains (Aulerques Diablintes)
182Noviodunum, l’agglomération romaine de Jublains (53) est installée sur un léger plateau à environ 150 m NGF, juste au nord du bourg actuel. Depuis les premières fouilles de sauvetage conduites par M. R. Boissel (au début des années 1970), jusqu’aux dernières opérations préventives, des niveaux gaulois ont régulièrement été interceptés sous les vestiges romains, sans qu’ils n’aient jamais vraiment été mis en perspective, à l’exception de la récente exposition sur Les premières villes de l’Ouest présentée justement au musée de Jublains et qui reconnaît un état antérieur à Noviodunum242.
183Les premiers vestiges datés de La Tène finale sont découverts en 1972, à l’occasion de la réalisation d’un terrain de sport au nord-est du bourg, en périphérie de l’agglomération romaine (fig. 15). Les fouilles sont alors menées par M. R. Boissel jusqu’en 1974, puis par R. Coutelle qui lui succède jusqu’en 1977. Elles se poursuivent encore (sous la direction de J. Girard puis de J. Naveau), deux années durant lesquelles seuls les vestiges antiques furent appréhendés. Au nord-ouest du terrain de sport, sont ainsi mis en évidence six foyers dont l’un livre des scories et des fragments de bronze qui témoignent de la présence d’une activité métallurgique243. Dans le même secteur, sont aussi découverts des creusets contenant des gouttelettes d’or ainsi que des moules à alvéoles en terre cuite attestant d’une activité d’orfèvrerie destinée à la fabrication d’objets précieux et peut-être de monnaies (moules pour flans monétaires ?). Deux monnaies gauloises, dont l’une est attribuée aux Aulerques Diablintes, ont d’ailleurs été recueillies au sud-est du terrain de sport244. Dans ce secteur, plusieurs sections de fossés présentent des orientations identiques à ceux du “Taillis des Boissières”, repérés environ 90 m plus à l’ouest et qui correspondent approximativement à l’orientation de la trame urbaine romaine.
Fig. 15. Ensemble des vestiges de La Tène finale, mis au jour sur la commune de Jublains (53), confronté à la trame de l’agglomération romaine, sous fond orographique (réal. J. Remy, d’après les plans des différentes opérations programmées et préventives conduites sur la commune de Jublains).

184Le site de “La Grande Boissière” a fait l’objet d’une intervention préventive en 1997 (dir. A. Bocquet), dont les premiers résultats – éléments parcellaires comblés entre 80 et 20 a.C. et un abondant mobilier céramique retrouvé en contexte résiduel (niveaux laténiens non atteints) – sont complétés lors d’opérations programmées menées plus au nord au “Taillis des Boissières”, de 1998 à 2004 (dir. A. Bocquet). Du mobilier daté de La Tène moyenne est alors recueilli en contexte résiduel, induisant une occupation du plateau dès cette période, bien qu’aucune structure ne vienne actuellement en préciser la nature245.
185En revanche, une occupation dense y est attestée pour la période suivante. Effectivement, une phase attribuée à La Tène D1, se caractérise par une fosse atelier semi-excavée de 9 m² ayant livré deux monnaies en argent et 38 pesons en terre cuite qui orientent l’interprétation de sa fonction vers un atelier de tisserand246. La Tène D2 est représentée par l’angle d’un enclos fossoyé, bordé sur 3,20 m de long par une probable palissade externe. Dans les environs immédiats de l’espace enclos, cinq fosses et un trou de piquet complètent les vestiges de la fin de La Tène247. Une abondante série de structures en creux (fosses, trous d’ancrage de piquets ou de poteaux) n’a pu être datée et vient donc potentiellement densifier l’occupation gauloise.
186Plus au nord, dans le cadre d’une fouille programmée réalisée en 1985 sur “la route de la Grazay”, une couche de La Tène finale a été suivie sur 142 m248.
187De plus, il faut évoquer les fouilles programmées entreprises plus récemment (2010-2012) sur une domus d’un îlot central de la ville antique (dir. A. Bocquet). Les niveaux antérieurs aux constructions de l’époque romaine sont rarement atteints par la fouille mais uniquement par le biais de petits sondages. Ainsi, un trou de calage de poteau y est repéré en 2010. De plus, notons que du mobilier de La Tène finale est régulièrement présent en contexte résiduel dans les couches stratigraphiques plus tardives249. La découverte d’amphore (Dressel 1A et 1B) dans ce secteur correspond aux premiers témoins d’importations en provenance du monde méditerranéen250. Au nord-est de la ville, de nouveaux indices d’occupation de La Tène C2 à La Tène D ont été perçus en 2019, à l’occasion d’une intervention portant sur 25 m², qui n’a pas encore fait l’objet d’un rapport de fouille (Information orale, A. Bocquet). Ces vestiges sont caractérisés par la présence de résidus sidérurgiques.
188Enfin, quelques éléments plus ponctuels viennent compléter ce tableau, comme l’identification, lors d’un diagnostic préventif réalisé au lieu-dit “Bellevue”, d’au moins un fossé d’orientation est/ouest dont le comblement est daté de La Tène251. Par ailleurs, deux autres monnaies gauloises sont mentionnées sur la commune de Jublains : une en argent découverte à “La Petite Renardière” (à environ 700 m du Temple de la Fortune), une autre ramassée au niveau de l’ancienne voie du Mans, à 1 km au sud du bourg, probablement dans les environs du lieu-dit “Les Yaux”.
189Au final, les interventions, rapidement évoquées ci-dessus, offrent souvent des fenêtres d’études sur les vestiges laténiens trop souvent limitées, restreignant de fait l’interprétation de l’organisation de l’occupation. Néanmoins, les opérations révèlent une occupation dense de la fin de La Tène (et peut-être dès La Tène moyenne), se distribuant sur environ 3,5 ha sous la ville romaine, qui déploie une trame urbaine dans le courant du ier siècle pour prendre le statut de capitale de cité des Aulerques Diablintes. On peut estimer son développement maximum à 20 ha selon la répartition des vestiges et le développement de la ville romaine.
190Pour la période gauloise, les fossés suivent des orientations cohérentes autour des lieux-dits de “La Boissière”, dont on note l’intéressante similarité avec la trame orthogonale de l’époque romaine qui traduit une certaine logique de continuité entre ces deux périodes. De plus, la répartition des vestiges et du mobilier semble pouvoir correspondre à des espaces structurés et spécialisés, avec au nord-ouest du terrain de sport une concentration d’activités artisanales hautement spécialisées, caractéristique des contextes d’agglomération gauloise et plus à l’ouest, des vestiges correspondant davantage au domaine domestique (céramiques, amphores, bracelet en lignite). Des restes osseux d’animaux domestiques (ovicaprins, porcins et bovins) interprétés comme des rejets de consommation complètent ce panel. Aussi, les restes de faunes indiquent la présence de chevaux dont on ne sait s’ils sont consommés ou non252. Ajoutons que les restes d’amphores et les monnaies confirment le rôle commercial de Jublains à la fin de l’âge du Fer.
191À l’entrée septentrionale de l’agglomération romaine, sous le temple de la Fortune, édifié au lieu-dit “La Tonnelle”, vers la fin du règne de Néron (dans la seconde moitié du ier siècle), des vestiges mobiliers (céramiques et objets métalliques), ainsi qu’un unique tronçon de fossé appartenant peut-être à un enclos (de 28,5 m de côté au minimum), confirment une occupation ancienne à Jublains, probablement de La Tène moyenne et finale, voire dès la fin de La Tène ancienne (300-250 a.C.). La nature (armement, parure, un instrument pour le feu) et l’état des pièces métalliques (brisées et fragmentées), couplé au choix d’implantation du monument romain, suggèrent un lieu à vocation religieuse, du moins hautement symbolique dès le début de La Tène (cf. infra p. 108).
192En conclusion, l’ensemble de ces indices – bien qu’apparaissant en pointillés – permettent désormais d’entrevoir une agglomération de plaine à Jublains, dont l’ampleur de la vocation artisanale, confirmée par des activités métallurgiques, reste à préciser. Elle se développerait pleinement à La Tène finale (autour de 120 a.C. environ) sur un substrat plus ancien – dès la fin du ive ou du début du iiie siècle –, sous une forme encore mal définie (sanctuaire gaulois ?), dont le rôle symbolique apparaît vraisemblable, d’autant plus si l’on tient compte de l’édification (sur le même emplacement) à l’époque romaine d’un temple, inscrit par ailleurs dans la trame urbaine du chef-lieu de cité.
Annexe 16 : Oisseau-le-Petit (Aulerques Cénomans)
193Au nord du territoire cénoman, à environ 2 km de distance du camp de “Saint-Evroult” (Gesnes-le-Gandelin), sur un coteau qui s’étire en pente douce vers le sud, une occupation de la fin de La Tène moyenne et du début de La Tène finale a été mise en évidence par une opération préventive, menée en 2006 sur la commune d’Oisseau-le-Petit (72).
194La fenêtre d’observation des “Noirâs” limitée à 320 m² a permis de dégager une forte densité de structures fossoyées, correspondant à une série de fosses réutilisées en dépotoirs, de trous d’ancrage de poteaux et d’au moins deux fosses silos (fig. 16). Une fosse carrée de 1,60 m de côté, aux parois verticales conservées sur 1 m de profondeur, a été interprétée comme une cave253. Aucun plan de bâtiment n’a réellement pu être mis en évidence. L’abondant mobilier associé à ces structures évoque un espace voué à diverses activités artisanales, plutôt qu’à un habitat. De fait, de nombreux déchets osseux d’animaux domestiques, comportant des traces de découpe (principalement du porc mais aussi du bœuf et des caprinés), signalent la présence d’un atelier de boucherie qui dépasse le cadre d’une unité domestique, avec 2071 restes comptabilisés254. Il est tentant de mettre en relation cette activité de transformation de la viande avec l’importante quantité de restes de godets à sel (117 tessons) et de vases de stockage sur lesquels ont été identifiées des traces inhabituelles de desquamation qui pourraient être dues à une usure du sel et pourquoi pas en lien avec des salaisons. Des éléments de fours et de plaques foyères s’ajoutent à ces vestiges. De plus, l’étude des restes de faune semble indiquer la pratique d’activités de tabletterie et de pelleterie dans des proportions assez modestes relevant probablement du domaine domestique, tout comme pour le travail du textile représenté par seulement deux pesons en terre cuite255. Enfin, la présence de quelques scories coulées évoque également une activité métallurgique.
Fig. 16. Plan des vestiges laténiens mis au jour aux “Noirâs” à Oisseau-le-Petit en Sarthe (réal. J. Remy, d’après Pétorin et al. 2007, fig. 30).

