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2. Analyse typologique
p. 23-64
Texte intégral
2.1. Les coupes de Kirkendrup-Jenišovice
2.1.1. État de la documentation
1Les coupes et tasses du type de Kirkendrup ou de Jenišovice figurent parmi les modèles de vaisselles en bronze les plus répandus en Europe. Parmi les inventaires publiés les plus récents, celui de J.-P. Thevenot porte à 120 le nombre des récipients recensés pour 60 sites (Thevenot, 1991, p. 108-110). Avec trente-deux coupes et tasses, l’effectif d’Évans représente donc un peu plus du quart de la totalité des récipients de ce type inventoriés avant cette découverte.
2Depuis l’étude de Sprockhoff (1930), plusieurs spécialistes se sont intéressés aux coupes et tasses de Kirkendrup qui ont donné lieu à des analyses typologiques et spatiales complémentaires : Childe, 1949 ; Thrane, 1965 et 1976 ; Ebel, 1987 ; Patay, 1990, 1996 ; Thevenot, 1991 ; Kytlicová, 1991. Une subdivision en deux types ou variantes, établie par H. Thrane (1965), constitue la base des distinctions typologiques qui seront ultérieurement utilisées à plusieurs reprises par différents auteurs :
le type A (ou « type palafittique ») est caractérisé par un profil bas, un pied annulaire à base plane, des parois rectilignes, un col et un bord obliques, un épaulement presque vertical. Le décor, d’une grande monotonie, est composé sur la panse d’une ou de deux lignes de bossettes au repoussé alternant avec des lignes de pointillés fins également repoussés de l’intérieur ;
le type B présente, quant à lui, une panse souvent haute, un fond ombiliqué fréquemment souligné à la base de la panse par plusieurs cannelures concentriques, des parois souvent convexes. Les bords, les cols et les épaules sont obliques. Le décor, généralement composé de deux à quatre lignes de bossettes sur la panse, se complète sur certains exemplaires par une ligne de bossettes sur le col. Ces récipients sont fréquemment dotés d’une anse rivée.
3Postérieurement, H. Thrane complétera cette bipartition en subdivisant le type A en trois variantes (Thrane, 1975, liste 13). Il distingue alors une variante 1 à fond plat et à une seule ligne de bossettes, une variante 2 à fond plat et à deux lignes de bossettes, et une variante 3 à deux lignes de bossettes ou plus et fond en V. Dans son étude du dépôt de Blanot, J.-P. Thevenot expose de façon détaillée la typologie des différents types de tasses et coupes en bronze (Thevenot, 1991, fig. 74a et b). À cette occasion, il reprend les deux principales catégories de H. Thrane, tout en inversant leur désignation sans raison explicite. Le type A de H. Thrane devient ainsi le type B de J.-P. Thevenot (coupe à panse basse, lisse ou décorée de lignes de points et de bossettes, pied annulaire) et réciproquement, le type B de H. Thrane devient son type A (panse haute, fond ombiliqué éventuellement surmonté de cannelures circulaires)3.
4Des exemplaires isolés, partageant des caractères communs au type de Kirkendrup-Jenišovice, se distinguent des deux principales variantes précédentes par des formes de profils originales et des décors pouvant caractériser des variantes régionales ou chronologiques. C’est le cas, par exemple, des récipients de Biernacice (Gedl, 2001, Taf. 2/5, 3/6), Saint-Martin-sur-le-Pré (Gaucher, 1981, fig. 19/V3), Mas-Saint-Chély (Millotte, 1959) et Liptovský-Mikuláš (Novotná, 1991, Taf. 6/36-38, 7/39-42).
5La répartition européenne des tasses et coupes du type Jenišovice a été abordée successivement suivant ces critères. Le type A connaît une diffusion majoritairement occidentale couvrant la France continentale, la Suisse, l’Allemagne occidentale et septentrionale, ainsi que le Danemark. Une forte représentation des exemplaires sans anse caractérise également cette zone. La rareté des anses fixées sur les exemplaires de type A représente en effet l’une des particularités de ces modèles. Les quatre exemplaires répertoriés qui en sont dotés (Corcelettes, Estavayer, Marburg tumulus U14, Budapest-Békásmegyer sép. 26) se distinguent des tasses du type B par une anse en tôle mince dont la forme est différente d’un récipient à l’autre. Seule la partie supérieure des anses des deux premiers exemplaires présente un élargissement demi-circulaire fixé par deux rivets, alors que la partie inférieure en ruban est fixée à la panse par un seul rivet. Les anses en ruban des deux autres tasses, dépourvues d’élargissement aux extrémités, sont fixées par un seul rivet (Budapest-Békásmegyer) ou par des agrafes (Marburg). Par ailleurs, l’anse de la tasse de Budapest (Patay, 1990, Taf. 40/89) présente un décor original sur ce type de récipient. Il est composé de triangles hachurés opposés par la pointe et d’arcs de cercles concentriques, motifs qui se retrouvent sur certaines anses de tasses du type Stillfried-Hostomice. Ces anses, fixées sans respecter le décor qu’elles recouvrent, peuvent correspondre à des transformations secondaires qui demeurent exceptionnelles4.
6La répartition plus orientale des récipients du type B concerne, quant à elle, plus particulièrement la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie et la Pologne (Thrane, 1965, fig. 9 ; Thevenot, 1991, fig. 75). Découvert en 2004, l’exemplaire de Tamlaght (Warner, 2004) en Irlande du Nord (Ulster) représente le témoin le plus septentrional et encore isolé au nord-ouest du continent européen. Il illustre, si besoin était, la diffusion à longue distance de ce type de vaisselles. La bipartition géographique entre les coupes et tasses de Kirkendrup-Jenišovice A et B peut être nuancée suivant les attributions de certains récipients à l’un ou l’autre type, variables selon les auteurs. On éclairera cette constatation en comparant les différentes listes et cartes publiées par H. Thrane (1965, 1975), J.-P. Thevenot (1991) et P. Patay (1996) (Martin, 2009). Par exemple, les récipients du dépôt éponyme de Kirkendrup sont répartis par H. Thrane dans les types A et B, alors qu’ils sont regroupés, à juste titre nous semble-t-il, uniquement dans le type B par J.-P. Thevenot. Ainsi, les exemplaires du type A connaissent une diffusion plus étendue vers l’est suivant H. Thrane, alors que la carte de J.-P. Thevenot (Thevenot, 1991, fig. 75), bien documentée par une représentation quantitative des ensembles, tend à accentuer la différence est-ouest entre la répartition des deux types, avec une zone de diffusion mixte correspondant au Danemark et à l’Allemagne du Nord. C’est d’ailleurs dans ce secteur que se trouvent quelques récipients au caractère mixte comme les tasses de Dahmen (Martin, 2009, no 85) et de Klein-Luckov (ibid., no 87) qui associent le fond en anneau à un décor de bossettes sur le col. Plus à l’ouest, la coupe de Fresnes (Despriée, 1978, fig. 4/23) montre également certaines particularités avec un fond inscrit dans un double cercle de côtes concentriques.
7La question d’une production issue de régions différentes, voire d’ateliers différents, découle de ces constatations typologiques et spatiales. Plusieurs spécialistes se sont penchés tour à tour sur cette question en sollicitant un certain nombre d’arguments pour étayer cette approche. Une origine dans le domaine lacustre suisse est envisagée pour le type A (Thrane, 1965 ; Patay, 1996), plus particulièrement la variante 1 (Thrane, 1975), et sera reprise par plusieurs auteurs (Thevenot, 1991 ; Kristiansen, 1998). Pour les tasses danoises du type B, ainsi que pour sa variante A3, H. Thrane envisage une zone d’origine à rechercher vers l’Elbe, la Moldau ou le moyen Danube. L’analyse que développe P. Patay à son tour prend en compte plusieurs paramètres. Selon lui, la différence de répartition entre les types de Fuchsstadt et de Kirkendrup, à l’exception de quelques exemplaires isolés, permettrait de déduire que ces récipients ne proviennent probablement pas des mêmes ateliers. Une origine issue des régions hongroises-carpatiques, où les tasses de Jenišovice sont fréquentes mais peu denses, lui semble également peu probable. Celle-ci serait plutôt à rechercher, selon lui, au nord-est de la République tchèque (« Sudetenländer »), ainsi que dans la région du Nyírség, au sud du coude de la Tisza (Patay, 1990 p. 64 ; 1996 p. 409). P. Patay n’exclut pas non plus des centres de production très éloignés les uns des autres. En opposition avec H. Thrane, il constate que la similitude des types représentés dans certains dépôts, notamment au Danemark, pourrait également tenir lieu d’argument en faveur de productions d’ateliers locaux situés dans cette région. O. Kytlicová, qui s’est également livrée à une analyse très détaillée de la filiation des tasses de Jenišovice, établit des parallèles entre les types de Friedrichsruhe variante I et II/ Středokluky-Osternienburg et une origine dans la partie orientale de l’Europe moyenne (Kytlicová, 1991 p. 54-55).
8Ces divergences d’appréciation sont susceptibles de modifier sensiblement les répartitions et les conclusions qui en découlent. Elles nous ont incité à reprendre dans le détail une analyse des caractères et de la typologie des tasses de Jenišovice. L’importante série de trente-deux récipients d’Évans nous a, en outre, permis d’en resserrer les critères.
2.1.2. Typologie : descriptifs
9En se référant à la planche typologique de la figure 12, les caractères typologiques des coupes et tasses du type Jenišovice peuvent être regroupés de la façon suivante :
10• Fond
11F1 : fond rentrant concave
12F2 : fond rentrant segmenté plat
13F3 : fond rentrant segmenté concave
14• Base
15B1 : cannelures à la base
16B2 : cannelures réservant une base non décorée
17B3 : ressaut
18B4 : base dégagée en V
19B5 : base en V simple
20B6 : base en anneau plat
21• Panse
22P1 : rectiligne
23P2 : convexe
24• Épaule
25E1 : verticale
26E2 : sub-verticale à légèrement rentrante
27E3 : convergente
28• Décors
29Col décoré
30D1 : une ligne de bossettes
31D2 : deux lignes de bossettes
32D3 : trois lignes de bossettes et plus
33D4 : guirlandes ou autres motifs
34D5 : nervures pointillées
35Enfin, parmi les motifs décoratifs usités, nous distinguerons deux types de bossettes, de grand diamètre (en moyenne 8-9 mm, rarement plus de 10 mm) et de petit diamètre (diamètre moyen 5-6 mm).
2.1.3. Les coupes de type A d’Évans
36Vingt-cinq coupes d’Évans sont attribuables au type A (fig. 13, 14 et 15, nos 25, 26 et 44). Aucune d’entre elles n’est dotée d’une anse. Leur diamètre est compris entre 120 et 186 mm pour des hauteurs s’échelonnant entre 42 et 62 mm (fig. 16). Si l’on écarte la coupe no 34 (fig. 14, no 34) et sans doute aussi la coupe incomplète no 44 (fig. 15, no 44), dont les dimensions se détachent nettement du lot, le diamètre moyen des vingt autres exemplaires mesurables est légèrement supérieur à 140 mm. La masse moyenne de métal utilisé pour leur réalisation, estimée à partir des exemplaires complets, se situe aux environs de 110 grammes. Les coupes du type A sont également caractérisées par un indice d’aplatissement bas (Ia : hauteur/diamètre), compris entre 0,32 et 0,52 avec une moyenne de 0,36. On retrouve, sur la plupart des exemplaires, les caractères morphologiques standards du type avec une base en anneau plat (type B6)5, un fond rentrant segmenté ou concave (types F1, F2), une épaule peu convergente (type E2), une panse légèrement convexe ou plus rarement rectiligne, un bord et un col oblique évasés. Les parois de la panse montrent nettement deux tendances. Elles sont légèrement convexes sur douze des dix-sept coupes non déformées ; les exemplaires restants se distinguent par un profil beaucoup plus rectiligne. Le décor de bossettes et de lignes de pointillés au repoussé est uniquement présent sur la panse. Il comprend une ligne (six individus) ou deux lignes de bossettes (qutorze individus). Sur seize exemplaires, qui représentent donc la plupart des coupes, l’ornementation est réalisée au moyen de grosses bossettes, quel qu’en soit le type du décor à une ou deux lignes de bossettes. Leur diamètre de 8 à 9 mm atteint exceptionnellement 10 mm (coupe no 46 ; fig. 14, no 46). Seuls trois récipients se distinguent par l’utilisation de bossettes nettement plus petites, de 5 à 6 mm de diamètre. Les exemplaires lisses sont minoritaires avec trois exemplaires (fig. 13, nos 14, 19 ; fig. 15, no 44).
37Techniquement, des traces de martelage, plus ou moins estompées par le polissage des parois lors de la finition, ont été observées à la radiographie ou à l’œil nu sur la face intérieure de dix récipients. Toutes suggèrent une technique de mise en forme analogue. Ces traces se présentent sous la forme d’impacts étroits et allongés de 7 à 9 mm, de répartition concentrique, espacés et souvent grossièrement alignés (fig. 17). Ces impacts sont plus rares sur les fonds (coupe no 15). Sur les autres récipients du type, ces traces ont été totalement oblitérées postérieurement à la mise en forme par le polissage intérieur et extérieur des parois. Seule la coupe no 12 présente au centre de la face externe du fond une cupule correspondant à un point de centrage du récipient lors de sa mise en forme (fig. 18). Ce caractère, unique à Évans – mais peut-être masqué par la corrosion sur d’autres coupes ? –, se retrouve en Suisse sur plusieurs coupes du type A de Guévaux, Hauterive-Champréveyres, Onnens, Estavayer. Enfin, seule la coupe no 12 présente une réparation d’une fissure à la partie supérieure au moyen d’une lamelle de bronze repliée en agrafe (fig. 13, no 12 ; fig. 19).
38Parmi les coupes représentées à Évans, une impression de série se dégage de l’examen d’un lot numériquement important de récipients qui partagent le plus grand nombre de caractères communs. Une première série comprend des coupes ornées d’une ligne (nos 11a, 15, 17, 18) ou de deux lignes de bossettes de grand diamètre, dotées d’un épaulement droit ou peu rentrant et d’une panse légèrement convexe ; caractères qui leur confèrent un certain « air de famille » (nos 11b, 11 d, 21, 23, 27, 33 et probablement les nos 25, 26 et 46). Trois coupes présentent de fortes affinités avec cette série, mais s’en distinguent par des dimensions plus élevées (fig. 14, nos 34, 43), ou par un fond ombiliqué, unique exemple représenté à Évans (fig. 13, no 24). Un second ensemble est formé par les coupes nos 13 et 16 (fig. 13) qui se distinguent de toutes les autres par l’utilisation de petites bossettes de 5 à 6 mm de diamètre, mais aussi par une panse rectiligne et une épaule rentrante qu’elles partagent avec la coupe no 22 (fig. 13). Ces derniers caractères morphologiques se retrouvent aussi sur les coupes non décorées nos 14, 19, et sur la coupe no 44. Bien qu’incomplète et déformée, cette dernière se rattache typologiquement aux coupes de Kirkendrup-Jenišovice, mais se distingue par son diamètre d’environ 214 mm, nettement supérieur aux autres exemplaires du type (fig. 15). Enfin, la coupe 12, à épaulement convergent, également décorée de petites bossettes, se distingue aussi par un indice d’aplatissement élevé (Ia : 0,40) qui la rapproche des tasses et coupes du type B (fig. 16).
