URL originale : https://books.openedition.org/artehis/6463

Les fosses à profil en V et Y dans le Nord-Pas-de-Calais
Yann Lorin, Ginette Auxiette, Sabine Loicq et Jean-Hervé Yvinec
p. 175-190
Entrées d’index
Mots-clés : fosse en V-Y, faune, chasse, rituel, Néolithique
Keywords : V-‚ Y-shaped cross-sections pits, fauna, ritual, Neolithic, Bronze Age
Schlüsselwörter : Gruben mit V-Y-Profil, Jagd, Ritual, Neolithikum, Bronzezeit
Note de l’éditeur
Des abrégés en langues anglaise et allemande figurent en fin d’article
Texte intégral
1Des fouilles récentes dans la région Nord-Pas-de-Calais ont révélé des habitats attribués à l’Âge du Bronze. C’est essentiellement à partir de ces données nouvelles que nous abordons la question des fosses à profil en « V, W, Y ». Le site d’Achicourt « Le Fort » (Lorin et alii, 2008b) a été rapidement rattaché à cette thématique1, puis associé aux résultats de la fouille récente de Marœuil « Rue Curie » (Lorin et alii, à paraître) qui proposait des données analogues. La révision globale de la question dans les régions voisines nous a conduits à reconsidérer la question pour le cas d’un troisième site, Aire-sur-la-Lys « ZAC du Hameau de Saint-Martin » (Lorin et alii, 2008a). Ce dépouillement ne constitue cependant pas un inventaire exhaustif, mais les premiers éléments d’un corpus à établir pour le Nord-Pas-de-Calais.
2Les trois fouilles documentent des zones appartenant aux franges du principal relief de l’Artois (fig. 1). Le massif crayeux artésien est recouvert de limons loessiques sur une épaisseur parfois importante. Les implantations protohistoriques reconnues s’attachent à la bordure de versant de ces premiers reliefs. Les emprises de fouilles offrent des surfaces variables, mais aucune corrélation pertinente ne semble pouvoir être établie entre la taille du décapage et le nombre de fosses à profil particulier. À Aire-sur-la-Lys, seule une découverte peut être attestée sur le plus large décapage de 15 hectares, une autre à Achicourt sur 7 000 m2 et enfin un regroupement de trois fosses à Marœuil à l’une des extrémités des 18 000 m2 ouverts.
1. Contexte des découvertes
3La rareté du mobilier dans ces fosses offre un contexte chronologique difficile à cerner mais défini par association géographique avec des ensembles datés. Le contexte ne pourra être précisé qu’à partir de datations radiocarbone. Les occupations multiples repérées sur chacun des sites ne facilitent pas l’interprétation des données. Le contexte culturel pour le site d’Aire-sur-la-Lys est diversifié. Ce relief modeste, culminant à 80 m et surplombant la Lys au nord-ouest de son cours, a fait l’objet d’une occupation vaste et continue depuis le Néolithique jusqu’à l’Époque moderne. Elle se concentre néanmoins sur deux périodes, le Néolithique final, représenté par cinq longs bâtiments, et l’Âge du Bronze final avec trois grandes phases d’occupation et en particulier la phase la plus ancienne attribuée au Bronze IIIa-IIIb, qui correspond à l’aire géographique dans laquelle a été fouillée la fosse en « Y ». Spatialement, la fosse se situe entre une zone d’habitat et une zone funéraire composées d’un enclos allongé de type Langgraben, d’une vingtaine d’incinérations diffuses en pleine terre et, dans cette même zone, d’une autre fosse particulière contenant un dépôt de quatre gobelets à bulbe d’oignons.

Fig. 1. Localisation géographique et topographique des sites de Marœuil et Achicourt.
4Dans la banlieue sud-ouest d’Arras, la principale occupation du site d’Achicourt « Le Fort » se caractérise par six petits groupes considérés comme des unités d’habitation attribuées au Bronze final IIIb, un dernier ensemble de creusements permettant de proposer que l’habitat évolue jusqu’au Hallstatt ancien. La fosse à profil en « Y » s’intercale entre ces deux ensembles, sans que l’on puisse préciser si elle appartient à l’une ou à l’autre des deux périodes ou même à une autre phase décalée chronologiquement. Cette localisation particulière est renforcée par la proximité avec une fosse au caractère funéraire supposé, signalée par le dépôt de trois vases complets datés du Hallstatt C2.
5L’emprise du projet de Maroeuil est localisée dans le nord-ouest d’Arras, sur les dernières hauteurs de l’Artois. Elle domine la vallée de la Scarpe, avant un élargissement de la plaine d’Arras. Les fosses en « V » sont mêlées aux indices d’habitat formant des ensembles épars ou des regroupements plus concentrés, interprétés comme de probables unités d’habitations spatialement distinctes. L’occupation ne comporte aucun plan de bâtiment. Seules les constructions de type greniers ou annexes sont représentées. Le mobilier Bronze final IIIb constitue l’essentiel des découvertes. L’occupation de ce versant est toutefois antérieure sur cette partie du relief. En contrebas ont été découverts un enclos circulaire mal daté d’une quarantaine de mètres de diamètre et une fosse à proximité qui a livré du mobilier décoré à la cordelette qui trouve une comparaison typologique dans le mobilier Bronze ancien de Fréthun (Bostyn et alii, 1992). Le Bronze moyen et la transition avec l’étape ancienne du Bronze final sont indiqués par du mobilier céramique comparable à celui découvert sur le site de Roeux (Desfoss és et alii, 1992). Pour l’occupation de Marœuil, la situation apparaît donc plus complexe, avec la présence bien marquée de traces d’habitat dans la zone concernée par les fosses 308, 315 et 320. L’organisation générale laisse penser à la superposition de différents états chronologiquement distincts. Les reconstructions et décalages inhérents pourraient expliquer l’apparente superposition avec les fosses en « V » dans le cas d’un synchronisme même partiel. Il n’exclut cependant pas l’idée d’un hiatus chronologique ou même d’une discontinuité temporelle et fonctionnelle plus importante.
2. Description des fosses
6À Aire-sur-la-Lys, la fosse « F.231 » possède un profil en « Y » (fig. 3). Dans un premier temps, elle a fait l’objet d’une fouille manuelle, achevée ensuite par des moyens mécaniques. Le profil caractéristique présente une base allongée et très étroite. Cette section est régulière sur tout l’axe longitudinal. Le pied du « Y » est long, mais son évasement dans la moitié supérieure est net. Le plan ovalaire est inscrit sur deux axes de 3,12 m de longueur, pour 1,92 m de largeur.