195Ces vestiges doivent être mis en relation avec une quantité considérable de découvertes inédites et issues de prospections de surface, qui ont fait l’objet d’un recensement minutieux de la part de J.-P. Bouvet256. En effet, la quantité et la qualité du mobilier découvert aux alentours de la fenêtre de fouille précédemment citée (à l’occasion de fouilles anciennes ou clandestines et de prospections pédestres), suppose l’existence d’un site assez étendu. On recense donc sur la commune d’Oisseau, outre des éléments d’armement ou de parure, 177 monnaies gauloises isolées où provenant de dépôts, avec une majorité d’exemplaires en or, soit 111 numéraires (cf. fig. 80, SA 147).
196Deux perles en verre (La Tène C et D), un bracelet en bronze de La Tène finale, une monnaie en bronze et un trésor de 110 monnaies gauloises en or proviennent du lieu-dit des “Noirâs”. Dans les environs, près de la voie antique Le Mans/Vieux257, une monnaie, de la céramique, des fragments de colliers gaulois ainsi que deux fers de lances pliés ont été découverts lors d’une fouille ancienne et mal localisée (en 1892/1893), située vraisemblablement non loin du temple romain des “Busses”258.
197Des prospections menées à la “Cordellerie”, c’est-à-dire un peu plus au sud-ouest, ont permis de ramasser, au sein d’une enceinte curvilinéaire, un fer de lance laténien et de la céramique de La Tène finale. Un dépôt monétaire contenant 54 monnaies gauloises et une monnaie romaine (un denier daté de 121 a.C.) provient du même endroit (dossier communal, SRA de Nantes).
198En outre, des structures excavées (fossés) identifiées à l’occasion d’opérations de sauvetage, ont livré des éléments de la fin de l’âge du Fer ou de La Tène finale, indiquant que l’occupation se poursuit jusqu’au “Champ des Vérettes” et aux “Longues Mézières”259. Le mobilier évoque préférentiellement des contextes domestiques (fragments de clayonnage, restes osseux de faune, céramiques, pierres calcaire brûlées). Signalons pour finir que la bibliographie ancienne indique la présence de céramique gauloise à la “Cordellerie” et près de la “Croix Blanche”.
199Ajoutons à ce mobilier, des indices d’espaces à vocation funéraire et cultuelle mal calés chronologiquement mais qui méritent tout de même d’être évoqués. Ainsi, dans la documentation ancienne, il est indiqué la découverte “non loin du bourg actuel”, en direction de l’est, de squelettes portant pour la plupart des colliers et des anneaux en bronze aux jambes260. Les anneaux correspondent probablement à des bracelets conservés dans une collection privée et attribués à l’époque gauloise de manière générale261.
200Dans les environs du site des “Noirâs”, des enclos, dont au moins trois présentent des orientations similaires, ont été aperçus lors de prospections aériennes. À moins de 200 m au sud-est de la fenêtre de fouille de 2006, au lieu-dit “la Croix Blanche”, un temple antique se superpose à deux enclos emboîtés (sous la forme de parallélogrammes), orientés selon un axe est/ouest. Il mesure environ 50 m de large pour 80 m de long au minimum, se développant sur une superficie d’environ 4000 m². Deux de ces fossés ont livré, lors de prospections au sol, de la céramique protohistorique et une monnaie gauloise en argent suggérant une attribution de ces aménagements à la fin de La Tène. La vocation cultuelle de l’édifice romain qui est édifié sur cet enclos, autorise à s’interroger sur la vocation éventuellement religieuse des aménagements qui les précèdent.
201De plus, au lieu-dit les “Busses”, au nord cette fois-ci de la fouille des “Noirâs”, un double enclos de même dimension, de même orientation et de morphologie proche du précédent, a été mis en évidence, grâce à des photographies aériennes. L’absence de mobilier dans cette structure ne permet pas d’assurer avec certitude son rattachement chronologiquement au reste de l’occupation. Un peu plus au sud, à seulement 10/11 m de l’emprise de fouille des “Noirâs”, quinze monnaies gauloises, dont des émissions exogènes (Lexoviens, Carnutes), ont été recueillies à l’occasion des fouilles d’un temple de l’époque romaine – auxquelles il faut ajouter deux autres exemplaires provenant des alentours immédiats262. Bien qu’elles soient issues d’un niveau romain (environ 50 p.C.), il n’est pas aberrant d’envisager que l’édifice connaisse un antécédent gaulois étant donné que la cella et son sol ont été préservés de la fouille. Les découvertes, déjà évoquées, de mobiliers retrouvés aux environs du temple – notamment deux fers de lance pliés – vont d’ailleurs dans ce sens.
202Pour l’heure, il est difficile de trancher sur le statut du site car la majorité des découvertes est issue de ramassages de surface. Néanmoins, la qualité du mobilier céramique mis au jour lors de la fouille des “Noirâs” –, des fragments de coupes à piédestales ont été recueillies –, atteste, tout comme la consommation carnée263, d’une certaine aisance, qui correspond plutôt à un type d’habitat privilégié. Ajoutons que la forte densité des structures appréhendées, à l’échelle de la commune d’Oisseau et l’ampleur de la dispersion des mobiliers sont éloquentes et renvoient clairement à un contexte d’agglomération, pour laquelle il semble raisonnable de suggérer une extension minimum de 25 ha, pour un maximum de 55 ha si l’on tient compte de l’enclos des “Busses”, localisé plus au nord. Il est même possible de pressentir des espaces (quartiers ?) spécialisés au sein de cet ensemble. Au sud, au croisement des voies antique Jublains/Chartres et Le Mans/Vieux, vers le lieu-dit des “Longues Mézières” les vestiges correspondent plutôt à des restes provenant de contextes domestiques. Par ailleurs, on a vu qu’aux “Noirâs”, un quartier artisanal était supposé, tandis que dans les environs du temple romain des “Busses”, le mobilier se rattacherait davantage à des domaines cultuels ou funéraires.
203Curieusement et pour terminer avec l’étude du mobilier, aucun tesson d’amphore italique ou gréco-italique n’est mentionné, ce qui peut sembler paradoxal au regard de la qualité du mobilier exhumé. Toutefois, on peut provisoirement expliquer ce phénomène par l’absence de fouille significative à Oisseau-le-Petit.
204La fouille des “Noirâs” offre le cadre chronologique le plus précis, car les éléments résultent de contextes stratifiés. Celle-ci établie une occupation au iie s. a.C., à la transition entre La Tène moyenne et finale (LT C2/D1). Néanmoins, l’exiguïté de la fouille invite à plus de prudence à l’échelle de l’ensemble de l’occupation, d’autant plus si l’on considère la découverte, à la “Croix Blanche”, d’un fragment de bracelet de verre bleu cobalt (en lien certainement avec les découvertes anciennes de colliers et de fers de lance), qui est attribué à La Tène C1b264.
205Finalement, une agglomération de 40 ha à 45 ha est ensuite établie au Haut-Empire, à l’emplacement de l’occupation de La Tène finale, perdurant jusqu’au iiie, voire ive siècle. En l’état actuel des connaissances, la continuité avec la période gauloise n’est pas assurée puisqu’en 2006, un hiatus a clairement été mis en avant par la fouille. En effet, les structures laténiennes sont colmatées au plus tard dans la première moitié du ier s. a.C., complété par un remblaiement général et un abandon jusqu’au début du ier siècle265. Enfin, il n’est pas exclu que ce phénomène soit local et qu’il reflète un simple déplacement de l’occupation (ou d’un secteur de l’occupation).
206Pour conclure, la relation chronologique entre le site de hauteur de Gesnes-le-Gandelin (72) et celui implanté en plaine à Oisseau-le-Petit (72) ne peut malheureusement pas être précisée (cf. fig. 74, SA 147). À ce jour, on peut tout autant envisager leur contemporanéité que l’abandon du site de plaine pour la (ré)occupation de la fortification de hauteur.
Les habitats groupés potentiels
Annexe 17 : Plounéventer (Osismes)
207Le site de “Kérilien” au nord de la commune de Plounéventer dans le Finistère est connu pour son agglomération secondaire romaine, implantée à une altitude moyenne de 75 m NGF sur le plateau du Léon et limitée au nord par la rivière de la Flèche. Traditionnellement associée à la ville antique de Vorganium, citée par Ptolémée, elle se développe entre la première moitié du ier s. p.C. et le début du ve siècle sur 30 à 35 ha266. Elle est découverte au xixe siècle par l’historien D.-L.-O. Miorcec de Kerdanet à qui l’on doit les premières explorations. Par la suite, les fouilles menées par L. Pape sur trois secteurs de l’agglomération romaine entre 1962 et 1968, atteignent rarement les couches stratigraphiques antérieures aux vestiges romains.
208Toutefois, celles-ci ont été furtivement appréhendées – au moins en un point – lors de la campagne de 1964 (cf. fig. 70, SA 147). En effet, une couche de 0,60 m d’épaisseur, contenant de nombreux restes céramiques et deux monnaies (un potin sénon et un quart de statère osisme) a pu être identifiée267. S’ajoute à cette découverte, une stèle de l’âge du Fer retrouvée incorporée dans le sol d’une cour de l’époque romaine. La nature de ces indices et l’absence d’opération archéologique à la suite des investigations de L. Pape limitent l’interprétation de cette occupation laténienne dont l’étendue ne peut être appréciée. Objectivement, ces éléments n’apparaissent certainement pas suffisants pour définir la présence d’un habitat groupé. Cependant, le développement d’un centre urbain dès le ier s. p.C., dont les vestiges semblent refléter une importante activité de production et de commerce, permettent de supposer avec prudence, l’existence d’un habitat aggloméré d’origine laténienne qui se pérennise à l’époque romaine. Ajoutons que le site est placé au carrefour d’au moins cinq voies romaines dont on peut soupçonner, pour deux d’entre elles, un tracé plus ancien (voie de Carhaix à Plouguerneau et celle qui se dirige vers Saint-Mathieu la Pointe du Bloscon). Cette hypothèse repose sur la mise en évidence d’indices d’origine gauloise le long de ces itinéraires268.
209Annexe 18 : Plaudren (Vénètes)
210Rejoignons maintenant le territoire vénète, à peu près au centre duquel s’élève encore dans le paysage l’enceinte carrée (environ 130 m de côté) de “Kerfloc’h” à Plaudren (56), qui a régulièrement fait l’objet de descriptions par les érudits depuis le xixe siècle269. Cependant, c’est la densité des vestiges de l’époque romaine et localisés dans les alentours proches de l’enceinte qui, jusque-là, a principalement retenu l’attention des visiteurs et des prospecteurs. En effet, une agglomération romaine, d’une surface estimée à 15/20 ha et implantée au carrefour de voies datées de la même période (allant de Vannes à Corseul et de Vannes à Carhaix), est reconnue dans ses environs270. Actuellement, le talus de l’enceinte de “Kerfloc’h” s’élève jusqu’à 4,30 m de haut pour une largeur de 9 m. Il est associé à un fossé extérieur, en grande partie comblé, dont on devine encore la largeur à l’ouverture (de 5 m), au milieu du xixe siècle. Si du mobilier de l’époque romaine a été recueilli dans l’angle sud-est de l’enceinte, son origine est supposée remonter à La Tène. En effet, dans le cadre de prospections inventaires menées par le Centre d’Etudes et de Recherches Archéologiques du Morbihan (le Céram), des fragments de céramiques du second âge du Fer et d’amphores (Dressel 1) ont été ramassés à l’intérieur de l’enceinte, attestant une occupation entre 300 et 50 a.C.271. Ajoutons également les découvertes plus anciennes de trois deniers, d’un statère (attribué aux Osismes) et d’un petit bronze frappé de l’époque gauloise272.
211L’intérêt de cette enceinte et les raisons qui ont conduit à la retenir dans notre inventaire résident dans son environnement. D’une superficie de moins d’un hectare (0,65 ha), elle occupe le sommet d’un plateau, à environ 150 m NGF. Dominant la rivière du Loc’h d’une centaine de mètres de haut, ainsi que l’ensemble du paysage environnant, elle est implantée à environ 300 m de distance d’un ensemble d’indices d’occupation de La Tène finale mis au jour lors d’un sondage effectué en 2005 au lieu-dit “Poul Guern”. Ces indices doivent également être mis en relation avec du mobilier issu de prospections pédestres (cf. fig. 109, SA 147).
212Parmi les découvertes réalisées en prospection, de nombreux déchets en lien avec l’artisanat du verre de l’époque romaine ont été récoltés, débouchant sur une évaluation archéologique à “Poul Guern” afin de renseigner le site menacé par la mise en culture du terrain.
213Sur un total de cinq sondages couvrant une superficie globale d’environ 90 m², une seule tranchée (de 18 m²) a livré une concentration de structures datées de La Tène D1b (120 à 80 a.C.), qui n’ont été que partiellement fouillées : fosses, un tronçon de fossé en partie comblé par un empierrement pouvant correspondre au calage d’une palissade, ainsi qu’un possible trou d’ancrage de poteau. Un autre sondage de 10 m², implanté dans la continuité du précédent, a livré du mobilier laténien mêlé à de la céramique romaine. L’absence de structures laténiennes dans la plupart des sondages n’apparaît pas rédhibitoire puisqu’il est probable que la fouille, qui n’a pas été achevée, n’ait pas atteint les couches antérieures à l’époque romaine. La plus grande fenêtre d’observation, localisée à environ 50 m plus à l’est a révélé des fours de verriers romains, installés dans des niveaux archéologiques datés par le mobilier et notamment des restes d’amphores de type Dressel 1, de La Tène finale. Ces vestiges bien que discrets retiennent l’attention de par leur densité vis-à-vis de la surface fouillée et parce qu’ils peuvent être mis en relation avec un statère gaulois ramassé non loin du sanctuaire romain de “Goh-Ilis” (localisé au nord des sondages). De plus, l’occupation peut être étendue jusqu’à l’enceinte quadrangulaire grâce à des ramassages de surfaces qui ont livré de la céramique de La Tène moyenne et finale ainsi que des fragments de Dressel 1 associés à des éléments de l’époque romaine273.
214L’ensemble de ces éléments renseigne sur une occupation de statut privilégié d’une extension d’au moins 5 ha, dépassant l’envergure d’un établissement rural même de statut élevé. En effet, la présence de six monnaies gauloises s’oppose au constat selon lequel les établissements ruraux ne livrent jamais de monnaies – mis à part sous la forme de dépôts dans de rares cas274. L’habitat de Paule (22), dont le statut dépasse pourtant largement celui des autres établissements connus pour la zone géographique concernée, illustre bien ce phénomène. Cet argument est renforcé par la découverte sur la commune d’un coin monétaire en bronze destiné à la frappe de quart de statère. Il s’agit là de l’unique exemplaire identifié dans le quart nord-ouest de la Gaule275. La présence d’un atelier de frappe monétaire dans les environs est donc fortement présumée, renforçant le caractère particulier de ce site. En effet, cette activité, qui implique le contrôle d’un pouvoir émetteur pour garantir la valeur des monnaies, n’est traditionnellement identifiée dans le monde celte que sur les oppida ou les sanctuaires276. Par conséquent, ces derniers arguments sont davantage favorables à un contexte d’agglomération gauloise plutôt qu’à celui d’un établissement rural aristocratique. Cette hypothèse est d’autant plus séduisante qu’une agglomération secondaire succède vraisemblablement à l’occupation laténienne à l’époque romaine.
215Il est d’ailleurs tentant de faire le rapprochement de cette occupation avec une nécropole gauloise mise au jour à l’est de la commune de Plaudren (cf. p. 237, SA 147). Néanmoins, l’importante distance qui les séparent (6 km) ne permet pas d’assurer leur correspondance et pourrait même invalider cette hypothèse.
216La présence de l’enceinte quadrangulaire, rappelle la situation de la fortification de Trégueux (22) au contact d’une agglomération. Malheureusement, en l’absence de fouille, sa fonction ne peut être sérieusement discutée (habitat aristocratique ? espace publique ?).
Annexe 19 : Le Fief-Sauvin (Ambiliates ?)
217Déjà évoquée pour la fortification laténienne qu’elle abrite, la commune du Fief-Sauvin, située dans le pays historique des Mauges, est également connue pour son agglomération secondaire romaine. Celle-ci se met en place au ier s. p.C., sur le vaste plateau qui se développe au-delà du rempart de “la Ségourie”. Supposée correspondre à l’antique station Segora figurant sur la carte de Peutinger et sur l’itinéraire Nantes-Poitiers, cette énigme motive les recherches d’A. Champigneulle qui explore, dans la seconde moitié du xxe siècle la voirie autour du Fief-Sauvin277. À sa suite, entre 1974 et 2011, les prospections aériennes (C. Lambert, A. Braguier, G. Boisbouvier, G. Leroux) et pédestres se succèdent et alimentent le plan de l’agglomération romaine. En parallèle, ces recherches révèlent une dense occupation de l’âge du Fer sous la ville antique, identifiée par toute une série d’enclos quadrangulaires, circulaires et d’indices fossoyés qui ne sont cependant pas strictement datés.
218Les ramassages de surface, eux, ont livré une importante quantité de mobiliers de qualité qui ont été recensés et localisés par J.-P. Bouvet (cf. fig. 90, SA 147). Ainsi, des fragments d’amphore Dressel 1A ont été découverts au “Grand Nombault” à quelques centaines de mètres au nord-ouest de l’agglomération romaine, suggérant une zone d’habitation de La Tène finale. Ci-ajoute un lot de meules gauloises recueillies un peu plus à l’ouest. Au cœur de l’agglomération antique, aux lieux-dits des “Gâts” et du “Champs des Chirons”, sont recensées trois pointes de lances en fer, une boucle de ceinture en bronze décorée et des perles en verre, toutes datées de La Tène finale. Deux épées en fer, qui pourraient appartenir au second âge du Fer sont également inventoriées. Enfin, autour du “Camp de César”, 61 potins au type du “taureau cornupète” ont été découverts, ainsi que d’autres monnaies en bronze (trois exemplaires), en or (dont quatre statères) et en argent. Il faut en plus mentionner l’existence d’une statuette en bronze provenant du même secteur, bien qu’elle ne soit pas datée.
219À cet important corpus s’ajoute une occupation de La Tène finale mise au jour sous le temple romain de “La Vieille-Vigne”, supposant un premier état gaulois (cf. infra p. 126). Il faut préciser qu’il s’agit là des seuls vestiges immobiliers tangibles de La Tène finale recueillis sur la commune. Toutefois, la richesse du mobilier et la densité des vestiges (enclos) présents autour du retranchement suggèrent la présence d’un pôle important au Fief-Sauvin à la fin de l’âge du Fer, évoquant des contextes particuliers, à l’image de ce que l’on met au jour dans les sanctuaires, les habitats privilégiés ou les agglomérations. En effet, la faible superficie de l’enceinte de “La Ségourie” pourrait signaler une occupation de type établissement rural aristocratique, fonctionnant avec tout un réseau d’enclos ou d’établissements périphériques. Néanmoins, les plans des enclos n’évoquent pas toujours ceux d’habitats ruraux. D’ailleurs, la morphologie d’un système d’enclos, dont la superficie atteint plus de 4 ha, pourrait s’apparenter à celui d’un sanctuaire gaulois (entre les lieux-dits “La Croix” et “Le Grand Nombault”).
220Une seconde hypothèse, ici privilégiée, suppose que l’on ait affaire à un retranchement fonctionnant en parallèle d’un habitat groupé situé sous les vestiges romains, dans les environs du “Grand Nombault”. Cette hypothèse justifierait davantage la présence du puissant rempart du “Camp de César” et surtout la richesse du mobilier – plus de soixante monnaies gauloises ont été découvertes, chiffre inhabituel sur des habitats ruraux de la région, même de rang élevé. On peut également supposer l’existence d’un site fortifié entouré d’un faubourg artisanal de “Type Zemplin”278.
Annexe 20 : Beaufort-en-Vallée (Andécaves)
221Nota bene : Depuis 2016, cette commune a fusionné avec d’autres pour devenir celle de Beaufort-en-Anjou.
222En 2004, à l’occasion d’un projet d’aménagement d’un lotissement sur 49100 m² au lieu-dit “Les Hauts Champs” sur la commune de Beaufort-en-Vallée (49), un diagnostic archéologique (dir. X. Dubillot, INRAP) permet la découverte, outre quelques indices d’activités agropastorales datées de la Protohistoire à la période contemporaine279, d’une nécropole où des pratiques funéraires et rituelles de la fin de La Tène D2 et de l’époque augustéenne sont reconnues (cf. p. 237, SA 147). En parallèle de cette opération et dans ses environs proches (lieu-dit “Les Marillères”), X. Dubillot et E. Girard de l’INRAP mettent au jour – dans le cadre de prospections pédestres de surface –, une “impressionnante quantité de fragments d’amphores sur une surface de plusieurs hectares” au lieu-dit “Les Marillères”280. La présence d’amphores de transition gréco-italique et Dressel 1 (a et b) indique l’existence d’une occupation remontant au moins au iie s. a.C. (La Tène C2). S’ajoute à ces artéfacts, la découverte, d’après la tradition orale, de nombreuses monnaies gauloises provenant du même site et éparpillées dans des collections privées281. Sept exemplaires sont connus, dont trois potins “à la tête diabolique” qui signalent des activités économiques.
223L’abondant mobilier reconnu au sol suggère une occupation étendue à une dizaine d’hectares, au minimum, se développant sans discontinuité jusqu’à la fin du Haut-Empire. L’envergure de ces découvertes et la présence des monnaies renvoient à un contexte privilégié d’habitat dépassant le statut d’une simple ferme isolée (même à caractère aristocratique) et permettent d’envisager l’existence d’un habitat groupé laténien qui perdure jusqu’à l’époque romaine, avant de connaître un déclin dans le courant du iiie siècle (cf. fig. 76, SA 147). Le site, localisé sur le versant nord de la vallée de la Loire (à environ 5,5 km de son cours actuel) et de son affluent l’Authion (distant d’environ 1 km), est implanté sur une plaine légèrement vallonnée, à environ 30 m NGF, en bordure du sommet d’une vaste éminence de 400 ha.
224Pour les périodes gauloise et romaine, l’organisation de l’habitat ne peut être précisée en l’absence de fouille. Néanmoins, le mobilier indique une période d’occupation privilégiée entre les ier s. a.C. et p.C. Cette phase coïncide avec la chronologie établie pour la nécropole qui témoigne pour la période gauloise de la présence d’une élite guerrière avec la mise au jour d’une épée.
225De fait, nous sommes en mesure de nous poser la question du lieu de vie des populations concernées par ces sépultures. De plus, les monnaies et l’abondance des amphores, attestent de l’importance du site dans les réseaux d’échanges commerciaux accréditant l’hypothèse d’un habitat groupé de la fin de La Tène (La Tène C2 à La Tène D ?).
226Enfin, il faut préciser que la découverte de deux oboles au type “La Chaloire” aux “Marillères”, une monnaie dont la diffusion se limite à une dizaine de sites centrés sur le Beaufortais, interroge sur la possibilité d’un centre de production monétaire dans ce périmètre et donc de la place de Beaufort-en-Vallée en territoire andécave à la fin de l’âge du Fer282.
Annexe 21 : Gétigné (Ambiliates)
227Au nord-ouest de la commune de Gétigné (44), à l’occasion de la construction d’une ZAC au lieu-dit “Toutes Joies” et à la suite de deux tranches de diagnostics (menées en 2007 puis en 2010), une fouille conduite en 2011 (Y. Viau, INRAP), favorise la découverte d’une forte densité de vestiges s’échelonnant sur une longue période d’occupation, soit de La Tène ancienne au début de La Tène finale. L’opération s’est déroulée sur la partie haute d’un plateau formé de la confluence de deux rivières, la Moine et la Sèvre Nantaise, sur une légère pente orientée nord-ouest/sud-est, à une altitude variant de 42 m à 28 m NGF (fig. 17).
Fig. 17. Localisation des opérations archéologiques menées à Gétigné (44) sous fond topographique (réal. J. Remy, d’après Viau 2014, 38, fig. 5).

228Deux secteurs distincts ont été décapés, l’un à l’est de 6000 m² qui n’a livré que très peu de vestiges datés, l’autre à l’ouest d’un hectare de superficie où a été reconnue la majorité des vestiges laténiens.
229La pauvreté du corpus céramique associée aux conditions d’interventions difficiles (inondation et sécheresse) n’ont pas permis d’attribuer chronologiquement toutes les structures, ni d’établir un phasage précis du site283.
230Ainsi, les informations obtenues pour La Tène ancienne et moyenne sont très lacunaires. Au moins un tronçon de fossé et deux bâtiments sur sablières ont été reconnus pour La Tène moyenne. Durant la phase suivante, à la transition entre La Tène moyenne et La Tène finale, deux bâtiments s’ajoutent aux deux précédents (cf. fig. 68, SA 147). Au total, trois sont construits sur sablières basses, le quatrième est édifié sur poteaux plantés. D’autres trous d’ancrage de poteaux n’ont pu être rattachés à aucun plan de bâtiment. Plusieurs fosses empierrées, attribuées à cette période, n’ont pu être interprétées. Aussi, deux sections de fossés orientés est-nord-est/ouest-sud-ouest pour l’un et nord-nord-ouest/sud-sud-est pour l’autre, de faibles dimensions (1,20 m de large pour 0,40 m à 0,60 m de profondeur) partitionnent l’habitat.
231L’indigence des éléments datés avec certitude de La Tène finale est compensée par de nombreuses structures laténiennes (au sens large), dont quelques-unes dessinent des architectures complexes associées à des sablières basses, tandis que 21 autres forment des ensembles architecturaux construits sur quatre à six poteaux. Ainsi, 16 bâtiments peuvent être interprétés comme des greniers bâtis sur quatre poteaux. L’activité domestique est confirmée par la présence de plaques de cuisson, de restes de meules et de pesons (activité de tissage). Quelques fragments de scories évoquent également le travail du fer.
232Le secteur oriental, lui, a livré des trous d’ancrage de poteaux épars et un réseau fossoyé orthogonal correspondant certainement à des limites parcellaires qui n’ont pu être associées à aucune phase.
233Si la description du site apparaît relativement commune, celui-ci présente tout de même quelques singularités qui méritent que l’on s’y attarde. Premièrement, les tranchées de diagnostic réalisées préalablement à la fouille, qui se répartissent autour de ces deux secteurs, n’ont pas permis d’appréhender de système d’enclos qui matérialise habituellement les limites des établissements ruraux de la fin de l’âge du Fer284. Alors même que la surface évaluée s’étend sur plus de 9 ha. En effet, aucun habitat rural ouvert n’est connu pour la région à la fin de l’âge du Fer et l’organisation et la densité des vestiges reflètent davantage ceux d’un habitat groupé à l’image de ce qui a été reconnu aux Alleuds (49) ou à Trégueux (22)285.
234Toutefois, la densité des structures mises au jour sur cette fenêtre de fouille contraste avec la rareté des rejets et des activités représentées, même dans le cas d’une agglomération à vocation agricole. On peut également s’étonner de l’absence de certains mobiliers, témoins d’échanges commerciaux (importations) ou témoins de la prospérité de la population (monnaies, amphores, fibules, parure…). En effet, même la probable agglomération du “Clos des Primevères” à Entrammes (53) – fouillée dans des proportions à peu près similaires – qui pourrait être exclusivement tournée vers une activité agricole, a livré quelques rares éléments de parures et d’importations. On peut alors envisager que les opérations ne concernent qu’une zone périphérique de l’occupation qui se développerait davantage vers l’ouest, nichée à l’extrémité de l’éperon qui n’a actuellement fait l’objet d’aucune intervention. Néanmoins, à l’ouest et au sud des zones de fouilles, les sondages de diagnostics ont recoupé assez peu de vestiges, mal calés chronologiquement et datés au mieux de l’âge du Fer286. Ce constat ne va pas dans le sens du développement d’une occupation dense au-delà de l’hectare décapé, à moins que les tranchées évitent toutes soigneusement les structures.
235L’autre hypothèse, avancée par Y. Viau, est qu’il s’agisse d’un habitat périphérique à un établissement enclos, comme on en trouve sur quelques sites de la région287. Notons que les exemples connus offrent des occupations bien moins denses qu’à Gétigné288. De plus, cette proposition ne résout pas le problème de l’absence de détection d’un enclos, c’est pourquoi elle n’est pas favorisée. Enfin, nous ne pouvons pas tout à fait exclure la possibilité d’un habitat rural en aire ouverte. Celui de “Bel Air 2” aux Herbiers (85), daté de La Tène moyenne et de La Tène finale, pour lequel aucun fossé d’enclos n’a été mis en évidence289, pourrait d’ailleurs également illustrer ce type d’occupation (fig. 18).
Fig. 18. Plan des vestiges de La Tène moyenne et finale, mis en évidence sur le site de “Bel Air 2” aux Herbiers (85), lors des évaluations archéologiques conduites en 2000 et 2001 (réal. J. Remy, d’après Jego 2000, fig. 4 et Jego 2001, fig. 3).