39La distinction constatée à partir des deux séries d’Évans trouve des comparaisons dans l’aire de diffusion du type A. À la première série, on rattachera la plupart des coupes suisses, celles de Basedow (Hundt, 1955, Abb. 2/10, 12), Quedlinburg (Brunn, 1968, Taf. 128/2), Brandenburg (Martin, 2009, Taf. 24/93), Marburg (Dobiat, 1994, Taf. 47/13), Budapest-Békásmegyer (Patay, 1990, Taf. 40/89). La coupe de Roeschwoog, également ornée de deux rangées de grosses bossettes, présente toutefois des dimensions nettement supérieures (diam. 165 mm ; hauteur : 70 mm) (Frey, 1929). Les coupes de la seconde série, au profil plus tendu, sont représentées par celles de Blanot (Thevenot, 1991, fig. 29/1), de Guévaux (10458), de Fresnes (Despriée, 1978, no 22), de Klein-Lückow (Hundt, 1955, Abb. 2/5) – la seule du type A à présenter un rang de bossettes sur le bandeau du col – et de Bredmose (Trane, 1976, fig. 2-3).
40Les volumes totaux de ces récipients ont été évalués à partir de dix-sept exemplaires dont les profils ont pu être restitués. Ils s’inscrivent dans une fourchette large, variant du simple au triple et comprise entre 286 et 912 cm3. Toutefois, parmi ces récipients, plus de la moitié est comprise entre 300 et 400 cm3 environ. Si on ne prend en compte que le volume de la panse, qui peut être considéré comme le volume utile maximal, celui-ci est compris entre 224 et 698 cm3 (la méthode de calcul du volume des récipients est exposée en Annexe 1).
41Nous avons retiré de l’inventaire des coupes de type A un certain nombre d’individus figurant sur les listes de Thrane, 1975 et de Thevenot, 1991, qui ne présentent pas, d’après les publications et suivant notre analyse, un nombre suffisant de critères ou qui s’écartent du type par des particularités. Ainsi, les tasses de Dahmen (Martin, 2009, Taf. 22/85) et de Sîg (Soroceanu, 2008, Taf. 5/19) présentent une base de type 3, celle de Wörschach (Prüssing, 1991, Taf. 1/10), quelquefois considérée comme un type de transition entre Fuchsstadt et Jenišovice, apparaît de toute façon comme une variante non décorée. Il en est de même de la tasse d’Egyek avec sa carène basse (Patay, 1990, Taf. 39/86) et de celle de Liptovský-Mikuláš avec le fond rétreint, l’absence de col (Novotná, 1991, no 35) et un indice d’aplatissement particulièrement élevé. Ces modèles, qui s’écartent sans conteste du type A standard, souvent d’après plusieurs critères, se trouvent localisés pour la plupart d’entre eux à la périphérie de la zone de répartition nucléaire des récipients du type A et contribuent à étirer vers l’est la répartition du type. Leur mise à l’écart rend plus cohérente une répartition occidentale du type A dont l’épicentre se situe de part et d’autre du Jura avec des extensions en direction de l’Allemagne du Nord et du Jütland, d’une part ; de la France du Centre-Ouest et du Sud, d’autre part (fig. 20). Seuls, quelques exemplaires isolés (Budapest-Békásmegyer, Hajdúsámson, Mühlbachl, Jezierzany ?) évoquent une diffusion orientale très limitée de récipients répondant à la définition du type A. Il apparaît aussi que les répartitions des coupes et tasses à simple et double ligne de bossettes se recouvrent et qu’il n’y a pas lieu de distinguer géographiquement ces deux types de productions. Les coupes non décorées sont, d’une manière générale, sous-représentées et se répartissent en deux secteurs. À l’ouest, un seul exemplaire du dépôt de Mas-Saint-Chély présente certains caractères tout à fait standards des coupes du type A (fig. 97, no 6).
Inventaire des coupes et tasses du type Kirkendrup-Jenišovice - Type occidental (variante A)
Allemagne
1 - BASEDOW : 2 ex. ; Hundt, 1955, Abb. 2/10, 12
2 - BRANDENBURG a. d. HAVEL : Sprockhoff, 1930, pl. 10 / b ; Martin, 2009, Taf. 24, no 93
3 - KLEIN-LUCKOW : Hundt, 1955, Abb. 2/5
4 - MARBURG Hügel U14 : Ebel, 1987 ; Dobiat, 1994, Taf. 47/13
5 - QUEDLINBURG : Brunn, 1968, Taf. 128/2 ; Martin, 2009, Taf. 24, no 94
Autriche
7 - MÜHLBACHL Gr. 83 : Prüssing, 1991, Taf. 2/11
Belgique
8 - SINSIN : Warmenbol, 1988, 1995 (fragments)
Danemark
9 - BREDMOSE : 2 ex. ; Thrane, 1976, fig. 2-3
10 - LUNDEN : 3 ex. ; Thrane, 1965, fig. 5 (3 autres coupes disparues)
France
11 - BLANOT : Thevenot, 1991, fig. 29, no 1
12 - FRESNES : 2 ex. ; Despriée, 1978, fig. 4, 21-2
13 - ROESCHWOOG : Frey, 1929
14 - MAS-SAINT-CHÉLY (Saint-Chély-du-Tarn) : Millotte, 1959
15 - CRAMANS : inédit, musée de Besançon
16 - ÉVANS : 25 ex. ; Piningre, 2001
17 - SAINT-MARTIN-SUR-LE-PRÉ (variante) : Gaucher, 1981, fig. 19/V3 V3 ; Mehrart, 1952, Taf. 12/5-9
Hongrie
18 - BUDAPEST-BÉKÁSMEGYER : Patay, 1990, Taf. 40/89 (anse décorée) ÉRSEKVADKERT : Patay, 1990, Taf. 41/93 (anse et fond type 3 mais la base type A ou B ?)
19 - HAJDÚSÁMSON II : Patay, 1990, Taf. 42/100
Suisse
20 - CORTAILLOD : Thrane, 1965
21 - CORCELETTES : 3 ex. ; Thrane, 1965
22 - GUÉVAUX : 2 ex. ; Thrane, 1965
23 - ZURICH « Alpenquai » : 2 ex. ; Primas, 1988
24 - HAUTERIVE-CHAMPRÉVEYRE : Thrane, 1975, fig. 80/b
25 - GRENG : Thrane, 1975, fig. 80/c
67 - ONNENS : Musée Neuchâtel : Rychner, Kläntschi, 1995, no 744
68 - ESTAVAYER : Musée Zurich ; probablement « Thrane, 1965 e »attribuée à Corcelette
Ukraine
66 - JEZIERZANY : Gedl, 2001, Taf. 66/no A4 (tasse fragmentée,
fond en anneau)
2.1.4. Les coupes et les tasses de type B d’Évans
42Les coupes de Kirkendrup-Jenišovice classées dans le type B sont caractérisées par un indice d’aplatissement supérieur au précédent (Ia = hauteur/diamètre ≥ 0,40) (fig. 16). Les bases, cannelées ou à ressaut (types B1, B2, B3 - fig. 12), sont les plus fréquentes et peuvent donner lieu à la distinction de plusieurs variantes ; les fonds sont rentrants concaves, segmentés ou non. Les épaulements sont nettement rentrants dans la plupart des cas. Les décors de deux lignes de bossettes ou plus sont la règle à quelques très rares exceptions près (Sîg - Soroceanu, 2008, Taf. 5/19, Érsekvadkert - Patay, 1990, Taf. 41/93). L’ornementation du bandeau du col par une ligne de bossettes caractérise certains exemplaires. L’utilisation de motifs non linéaires (guirlandes, arcs de cercles) apparaît spécifique au type B6, mais reste exceptionnelle (Velem Szent Vid II - Patay, 1990, Taf. 42/98, Jenišovice - Kytlicová, 1991, Taf. 42/12, ensemble du Dorotheum de Vienne - Wirth, 2006). Enfin, les tasses sont dominantes dans cette catégorie. Les anses à bords parallèles, aux extrémités élargies de formes souvent elliptiques, sont généralement fixées par des rivets à tête plate. Comme sur les tasses du type de Fuchsstadt, un grand nombre d’anses sont ornées de simples rainures parallèles sur la bordure. Sur certaines d’entre elles, ces lignes sont complétées par des motifs gravés, plus ou moins couvrants, composés pour la plupart d’entre eux d’oves, de hachures en épis, de chevrons ou de croisillons. La combinaison de ces différents paramètres (base, profil et composition du décor) peut permettre d’isoler plusieurs variantes.
43Les récipients complets d’Évans se rattachant indubitablement au type B sont au nombre de cinq (fig. 15, nos 31, 32 ; fig. 21, nos 28, 30, 40). Deux exemplaires incomplets seront également associés à ce type par leurs caractères. Il s’agit de la tasse no 37 (fig. 21) à col décoré d’une ligne de bossettes, ainsi que le récipient fragmenté no 42 (fig. 15) à col décoré et base cannelée. Parmi ceux-ci, quatre sont représentés par des tasses, deux par des coupes (fig. 15, nos 31, 32). Tous se caractérisent aussi par un indice d’aplatissement relativement bas, compris entre 0,40 et 0,47, comparé aux récipients de cette catégorie (fig. 16).
44Les décors de bossettes sont variés. À l’exception du no 37 (fig. 21), dont le diamètre des bossettes est de 9 mm, les autres décors utilisent des bossettes de diamètres compris entre 5 et 6,5 mm, qui sont généralement les plus fréquemment utilisées sur les autres tasses du type B. Les motifs classiques sont composés : d’une double rangée de bossettes séparées par des lignes de pointillés repoussés sur la panse (fig. 21, nos 28, 40 ; fig. 15, no 42), d’une double rangée de bossettes sans pointillés intermédiaires (fig. 15, no 32), d’une triple rangée de bossettes et lignes de pointillés (fig. 15, no 31 ; fig. 22). La tasse no 30 (fig. 21, 24 et 25) présente, quant à elle, un ornement plus complexe et original. Il est composé de deux registres de motifs de chevrons curvilinéaires (ou d’arcs brisés emboîtés) disposés en symétrie quaternaire alterne, soulignés par une ligne de pointillés. Une guirlande médiane sinueuse de bossettes sépare ces deux registres. Sous la carène et au-dessus du fond, des bossettes isolées ponctuent le centre de chaque motif et les intervalles les séparant. Le col de cinq récipients est orné d’une rangée de bossettes (fig. 15, nos 31, 42 ; fig. 21, nos 30, 37, 40).
45Les anses, aux extrémités élargies ovalaires, sont assemblées par des rivets à tête plate. Deux d’entre elles sont décorées de rainures latérales doubles (fig. 21, no 28) ou triples (fig. 21, no 30) qui constituent les motifs décoratifs les plus fréquents des anses de tasses de Kirkendrup, mais aussi du type de Fuchsstadt. Également bordé de trois rainures, le décor de l’anse de la tasse no 37 est complété par deux séquences de chevrons internes formant une ligne brisée (fig. 21). Ce thème décoratif, moins fréquent, évoque les guirlandes qui garnissent les anses des tasses de Pössneck-Schlettwein (Martin, 2009, Taf. 23/89), Počúvadlo (Novotná, 1991, Taf. 4/28), Dubnica nad Váhom (Novotná, 1991, Taf. 5/33), Egyek (Patay, 1990, Taf. 40/91-92), Kuźnica Skakawska (Gedl, 2001, Taf. 4/8), Sîg (Soroceanu, 2008, Taf. 4/17). Quatre d’entre elles (Počúvadlo, Dubnica nad Váhom, Egyek, Sîg) sont géographiquement proches et se situent entre la Slovaquie et la Roumanie nord-occidentale. Décorée des mêmes motifs, l’anse de la tasse no 40 est complétée d’une ligne médiane de chevrons (fig. 21 et 23). Ce décor n’apparaît pas sur les anses de tasses de type B. Seule la tasse de Záluží (Kytlicová, 1991, Taf. 3/19) présente une bande axiale de chevrons entre les rainures latérales. Enfin, on constatera que l’emplacement de l’anse a été réservé au moment de la réalisation du décor de bossettes par une interruption totale de celui-ci sur les tasses 28 et 40, ou par une interruption partielle sur les exemplaires 30 et 37 (fig. 21).
46Techniquement, les récipients appartenant à ce type sont soigneusement polis. Deux d’entre eux, les nos 28 et 40, ont permis d’observer des traces de martelage étroites couvrant la totalité de la paroi suivant une orientation rayonnante (M. Pernot ce volume). Cette particularité les distingue des coupes du type A aux impacts de martelage toujours concentriques, comme on a pu le remarquer plus haut.
47Les volumes totaux de ces exemplaires, moins nombreux que les coupes, sont tous supérieurs à 500 cm3 et sont compris entre 534 et 996 cm3. Le volume de la panse est compris entre 392 et 738 cm3. Ils se classent parmi la catégorie la plus volumineuse définie pour les coupes du type A (cf. Annexe 1).
48Tous ces modèles sont uniques et n’évoquent pas le caractère de série remarqué à propos des coupes du type A d’Évans ou des tasses du type B de certains dépôts orientaux (Jenišovice, Štramberk, Křenůvky). Quelques points communs pourraient toutefois permettre de rapprocher certains récipients. On constatera sur les nos 30 (fig. 21, 24, 25) et 31 (fig. 15, 22), ainsi que sur la tasse no 37 (fig. 21), l’utilisation de nervures pointillées. Cette technique décorative, peu répandue, se retrouve concentrée en Bohème sur la tasse de Záluží (Kytlicová, 1991, Taf. 3/19), sur les coupelles et le vase à étage du dépôt de Štramberk (Nekvasil, Podborský, 1991, Taf. 4/26-28), ainsi que sur les passoires de Velká Dobrá et Záluží (Kytlicová, 1991, Taf. 7/38-39). Il en est de même de la présence sur les récipients nos 30 et 31 d’une bossette, repoussée de l’intérieur vers l’extérieur, marquant le centre du fond (fig. 22, 25). Cette particularité est signalée sur la tasse d’Egyek (Patay, 1990, Taf. 40/90) et sur une tasse du dépôt éponyme d’Øgemose-Kirkendrup (Thrane, 1965, fig. 7/b).
49La coupe no 32 et la tasse no 28, ornées d’une double ligne de bossettes et d’une base cannelée de type B2 pour la première et B1 pour la seconde, se distinguent des autres modèles de cet ensemble par l’absence de bossettes sur le col. La coupe no 32 est comparable par son profil et son ornementation à la coupe de la sépulture 47 de Haunstetten en Bavière (Wirth, 1998, Taf. 47/12). La tasse no 28 se rapproche de plusieurs exemplaires, généralement dotés d’une base de type B2, que l’on retrouve en Bohème, en Moravie (Štramberk, Kamýk, Lipkovice Pod Ripem - Kytlicová, 1991 ; Nekvasil, Podborský, 1991) et au Danemark (Løgtved Mose - Thrane, 1965).
50Par contre, le décor baroque de la tasse no 30 est singulier. Il ne trouve pas de parallèles connus sur les tasses très ornées de Kirkendrup-Jenišovice. Rares sont les coupes et tasses dont les motifs ornementaux diffèrent des classiques registres de bossettes et de pointillés. À l’exception de la bossette inscrite dans le motif de chevrons, son décor se distingue des rares exemplaires ornés de guirlandes de Jenišovice (Kytlicová, 1991, Taf. 4/26) et de Velem Szent Vid II (Patay, 1990, Taf. 42/98), sans doute dérivés des ornementations en étoile des tasses du type Osternienburg-Dresden (Kytlicová, 1991). Tout au plus, peut-on ici évoquer quelque similitude avec le décor de nervures simples en arcs brisés, soulignés d’une guirlande de bossettes, du récipient singulier d’Østermarie (Danemark), dont la chronologie attribuée à la Période IIc/IIIa (Bz D/Ha A1) (Thrane, 1962) est antérieure à celle des tasses de Jenišovice7.