7La large fosse 177 d’Achicourt présentait tous les aspects d’un chablis en surface. Le test manuel a permis de constater la régularité d’un creusement au contour rectangulaire au-delà du premier mètre particulièrement dégradé par l’érosion. La stabilisation du profil et les phases de comblements successifs livrent au final un profil très évasé en « Y » qui se resserre en profondeur, de manière à former dans le fond un espace étroit et régulier. C’est dans cet espace qu’un squelette de cervidé complet a été exhumé.
8Rue Curie à Marœuil, trois fosses forment un groupe homogène. L’association paraît évidente au regard des modules ovalaires, de leur profondeur, de l’espacement régulier entre elles et de l’orientation préférentielle nord/nord-est – sud/sud-ouest qu’elles dessinent. Chacun des profils s’apparente à un « V » en coupe transversale.
9La fosse 308 a fait l’objet d’une coupe longitudinale (coupe 1), puis décalée (coupe 2) et complétée par une coupe transversale (coupe 3). En définitive, ces sections révèlent une fosse profonde et un évasement régulier, légèrement dissymétrique. La fouille manuelle du remplissage a permis de découvrir un amas osseux associant différents ossements d’un sanglier, situé dans la partie centrale de l’étroite bande plane qui constitue le fond.
10La fosse 315 présente les mêmes caractéristiques, une forme ovalaire à sub-rectangulaire oblongue, des bords sub-verticaux à terminaison évasée et un fond étroit et régulier. Trois coupes ont été enregistrées (coupes 1 à 3). Dans le fond, à l’extrémité orientale, reposent des ossements appartenant pour la plupart à une partie de squelette de chevreuil.
11La fosse 320 présente un profil identique en « V » légèrement plus étroit, avec des parois plus abruptes. Le fond est entaillé en cuvette étroite, formant sur toute la longueur une rigole irrégulière. Aucun mobilier n’a été découvert lors de la fouille de cette troisième fosse.

Fig. 2. Tableau descriptif des structures inventoriées.
12Dans chacun des cas, le comblement s’est fait en suivant les phases de remplissage naturel d’une fosse laissée ouverte. À la base, des litages indiquent un ruissellement et un apport régulier de sédiments en fines couches répétées. Des comblements successifs plus importants leur succèdent. Ils sont interrompus à l’extrémité orientale par l’indice d’un aménagement, marqué par un remplissage plus hétérogène et présentant des traces d’hydromorphie. La fouille mécanisée de la seconde partie de la fosse et un levé en plan régulier au théodolite ont permis de retracer son contour, celui d’une section semi-circulaire pour cette moitié. Il pourrait correspondre aux traces laissées par le pourrissement d’un poteau.
3. Études spécialisées2
3.1. Étude malacologique du site de Marœuil (S. Loicq)
13Un total de cinq échantillons a été soumis à analyses (Str. 308 us. 1 et us 1/2, Str. 315 ; Str. 320 us 1/2 fond sud et fond nord-est). Leur étude est destinée à orienter l’interprétation du paléo-environnement local de ces fosses à profil en « Y ». Les prélèvements (5 l. de sédiment par échantillon) ont privilégié soit la couche de fond des fosses sur toute la longueur, soit le centre de la coupe longitudinale. Les niveaux de comblement concernés sont limoneux avec une quantité plus ou moins importante de petits éléments crayeux. Toutes les fosses en « Y » traversent un loess non calcaire, un loess calcaire et enfin un substrat crayeux. Ce tri a livré 213 coquilles de mollusques identifiables, trois échantillons s’étant par ailleurs révélés stériles ou presque.
14L’étude malacologique du site de Marœuil a mis en évidence un certain nombre de caractéristiques des fosses en « Y » étudiées. Les espèces rencontrées sont exclusivement terrestres, majoritairement le Discus rotundatus. Tous les échantillons révèlent l’existence d’un environnement semi-forestier, soit semi-ouvert/semi-fermé, potentiellement une zone en friche oscillant entre fauchage et ré-embuissonnement. Les assemblages malacologiques révèlent un paysage fermé, avec un faciès clairement semi-forestier, arbustif et buissonnant comprenant de nombreux éléments ligneux d’espèces arbustives et de quelques arbres à proximité, mais ne correspondent pas pour autant à des ensembles de pleine forêt.
15Le taux d’humidité au sol semble assez important sur substrat calcaire. La présence d’installations humaines à proximité n’est pas exclue. En effet, Discus rotundatus et Aegopinella nitidula sont deux espèces anthropophiles qui se retrouvent souvent à proximité des habitats.

Fig. 3. Les fosses en « V » et « Y » de Marœuil, Achicourt et Aire-sur-la-Lys.
3.2. Étude des restes fauniques du site d’Achicourt (Alessio Bandelli, Jean-Hervé Yvinec3)
16Le squelette d’un cerf, déposé au fond de la fosse du Bronze final st. 177 (fig. 4), représente sans doute l’élément le plus intéressant du corpus des restes fauniques prélevés sur l’habitat d’Achicourt, par ailleurs complété par quelques déchets culinaires supposés provenant de la structure 60 (huit restes qui ont pu être attribués à deux espèces domestiques – le bœuf et le porc).
17Le cerf, immature, reposait sur le fond de la structure 177. Le squelette est complet (à l’exception de quelques petits éléments qui ont dû échapper à la collecte manuelle) et en connexion anatomique. Il ne présente aucune trace de découpe ou de feu pouvant évoquer une intervention humaine sur le cadavre.
18Le corps est allongé en position dorsale-latérale gauche, la tête orientée vers l’est. Les membres postérieurs et la patte antérieure gauche sont entièrement repliés. Le membre antérieur droit est, en revanche, déplié, le métacarpe repose sur la tête. L’état dans lequel l’animal nous est parvenu ainsi que sa position soulèvent la question de son origine : s’agit-il d’un dépôt ou du piégeage de l’animal ? Un geste intentionnel est probable, comme le suggère l’espace contraint qui paraît avoir été creusé aux dimensions du cervidé. La position du corps dans cet espace réduit, formé par le goulot d’étranglement de la fosse, suggère autant le piégeage d’un animal qu’une déposition volontaire. L’étroitesse de la partie basale des fosses en « V » ou « Y » suggère une finalité cynégétique, la profondeur et la morphologie particulière permettant d’entraver la proie. Après discussion avec différents spécialistes4, des doutes sérieux subsistent quant à l’hypothèse d’un dépôt intentionnel de l’animal. Ces doutes tiennent en partie à la position en extension d’une des pattes, que l’on peut interpréter comme l’indice d’une bête piégée ne pouvant plus s’extirper de son piège et vouée à une mort lente par épuisement. Nous exprimons une réserve face à cet argument logique. Il demeure étonnant de penser qu’un tel dispositif n’ait pas fait l’objet d’une surveillance plus stricte ou d’un simple nettoyage si le gibier avait été découvert trop tardivement pour être consommé.