236Finalement, l’étendue de l’habitat reste à confirmer et il paraît imprudent de statuer sur la nature du site en l’état actuel des données. La fouille n’a pas offert une perception claire de la densité des architectures pour chaque phase d’occupation, mais seulement pour un temps long.
Annexe 22 : Guérande (Namnètes)
237À l’ouest du territoire namnète, la commune de Guérande (44) et sa région sont implantées dans un paysage cerné par l’océan Atlantique précédé de marais salants, au sud par l’estuaire de la Loire et à l’est par les marais de la Brière. Si la ligne de rivage actuelle de l’océan est distante de 6/7 km du site, les études paléo-environnementales montrent qu’elle était certainement plus proche à l’âge du Fer du fait d’une régression marine qui s’amorce vers la fin de cette période pour s’achever dans le courant du ive siècle290.
238L’occupation de cette région débute dès le premier âge du Fer et se développe à la fin de La Tène autour d’une économie agricole et salicole, qui n’a jamais fait l’objet d’une réelle synthèse291. Ainsi, on note une importante occupation rurale avec les établissements de “Villejames” ou de la “Métairie de la Lande”, mais également des vestiges d’habitat ouvert aux “Hauts Trébissin”292 et des traces d’activités salicoles (enclos à fonction artisanale de “Bréhadour” (cf. fig. 89, SA 147).
239Au centre de cet environnement – complété par la présence de toute une série d’enclos identifiés par photographies aériennes293 – et distant de 500 m au nord-est de la ville médiévale, une occupation de La Tène finale a été mise en évidence par une succession d’opérations de sauvetages et préventives conduites entre les années 1970 et 1990. L’ensemble de ces découvertes est localisé à l’emplacement d’une probable agglomération romaine qui se développe sur environ 20 ha à 25 ha sans discontinuité avec l’époque gauloise jusqu’au iie s. p.C.294. Implantés sur une butte naturelle – qui constitue l’un des plus hauts reliefs dominant le littoral (entre 40 m et 55 m NGF) – au “Moulin de Beaulieu” et sur son bas versant sud au lieu-dit du “Clos Flaubert”, ces vestiges de La Tène finale s’étendent sur un secteur de 4 ha minimum (et jusqu’à 7 ha).
240Les premières observations les concernant reviennent à M. La Ferté qui procède à une fouille de sauvetage avec le Groupe de Fouilles du Centre de Recherches Archéologiques de la Presqu’Île Guérandaise, en 1974, lors de la construction d’un lotissement295. Deux occupations, se succédant entre le ier s. a.C. et le début du iie s. p.C. sont mises au jour. Puis en 1990, une évaluation est réalisée sur 5 ha, sous la direction d’Y. Gracia, lors de travaux de construction d’un lycée. Une occupation de la fin de La Tène y est identifiée sous des vestiges datés du début de la période romaine, dans des conditions d’interventions difficiles et limitées par le terrain qui devait être rapidement libéré. En effet, sur les soixante sondages mis en œuvre (larges de seulement 0,75 m à 1,25 m), seuls quinze d’entre eux ont fait l’objet d’un nettoyage et d’un relevé296. Enfin, en 1996, préalablement à la construction d’un lotissement, une fouille de sauvetage (sur 1500 m²), dirigée par L. Pirault (AFAN), au lieu-dit “Le Clos Flaubert”, met en évidence une occupation bien stratifiée de la fin de l’âge du Fer, caractérisée par un habitat ouvert qui livre un abondant mobilier céramique297. L’étude stratigraphique permet d’établir la présence de deux occupations se succédant entre la fin de La Tène C2 et la fin de La Tène D2, puis d’une occupation romaine des ier et iie s. p.C.298.
241Ainsi, sur les 4 ha désignés, l’occupation se matérialise par des structures en creux (fosses, réseau de fossés, trous d’ancrage de poteaux) et des niveaux en place conservés (identifiés en 1990 puis en 1996). Les importations sont représentées par des fragments d’amphores gréco-italiques et républicaines (Dressel 1A et 1B) ainsi que par deux fragments de céramique campanienne299.
242Au “Moulin de Beaulieu”, la fouille conduite en 1990, a également permis d’attester la présence de puits, de foyers, d’une possible citerne, d’une cave ou d’un silo et surtout d’un four de potier300. Plus au sud, au “Clos Flaubert”, un large fossé de 2 m de large (pour 0,40 m de profondeur) pourrait constituer les restes d’un enclos d’environ 30 m de côté. Quelques mètres plus au nord, sous le tracé d’une voie romaine, une large fosse rectangulaire de 1,40 m de côté, bordée sur son côté ouest par un appareil en pierres sèches, mérite d’être signalée pour la dépouille d’un petit cheval qu’elle contenait. Ajoutons, non loin de là, la découverte sous un temple octogonal de l’époque romaine installé en bord de la voie, d’un petit édifice subcirculaire sur poteaux plantés de plus de 25 m², en partie arasé par l’occupation romaine. Il est constitué d’une pièce centrale autour de laquelle s’articule une sorte de “portique”301. Cinq petites fosses comportant des ossements calcinés (humains ?) ont été mises en évidence à l’intérieur et en bordure du portique. Le niveau de sol associé à ces structures comprenait du mobilier céramique (huit restes de vases hauts à épaulement et deux vases de stockage) et un billon armoricain. Un niveau de destruction composé de torchis et de charbons de bois scelle cet état daté de La Tène finale. La fonction cultuelle du monument qui succède à ce bâtiment, la nature des vestiges et la proximité avec la sépulture inhabituelle d’un équidé interroge sur la possibilité d’un lieu rituel de la fin de l’âge du Fer au “Clos Flaubert”.
243Enfin, notons que l’étude parcellaire montre que les fossés des sites du “Moulin de Beaulieu” et du “Clos Flaubert” – tout comme l’enclos artisanal (salicole) de “Bréhadour”, localisé 500 m plus au nord – suivent des orientations identiques.
244Finalement, la densité des vestiges mis au jour autour du “Moulin de Beaulieu”, l’absence d’enclos limitant cette occupation et son évolution à l’époque romaine sous la forme d’une probable agglomération suggère l’existence d’un habitat groupé de La Tène finale302 qui se développe peut-être dès le début du iie s. a.C.
245Toutefois, du fait de la présence d’une occupation dense à vocation artisanale (production de sel) et agricole dans les environs, cette hypothèse doit être nuancée. En effet, on ne peut pas totalement exclure la possibilité d’un établissement rural dont les fossés d’enclos auraient jusqu’ici échappé aux opérations archéologiques. L’environnement évoque un réseau d’établissements ruraux alliant des activités agricoles et salicoles, constituant les différentes composantes d’un terroir au sens d’un regroupement de domaines agricoles, sur plus d’une centaine d’hectares, éventuellement à la charge d’une autorité303. En effet, la configuration du territoire de Guérande à la fin de l’âge du Fer rappelle le vaste terroir agraire de la ZAC “Object’Ifs Sud” structuré par un réseau de plusieurs établissements qui coexistent avec des habitats périphériques304.
246Bien que les indices d’un espace à vocation religieuse orientent davantage vers l’hypothèse d’une agglomération laténienne, en l’état actuel des données il reste difficile de trancher en faveur de l’une ou l’autre de ces propositions.
Annexe 23 : Blain (Namnètes)
247Les deux dernières agglomérations laténiennes potentielles que nous souhaitons aborder correspondent à des indices ténus de la fin de l’âge du Fer mis en évidence sous une agglomération secondaire romaine.
248La première, située sur la commune de Blain (44), toujours en territoire Namnète, est localisée à une trentaine de kilomètres au nord de Nantes. Le bourg actuel s’étend sur le léger versant sud d’un plateau à environ 20 m NGF au contact de l’Isac, rivière dont le lit actuel a été modifié au début du xixe siècle lors de la construction du canal de Nantes à Brest.
249Les traces d’une occupation romaine sont renseignées dès le xixe siècle305 mais il faut attendre 1999 pour qu’un suivi systématique des travaux, mis en place par le SRA des Pays de la Loire, conduise à la découverte des premiers vestiges datés de La Tène finale (cf. fig. 69, SA 147). La fouille menée en 2000 par l’INRAP livre, à l’est du bourg de Blain, près de la place Jollan de Clerville, un ensemble de fossés à fonction parcellaire (et sans doute drainante) ainsi qu’une petite fosse, des éléments datés de cette période. Une palissade a également été reconnue sur 10 m de long en bordure de l’un des fossés. Des fragments de clayonnages, de torchis et des vases de stockage signalent la présence d’habitats, toutefois la surface appréhendée est trop restreinte pour permettre la caractérisation fonctionnelle de ces vestiges qui se développent visiblement hors de l’emprise de fouille vers le nord-ouest306.
250Nous nous attarderons plus spécifiquement sur l’ensemble identifié en 2002, à 150 m de distance justement dans cette direction, rue de Nantes, dans le périmètre de l’agglomération romaine, supposée couvrir entre 20 ha et 25 ha307.
251Les traces d’habitats de La Tène finale mises en évidence se répartissent de manière orthogonale de part et d’autre d’une aire de circulation de 7 m de large, constituée de graviers roulés et de fragments de céramiques sur une épaisseur de 5 cm à 10 cm. Cet aménagement s’apparente fortement à un espace de voirie. L’habitat en lui-même est caractérisé par de nombreux trous d’ancrage de poteaux, indices de multiples reconstructions, de palissades à poteaux jointifs, de tranchées de fondation, voire de sablières basses (parallèles à l’aire de circulation) témoignant d’une architecture de terre et de bois sans qu’aucun plan de bâtiment n’ait pu être mis en évidence au moment de la fouille308. La présence de restes d’amphores gréco-italiques (Dressel 1A) renseigne sur l’intégration du site dans un circuit d’échanges mais aussi sur la chronologie de cette occupation, actuellement limitée à La Tène D1 (pour laquelle deux phases ont été reconnues). Quelques déchets attestent dans ce secteur d’une activité métallurgique (scories et parois de fours vitrifiés).
252Si ces indices restent pour l’heure ténus, ils reflètent tout de même une organisation rigoureuse et une densité de structures, sur une surface pourtant réduite (370 m²), des caractéristiques peu fréquentes en contexte d’habitat rural. De plus, la documentation ancienne mentionne la découverte de deux statères d’or vénètes provenant du bourg de Blain309. Ajoutons à ces arguments et sur la base de l’étude des mobiliers – présentée par O. Nillesse (INRAP) – issus de la fouille menée rue de Nantes, que la présence de céramique tournée et de restes de bracelets en lignite atteste d’un habitat suffisamment puissant pour capter ce type de mobilier. En effet, si le tour rapide apparaît certainement dès le iiie s. a.C., seuls de rares centres semblent en bénéficier au début de La Tène finale, la vaisselle tournée étant particulièrement rare en Loire-Atlantique (Information orale, A. Levillayer). Le développement d’une agglomération – entre l’époque augustéenne et le début du ive siècle – inscrite au carrefour de deux importantes voies romaines Angers/Vannes et Nantes/Rennes suggère le maintien à l’époque romaine d’un centre prééxistant malgré le hiatus constaté à La Tène D2.
253Il convient néanmoins de rester prudent quant à la mise en évidence de ce hiatus puisque des amphores de type Dressel 1B auraient été découvertes entre 1868 et 1902, près du lieu-dit “Champ de Foire”, une parcelle justement localisée au sud de la route de Nantes310.
Les habitats enclos aristocratiques
254Comme pour les sites fortifiés, les habitats enclos aristocratiques sont présentés par de courtes notices et regroupés par territoire. La description des sites se concentre principalement sur les critères évoqués précédemment.
Annexe 24 : Chez les Osismes
Le site de Paule (22)
255Les vestiges de la résidence de Paule (22) sont mis au jour en 1988, alors qu’une partie de l’enceinte était encore en élévation311. Le réaménagement de la route nationale 64 entraîne, en effet, la réalisation d’une fouille de sauvetage programmée, dirigée par C. Le Potier. L’importance des vestiges exhumés lors de cette première opération encourage la poursuite de fouilles programmées entre 1989 et 1990, conduites par J.-C. Arramond. Elles se prolongent ensuite jusqu’en 2001, par un long programme mis en place par Y. Menez. Des campagnes de sondages ponctuels, toujours sous la direction d’Y. Menez et en collaboration avec A. Villard-le-Tiec d’une part et M. Berranger d’autre part, viennent compléter ces treize années d’étude sur le site gaulois de “Saint-Symphorien”. Au total, ces campagnes de fouilles parviennent à documenter près de 5 ha d’un vaste site dont nous allons succinctement rappeler l’évolution chronologique.
256De fait, l’établissement de Paule connaît six phases de construction entre le vie siècle et la fin du ier s. a.C., durant lesquelles il sera progressivement agrandi et monumentalisé jusqu’à son abandon (fig. 19). Le premier habitat, édifié à la fin du premier âge du Fer, correspond à une enceinte curviligne contre laquelle s’adosse un enclos, probablement destiné au bétail. D’une surface supérieure à 1 ha, il accueille une unité familiale (une maison) ainsi que ses dépendances (ateliers de tissages et souterrains).
Fig. 19. Paule, “Saint-Symphorien” (22) : plans simplifiés des cinq premières phases d’occupations de l’enclos résidentiel (DAO J. Remy, d’après Menez 2008, 524, vol. 2, fig. 502).

257Il est en partie détruit et complètement restructuré entre la fin du ive siècle et le début du iiie s. av. n. è (phase 2). Deux enclos quadrangulaires accolés sont alors construits, l’un destiné à la résidence, l’autre servant d’avant-cour.
258Cet habitat, dont la taille des fossés et la présence de tours portières indiquent déjà un état monumental, connaît de nouvelles modifications dans le courant du même siècle. La partie résidentielle est alors fortifiée (phase 3), c’est-à-dire entourée de deux lignes de remparts, de forme quadrangulaire, précédés de profonds fossés – qui atteignent 3,50 m de profondeur pour 5,70 m de largeur à l’ouverture pour la ligne extérieure. L’entrée est contrôlée par un bâtiment rectangulaire à étage d’environ 60 m² d’emprise au sol. L’avant-cour est elle aussi monumentalisée, ceinte par des fossés de 2,50 m à 4,50 m de profondeur.
259La phase suivante (phase 4), au cours du deuxième quart du iie s. a.C., est marquée par l’incendie du secteur principal de l’habitat qui est reconstruit et agrandi. Il regroupe alors le logis principal, un vaste bâtiment rectangulaire de 50 m de long et un puits abrité sous une construction sur poteaux plantés d’environ 60 m² d’emprise au sol. Durant cette période de reconstruction, tous les souterrains des phases précédentes sont définitivement comblés. L’avant-cour, qui n’a pas été endommagée par l’incendie, elle, ne connaît pas de modifications majeures. En parallèle, le cœur de l’habitat est intégré à une vaste enceinte, associant un rempart à poteaux verticaux et un fossé d’environ 3 m de profondeur. Les différents sondages réalisés sur cette fortification n’ont pas permis de percevoir l’intégralité de son tracé – elle est fouillée sur quelques dizaines de mètres de long – néanmoins, avec l’appui de relevés topographique et lidar, la surface qu’elle ceint a pu être évaluée à une dizaine d’hectares au minimum312. Celle-ci accueille différentes constructions dont quelques-unes ont été appréhendées lors des campagnes de fouilles. On compte notamment un bâtiment fermé, édifié au sud de la zone résidentielle et constitué de trois ailes qui cloisonnent une cour intérieure. La réalisation d’analyses sédimentologiques (dosage des phosphates) a permis d’y reconnaître une écurie313. À 70 m à l’est du secteur résidentiel principal, un enclos carré de 30 m de côté est bâti. Cette enceinte, caractérisée par des fossés de 2 m de profondeur et une entrée probablement munie d’un porche, protège une construction sur quatre poteaux, interprétée comme un grenier. Un second enclos rectangulaire plus imposant (2000 m²) a été reconnu 90 m plus à l’est. Celui-ci reçoit plusieurs bâtiments, dont deux aux caractéristiques architecturales exceptionnelles. Un premier bâtiment rectangulaire édifié sur neuf poteaux de 42 m² correspond, d’après Y. Menez, aux fondations d’un vaste grenier314. Le second, qui couvre une superficie d’environ 240 m², ne trouve d’équivalent que sur certains oppida d’Europe. L’originalité de son plan permet à l’archéologue d’établir un parallèle avec les horrea, ces vastes entrepôts de l’époque romaine, ou avec des granges du haut Moyen Âge315.
260Puis, dans le courant de La Tène finale de nouveaux travaux, modifiant la structure de l’habitat de “Saint-Symphorien”, sont réalisés progressivement durant une 5e phase. L’enceinte de la forteresse (la résidence principale de l’habitat) est de nouveau doublée, de manière à reproduire un plan similaire à celui de la phase 3. Deux entrées au nord et au sud de la forteresse offrent un accès direct sans passer par l’avant-cour. Si la nature des architectures implique une indéniable recherche de monumentalité, la complexité et l’ampleur des aménagements suggèrent un caractère résolument défensif à la résidence. En effet, les accès sont soigneusement aménagés de manière à contrôler les passages. Ainsi, les fossés (jusqu’à 3,10 m de profondeur) sont franchis par des ponts, qui débouchent sur des systèmes de porches aménagés dans l’épaisseur des remparts (talus massif). Aussi, l’accès à l’avant-cour est protégé par un coude à 90 degrés.
261La cour attenante au logis principal, qui atteint alors plus de 450 m² de superficie au sol – l’ampleur des fondations sous-entend l’existence d’un ou deux étages et d’une tour comprise entre le logis et le rempart –, accueille un grand édifice ayant certainement fonctionné à ciel ouvert. Son architecture originale, limitée au nord par une rangée de poteaux, au sud par des planches et à l’ouest par un probable portique, suggère qu’il s’agit d’un vaste espace collectif édifié dans la première moitié du ier s. a.C.316. À l’extérieur de l’enceinte principale, les enclos carré et rectangulaire, précédemment évoqués, sont modifiés. Certains bâtiments sont agrandis et les enceintes sont renforcées. Enfin, en 2008, une seconde enceinte périphérique supposée construite dans le courant du ier s. a.C. et pouvant couvrir une superficie estimée à 30 ha, a été restituée d’après des vestiges repérés au nord et à l’est du promontoire317. Cette hypothèse a depuis été revue et est aujourd’hui abandonnée (Y. Menez, information orale, avril 2017).
262Enfin, au cours des trois dernières décennies du ier s. a.C. et jusqu’à la fin du règne d’Auguste ou le début de celui de Tibère, débute une phase d’abandon et de démantèlement progressif de la résidence, de ses bâtiments et de ses remparts (récupération de matériaux). On note cependant que l’atelier de sidérurgie, installé à l’extrémité orientale de l’habitat reste en fonction jusqu’au iie s. a.C. En parallèle et dans le dernier quart du ier s. a.C., un enclos de 8000 m² à l’intérieur duquel plusieurs constructions ont été identifiées, est édifié à l’emplacement d’une ancienne nécropole de l’âge du Bronze, située à proximité de la forteresse, sur le versant sud de la ligne de crêtes. Les vestiges mis au jour dans cet espace attestent de cérémonies cultuelles “dédiés aux Mânes des ancêtres de la famille, qui, cinq siècles durant, ont résidé dans l’habitat”, qui se déroulent dans les premiers temps autour d’une vaste fosse creusée dans l’un des tumuli318. Il fonctionne vraisemblablement jusque vers la fin du iiie s. avant d’être démoli et abandonné.
263L’importance du statut des occupants de la résidence principale se lit à travers de nombreux indices immobiliers bien sûr, par la monumentalité des architectures, la perduration de l’habitat et ses capacités de restructurations, mais également par les témoins mobiliers : forte représentation d’objets personnels et d’éléments de parures, présence de vaisselle luxueuse (découverte de restes de chaudron, d’un fragment de simpulum), capacité d’importation lointaine – le plus gros corpus de restes d’amphores de l’Ouest, sans doute destinées aux banquets319. Enfin, la découverte de quatre statues anthropomorphes, exemplaires plutôt rares en Gaule, tend à renforcer la stature de l’habitat de Paule. Suite à l’analyse de ces rondes-bosses, Y. Menez propose qu’elles correspondent à des figurations d’ancêtres, ayant pourquoi pas servi à préserver leur mémoire collective320. D’autre part, les activités artisanales apparaissent diversifiées sur le site, au contraire des activités agricoles qui sont étonnamment peu représentées par le mobilier métallique (peu d’outils spécifiques). Effectivement, une production métallurgique, nécessitant la présence d’artisans spécialisés, est organisée au sein de l’établissement321. Le secteur concerné, situé près de l’entrée de l’avant-cour de la forteresse, correspond à un atelier de forge spécialisé (forge d’élaboration d’objets, pratique de la soudure, ajouts sableux et peut-être pollymétallurgie). Un autre atelier de sidérurgie, placé à l’extérieur du tracé supposé de l’enceinte extérieur de l’établissement, initialement attribué à l’âge du Fer, a finalement été daté du Moyen Âge (Y. Menez, information orale). Le travail des alliages cuivreux est également représenté, mais aucun atelier n’a été identifié. Cette activité semble s’être intensifiée au cours de l’occupation du site et semble assez régulière lors de la phase 5322. Ajoutons qu’une production d’or et le travail du verre sont également supposés. Enfin et pour conclure sur le statut de “Saint-Symphorien”, nous rappellerons qu’à l’issue de l’étude du mobilier métallique recueilli sur le site, K. Chanson conclut à un corpus équivalent à un site de statut intermédiaire entre l’établissement rural et l’oppidum323. Effectivement, à partir de la phase 4, le statut initial du site, correspondant à la résidence privée d’un riche propriétaire, peut être remis en question par la diversité des activités et indirectement par le nombre de la population qu’elle a attiré. Ce point sera plus longuement abordé à la fin de l’analyse (cf. p. 282, SA 147).
Le site de Laniscat (22)
264Nota bene : Depuis 2017, cette commune a fusionné avec d’autres pour devenir celle de Bon repos sur Blavet.
265Le site de “Rosquelfen” à Laniscat (22) a fait l’objet d’un diagnostic en 2005, puis d’une fouille préventive en 2007 (dir. E. Roy), conduite sur une superficie d’environ 2,8 ha. L’habitat rural mis au jour est installé sur le versant d’un plateau orienté au nord, entre 160 m et 165 m NGF, distant de 500 m du fleuve côtier du Blavet. L’établissement de “Rosquelfen” est caractérisé par un grand enclos quadrangulaire de près de 0,8 ha, édifié dans le courant du iie s. a.C. et dont l’occupation perdure jusqu’à l’époque romaine (cf. fig. 102, SA 147). Durant cette période (dès le milieu du ier s. a.C.), le site voit s’opérer d’importantes restructurations et agrandissements, complétés par une activité meunière prédominante. Puis, aux ier et iie siècles, l’établissement est progressivement remplacé par un hameau qui perdure jusqu’à la fin du iiie siècle.
266L’occupation laténienne, pour laquelle deux phases ont été reconnues, révèle une certaine organisation en secteurs bien différenciés : un secteur d’habitation, deux zones destinées à l’activité de meunerie, de mouture et de stockage et une cour. La présence de quinze greniers traduit une importante capacité de stockage des récoltes, sans compter quatre grands bâtiments longilignes pouvant correspondre à des granges ou à des étables. L’enclos principal, limité par des fossés (1,70 m de profondeur au plus), est ouvert par trois entrées équipées de portails.
267Les activités de stockage et de meunerie sont prépondérantes au sein de l’établissement laténien dépassant le cadre de productions familiales vivrières – au regard du nombre d’habitations324. Un enclos funéraire (probablement associé à l’élévation d’un petit tumulus) localisé non loin de l’habitat est daté, sans certitude, du iie s. a.C. et semble avoir été entretenu longtemps jusqu’au ier s. a.C.325. Enfin, peu avant la restructuration de l’établissement dans la seconde moitié du ier s. a.C., un lot de 547 monnaies osismes en or allié est enfoui au pied du talus d’enceinte.
268Finalement, cet établissement agricole de 7500 m², montre assez peu de signes ostentatoires ou de richesse, néanmoins la présence d’un dépôt monétaire pose la question du statut du propriétaire, car “globalement les sites ruraux d’habitat ouvert chez les Osismes ont livré très peu de monnaies isolées et cette très volumineuse trouvaille ne va pas dans le sens d’une monétarisation de leur économie au quotidien”326. Cette découverte signifie plutôt une richesse thésaurisée du ou des propriétaires de l’établissement.
Annexe 25 : Chez les Coriosolites
269L’établissement du Boisanne à Plouër-sur-Rance (22) est installé sur le sommet d’une colline qui culmine à environ 60 m NGF, dominant la vallée de la Rance à quelques centaines de mètres d’un rétrécissement de la ria. Deux campagnes de fouilles programmées, menées entre 1988 et 1989 en complément d’une opération de sauvetage (dir. Y. Menez), permettent de proposer le plan de cet habitat établi au contact d’un massif naturel de gneiss (fig. 20). Quatre phases d’occupation sont reconnues pour la période laténienne entre le vie siècle à la fin du ier s. a.C., durant lesquelles l’habitat est progressivement agrandi327.
Fig. 20. Plan de l’établissement du “Boisanne” à Plouër-sur-Rance (22) (DAO J. Remy, d’après Menez 1996, 25, fig. 12).

270Durant la troisième phase (du début au milieu du iie s. a.C.), la surface initiale du site est quadruplée et protégée par des systèmes de talus de terre parementés, doublés de profonds fossés (2,5 m de profondeur).
271Le développement s’accentue encore à La Tène finale (120 a.C.), l’établissement, qui s’étend alors sur 0,6 ha clôturés, s’organise autour d’une série d’enclos accolés, fermés par des palissades à poteaux jointifs, implantés dans les fossés de la précédente phase d’occupation328. Ainsi, les anciens talus sont progressivement arasés. Pour cette période, les plans de cinq bâtiments ont pu être identifiés, l’un d’eux atteignant 31 m².
272Un réseau de chemin, mis en place dès le vie ou le ve s. a.C., se développe dans le courant de l’occupation du site. L’activité agricole n’est attestée que par des fossés parcellaires présents autour de l’habitat (aucun grenier n’est signalé), tandis que l’élevage est confirmé par la découverte de restes de bovidés. Par ailleurs, les témoins en lien avec la métallurgie évoquent une activité épisodique. Enfin, il faut noter la découverte de quelques éléments mobiliers remarquables sur le site tels qu’un bracelet en verre, trois autre en lignite, une coupelle en lignite. De plus, les importations d’amphores italiques (1A ou 1B) sont accompagnées d’une olpé provenant d’Ampurias en Espagne329.
Annexe 26 : Chez les Vénètes
273Le site d’Inguiniel (56), localisé au nord-ouest du territoire vénète, est établi au milieu d’un paysage de colline, sur un replat culminant à 130 m NGF, entouré à l’ouest et au sud d’une crête qui le domine de 30 m. L’établissement de “Kerven-Teignouse”, qui surplombe d’environ 10 m de haut deux petits affluents du Scorff, a fait l’objet de fouilles programmées (depuis 1992 et jusqu’en 2015), dirigées par D. Tanguy (fig. 21).
Fig. 21. Plan de l’établissement de “Kerven Teignouse” à Inguiniel (56) (DAO J. Remy, d’après Tanguy 2012, 46, fig. 62b).