51Toutes ces tasses trouvent sans problème des comparaisons parfois très étroites avec les exemplaires de Bohème, du bassin carpatique, d’Allemagne du Nord et du Danemark, à l’exception des modèles à base décrochée (type B3 - fig. 12) absents à Évans. À l’ouest de l’Europe, la présence dans le dépôt d’Évans de tasses et coupes de Kirkendrup-Jenišovice du type B mérite enfin d’être soulignée. À l’exception de la coupe no 23 de Fresnes (Despriée, 1978, fig. 7), dont le caractère mixte peut être rappelé, le dépôt d’Évans rassemble pour la première fois un lot de coupes de style indubitablement oriental dans un secteur géographique très éloigné, à l’ouest des principales concentrations de tasses de Kirkendrup du type B (fig. 26).
2.1.5. Chronologie
52La chronologie des tasses et des coupes de Kirkendrup-Jenišovice repose dans toute leur aire de répartition sur de nombreuses associations en dépôts et dans une moindre mesure en sépultures. Elles figurent parmi les types représentatifs du Ha B1 du domaine nord-alpin retenus par H. Müller-Karpe (1959, Abb. 40/1) et par G. von Brunn (Brunn, 1968). Le thème décoratif du « Punkt-Buckel-System », qui orne la grande majorité de ces récipients, est considéré par G. von Merhart comme caractéristique de l’étape récente des Champs d’Urnes (Merhart, 1952).
53En Europe centrale et orientale, on se réfèrera aux synthèses récentes des Prähistorische Bronzefunde pour l’Allemagne (Martin, 2009 ; Jacob, 1995), la Hongrie (Patay, 1990), la Bohème (Kytlicová, 1991), la Moravie (Nekvasil, Podborský, 1991), la Slovaquie (Novotná, 1991), la Pologne (Gedl, 2001) et l’Autriche (Prüssing, 1991). Au Danemark et en Allemagne du Nord, les associations des dépôts de Øgemose/Kirkendrup, de Quedlinburg, avec des fibules de la période IV, permettent de rattacher les variantes A et B du type à la chronologie nordique (Thrane, 1965). Parmi les coupes du type B, la question des caractères précoces de certains ensembles a été soulevée, notamment par O. Kytlicová dans le cadre d’une étude particulièrement approfondie. Cette distinction repose sur les comparaisons typo-chronologiques d’artefacts associés (Libkovice, Záluží), ou sur certains critères stylistiques déjà représentés sur des récipients antérieurs, notamment sur les formes les plus récentes du type Friedrichsruhe/Osternienburg. C’est le cas de certaines tasses du dépôt éponyme de Jenišovice (Kytlicová, 1991, p. 50 et suiv.). Plus discutables sont les associations de coupes de type Kirkendrup avec des formes de vaisselles apparues plus anciennement, dont la durée d’utilisation possible ne constitue pas un argument incontournable d’ancienneté de l’ensemble. On pense ainsi au dépôt de Thale 3 avec une tasse de type Fuchsstadt et de Friedrichsruhe/Osternienburg, à celui d’Egyek avec une tasse à anse cornue, ou au dépôt d’Hajdúsámson II avec une tasse proche de la précédente et trois chaudrons du type B1 généralement datés du Ha B1. Enfin, les associations avec une tasse du type de Fuchsstadt apparaissent dans plusieurs dépôts en Allemagne septentrionale (Basedow, Pössneck-Schlettwein, Dötzingen). Elles permettent à O. Kytlicová de proposer l’apparition de certaines tasses de type Kirkendrup durant l’utilisation de ces types du Ha A, préfigurant leur expansion à la période suivante. Inversement, P. Patay envisage à plusieurs reprises la continuité d’utilisation de formes anciennes déposées ensuite en association avec des objets plus récents.
54La question d’une antériorité des coupes du type A à fond en anneau, rapprochées par H. Thrane des tasses de Fuchsstadt, par rapport aux tasses de type B, ne repose que sur des considérations stylistiques. Cette hypothèse, non confirmée par des contextes chrono-typologiques, sera controversée par P. Patay par la suite.
55En France de l’Est, le dépôt de Blanot fournit un ensemble tout à fait caractéristique de l’étape moyenne du Bronze final. L’étude argumentée de J.-P. Thevenot rend compte d’une durée d’utilisation possible de certaines parures associées dans cet ensemble et d’un étalement de la chronologie des objets du dépôt entre le Ha A2 et B1 (Thevenot, 1991).
56Les parures associées aux coupes de Fresnes sont moins nombreuses et moins caractéristiques. Les parallèles établis entre les appliques à bélières coniques à téton, nombreuses à Fresnes et à Blanot et interprétées comme ornement d’un vêtement, offrent un point commun fort entre ces deux ensembles. Avec un diamètre de 90 mm, l’anneau ouvert massif de Fresnes, à section circulaire et extrémités jointives légèrement épaissies, décoré de bandes incisées de hachures transversales et de chevrons, se range vraisemblablement parmi les anneaux de chevilles (Despriée, 1978, fig. 3/19). Quelques exemplaires comparables proviennent de Suisse (Morges, Bevaix, Nyon) et sont datés typologiquement de l’étape moyenne des Champs d’Urnes (Pászthory, 1985, Taf. 38).
57Plus au sud, dans le dépôt de Carnac, Mas-Saint-Chély, on retrouve les boutons à bélière appartenant aux différents types convexes, coniques à téton, à sommet aplati, déjà représentés à Blanot et à Fresnes. Ils étaient accompagnés de deux têtes d’épingles discoïdes de grand diamètre qui se rapprochent de nombreux exemplaires du domaine jurassien. L’une est ornée d’un motif en étoile simple à branches multiples (Millotte, 1959, pl. 1, no 12) qui trouve ses comparaisons les plus proches à Larnaud, Nyon, Estavayer, Villars-sous-Dampjoux. L’autre, ornée de guirlandes et de pointillés (ibid., pl. 1, no 11), est comparable à l’épingle de Marangea (Jura). Plusieurs de ces épingles, toutes variantes confondues, se retrouvent associées dans des dépôts du Jura et de Savoie – à Bouclans, Larnaud, Villars-sous-Dampjoux, Drumettaz, Goncelin – avec d’autres objets métalliques représentatifs du RSFO, datables de l’étape moyenne du Bronze final ou de la fin de celle-ci (BF IIIa) (Piningre et alii, 2004). Trois anneaux de cheville ouverts, à incisions transversales, n’offrent pas matière à comparaisons précises. Les deux bracelets ouverts, à jonc circulaire et petits tampons aplatis, se rapprochent de modèles de l’étape moyenne du Bronze final. Le motif ornemental central en zigzags du bracelet existe déjà sur des bracelets du Bronze moyen et du début du Bronze final sous différentes formes : chevrons, hachures alternes (Sermizelles II). Plusieurs bracelets du dépôt de Larnaud à section plan-convexe ou elliptique offrent des décors comparables (Simon-Millot, 1998, pl. 5-7). Des exemplaires à petits tampons et décor central de zigzags se retrouvent encore à Pourrières (Schauer, 1975, Abb. 10/2, 3, 6), sur le lac de Morat et à Concise (Pászthory, 1985, Taf. 49/660 et 661), ainsi qu’à Donzère (Vital, 1990, fig. 52/16).
Inventaire des coupes et tasses du type Kirkendrup-Jenišovice - Type oriental (variante B)
Allemagne
27 - ALTENSITTENBACH : Jacob, 1995, Taf. 5/26 (variante Fuchsstadt)
1 - BASEDOW : 2 ex. ; Martin, 2009, nos 91, 92
28 - DAHMEN : Martin, 2009, Taf. 22/85
73 - FRANKFURT a. d. ODER : Martin, 2009, no 96 (variante)
29 - HAUNSTETTEN I Inc. 47 : Wirth, 1998, Taf. 47/12
3 - KLEIN-LUCKOW : 2 ex. ; Hundt, 1955
30 - PÖSSNECK-SCHLETTWEIN : Martin, 2009, Taf. 23, no 89
31 - RIESA-GRÖBA : Brunn, 1968 ; Martin, 2009, no 90
6 - THALE 3 : Brunn, 1968, Taf. 164/2 ; Martin, 2009, no 95 Sans provenance, musée de Münich : 12 tasses ; Wamser, Gebhard, 2001, 150
Autriche
32 - FRANZHAUSEN : Prüssing, 1991, Taf. 2/15A
33 - INNSBRÜCK-WILTEN : Prüssing, 1991, Taf. 2/13
34 - SOMMEREIN AM LEITHAGEBIRGE : Prüssing, 1991, Taf. 2/14
Danemark
35 - ØGEMOSE-KIRKENDRUP : 4 ex. ; Thrane, 1965, fig. 7
36 - LØGTVED MOSE : 3 ex. ; Thrane, 1965, fig. 6
France
16 - ÉVANS : 7 ex. ; Piningre, 2001
12 - FRESNES : Despriée, 1978, fig. 4/23
Hongrie
37 - EGYEK KENDERTAG : 3 ex. ; Patay, 1990, Taf. 40/90-92
65 - ÉRSEKVADKERT : Patay, 1990, Taf. 41/93
38 - HAJDÚBÖSZÖRMÉNY : Patay, 1990, Taf. 41/94
19 - HAJDÚSÁMSON : 2 ex. ; Patay, 1990, Taf. 42/101, 102
47 - NÁDUDVAR : Patay, 1990, Taf. 42/103 (variante ?)
39 - PAP : Patay, 1990, Taf. 41/95
40 - SOLT : Patay, 1990, Taf. 41/96
41 - SZENTES-NAGYHEGY II : Patay, 1990, Taf. 41/97
42 - VELEM-SZENT-VID II : Patay, 1990, Taf. 42/ 98 TETÉTLEN : Soroceanu, 2008, Taf. 7/3
Pologne
43 - BIERNACICE : 2 ex. ; Gedl, 2001, Taf. 2/5 et 3/6
44 - BISKUPICE : Kostrewski, 1964 ; Gedl, 2001, Taf. 3/7
45 - KUŹNICA SKAKAWSKA : 4 ex. ; Gedl, 2001, Taf. 4/8-9 ; 5/10-11
46 - PODGORNIK : 3 ex. ; (SEIFFENAU) Gedl, 2001, Taf. 6/12-14
64 - PRZYBOROW : Gedl, 2001, Taf. 6/16
Roumanie
69 - LAPUS : 2 ex., fragment de paroi d’une troisième tasse possible ; Soroceanu, 2008, Taf. 3/13 ; 4/14-15
70 - MOIGRAD : Soroceanu, 2008, Taf. 4/16
48 - SÎG : 3 ex. décorés : Soroceanu, 2008, Taf. 4/17 ; 5/18, 19 ; 2 ex. lisses : Soroceanu, 2008, Taf. 7/23, 24
71 - ZAGON : Soroceanu, 2008, Taf. 6/22
« SIEBENBÜRGEN » : sans provenance ; Soroceanu, 2008, Taf. 5/20
« SÜDBANAT » : sans provenance ; Soroceanu, 2008, Taf. 6/21
Slovaquie
49 - BREZNO NAD HRONOM : 2 ex. ; Novotná, 1991, Taf. 3/26 ; 4/27
50 - DUBNICA NAD VÁHOM : 1 ex. ? Novotná, 1991, Taf. 5/33
26 - LIPTOVSKÝ MIKULÁŠ : 6 ex. variantes ; Novotná, 1991, Taf. 6/36-38 ; 7/39-42
57 - MADACSA (MADAČKA) : type A ? à vérifier, mais comme Thale la assez haut ; Novotná, 1991, pl. 3/25
59 - POČÚVALDO : Novotná, 1991, Taf. 4/28
60 - SOMOTOR : 4 ex. Novotná, 1991, Taf. 4/29 ; 5/30-32
72 - ŽARNOV : Novotná, 1991, Taf. 6/34
République Tchèque
51 - JENIŠOVICE : 14 ex. ; Kytlicová, 1991, Taf. 2/11-14 ; 3/15-18 ; 4/22-26 ; 5/27
52 - KAMÝK : Kytlicová, 1991, Taf. 3/20
53 - KLENTNICE : Nekvasil, Podborský, 1991, Taf. 1/5
54 - KNĔŽEVES : Kytlicová, 1991, Taf. 5/29
55 - KŘENŮVKY : 4 ex. ; Nekvasil, Podborský, 1991, Taf. 1/6-8
56 - LIPKOVICE POD RIPEM : Kytlicová, 1991, Taf. 4/21
58 - MILOVICE : Nekvasil, Podborský, 1991, Taf. 2/10
61 - ŠTRAMBERK II : 8 ex. + fgts ; Nekvasil, Podborský, 1991, Taf. 2/11-14 ; 3/15-17, 19, 22)
ŠTRAMBERK IV : 2 ex. ; Nekvasil, Podborský, 1991, Taf. 3/20/21
62 - ZÁLUŽÍ : 2 ex. ; Kytlicová, 1991, Taf. 3/19
Ukraine (1)
63 - NIEDZIELSKA : Gedl, 2001, Taf. 76/C3
Irlande du Nord - Ulster
TAMLAGHT : Warner, 2004 (non cartographiée)
58Parmi les cinq récipients associés à la coupe de Kirkendrup de Mas-Saint-Chély, l’attribution au type de Fuchsstadt de l’un d’entre eux ne pose pas de problème8 (fig. 97, no 5, infra). Cette tasse, qui correspondrait au no 4 de la planche II de J.-P. Millotte9, est tout à fait caractéristique avec un profil bas à épaule arrondie, un fond en anneau et une anse bordée de trois incisions parallèles, assemblée à l’intérieur du col par deux rivets coniques.
59Les quatre autres récipients présentent une certaine originalité et n’ont pas fait l’objet d’une étude typologique détaillée. J.-P. Millotte regroupe ainsi, non sans hésitation, l’ensemble des récipients du dépôt dans le type de Fuchsstadt « quoique le profil de l’une de ces pièces soit celui d’une coupe de Kirkendrup » (Millotte, 1959, p. 33). Les quatre récipients restants présentent en effet une certaine originalité et la confusion des dessins publiés jusqu’ici justifie qu’une attention particulière leur soit accordée :
coupe à col et bord obliques, épaulement arrondi haut, base conique, fond rentrant en anneau (Millotte, 1959, p. 28, non dessinée) (fig. 97, no 4) ;
tasse à col vertical, bord court, épaulement haut, arrondi et peu saillant. L’anse, élargie aux extrémités et fixée par des rivets plats, est bordée de hachures et décorée au centre de lignes pointillées et d’incisions parallèles. Le fond est rentrant sans anneau individualisé (Millotte, 1959, pl. II/5) (fig. 97, no 3) ;
deux exemplaires identiques dont l’un est doté d’une anse en ruban surélevée à bords parallèles fixée par des agrafes. Comme la tasse précédente, ces récipients sont caractérisés par un col peu évasé, un bord oblique, un épaulement haut, arrondi et peu saillant, une panse conique. Le fond, légèrement rentrant, est ici souligné par deux cannelures concentriques (Millotte, 1959, pl. II/1-2) (fig. 97, nos 1, 2).