3.3. Étude des restes fauniques du site de Marœuil (G. Auxiette)
19Le site de Marœuil présente un profil faunique atypique qui se distingue très nettement des caractéristiques des rejets de consommation des sites de cette période (fig. 5 et 6). Cette remarque vaut en particulier pour les deux fosses en « Y » contenant des ensembles de faunes sauvages.
20Quelques os ont été découverts au fond de la grande fosse 315. Ils sont apparemment bien conservés en surface, mais ils sont en fait très fragilisés en profondeur et délités. La particularité de cet assemblage est d’être constitué de plusieurs parties d’au moins deux, voire trois animaux.
21Le premier individu est un chevreuil femelle tout juste adulte, de plus ou moins 14 mois. La tête est dirigée vers le nord et repose sur la joue droite. Les mandibules ne reposent pas l’une sur l’autre, mais sont légèrement décalées, la mandibule droite a glissé sous la gauche, suggérant un léger pivotement de la tête peut-être au moment du pourrissement des chairs, en espace vide. La tête est isolée des autres éléments du squelette qui se présentent sous la forme d’un amas longiligne constitué par le rassemblement des membres postérieurs et très bien circonscrit dans l’espace. L’examen détaillé des membres met en évidence la désorganisation anatomique du dépôt : la patte arrière droite, en connexion stricte, a été déposée dans le sens inverse de l’orientation du corps matérialisé par la tête, soit le proximal du tibia orienté vers le sud, fémur replié sous le tibia prolongé par le bas de patte. On peut supposer que l’acétabulum du coxal droit se situe à proximité du proximal du fémur. Cette même patte repose sous la patte arrière gauche (très fragmentée par la fouille) dont les éléments constitutifs sont déconnectés les uns des autres, mais sont aussi incomplets (absence du fémur) et déposés dans le sens inverse de sa jumelle droite. On distingue l’extrémité distale attachée à une partie de la diaphyse d’un fémur droit d’un animal immature et situé entre les deux « lots » constitués par deux fois deux côtes. On constate l’absence du fémur gauche qui s’explique difficilement alors que le coxal, le tibia et le métatarse (mais ni le calcanéum, ni l’astragale) sont bien présents.
22La forme prise par le dépôt suggère la présence initiale d’un contenant périssable pour accueillir les gigues. Elles ont été prélevées sur un, voire deux chevreuils et soigneusement déposées au fond de la fosse. L’hypothèse d’une décomposition au fond de la structure puis d’un prélèvement postérieur une fois l’animal fortement décomposé, n’est pas retenue, à moins que la dislocation de la tête ne soit un indice d’exposition et que le prélèvement de la colonne ait entraîné in fine le glissement des mandibules. Rappelons que l’articulation entre les condyles occipitaux et l’atlas est très solide et que les désarticuler entraîne inévitablement des perturbations des connexions, notamment celle de la tête.

Fig. 4. La fosse 177 d’Achicourt « Le Fort ». Clichés H. Trawka.

Fig. 5. Plans des fosses 315 et 308 de Marœuil « Rue Curie » et identification des ossements mis au jour. Dessin : M. Coutureau (Inrap) d’après Pales, Garcia, 1981.
23Un deuxième animal est représenté par un fémur – chevreuil ou capriné ? – de moins de 14 mois s’il s’agit d’un chevreuil, ou de moins de 40 mois s’il s’agit d’un capriné. Un dernier individu est identifié par un calcanéum droit d’une taille identique à celui du premier animal, situé dans la tête de ce dernier « entre » les deux mandibules et deux phalanges proximales.

Fig. 6. Les fosses 308 et 315 de Marœuil « Rue Curie ». Clichés Y. Lorin. Photographies de l’auteur, Inrap.
24Dans le second assemblage (structure 308 – fig. 5 et 6), les ossements se présentent sous la forme d’un amas compact rassemblant exclusivement quelques os d’un sanglier sans connexion apparente. L’état de conservation des os est similaire à celui du dépôt précédent (st. 315). Les pattes antérieures appartiennent à un jeune sanglier adulte de plus de 12 mois et de moins de 42 mois. Quoique disparate, cet assemblage ne ressemble en rien aux rejets domestiques classiques fragmentaires. En effet, ces os sont complets (même si, à la fouille, certains os ont subi une fragmentation) et appartiennent au même animal. La présence d’un proximal de fémur et d’une rotule laisse supposer que l’amas était peut-être constitué à l’origine d’une patte postérieure et d’un crâne, du fait de la présence de la troisième molaire et peut-être d’autres vertèbres. À l’examen détaillé de l’amas (étudié à partir des photos de travail), une observation s’impose : les restes se présentent sous la forme d’un « paquet » d’os rassemblés avec des inclinaisons variables, certains étant pratiquement verticaux. Certains os semblent « épouser » les parois d’un contenant initialement en matériau périssable, un sac par exemple, comme le suggère la verticalité des os longs antérieurs gauches et de quelques côtes, sac duquel certains éléments se sont échappés, notamment la vertèbre thoracique. Nous interprétons cet assemblage comme le rassemblement de certains morceaux – préalablement décharné ? – d’un animal probablement sacrifié, finalement « déposé » dans un contenant périssable au fond de la fosse.
4. Hypothèses d’interprétation
25Ce premier recensement illustre une domination du corpus – soit trois cas sur cinq – par un type de fosse, de forme régulière rectangulaire à ovalaire, allongée et à profil en « V ». Les deux autres montrent de vrais profils en « Y » et des variations du contour en surface. Les profils décrits tendent à offrir une ouverture plus ou moins large, un resserrement progressif jusqu’à une base étroite en profondeur. Ce constat rejoint dans son esprit, la définition allemande d’une morphologie en « fentes » (Schlitzgruben, Schlitzgräbchen, slits). Il correspond cependant à une tendance qui ne doit pas masquer la variabilité existante.