274Un premier habitat enclos apparaît dès le ve s. a.C., avant d’être agrandi au ive s. a.C., période qui marque une première phase d’essor. La céramique de qualité (richement ornée), découverte en abondance, témoigne alors d’une certaine prospérité330. Puis, au iiie siècle le site est restructuré par l’aménagement d’un enclos quadrangulaire central fortifié, auquel sont accolés deux autres enclos331. Les fossés de l’enclos principal, doublé par un talus, voire par deux talus sur le côté occidental, atteignent alors 2,50 m à 3 m de profondeur. Ces derniers sont ensuite comblés au iie s. a.C. pour accueillir une palissade. Durant cette période, l’enclos central à vocation résidentielle (1250 m²), équipé d’une entrée monumentale (tour portière), est adjoint de trois enclos accolés pour une surface totale de 2,8 ha. L’enclos oriental semble dévoué à une activité artisanale (métallurgie) et domestique, tandis que celui qui est localisé au nord, réservé à la métallurgie (forge) et au stockage des récoltes (trois greniers), comprend un vaste espace vide (probable place) traversé par une voie. Sur les dix bâtiments reconnus par la fouille, l’enclos central accueille les deux plus imposants (environ 60 m²), séparés par une palissade.
275Les déchets associés à la métallurgie signalent la pratique d’une activité qui dépasse les besoins d’un établissement rural ordinaire, comme l’illustre la découverte d’un creuset d’orfèvre, de moules de bronzier et d’un moule de bracelet. Notons également que la production de meules sur l’établissement est présumée durant La Tène finale. En plus d’outils témoignant d’activités agricole et métallurgique (pince de forgeron, lame en fer, hache en fer, faucille), la découverte d’un mors de cheval et d’une pointe de lance (arme ou équipement de chasse ?) évoquent un environnement social élevé, tout comme la monumentalité de l’enceinte332.
276Puis, au ier s. a.C., l’établissement évolue vers un habitat enclos de dimension plus modeste. La présence de mobilier de l’époque romaine (jusqu’au iiie siècle) renseigne d’une fréquentation du site durant au moins le Haut-Empire333.
Annexe 27 : Chez les Aulerques Cénomans
277L’établissement de “Beauregard” à Dissay-sous-Courcillon (72) a été presque intégralement dégagé lors d’une fouille préventive menée en 2004, sur le tracé de la future autoroute A28 (dir. O. Nillesse). Il est occupé sur une courte période, à La Tène D2, sans connaître d’importants réaménagements (fig. 22). Le site est caractérisé par un plan d’ensemble assez simple, c’est-à-dire un double enclos pentagonal dont les fossés peuvent atteindre jusqu’à 2,70 m de profondeur. Un troisième enclos, interprété comme un espace pour la gestion du bétail, s’y adjoint participant à la surface totale de cet établissement évaluée à 2,4 ha. La partie interne, la plus densément construite, est divisée en deux espaces par un fossé de partition qui s’ouvre en son centre par un système de portail334. Le nombre de bâtiments – dix dont deux correspondent à des habitations – et leurs superficies témoignent d’habitats modestes (33 m² au maximum), une impression renforcée par l’absence de parure.
Fig. 22. Plan de l’établissement de “Beauregard”, Dissay-sous-Courcillon dans la Sarthe (DAO J. Remy, d’après Nillesse 2004, fig. 4).

278L’étude des restes de faunes indique que l’élevage était pratiqué à des fins de boucherie. Un important travail de forge a été mis en évidence sur le site par la découverte d’outils et de nombreuses scories ferrugineuses.
279La modestie de cet habitat transparaît également à travers le nombre peu élevé de restes d’amphores qui indique qu’il est en dehors des circuits d’échanges à longue distance. Toutefois, la découverte de pièces d’armement au sein de l’établissement (deux lames d’épée, un fourreau) et d’un rasoir, instrument de toilette rare, semble se rapporter à la présence d’individu(s) d’un statut relativement élevé. L’organisation rigoureuse de l’espace et la consommation carnée – avec une proportion importante de jeunes individus (bovins) qui suppose une viande de bonne qualité335 – vont également dans ce sens. On peut donc supposer que la résidence de “Beauregard” était celle d’une famille aristocratique.
Annexe 28 : Chez les Andécaves
Le site de Bauné (49)
280Le site du “Haut-Soulage” à Bauné (49) est installé sur le versant oriental d’une butte-témoin (à environ 50 m NGF), à environ 14 km de distance de la ville actuelle d’Angers. Il est découvert en 1994, à l’occasion de sondages d’évaluation menés sur le tracé de la future autoroute A85, qui donnent lieu l’année suivante à des fouilles d’ampleur limitée (dir. E. Mare et A. Valais). L’occupation laténienne de cet établissement, qui semble circonscrite aux iie et ier s. a.C., se présente sous la forme de trois enclos emboités successivement, qui n’ont été que très partiellement dégagés (fig. 23). Les deux premiers enclos sont délimités par des fossés dont certains apparaissent imposants – de 2 m à 8 m de large pour 0,50 m à 3 m de profondeur336. Malheureusement, l’intérieur de ces espaces n’a pas été fouillé. Seuls deux tronçons de fossés et trois fosses ont pu être identifiés.
Fig. 23. Plan de l’établissement du “Haut-Soulage” à Bauné dans le Maine-et-Loire (DAO J. Remy, d’après Mare 1995, fig. 11).

281Au sommet du terrain, le plus petit enclos, de forme trapézoïdale de 70 m de côté, est délimité par d’imposants fossés de 3 m à 3,80 m de profondeur. D’après les observations de terrain, sa construction est postérieure à l’abandon des deux autres enclos337. Y. Menez, qui a visité le site en cours de fouille, nota la présence d’imposants trous d’ancrage de poteaux qui matérialiseraient, selon lui, l’existence d’une tour dans l’angle nord de cette enceinte338. À l’intérieur, des maçonneries de l’époque romaine, par lesquelles un probable temple à plan centré, ainsi que de rares structures laténiennes ont été mises au jour.
282Si les limites des enclos jumelées ne semblent plus fonctionner au moment de la réalisation de l’enclos occidental, la dimension de leurs fossés et la découverte en quantité relativement importante de restes d’amphores dans leurs comblements suggèrent que cet établissement bénéficiait d’un statut particulier, bien que les données de fouille soient très limitées.
Le site de Marcé (49)
283Le projet de construction d’un aérodrome sur la commune de Marcé (49), au nord-est de l’actuelle ville d’Angers est à l’origine de fouilles de sauvetage qui ont favorisé la mise au jour de deux établissements distants de 300 m, l’un situé au “Dreffoux”, l’autre à “Hélouine” (fig. 24). Tous deux sont occupés sur une courte période durant La Tène D1 et sont susceptibles de s’être succédé dans le temps, avec une datation légèrement antérieure pour le “Dreffoux” (La Tène D1a) et peut-être un peu plus tardive pour le second (La Tène D1b)339.
Fig. 24. Plans des établissements du “Dreffoux” et d’“Hélouine” à Marcé (49) (DAO J. Remy, d’après Nillesse 1998a, fig. 5 ; Nillesse 1998b, fig. 5).

284L’établissement du “Dreffoux” correspond à un enclos de forme quadrangulaire au plan assez irrégulier et de moins d’un hectare de superficie (environ 0,8 ha). Malgré la simplicité de ce plan, l’espace interne paraît rigoureusement organisé, avec un vaste secteur délimité par une palissade et des bâtiments répartis autour d’espaces vides, probablement pour faciliter la circulation. Au total, dix-sept structures bâties ont été identifiées, parmi lesquelles neuf greniers, auxquels s’ajoute un silo d’une capacité de stockage relativement importante. Les activités mises en évidence sont d’ordre domestique (tissage, filage) et agricole, ce qui apparaît tout à fait habituel pour ce type d’habitat. De plus, un nombre assez important de fragments de meules traduit une activité de mouture et donc de transformation des récoltes. La découverte d’une pince de forgeron – un outil rarement retrouvé dans ce type de contexte – suggère une activité métallurgique qui n’a pourtant laissé que peu de déchets (huit scories). Il ne s’agit donc certainement pas d’une activité de production, mais plutôt d’entretien du matériel métallique340. Malgré la modestie apparente de cet habitat – un anneau en lignite correspond au seul élément de parure –, la présence de 218 restes d’amphores italiques témoigne tout de même d’importations à longue distance, peut être permises par des surplus de production agricole comme l’évoque le nombre de greniers.
285Le site d’“Hélouine”, lui, est caractérisé par un grand enclos quadrangulaire d’un peu plus d’1 hectare, s’organisant suivant trois secteurs bien distincts et limités par des fossés parcellaires : un secteur correspondant à l’entrée du site, un autre interprété comme un espace d’avant-cour (pour la pratique d’activités collectives) et un secteur d’habitat. Cette dernière zone est ceinturée par des fossés de profondeurs relativement modestes (1 m à 2 m). Au moins dix-sept bâtiments ont été identifiés sur l’ensemble de l’établissement, dont cinq greniers, complétés par trois silos pour permettre le stockage des récoltes. Cet équipement ne paraît pas démesuré au regard du nombre de bâtiments reconnus, néanmoins la présence de restes d’amphores (246 restes) suggère une capacité d’importation, en supposant qu’elles aient été échangées contre un surplus de récoltes. Les activités mises en évidence sont identiques à celle du “Dreffoux”, à savoir l’agriculture (de manière indirecte par le stockage), la mouture et le tissage. La découverte d’une enclumette et de quelques scories renseigne de la présence d’une petite forge d’appoint pour réparer le matériel métallique341. Enfin, les effets personnels, limités à un bracelet et à une fibule, ne révèlent pas un environnement particulièrement aisé, tout comme aux “Dreffoux”. Cependant, l’agencement de l’habitat, dont l’organisation apparaît relativement rigoureuse, le nombre de bâtiments, qui dépasse les besoins d’une seule unité familiale et les restes d’importations lointaines témoignent d’un statut social plus élevé sur les deux sites, en comparaison des autres habitats ruraux de la région.
Annexe 29 : Chez les Namnètes
Le site de Nantes (44)
286Le site du “Bois Hue” au nord de Nantes (44), est installé sur le bassin versant est de l’Erdre, un affluent de la Loire, distant de 500 m de l’établissement. Découvert à l’occasion d’un projet de construction d’une ZAC, en 2009, seule la partie orientale de l’enclos a été dégagée lors de la fouille préventive – soit une surface minimale avérée de 0,35 ha –, menée sur près de 7000 m² (fig. 25). Une deuxième tranche de diagnostic, conduite la même année, en 2012, n’a pas permis d’intercepter la seconde partie du site pour laquelle la superficie totale reste inconnue, faisant ainsi obstacle à l’interprétation définitive de son statut.
Fig. 25. Plan de l’établissement du “Bois Hue” à Nantes en Loire-Atlantique (DAO J. Remy, d’après Levillayer 2012, 42, fig. 42).

287L’établissement est fondé dès la fin du ive ou au début du iiie s. a.C. il se développe durant La Tène D1, avant d’être abandonné autour de 100 a.C.342.
288L’enclos de forme trapézoïdale est formé de fossés atteignant jusqu’à 2,60 m de profondeur, doublés d’un talus de 2 m à 3 m de large. L’espace interne, organisé par au moins un fossé de partition, a livré vingt bâtiments – ne dépassant pas 34 m² – dont sept greniers. En dehors des traces d’activités domestiques habituellement rencontrées sur ces sites (mouture, tissage, métallurgie du fer et du bronze), on notera la présence d’importations de sel (présence d’augets et de godets à sel) en provenance du littoral ou du Pays de Retz. Outre une utilisation vivrière, on peut envisager leur emploi pour la production de salaisons.
289La proposition d’un statut aristocratique du “Bois Hue” tient principalement à des comparaisons régionales. En effet, les dimensions des fossés dépassent largement ce que l’on observe généralement pour la région. En effet, seulement 16 % de fossés dépassent 2 m de profondeur343. De plus, les amphores ont été recueillies en quantité relativement importante (400 restes), en comparaison avec les autres établissements de la région et notamment les cinq autres habitats ruraux enclos (de la même période) mis au jour dans les environs, à l’interfluve Erdre-Loire : “Le Clouët”, “Le Bois Saint-Lys”, “La Brèchetière” à Carquefou (44) et la “Maison Neuve” à Sainte-Luce-sur-Loire (44). Si les arguments sont assez limités pour qualifier cette résidence d’aristocratique, il regroupe au moins quatre des caractéristiques définies par Y. Menez qui témoignent d’un environnement privilégié : la profondeur des fossés, des importations lointaines, une capacité de stockage, une organisation spatiale des espaces. Ces caractéristiques sont d’ailleurs pour certaines comparables à celles mises en évidence sur d’autres sites retenus pour cette étude (“Brantonnet” à Guérande, 44 ; “La Bleure” à Cholet, 49 ; “Bellevue” à Thorigné-Fouillard, 35). D’autant, qu’il faut rappeler que le site du “Bois Hue” n’a pas été intégralement fouillé.
Le site de Guérande (44)
290Au nord de l’estuaire de la Loire, au sud-est de la commune actuelle de Guérande (44), l’établissement de “Brantonnet”, connu depuis 1993 grâce à des survols aériens (cl. de L. Pirault, AFAN), a fait l’objet d’une fouille préventive en 2009 à l’occasion de la construction d’une ZAC. L’intégralité d’un vaste enclos pentagonal d’environ 1,4 ha de superficie a été entièrement dégagé. Durant cette opération, sont mises en évidence six phases d’occupations successives s’échelonnant de la fin de La Tène ancienne ou du début de La Tène moyenne à la fin du ier s. p.C. L’établissement de plan complexe est constitué d’une double enceinte sur les flancs nord et nord-ouest, qui est triplée sur les côtés est, sud et sud-ouest, conférant à l’ensemble un caractère défensif (fig. 26). L’entrée orientale est dotée, dès le premier état de construction, d’un porche puis d’une tour portière. Les fossés qui délimitent l’enceinte atteignent 2 m de profondeur pour 4 m à 6 m de largeur. Le site conserve globalement la même morphologie durant les iie et ier s. a.C., avec une organisation bipartite est/ouest344. L’espace interne de cet habitat est fractionné en cinq ou six secteurs, séparés par des fossés talutés, parfois munis de portails qui évoluent au cours de l’occupation.
Fig. 26. Plan de l’établissement de “Brantonnet” à Guérande en Loire-Atlantique (DAO J. Remy, d’après Bellanger et al. 2013, 406, fig. 327).

291Durant La Tène D1 (de la seconde moitié du iie s. a.C. au début du ier s. a.C.), la métallurgie du fer et du bronze est attestée sur le site, tout comme la pratique de l’élevage induite par la présence d’enclos probablement destinés au parcage des animaux. Plus rare, la fabrication de céramique est supposée par la découverte de fragments de parois de four et de restes de soles à carneaux345.
292L’aspect monumental de cette résidence agricole est renforcé par la qualité de certains mobiliers qui y ont été recueillis : perle et bracelets en verre, une fibule, des vases “luxueux” de type coupe à haut col et des écuelles en “S” basses munies de décors lustrés. Il est nécessaire de noter que cet ensemble n’est pas isolé puisque l’angle d’un autre habitat enclos a été mis au jour au lieu-dit “La Lande” à quelques centaines de mètres de distance.
293Ajoutons que l’établissement se développe probablement au-delà de cette enceinte puisque le diagnostic mené en 2007 a révélé la présence, une centaine de mètres plus au sud, de rejets d’un artisanat de saunerie datés de La Tène finale (fragments de four à sel et augets notamment). On peut alors estimer un site étendu sur plus de 3 ha346.
294Enfin, précisons que le statut de l’établissement semble décliner dès le début du ier s. a.C. (à la fin de La Tène D1) et les fossés de l’enceinte interne sont alors comblés347.
Annexe 30 : Chez les Ambiliates
295Le site des “Natterries”, localisé sur le bord d’un promontoire, à 4 km au sud de l’actuelle ville de Cholet (49), a fait l’objet d’une fouille préventive entre la fin de l’année 1999 et le printemps 2000, couvrant deux tiers de la surface totale de l’établissement (dir. P. Maguer)348. Trois phases d’occupation ont été discernées entre La Tène ancienne et La Tène finale (fin de La Tène D1). La première phase voit la création d’un établissement agricole, au plus tôt au iiie s. a.C., d’une surface interne enclose d’environ 0,5 ha. Le site est dès lors doublé par un second fossé délimitant 1,1 ha. Lors de La Tène C2 (entre 175 et 150 a.C.), un vaste enclos quadrangulaire d’environ 2,3 ha est mis en place avec une zone de stockage placée à l’extérieur. Au début de La Tène finale, le site connaît une nouvelle restructuration, avec la construction d’un enclos trapézoïdale (fig. 27). La profondeur des fossés de l’enceinte varie de 1,60 m à 2,70 m (plus profonds au niveau des zones de passage). Notons qu’à cette période, une voie, longeant le site au sud, est mise en place et perdure jusqu’à l’époque moderne.
Fig. 27. Plan de l’établissement des “Natteries” à Cholet dans le Maine-et-Loire (DAO J. Remy, d’après Maguer 2000, 221, fig. 127).

296Le caractère exceptionnel de ce site repose sur le nombre significatif de bâtiments identifiés et sur l’ampleur de la superficie de certains (au moins trois bâtiments de plus de 100 m²), mais également, sur la puissance des limites de l’enclos, comparable au site des “Humelles” à Mûrs-Érigné (49). On note en effet, une mise en scène des espaces puisque la voie qui permet d’accéder à l’entrée de l’établissement, probablement située sur le côté nord, oblige ainsi le visiteur à longer le système talus/fossé sur environ 300 m. La voie dessert d’ailleurs un vaste ensemble architectural, organisé autour d’une cour de plus de 480 m², dont la fonction n’a pu être définie349. Si l’espace enclos délimite une superficie de 1,3 ha (en restituant l’angle nord-est non décapé), le domaine peut être estimé à environ 3 ha, en tenant compte de cet ensemble architectural à l’est et d’une importante zone de stockage à l’ouest – vingt et un greniers organisés autour d’une cour, construits dès La Tène moyenne. On remarquera que l’installation de ces équipements à l’extérieur de l’espace enclos indique une fonction ostentatoire ou dissuasive des limites de l’enclos, plus qu’une réelle fortification du site, tout comme à Guérande.
297Le caractère particulier du site repose également sur l’importance du corpus d’amphores et de la céramique exhumées (8745 NR, 744 NMI) qui dépasse largement ce que l’on observe pour les autres établissements ruraux de la région. La céramique se démarque également des découvertes locales (et notamment du site de “La Bleure”) par la qualité de fabrication de certaines pièces pouvant signifier une production artisanale destinée à une clientèle aisée. De plus, la présence d’amphores en grande quantité au moment de l’expansion maximale du site signale la mise en place d’un réseau d’échange avec l’Italie, à une date précoce, dès la première moitié du iie s. a.C.350. Ajoutons la découverte de deux pièces d’armement qui suggèrent la fréquentation d’au moins un individu armé.
298Enfin, le site est abandonné dès le début du ier s. a.C.
299Parallèlement à cette fouille, sur la même commune et à la même période (1999/2000), sur le tracé de la future autoroute A87, un autre établissement a fait l’objet d’une fouille préventive, au lieu-dit “La Bleure”, à 5 km de distance, en direction du nord-est (dir. G. Sandoz). Le début de l’occupation de ce site est plus difficile à déterminer. En effet, si de premiers vestiges remontent à La Tène ancienne (La Tène B), il est fort probable que la construction de l’enclos n’intervienne qu’au début de La Tène finale351. La fouille a permis de dégager l’intégralité de cette résidence enclose de près d’un hectare (fig. 28). Les limites de l’enclos sont moins impressionnantes qu’aux “Natteries” puisque les fossés atteignent une profondeur de 1 m à 1,70 m. Le talus estimé à 4 m de large s’ouvre sur le côté ouest sur une entrée large de 5 m à 6 m.
Fig. 28. Plan de l’établissement de la “Bleure” à Cholet dans le Maine-et-Loire (DAO J. Remy, d’après Sandoz 1999, pl. 3).

300Le caractère particulier du site, qui le différencie des établissements ruraux habituellement rencontrés, réside dans une forte structuration de l’espace, malgré un plan assez simple, ainsi que par l’important nombre de bâtiments (dix-sept comptabilisés) correspondant probablement à des habitats. De plus, l’ampleur de la capacité de stockage de ce site de production agricole permet de le situer, d’un point de vue hiérarchique, au-dessus des établissements ruraux classiques ouverts ou enclos – puisque quarante greniers ont été identifiés. Par contre, au vu du nombre de bâtiments d’habitation, il est difficile d’affirmer que cette capacité de stockage excède le cadre d’une agriculture vivrière352. Néanmoins, ces chiffres suggèrent une occupation du site par une cinquantaine de personnes au minimum qui dépasserait ainsi le cadre familial d’une simple ferme. De plus et malgré l’absence de mobilier exceptionnel – peu de fragments d’amphores, aucun élément de parure –, la découverte de quelques restes d’armement permet de supposer la présence d’une aristocratie guerrière. Finalement, cet établissement évoque un petit hameau, peut-être regroupé autour d’une personnalité de rang social élevé.
Les sanctuaires et espaces rituels
Les sanctuaires certains
Annexe 31 : Chez les Osismes
Le site d’Ouessant (29)
301Entre 1993 et 2015, des fouilles programmées ont été engagées par J.-P. Le Bihan sur l’île d’Ouessant, localisée à 20 km au large des côtes finistériennes. Elles font suite à des interventions de sauvetage conduites entre 1988 et 1992 dans le cadre d’un projet immobilier visant la construction d’un lotissement qui menaçait alors le site.
302Effectivement, une occupation longue, s’étendant du Néolithique à l’Antiquité tardive, a été appréhendée au centre de l’île (fig. 29). Un habitat groupé associé à une petite aire rituelle se met en place dès le Bronze ancien et perdure jusqu’au début de La Tène ancienne. Au premier âge du Fer, l’habitat groupé, qui se développe sur 2 ha, est organisé selon une trame régulière353.
Fig. 29. Ouessant (29), emplacement de l’espace cultuel laténien de “Mez Notariou” (réal. J. Remy).