60Composé d’une paire de récipients semblables et de deux récipients légèrement différents, ce dernier lot comprend des objets qui présentent certains points communs avec un col droit ou peu évasé, des bords courts, un épaulement haut arrondi et peu saillant et une base conique. Ces récipients se distinguent indubitablement des tasses de type Fuchsstadt par un indice d’aplatissement supérieur à la majorité des modèles du type (Ia = 0,36 à 0,42), par leur épaulement surélevé et, pour trois exemplaires sur quatre, par l’absence de fond en anneau. On notera aussi sur les anses des deux tasses l’absence de rivets coniques dont est dotée une partie des récipients du type de Fuchsstadt. Si ce n’est par l’absence d’anse, la coupe no 4 (fig. 97, no 4) est celle qui offre toutefois le plus de points communs avec les exemplaires à épaulement haut du type de Fuchsstadt de Dötzingen (Jacob, 1995, Taf. 2/ 14, 15), Ehingen (ibid., Taf. 4/22), Érsekvadkert (Patay, 1990, Taf. 40/87), Staaken (Martin, 2009, no 75).
61Ces remarques étant faites, se pose la question de l’origine et de la filiation des récipients du dépôt de Carnac. La partie haute des récipients à col droit ou peu évasé, bord court se retrouve sur certains exemplaires du type Friedrichsruhe/Osternienburg. Les fonds rentrants (ici peu concaves) et cannelés sont déjà présents sur le type de Blatnica au Bz D. Ils sont ensuite repris sur certains récipients du type de Friedrichsruhe à Pfaffenhofen, Středokluky, Grossörner (Martin, 2009, no 34), dans le dépôt de Dresden-Dobritz (Jacob, 1995, Taf. 92/6), ainsi que sur certaines tasses de Kirkendrup considérées comme anciennes du dépôt de Jenišovice (Kytlicová, 1991, Taf. 2/11-13).
62L’anse de la tasse no 3 (fig. 97, no 3), avec ses extrémités étroites à bords arrondis et son décor couvrant associant des hachures, des rainures et des lignes pointillées, ne trouve aucun parallèle sur les tasses de Fuchsstadt et de Kirkendrup. Elle se rapproche par sa forme de celle de la tasse no 27 du dépôt de Jenišovice décorée de lignes de bossettes fines (Kytlicová, 1991) ou du pichet de Dresden-Dobritz (Jacob, 1995, Taf. 93/5). La facture grossière de l’anse en ruban de tôle de la tasse no 1 (fig. 97, no 1) et de son dispositif d’assemblage apparaît, quant à elle, plus atypique en comparaison des anses en ruban des tasses du type Friedrichsruhe/Osternienburg, souvent ornées et rivées sous la carène. Des aménagements comparables sont connus sur les tasses plus récentes du Ha B3 de Liptovský-Mikuláš (Ondrašová) (Novotná, 1991, no 41) et sur la tasse de Kirkendrup de Marburg « tumulus U 14 ». Inversement, le fond en anneau du récipient no 4, les attaches des anses assez haut sur la panse correspondent à des nouveautés par rapport au contexte ancien des comparaisons précédemment énoncées.
63On évoquera enfin les rapprochements des parties supérieures des récipients de Mas-Saint-Chély avec les tasses du type Chiusa di Pesio (Rubat-Borel, 2009, fig. 39, 40). Celles-ci se distinguent toutefois par un fond ombiliqué étroit et leurs anses surélevées caractéristiques des tasses du type Stillfried-Hostomice de la fin de la période. On y retrouve le décor de registres de hachures sur les bords et de lignes centrales de pointillés sur la tasse de la tombe « Monterozzi 7 » de Tarquinia (Müller-Karpe, 1959, Taf. 31/7). Ces modèles à épaulement haut et col peu évasé sont datés de la fin du ixe - début du viiie siècle av. J.-C. Toutefois, ces ressemblances n’écartent pas une filiation possible entre ces deux types. Toutes ces remarques concourent à placer les récipients de Mas-Saint-Chély dans l’évolution de types anciens faisant référence à des techniques d’Europe moyenne et d’Allemagne de l’Ouest. Ces récipients soulèvent aussi l’hypothèse d’une production originale difficile à rattacher pour l’instant à d’autres récipients connus. Chronologiquement, les récipients (tasse de Fuchsstadt, coupe de Kirkendrup variante A), ainsi que les parures associées, datent le dépôt de cet ensemble au plus tard du Ha B1.
64Enfin, la coupe de Saint-Martin-sur-le-Pré (fig. 180, 181, infra), associée à deux tasses du type Stillfried-Hostomice, marque un terminus dans l’extension du type de Kirkendrup au Ha B2/3. Si ce récipient évoque encore par son décor et ses proportions basses les modèles de la variante A, ses parois convexes et son fond rentrant étroit, doté d’un petit bourrelet en anneau, montrent des particularités jamais observées sur d’autres récipients du type.
2.3. La tasse du type Fuchsstadt
2.3.1. Description
65Les tasses du type de Fuchsstadt sont caractérisées par un indice d’aplatissement (Ia : hauteur/diamètre) compris entre 0,30 et 0,38, soit un rapport de 1/2 à 1/2,5, un col rectiligne évasé à bord oblique débordant, une épaule arrondie large avec un point de segmentation situé en moyenne à mi-hauteur mais qui peut fluctuer suivant les exemplaires un peu au-dessus (Ehingen, Dötzingen 15) ou au-dessous. La partie inférieure de la panse est rectiligne ou faiblement convexe ; le fond en anneau plat ou légèrement oblique en constitue un caractère spécifique. L’anse en ruban, aux extrémités élargies, est majoritairement décorée de deux ou trois rainures parallèles aux bords, quelquefois complétées par une rainure médiane. Elle est fixée à l’intérieur du col par deux rivets à tête généralement conique, alors qu’à la base les deux rivets plats rattachent l’anse vers le milieu de la partie inférieure de la panse.
66Les quatre variantes du type distinguées par H. Thrane (Thrane, 1975) ont fait ensuite l’objet de discussions et d’appréciations différentes (Jacob, 1995, p. 24 ; Patay, 1996). Avec vingt exemplaires, la variante 1 regroupe les tasses les plus classiques, dotées d’un épaulement arrondi dont le profil rappelle les tasses du type d’Oternienburg-Dresden. La variante 2 regroupe des tasses à profil caréné et corps surélevé pour les exemplaires de Staaken, Wörschach, Altensittenbach. La variante 3 est caractérisée par un diamètre à l’ouverture nettement supérieur au diamètre de l’épaule et par un col évasé plus ou moins développé. Enfin, la variante 4, caractérisée par un corps élevé et un bandeau de col marqué, regroupe des récipients assez éloignés les uns des autres, non retenus par P. Patay dans son inventaire (Patay, 1996, Abb. 3). À partir de ces critères, nous préférerons retenir deux variantes :
un premier ensemble à épaulement arrondi, fond en anneau et col évoluant depuis des formes droites, minoritaires (Völs Gr. 6, Dötzingen ; Jacob, 1995, no 16), vers des orientations peu obliques majoritaires, ou très obliques (variante 3 de H. Thrane) ;
un second ensemble regroupe des formes carénées, hautes ou basses, de la variante 2 de H. Thrane, présentant des caractères mixtes comme les tasses décorées d’un rang de bossettes d’Altensittenbach ou de Haunstetten 1/23.
67L’unique exemplaire d’Évans appartenant à ce type est incomplet (fig. 27, no 8). Il a pu faire toutefois l’objet d’une restitution graphique. Il se caractérise par un fond en anneau, une panse arrondie développée, ainsi qu’un indice d’aplatissement qui se rangerait sans doute parmi les plus forts des récipients de cette catégorie. Le col développé et débordant renvoie aux récipients de la variante 3 de H. Thrane, notamment la tasse de Möhringen. Ses pro portions hautes se rapprochent des tasses de Braunsbedra (Martin, 2009, no 57) et de Pössneck-Schlettwein (ibid., no 74), toutes deux associées à des tasses et coupes de Kirkendrup-Jenišovice. Avec 1,15 litre, son volume total estimé se place parmi le maximum de celui des coupes et tasses de Jenišovice. L’anse fixée à la partie supérieure par deux rivets coniques aplatis et à la base par deux rivets plats est décorée sur chaque bord de deux rainures parallèles.
Inventaire des tasses type Fuchsstadt
Allemagne
1 - ABSTATT : Sprockhoff, 1930, 69
2 - ALTENSITTENBACH : Hennig, 1970, pl. 47 ; Thrane, 1975 ; Jacob, 1995, Taf. 5/26 (variante décorée et carénée)
3 - BASEDOW : Sprockhoff, 1930, Taf. 15c ; Hundt, 1955, Abb. 2/9 ; Martin, 2009, no 57
4 - BRAUNSBEDRA : 5 ex. ; Otto, 1955, Abb. 3-7 ; Martin, 2009, nos 58-62
5 - BURGSDORF : Sprockhoff, 1930, 71 ; Brunn, 1968, Taf. 23/2 ; Martin, 2009, nos 62, 63
6 - BURLADINGEN : Müller-Karpe, 1959, Taf. 207 G ; Jacob, 1995, Taf. 6/31 (variante)
7 - DEXHEIM : Sprockhoff, 1930, 68 ; Jacob, 1995, Taf. 5/23
8 - DÖTZINGEN : Sprockhoff, 1930, Taf. 18a, c ; Jacob, 1995, Taf. 3/13-16 (4 ex. selon Jacob)
9 - ESCHBORN, sép. 1 : 2 ex. ; Sprockhoff, 1930, 62f ; Jacob, 1995, Taf. 2/7, 6/33
10 - EHINGEN : Sprockhoff, 1930, 70 ; Jacob, 1995, Taf. 4/22)
45 - FALKENBERG : Martin, 2009, no 79
11 - FUCHSSTADT : Müller-Karpe, 1959, Taf. 207 A7 ; Jacob, 1995, Taf. 2/10
12 - GERNLINDEN : sép. 34 ; Müller-Karpe, 1959, Taf. 207 D ; Jacob, 1995, Taf. 4/19
46 - GROSSÔRNER : dépôt, 7 ex. ; Martin, 2009, nos 66-72, 80 13 - GRÜNWALD : sép. 1 ; Müller-Karpe, 1959, Taf. 207 C ; Jacob, 1995, Taf. 3/11)
22 - HAUNSTETTEN I-23 : Wirth, 1998, Taf. 23/15 (variante décorée)
14 - HITZACKER : Sprockhoff, 1930, Taf. 10e (attribuée à Dötzingen par Jacob, 1995)
47 - HURLACH (Lkr. Landsberg am Lech) : Wirth, 1998, p. 99, note 422
15 - LANGENGEISLING : Müller-Karpe, 1959, Taf. 207 H ; Jacob, 1995, Taf. 4/20
16 - MANSFELD : Sprockhoff, 1930, Taf. 16d ; Brunn, 1968, Taf. 113/1 ; Martin, 2009, no 73
17 - MÖHRINGEN : Sprockhoff, 1930, 69 ; Jacob, 1995, no 17
18 - NIERSTEIN : Thrane, 1965, Abb. 2b ; Jacob, 1995, Taf. 3/12
19 - OBERBOIHINGEN : Thrane, 1975 ; Jacob, 1995, Taf. 4/18
20 - PÖSSNECK-SCHLETTWEIN : 2 ex. ; Feustel, 1967, Taf. 45 a-b
21 - PRETEN : Sprockhoff, 1930, 72f
23 - REICHENBACH (SCHUSSENRIED) : Müller-Karpe, 1959, Taf. 207 B ; Jacob, 1995, Taf. 4/21
48 - SENGKOFEN : Jacob, 1995, Taf. 5/25 (variante)
24 - STAAKEN : Sprockhoff, 1930, Taf. 16 A, B ; Martin, 2009, nos 75-77 (3 ex. variante carénée)
25 - THALE (KLEWE BEI) : Sprockhoff, 1930, Taf. 10g ; Brunn, 1968, Taf. 165/1 ; Martin, 2009, no 78
49 - WOLLMESHEIM : Jacob, 1995, Taf. 5/28
Autriche
50 - LINZ : Prüssing, 1991, Taf. 1/9) (pas typique selon Patay)
51 - RASSING : Neugebauer, 2000, Abb. 22
26 - VOLDERS, Gr. 208 : Prüssing, 1991, no 8
27 - VÖLS, Gr. 6 : Müller-Karpe, 1959, Taf. 207/E ; Prüssing, 1991, no 87
28 - WÖRSCHACH, sép. 1 : Prüssing, 1991, Taf. 1/10) profil caréné, forme de transition ?
Danemark
29 - EJSTRUP : Thrane, 1965, Abb. 1
France
30 - MAS-SAINT-CHÉLY (SAINT-CHÉLY-DU-TARN) : Millotte, 1959, pl. II/4
31 - ÉVANS
Hongrie
32 - VELEM : Patay, 1990, no 87 ; « provenance incertaine, peut-être Velem »
33 - ÉRSEKVADKERT : Patay, 1990, no 87
Irlande du Nord - Ulster
52 - TAMLAGHT : Warner, 2004 (non cartographiée)
Norvège
34 - NYSTAD : Thrane, 1965, Abb. 2a
Pologne
35 - POZNAŃ-WIELKA STAROŁĘKA : Gedl, 2001, Taf. 1/2-3 ; 2 ex. variante
Roumanie
36 - MOIGRAD : Nestor, 1935, Abb. 1. 3/Taf. 2. 13
37 - PIȘCOLT : Nemeti, 1972, Abb. 2
38 - SÎG : Petrescu-Dîmbovita, 1977, Taf. 319. 4-5
39 - SÎNCRAIENI/CSIKSZENTKIRALY : Patay, 1975, Abb. 5. 7
40 - BURU : Roska, 1932, Abb. 2 ; Petrescu-Dîmbovita, 1977, pl. 344/3
Slovénie
53 - LUBLJANICA : Terzan, 1995, Taf. 36/263
Suisse
41 - MÖRIGEN : Gross, 1883, pl. XXII/7 ; Thrane, 1975
42 - BEVAIX : Thrane, 1975, fig. 80a
République tchèque
43 - ROHOW : Sprockhoff, 1930, Taf. 13b ; Gedl, 2001, Taf. 2/4
44 - ZARNOV : Novotnà, 1991, no 34 ; forme carénée classée Kirkendrup par Novotnà, Fuchsstadt par Patay (1996)
2.3.2. Répartition, chronologie
68Les tasses du type Fuchsstadt (variante 1 et 3 de H. Thrane) ont une répartition essentiellement occidentale (fig. 28). Celle-ci montre une zone de principale densité centrée sur l’Allemagne du Sud-Ouest, la moyenne et la basse vallée de l’Elbe, le sud de la Bavière, avec quelques exemplaires en Suisse et en Autriche. Des exemplaires isolés se retrouvent en France à Mas-Saint-Chély (fig. 97, no 5), au Danemark, et vers l’est : Hongrie, Tchéquie, Slovaquie, Roumanie (Sprockhoff, 1930, Taf. 19 ; Thrane, 1965, Abb. 4 ; 1975, fig. 81 ; Patay, 1996, Abb. 3). La plupart des modèles orientaux correspondent toutefois à des variantes qui s’éloignent des formes classiques du type (Jacob, 1995, Taf. 80 B).