26Les observations qui ont pu être faites par les différents intervenants nous confortent dans la formulation d’hypothèses de travail. D’abord par élimination progressive de l’hypothèse artisanale. Spatialement, la cartographie de ces fosses ou indices d’activité permet de les distinguer des autres regroupements, et même de les rapprocher d’indices à vocation non domestique (funéraire à Aire-sur-la-Lys et Achicourt ?). Ce rejet hors des zones de vie pourrait trouver une explication à travers l’hypothèse d’un nécessaire éloignement dans le but d’échapper à des nuisances olfactives par exemple (Buttler, Haberey, 1936). Le cas de Marœuil traduit la complexité d’une telle interprétation sur un plan géographique. L’ensemble des découvertes correspond à un type d’occupation étendu et livrant une densité faible à moyenne de structures (deux à dix structures pour 100 m2). Les interprétations courantes font de tels sites des occupations marquées par les rejets d’une ou plusieurs unité(s) agricole(s) et domestique(s), ayant une durée limitée et dont les indices correspondent probablement à une utilisation répétée dans le temps. Pour ce type d’habitat dispersé, dont les limites ont immanquablement varié au fil des reconstructions, il est délicat de proposer un phasage précis à partir du mobilier céramique. L’absence de plans de bâtiments d’habitation rend plus complexe encore l’interprétation de l’organisation. Par ailleurs, ce sont des habitats qui sont non délimités ou du moins dépourvus de délimitations avérées ou conservées. Au final, les traces subsistantes se réduisent à une série de creusements épars et une analyse de type spatial devient problématique voire incertaine. À Marœuil, il n’est pas exclu que ces fosses se soient trouvées en dehors de la zone d’habitation. Les échantillons soumis au laboratoire de l’université de Groningue pour datations radiocarbone permettront sans doute d’avancer vers l’une ou l’autre de ces hypothèses. Leurs résultats sont attendus pour discuter l’éventualité d’une discontinuité plus forte. Pour l’heure, seul un tesson de céramique dont l’aspect général autorise une attribution à l’Âge du Bronze permet de proposer une éventuelle contemporanéité avec les autres vestiges de l’habitat. Cette information est importante puisque de nombreuses questions se posent encore sur le mode et la durée d’utilisation. L’étude malacologique documente un aspect de leur relation éventuelle avec l’habitat et sa position en lisière de forêt. La micro-faune devrait permettre de compléter les indices liés à l’environnement immédiat du site.
27Les profils « en fente » ne sont pas les seules caractéristiques de ces fosses. La rareté du mobilier issu de ces dernières en est une autre. Les restes fauniques sont les rares éléments susceptibles de compléter une réflexion sur la fonction. Ils sont présents dans le fond de trois de ces cinq fosses. Les assemblages fauniques se distinguent du simple rejet de reliefs domestiques. La nature des structures dont le mobilier osseux est ici issu semble conditionner la nature des rejets. Ainsi, la composition de ces assemblages est le résultat de gestes précis, qui évoquent le lien entre pratiques cynégétiques et valeur(s) symbolique(s).

Fig. 7. Hypothèse d’une fonction cynégétique.
28La piste de fosses dédiées à la chasse est bien documentée. Ce sont les « trap-pit » ou « trapping pit » des recherches archéologiques scandinaves, japonaises et proche-orientales5. Les exemples régionaux décrits dans cet article permettent d’aider à la formulation d’hypothèses concernant la ou les fonction(s) associée(s) à ces structures particulières et d’évoquer d’éventuels rapprochements avec ces autres régions du globe. Le trait commun à de nombreuses structures identifiées en groupes, c’est l’impression d’une organisation régulière en ligne. Des alignements comparables ont été décrits préalablement, à Colmar « Route de Rouffach » dans le Bas-Rhin (Jeunesse, 1993) ou encore à Rosenburg « Flur Hofmühle » en Autriche (Lenneis et alii, 1996). Une vingtaine de fosses identifiées comme des Schlitzgruben, découvertes lors de la fouille d’un village rubané, sont alignées, parallèlement entre elles, sur un même axe long de 50 m. De tels alignements sont recensés dans certains pays comme la Norvège. Ils font l’objet d’hypothèses diverses dont celui d’un dispositif de chasse élaboré. Ainsi, les trois fosses de la rue Curie peuvent être envisagées comme un « focus » représentatif de l’aménagement plus complexe d’un système de chasse par rabattage d’animaux (fig. 7). Leur disposition décrit des lignes piégeant le gibier ou le contraignant dans sa fuite à suivre de véritables couloirs prédéfinis. Ce dispositif rappelle des systèmes connus à différentes périodes et de par le monde6 (cf. les Desert Kites et l’art rupestre saharien, Braemer, Echallier, 1995). Dans cette hypothèse, les fosses jouent le rôle de pièges régulièrement établis le long du parcours imposé au gibier, ces obstacles pouvant être implantés suite à des observations préalables en lien avec la topographie ou les coulées habituelles empruntées par les hardes de gibier. Cette hypothèse séduisante est résumée à travers la superposition des relevés des fosses implantées sur la pente, suivant la logique du dispositif complet découvert dans la région de Dovrefjell-Rondane, en Norvège (Jordhøy et alii, 2005).
29Ces deux propositions – cynégétique et symbolique – ne sont pas nécessairement contradictoires. En effet des pratiques ritualisées peuvent être raisonnablement envisagées au sein de sociétés aux pratiques et gestes fortement codifiés. Dans la description que nous avons pu faire des trois cas ayant livré de la faune à Marœuil, les restes sont assimilés à des dépôts intentionnels de morceaux dont certains ont pu être préalablement consommés pour au moins deux des trois cas étudiés. La morphologie des fosses leur confère une fonction liée à la technique de chasse (piégeage ?). L’hypothèse qui consiste à envisager que certaines parties de l’animal pris au piège seraient restées prisonnières de la fosse au moment de l’extraction du corps semble exclue dans le cas des assemblages de Marœuil. Ces assemblages de faunes sauvages sont vraisemblablement les témoignages de pratiques ritualisées concomitantes à leur rôle strictement fonctionnel. L’ethnologie décrit de telles pratiques pour nombre des activités du quotidien. Les esprits sont convoqués à des moments précis et au moyen de rituels très codifiés sous la forme de rites propitiatoires destinés à favoriser dans le cas présent, la capture. Ces pratiques pourraient-elles fournir de tels indices, mettant en scène la technique de chasse tout en rendant à la nature sur les lieux mêmes de la chasse les bénéfices de son produit ?