303Les vestiges datés de La Tène finale ne sont pas suffisamment denses pour envisager la persistance de l’agglomération tout au long de La Tène, bien que l’existence d’un habitat ne puisse être totalement écartée. Quelques trous d’ancrage de poteau et de la céramique de La Tène finale signalent tout de même une présence certainement en lien avec une activité rituelle354. En effet, les principaux éléments concernant le second âge du Fer ont été localisés plus à l’ouest, sur le flanc occidental de la colline Saint-Michel, sur un petit replat limité à l’ouest et au sud par des thalwegs. Ils se caractérisent par une grande dépression, issue de creusements successifs (du Bronze moyen au haut Moyen Âge), dans laquelle a été recueilli un abondant mobilier laténien en position secondaire, c’est-à-dire mêlé à des artefacts de périodes diverses – des éléments d’armement sacrifiés, des restes de chaudrons, de socs d’araires, de récipients en bronze, des monnaies dont certaines présentent des coups de burin, quelques éléments de parure, un fragment de céramique importée de Grèce, un os humain, des céramiques ayant subi des bris rituels, etc. Des pratiques rituelles liées aux animaux (dépôts de sélections osseuses) sont attestées tout au long du fonctionnement de l’aire, soit sur environ 2000 ans. Le lot d’ossements pour La Tène finale est toutefois peu abondant, c’est pourquoi la tenue de banquets est exclue pour cette période355. Une activité métallurgique coexistant parallèlement aux pratiques religieuses est envisagée du fait de la découverte de nombreux fragments de lingots de type “currency-bars” et d’argile cuite associés à des fragments de tôles de bronze (des scories et fragments de minerai de fer). D’après J.-P. Le Bihan, l’ensemble de ces vestiges pourrait correspondre à des restes tardifs de destruction d’un sanctuaire laténien puis romain, situé probablement à proximité, mais non identifié par les fouilles.
304En supposant que l’habitat groupé, associé à cet espace rituel, ait perduré au-delà de La Tène ancienne, il est possible qu’il ait été détruit par des réaménagements plus récents. Mais l’hypothèse privilégiée est celle de constructions périphériques mal conservées en lien avec l’activité rituelle. En effet, il semble que la fonction du site de “Mez-Notariou” change radicalement à partir de La Tène moyenne avec une prédominance de l’activité religieuse356.
Le site de Douarnenez (29)
305À moins de 20 km de distance en direction du nord-ouest, le sanctuaire romain de “Trogouzel” est implanté au fond de la ria de Douarnenez (29), sur une petite hauteur à 48 m NGF. Le site, en partie exploré entre 1894 et 1899 par H. Halna du Fretay, a fait l’objet d’interventions dans la seconde moitié du xxe siècle à l’occasion de travaux routiers qui menaçaient le sanctuaire. Une fouille de sauvetage, dirigée par M. Clément en 1977, fut prolongée par deux années de fouilles programmées, complétées en 1984 par une dernière opération préventive toujours sous la direction du même archéologue (cf. fig. 118, SA 147).
306Trois états romains succèdent à une première construction en bois de La Tène finale. Le dernier, édifié vers 90 p.C., correspond à un temple monumental d’environ 40 m de diamètre, matérialisé par une cella centrale entourée de galeries périphériques. Les iie et iiie s. p.C. sont peu représentés et mal caractérisés. De nouveaux dépôts d’objets attestent d’une activité à la fin du iiie ou au début du ive siècle, après quoi le site est abandonné357.
307Du mobilier daté de La Tène ancienne ou moyenne (notamment de nombreux restes de céramiques estampées) a été recueilli en position résiduelle dans les différentes couches stratigraphiques du temple358. Il n’est associé à aucun niveau en particulier ni à aucune structure, mais il témoigne d’une fréquentation du site dès le début du second âge du Fer.
308Trois trous d’ancrage de poteaux, localisés sous les galeries du temple romain, constituent les uniques vestiges d’une construction du début de La Tène finale, scellée par une épaisse couche cendreuse, datée de 120 à 30 a.C. (La Tène D1b à La Tène D2b) d’après les analyses radiocarbones effectuées sur des charbons359. Cette couche, interprétée comme les restes de l’incendie de ce premier état en bois, était recouverte d’un probable remblai – décrit lors de la fouille comme un “blocage de pierre et dépotoir”360 – ayant livré un abondant mobilier de La Tène finale : restes d’amphores, armement, quelques éléments de parure (fibules et perles en verre), des coquillages, des restes d’ossements (anthropiques ?) et de la faune. Il faut ajouter à ces éléments, la présence, dans le niveau charbonneux, d’une plaque de bronze ornée au repoussé pouvant correspondre à un élément de paragnathide. Une importante quantité de monnaies gauloises et romaines provient de “Trogouzel”, mais il semble que la plupart des numéraires gaulois (au moins cinquante-et-un), notamment un lot de petits billons armoricains, soit issue d’une couche augustéenne. Il faut probablement les mettre en lien avec un rite de jet de monnaies du début de l’époque romaine (daté des trente dernières années avant le début de notre ère), pratiqué à l’entrée est du temple augustéen361.
309La faible densité des structures datées de La Tène finale entrave la restitution d’un plan de bâtiment. Néanmoins, la nature du mobilier recueilli, qui révèle un contexte particulier voire exceptionnel, ainsi que la chronologie du site, suggèrent l’existence d’un lieu à vocation rituelle et religieuse dès La Tène moyenne (voire dès La Tène ancienne), qui est remplacé par un sanctuaire à l’époque augustéenne.
Le site de Saint-Jean-Trolimon (29)
310Bien que l’histoire de la recherche sur le site de “Tronoën” à Saint-Jean-Trolimon (29) soit mouvementée et que très peu de documentation ne nous soit parvenue, la qualité des objets et leur abondance attestent de l’existence d’un sanctuaire laténien, comparable aux grands sanctuaires du nord-est de la Gaule (Picardie et Bourgogne). Implanté à moins de 2 km du littoral atlantique, sur un léger versant proche des côtes de la Baie d’Audierne, presque à égale distance de Quimper et de Douarnenez, le site est fréquenté dès le ve s. a.C. et jusqu’à la fin de l’époque romaine, voire jusqu’au Moyen Âge (cf. fig. 126, SA 147). Les premières découvertes de mobilier à “Tronoën” (céramique, fragments de statuettes et d’armes…) entrainent, dès 1875, diverses explorations qui bouleversent le site. À partir de 1878, les fouilles sont conduites par A. du Chatellier et son fils P. du Chatellier, qui ne laisseront malheureusement que très peu de notes et un vague croquis du péribole romain. Dans la seconde moitié du xixe siècle, l’interprétation du site, d’une étendue estimée à environ 25 ha, fait débat auprès des érudits. Les fouilleurs reconnaissent les vestiges d’un oppidum tandis que R.-F. Le Men, membre de la Société Archéologique du Finistère, identifie un poste militaire romain362.
311La majorité des collections de P. du Chatellier est acquise par le M.A.N. de Saint-Germain-en-Laye en 1924 – les autres étant dispersées dans divers musées bretons 363–, ce qui permet à A. Duval d’étudier, en 1990, quelques pièces de “Tronoën” conservées au musée départemental. Ces observations le conduisent à revoir l’interprétation du site et à proposer l’existence d’un sanctuaire gaulois et romain. Précisons que les fouilles, menées de façon peu méthodique, n’ont laissé que de rares indices quant à l’organisation du site laténien. En outre, il est vraisemblable que les vestiges de l’âge du Fer ont été largement bouleversés par la construction d’un bâtiment romain.
312D’un point de vue stratigraphique, l’ensemble des objets laténiens semble provenir d’une même couche, épaisse de 1,30 à 2 m, constituée de cendre et de charbons. Celle-ci était recouverte d’une strate de sable, déposée tardivement. La révision des données de fouille a permis de distinguer deux secteurs de fouilles364.
313Le premier, qui correspond au dégagement du péribole du temple romain au nord de la chapelle Notre-Dame de “Tronoën” (en 1876), a livré un important lot d’armements en fer, présentant des traces de mutilations et de déformations – vingt-cinq à trente épées dont certaines encore dans leur fourreau, des poignards, des restes de lances et de javelots... –, mais également du petit mobilier tels que des clés, des outils (couteaux, poinçon, pinces, faux, etc.), des objets de parure (des fibules du Hallstatt, de La Tène ancienne et moyenne, des bracelets, etc.) et de toilettes (rasoirs), des ossements d’animaux (surtout des chevaux) et deux mâchoires humaines365. Une vingtaine de monnaies gauloises, de la céramique de La Tène ancienne, moyenne et finale complètent le corpus.
314Au nord de ce premier secteur, les structures mises au jour entre 1877 et 1896 sont alors interprétées comme les vestiges de neuf maisons rectangulaires incendiées, de 5 à 6 m de long, constituées de soubassements en pierres et d’élévation en clayonnage366. Le manque de rigueur avec lequel la fouille de ces structures a été conduite – qui ont été incomplètement étudiées – autorise à douter de leur interprétation. Le mobilier qu’elles renfermaient (mêlé aux cendres de l’incendie) pose également question : des meules, de la céramique, de nombreux restes d’armes en fer et en bronze (notamment les restes d’un casque orné, de grande qualité), ainsi que des monnaies gauloises367.
315À 20 m au sud de ces aménagements, une sépulture (inhumation), identifiée lors des fouilles du xixe siècle, est datée de La Tène finale d’après A. Duval. Elle est délimitée par plusieurs pierres renfermant un squelette couché sur la face, accompagné de pièces d’armement en partie déformées, un soc de charrue, de la céramique, des bois de cerf, un squelette de chien et trois monnaies gauloises. La nature du mobilier – qui mériterait d’être à nouveau examiné – permet d’envisager une activité rituelle entre le ve s. a.C. et le début du iie siècle, sous la forme de dépôts d’armements (avec un temps fort entre le iiie et le iie s. a.C.), de parures (fibules), de céramiques. Il est possible que ce type d’offrandes se substitue progressivement, à la fin de La Tène moyenne, à des dépôts d’outils, puis à des dépôts de monnaies dans le courant de La Tène finale.
316La faible distance qui sépare la sépulture des dépôts mis au jour sous le temple romain suppose un lien direct entre ces vestiges, bien qu’il ne soit pas possible d’en définir la nature. S’agit-il d’un sacrifice rituel en lien avec le sanctuaire, ou bien le sanctuaire se développe-t-il au contact de la sépulture d’un personnage important ? En effet, il est aujourd’hui démontré que certains stigmates observés sur des armes traduisent des chocs ou des usures liés à l’usage du matériel, ce qui ne peut être vérifié dans le cas des pièces associées au défunt inhumé368.
Annexe 32 : Chez les Coriosolites
Le site de Saint-Malo (35)
317Le site des “Sept-Perthuis” est localisé au sud de l’agglomération gauloise d’Alet (35), à 3,5 km de distance, sur le versant occidental d’un des points les plus hauts d’un plateau qui domine l’estuaire de la Rance. Seul sanctuaire potentiel mis au jour sur le territoire coriosolite, il est découvert à l’occasion d’une prospection aérienne en 1976. Un projet de création d’une ZAC motive de premiers sondages d’évaluations qui donnent suite à deux campagnes de fouilles de sauvetage entre 1989 et 1990, menées sous la direction de C. Bizien et de T. Lejars369.
318Durant ces opérations, quelques rares éléments de mobilier de La Tène ancienne (céramique) sont mis au jour dans les comblements des différentes structures appréhendées. Mais, le fait qu’ils soient systématiquement mêlés à un mobilier plus tardif ne permet pas de faire remonter l’implantation du site à cette période. En effet, l’ensemble dégagé sur d’environ 1 ha révèle deux phases d’occupations entre La Tène moyenne et La Tène finale sans discontinuité chronologique (cf. fig. 124, SA 147).
319Un premier enclos trapézoïdal, comportant un angle légèrement désaxé à l’est et une entrée monumentale orientée sud/sud-ouest, se développe sur environ 700 m². Le fossé a d’abord fonctionné ouvert avant d’avoir accueilli un système de palissade370. À peu près au centre de l’enclos, un ensemble de fosses, imbriquées les unes dans les autres, est y implanté, occupant un espace de près de 300 m². Elles s’inscrivent dans un hémicycle s’ouvrant au sud. Effectivement, l’organisation des structures suggère un rayonnement à partir d’un centre, situé dans le prolongement de l’entrée. Des indices de stagnation d’eau ont été identifiés dans ces structures, ce qui signifie qu’elles aient fonctionné ouvertes au moins pendant un temps371. Plusieurs phases de creusements signalent de nombreux réaménagements.
320Une seconde enceinte, composée d’un double fossé, venant recouper l’angle est de la précédente enceinte, suit le même axe de construction. Le fossé interne a accueilli une palissade tandis que le second a fonctionné ouvert. La surface enclose est alors doublée (1800 m²). C. Bizien-Jaglin et T. Lejars ont envisagé que le double fossé de la seconde enceinte puisse correspondre à un passage voué à la déambulation, un type de rituel qui se développerait avec la romanisation372. Le tracé de cette enceinte, datée au plus tard de l’époque augustéenne, est conditionné par un fossé légèrement courbe qui longe l’angle nord-ouest, à l’endroit où les fossés de la seconde enceinte s’interrompent. Au nord de ce fossé, un ensemble de trous d’ancrage de poteaux s’organisent selon un plan circulaire d’environ 7 m de diamètre (probable bâtiment ?). Des fosses ont également été repérées dont l’une, large de 3 m, a été interprétée comme une fosse à combustion (présence de charbon et de blocs rubéfiés). L’ensemble de fosses imbriquées, mises en place dès le premier état, connaît son extension maximale durant cette seconde période.
321Adossé contre l’enclos interne du second état, un puits de section carrée est creusé dans la roche (sur 8,20 m de profondeur). La nappe phréatique maintenait un niveau d’eau constant d’environ 22 cm. Le fond du comblement de la structure est riche en matières organiques (sur 0,60 m), composées de rares ossements et de 873 fragments de bois provenant vraisemblablement de la destruction de structures (charpente, menuiserie, lattis). La nature des comblements indique qu’il servait uniquement à récupérer l’eau.
322Le mobilier associé à ces aménagements est peu abondant – quelques outils tels que des fragments de meules, des restes d’amphores gauloises et romaines, un fragment de bracelet en lignite, un fragment de lame d’épée du iie s. a.C. issu d’une arme pliée et brisée – et la majorité du mobilier métallique (douze objets en fer et quatre en bronze) provient des couches tardives liées à l’abandon du site. Les restes osseux, peu nombreux, ont été altérés par l’acidité des sols. Ils correspondent principalement à des restes de faune mis à part un fragment de fémur humain373. Finalement, le caractère détritique de ce mobilier, peu spécifique aux contextes rituels, ne suffit pas à affirmer la nature religieuse du site. De plus, la fréquentation des lieux s’interrompt à l’époque romaine, puisque les structures (puits, fosses, fossés) sont comblées dès la période augustéenne avec notamment des blocs de quartz dont certains, pigmentés sur leur face plane, sont susceptibles d’appartenir à une construction en pierres démontée au moment de l’abandon du site. Or, le développement d’un sanctuaire romain sur un substrat laténien est souvent un argument pour comprendre la nature des aménagements laténiens. Néanmoins, l’originalité des enclos appréhendés et l’organisation des fosses imbriquées n’évoquent pas non plus un contexte domestique d’établissement rural, voire rappellent même les aménagements mis en évidence à Gournay-sur-Aronde (60). Aucun plan de bâtiment classique n’a été identifié, ni aucune structure de stockage ce qui explique que C. Bizien-Jaglin et T. Lejars privilégient l’hypothèse d’un lieu de culte.
Annexe 33 : Chez les Vénètes
Le site d’Arzon (56)
323Sur la partie culminante (36 m NGF) de la pointe du “Petit Mont”, située à l’extrémité sud-ouest de la presqu’île de Rhuys sur la commune d’Arzon (56), un monument mégalithique néolithique s’élève face à la baie de Quiberon (cf. fig. 119, SA 147). D’après les fouilles programmées réalisées par J. Lecornec entre 1979 et 1989 – qui font suite à de premières explorations menées dans la seconde moitié du xixe siècle avant que le site ne soit classé aux Monuments Historiques en 1904374 – le monument, caractérisé par deux cairns jumelés auxquels succède un dolmen, est fréquenté durant La Tène, plus particulièrement à La Tène finale et jusqu’au ive s. p.C. Quelques fragments de vases datés du Bronze final pourraient également signifier une occupation durant la Protohistoire ancienne.
324La fouille de l’esplanade du cairn a livré un abondant mobilier de La Tène finale – des éléments de parures, une dizaine de monnaies et un abondant mobilier céramique375 – qui informe de l’importante fréquentation du monument mégalithique à la fin de l’âge du Fer. D’autres monnaies gauloises en bronze, issues des fouilles du xixe siècle, n’ont pu être retrouvées376. Cependant, aucune structure n’est réellement en lien avec le mobilier ramassé pour l’âge du Fer ainsi que pour la période antique – aucun temple n’est érigé. Pourtant, le caractère votif de l’occupation romaine est assuré par la présence de nombreux fragments de statuettes en terre blanche (800 restes), volontairement brisées. Un autel épigraphique en grès destiné à recevoir les statuettes a d’ailleurs été découvert à l’entrée du dolmen377. Seuls deux foyers domestiques, dont les fonctions sont difficilement interprétables, peuvent être associés aux couches stratigraphiques ayant livré le mobilier laténien.
325L’impressionnante construction néolithique bénéficie d’une localisation géographique intéressante, implantée sur un promontoire qui s’avance dans la baie de Quiberon, surveillant l’accès au Golfe du Morbihan, face au site de “Goulvars” (cf. supra p. 58). Il n’est donc pas surprenant que ce monument, encore en élévation à l’âge du Fer, ait pris un caractère sacré ou symbolique à l’âge du Fer, impliquant des fréquentations ponctuelles associées à des dépôts d’objets (rituels ?). L’intérêt pour ce monument durant La Tène est d’ailleurs confirmé par l’utilisation de deux stèles, datées de cette période, pour le réaménagement du portique d’entrée d’une des tombes à couloir378. Le monument fait ensuite clairement l’objet de pratiques votives à l’époque romaine.
326Ce site est un exemple particulièrement intéressant si l’on concède qu’il s’agit bien de pratiques rituelles à La Tène finale, puisque l’occupation ne laisse que peu de traces au sol. Aucune installation durable ne semble avoir été mise en place à la fin de l’âge du Fer. Les pratiques se sont organisées autour d’un monument déjà existant. On peut conclure de ces remarques qu’à la fin de l’âge du Fer, l’intérêt ou l’importance (symbolique) d’un lieu n’entraîne pas nécessairement la construction d’un bâtiment.
Annexe 34 : Chez les Aulerques Diablintes
Le site de Juvigné (53)
327Localisé à l’ouest du territoire Diablinte, le site de “la Fermerie” à Juvigné (53) est installé en plaine, dans un secteur peu vallonné. Il est découvert dans les années 1980 par le propriétaire et l’exploitant du terrain qui recueillent du mobilier remonté par les labours. Le mobilier métallique, les monnaies gauloises et romaines mis au jour sont déclarés à la Direction des Antiquités Historiques des Pays de la Loire, entraînant trois campagnes de sondages conduites par J. Meissonnier entre 1987 et 1989. Lors de ces opérations, un fossé aux dimensions imposantes (jusqu’à 3 m de profondeur) est mis en évidence, ainsi qu’un angle de bâtiment, distant d’environ 30 m. Au sommet du comblement du fossé, daté de la fin de l’âge du Fer, se développent trois murs parallèles qui appartiennent, selon les archéologues, à un temple romain et à son péribole (cf. fig. 120, SA 147). Cette interprétation induit la présence d’un lieu à vocation rituelle édifié dès l’époque gauloise et matérialisé par le fossé qui suit une orientation identique à celle des constructions romaines379. Cette hypothèse est renforcée par la nature pour le moins inhabituelle du mobilier recueilli380. Les prospections se poursuivent visiblement au moins jusqu’en 1991 puisqu’une lettre conservée au SRA des Pays de la Loire mentionne la découverte de nouveaux fragments de pièces d’armement.
328L’étude est reprise en 2014 dans le cadre d’un mémoire universitaire réalisée par S. Bossard qui engage à l’été 2016 une première campagne de fouille qui conforte les hypothèses émises par ses prédécesseurs. La présence d’une enceinte fossoyée laténienne – dont la chronologie n’a pu être précisée – de 3500 m² à 4000 m² de superficie, est confirmée. L’occupation interne est matérialisée par un ancien sol brun – conservé sur 40 cm d’épaisseur – dans lequel du mobilier (céramiques, mobilier métallique, armement en fer, éléments de parure...) daté des deux derniers siècles a.C., a été récolté en abondance. Quelques tessons de céramiques suggèrent une fréquentation des lieux dès le iiie s. a.C. Une série de fosses et de trous d’ancrage de poteaux est aussi dégagée, mais aucune organisation particulière ou aucun plan de bâtiment n’est mis en évidence381. Enfin, à l’extérieur de l’enclos, un sondage intercepte un chemin creux non daté, qui semble avoir fonctionné simultanément avec l’enceinte.
329L’étude des mobiliers découverts à cette occasion est en cours et apportera certainement des précisions concernant la chronologie du site. Toutefois, les éléments recueillis à la fin du xxe siècle révèlent d’ores et déjà l’importance de ce sanctuaire dont l’origine remonte au iiie s. a.C., d’après l’attribution chronologique de certaines pièces et perdure au moins jusqu’au iie s. p.C.382. Le corpus mobilier gaulois est composé de restes d’épées et de talons de lance attribués à La Tène de manière générale, les éléments de parure sont plus rares. On notera enfin l’important lot monétaire constitué de près d’une centaine de monnaies gauloises (sur un total de 385 numéraires) de provenances diverses, certaines sont attribuées aux Diablintes, d’autres aux Cénomans, aux Bituriges Cubi, aux Turons, aux Riedones, aux Coriosolites et aux Esuvii. Elles informent de l’important rayonnement de ce site, localisé près de la frontière entre les territoires diablinte et riedone. Enfin, ajoutons que soixante-dix numéraires romains et gaulois attestent d’une dégradation volontaire caractérisée par un coup de burin que l’on peut interpréter comme le résultat d’une pratique rituelle383.
Le site de Jublains (53)
330Le temple romain dit “de la Fortune” à Jublains (53) est découvert en 1835 par l’archéologue F.-J. Verger. Il effectue de premières fouilles jusqu’en 1840, qui livrent une dizaine de pièces en fer de l’âge du Fer (conservées au musée de Laval). Plusieurs campagnes d’explorations se succèdent ensuite dans le courant du xixe siècle et la première moitié du xxe siècle. Puis entre 1986 et 1991, l’étude du sanctuaire est reprise dans son ensemble par J. Naveau, qui entreprend chaque année des fouilles programmées. Celles-ci ont pour objectif final d’orienter la restauration du monument, classé aux Monuments Historiques en 1917. À cette époque, est mis en évidence un niveau stratigraphique daté de l’âge du Fer, dont l’approche se limite malheureusement à quelques sondages de reconnaissance.
331Aucun aménagement spécifique ne témoigne d’un lieu de culte gaulois à proprement parlé. Outre la découverte de mobiliers, seul ce niveau, interprété comme un paléosol parfois aménagé en surface par un lit de galets de quartzite induré par des encroûtements ferrugineux et un tronçon de fossé signalent une occupation antérieure aux constructions de l’époque romaine (cf. fig. 116, SA 147).
332La couche stratigraphique a été observée à différents endroits sous le sanctuaire romain et notamment contre le mur oriental du péribole. Le fossé peu profond (0,65 m de profondeur pour 0,75 m de large) qui la traverse a été identifié sur 32 m de long sous l’angle nord-ouest de la galerie du bâtiment principal du temple romain384. L’extrémité est du fossé, qui a reçu une palissade avant d’être remblayé, présente un retour vers le nord. Notons que son orientation ne sera pas reprise par la construction romaine.
333Le mobilier gaulois, lorsqu’il est contextualisé, provient du sommet du paléosol, mais aussi et en majorité des niveaux romains. La plupart des objets métalliques gaulois découverts sont fragmentaires, brisés et déformés. L’étude du mobilier céramique renseigne une chronologie allant de La Tène ancienne (ve-iiie s. a.C.) à La Tène finale, avec laquelle s’accorde le mobilier métallique385.
334Les strates antérieures à la maçonnerie romaine n’ont été observées qu’à l’occasion de sondages ponctuels, de fait l’organisation du site laténien ne peut être précisée. Cependant, le caractère remarquable du mobilier386, dont certains éléments remontent au début de La Tène et le devenir du site à l’époque romaine constituent des arguments suffisamment solides pour statuer de l’existence d’un sanctuaire gaulois à Jublains. Des couches ont révélé une phase de travaux, intercalée entre le niveau laténien et les fondations du monument romain édifié au début du ier s. p.C.387.
Annexe 35 : Chez les Aulerques Cénomans
Le site d’Allonnes (72)
335Le sanctuaire de la “Tour aux Fées” à Allonnes (72) est installé sur la petite butte des “Fondues” qui domine la rive droite de la Sarthe, au sud-ouest du Mans. Exploré par P. Térouanne entre 1953 et la fin des années soixante-dix, son étude n’est reprise qu’en 1993 par K. Gruel et V. Brouquier-Reddé qui mettent en place un programme de quinze années de fouilles programmées388.
336Les structures gauloises ont été identifiées sous des niveaux de remblais, scellés par des constructions liées à un sanctuaire romain (cf. fig. 117, SA 147). Si les structures laténiennes sont fortement arasées et certainement en partie détruites par les différents états de construction romains, on note tout de même une forte densité des vestiges appartennant à des phases comprises entre la fin du ive et le milieu du ier s. a.C.389.
337Deux bâtiments circulaires sont attribués aux phases les plus anciennes du site (La Tène ancienne), les autres aménagements sont vraisemblablement plus tardifs (datés entre la fin du ive et le milieu du ier s. a.C.). Ils se caractérisent par des constructions sur sablières basses et sur poteaux plantés390. Un sol lié à l’un d’eux a livré des potins.
338Une palissade, orientée nord-sud, a été reconnue sur plus de 50 m de long, visiblement associée à trois fosses ovales de même orientation, limitées par des poteaux. Elle borne le côté ouest d’un enclos quadrangulaire daté de La Tène D1-D2391.
339Les monnaies gauloises, abondantes dans cette zone (à l’est de la palissade), sont mêlées à des monnaies augustéennes, qui suggèrent un fonctionnement jusque dans le courant du ier s. a.C. Une activité métallurgique a aussi été mise en évidence à l’ouest de la palissade. Plusieurs autres trous d’ancrage de poteaux ont été observés, sans qu’ils révèlent une organisation particulière.
340Enfin, durant la dernière phase, qui précède la première construction romaine en pierres, un possible état en bois, attribué à La Tène finale pourrait avoir été édifié. Cette période est celle qui fournit le moins d’objets métalliques, mis à part les monnaies qui au contraire apparaissent alors en grand nombre392.
341L’ensemble du mobilier gaulois découvert sous le temple romain semble avoir subi des bouleversements, si l’on en croit son état très fragmentaire et souvent incomplet (pièces d’armement brisées, mais ne portant aucune trace de coup ou de torsion). Daté du ve s. a.C. au tout début de l’époque romaine, il est très probablement en position secondaire, rapporté avec de la terre sableuse pour servir de remblais afin d’asseoir le premier aménagement en pierre de l’époque romaine.
342Notons que la majeure partie des pièces métalliques (majoritairement des éléments liés à la guerre) appartient à la fin de La Tène B ou au début de La Tène C1 et que la céramique gauloise est quasiment absente sur le site393.
343Enfin, le sanctuaire se développe tout au long de l’époque romaine, sans rupture avec la fin de l’âge du Fer. Il est réaménagé entre 80-90 et 160 pour la construction d’un sanctuaire quadriportique fréquenté jusqu’au milieu du ive siècle. Il domine l’agglomération antique d’une cinquantaine d’hectares, dotée d’une remarquable parure monumentale.
Le site de Neuville-sur-Sarthe (72)
344En 2009, un diagnostic archéologique conduit sur la commune de Neuville-sur-Sarthe à l’emplacement de la future ZAC du “Chapeau” révèle la présence d’un sanctuaire installé sur une partie plane du plateau de Sargé, localisé à un peu plus de 4 km à l’est de la ville antique du Mans394. L’origine du site – qui fait l’objet d’une fouille exhaustive la même année – remonte au plus tôt à La Tène C2/D1 et il perdure jusqu’à la fin du iiie siècle. Il est caractérisé par la succession de deux états d’enclos fossoyés (peu profonds) entre La Tène C2 et La Tène D, puis par un enclos palissadé de 25 m à 30 m de côté à la fin de La Tène finale (LT D2b) ou au début de l’époque augustéenne, avec peut-être un état intermédiaire mal conservé395.
345Au centre de l’enclos du premier état, une petite fosse ainsi que deux trous d’ancrage de poteaux représentent les seuls vestiges en grande partie détruits par le sanctuaire romain qui leur succède (cf. fig. 121, SA 147). Toutefois, la découverte d’argile rubéfiée dans le comblement de ces structures induit l’existence d’un bâtiment aujourd’hui disparu.
346La majorité du mobilier, peu abondant, a été découverte en position secondaire, redéposée dans des couches postérieures. Trente-huit potins dits “à la tête diabolique” ont été mis au jour, ainsi que quelques restes d’armement (un fragment de paragnathide, un autre d’orle de bouclier, deux pointes de flèches), des restes d’éléments de parure (un bracelet et quatre fibules) et de rares fragments d’amphores de type Dressel 1A396.
347Un enclos curvilinéaire, attribué aux deux premiers états, est installé à proximité immédiate de l’enclos cultuel (à 3 m de distance). Aucun élément stratigraphique ou mobilier ne permet de préciser lequel des deux a précédé l’autre. Seule une partie de son tracé a été perçue lors de la fouille, limitant les interprétations liées à la nature de cet espace. La présence de quelques fragments de céramiques, d’argile rubéfiée et de témoins d’une activité de réduction (parois de four scorifiées) suggère que cette structure appartient à un habitat. Selon cette hypothèse, sa forme curviligne oriente vers une fonction d’enclos annexe à l’habitat principal (établissement rural ?).
348Le fait que les deux premiers états semblent liés (LTC2/D) au fonctionnement d’un établissement rural permet d’évoquer un contexte de sanctuaire privé. Cependant, la continuité chronologique et le maintien de l’orientation des aménagements durant l’époque romaine (baisse de la fréquentation dans le courant du iie siècle et destruction à la fin du iiie siècle), suggèrent un rayonnement allant au-delà du culte privé, probablement local et donc d’ampleur moindre que le sanctuaire d’Allonnes397.
Le site d’Aubigné-Racan (72)
349Dans le contrebas du petit promontoire fortifié, déjà évoqué, de la “Butte de Vaux” à Aubigné-Racan (72), se développe, un vaste complexe monumental entre le dernier quart du ier s. p.C. et le milieu du iie siècle (fig. 30). Malgré les recherches programmées conduites par J. Rioufreyt et C. Lambert depuis 1977, il n’est pas possible d’affirmer s’il constitue la parure monumentale d’une agglomération dont l’habitat n’a pas encore été identifié, ou s’il a fonctionné en parallèle de l’agglomération secondaire de Vaas, localisée 7 km plus à l’ouest398. En tout cas, le choix d’implantation de cet ensemble cultuel romain ne semble pas anodin. En effet, la commune d’Aubigné-Racan, occupée probablement dès le Néolithique, livre d’importants indices dès le Bronze final (IIb, IIIa). Des tumuli, localisés dans la plaine alluviale du Loir, sont attribués à cette période et probablement associés à un habitat dont quelques traces ont été perçues au sommet de la “Butte de Vaux” (en partie sous le rempart). Puis, le cimetière, qui s’étend certainement sur plusieurs dizaines d’hectares (si l’on en croit les prospections aériennes), est réutilisé à la fin du premier âge du Fer – dès le début du ve s. a.C. (cf. fig. 130, SA 147).
Fig. 30. Photographie aérienne de la “Butte de Vaux” à Aubigné-Racan (72) et de ses environs (Cl. J. Rioufreyt, vers 1975).