69La chronologie des tasses du type de Fuchsstadt, souvent discutée, repose sur des associations funéraires et des dépôts. Elles sont représentatives du Ha A2 dans leur majorité. L’association dans plusieurs dépôts des tasses de Fuchsstadt et de Kirkendrup-Jenišovice permet de postuler en faveur d’une continuité du type jusqu’au Ha B1 (Müller-Karpe, 1959). Cette proposition sera ensuite reprise par H. Thrane (Thrane, 1965) pour qui les véritables tasses de Fuchsstadt sont les plus fréquentes au Ha A2, même si quelques exemplaires peuvent être représentés au Ha B1 dans les dépôts d’Allemagne moyenne et du moyen Danube. Ainsi, à six reprises, elles sont associées aux tasses de Kirkendrup dans les dépôts de Basedow, Thale 3, Ersekwadkert, Moigrad, Pössneck-Schlettwein, Mas-Saint-Chély. L’unique exemplaire d’Évans est tout à fait conforme à ce contexte.
2.4. Les puisoirs demi-sphériques « type Egyek »
2.4.1. Description
70Le profil de ces quatre récipients est caractérisé par une panse demi-sphérique à bord rentrant légèrement épaissi et par une base annulaire (fig. 27, nos 3, 29, 39, 45). Il est la réplique réduite des chaudrons de type B1 de G. von Merhart. Les diamètres à l’ouverture sont compris entre 100 et 129 mm pour une hauteur de 50 à 57 mm. Leurs volumes totaux, compris entre 382 et 597 cm3, peuvent se scinder en deux classes distinctes : l’une approchant les 400 cm3, l’autre les 600 cm3. Les parois externes sont soigneusement polies. Seul le bord est orné sous la lèvre d’un bandeau dont les motifs incisés sont spécifiques à chaque récipient :
no 3 : hachures alternées délimitées de part et d’autre par une double ligne horizontale (fig. 27 et 29) ;
no 29 : hachures alternées soulignées par trois lignes horizontales à la base. Des pointillés espacés sont disposés symétriquement dans les triangles réservés par les hachures et à la base des lignes incisées (fig. 27 et 30) ;
no 39 : bande de quatre lignes horizontales flanquées de part et d’autre d’une frise de lunules estampées (fig. 27 et 31) ;
no 45 : frise de chevrons emboîtés en arêtes de poisson superposée à trois lignes horizontales et un rang de lunules impressionnées (fig. 27 et 32).
71Tous ces récipients étaient munis d’une poignée unique dont il ne reste, sur deux d’entre eux, que les attaches et les dispositifs de fixation par double rivetage. Les deux exemplaires complets sont dotés d’une seule anse en forme de poignée coudée vers le haut. Les extrémités aplaties en spatule étaient fixées par deux paires de rivets à tête conique (fig. 32). Dans l’une de ces poignées, la seule qui soit torsadée (fig. 27, no 3) était enfilée au moment de la découverte dans un anneau à section losangique plate, à arête crantée. Selon les inventeurs, deux autres anneaux analogues ont été retrouvés dans les déblais au voisinage de ce récipient. Un dispositif identique se retrouve sur la tasse en or à poignée également torsadée du dépôt d’Angyalföld (Hongrie) (Sprockhoff, 1930, Taf. 21b). Morphologiquement, ces récipients se distinguent des tasses, tous types confondus, par leur paroi à bord rentrant ainsi que par leur poignée horizontale unique. La présence d’un anneau peut laisser penser que ce récipient a pu être suspendu ou rattaché à un autre récipient dont il était complémentaire. Comme W. A. von Brunn le suggère à propos du récipient de Braunsbedra, nous interpréterons ces récipients comme des puisoirs, fonction adaptée à la morphologie rentrante de la lèvre ainsi qu’à celle du dispositif de préhension.
2.4.2. Chronologie et répartition
72Ce type est peu répandu. Il n’est représenté que par deux exemplaires à poignée lisse (fig. 33). L’un, non décoré, provient du dépôt d’Egyek-Kendertag en Hongrie (Patay, 1990, Taf. 42/104) ; l’autre, décoré sous le bord d’une frise de trois lignes horizontales et de zigzags incisés, fait partie du dépôt de Braunsbedra (Kr. Merseburg, Allemagne – Brunn, 1968, Taf. 18/3). Chronologiquement, le puisoir d’Egyek est daté du Ha B1 par le contexte du dépôt. Il y est associé à trois tasses de Kirkendrup-Jenišovice, à une variante du type Fuchsstadt selon P. Patay, rapprochée des tasses de Chrášt’any/Spišská-Belá par O. Kytlicová, et à un chaudron à double attache cruciforme dont la paroi est ornée de lignes de bossettes horizontales alternant avec des lignes pointillées (Patay, 1990, Taf. 40/90-92 et Taf. 3/6). Une datation plus ancienne est retenue par W. A. von Brunn pour l’ensemble de Braunsbedra, dans la mesure où la composition de ce dépôt associe plusieurs types présents au Ha A2. Il peut être encore globalement attribué à die ältere Urnenfelderkultur d’Allemagne moyenne avec au moins cinq tasses du type de Fuchsstadt et deux tasses du type Oternienburg-Dresden. D’après P. Patay, qui se fonde sur la similitude morphologique du puisoir, l’ensemble peut être considéré comme contemporain des chaudrons de type B1 et des situles de type Hajdúböszörmény (Patay, 1990, p. 65). Le décor de lunules et d’incisions horizontales du puisoir no 39 se retrouve sur trois chaudrons. L’un est sans provenance (ibid., Taf. 22/29), un autre, provenant du dépôt II de Hajdúsámson, a un profil très similaire (ibid., Taf. 8/11), enfin, le dernier est celui de Blanot. Le décor du puisoir no 29, quant à lui, est semblable à celui du chaudron hongrois du dépôt II de Szentes-Nagyhegy (ibid., Taf. 17/24).
73Selon P. Patay, les rapprochements morphologiques que les puisoirs du type Egyek suggèrent avec les chaudrons et les poêles laissent penser à une origine similaire de ces récipients. Leur concentration dans le Nyírség, à l’est de la Tisza, et ses environs, placerait le lieu de production vraisemblable de ces ustensiles dans la culture de Gáva (Patay, 1990, p. 65). Le puisoir de Braunsbedra peut en être une exportation. Selon cette hypothèse, les quatre exemplaires d’Évans prolongent cette fois-ci loin vers l’ouest la diffusion de ce type, sans en modifier toutefois les comparaisons morphologiques et techniques qui rapprochent étroitement ces récipients de plusieurs types de productions hongroises.
2.5. Les bouteilles
2.5.1. Typologie
74Les bouteilles sont au nombre de six (fig. 34 et 35). Toutes ont en commun un mode de construction identique en trois éléments (fig. 36). La partie inférieure de la panse est formée par une coupelle conique à parois légèrement convexes et à fond arrondi. Un second élément constitue l’épaulement tronconique terminé par un méplat attenant à la base d’un goulot cylindrique ou légèrement évasé. Cette partie, qui s’emboîte au niveau de la carène et recouvre le bord de la partie inférieure, est assemblée par un repli de la tôle débordant de 3 à 4 mm. Le dernier élément est composé par le haut du goulot cylindrique ou tronconique évasé, terminé par un bord large débordant, oblique ou horizontal. Cette partie s’emboîte à l’intérieur de la partie inférieure du goulot avec laquelle elle est sertie à mi-hauteur par une rainure en V (fig. 37 et 38) (voir M. Pernot, ce volume, p. 86).
75Proches dans leur conception et leur décor, les bouteilles d’Évans peuvent se classer en trois lots. Quatre exemplaires sont comparables par leur forme et leur décor ; parmi eux on distingue deux bouteilles à panse haute (indice d’aplatissement - Ia total : hauteur/diamètre de 1,18 à 1,28 ; indice d’aplatissement - Ia panse : 0,91/0,92) (fig. 39 ; fig. 35, nos 6, 38) et deux bouteilles à panse plus basse (indice d’aplatissement - Ia panse : 0,75/0,78) (fig. 35, nos 4, 5). Ces quatre récipients sont confectionnés dans une tôle mince. Les hauteurs des deux récipients conservés dans leur totalité sont respectivement de 101 mm (no 6) et 118 mm (no 38). Les diamètres de la carène sont compris entre 85 et 92 mm pour un diamètre à l’ouverture de 38 mm. Les décors réalisés sur l’épaule se composent de deux lignes de bossettes de 5 à 7 mm de diamètre alternant avec des lignes parallèles de pointillés fins. La ligne de pointillés supérieure, qui souligne le méplat à la base du col, peut être simple (no 4), double (nos 5, 6) ou triple (no 38).
76Bien que très déformée et déchiquetée en six fragments, la bouteille no 35, fig. 35, se rapproche des précédents exemplaires à panse basse par son profil restitué (Ia panse : 0,76) et son décor. Elle s’en distingue par l’utilisation d’une tôle beaucoup plus épaisse, par l’absence de méplat à la base du goulot, et par un décor de pointillés plus serrés et des bossettes aux contours moins nets résultant sans doute de l’épaisseur de la tôle.
77Le dernier exemplaire (fig. 35, no 7), à panse haute (Ia panse : 0,85) et tôle mince, se distingue des autres récipients de ce type par son décor de lignes verticales de trois bossettes chacune alternant avec trois lignes de pointillés limitées en haut et en bas par une ligne horizontale de pointillés serrés. Au sommet, une ligne de pointillés serrés souligne l’arête du méplat à la base du col.
78Les volumes des panses s’échelonnent entre 190 et 282 cm3. Cinq d’entre elles avoisinent les 200 cm3, alors que la sixième (no 38) se détache du lot avec un volume de près de 300 cm3. Techniquement, les faces extérieures, ainsi que la face interne du rebord, ont été soigneusement polies comme en témoignent leur surface uniforme et la présence de stries de polissage encore bien apparentes sur les portions les moins corrodées. Par contre, l’intérieur est resté brut de façonnage et montre sur tous les récipients des traces de martelage sous la forme d’impacts allongés et étroits de 8 à 11 mm. Ces impacts indiquent un travail réalisé suivant deux orientations : concentriques serrées, se terminant au niveau du fond par une spirale, et transversales obliques plus espacées (fig. 40). Ils permettent néanmoins de distinguer les bouteilles nos 6, 35 et la partie haute du no 5 sur lesquelles ne sont visibles que les traces de martelage tangentielles en spirales concentriques. Sur les bouteilles nos 4, 7 et 38, ainsi que sur la coupelle basse du no 5, s’ajoutent aux premiers des impacts transversaux légèrement obliques et plus espacés.
2.5.2. Comparaisons, chronologie
79Avec onze bouteilles, le dépôt de Blanot offre un ensemble de référence représentatif de ce type de récipient peu fréquent (Thevenot, 1991, fig. 9, 10). Il forme avec les six bouteilles d’Évans une série originale dans le corpus des vaisselles métalliques du Bronze final européen. La notion de série a été bien mise en évidence à travers les deux variantes des bouteilles de Blanot. Elles se distinguent par des indices d’aplatissement de la panse, respectivement proches, de 0,50 (nos 1, 2, 4, 5) et de 0,70 (nos 8-11) (fig. 39), par deux thèmes décoratifs de doubles et triples lignes de bossettes, ainsi que par des particularités techniques propres à chacune d’elles.
80Les bouteilles de Blanot et d’Évans offrent de nombreux points communs, que ce soit dans leur forme générale, dans leurs techniques d’assemblage identiques de la carène et du goulot, ainsi que dans la réalisation et la disposition du décor de lignes de bossettes et de pointillés au repoussé. Les exemplaires d’Évans se distinguent toutefois dans leurs formes par une panse plus haute, un col de diamètre moyen à l’ouverture plus étroit et la présence d’un méplat au sommet de l’épaule (à l’exception du no 35) ; ainsi que, dans le détail, par une plus grande variabilité de la composition du décor. Techniquement, nous avons également constaté sur certains vases d’Évans l’existence de traces de martelage croisées qui n’apparaissent pas à Blanot. À cet égard, la bouteille no 35 est celle qui, à tous ces points de vue, se rapproche le plus de la série de Blanot, notamment des nos 6 et 7. Comme à Blanot, les bouteilles d’Évans suggèrent une impression de série avec, dans les deux ensembles, des récipients identiques et la présence de deux variantes à panse haute et basse. Toutefois, si nous considérons le rapport diamètre/hauteur de la panse, leur représentation graphique montre une plus grande dispersion des exemplaires d’Évans, ce que reflète aussi dans le détail une plus grande diversité du décor.
81Le décor de la bouteille no 7 est quant à lui original (fig. 35, no 7). Le motif, composé de lignes de quatre bossettes alternant avec des doubles lignes de pointillés verticales, est très proche de celui de la bouteille de Malhostovice en Moravie, assimilée aux vases à étage du type Štramberk et interprétée un temps comme lampe (Nekvasil, Podborský, 1991, Taf. 4/24, p. 9). Ce fragment de récipient, comparé à juste titre par J. -P. Thevenot aux bouteilles hautes de Blanot, en partage toutes les caractéristiques. Dans le même dépôt, on trouve d’ailleurs un élément en tôle de bronze conique lisse de même diamètre, alors interprété comme « umbo de bouclier » (Schildbuckel), qui peut tout à fait constituer la base de la panse de la bouteille et vient confirmer cette interprétation (Podborský, 1970, Taf. 7/11). Une bouteille, dont il manque le haut du col et le fond, provient de la sépulture b de Völs (Autriche) et constitue un autre jalon dans la répartition orientale de ce type de récipient (fig. 33). Il s’agit aussi d’un modèle original, dont le décor, de trois lignes parallèles espacées de petites bossettes sur l’épaule, diffère des autres exemplaires connus (Prüssing, 1991, Taf. 10/79A). Ces deux exemplaires, pour l’instant isolés et géographiquement éloignés l’un de l’autre, ne peuvent être interprétés avec certitude dans l’état actuel des données, mais posent la question d’autres centres de production de ces récipients. Enfin, provenant d’Auvernier, le décor d’un fragment de tôle en arc de cercle rappelle également celui de ces bouteilles, bien qu’ici cette pièce ne soit pas attribuée à un type d’objet précis (Rychner, 1979, pl. 101/11).
82Les bouteilles biconiques à goulot et rebord évasé entrent également dans la composition de certains dépôts de récipients en or d’Europe du Nord comme Vimose Overdrev (Schauer, 1986, Taf. 38/2-3). Dans cette catégorie, on remarque aussi la bouteille de l’ensemble plus méridional de Heroldingen-Huisheim (Lkr. Donau-Ries) dont les dimensions et les proportions sont en tous points comparables aux exemplaires hauts d’Évans (Wamser, Gebhard, 2001, p. 224). Le décor couvrant les deux parties de la panse est composé d’une alternance de lignes de petites bossettes, de pointillés, de nervures horizontales et de bandes de hachures verticales. Le goulot en une seule pièce se termine sous le bord par un bourrelet qui évoque le dispositif d’assemblage des goulots des bouteilles en bronze (ibid., Abb. 8, 24e). Enfin, ce type de forme à panse biconique et col cylindrique est représenté par l’exemplaire en bronze coulé qui orne le chariot miniature de la sépulture d’Acholshausen (Pescheck, 1972).