30À Achicourt, au dépôt intentionnel d’un animal sauvage entier, peut être objecté l’abandon ou l’oubli d’une bête piégée. En l’absence d’une interprétation définitive, c’est la place importante d’espèces sauvages (cerf, chevreuil, sanglier…) dans le comblement inférieur de ces fosses qui pourrait répondre à l’hypothèse d’une fonction cynégétique. Un premier dépouillement bibliographique fait apparaître un nombre de cas non négligeable de « dépôts » avérés de cervidés pour la période de l’Âge du Bronze, dont le plus remarquable est celui du département de l’Oise, avec la découverte ancienne faite à Bury, près de la rivière appelée le Thérain. Lors du creusement d’un étang, une sépulture protohistorique y a été découverte. Elle contenait un fragment de crâne humain, un andouiller de cerf, deux squelettes de cerf de grande taille (bois de dix corps) et une hache en bronze (Baudon, 1867, p. 728-731).
31Ces formes des dépôts ne sont pas sans rappeler d’autres exemples dans un espace géographique large, entre Champagne et Normandie jusqu’à la région Centre. Toutes ne présentent pas des caractéristiques identiques, mais elles confirment l’implication de l’animal sauvage lors de pratiques ritualisées au sein des Cultures du nord de la France.
Bibliographie
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BIBLIOGRAPHIE
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Annexe
THE PITS WITH V- AND Y-SHAPED SECTION IN THE NORD-PAS-DE-CALAIS REGION
Yann Lorin, Ginette Auxiette, Sabine Loicq, Jean-Hervé Yvinec
Abstract
Recent excavations in the Nord-Pas-de-Calais region have revealed settlements dated to the Bronze Age. Mainly based on these new data, we will enter into the question of the pits with “V-, W-, Y-shaped section”. The site of Achicourt “Le Fort” (Lorin et alii, 2008b) has been rapidly integrated to this issue7, and subsequently associated with the results stemming from the recent excavation at Maroeuil “Rue Curie” (Lorin, 2011 – in press) that provided analogous data. As a result from the global revision of this issue in the neighbouring regions we reconsider the question for a third site, Aire sur la Lys «ZAC of Hameau de Saint-Martin» (Lorin et alii, 2008a). This analysis, however, does not constitute a real inventory but only the first elements of a data corpus compiled for the Nord-Pas-de-Calais region.
Context of the discoveries
In these three sites, the rare vestigial remains only offer a very badly defined chronological context, mainly through the spatial association with already dated assemblages. This context can only be determined more precisely through radiocarbon dating. The multiple occupations identified on each site do not facilitate the interpretation of the data. The cultural context for the site of Aire sur La Lys is particularly diversified.
Description of the pits
Pit “F. 231”, discovered in the site of ZAC Saint-Martin has a Y-shaped section. It has been partially excavated by hand and the digging was then completed by mechanical means. The characteristic section has a long and very narrow bottom. The section is regular along the entire longitudinal axis. The foot of the “Y” is long but it shows a clear widening in its upper half. The oval plan measures 3,12m along its longer axis and 1,92m transversely
In plan, the large pit 177 of Achicourt presents all the characteristics of a windthrow. However, manual uncovering has permitted to demonstrate the regular outline of the digging out beyond the first meter down, particularly damaged by erosion. The stabilisation of the section and the successive phases of the filling finally show a strongly widened “Y-” shaped» section tapering downwards and forming a narrow and regular space at bottom. In this space, a complete deer was “deposited” or “captured.
”In the site of Maroeuil “Rue Curie” three pits form a homogenous complex. Their association seems obvious through their oval shape, their depth, the regular distance that separates them and their preferential orientation pointing north/northwest. Each of the transverse sections resembles a “V”. The sections evidence a deep pit with a regular, slightly dissymmetrical widening. The excavation of the infill has permitted to uncover an amount of different bones from boar, laid down in the central part of the narrow stripe at bottom of the pit. Pit 315 exhibits the same characteristics, an oval, almost rectangular oblong shape, nearly vertical wide-mouthed sides and a narrow regular bottom. Three sections have been planned (section 1 to 3). At the east end of the bottom laid the bones, mostly belonging to a partial skeleton of roe deer
Pit 320 has the same “V-shaped” section, the whole feature is slightly narrower and the sides steeper. The bottom is formed by a narrow, irregular-shaped groove along the entire longer axis. No archaeological material was recovered from this third pit.
In each case, the filling was made according to the natural backfilling of a pit that has been left open. The lowermost levels indicate water streaming and a regular sedimentation process with multilayered thin deposits.
Specialized studies8
Analysis of the faunal remains of the site of Achicourt by Alessio Bandelli (a), and Jean-Hervé Yvinec (b)9.
The skeleton of a juvenile deer, deposited at bottom of feature 177 and dated to the Final Bronze Age, doubtlessly represents the most interesting element within the assemblage of faunal remains sampled in the settlement of Achicourt. The skeleton is complete and is lying in the natural anatomical position. It does not present any butchering marks or fire traces that can be put in relationship with a human intervention on the carcass. The remains of the animal in a state of non alteration, as suggested by this discovery, allow an interpretation as a deposit as well as a trap pit.
Analysis of the faunal remains of the site of Maroeuil by Ginette Auxiette10
The site of Maroeuil exhibits an untypical faunal assemblage that very clearly distinguishes from food refuse in other sites assigned to this period. This observation more particularly applies for the two pits with “Y-shaped” section that have yielded wild fauna.
Several animal bones have been discovered at bottom of the large pit 315. They are apparently well preserved at their surface but they are in reality very fragmented and cleaved inside. More particularly, this assemblage is constituted by diverse parts stemming from at least two or three different animals. The form of the deposit suggests the initial presence of a perishable container in which the haunches were kept. They have been cut from one or two roe deer and carefully placed in the bottom of the pit. A second animal is represented by a femur – roe deer or caprine? – less than 14 months old if we deal with roe deer or less than 40 months old if we deal with a caprine. A last animal has been identified through a right heel bone of identical size compared to the one of the first animal. It has been found in the skull of the latter, “between” the two mandibles and two first phalanges.
In the second assemblage (feature 308), a series of bones appear as a compact amount. They exclusively belong to boar and were not lying in their anatomical position. The state of preservation of the bones is similar to the one of the former deposit (feature 315). The anterior paws belong to a young adult boar between 12 and 42 months old. Although unorganized, this assemblage clearly does not resemble classical fragmentation of domestic refuse. As a matter of fact, these bones are complete (although certain have been damaged during excavation) and they belong to the same animal.
Some bones seem to “line” the walls of a container initially made from perishable material, for example a bag as it is suggested by the vertical position of the left anterior limbs and several ribs, from which certain elements have been detached, in particular the thoracic vertebrae. We interpret this assemblage as the collecting of distinct anatomical parts of an animal after its decomposition, deposited as a sacrifice and carefully “placed” within a container in the bottom of the pit.