350Au début des années 1990, une série de sondages est réalisée aux alentours d’un grand temple romain à péribole, au lieu-dit la “Grande Pâture”, afin de vérifier des anomalies de résistivité apparues lors d’une prospection électrique. Une couche argilo-sableuse attribuée à La Tène finale (céramique, fibule, potin), couvrant plusieurs centaines de mètres carrés, est alors appréhendée399. Des ossements humains repérés dans l’une des coupes stratigraphiques témoignent de la présence d’une possible inhumation attribuée à La Tène finale. Celle-ci doit être mise en relation avec un dépôt de pièces d’armement du début de La Tène moyenne (La Tène C1) découvert à proximité, à l’occasion d’un autre sondage. Il semble que ce mobilier – des fourreaux d’épées, des lingots de type “currency-bars”, des lances et des umbos accompagnés de crânes de bovidés et de porc400 – ait été déposé en une seule fois, en zone humide, à l’emplacement d’un ancien marécage (trophée militaire ? évacuation liée à un sanctuaire ?). En outre, à environ 150 m plus au nord, à l’emplacement d’un autre petit temple romain, un fossé rectiligne a été reconnu sur quelques mètres, sous cet édifice. Il a livré du mobilier du premier âge du Fer ainsi qu’une fibule en bronze de Nauheim attribuée à La Tène finale401.
351Finalement, la succession d’indices d’activités funéraires et cultuelles, sur un site humide localisé dans la plaine alluviale en contrebas de la “Butte de Vaux”, sur une importante période allant du Bronze final à l’époque romaine, suppose la présence d’un lieu à forte symbolique religieuse, dont l’organisation spatiale ne peut être à ce jour précisée.
Annexe 36 : Chez les Andécaves
Le site d’Andard (49)
352Au début des années quatre-vingt la commune d’Andard (49), installée sur la rive droite de l’Authion, un affluent direct de la Loire, prévoit la construction d’un foyer-logement HLM dans le centre du bourg, ce qui entraîne la réalisation de plusieurs campagnes de sondages et de fouilles entre 1982 et 1985. X. Delestre, qui établit justement un bilan des connaissances sur la commune dans le cadre de sa thèse, est chargé de la conduite des différentes opérations dont certaines sont d’ailleurs à son initiative.
353Les premiers indices d’un lieu de culte romain et d’un niveau sous-jacent de La Tène finale sont mis en évidence sur le site du “Foyer-Logement” en 1983402. En effet, à proximité d’un temple construit à l’époque augustéenne, sous un bâtiment du ier siècle parallèle à un tronçon de voie orientée est/ouest, des vestiges du second âge du Fer ont été appréhendés (cf. fig. 125, SA 147). Les plus anciennes structures mises au jour se caractérisent par cinq trous d’ancrage de poteaux et deux fossés parallèles orientés est/ouest, de moins de 1 m de profondeur, dont l’un passe sous la cella du temple romain403. La présence d’une fibule de Nauheim et d’une obole de type Chalouère dans les remplissages permet de dater le comblement de ces fossés juste avant le principat d’Auguste, situant leur utilisation entre 80 et 30 a.C.404.
354Le comblement de l’un d’eux a livré une grande quantité de restes de faune, des fragments d’une calotte crânienne humaine, ainsi que des restes de clayonnage brûlés, probables témoins d’un bâtiment non identifié. Entre ces deux structures, les lambeaux d’un ancien sol ont été reconnus405. D’autres mobiliers attribuables à La Tène finale ou au début de l’époque augustéenne ont été découverts en quantité dans un niveau de terre sableuse : des fragments de bracelet, un anneau en verre, une bague en bronze, des fibules, deux céramiques, ainsi que des monnaies dont une division d’un statère namnète (BN 6725) et un potin dit “à la tête diabolique”.
355Entre 1984 et 1986, dans une parcelle située au sud-ouest du “Foyer-Logement”, quatre puits sont dégagés à environ 200 m de distance du temple (fig. 31). Leurs premières couches de comblement (de 2,50 m à 3,50 m de profondeur) contenaient du mobilier céramique laténien, signifiant l’origine gauloise (au plus tard) de ces puits. Dans leurs alentours immédiats, un lot de pièces d’armement – datées de La Tène moyenne ou finale406 – a été exhumé, sans que le contexte stratigraphique n’ait pu être précisé407. En dépit de cette carence documentaire, qui limite l’interprétation du site, on peut tout de même supposer qu’il s’agit d’un dépôt d’armes mutilées.
Fig. 31. Andard (49), localisation des puits ayant livré du mobilier laténien par rapport au temple romain du Foyer-Logement (réal. J.-P. Bouvet, DAO J. Remy).

356Au moins deux sites distincts ont donc été identifiés sur la commune d’Andard sans que l’on puisse clairement faire le lien (spatialement) entre les deux. Les mobiliers recueillis placent l’origine de l’occupation à La Tène moyenne de manière large avec une évolution continue jusqu’au milieu du ier s. p.C., période durant laquelle le sanctuaire (édifié à la fin de l’époque augustéenne) est abandonné. La nature des mobiliers du second âge du Fer et la fonction cultuelle de l’édifice qui supplante les aménagements laténiens permettent d’identifier un sanctuaire gaulois construit, bien que son organisation n’ait été que partiellement appréhendée par les fouilles et que son fonctionnement ne puisse être précisé. Par la suite, le bourg d’Andard est occupé par une agglomération secondaire, créée à l’époque augustéenne et qui perdure jusqu’à la fin du ive siècle408.
Des indices de sites sous les lieux de culte romains : les sanctuaires potentiels
Annexe 37 : Chez les Osismes
Le site de Quimper (29)
357Le site du “Parc-ar-Groas” à Quimper (29) est implanté en fond de ria, au sommet du plateau du Frugy, dominant le paysage environnant. Le promontoire, formé par un méandre du fleuve côtier l’Odet, est distant d’environ 3 km au sud de l’agglomération laténienne de “Kergolvez”. Découvert en 1876, ce site est d’abord interprété comme un poste fortifié de l’époque romaine par R.-F. Le Men qui dégage un ensemble bâti409. Les archéologues qui le succèdent dans le courant du xxe siècle, reprennent la documentation de fouille et notamment le plan dressé par leur prédécesseur, révisant la fonction des vestiges qu’ils pensent plutôt correspondre à une villa périurbaine abritant un petit sanctuaire410.
358À partir de 1990, l’urbanisation de l’actuelle agglomération de Quimper révèle progressivement les vestiges sous-jacents de l’âge du Fer, favorisant simultanément une réinterprétation de ceux de l’époque romaine, dès lors compris comme un vaste complexe cultuel411. Ainsi, les fouilles préventives menées sous la direction de J.-P. Le Bihan, archéologue municipal de la ville de Quimper, ont livré plusieurs tronçons de fossés peu profonds, dont l’un d’eux contenait un important lot de petits pots et de jattes hautes fragmentées de La Tène finale, interprété comme un dépôt rituel412. Des trous d’ancrage de poteaux répartis de part et d’autre des fossés ont également été appréhendés, certains étant attribués avec certitude à la fin de La Tène, d’autres n’ayant pas livré d’éléments de datation (cf. fig. 129, SA 147). Aucun plan d’aménagements ou aucune organisation particulière ne se dégage de ces structures. À quelques mètres plus à l’est, une urne funéraire datée du début de La Tène finale a été mise au jour lors des fouilles conduites au xixe siècle. La fosse cylindrique comprenait des ossements, dont des restes de boeuf.
359Finalement, les opérations archéologiques et les destructions subies par les terrains depuis l’Antiquité ne permettent pas de reconstituer une organisation spatiale cohérente du site pour La Tène finale. Les fouilles ont montré que l’activité se développe ensuite et sans discontinuité avec la fin de l’âge du Fer, de l’époque augustéenne jusqu’au ive siècle. Le complexe, composé d’une enceinte maçonnée de 120 m de long par 75 m de large, intègre alors six bâtiments. L’enceinte accueille également une nécropole à incinérations de La Tène ancienne, distante d’environ 200 m d’un probable établissement rural, dont l’existence est suggérée par la découverte d’un souterrain. Une stèle, découverte en position secondaire dans le sol du sanctuaire romain devait être associée à ces incinérations413.
Le site de Rosporden (29)
360Le site de “Buzit Bras” à Rosporden (29) se présente sous la forme d’un système d’enclos fossoyés, en partie comblés à La Tène finale, dont le tracé et l’emplacement sont repris à l’époque romaine pour l’élévation d’un temple rectangulaire maçonné (cf. fig. 122, SA 147). Le diagnostic, opéré en 2006, sur environ 1 ha (qui ne comprend pas la totalité du site laténien), n’a livré aucun élément mobilier significatif des lieux de cultes pour la période gauloise et romaine. La nature de l’opération archéologique en est certainement, au moins en partie, responsable puisque les vestiges protohistoriques n’ont pu être appréhendés dans les secteurs occupés par le sanctuaire antique. De plus, notons qu’une forte érosion du site, due à une longue tradition de mise en culture des sols, a induit la quasi-absence de mobilier recueilli lors du diagnostic. Une enceinte quadrangulaire de 150 m de côté, encore visible dans le paysage en 1986, doit certainement être mise en lien avec ces vestiges414. Aussi, la morphologie du plan de l’époque romaine permet de l’associer à un temple. Pour la période gauloise, le seul argument qui suggère une fonction rituelle repose sur la nature de l’occupation qui lui succède.
Annexe 38 : Chez les Coriosolites
Le site de Breal-sous-Montfort (35)
361Le sanctuaire rural antique de la “La Bouëxière”, sur la commune actuelle de Breal-sous-Montfort (35), est localisé à la marge orientale du territoire coriosolite, connu depuis la première moitié du xixe siècle par des mentions d’A. Toulmouche qui interprète alors les vestiges comme ceux d’une villa romaine. Dans les années soixante et soixante-dix, le site fait l’objet de destructions – certains murs sont démontés pour récupérer la pierre –, mais également de prospections clandestines au détecteur à métaux415.
362En fin de compte, le site n’est réellement appréhendé que tardivement puisqu’entre 1989 et 1991, il fait l’objet de reconnaissances aériennes qui révèlent la présence d’un enclos quadrangulaire implanté 40 m à l’ouest d’une construction en dur, cette fois interprétée comme un temple romain. Le diagnostic, réalisé en 1991 sous la direction d’A. Provost, permet d’évaluer le potentiel archéologique du site sur un peu moins d’un hectare (fig. 32).
Fig. 32. Breal-sous-Montfort (35), plan du sanctuaire romain de “La Bouëxière” et de ses antécédents gaulois (réal. J. Remy, d’après Provost 1991a, 11, fig. 4).

