3. Les interdisciplinarités à l’épreuve des cadres disciplinaires : ajustements et recompositions
p. 75-87
Texte intégral
1La fabrique des politiques d’interdisciplinarité renvoie aux liens complexes et aux ajustements nécessaires entre les champs disciplinaires d’un côté et les espaces et pratiques d’interdisciplinarité de l’autre, ainsi qu’à leurs multiples interactions et recompositions. Structurellement, tenter de comprendre et d’analyser les conditions de possibilité mais également les principales contraintes des pratiques d’interdisciplinarité nous conduit à considérer trois mises à l’épreuve essentielles. Ces pratiques sont en effet confrontées aux processus d’évaluation de la recherche, aux logiques d’accumulation des connaissances et de publication scientifique, aux cursus et institutions de formation dépendant aussi du développement et du renforcement des politiques de sites.
Les interdisciplinarités à l’épreuve de l’évaluation individuelle ou collective
2Une question très sensible quant aux conditions pratiques de développement d’une logique d’interdisciplinarité dans les sciences repose sur les critères, processus et procédures d’évaluation du travail scientifique lui-même. L’évaluation des travaux de recherche mais également des chercheurs dans le cadre de la gestion de leurs carrières et des institutions qui les accueillent, est bien sûr une problématique centrale dans la construction d’un espace scientifique légitime et reconnu comme tel par les pairs mais aussi par les gouvernants et les citoyens ordinaires.
3Cette problématique de l’évaluation a été abordée à plusieurs reprises dans le colloque, notamment dans le cadre des trois tables rondes, ainsi que dans les récits que les chercheurs ont pu faire de leurs expériences d’interdisciplinarité au sein des MSH et sur leurs territoires. L’évaluation des personnes et des projets est une question qui apparaît comme tout à fait centrale dans le cadre de la mise en place des interdisciplinarités. D’autant plus centrale qu’elle renvoie à la fabrique de la confiance dans l’activité scientifique, et à la capacité à évaluer la qualité des recherches et travaux scientifiques.
4Or, la confiance est fondamentale au fonctionnement de la science et la construction, comme la solidification, des disciplines a été un moyen de générer et d’engendrer celle-ci1. Confiance mutuelle entre les pairs bien sûr mais également confiance plus générale des citoyens et des dirigeants politiques envers la science. Avec la multiplication de projets interdisciplinaires, la question de la pertinence des instances et procédures d’évaluation et de leurs évaluateurs/experts se pose avec acuité. Comment évaluer la connaissance interdisciplinaire, sinon à travers des expertises plurielles forcément plus complexes à monter, plus partielles, et suscitant mécaniquement davantage de différences d’appréciations et donc de controverses ? La pandémie de Covid-19 a bien mis en évidence ces controverses et débats scientifiques qui, étalés au grand jour et médiatiquement relayés, participent à éroder la confiance des publics et des citoyens dans l’expertise des communautés scientifiques.
5Se pose ainsi la question d’une évaluation plus collective d’activités scientifiques plurielles et toujours plus hybridées en termes disciplinaires, en lien avec une conception réaffirmée de la science comme activité fondamentalement collective, à rebours du mythe du génie individuel ! Les instruments et dispositifs actuellement en place sont-ils adaptés à ces nouveaux enjeux et à tous ceux qui travaillent en dehors des « silos disciplinaires » ? Comment passer d’une évaluation individuelle à des formes d’évaluation plus collectives des projets et dispositifs de recherche ? Il faut sans aucun doute former les chercheurs et les évaluateurs à l’interdisciplinarité, car évaluer l’interdisciplinarité ce n’est pas quelque chose qui s’improvise, il faut y être préparé et comprendre la logique et les enjeux des montages et hybridations entre secteurs disciplinaires. Il devient crucial d’acculturer les nouvelles générations de chercheurs aux exigences des interdisciplinarités, comme nous pourrons le souligner plus loin. Saadi Lahlou va même jusqu’à évoquer la notion d’un H-index collectif et ce qu’il impliquerait en termes d’évaluation des activités scientifiques2.