Hypotheses of interpretation
This first inventory shows that this complex is dominated by a distinct type of pit exhibiting a regular, rectangular-or oval-shaped, elongated plan and a “V-shaped” section. This type is represented by three pits. The other two have real «Y-shaped» sections and their outlines vary in plan. The described sections show a more or less large mouth, progressively tapering down to a narrow base. This observation matches the German definition of “slot” type morphology (slot pits). However, this describes merely a trend and we should keep in mind the existing variability of these features.
The observations made by the different specialists confirm our primary hypotheses. First, the hypothesis of craft can be ruled out. The spatial mapping of these pits or indications of activities allow to distinguish them from the other groups and even to connect them with non domestic activities (burials at Aire sur la Lys and Achicourt?). This refuse disposal outside the living areas can be explained by the hypothesis of a necessary distance in order to escape from nuisance for example (Butler, 1936).
At Maroeuil, it can not be excluded that these pits may have been located outside the settlement areas.
The malacological study confirms an aspect concerning their relationship with the dwelling place and its location close to the forest.
The study of the microfauna is expected to complete the indications related to the immediate environment of the site.
The “slot” sections are not the only characteristics of these pits. The scarcity of archaeological material stemming from these latter is another one. The faunal remains are the rare elements that may complete a reflection about their function. They are present at bottom of three from five pits. The faunal assemblages distinguish from ordinary domestic refuse. The nature of the features from which stems the bone material seems to condition the nature of the refuse. Thus, the composition of the assemblages either results from accidental or intentional capture for which an adequate interpretation has to be proposed. In both cases, they are related to the hunting and/or symbolic domain.
Thus, the three pits of Rue Curie may be considered as a representative part of a more complex construction, for example a hunting system for big game. Their position describes lines to capture the game or to force it into predefined corridors. This system recalls other ones known from different periods and worldwide11 (see the desert kites and the Saharan rock art (Braemer, Echallier, 1995). According to this hypothesis, the pits play the role of traps regularly set along the forced path of the game. These obstacles/fences could have been erected according to preceding observations related to the topographical situation or the pathways currently used by the herds of wild animals. This attractive hypothesis may be derived from the superposition of the mapping of pits set up on the slope, and inspired by the complete system described in the region of Dovrefjell-Rondane, in Norway (Jordhøy et alii, 2005).
At Achicourt, the abandon of a captured animal may be opposed to the intentional deposit of a complete wild animal. Lacking a definitive interpretation, it is the high number of wild species (deer, roe deer, boar…) at bottom of these pits that may match the hypothesis of a hunting function. This would not be accidental! A first overview of the literature reveals a significant number of cases of deer “deposits” for the Bronze Age period. The most noticeable is the one of the Oise department with the ancient discovery made at Bury, near Le Thérain. A Bronze Age burial has been discovered during the digging out of a pond. It contained the fragment of a human skull, a deer tine, two skeletons of deer, ten corpses and a bronze axe (Baudon, 1867, p.728-731).
These types of deposits also recall other examples distributed over a wider geographical area between Chapaign and Normandy down to the Centre region. They do not all present the characteristics of the above mentioned cases but they confirm the importance of wild animals within the cultures in Northern France.
DIE GRUBEN MIT V- UND Y-FÖRMIGEM QUERSCHNITT IM DEPARTEMENT NORD-PAS-DE-CALAIS
Yann Lorin, Ginette Auxiette, Sabine Loicq, Jean-Hervé Yvinec
Zusammenfassung
Bei neueren Grabungen in der Region Nord-Pas-de-Calais wurden bronzezeitliche Siedlungen freigelegt. Ausgehend von vorwiegend diesen neuen Funddaten gehen wir der Frage der Gruben mit „V-, W-und Y-„ förmigem Querschnitt nach. Die Fundstelle „Le Fort“ (Lorin et alii, 2008a) wurde rasch in diesen thematischen Zusammenhang gestellt12 und dann mit den Grabungsergebnissen der neueren Grabung von Maroeuil „Rue Curie“ (Lorin, 2011 – im Druck) assoziiert, die ähnliche Funddaten lieferte. Eine globale Behandlung des Themas in den benachbarten Regionen, hat uns dazu veranlasst, die Frage anhand einer dritten Fundstelle zu untersuchen, Aire sur la Lys „ZAC du Hameau de Saint-Martin“ (Lorin et alii, 2008a). Diese Dokumentanalyse bildet jedoch kein richtiges Inventar, vielmehr handelt es sich hier um die ersten Elemente eines Korpus, der für die Region Nord-Pas-de-Calais erstellt werden soll.
Kontext der Entdeckungen
An diesen drei Fundstellen ist der chronologische Kontext aufgrund des spärlichen archäologischen Fundmaterials ziemlich schlecht definiert, meistens über die Assoziierung mit benachbarten, bereits datierten Fundensembles. Der Kontext kann jedoch nur anhand von14C-Datierungen genau datiert werden. Die vielfältigen Besiedlungsphasen an allen diesen Fundstellen erschweren die Interpretation der Daten. Zudem ist der kulturelle Kontext für die Fundstelle Aire sur La Lys breit gefächert.
Beschreibung der Gruben
Die Grube „F231“ in der ZAC Saint-Martin besitzt einen „Y-“förmigen Querschnitt. Sie wurde zunächst per Hand sondiert und die Grabung dann maschinell fortgesetzt. Der charakteristische Querschnitt weist eine längliche und sehr enge Basis auf. Dieses Profil ist auf der gesamten Längsachse gleichbleibend. Der Fuß des „Y“ ist lang, aber eine Verbreiterung in der oberen Hälfte klar erkennbar. Im Planum erscheint die Grube als Oval von 3.12 m Länge auf 1.92 m Breite.
Die breite Grube 177 von Achicourt weist an der Oberfläche alle Aspekte eines Windwurfs auf. Bei der Grabung per Hand, konnte jedoch ein regelmäßiger, rechteckiger Grubenumriss beobachtet werden, der über den durch Erosion besonders gestörten ersten Meter Sediment hinaus in die Tiefe reichte. Die Stabilisierung des Profils und die aufeinanderfolgenden Verfüllungsphasen ließen schlussendlich einen sehr ausgeweiteten „Y-“förmigen Querschnitt erkennen, der sich nach unten verjüngt und an der Sohle einen engen und ebenmäßigen Hohlraum bildet. Darin war das komplette Skelett eines Hirsches «deponiert» oder „gefangen“.