363Le complexe cultuel antique (de l’époque augustéenne jusqu’au milieu du iiie siècle), dont la vocation religieuse est assurée par le plan des bâtiments et le mobilier mis au jour, est constitué principalement d’un temple à cella et galerie périphérique, ainsi que d’au moins un autre bâtiment mal défini et d’un possible mur de péribole416. Il est implanté au sommet d’une colline schisteuse, surplombant la rivière de la Chaize de 30 m de haut. Au nord, cette colline est partiellement isolée du reste de la plaine vallonnée, qu’elle domine, par deux thalwegs.
364Sous le temple carré, les sondages ont permis de dégager une couche d’occupation de La Tène finale, ainsi qu’une structure en creux interprétée comme une possible sablière. D’après les informations de terrain, cette couche semble avoir été perturbée par les aménagements plus récents (sanctuaire romain) car elles ont également livré un peu de mobilier du ier s. p.C.417.
365Le mobilier laténien est représenté uniquement par la céramique, seul un billon riedone, dont on ne connaît pas la date d’émission (tardive ?), doit être mentionné, mais celui-ci provient d’un niveau remanié et daté de l’époque romaine418.
366Finalement, seul l’argument de la pérennité des lieux de culte concourt à supposer la présence d’un sanctuaire laténien, car aucun mobilier spécifique ni aucun plan de bâtiment n’ont pu être dégagés. Rappelons toutefois que l’enclos quadrangulaire (de 160 m de côté par 90 m), repéré en prospection aérienne, réserve peut-être encore des surprises.
Annexe 39 : Chez les Vénètes
Le site de Vannes (56)
367Le sanctuaire romain de “Bilaire” est établi à 2 km au nord du centre historique de la ville de Vannes (56), sur la partie supérieure du versant est d’une colline. Les vestiges de murs romains sont mentionnés dès le xixe siècle, puis partiellement dégagés à l’occasion de deux campagnes de sondages réalisées suite à un projet de construction d’un lotissement communal, qui motivent la réalisation de deux campagnes de fouilles programmées en 1999 et 2000. L’occupation laténienne est mise au jour sous la galerie d’un temple à cella carrée, sous un bâtiment hexagonal romain et au sud de celui-ci (fig. 33). Ils se caractérisent par deux petites tranchées (au niveau de la galerie du temple romain), interprétées comme les restes d’une palissade pouvant appartenir à un petit enclos419. De nombreux trous d’ancrage de poteaux ont également été découverts, dont un groupe de quatre près de l’angle nord-est du temple, correspondant peut-être aux fondations d’un bâtiment quadrangulaire de plan irrégulier (de 3 m de côté par 2,50 m). Un fossé a aussi été mis en évidence plus à l’est, sous le grand bâtiment hexagonal sur environ 13 m de long. Selon les fouilleurs, celui-ci renvoie à la fondation d’une palissade d’après la morphologie de ses parois (verticales et légèrement évasées en partie supérieure, de 0,40 m de profondeur) et la présence de pierres de calage au fond de son comblement420. Le long de ce fossé, un empierrement a été dégagé sur 1 m de large et 5 m de longueur, présentant des traces d’usures. Il s’apparente vraisemblablement à un espace de circulation ou à un point d’accès. Ces deux dernières structures laténiennes ont été plus précisément attribuées à la première moitié du iie s. a.C. L’occupation gauloise perdure jusque dans le courant du ier s. a.C. puisqu’une fosse isolée a livré du mobilier daté de cette période. Ajoutons que de nombreux objets datés de La Tène finale ont été découverts dans le comblement de structures plus récentes, tels que des fragments d’amphores, des tessons de céramique à décor estampés, un fragment de bracelet en verre bleu, un poussier de passoire en bronze et une fibule type Feugère 1b1.
Fig. 33. Vannes (56), plan des structures gauloises de “Bilaire” (Galliou et al. 2009, fig. 441).

368Il est difficile de conclure avec ces seuls éléments à la présence d’un sanctuaire gaulois, néanmoins entre les années 10 a.C. et 40 p.C., les aménagements de la période gauloise sont scellés par des remblais (de 0,30 m à 0,40 m d’épaisseur) qui servent à asseoir le temple à cella421.
Annexe 40 : Chez les Riedones
Le site de Mordelles (35)
369Le sanctuaire rural de “Sermon” à Mordelles (35) est découvert en 1977 dans le cadre d’un programme de prospection systématique du bassin de Rennes. Suite à plusieurs campagnes aériennes et pédestres, M. Batt engage un premier sondage en 1984, suivi de cinq campagnes de fouilles, complétées par une opération de sauvetage urgent en 1992422. Dans l’environnement immédiat d’un temple à cella hexagonale, édifié au ier s. p.C., est alors dégagé un ensemble de structures fossoyées attribuées à La Tène finale de manière générale (fig. 34). Ainsi, un enclos trapézoïdal – de 19 m par 30 m – y est reconnu à quelques mètres au nord de l’édifice de culte romain. Les fossés, qui se développent sur 1,75 m de profondeur, s’interrompent à l’ouest offrant un accès423. Aucun plan de bâtiment ou d’un quelconque aménagement n’a été identifié, malgré les nombreux trous d’ancrage de poteaux laténiens mis en évidence à l’intérieur de cet espace. D’autres fossés et un foyer datés de la même période ont aussi été repérés. Les structures ont livré un mobilier peu abondant de La Tène finale (La Tène D2b) – céramique, fragments d’amphores de type Dressel 1A et 1B, une fibule et le reste d’un couteau.
Fig. 34. Mordelles (35), temple romain et systèmes fossoyés laténiens de “Sermon” (Batt 1989, 35).

370Il faut également signaler la présence d’une fosse-dépotoir rectangulaire (de 12 m par 9 m), installée dans l’angle nord-est de l’enclos, dont le comblement n’a livré que peu d’informations quant à sa fonction originelle. M. Batt propose qu’elle corresponde à un petit bassin424. De plus, la fouille du temple romain a montré qu’il était installé sur un substrat laténien – des couches ont livré de la céramique de La Tène moyenne et finale, trois monnaies dont l’une présente une dégradation volontaire résultant d’un coup de burin, ainsi qu’un fragment de bracelet en verre daté de La Tène C1.
371Le choix d’une orientation similaire à celle de l’enclos lors de l’édification du temple à cella suggère soit la présence d’une trame dense de l’occupation aux alentours, qui aurait conditionné l’implantation de l’aménagement, soit une volonté manifeste de reprendre l’orientation des aménagements préexistants. La seconde hypothèse semble aller dans le sens d’un lieu de culte gaulois ayant précédé le temple romain du ier siècle. En effet, l’implantation de cet édifice découle très probablement d’un choix volontaire répondant à des critères précis, par exemple celui d’un lieu déjà doté d’une symbolique religieuse. Toutefois, si la fonction cultuelle du temple polygonal est avérée, notamment par la mise au jour d’un mobilier caractéristique, elle reste hypothétique pour l’enclos laténien installé plus au nord, sans une révision du mobilier425.
Annexe 41 : Chez les Aulerques Diablintes
Le site d’Entrammes (53)
372Entre 1977 et 1978, J. Naveau (conservateur du musée de Jublains) entreprend des fouilles sur le temple romain du “Port du Salut” découvert au centre de la fortification d’Entrammes (53) à l’occasion de prospections aériennes effectuées par J. Rioufreyt et C. Lambert (fig. 35). La forte proportion de mobilier daté de La Tène finale (datation large), récolté sous le temple – de la céramique, des fragments d’amphores de type Dressel 1, quelques monnaies dont deux potins dits “à la tête diabolique” et une meule – et sous son annexe (céramiques), pose la question d’un lieu de culte plus ancien426. Une fosse (d’environ 1 m de profondeur), partiellement dégagée sous la galerie est du bâtiment annexe, constitue le seul indice immobilier de cette période, qui n’a pu être interprétée427.
Fig. 35. Entrammes (53), emplacement du temple romain au centre du site fortifié du “Port du Salut” (réal. J. Remy).

373Au sud-est du temple, près de l’annexe, un enclos dont l’angle est repéré lors d’un survol aérien, pourrait être associé à cette occupation laténienne, mais aucune intervention archéologique n’est venue le confirmer. Les indices sont donc trop minces pour affirmer l’existence d’un lieu à vocation religieuse de l’époque gauloise. Les édifices maçonnés sont construits sous Auguste, probablement à l’extrême fin du ier s. a.C., puis abandonnés vraisemblablement au début du iie siècle428.
Annexe 42 : Chez les Aulerques Cénomans
Le site d’Oisseau-le-Petit (72)
374L’agglomération romaine d’Oisseau-le-Petit (72), qui succède très probablement à une agglomération gauloise, est équipée d’une parure monumentale et notamment de trois temples. Depuis le xixe siècle, dans les environs de chacun de ces trois monuments, des indices d’occupation laténienne ont été régulièrement mis en évidence, lors de prospections aériennes, pédestres ou de découvertes clandestines (fig. 36). Ces vestiges ont déjà été décrits dans le cadre de la présentation de l’habitat groupé laténien (supposé) sur cette commune (cf. supra p. 67). Toutefois, les principaux faits doivent être ici rappelés.
Fig. 36. Oisseau-le-Petit (72), localisation des trois indices d’espaces à vocation rituelle autour des “Noirâs” (réal. J. Remy, d’après Bouvet 2001, fig. 371).

375Ainsi, le temple de “la Croix Blanche”, localisé à environ 200 m au sud-est des “Noirâs” – qui a révélé une dense occupation du iie s. a.C. – se superpose à un système d’enclos emboîtés. Repérés lors d’un survol aérien, ces vestiges qui s’étendent sur environ 4000 m² sont mal datés429.
376La fouille du temple des “Busses”, localisé seulement à quelques dizaines de mètres à l’ouest des “Noirâs”, a livré des monnaies gauloises, enfouies dans des niveaux attribués au milieu du ier s. p.C. Deux autres monnaies proviennent des environs du temple qui a fait l’objet d’une reconstitution dans les années 1980. D’ailleurs, le sol de la cella n’a pas été démonté lors des campagnes de fouille, par conséquent ses origines ne sont pas connues.
377Mais, l’indice le plus éloquent est situé moins de 100 m plus au sud, dans les environs du temple de “la Cordellerie” (reconnu lors de survols aériens dans les années 1990). En effet, au xixe siècle, un érudit signale la découverte, de part et d’autre du monument romain, de céramiques de facture similaire à celles découvertes sur l’éperon barré de “Saint-Evroult” à Gesnes-le-Gandelin (datée de La Tène finale) qui domine la commune d’Oisseau-le-Petit430. C’est aussi aux abords de ce temple qu’un dépôt monétaire a été ramassé par des prospecteurs clandestins. Cinquante-quatre monnaies gauloises de provenances diverses (attribuées aux Baiocasses, aux Osismiens, aux Diablintes, aux Coriosolites, aux Redones et aux Bellovaques), ainsi qu’une monnaie romaine ont pu être étudiées. Elles sont pour la plupart mutilées, c’est-à-dire marquées par un coup de burin. Ajoutons qu’un fer de lance associé à de la céramique datée de La Tène finale provient également de cet endroit431. En dehors, de ces indices mobiliers, tout à fait compatibles avec ce que l’on retrouve habituellement sur les sanctuaires gaulois, il faut rappeler la présence d’un fossé d’enclos curvilinéaire (non daté), aperçu lors d’une prospection aérienne autour du temple, qui n’est pas daté.
Annexe 43 : Chez les Namnètes
Le site de Mauves-sur-Loire (44)
378Le coteau de “Vieille-Cour”, sur la commune de Mauves-sur-Loire (44), est occupé à l’époque romaine – entre le Ier siècle et le courant de la seconde moitié du ive s. p.C. – par une agglomération de 30 à 35 ha, équipée de thermes, d’un théâtre et d’un sanctuaire sous lequel ont été identifiés des vestiges laténiens432. Le site bénéficie d’une visibilité particulièrement intéressante sur la vallée de la Loire, implanté à environ 73 m NGF, surplombant le fleuve (fig. 37).
Fig. 37. Mauves-sur-Loire (49), plan du sanctuaire antique de “Vieille-Cour” et des sondages ponctuels ayant livré des structures laténiennes (réal. J. Remy, d’après Monteil et al. 2009, 161, fig. 9).

379Le sanctuaire antique est connu depuis la fin du xixe siècle, période durant laquelle (entre 1885 et 1886) l’érudit L. Maître entreprend de premières fouilles433. Puis, il faut attendre 1966 pour que le site suscite à nouveau l’intérêt, celui du Groupe d’Archéologie antique du Touring Club de France qui réalise lui aussi des sondages ponctuels. Mais, ce sont les fouilles programmées entreprises par J. Hyvert, entre 1976 et 1979, qui permettent d’établir une chronologie découpée en cinq phases successives, dont l’origine remonterait à La Tène finale434.
380Le premier état de construction à vocation véritablement cultuelle doit être situé au début du ier s. p.C. (années 20-30). Il évolue progressivement vers un temple périptère sur podium abandonné dans le courant de la seconde moitié du ive s. p.C. Ce sanctuaire romain est précédé par une série de trous d’ancrage de poteaux (une trentaine), mis en évidence sous un bâtiment périphérique interprété comme “une salle d’accueil des pélerins”435. Ces vestiges sont associés à une couche d’argile noirâtre parsemée de charbon de bois. Celle-ci, qui a été reconnue sur l’ensemble du site d’après J. Hyvert, a livré du mobilier de l’âge du Fer436. La céramique recueillie permet de distinguer deux phases pour cette période, l’une datée de La Tène ancienne, voire du premier âge du Fer et une seconde attribuée à La Tène finale.
381L’absence de certains mobiliers spécifiques, que l’on retrouve habituellement dans les sanctuaires gaulois (armes, parure…), la faible quantité de monnaies gauloises – qui sont d’ailleurs issues d’un contexte stratigraphique romain – et l’absence d’un plan cohérent restreignent l’interprétation de l’occupation laténienne. Cependant, l’importance de l’espace religieux à l’époque romaine suggère tout de même un héritage de La Tène finale, d’autant que les fouilles anciennes n’ont que très ponctuellement atteint les niveaux anciens. Ajoutons que d’autres monnaies gauloises ont été inventoriées dans les environs du sanctuaire romain, venant étayer cette hypothèse (cf. notice).
Le site de Guérande (44)
382Sur le territoire namnète, il faut également rappeler l’existence sous le temple romain du “Clos Flaubert” à Guérande (44) d’un petit édifice subcirculaire sur poteaux plantés de plus de 25 m². La construction, associée à un niveau de sol en place, est accompagnée de cinq petites fosses comblées par des ossements calcinés (humains ?). En partie arasés par l’occupation romaine, ces vestiges étaient recouverts par un niveau de limon brun cendreux caractérisé par un abondant mobilier céramique laténien et scellé par une couche de destruction composée de torchis et de charbons de bois. Celle-ci informe d’une phase d’incendie de l’état laténien avant l’élévation du temple maçonné romain437. L’ensemble des vestiges gaulois correspond à deux phases d’aménagements mal définies, comprises entre La Tène C2 et La Tène D2438.
383L’absence de certains mobiliers caractéristiques des grands sanctuaires gaulois (armements ou monnaies sacrifiées ou mutilées) empêche de statuer clairement sur la nature de l’occupation (cf. fig. 127, SA 147). Néanmoins, l’analogie de la stratigraphie avec celle observée sur des sites mieux caractérisés tels que Juvigné (53) ou Douarnenez (29) invite à s’interroger sur la vocation du site de Guérande (cf. supra p. 79). D’autant que l’originalité de l’ensemble architectural, édifié justement à l’emplacement d’un temple construit au début du ier siècle – et utilisé au moins jusqu’au milieu du ier siècle –, ainsi que la présence d’une inhumation d’équidé à quelques mètres de distance (35 m) ne sont pas des indices anodins. En effet, il convient de revenir sur la découverte du cheval complet, retrouvé recroquevillé sur lui-même dans une fosse quadrangulaire, située sous une voie romaine aménagée sous Auguste. Si la fouille de cette structure n’a pas été exhaustive, elle a permis de reconnaître sous le squelette, un plancher en bois maintenu par des poutrelles ancrées dans les parois de la fosse439. S’agit-il d’un système pour isoler le fond de la structure ? Celle-ci a-t-elle fonctionné ouverte ? A-t-elle été creusée dans le seul but de recevoir la dépouille du cheval, ou bien cette fonction est-elle secondaire ? Était-elle ouverte au moment de la construction de la voie romaine, ou fermée par un couvercle en matériau périssable qui s’est progressivement dégradé ? En effet, les restes de l’équidé étaient recouverts par 0,60 m de recharges provenant de la voie. Malheureusement, la fouille n’a pas offert les réponses à ces différentes questions, néanmoins l’existence même de cette inhumation constitue un argument en faveur d’un espace à vocation rituelle, puisque les sépultures de chevaux sont généralement associées à des contextes religieux ou funéraires à l’époque gauloise440.
384Enfin, il faut préciser que la datation du bâtiment romain n’est pas suffisamment précise pour éclairer quant à un éventuel hiatus chronologique au changement d’ère.
Annexe 44 : Chez les Ambiliates
Le site du Fief-Sauvin (49)
385Au nord-ouest de l’agglomération romaine du Fief-Sauvin (49), le sanctuaire de “La Vieille Vigne” a fait l’objet de fouilles programmées entre 1977 et 1978 (dir. G. Aubin), à la suite d’un repérage aérien réalisé en 1974 (fig. 38). Un temple de plan carré, à cella et galerie concentrique, daté des ier et iie s. p.C., est alors partiellement dégagé441. Ce bâtiment recoupe une construction conservée sur 0,25 m de hauteur, constituée de petits moellons et de plaques de schiste directement disposés sur le sol naturel (argileux), qui a pu être attribuée à La Tène finale442. L’emprise des fouilles du temple était trop restreinte pour percevoir les limites en plan de cette structure, qui était par ailleurs associée à des trous d’ancrage de poteau. Mis à part des fragments de céramique, aucun mobilier ne vient renseigner la nature de l’occupation gauloise.
Fig. 38. Le Fief-Sauvin (49), emplacement du temple de “La Vieille Vigne”, distant d’environ 500 m de l’éperon barré de “La Ségourie” (réal. J. Remy).

Annexe 45 : Chez les Pictons
Le site de Montreuil-Bellay (49)
386Un dernier site a été recensé dans le Maine-et-Loire, en marge des territoires pris en compte dans cette étude, c’est-à-dire chez les Pictons. On en présentera, quand-même, ici ses principales caractéristiques utiles à l’étude comparative entre les différents sites.
387En 1897, au lieu-dit “Le Champ des Romains” au sud de la commune de Montreuil-Bellay (49) et à proximité des rives de la Dive, l’un des propriétaires du terrain, en voulant détruire des vestiges interprétés jusqu’alors comme de la roche, met au jour une construction romaine, des sarcophages, des restes d’ossements, ainsi que des monnaies. Une grande partie de ces monnaies furent ramassées par les propriétaires qui en vendirent. Avant que le site ne soit totalement pillé, le préfet fait appelle à une commission qui se charge alors des fouilles archéologiques. Celles-ci débouchent sur la réalisation d’un rapport officiel et d’un plan des vestiges443. À l’époque, la commission ne tranche pas quant à la nature des vestiges qu’ils pensent correspondre soit à un temple romain soit à une construction destinée à abriter des sépultures franques (fig. 39). En tout cas, plus de 500 monnaies gauloises et romaines en argent et en bronze sont découvertes “entre ces deux murs concentriques et sur tout le rebord extérieur, mais particulièrement au centre de l’édifice”, sous un sol en béton, dans une couche de terre noirâtre d’après C. Urseau qui fait partie de la commission444. Seul un échantillon de ce trésor parvint aux fouilleurs qui décrivent l’état des monnaies : “quelques-unes presque entièrement rongées par la rouille ; d’autres, altérées par un feu intense, qui avait fondu en partie le métal ; le plus grand nombre en bon état”445.
Fig. 39. Montreuil-Bellay (49), le sanctuaire antique de “Méron” (réal. J. Remy, d’après Sausseau 1897).