6On peut à cet égard s’interroger sur la capacité à évaluer la part réelle d’interdisciplinarité contenue dans un projet de recherche. Comme cela a déjà été évoqué3, il peut exister des degrés divers d’interdisciplinarité qui seront d’ailleurs appréciés de manière souvent différente par les évaluateurs, en fonction de jugements internes ou extérieurs à un même champ disciplinaire4. L’impératif d’évaluation citoyenne et participative apparaît également très important dans un cadre scientifique de plus en plus co-construit entre acteurs scientifiques et acteurs de la Cité. D’autant qu’Internet et les réseaux sociaux ont radicalement changé le rapport à la connaissance et donc à la science. On tend à osciller entre deux pôles d’un continuum allant d’une sorte de mythe du communisme de la science collective jusqu’au managérialisme hyper-spécialisé de la science des « experts ». C’est ici le rapport de la société civile et des citoyens au savoir qui a profondément changé : avec une volonté toujours plus forte des scientifiques de répondre aux questions de la société civile et aux enjeux sociétaux, mais avec également une société civile qui n’attend plus énormément des communautés scientifiques traditionnelles ou qui se tourne vers d’autres sources de savoirs plus ou moins valides. D’où une interrogation légitime sur la nécessaire – ou non – autonomie de la science, ou plus exactement sur l’autonomie des activités scientifiques.
7Ces transformations des représentations mais également des pratiques scientifiques expliquent le recours plus fréquent à des méthodes d’évaluation inspirées de l’analyse des systèmes complexes, ou encore des sciences de gestion et management qui proposent le passage par des objets intermédiaires : une carte, un jeu de rôle, un diagnostic socio-écologique permettant de capter les savoirs des chercheurs de différentes disciplines autour d’objets complexes comme la protection de la biodiversité ou la lutte contre les maladies vectorielles par exemple. De manière plus générale, la question des « langues de l’expertise » constitue également un enjeu majeur, avec un éventuel appauvrissement des projets et de leurs évaluations, à travers l’utilisation d’une sorte de novlangue plus ou moins standardisée (sur base anglophone), souvent technocratique et qui peut rapidement être vidée de sens5.
8Mais en plus de l’évaluation, les postures et pratiques interdisciplinaires interrogent un des fondements de la démarche scientifique, à travers le processus d’accumulation de données de recherche et donc la logique de cumul des connaissances.
Interdisciplinarités, formes alternatives d’accumulation des connaissances et publications scientifiques
9En quoi les pratiques interdisciplinaires interrogent-elles les formes désormais bien rodées d’accumulation et de gestion des connaissances ? Le prisme disciplinaire a en effet permis l’agglomération des connaissances par disciplines et grands secteurs scientifiques mais comment faire avec l’ensemble des données, toujours plus nombreuses, issues des recherches interdisciplinaires ? Doit-on transformer nos régimes de connaissances pour faire face à ces nouveaux enjeux et comment adapter les édifices scientifiques disciplinaires antérieurs ?
10Parmi les enjeux contemporains fondamentaux, on trouve ce que l’on appelle l’anthropocène, autrement dit, une ère historique nouvelle dans laquelle nous sommes entrés et où les humains sont devenus une force géologique majeure dont dépend l’avenir même de la terre, et rien moins que la survie de l’espèce humaine sur notre planète. Une grande partie du travail des géologues est ainsi en train de croiser celui des archéologues et des paléontologues, avec un nouveau modèle de la connaissance qui se construit. Comme l’a bien montré Bernadette Bensaude-Vincent, cela remet fondamentalement en cause le partage entre sciences de l’esprit et sciences de la nature, partage instauré au 19ème siècle, et cela induit que l’histoire de la terre est maintenant tributaire de l’histoire sociale, culturelle, économique des humains. On peut mettre en évidence une sorte de grand « tournant historique » (« historical turn »), pas seulement dans les sciences sociales6, dans la mesure où les sciences de la nature deviennent aussi des sciences historiques et qu’on assiste à une relecture de la nature comme objet historique.