An der Fundstelle Rue Curie in Maroeuil bilden drei Gruben eine homogene Gruppe. In Anbetracht ihrer ovalen Form, ihrer Tiefe und des regelmäßigen Abstandes, der sie voneinander trennt, sowie ihrer vorrangig NNW-SSW orientierten Ausrichtung, scheint ihre Assoziierung eindeutig. Im Querschnitt zeigen sie alle eine „V-“Form. Diese Gruben sind tief und besitzen einen leicht asymmetrischen, sich gleichmäßig nach oben verbreiternden Querschnitt. Beim Ausgraben der Verfüllung konnte eine Anhäufung von Knochen entdeckt werden, die verschiedene Knochen eines Wildschweins enthielt, das im mittleren Abschnitt der ebenen Sohle deponiert worden war.
Grube 315 weist die gleichen Charakteristika auf, eine ovale bis länglich-rechteckige Form, annähernd gerade Wände, die sich nach oben verbreitern und eine enge gleichförmige Sohle. Drei Schnitte wurden aufgenommen (Schnitt 1 bis 3). Am Boden befanden sich am östlichen Ende Knochen, die größtenteils zu einem Teil eines Rehskeletts gehören.
Grube 320 beschreibt das gleiche „V-“förmige Profil, insgesamt ist die Grube jedoch etwas enger und die Wände steiler. Der Boden besteht aus einer engen Vertiefung, die als unregelmäßige Rinne auf der gesamten Länge ausgeprägt ist. Bei der Ausgrabung dieser dritten Grube wurde kein Fundmaterial entdeckt.
In allen Fällen erfolgte die Verfüllung der offen stehenden Gruben durch natürliche Sedimentablagerungen. Die Schichtablagerungen an der Basis zeigen Versickerungsspuren und regelmäßige Sedimentablagerungen in übereinanderliegenden dünnen Schichten.
Spezialuntersuchungen13
Untersuchung der Faunenreste der Fundstelle Achicourt durch Alessio Bandelli (a), Jean-Hervé Yvinec (b)14.
Das Skelett eines juvenilen Hirsches, der auf dem Boden der spätbronzezeitlichen Grube 177 deponiert wurde, stellt zweifelsohne das interessanteste Element des in der Siedlung von Achicourt gesammelten Korpus von Faunenresten dar. Das Skelett war vollständig und lag im anatomischen Verbund. Es zeigte keine Schnitt- oder Brandspuren, die menschlichen Eingriff am Kadaver belegen könnten. Die Knochenreste waren nicht beschädigt. Daher kommen zwei Interpretationen in Betracht, ein Depot oder eine Falle.
Untersuchung der Faunenreste der Fundstelle von Maroeuil durch Ginette Auxiette15
Die Faunenreste der Fundstelle von Maroeuil zeigen ein atypisches Bild, das sich sehr klar von charakteristischen Speiseabfällen aus Siedlungsfundstellen dieser Periode unterscheidet. Diese Bemerkung bezieht sich insbesondere auf die zwei Gruben mit „Y-“förmigem Querschnitt, die Wildtierknochen enthielten.
Am Boden der großen Grube 315 wurden mehrere Knochen entdeckt. An der Oberfläche erscheint ihr Erhaltungszustand gut, sie sind jedoch in Wirklichkeit im Innern sehr brüchig und zersplittert. Die Besonderheit dieses Ensembles besteht darin, dass es sich aus verschiedenen Skelettteilen zusammensetzt, die von mindestens zwei, vielleicht auch drei Tieren stammen. Die Form des Depots lässt annehmen, dass diese Haxen sich ursprünglich in einem Behältnis aus vergänglichem Material befanden. Diese Fleischteile stammen von einem oder zwei Rehen und wurden sorgfältig auf dem Grubenboden niedergelegt. Ein zweites Tier – Reh oder Schaf/Ziege? – ist durch den Oberschenkelknochen eines mindestens 14 Monate alten Tieres, sollte es sich um ein Reh handelt oder eines mindestens 40 Monate alten Tieres, sollte es sich um ein Schaf/Ziege handelt, vertreten. Ein letztes Tier kann durch ein rechtes Fersenbein belegt werden, dass die gleiche Größe wie dasjenige des ersten Tieres besitzt und sich an dessen Schädel, zwischen den beiden Kieferknochen und den zwei ersten Phalangen befand.
In dem zweiten Ensemble (Struktur 308), lagen die Knochen in einer kompakten Anhäufung vor, die lediglich ein paar Wildschweinknochen ohne offensichtlichen Verband enthielt. Der Erhaltungszustand der Knochen ist mit demjenigen des vorhergehenden Depots (Grube 315) vergleichbar. Die Vorderhufe gehören zu einem juvenilen Wildschwein zwischen 12 und 42 Monaten. Obwohl dieses Ensemble verstreut ist, ist es in keiner Weise mit üblichen Fragmenten aus Siedlungsabfall vergleichbar. Tatsächlich sind diese Knochen vollständig (auch wenn bei der Grabung manche Knochen fragmentiert wurden) und gehören zu demselben Tier.
Manche Knochen scheinen sich an die Wände eines ursprünglich vorhandenen Behältnisses aus vergänglichem Material anzupassen, zum Beispiel ein Sack, wie es die in Längsrichtung liegenden linken vorderen Beinknochen und ein paar Rippen vermuten lassen. Aus diesem Verband fallen ein paar Elemente heraus, insbesondere der Rückenwirbel. Wir interpretieren dieses Ensemble als eine Auswahl von bestimmten anatomischen Teilen nach der Zersetzung eines Tieres, die als Opfergabe sorgfältig auf dem Boden der Grube „deponiert“ wurden.
Interpretationsvorschläge
Diese erste Bestandesaufnahme zeigt, dass im Korpus mit drei Fällen ein Grubentyp dominiert, der eine regelmäßig rechteckige bis ovale, längliche Form besitzt, sowie einen „V-„ förmigen Querschnitt. Die anderen zwei Fälle weisen echte „Y-“ förmige Querschnitte auf und ihre Umrissform variiert im Planum. Die beschriebenen Querschnitte weisen mehrheitlich eine mehr oder weniger breite Öffnung auf, die sich in die Tiefe nach und nach verengt und mit einer engen Basis endet. Diese Beschreibung passt zu der deutschen Definition der „Schlitzgruben“, sollte aber nicht die vielfältigen Ausprägungen verdecken.
Die Beobachtungen, die von den verschiedenen Bearbeitern gemacht werden konnten, bestätigen unsere Arbeitshypothese. Zunächst durch das progressive Ausschließen der Hypothese von Handwerksgruben. In der Fläche erlaubt es die Verteilung oder Hinweise auf Aktivitäten, diese Gruben von anderen Gruppierungen zu unterscheiden und sie sogar außerhalb eines Zusammenhangs von Siedlungsaktivitäten zu stellen (Bestattungen in Aire sur la Lys und Achicourt?). Dieser Abfall außerhalb des Siedlungsbereiches könnte vielleicht damit erklärt werden, dass man hier etwas mit einer notwendigen Distanz entsorgte, um Umweltbelästigungen zu vermeiden (Butler, 1936).