388Près d’un siècle plus tard, le réexamen des données de fouilles permet d’identifier un temple périptère rond et de reconnaître les différents types de monnaies, décrites par C. Urseau446. Si la présence du dépôt monétaire ne suffit pas à établir une activité rituelle de la fin de l’âge du Fer, la mise en évidence d’une couche incendiée antérieure à l’élévation romaine rappelle les cas de Juvigné (53) et de Mauves-sur-Loire (44), qui suggèrent l’existence de structures laténiennes détruites avant l’édification d’un temple au début de l’époque augustéenne (cf. p. 223 SA 147). Néanmoins, sans une nouvelle opération archéologique, il n’est pas possible de lever le doute sur cette éventuelle occupation laténienne.
389Quoi qu’il en soit, la découverte de ces monnaies sous le sol maçonné de l’édifice suggère un dépôt de fondation, puisque la majorité des monnaies gauloises décrites correspond visiblement à des émissions tardives (dernier quart du ier s. a.C.). D’après C. Port “toutes sont monnaies du premier siècle ; quelques-unes même sont antérieures”447.
Notes de bas de page
1 Marteville in Ogée 1853, 966 ; Brune 1862 ; Bézier 1886, 22.
2 Millon 1900 ; 1911.
3 Vandenbroucque 1960.
4 Découverte d’une vingtaine de statères gaulois au début du xxe siècle près de la chapelle implantée sur le promontoire d’Orange (Millon 1911 ; Colbert de Beaulieu 1961). Par la suite, sept autres exemplaires ont été ramassés lors de travaux agricoles (Goulpeau 1990).
5 Ibid.
6 Abollivier 2008, 157-158.
7 Lemière 1852.
8 Langouët 1996, 31.
9 Langouët 1987.
10 Langouët 1978, 104.
11 Daire 1992.
12 Langouët 1996, 39-41.
13 Giot & Briard 1969.
14 D’après un sondage réalisé en 1967 par P.-R. Giot et J. Briard : le rempart est installé sur un paléosol daté du Néolithique, recouvert d’un talus en terre (terre cendreuse noire ou grise) composé de charbons dont certains ont été datés par le radiocarbone du vie s. a.C. Cette datation est confirmée par la présence de céramique prise dans une couche de remblai plus tardive (sur la partie haute du talus).
15 Giot et al. 1968.
16 Un programme de recherches franco-britannique, dirigé par Barry Cunliffe et Patrick Galliou, vise à la conduite chaque année, entre 1991 et 2002, de fouilles programmées qui donnent lieu à une volumineuse monographie (Cunliffe & Galliou 2005).
17 Le réseau de fortification est en grande partie étudié entre 1993 et 1999. Durant les campagnes de 2000 à 2002, à l’occasion de fouilles en aires ouvertes, certaines précisions sont apportées quant à l’architecture et à la datation des remparts (Cunliffe & Galliou 2004, 203-205).
18 Ibid., p. 170-174.
19 Mortillet 1906 ; Fréminville 1832, 234 ; Ogée 1853.
20 Wheeler & Richardson 1957, 24.
21 Ibid., plate III, site E.
22 Ibid.
23 Dardignac 2009.
24 Du Chatellier 1907, 333.
25 Wheeler & Richardson 1957, 54-59.
26 Daire 1992, 274.
27 Le Bihan & Robic 1990.
28 Grossin 1900 ; Mortillet 1906, 199 ; Wheeler & Richardson 1957, 111-112.
29 Maguer 1994.
30 Maguer 1997.
31 Maguer 1995.
32 Daire et al. 2015, 152.
33 Daire 2001, 166-177.
34 Daire 1990, 31.
35 Daire 2001, 163 ; Daire et al. 2015, 152.
36 Wheeler 1938, 23, vol. 1.
37 Giot 1967, 23 ; Galliou et al. 1984, 74.
38 Maguer 1994, 214-215 ; Galliou 2010, 312.
39 Wheeler & Richardson 1957, 109.
40 Le Men 1873, 145.
41 Ibid., p. 151-159.
42 Wheeler & Richardson 1957, 85, fig. 24 ; Daire 1992, 249.
43 Duval 1959, 52-53.
44 Le Men 1873.
45 Galliou 2010, 108.
46 Galles 1869.
47 Closmadeuc (de) 1868.
48 Bernier 1963 ; Jersey (de) 1994, 204-206.
49 Cayot-Delandre 1847, 502 ; Rosenzweig 1863, 61.
50 Threipland 1945, 138 ; Wheeler & Richardson 1957, 106.
51 Hervé 1989, 135-142.
52 Cayot-Delandre 1847, 493-494 ; Rosenzweig 1863, 55 ; Le Méné 1891, 268 ; Mortillet 1906, 202.
53 Threipland 1945, 128-133 ; Wheeler & Richardson 1957, 106-107.
54 Daire 1989.
55 Hervé 1989, 60-70.
56 Bernier 1964.
57 Threipland 1945, 141-149.
58 Wheeler 1957, 103.
59 Bertrand 1970.
60 Hervé 1989, 198-207.
61 Tanguy 1982.
62 Tanguy 1990a ; 1990b ; Tanguy et al. 1990.
63 Marsillé & André 1972, 11.
64 Triste & Daré 2008.
65 Gautier 2009, 31.
66 Daré et al. 2015.
67 Ogée 1843, 51 ; Cayot-Délandre 1847, 215.
68 Ibid.
69 Closmadeuc (de) 1887, 202-203.
70 Ibid., p. 203.
71 Ibid., p. 206.
72 Ibid., p. 201.
73 Dufay-Garel et al. 2016, 105.
74 Angot 1890, 8.
75 Lambert 1865, 125 ; Angot 1910b, 143.
76 Boissel et al. 1972, 6.
77 Cherel 2015, 78.
78 Ibid.
79 Briand & Houdusse 2015, 123.
80 Ibid., p. 137.
81 Le Goff 2015, vol. 4, 386.
82 Barbier-Pain 2015, 283.
83 Houdusse in Le Goff 2015, 365.
84 La date d’abattage est fixée entre 120 et 91 a.C. (Ibid., p. 358).
85 Morin de la Beauluère 1853, 408.
86 Angot 1910a, 97.
87 Valais, dir. 2005.
88 Ibid.
89 Morin 2007.
90 Naveau 1997b, 52-53 ; Guillier et al. 2012, 150.
91 Valais, dir. 2005.
92 Renouard 1811.
93 Morteveille 2006, 55.
94 La Pilaie (de) 1829.
95 Frederiksson et al. 1978.
96 Naveau 1992, 152.
97 Remy 2011, 88-99.
98 Morteveille 2006.
99 Bocquet 2008.
100 Bocquet et al. 2009.
101 Voisin 1852, 76.
102 La Sicotière 1894, 121.
103 Fleury 1894, 276-279.
104 Le premier état est attribué sans certitudes à l’âge du Bronze, tandis que le dernier est daté de la fin de la période carolingienne.
105 Bouvet 2001, 235.
106 Legeay 1857, 24-25.
107 Bouton 1947, 187.
108 Siraudeau 1972, 58.
109 Échantillons : GIF 4118 : 804-245 av. J.-C. ; GIF 4119 : 764-113 av. J.-C. (dates calibrées par le laboratoire de l’Université de Lyon 1).
110 Verdier & Véron 1978, 152 ; Lambert & Rioufreyt 1981, 44 ; 1983, 16.
111 Aubin et al. 2011.
112 Bouvet 2001, 181.
113 Le Boulaire 2012, 87.
114 Chevet et al. 2014.
115 Le Boulaire 2012, 88.
116 Gaillard & Monteil à paraître.
117 Menjot d’Elbenne 1896.
118 D’après E. Nègre, le nom de la commune de Duneau, issu de Dunellum (en 1010), dérive du gaulois dunum qui signifit “enceinte fortifiée” et du suffixe romain -ellum (Nègre 1990, 150).
119 Verdier & Véron 1982, 159.
120 Guillier 2007.
121 Bouvet et al. 2009.
122 Chevet 2001.
123 Desmazières 1911, 4.
124 En effet, César mentionne, à deux reprises, l’hivernage de la VIIe légion commandée par Publius Crassus, sur le territoire andécave en 57/56 a.C. : “Il amena ses légions prendre leurs quartiers d’hiver chez les Carnutes, les Andes, les Turons et les peuples voisins des régions où il avait fait la guerre, et partit pour l’Italie” (Caes., Gaul., 2.35.3) et “Le jeune Publius Crassus, avec la 7e légion, avait établi ses quartiers d’hiver chez les Andes : c’était lui qui était le plus près de l’Océan” (Ibid., 3.7).
125 Mortreau 2008, 9-42.
126 Bouvet et al. 2009, 435.
127 Chevet 2007, 35.
128 Ibid.
129 Bouvet et al. 2003a, 117.
130 Bouvet et al. 2009, 433, fig. 21.
131 Bouvet et al. 2003a, 175.
132 Pithon 2007.
133 Siraudeau 1980.
134 Siraudeau 1974, 40-42.
135 Le Goff 1999.
136 Bouvet 1987, 240, vol. 3.
137 Robin 1764 ; La Sauvagère (de) 1776.
138 Port 1878, 679-681.
139 Desmazières 1911, 13.
140 Provost 1988b, 54, Monteil 2012, 233.
141 Bouvet 1987, 266-282.
142 Port ibid. ; Bouvet 1987, 75, vol. 1.
143 Picard 1912.
144 Dain 1968.
145 Provost 1988b, 54-58.
146 Port 1878, 641.
147 Desmazières 1911, 11.
148 Bouvet 1987, 67, vol. 1.
149 Meuret 1993, 168.
150 Remy 2010, 45-46.
151 Foulon 1868, 110 ; Lisle du Dreneuc 1882, 177 ; Maître 1889, 181.
152 Wheeler & Richardson 1957, 102-103.
153 Gaiffe et al. 1995, 118.
154 Laporte 1991.
155 Gaiffe et al. 1995, 119-123.
156 Ibid.
157 Guillier 2016b, 168.
158 Chouvenc 2014 ; 2015.
159 Wheeler 1957, 207; Hérubel 1932, 36, 40.
160 Lisle du Dreneuc 1885, 81 ; Orieux & Vincent 1895, 502.
161 Bouvet et al. 2014.
162 Maître 1895.
163 Fréor 1961 ; Aubin 1984, 92 ; Tessier 1994.
164 Provost 1988a, 69.
165 Maître 1895.
166 Étienne 1997.
167 Remy 2012.
168 Nauleau 2012.
169 Guillier 2016a, 193-197.
170 Ibid., p. 323-334.
171 Guillier 2016b, 170.
172 Nauleau 2012, 116.
173 Port 1876, 148-150 ; Poilane 1931 ; 1932.
174 Martin 1854 ; Champigneulle 1963 ; Desmazières 1911, 16-17.
175 Roinet 1973.
176 Godard-Faultrier 1884.
177 Chéné 1982, 19.
178 Roinet 1973, 69 ; Port 1878, 508.
179 Champigneulle 1963 ; Georcelin 1980.
180 Roinet 1973.
181 Bouvet et al. 2014.
182 Remy et al. 2016.
183 Remy 2015.
184 Un fossé livre des tessons de La Tène ancienne/moyenne et un autre de La Tène finale.
185 Laboratoire Beta Analytic, échantillon : Beta-424063, Cal BC 370 to 180 (Cal 2320 to 2130).
186 Routhiau 2016.
187 Fichtl 2010.
188 Krausz 2007.
189 Pour reprendre les exemples cités par S. Fichtl (Fichtl 2010, 322) : Bracquemont (76) : 54 ha ; La Chaussée-Tirancourt (80) : 35 ha ; Liercourt-Erondelle (80) : 32 ha ; Titelberg (Luxembourg) : 50 ha ; Hérisson (03) : 20 ha...
190 Saedlou 2012, 1518.
191 Allen et al. 2012, 473-474.
192 Ibid., p. 30.
193 Ibid., p. 474.
194 Menez & Allen 2016.
195 On ne peut s’empêcher d’évoquer l’enclos cultuel de Barzan (17) dont les proportions sont très proches. Le fossé, qui atteint 4 à 5 m de profondeur pour 11 m de large, occupe une superficie d’environ 1 ha, contre près de 0,9 ha à Trégueux (Aupert & Robin 2015).
196 Nieto-Pelletier et al. 2012, 1367-1373.
197 Méniel 2012, 1710.
198 Allen et al. 2012, 1173-1174.
199 Fichtl et al., dir. 2016, 56.
200 Le Béchennec 2016, 313.
201 Menez & Allen 2016, 163.
202 Berranger 2012.
203 Leroux 2008, 13.
204 Ibid., fig. 4a, 4b.
205 Le Goff 2014, 110-111.
206 Le Bihan & Villard 2012, 26-29.
207 Villard 2003.
208 Le Goff 2006.
209 Le Goff 2014, 809.
210 Ibid., p. 816.
211 Gruel & Morin 1999, 33 ; Gruel 2002, 206-207.
212 Hamon 2014.
213 Ibid., p. 748-750.
214 Ibid., p. 785.
215 Berranger 2014.
216 L’étude intégrée au rapport a été réalisée avant la radiographie des objets qui devrait permettre d’affiner leur identification (Cherel 2014, 735).
217 Le Forestier 2014.
218 Aubin et al. 2007, 111.
219 Levillayer 2016.
220 Gruet & Passini 1985.
221 Verdin et al. 2012, 408 ; Pion 1996, 89.
222 Ibid.
223 Aubin et al. 1982.
224 Jud 2007.
225 Levillayer 2016, 148.
226 Le Pennec 2009.
227 Le Rouzic 1935 ; Galliou et al. 2009, 277-278 ; Bernier 1969.
228 Hyvert 1990.
229 Robic & Boujot 1987.
230 Guillier et al. 2012, 150.
231 Pétorin et al. 2004.
232 Guillier et al. 2015, 179-180.
233 Ibid., p. 186.
234 Guillier et al. 2015, 217.
235 Ibid., p. 177.
236 Ibid., p. 252.
237 Lambot 2003, 43 ; Buchsenschutz et al. 1992.
238 Collis et al. 2000, 81.
239 Guillier et al. 2015, 216-217.
240 Collis et al. 2000.
241 Schéma aujourd’hui largement nuancé par l’avancée de la recherche archéologique qui montre des réalités et des relations plus complexes entre ces sites (Féliu 2005 ; Kaenel 2006, 31-32 ; Fichtl 2013, 35-36).
242 Bocquet & Le Goff 2016.
243 Boissel & Naveau 1980, 3-7.
244 Coutelle 1977.
245 Bocquet 2005, 3.
246 Ibid., p. 3-4.
247 Ibid., p. 7-12.
248 Naveau 1985.
249 Bocquet 2011, 11, 54.
250 Bocquet 2012, 14-15.
251 Paillot 1999.
252 Bocquet & Le Goff 2016, 119.
253 Pétorin 2007, 21.
254 Ibid., p. 53 et p. 74-75.
255 Ibid., p. 74.
256 Bouvet 2001, 376-395.
257 Dont l’origine est placée à l’époque gauloise d’après la tradition (Bouton 1978 ; Lemeunier 1978, 227).
258 Liger 1903, 66-67.
259 Tikonoff 1993.
260 Liger 1895, 14-15
261 Bouvet 2001, 39-380.
262 Bouvet 2001, 385.
263 Les résultats de l’étude des restes osseux, réalisée par D. Germinet, concluent à une alimentation de bonne qualité (Pétorin 2006, 75).
264 Bouvet 2001, 380.
265 Pétorin 2006, 78.
266 Monteil 2012, 200.
267 Pape 1965a ; 1965b.
268 Le Pennec 2000 ; inédit.
269 Cayot Delandre 1847, 101 ; Ogée 1853, 277 ; Rosenzweig 1863, 187 ; André 1959a, 29.
270 Monteil 2012, 126, 213.
271 Le Goff 2000 ; 2002 ; Daré & Dufay-Garel 2014.
272 Dufay-Garel 2014.
273 Le Goff 2000 ; 2002.
274 Menez 2008, 302.
275 Delestrée & Pilon 2013.
276 Fichtl 2005, 159-162 ; Gruel & Haselgrove 2006, 120-121.
277 Champigneulle 1963
278 Collis 1975.
279 Dubillot 2004.
280 Ibid. 2008.
281 Ibid.
282 Collin 1995, 148.
283 Viau 2014, 42.
284 Le Goff 2013.
285 Ibid., p. 213.
286 Martineau 2007 ; Ibid. 2010.
287 Viau 2014, 231.
288 Le Goff 2013, 213.
289 Jego 2000 ; 2001.
290 Prigent 1977 ; Visset 1990.
291 Devals 2004 ; 2009.
292 Le Boulaire 2009.
293 Devals 2004, 8.
294 Monteil 2012, 167.
295 La Ferté 1994a ; 1994b.
296 Casanave et al. 1990.
297 Pirault 1996.
298 Pirault 1998, 19-21.
299 Pirault 1996, 37.
300 Bouvet 2004, 38-39, fig. 6.
301 Pirault 1996, 17-18.
302 En outre, cette hypothèse a déjà été soulevée par d’autres chercheurs (Bouvet 2004 ; Rouzeau 2001).
303 Cony & Wassong 2014.
304 Le Goff 2009.
305 Bizeul 1859 ; Maître 1893, 251-261, 324-339, 346-361, 369-370 ; Révelière 1903.
306 Bellanger 2000 ; 2003, 15-16.
307 Monteil 2012, 217.
308 Bellanger 2002.
309 Provost 1988a, 129, 133.
310 Galliou 1982, 37.
311 Menez & Arramond 1997, 121.
312 Menez 2008, 140-141.
313 Menez & Arramond, 133.
314 Menez 2008, 155.
315 Ibid., p. 161.
316 Ibid., p. 216.
317 Ibid., p. 201.
318 Ibid., p. 254.
319 Ibid., p. 442.
320 Menez 1999.
321 Chanson in Menez 2008, 277, Berranger in Menez 2008, 285.
322 Pernot in Menez 2008., 298.
323 Chanson in Ibid., p. 278.
324 Roy, dir. 2009, 231-232.
325 Ibid., p. 226.
326 Abollivier 2008.
327 Menez 1996.
328 Menez 2000, 10.
329 Menez 1991, 29.
330 Tanguy 2012, 4.
331 Tanguy 2000.
332 Tanguy 2008.
333 Tanguy 2010, 49.
334 Nillesse 2004, 11.
335 Ibid., p. 42.
336 Valais 1995.
337 Mare 1995, 12-13.
338 Menez 2008, 462.
339 Nillesse 2003a, 165.
340 Nillesse 1998, 58.
341 Ibid., p. 66.
342 Levillayer 2012, 106.
343 Maguer & Lusson 2009, 430.
344 Bellanger, dir. 2013, 417.
345 Ibid., p. 406.
346 Devals, dir. 2008.
347 Ibid., p. 408.
348 Maguer 2007.
349 Maguer 2000, 224.
350 Lemaître 2000, 153.
351 Sandoz 1999, 73-74.
352 Ibid., p. 83.
353 Le Bihan & Villard 2001.
354 Le Bihan 2007a.
355 Le Bihan 2007b.
356 Le Bihan 2014.
357 Clément 1978.
358 Clément 1979.
359 Sanquer 1981.
360 Clément 1979.
361 Clément et al. 1987 ; Gruel & Clément 1987.
362 Du Chatellier 1878 ; Le Men 1878.
363 Galliou 2006.
364 Villard-Le Tiec 2003, 103.
365 Duval 1990.
366 Du Chatellier 1896.
367 Du Chatellier 1877.
368 Reich 2016.
369 Bizien-Jaglin & Lejars 1989.
370 Bizien-Jaglin & Lejars 1991, 133.
371 Bizien-Jaglin & Lejars 2003, 126.
372 Bizien-Jaglin & Lejars 1990, 85.
373 Bizien-Jaglin & Lejars 2003, 135.
374 Lecornec 1985, 49-52.
375 Gruel 1991, 230-232
376 Lecornec 1994, 68
377 Ibid., p. 75-76.
378 Lecornec 1999, 54.
379 Meissonnier 1988, 28.
380 Aubin et al. 1999.
381 Bossard & Dufay-Garel 2016.
382 Bossard 2015a, 75 ; 2015b, 126.
383 Aubin et al. 1999, 126.
384 Naveau 1997b, 149.
385 Ibid.
386 C’est-à-dire vingt-deux pièces attribuables à des épées, huit à des armes d’hast, un umbo, un tisonnier (à moins qu’il ne s’agisse d’une pelle à feu ou d’un croc à viande ?), plusieurs éléments de parure, etc.
387 Naveau 1997b, 150-151.
388 Brouquier-Reddé, dir. 2001, 107.
389 Gruel & Brouquier-Reddé 2004, 295-296.
390 Gruel & Brouquier-Reddé 2003, 29-31 ; Brouquier-Reddé & Gruel 2006, 137-138.
391 Brouquier-Reddé & Gruel 2015, 76.
392 Gruel & Brouquier-Reddé 2004, 303-304.
393 Ibid., p. 297.
394 Lethos-Duclos 2009.
395 Guillier 2013
396 Guillier 2015, 95.
397 Ibid., p. 100.
398 Monteil 2012, 183.
399 Lambert & Rioufreyt 1993, 78.
400 Lambert & Rioufreyt 1994, 84.
401 Lambert & Rioufreyt 1995, 111.
402 Delestre 1983.
403 Bouvet 2003, 94.
404 Ibid.
405 Ibid.
406 Gomez de Soto & Lejars 1991.
407 Delestre 1986.
408 Provost 1988b, 84-85.
409 Le Men 1876.
410 Pape 1975 ; Galliou 1983 ; Le Bihan 1986.
411 Le Bihan 1998.
412 Le Bihan 1996.
413 Le Bihan 2003, 101.
414 Du Chatellier 1907 ; Pouille 2006, 8.
415 Provost 1991a, 6-7.
416 Provost 1991b.
417 Provost 1991a.
418 Ibid., p. 39.
419 Baillieu 2000, 8.
420 Baillieu 1999, 4.
421 Ibid., p. 6.
422 Batt 1994, 79.
423 Batt 1988, 47.
424 Batt 1993, 56.
425 Batt 2003, 98-99.
426 Naveau 1977, 69.
427 Naveau 1978, 37-38.
428 Naveau 1992, 123.
429 Bouvet 2001, 378.
430 Liger 1895.
431 Bouvet 2001, 378-379.
432 Monteil et al. 2009, 154-156.
433 Maître 1885, 101-107 ; Maître 1893, 29-43.
434 Windels 1998.
435 Monteil et al. 2009, 158.
436 Hyvert 1978-1979.
437 Pirault 1996, 19.
438 Pirault 1998, 19.
439 Pirault 1996, 12.
440 Quelques exemples peuvent être présentés pour illustrer cette remarque. Le squelette humain d’une des trois sépultures du site de “Lelleton” à Pétosse (85) était associé à celui d’un cheval, d’un veau et de deux boeufs. Les deux autres sépultures étaient également accompagnées d’un riche mobilier en plus de la dépouille d’animaux (Nillesse 2003b). La localisation de ce site – à mi-chemin entre le sanctuaire de Nalliers (85) et d’une nécropole – et la nature des offrandes illustrent la difficulté que l’on peut avoir à classer certains sites gaulois dans le domaine funéraire ou religieux. Le sanctuaire de Saint-Jean-Trolimon (29) a également livré de nombreux restes de chevaux mêlés à du mobilier métallique laténien et à des mâchoires humaines (cf. supra p. 102). On peut également citer les inhumations simples du “Brézet” ou celles multiples de Gondole ou de “L’Enfer” (63), étudiées dans le cadre du PCR sur l’Archéologie des chevaux arvernes (iiie s. a.C. au ier s. p.C.), dirigé par S. Foucras, dont l’un des objectifs est justement de définir la place de cet animal dans la société gauloise. Les études menées jusqu’alors sur ses sépultures indiquent qu’elles résultent de pratiques rituelles (Foucras 2013a ; 2013b ; 2014). Enfin, le sanctuaire du “Mormont” sur la commune de La Sarraz (Suisse), qui a livré plusieurs centaines de fosses ou de puits à offrandes, peut être évoqué. Les dépôts votifs sont de nature variée (faune, ossements humains, parures, meules, céramiques, outils, monnaies) et les ossements d’animaux témoignent pour la plupart de restes de banquets collectifs, néanmoins quelques inhumations de chevaux entiers ont été exhumées (individuelles pour certaines). Dans ce cas, des rituels d’exposition peuvent être envisagés (Dietrich 2007).
441 Aubin 1977.
442 Aubin 1981.
443 Port et al. 1897.
444 Urseau 1897, 141-156.
445 Ibid.
446 Provost 1988b, 37-38 ; Aubin 1984, 68-69.
447 Port et al. 1897, 1125.
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