11Ces enjeux nouveaux et les impératifs d’interdisciplinarité qu’ils induisent imposent des formes plus collaboratives de construction des savoirs, autour notamment d’une logique de développement et de financement par « projet ». Face au concept d’unité de la science, une certaine « désunité », un certain désordre peut d’ailleurs paraître plutôt utile et fertile pour l’activité scientifique (de Munck citant Peter Galison7 lors de la troisième table ronde). Il faut donc bien reconnaître que le modèle de l’université humboldtienne et la division disciplinaire qu’elle implique sont largement bousculés par la crise climatique et la réalité de l’ère de l’anthropocène. L’idée de la science comme activité et projet collectifs n’a jamais été aussi partagée et jugée nécessaire, recoupant en partie la notion d’intellectuel collectif développé notamment, il y a quelques années déjà, par exemple par Pierre Bourdieu8 ou encore Gérard Noiriel9 en sciences sociales.
12La multiplication des données de la recherche (data/big data), d’autant plus quand celles-ci sont hybrides et issues de projets interdisciplinaires, pose la redoutable question de la collecte, de l’exploitation et de la gestion de ces données et de leur possible pérennisation et réutilisation. C’est ainsi tout l’enjeu d’une culture des données qui est ici pointée, croisant les initiatives développées depuis plusieurs années autour des plateformes au sein des MSH en relation avec les Infrastructures de Recherche (IR *) nationales comme Progedo et Huma-Num. Tous ces dispositifs et équipements collectifs d’accompagnement de la recherche sont porteurs, par nature, d’une logique de transdisciplinarité et d’interdisciplinarité. Ils regroupent des réseaux nationaux de compétences, des réseaux professionnels d’ingénieurs et techniciens et proposent des formations spécialisées qui participent à l’accroissement des échanges et à l’assimilation de nouveaux modèles liés à la culture des données, aux humanités numériques et à la science ouverte.
13Une autre question se pose quand on réfléchit à la lisibilité, et surtout à la cumulativité et à la valorisation du travail scientifique : comment légitimer un travail interdisciplinaire, comment le faire connaître et reconnaître, comment en particulier lui trouver des supports de publication et de valorisation scientifiques ? La logique de développement des revues, mais également en partie des collections éditoriales, reste en priorité disciplinaire, ou à tout le moins organisée par grands champs et secteurs scientifiques. Quelques espaces éditoriaux cultivent bien sûr les interdisciplinarités mais ils restent minoritaires parce que les critères d’évaluation éditoriale sont des critères avant tout disciplinaires, en fonction de publications et de stratégies prioritairement disciplinaires.
14Intervient également, de manière plus générale, la question – précédemment évoquée – de la langue de publication scientifique. L’essentiel des publications scientifiques sont en effet en langue anglaise, contrôlées par quelques très grands éditeurs internationaux anglophones. Selon Louise Vandelac10, c’est un sujet vraiment crucial, particulièrement en SHS, où la langue d’écriture des travaux scientifiques est quelque chose de fondamental. Cela pose la question du soutien aux revues francophones ou hispanophones, etc., avec des passerelles à imaginer à travers par exemple des résumés traduits en plusieurs langues, sans trop de déperdition. En effet, comment penser ces questions complexes en étant non seulement formés dans une discipline, en étant relativement agiles dans d’autres disciplines dont on essaie de saisir les logiques, en étant enfin capables de faire des travaux de synthèse, et en même temps en devant constamment traduire sa pensée dans une autre langue. C’est une équation impossible.
15La logique de construction scientifique interdisciplinaire doit également composer avec la force et la prégnance des instances, institutions et cursus de formation qui dessinent un des principaux cadres du paysage de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (ESR), lui-même en forte évolution.