In Maroeuil ist nicht auszuschließen, dass diese Gruben sich außerhalb des Siedlungsbereiches befanden.
Die malakologische Untersuchung bestätigt einen Aspekt ihrer möglichen Beziehung zur Siedlung und deren Lage am Waldrand.
Die Mikrofauna dürfte es ermöglichen, die Hinweise auf die unmittelbare Umgebung der Fundstelle zu ergänzen.
Die schlitzförmigen Querschnitte sind nicht das einzige Charakteristikum dieser Gruben. Ein weiteres ist das geringe Fundmaterial.
Die Faunenreste gehören zu den wenigen Elementen, die die Überlegungen zur Funktion vorantreiben können. Sie traten am Boden von drei von fünf Gruben auf. Diese Ensembles unterscheiden sich von gewöhnlichem Siedlungsabfall. Die Art der Struktur, aus der das Knochenmaterial stammt, scheint die Art des Abfalls zu bestimmen. Daher ist die Zusammensetzung der Ensembles entweder das Ergebnis eines zufälligen Fangs oder das Ergebnis von präzisen Handlungen für die eine entsprechende Interpretation in Betracht gezogen werden muss. In beiden Fällen steht sie im Zusammenhang mit der Jagd und/oder der Symbolwelt.
So können die drei Gruben der Rue Curie als ein repräsentativer Ausschnitt einer komplexeren Einrichtung betrachtet werden. Dabei denkt man an ein Fallensystem durch Treibjagd. Die Anordnung in Reihen verdeutlicht Gehege, in denen das Wild zusammengetrieben oder auf seiner Flucht in bereits vorhandene Korridore gelenkt wurde. Diese Einrichtung erinnert an bekannte Fangvorrichtungen aus unterschiedlichen Perioden in anderen Teilen der Welt16 (siehe die „Wüstendrachen“ (desert kites) und die Felskunst in der Sahara (Braemer, Echallier, 1995). Bei dieser Hypothese würde es sich um in regelmäßigen Abständen entlang eines Wildwechsels aufgestellte Fallgruben handeln. Diese Fallen wurden an gut beobachteten günstigen Stellen im Gelände oder entlang der Wildwechsel angelegt. Diese naheliegende Hypothese geht aus der Überlagerung der Planzeichnungen der am Abhang angelegten Gruben hervor und folgt der Logik einer kompletten Vorrichtung, die in der Region von Dovrefjell-Rondane in Norwegen beschrieben wurde (Jordhøy et alii, 2005).
Bei dem Befund in Achicourt kann es sich sowohl um das Depot eines kompletten Wildtieres als auch um eine in der Falle vergessene Beute handeln. Da eine endgültige Interpretation noch aussteht, könnte der große Anteil an Wildtierarten (Hirsch, Reh, Wildschwein…) für eine Jagdfunktion sprechen. Dies wäre kein Zufall! Eine erste Durchsicht der Literatur erbrachte eine beachtliche Anzahl von „Depots“ von Hirschen für die Bronzezeit. Davon ist der bemerkenswerteste ein Altfund im Departement Oise in Bury, in der Nähe von Thérain. Beim Ausheben eines Teiches wurde dort eine bronzezeitliche Bestattung entdeckt. Sie enthielt die Fragmente eines menschlichen Schädels, eine Hirschgeweihstange, zwei Skelette von Hirschen, zehn menschliche Skelette und eine Bronzeaxt (Baudon, 1867, S.728-731).
Diese Art von Depot erinnert an andere Beispiele, die innerhalb eines weitgespannten geographischen Gebietes, zwischen der Champagne und der Normandie bis nach Zentralfrankreich verbreitet sind. Alle besitzen die gleichen Charakteristika und bestätigen die Bedeutung des Wildtieres in den Kulturgruppen Nordfrankreichs.
Notes de bas de page
1 Je tiens à remercier ici M. Talon et J-.H. Yvinec pour les premiers échanges sur ce thème.
2 Les études sont présentées sous forme de résumé.
3 A. Bandelli A., Laboratoire d’archéozoologie C.R.A.V.O., 21 rue des Cordeliers, 60200 Compiègne, et J.-H. Yvinec, Inrap, UMR 5197 du CNRS, C.R.A.V.O., 21 rue des Cordeliers, 60200 Compiègne.
4 Voir la retranscription des discussions notamment (en fin de volume).
5 Voir le premier dépouillement bibliographique de l’ACR Champagne Ardennes.
6 Cette analogie a été soulignée par différents participants à cette journée d’étude.
7 Thanks to M. Talon and J.-H. Yvinec for discussion on this issue.
8 These studies are published under the form of abstracts.
9 Bandelli A., Inrap and Yvinec J.-H., Cravo.
10 Ginette Auxiette.
11 This parallel has been highlighted by the organizers of the meeting.
12 Ich möchte an dieser Stelle M. Talon und J.-H. Yvinec für erste Diskussionen zu diesem Thema danken.
13 Die Untersuchungen werden in Form von Zusammenfassungen vorgestellt.
14 Bandelli A., Inrap und Yvinec J.-H., Cravo.
15 Ginette Auxiette.
16 Auf diese Analogie wurde von den Organisatoren der Tagung hingewiesen.
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Chasse, culte ou artisanat ? Les fosses « à profil en Y-V-W »
Ce livre est cité par
- Michler, Matthieu. Badey, Sylvain. Berranger, Marion. Cabboï, Luisella. Clerc, Patrick. Jodry, Florent. Putelat, Olivier. Van Es, Marieke. (2018) Ensilage et artisanat du fer entre le Hallstatt D3 et La Tène ancienne à Weyersheim (Bas-Rhin). Premiers résultats. Archimède. Archéologie et histoire ancienne, 5. DOI: 10.47245/archimede.0005.var.02
- Crassard, Rémy. Abu-Azizeh, Wael. Barge, Olivier. Brochier, Jacques Élie. Chahoud, Jwana. Régagnon, Emmanuelle. (2022) The Use of Desert Kites as Hunting Mega-Traps: Functional Evidence and Potential Impacts on Socioeconomic and Ecological Spheres. Journal of World Prehistory, 35. DOI: 10.1007/s10963-022-09165-z
Chasse, culte ou artisanat ? Les fosses « à profil en Y-V-W »
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