83Dans leur morphologie – forme fermée dotée d’un goulot, petit volume de la panse, absence d’élément de préhension – les bouteilles du type Blanot constituent un type original parmi le corpus des formes de vaisselle métallique en bronze de l’Âge du Bronze européen. Elles se distinguent des récipients ouverts habituellement rencontrés, qui sont généralement considérés comme adaptés à la préparation (situles, chaudrons, passoires), au prélèvement ou à la consommation de liquides (tasses, coupes, puisoirs). La découverte de la série des bouteilles de Blanot avait permis de soulever plusieurs questions quant à leur origine et à leur fonction. J. -P. Thevenot envisageait l’hypothèse d’une origine occidentale de ces productions et, compte tenu de leur très grande similitude, celle d’une production issue d’un même atelier, d’une part, et d’autre part, une utilisation comme contenant de liquides précieux : parfums, onguents ou vases à libation (Thevenot, 1991, p. 81-82). Privilégiant l’hypothèse d’un assortiment de toilette lié à la parure féminine de ce dépôt, S. Verger retient également l’hypothèse de contenant d’ingrédients entrant dans la composition de fards, de teintures ou de parfums (Nicolardot, Verger, 1998).
84La datation des bouteilles du type de Blanot, dont les décors appartiennent au Punkt-Buckel-System, ne repose donc que sur un nombre limité de comparaisons. Nous avons vu que l’attribution du dépôt de Blanot au Ha B1 (BF IIIa) est attestée par l’association d’un chaudron du type B1 de Merhart, une coupe du type de Jenišovice/Kirkendrup de variante occidentale avec un lot de parures originaires du domaine nord-alpin occidental : anneau réniforme, ceinture articulée, jambières à spirales. Le bracelet réniforme à côtes, comparable aux types de Pfedersheim et Lindenstruth, peut être attribué à partir de plusieurs associations à la fin du Ha A2 et au Ha B1 (Richter, 1970 ; Chaume, 1989 ; Thevenot, 1991). Il en est de même des jambières à jambart large et spirales, dont les modèles les plus récents se situent dans des ensembles du Ha A2 et perdurent dans l’est de la France jusqu’au Ha B1, comme à Champigny où cette parure se retrouve associée au bracelet réniforme à côtes (Thevenot, 1991). Une datation à la charnière du Ha A2 et B1 peut être proposée pour la bouteille de Malhostovice à partir du mobilier d’accompagnement et notamment du couteau à soie et dos sinueux (Rihovsky, 1972, Taf. 41 C), alors que le contexte du récipient de Völs reste incertain (Prüssing, 1991). Enfin, la bouteille en or de Heroldingen-Huisheim, attribuée aux xe-ixe siècles av. J.-C., est en accord avec les propositions précédentes. Les parallèles envisagés entre ces récipients métalliques et certains gobelets en céramique à panse biconique et col étroit, rhénans et sarrois, parmi lesquels on peut citer ceux des sépultures 1930-1 de Wingersheim (Bas-Rhin) (Forrer, 1930, pl. LII i), A/20 de Wintersdorf, C35 de Ballern et de Gerolstein (Sarre - Kolling, 1968), la sépulture 2 d’Armstein, l’incinération 1979-1 de Koenigschaffhausen (Grimmer-Dehn, 1991, Taf. 97/9) ou encore un vase isolé de Colmar, confortent une datation dans l’étape moyenne du Bronze final. Si une convergence morphologique et la chronologie réunissent ces types de récipients, leurs répartitions distinguent trois zones géographiques différentes qui rendent pour l’instant difficile l’établissement d’une filiation entre eux.
85La présence d’une série de six bouteilles dans le dépôt d’Évans, distant d’une centaine de kilomètres à l’est de celui de Blanot, renforce l’hypothèse d’une production occidentale de ce type de formes. Les ressemblances entre les bouteilles et certaines formes de gobelets en céramique, remarquées par J.-P. Thevenot dans les associations funéraires du domaine Rhin-Suisse-France orientale, peuvent aussi suggérer certains rapprochements, bien que l’aire de répartition plus septentrionale de ces céramiques soit distincte à ce jour de celle des bouteilles du type Blanot. La découverte d’Évans apporte un argument typologique supplémentaire pour une production que l’on pourrait situer dans le bassin de la Saône ou ses abords immédiats, compte tenu de l’implantation des lieux de découverte et de l’homogénéité typologique de ces récipients.
2.6. Les passoires
86Deux passoires appartenant à deux types très différents proviennent du dépôt d’Évans. Elles lui confèrent un intérêt particulier compte tenu de la rareté de ces ustensiles et de leur variété typologique.
2.6.1. Passoire type Tiszavasvári
87La grande passoire d’Évans, d’un diamètre à l’ouverture de 279 mm environ pour une hauteur de 192 mm, est caractérisée par un corps conique à fond arrondi, terminé à la partie supérieure par une légère carène (fig. 41 et 42). Un large bord oblique évasé est renforcé par une lèvre enroulée autour d’un fil de bronze (fig. 43). Deux poignées coudées vers le haut, diamétralement opposées, étaient fixées au moyen de rivets à tête conique sur le bord. Seule l’une d’elles, arrachée et déformée au moment de la découverte, a été recueillie.
88Cette passoire trouve des comparaisons très étroites dans la forme, les dimensions, le renforcement de sa lèvre, la position en quinconce des perforations, l’épaulement et les poignées, avec deux autres exemplaires géographiquement très éloignés l’un de l’autre (fig. 44 et 33). La passoire du dépôt de Tiszavasvári-Fácánoserdö (Hongrie), d’un diamètre de 30 cm, est décorée sous la carène d’une frise de protomés d’oiseaux alternant avec des groupes de trois bossettes (Patay, 1990, Taf. 46/120). L’exemplaire non décoré du dépôt de Kostræde (Danemark) est incomplet. Son diamètre de 30,7 cm est proche de celui des deux exemplaires précédents (Thrane, 1965, Abb. 23 et 1967, Taf. 9). Ces trois passoires appartiennent à deux variantes du même type, l’une décorée, l’autre non, que nous proposons de nommer type de Tiszavasvári. La partie supérieure à large bord oblique, renforcé par un fil de bronze, évoque fortement celle des situles de type Hajdúböszörmény, similitude que renforce encore la frise de la passoire éponyme et qui postule en faveur d’une provenance d’ateliers communs. Compte tenu de ces ressemblances, une origine hongroise, déjà envisagée pour la passoire de Kostræde par H. Thrane, apparaît devoir être à nouveau proposée dans l’état actuel de la documentation.
89Nous avons vu en introduction que des indices tendent à montrer que les deux passoires d’Évans ne sont pas un cas isolé dans le Jura. Quelques fragments de tôle à perforations fines provenant de dépôts jurassiens peuvent également appartenir à des passoires. L’ensemble le plus significatif provient du dépôt de Bouclans (Doubs), sur la bordure nord-occidentale des plateaux du Jura, à une quinzaine de kilomètres à l’est de Besançon (Doubs). Parmi plusieurs fragments de tôle lisse difficiles à identifier, nous y remarquons la présence d’une poignée, d’un fragment de bord de récipient enroulé autour d’un fil de bronze et d’un fragment de passoire en tôle de bronze présentant sur la moitié de sa surface de fines perforations disposées en quinconce (Passard et alii, 1984, fig. 5, nos 2, 13, 14). La poignée surtout est intéressante (fig. 166, no 1). Compte tenu de sa courbure et de l’orientation de la patte de fixation encore conservée, elle ne peut s’adapter à une panse de situle ou d’amphore, mais elle est identique aux poignées des passoires à bord oblique évasé du type de Tiszavasvári. Bien qu’aucun argument ne permette d’attribuer ces trois éléments à un même récipient, nous constaterons que chacun d’entre eux trouverait sa place sur une passoire comparable à celle d’Évans. Enfin, deux fragments de tôle à fines perforations attribués à des passoires ont également été signalés parmi le mobilier du dépôt de Larnaud (Jura) (infra, fig. 172, nos 7, 8 - Coutil, 1914).
90La passoire du dépôt de Tiszavasvári est datée du Ha B1 par ses points communs avec les décors des situles du type Hadjuböszörmény, ainsi que par le mobilier d’accompagnement comprenant deux haches à douilles à tranchant large et une épingle à tête sphérique décorée de chevrons emboîtés et de pointillés qui conforte cette datation (Kemenczei, 1984, Taf. 213 a/1, 4, 5 ; Patay, 1990, p. 71). La passoire de Kostræde est associée, quant à elle, à un mobilier daté de la période IV du Bronze scandinave comprenant une fibule, deux appliques de ceintures coniques très semblables, un vase coffret et deux spirales en or (Thrane, 1965). Le dépôt de Bouclans rassemble un lot d’objets fragmentés qui, dans leur grande majorité, sont représentatifs de l’étape moyenne du Bronze final du domaine jurassien : couteau à manche massif, haches à ailerons subterminaux sans anneaux, bracelets type Avenches, anneaux de cheville ouverts à petits tampons décorés de chevrons et d’inci sions transversales assimilés au type Pourrières, faucilles à bouton, éléments de ceinture à maillon plat, pendeloques triangulaires et en rouelle, épingle à tête discoïde rapportée de grand diamètre. Une languette d’épée du type de Forel et un fragment de cnémide décorée de bossettes et pointillés, comparable aux exemplaires de Kuřim et Kloštar-Ivanić, permettent également de situer son enfouissement au Ha B1.
2.6.2. Passoire à crochet de suspension
91La seconde passoire, d’un diamètre à l’ouverture restitué de 144 mm pour une hauteur de 72 mm, présente une panse demi-sphérique surmontée d’un épaulement caréné, un bord et un col oblique évasés (fig. 45 et 46, no 10). Un crochet de suspension et/ou de préhension coulé, de section grossièrement trapézoïdale, se termine par une languette de fixation allongée assemblée à l’intérieur du col par deux rivets à tête conique.
92Par sa forme et son dispositif de suspension, cet accessoire se distingue des passoires peu nombreuses du début du Bronze final. Ces ustensiles, également de petites dimensions, sont généralement dotés d’une (Záluží - Kytlicová, 1991, Taf. 28 C1 ; Velká-Dobrá - Kytlicová, 1991, Taf. 29 A1 ; Milavče, tum. C6 - Kytlicová, 1991, Taf. 28 A1 ; Hart a. d. Alz - Jacob, 1995, Taf. 9/52 ; Falkenberg - Martin, 2009, Taf. 30/121 ; Středokluky - Kytlicová, 1991, Taf. 7/40 ; Dresden-Dobritz - Martin, 2009, Taf. 30/120 ; Poing - Winghart, 1999, Abb. 10) ou de deux anses en ruban (Nadap - Petres, 1990, Taf. 75/187). Le corps de la passoire d’Évans se rapproche de celui de la passoire à anse de la sépulture 4 de Langengeisling (Jacob, 1995, Taf. 9/53). De dimensions approchantes, cette dernière se distingue toutefois de l’exemplaire d’Évans par un col plus développé et un épaulement délimité par une légère carène.
93Avec une partie supérieure qui rappelle celle des tasses du type de Jenišovice (col et bord oblique courts, carène et épaulement étroit), la passoire d’Évans s’inscrit dans le schéma évolutif proposé par O. Kytlicová, à la suite des exemplaires de Hart a. d. Alz et de la sépulture 4 de Langengeisling, respectivement attribuées au Ha A1 et A2 (Kytlicová, 1991, Abb. 1). Par son profil, la passoire d’Évans se rapproche également de la coupe originale de dimensions légèrement inférieures (diam. 130 mm ; hauteur : 50 mm) à fond arrondi, réalisée sur une tôle ornée, provenant d’Estavayer qu’il est difficile d’interpréter comme une forme aboutie ou inachevée (Wyss, 1971, Abb. 6/10). Il est par contre plus délicat de donner une signification chronologique à l’emploi de rivets coniques pour la fixation du crochet de suspension. On remarque que ces rivets sont fréquemment utilisés sur les tasses du type de Fuchsstadt et ne sont par contre plus attestés sur la grande majorité des tasses du Ha B1 du type Kirkendrup-Jenišovice. Inversement, leur présence perdure à cette phase pour la fixation des poignées des situles du type Hajdúböszörmény, pour celles des passoires du type de Tiszavasvári ou encore pour les puisoirs du type Egyek. L’apparition d’un crochet recourbé vers l’extérieur constitue ici une nouveauté qui se développera sur plusieurs récipients en bronze et sous différentes formes à la fin du Bronze final (puisoir de Zuchring, puisoir de Steinkirchen) puis au Hallstatt C (Jacob, 1995, Taf. 13, 17). À l’inverse de la première passoire d’Évans dont les caractères postulent en faveur d’une importation carpatique, l’origine de la seconde serait davantage à rechercher dans des ateliers plus occidentaux, voire régionaux ?
94Avec vingt et un exemplaires connus, les passoires sont relativement peu représentées dans les ensembles du Bronze final européen. Les passoires d’Évans marquent une évolution certaine de ce type d’accessoire à la fin de l’étape moyenne du Bronze final. Avec une panse volumineuse approchant les 5 litres, la passoire conique, à laquelle on a adapté un dispositif de préhension à double poignée plus robuste, reflète un accroissement des volumes filtrés lors des préparations. Par la présence d’un dispositif de suspension à crochet et avec un volume nettement inférieur de 500 cm3 environ, la seconde passoire peut suggérer, quant à elle et suivant cette interprétation, une association avec un récipient sans doute profond à col droit ou peu débordant. De par leurs volumes et leurs aménagements différents, ces deux ustensiles peuvent correspondre à deux fonctions distinctes d’une même préparation ou à deux types de préparations distinctes.
2.7. Le vase biconique
2.7.1. Description
95D’un diamètre maximal de 210 mm pour une hauteur de 145 mm, ce récipient à panse biconique est composé de deux éléments (fig. 46, no 2 ; fig. 54). Ceux-ci sont sertis au niveau de la carène par un repli de la partie supérieure de la tôle qui recouvre le bord évasé de la partie inférieure. Une cannelure formant un bourrelet saillant contribue à resserrer cet assemblage (fig. 47). Les parois légèrement convexes se terminent par une carène haute et un bord évasé destiné au sertissage. La partie inférieure de la panse est soulignée de trois nervures concentriques. Le fond rentrant est segmenté. Par son profil, cet élément inférieur rappelle celui des coupes de Kirkendrup-Jenišovice. L’élément supérieur, en une seule pièce, est composé d’une épaule décorée et d’un col tronconique évasé à large bord oblique d’un diamètre maximal de 190 mm et d’un diamètre à l’ouverture de 140 mm. La lèvre est renforcée par un fil de bronze autour duquel la tôle est enroulée. Le décor au repoussé couvrant l’épaule présente un double registre de petites bossettes séparées par des lignes pointillées horizontales. Il surmonte un bandeau de cannelures et nervures verticales serrées, alternant avec quatre panneaux symétriquement opposés deux à deux (fig. 48). Leurs décors sont respectivement composés d’une grosse bossette centrale flanquée de part et d’autre de deux bossettes plus petites. Ce motif central est souligné en haut et en bas par une ligne de pointillés repoussés. Le volume total de ce récipient peut être estimé à 3 litres et celui de la panse seule à 2,5 litres.