Interdisciplinarités, politiques de formation et politiques de site
16Il nous faut en effet réfléchir aux liens complexes entre recherche et formation, et à leurs évolutions, ainsi qu’aux impératifs disciplinaires qui se déclinent de manière à la fois convergente et potentiellement différenciée dans ces deux secteurs de la connaissance. Comment penser alors des logiques de formation qui puissent prendre en compte les nouveaux impératifs interdisciplinaires, sachant que l’interdisciplinarité ne se décrète pas (d’en haut) mais répond plutôt à des besoins et intérêts scientifiques croisés et à l’hybridation (voulue ou ressentie comme nécessaire par les chercheurs eux-mêmes) de certains champs disciplinaires ?
17Un point essentiel sur lequel on peut s’accorder est de dire que toute interdisciplinarité doit s’appuyer sur des bases et des cultures disciplinaires solides et bien intégrées. Les principes de l’interdisciplinarité peuvent bien sûr être enseignés à partir de la formation initiale des étudiants et approfondis dans le cadre de formations de niveaux Master et Doctorat. Mais elle peut – et doit – également faire l’objet d’une formation continue, tout au long de la vie, et apparaître comme un horizon de développement scientifique pour des chercheurs déjà en place, établis et légitimes dans leur discipline d’origine.
18La formation des étudiants, des enseignants-chercheurs et chercheurs ainsi que des personnels d’accompagnement de la recherche est un enjeu majeur des années à venir. Les compétences transverses pour écouter, traduire, collaborer, communiquer, propices au travail interdisciplinaire sont difficilement évaluables mais sont sans aucun doute déterminantes pour permettre un véritable développement des recherches ressortissant à l’interdisciplinarité. Avec Pierre-Cyrille Hautcoeur, on peut émettre l’hypothèse selon laquelle les incitations devraient moins consister à imposer l’interdisciplinarité dans les projets de recherche ou les carrières, qu’à donner aux chercheurs des outils leur permettant de s’en emparer quand ils en ont besoin, notamment des outils en termes de formation. On a en effet dans beaucoup de cas une difficulté à comprendre comment les gens d’une autre discipline pensent, quelle est leur manière d’aborder un objet, leur manière de l’observer, leur manière de construire des théories, des outils et méthodes d’analyse. On a donc besoin d’être préparé, formé et incité à l’interdisciplinarité, en fonction des projets concrets que l’on souhaite mener et des investissements scientifiques que ceux-ci requièrent. Comme l’indique Pierre-Cyrille Hautcoeur, il faut former au départ les étudiants et apprentis-chercheurs sur la manière d’entrer en contact avec les autres disciplines, ne serait-ce que pour pouvoir monter des projets communs en se comprenant, puis donner aux chercheurs la possibilité de se mettre à jour et d’être informés et réalistes sur ce qu’on peut attendre d’une autre discipline à un moment donné.
19Dans les formations universitaires, une certaine liberté et une volonté de mixtion et d’enrichissements croisés a pu se développer au cours de ces dernières décennies. Mais si cela n’est pas articulé, en particulier entre le secondaire et le supérieur, voire avec le primaire, cela paraît difficile à réaliser. La démarche revient en effet à repenser tout l’enseignement du primaire au secondaire, ce qui est quand même extrêmement compliqué comme l’a fait remarquer Dominique Pestre. Dans le supérieur, l’idée de majeure et mineure, en SHS et dans les autres sciences par exemple, commence à être de plus en plus développée dans la formation des étudiants, comme dans le cadre de cycles pluridisciplinaires mis en place dès la Licence puis poursuivis en Master. L’offre de formation des universités et des grandes écoles, en premier mais également en second cycles, a profondément évolué ces dernières années. Ce phénomène va avoir mécaniquement des effets avec le temps mais encore faut-il que cette offre ne soit pas centrée sur les contenus mais sur les manières de penser et d’expliciter ce que c’est qu’une discipline, en ayant en particulier recours aux acquis des sciences sociales des disciplines ou sciences studies. Cela permettrait de mettre à distance nos savoirs, et donc de discuter plus facilement et de façon plus pertinente à la fois la culture de nos propres disciplines et celle des autres.