2.7.2. Comparaisons, chronologie
96Ce vase ne connaît à ce jour aucune comparaison directe. Il faut bien reconnaître aussi qu’antérieurement à l’apparition des amphores du type Gevelinghausen-Vejo-Seddin les récipients fermés restent peu nombreux, même si les fragments attribués à une amphore à panse biconique de Žatec illustrent l’existence de cette catégorie de récipients dès le Ha A1-A2 en Bohème (Kytlicová, 1991, no 45). L’amphore à panse biconique de Žatec, celles du Ha B1 de Mariesminde et Bjärsjöholm, puis les amphores plus récentes du type Gevelinghausen-Vejo-Seddin, dont les premières pourraient en être les prototypes, sont caractérisées par un assemblage en deux parties rivetées à la carène qui diffère de celui utilisé ici. L’assemblage par sertissage sans l’aide de rivets est original sur un récipient de grand volume. Cette technique est toutefois représentée au Bronze final sur des récipients de profil fermé de plus petites dimensions sous différentes variantes. Le dispositif d’assemblage des bouteilles du type Blanot, qui se rapproche de celui du vase à panse biconique d’Évans, n’est toutefois réalisé que par l’emboîtement de la partie supérieure couvrant le bord évasé de la partie inférieure. La panse des petits récipients de forme originale du type Štramberk (Podborský, 1991, nos 25, 26) présente également un assemblage en deux parties par emboîtement et repli de la tôle supérieure au niveau de la carène. Le pichet de Keresztéte, en Hongrie (Patay, 1990, Taf. 35/67), que Patay rapproche, toutes proportions mises à part, des amphores de Mariesminde-Bjärsjöholm, se distingue des précédents. Ici, le sertissage de la partie inférieure recouvre la partie supérieure évasée formant, comme pour le vase d’Évans, un bourrelet saillant au niveau de la carène. Seule l’amphore du dépôt F du Bullenheimer Berg, associée à des objets du Ha B3, présente une variante proche du vase d’Évans avec le sertissage de la partie supérieure sur la partie inférieure au moyen d’une cannelure sous la carène (Hagl, 2008, Abb. 19). Le renfort du rebord, par un enroulement de la lèvre autour d’un fil métallique, est par contre une technique utilisée à plusieurs reprises qui renforce les bords des récipients de grandes dimensions, que ce soit les passoires du type de Tiszavasvári, l’amphore de Bjärsjöholm (Thrane, 1965, fig. 22), ou les situles du type Hajdúböszörmény et Kurd.
97Quant au décor, qui intègre des motifs classiques de pointillés et de bossettes, il se complète par un bandeau de nervures verticales, moins fréquemment usitées dans les ornements de la vaisselle de bronze. On peut rapprocher ce motif d’une tasse du dépôt de Dresden-Dobritz (Brunn, 1968, Taf. 56/1 ; Jacob, 1995, Taf. 92/4) et d’une coupe (?) de Weisin (Sprockhoff, 1930, Taf. 18 e). Ce thème décoratif apparaîtra ensuite sur des formes plus récentes : amphores de Narce (Merhart, 1952, Taf. 24/6), coupes de Wolfshagen (Sprockhoff, 1930, Taf. 22c) et Zimitz (ibid., Taf. 34b), puisoir de Pluckow (Merhart, 1952, Taf. 15/1). Il en est de même des quatre panneaux décorés de cinq bossettes qui ornent l’épaule en alternance avec les nervures et cannelures verticales. Aucun type de motif strictement comparable n’est connu. Il peut être rapproché des panneaux de trois bossettes de même diamètre inscrites d’anneaux concentriques qui ornent l’épaule de certaines amphores du type Gevelinghausen-Vejo-Seddin comme celles de Rørbæk (Thrane, 1975, fig. 96), Seddin et Herzberg (May, Schmidt, 1993). Sur le décor de la « barque solaire » des situles du type Hajdúböszörmény et des amphores du type Gevelinghausen-Vejo-Seddin, on remarque une disposition généralement ternaire de deux bossettes respectivement situées de part et d’autre d’un motif principal de grand diamètre, composé d’une bossette inscrite au centre de cercles concentriques de pointillés et de petites bossettes, figurant la représentation solaire. Le motif de deux bossettes de part et d’autre du disque central orne les deux situles de Granzin (Martin, 2009, Taf. 39/134-135), la base de l’amphore de Gevelinghausen, voire le motif bas plus complexe de la situle du Dorotheum de Vienne (Wirth, 2006, fig. 8). La variante du motif simplifié de l’urne d’Évans évoque-t-elle ici une schématisation du même thème ?
98Le type original du vase biconique d’Évans n’autorise pas de comparaisons directes avec d’autres récipients équivalents permettant une attribution typochronologique. La morphologie de la partie inférieure (épaulement anguleux, fond en V souligné par trois cannelures), ainsi que la technique de martelage rayonnante se retrouve sur les tasses de Kirkendrup-Jenišovice variante B (fig. 60a). Ces convergences techniques permettraient de proposer une datation du Ha B1. Une production commune d’un atelier appliquant la même technique de fabrication que celle utilisée pour les tasses de Jenišovice suivant les critères orientaux apparaît tout à fait possible. De même, l’assemblage par sertissage des deux parties à la carène est une technique utilisée sur différentes variantes à la même époque. Celle-ci est à la fois connue sur des récipients représentés dans le domaine occidental (bouteilles de Blanot) et oriental (pichet de Kereszetéte), les vases de Štramberk offrant dans le détail un profil de bourrelet d’assemblage à la carène comparable à celui du vase d’Évans (Nekvasil, Podborský, 1991, Taf. 4/25-27). À l’exception de l’amphore du Bullenheimer Berg, cette technique sera ensuite abandonnée sur les amphores dont la grande majorité est alors assemblée à la carène au moyen de rivets plats. L’assemblage par repli de la partie supérieure sur la partie inférieure se retrouve toutefois au Hallstatt ancien sur des récipients de petit volume du type pichet. Le col tronconique évasé, à bord oblique renforcé par un fil de bronze, est comparable à celui de l’amphore de Bjärsjöholm, également datée du Ha B1 par H. Thrane par comparaison avec celle de Mariesminde. Ce dernier type se distingue également des amphores plus récentes du Ha B2/3 par son corps biconique symétrique et par un fond concave dépourvu de pied, autant de caractères généraux qui sont partagés par le vase d’Évans. Enfin, parmi les vaisselles métalliques complètes de contenant volumineux du Bronze final, le vase d’Évans se distingue par l’absence d’éléments de préhension. Par ce caractère et par son profil général, on notera aussi la ressemblance de ce récipient avec les jarres en céramique du Bronze final, que ce soit dans le domaine RSFO ou dans différentes cultures contemporaines d’Europe moyenne.
2.8. Le chaudron à attaches cruciformes
2.8.1. Description
99Le chaudron à attaches cruciformes d’Évans se range parmi les modèles du type B1 de G. von Merhart (fig. 49). Ce type est caractérisé par des attaches d’anses cruciformes à branches courtes, plutôt grossières, une panse convexe à bord rentrant, un fond en anneau ou à arête vive et un décor généralement localisé sous la lèvre composé d’un bandeau étroit de lignes et de motifs simples gravés (Merhart, 1952).
100Le chaudron d’Évans a un diamètre à l’ouverture de 270,5 mm et une hauteur de 118,3 mm, dimensions qui lui confèrent un indice d’aplatissement assez bas comparé aux autres exemplaires du type (Ia = 0,41). Il s’inscrit sous la moyenne des chaudrons de ce type (Ia = 0,44), dont les extrêmes sont compris entre 0,60 et 0,39. Son volume total peut être estimé à 7,7 litres. Le bord rentrant, décoré de trois rainures parallèles, est épaissi et la lèvre aplatie (fig. 50). Le fond forme un anneau plat à centre rentrant. Les parois internes présentent sur toute leur surface des traces de martelage nombreuses, allongées, d’orientation rayonnante, estompées par le polissage.
101Les attaches d’anses cruciformes doubles, à patte verticale peu longue, sont coulées d’une seule pièce. Elles sont symétriques et issues du même moule (fig. 51). Elles sont assemblées à la panse par des rivets à tête conique. L’anneau de suspension à section trapézoïdale se prolonge par une nervure en relief qui renforce la patte de fixation. Cette particularité est fréquente sur les chaudrons de Hongrie. Comme le pourtour extérieur de la pièce, le bord intérieur de l’anneau de suspension est irrégulier, brut de coulée et ne montre aucune trace d’usure importante décelable à l’œil nu.
102Les deux anses de même forme générale, aux extrémités équarries et amincies, recourbées vers le haut, sont dissemblables dans leurs sections et leurs décors. L’une, à section ovalaire, est ornée sur toute sa longueur de bandes de chevrons emboîtés en rameau de sapin alternant avec des bandes d’incisions transversales parallèles et des portions lisses (fig. 52). L’autre, de section circulaire, est ornée de cinq bandes de hachures transversales limitées à chaque extrémité par une bande de chevrons emboîtés, en alternance avec des plages lisses. Sur les deux anses, le décor n’est lisible que sur un seul côté. Le décor de l’anse encore attenante au récipient est visible lorsque celle-ci repose sur le bord du chaudron. Il est légèrement estompé dans sa partie médiane, témoignant d’une usure sur une longueur de 6 à 7 cm. Inversement, le décor de l’autre anse n’est visible que lorsque celle-ci est relevée, mais compte tenu de sa corrosion, il est difficile de se prononcer sur la présence de traces d’usures. Ces décors sont originaux sur les anses des chaudrons de ce type qui sont généralement dotés d’anses lisses ou plus rarement torsadées. Seul le chaudron d’Acholshausen, du type A de G. von Merhart, à panse carénée et attaches triangulaires, daté de la transition Ha A2-B1, est muni d’une anse ornée de groupes d’incisions transversales (Pescheck, 1972, Abb. 4/3b). On peut alors s’interroger sur l’origine des anses du chaudron d’Évans. De morphologie et de décors distincts, originaux et asymétriques, ces anses pourraient avoir été rapportées a posteriori (?) Leurs décors évoquent des motifs répandus sur des bracelets et les anneaux de cheville à jonc circulaire du Bronze moyen et du début du Bronze final en Allemagne du Sud-Ouest et en Rhénanie, voire sur des torques à extrémités enroulées des Alpes et de Slovénie.
2.8.2. Comparaisons, chronologie
103Le chaudron d’Évans est le second exemplaire du type B1 attesté en France après celui de Blanot. Il est comparable à un chaudron hongrois à anses lisses de Máriapócs (Patay, 1990, Taf. 13/18) dont il se rapproche par des proportions semblables (diam. : 288 mm, ht. : 121 mm, Ia : 0,42), par des pattes d’attaches d’anses allongées à nervures en relief fixées par des rivets coniques, ainsi que par son décor de trois rainures sous le bord. Le profil de la panse du chaudron d’Évans peut encore être comparé à ceux de Hajdúböszörmény (Patay, 1990, Taf. 4/7) et du dépôt II de Hajdúsámson (ibid., Taf. 8/11). Le décor de rainures parallèles sous la lèvre reste banal comparé aux motifs incisés plus complexes utilisés sur la plupart des chaudrons. Ceux-ci comprennent des hachures, festons, pointillés, zigzags et quelquefois des lignes ou des motifs de bossettes repoussées. Les décors linéaires se retrouvent sur d’autres exemplaires de Moigrad I (Soroceanu, 2008, Taf. 20/94), Visuia (ibid., Taf. 21/97), Unterglauheim (Jacob, 1995, Taf. 32/223). On pourra également remarquer que les anneaux des attaches d’anses se rattachent directement aux pattes cruciformes (cf. fig. 50). Par ce détail, ils se distinguent d’une majorité d’attaches de chaudrons à anneau individualisé par un étranglement : Kisvarsány (Patay, 1990, Taf. 11/16), Hajdúszovát (ibid., Taf. 9/12), Hajdúsámson (ibid., Taf. 6/9 ; 7/10 ; 8/11), Hajdúböszörmény (ibid., Taf. 5/8), Szentes (ibid., Taf. 18/25 ; 19/26), etc.
104La carte de répartition des chaudrons à attaches d’anses cruciformes de J.-P. Thevenot (1991, fig. 73) est venue réactualiser les cartes précédentes de G. von Merhart (1952, Karte 1) et de H. Thrane (1965, fig. 15). Toutes montrent la rareté du type à l’ouest du bassin supérieur de la Tisza où se concentre, avec le secteur carpatique, la plus grande densité des chaudrons de type B1. À partir de cette zone nucléaire, quelques exemplaires jalonnent deux axes de diffusion privilégiés, vers l’ouest, le long du Danube (Unterglauheim, Linz), et vers le nord en Brandebourg (Hennickendorf, Zepernick), en direction du Danemark (Hvedolm, Vester Skjerninge). À l’ouest du Rhin, les découvertes de Blanot et d’Évans prolongent ainsi l’axe de diffusion est-ouest, matérialisé toutefois par des exemplaires très peu nombreux et espacés10. Les caractéristiques de ces chaudrons les rapprochent étroitement des exemplaires du bassin des Carpates, avec notamment les attaches d’anses jumelées coulées d’une seule pièce qui caractérisent et distinguent les productions de la région du Nyírség, au sud du coude de la Tisza (Patay, 1990). Suivant ces critères, l’hypothèse d’une importation à partir de centres de production de la région de la Tisza, émise pour les exemplaires de Blanot (Thevenot, 1991, p. 74) et d’Unterglauheim (Wirth, 2006), reste valable pour le chaudron d’Évans. Dans ce contexte, la particularité et la dissymétrie des décors des deux anses de celui-ci posent en revanche la question de leur origine. Peut-on alors supposer qu’elles aient été rajoutées a posteriori sur un exemplaire importé sans anse ? Les rares comparaisons occidentales ne permettent pas de répondre à cette question, mais on se souviendra que les chaudrons les plus occidentaux de Blanot et d’Unterglauheim n’en possédaient pas lors de leur dépôt. En ce qui concerne le chaudron de Blanot, l’absence d’usure de l’intérieur des anneaux de suspension, non ébavurés, laisserait même penser que ce récipient n’en avait peut-être jamais été doté.
105La chronologie des chaudrons de type B1 est fournie par de nombreuses associations. On pourra se référer à ce sujet aux synthèses de P. Patay (Patay, 1990) ou de J.-P. Thevenot (1991). Quelques exemplaires figurent dans des associations anciennes qui laissent penser à une apparition du type au Ha A1/A2 (Hejöszalonta, Borsodbóta). La question d’une ancienneté des trois chaudrons du dépôt II de Hajdúsámson dans le Ha B1 a également été posée. Dans cet ensemble, une tasse de Spišská-Belá, dont l’anse est ornée d’un bucrane, est associée à une tasse non décorée du type de Jenišovice, dotée d’une anse en ruban simple, ainsi qu’à une coupe de la variante A (Patay, 1990, p. 25, 27, 63). L’apogée des chaudrons du type B1 dans le bassin des Carpates correspond au Ha B1 avec les dépôts de Mezökövesd, Egyek, Hajdúszovát, Sîncraieni, Moigrad I, Visuia. Ce modèle peut encore se prolonger au Ha B2. Une datation du Ha B1 est confirmée pour la France par le chaudron et l’ensemble de parures du dépôt de Blanot. Dans plusieurs dépôts, comme à Évans et à Blanot, les chaudrons du type B1 sont associés à plusieurs reprises aux tasses de Jenišovice : Egyek, Hajdúböszörmény, Hajdúsámson II, Szentes II.
2.9. Récipient indéterminé
106Un récipient n’est connu que par des fragments à bord oblique large et col droit décoré d’une ligne de bossettes de grand diamètre (fig. 15, no 41). La base du col montre le départ d’un épaulement arrondi étroit qui suggère un profil ouvert apparenté à une coupe ou à une tasse. Toutefois, le diamètre restitué de 210 mm est nettement supérieur à celui de la majorité des coupes et tasses de la série d’Évans. Ce récipient, qui comporte des caractères présents sur les tasses de Kirkendrup type B (col à bord évasé décoré de bossettes) et de Fuchsstadt (épaulement arrondi), ne peut être rangé dans aucune de ces deux catégories et se rattache vraisemblablement à une variante originale qui porterait à trente-quatre le nombre total des coupes et tasses représentées à Évans.
2.10. Le pichet-situle
2.10.1. Description
107Nous attribuerons à un même objet la partie supérieure, très déformée et lacunaire, d’un petit récipient en forme de situle et une base tronconique à fond plat rapporté et rivé (fig. 46, no 47). Il s’agit d’un récipient d’environ 110 mm de diamètre restitué à l’ouverture, caractérisé par un bord oblique évasé se rattachant à un épaulement lisse peu convexe et doté d’une lèvre enroulée autour d’un fil de bronze. La partie débordante du fond, rapportée et emboîtée, est assemblée par six rivets à tête circulaire plate. Ce récipient est réalisé au moyen d’une tôle de bronze enroulée dont les extrémités se recouvrent latéralement et sont assemblées par des rivets à tête plate circulaire. La paroi extérieure a été soigneusement polie ; de même les raccords des assemblages et des bords des rivets ont été biseautés de manière à former une surface uniformément lisse. Une anse en ruban, décorée sur les deux bords de trois rainures parallèles, est assemblée à l’intérieur du col et sur l’épaule par deux rivets à tête circulaire plate. Elle se superpose au contact du raccord de la paroi.
2.10.2. Comparaisons, chronologie
108Le type d’assemblage de la paroi et le fond rapporté emboîté figurent parmi les caractères des situles à panse haute du type Kurd et Hajdúböszörmény, ainsi que sur des variantes à anse unique : Hart a. d. Alz (Jacob, 1995, no 305), Dresden-Dobritz, Vàrvölgy (Hongrie) (Patay, 1990, Taf. 27/46A), dépôt de Merlara (Montagnana - Italie) (Müller-Karpe, 1959, Taf. 83/7). C’est vraisemblablement vers ces derniers exemplaires que les petites dimensions du récipient d’Évans nous portent à rechercher des comparaisons. Certains de ces récipients (Hart a. d. Alz, Dresden-Dobritz, Vàrvölgy) se distinguent toutefois du pichet d’Évans par la présence de plusieurs bourrelets soulignant le sommet de l’épaule, ainsi que par un épaulement peu marqué ou inexistant. La situle de grande taille de Püspökladany en Hongrie, classée dans la variante Hosszúpályi (Patay, 1990, Taf. 29/55), se rapproche davantage du pichet d’Évans avec un profil à bord oblique et un épaulement dépourvu de cordons en relief. Par son profil et son épaule convexe, son bord oblique et son anse à extrémités élargies décorée de rainures, l’exemplaire de Vàrvölgy est toutefois, parmi les récipients de petite taille à anse unique, celui qui offre le plus de ressemblances.
109La plupart des exemplaires cités sont antérieurs au Ha B : la sépulture de Hart a. d. Alz est attribuée au Ha A1, le dépôt de Dresden-Dobritz au Ha A2, celui de Merlara au Ha A1 (Müller-Karpe, 1959, p. 193). L’exemplaire de Vàrvölgy est situé par P. Patay « pas antérieurement au Ha A2 ou au Ha B ». Postérieurement, P. Patay postule en faveur d’une datation du Ha B1 pour ce dernier récipient (Patay, 1996). Le pichet d’Évans pourrait donc occuper une place précoce dans les récipients de cet ensemble.
2.11. Chronologie du dépôt d’Évans
110Avec neuf types et variantes de récipients différents, le dépôt d’Évans constitue un ensemble particulièrement représentatif pour une approche typo-chronologique de la vaisselle métallique du Bronze final en Europe occidentale.
111L’analyse typologique de chacun des ustensiles qui composent le dépôt a montré que plusieurs d’entre eux, pour lesquels nous avons précédemment examiné les différents contextes, appartiennent à des modèles présents dans des associations funéraires, et surtout dans des dépôts considérés comme caractéristiques du Ha B1 en Europe moyenne-occidentale (Allemagne, France orientale), en Europe orientale (Hongrie, République tchèque, Slovaquie) et nordique (Danemark). C’est le cas du chaudron à attaches cruciformes de type B1, des coupes et tasses de Kirkendrup-Jenišovice, de la passoire du type de Tiszavasvári et des bouteilles du type Blanot. Quelques récipients uniques, comme l’amphore biconique et la passoire à crochet, n’offrent à ce jour aucun autre élément de comparaison, mais leur attribution au Ha B1 a pu être proposée sur la base des rapprochements stylistiques et technologiques effectués avec d’autres modèles attribuables à cette étape.
112Cette analyse nous a également conduit à reconsidérer la question de l’origine et de la durée d’utilisation de plusieurs types de récipients. Cette question a été précédemment abordée par plusieurs auteurs à partir d’associations d’objets diachroniques ou de considérations technologiques et stylistiques. La recherche de la représentativité chronologique d’un lot d’objets et de sa durée de collecte prend une importance particulière dans le cas d’un dépôt numériquement important comme celui d’Évans. En ce qui concerne les dépôts de vaisselles métalliques, la présence d’objets diachrones dans certains d’entre eux peut suggérer un recrutement sur la durée ou la longue conservation de certains de ces ustensiles à des fins fonctionnelles ou symboliques.
113La question de l’origine et de la chronologie des coupes et tasses de Kirkendrup-Jenišovice, qui représentent le point fort du dépôt d’Évans, a été abordée par O. Kytlicová à propos de plusieurs ensembles. Les parallèles décoratifs entre certaines tasses du dépôt éponyme de Jenišovice et les tasses du type Osternienburg-Dresden, l’association de tasses du type de Kirkendrup avec des tasses du type de Spišská-Belá ou assimilées ayant cours au Ha A2 dans les dépôts de Hajdúsámson II (tasse de Spišská-Belá avec une anse cornue, tasse carénée), Egyek (variante du type Spišská-Belá) et Thale 3 (tasse apparentée au type Osternienburg-Dresden et tasse de Fuchsstadt), conduisent l’auteur à placer l’apparition des tasses de Jenišovice pendant la durée d’utilisation des tasses de Fuchsstadt, Osternienburg-Dresden et Spišská-Belá. Des caractères typologiques ou techniques ont également été considérés comme représentatifs de l’ancienneté de certains exemplaires. C’est le cas de l’utilisation de rivets coniques qui caractérisent les fixations supérieures des tasses de Fuchsstadt. Ces rivets utilisés sur une tasse de Somotor (Slovaquie) (Novotná, 1991, no 29) se retrouvent également sur une des tasses de Podgornik (Gedl, 2001, Taf. 6/13). L’hypothèse d’une antériorité des coupes de type A, à fond en anneau comparable à ceux des tasses de Fuchsstadt, a été envisagée par H. Thrane (1965) mais ensuite controversée par P. Patay et O. Kytlicová. Le dépôt d’Évans qui montre, mais ce n’est pas le seul, la coexistence de nombreuses tasses et coupes des deux types, ne permet pas non plus d’argumenter sur cette dernière hypothèse. La situation apparaît plus claire pour les récipients du type figurant dans des associations les plus récentes, du Ha B2/3, qui se démarquent par leurs caractères stylistiques. On retiendra la série de Liptovský-Mikuláš (Ondrašová) ou, plus près de nous, la coupe de Saint-Martin-sur-le-Pré (Gaucher, 1981, fig. 19/V3). Cette dernière, datée par son association avec deux tasses du type Stillfried-Hostomice (Merhart, 1952, Taf. 12/5-9), illustre l’utilisation exceptionnelle d’une coupe de Kirkendrup-Jenišovice dans une association de la fin du Bronze final. Bien que très proche des standards du type, ses parois convexes et son fond de petit diamètre, inhabituels sur les autres modèles, pourraient être considérés comme un caractère évolutif ultime des coupes de Kirkendrup. Mais rien ne permet d’écarter non plus la coexistence d’un récipient ancien dans un ensemble daté par des objets plus récents, comme on le constate dans d’autres associations.
114Dans ce contexte, la chronologie des puisoirs du type Egyek, qui reposait jusqu’ici sur les deux associations des dépôts d’Egyek et de Braunsbedra 2, peut venir susciter une discussion. Leur attribution au Ha B1 proposée par P. Patay repose, nous l’avons vu, sur leur analogie morphologique et décorative avec les chaudrons du type B1. Ces derniers récipients sont majoritairement considérés comme représentatifs du Ha B1, mais certains exemplaires peuvent toutefois apparaître dès le Ha A2. Les récipients du dépôt de Braunsbedra 2, qui accompagnent l’un des puisoirs, sont représentatifs de types caractéristiques du Ha A2 avec sept tasses de Fuchsstadt, entières ou fragmentées, et deux tasses du type Osternienburg-Dresden. Cette association nous place devant une alternative qui consiste soit à considérer le puisoir, ainsi que le propose P. Patay, comme le récipient le plus récent datant l’enfouissement du dépôt au Ha B1, soit à voir pour cet objet une origine antérieure au Ha B1, suivant l’attribution chronologique fournie par tous les autres récipients de cette série. Le contexte du dépôt d’Egyek ne permettrait pas non plus d’aller dans le sens de P. Patay, si l’on suit la proposition de O. Kytlicová qui place celui-ci parmi les plus anciens ensembles contenant une tasse de Kirkendrup.
115Les situles du type Kurd connaissent une utilisation dès le Ha A1/A2 comme le montrent les contextes géographiquement éloignés les uns des autres de la sépulture de Hart a. d. Alz et des dépôts de Merlara et de Dresden-Dobritz. La continuité de ces récipients au Ha B1 est supposée pour l’exemplaire de Várvögly qui semble le plus proche du récipient d’Évans (Patay, 1996).
116Enfin, la tasse de Fuchsstadt du dépôt d’Évans se rattache à un ensemble de récipients représentatifs du Ha A2 qui perdurent souvent en un unique exemplaire dans plusieurs dépôts datés du Ha B1 où ils sont associés à des tasses de Kirkendrup : Thale 3, Mas-Saint-Chély, Érsekvadkert, Basedow, Egyek, Dötzingen, Moigrad. Très excentré, le dépôt de Tamlaght en Ulster associe une épée d’Hemigkofen, une tasse de Fuchsstadt et une coupe de Kirkendrup-Jenišovice (Warner, 2004). Si l’on se réfère à la fréquence réduite des tasses du type de Fuchsstadt dans les associations comportant des objets plus récents, on peut considérer ces exemplaires comme des types résiduels qui pourraient se situer à la fin de leur utilisation. Cet exemple attesterait une certaine longévité de ces types, que ce soit dans leur fabrication ou leur utilisation.
117En conclusion, le dépôt d’Évans rassemble une majorité de récipients de plusieurs types datés du Ha B1 qui nous invitent à situer son enfouissement à cette période. Dans le cas présent, aucun indice ne permet, en effet, d’envisager une continuité au-delà de cette étape. Quelques récipients (tasse de Fuchsstadt, situle, puisoirs) appartiennent à des types apparus dans des contextes antérieurs au Ha B1, mais pas avant le Ha A2. Il peut alors s’agir, soit de modèles anciens, souvent uniques, encore en usage et dont la présence épisodique est attestée dans quelques autres ensembles plus récents (tasse de Fuchsstadt, associée au type Kirkendrup-Jenišovice dans huit ensembles), soit de types nouvellement apparus dont l’utilisation se poursuivra ou se développera durant le Ha B1, comme tendraient à le montrer les quatre puisoirs du type Egyek. Les séries des coupes de Kirkendrup-Jenišovice type A, très homogènes et abondantes, confortent la validité de cette chronologie pour une variante de récipients qui ne se trouvait datée jusqu’à présent que par quelques ensembles seulement (Blanot, Øgemose, Quedlinburg, Hajdúsámson II). L’association dans un même dépôt de six types de récipients (chaudron type B1, coupes de Kirkendrup-Jenišovice type A, tasses de Kirkendrup-Jenišovice type B, puisoirs type Egyek, bouteilles type Blanot, passoire type Tiszavasvári), dont certains étaient déjà connus dans plusieurs autres assortiments n’excédant pas trois types : Kirkendrup-Jenišovice type A et B (Basedow), Fuchsstadt / Kirkendrup-Jenišovice (sept cas), Kirkendrup-Jenišovice /chaudron (huit cas), Kirkendrup-Jenišovice /chaudron/bouteille (Blanot), vient étoffer l’image de la composition de l’horizon typologique du Ha B1 dans le domaine culturel Rhin-Suisse-France orientale pour les vaisselles métalliques. Toutefois, compte tenu du statut particulier de ces récipients et de ces dépôts, sur lequel nous reviendrons, il n’est également pas exclu que ces ensembles soient composés de lots d’objets constitués dans le temps sur plus d’une génération. En tout état de cause, la série d’Évans est représentative dans son ensemble de l’étape moyenne du Bronze final et plutôt de la seconde moitié de celle-ci dans l’optique de la chronologie « française ».
Notes de bas de page
3 Dans la suite de notre étude, afin d’éviter toute confusion, nous utiliserons pour les types A et B la définition et la nomenclature de Thrane.
4 O. Kytlicová compare les anses des tasses suisses avec celles des tasses de Hostomice du Ha B2/3, en posant ainsi le problème de leur longue durée d’utilisation (Kytlicová, 1991, p. 47, note 1).
5 À l’exception de la coupe no 24 qui est la seule dotée d’un fond cupulé.
6 Exception faite de la coupe incomplète de Greng (fig. 98, no 3), décorée d’un motif circulaire inhabituel de deux cercles de pointillés concentriques, qui appartient vraisemblablement au type A bien que le fond ne soit pas connu.
7 Les relations de ce récipient avec les wooden bowls scandinaves, d’une part, et une éventuelle origine centre européenne, d’autre part, ont été longuement développées par Thrane, 1962, p. 132 et suiv.
8 Je remercie vivement J.-P. Thevenot pour la communication des dessins inédits de ces récipients qui apportent d’utiles précisions par rapport à ceux publiés par J.-P. Millotte.
9 À l’exception de l’anse, le profil du récipient dessiné par J.-P. Millotte, identique à celui de la coupe de Kirkendrup fig. II/3, ne correspond pas à l’exemplaire examiné. Il semble qu’il y ait eu une confusion entre ces deux exemplaires.
10 Le fragment d’attache cruciforme de Gletterens (canton de Fribourg) déposé au musée de Bienne (inv. GS 1796), attribué par von Merhart au type B1, n’a ensuite pas été repris dans les inventaires de ce type (Thevenot, 1991). Ce fragment présente en effet des caractères propres aux attaches des chaudrons de type B2 auxquels il peut se rapporter : nervures verticales moulurées sous l’anneau, empattement élargi au niveau du rivet.
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Le dépôt d’Évans (Jura)
Ce livre est cité par
- Piningre, Jean-François. Pernot, Michel. Ganard, Véronique. (2015) Le dépôt d’Évans (Jura). DOI: 10.4000/books.artehis.5811
- Pernot, Michel. (2018) Arqueometría. DOI: 10.4000/books.ifea.13160
- Pernot, Michel. (2013) Alliages cuivreux et transferts de technologies au Ier millénaire av. J.-C. dans le sud-ouest de l’Europe. Mélanges de la Casa de Velázquez. DOI: 10.4000/mcv.4768
Le dépôt d’Évans (Jura)
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