20Reste enfin à aborder la question de la place de l’interdisciplinarité dans le cadre de la (re)structuration de l’ESR, à différents échelons, du local, à l’international, en passant par le national et le supranational. En particulier, on peut se poser la question de la place dévolue aux interdisciplinarités dans les politiques de sites et d’établissements ancrés dans des territoires. Ces politiques universitaires territorialisées, dans une logique d’autonomie des établissements mais également de multi-partenariats, font en effet de plus en plus souvent le pari de l’interdisciplinarité. Les exemples développés à partir des expériences d’Aix-Marseille Université (AMU) et de l’Université Lumière Lyon 2 éclairent toute une série de dispositifs, de procédures et de réaménagements organisationnels ou institutionnels qui visent à créer et/ou développer, en lien avec la logique de recomposition nationale impulsée par le ministère, de grandes universités interdisciplinaires (SHS et autres sciences) de recherche intensive (introduction de la deuxième partie du colloque par Éric Berton, président de l’AMU).
21Cela passe d’abord par la définition des axes scientifiques prioritaires des sites, en fonction des forces de recherche et des spécificités du territoire. Cela s’incarne aussi dans des charges de mission destinées à structurer une offre interdisciplinaire sur un site, dans des ouvertures de postes dédiés, dans des outils et dispositifs de meilleure gestion des carrières, tenant davantage compte de ces investissements pluriels et croisés, dans la création d’observatoires des pratiques interdisciplinaires, etc. Le pari consiste ici à réussir à conserver des cadres disciplinaires, notamment sur le plan des formations, en particulier initiales, et de la recherche, tout en tirant parti des spécificités locales et en travaillant à développer des dispositifs d’interdisciplinarité pleinement assumés mais forcément limités en nombre et constituant une pointe avancée des interfaces formation/recherche sur les sites.
22Finalement, en suivant Saadi Lahlou, ne peut-on pas considérer que « les institutions transdisciplinaires de type MSH, ou des institutions spécialisées, des institutions « interstitielles » sont beaucoup plus agiles, flexibles et beaucoup moins en proie au nationalisme institutionnel que le fonctionnement disciplinaire qui a gardé quelque chose de féodal… » ? Cette idée de la science comme espace intellectuel collectif, toujours en mouvement et en construction, donne tout son sens aux actions des MSH et de leur réseau. Ces dernières apportent des expériences concrètes et des briques, à la fois modestes mais structurantes et innovantes, à l’édifice général de l’interdisciplinarité. Ces laboratoires de l’innovation scientifique que sont les MSH permettent aux SHS d’être motrices dans leurs demandes et propositions d’interdisciplinarité et d’embarquer les autres sciences dans un dialogue fécond et constructif.
Notes de bas de page
1 Voir TR1, notamment Bernadette Bensaude-Vincent.
2 Sur la question plus générale de l’évaluation de la recherche et, en particulier, la bibliométrie, voir : Gingras, Y. Les dérives de l’évaluation de la recherche. Du bon usage de la bibliométrie, Paris, Raisons d’agir, 2014 ; Servais, P. (dir.), L’évaluation de la recherche en sciences humaines et sociales. Regards de chercheurs, Académia, 2011.
3 Voir supra p. 66.
4 Voir TR2, François Héran. Il pose ainsi la question : « Comment évaluer le degré d’interdisciplinarité ? Est-il réel ou factice ? Il y a tout un gradient, ce n’est pas aussi simple que ça. Regardez comment les historiens se divisent entre contemporanéistes, modernistes ; pour eux rapprocher un moderniste d’un préhistorien, c’est une formidable interdisciplinarité, alors que pour l’extérieur cela n’apparaît pas aussi net. Regardez aussi les juristes avec les pénalistes ou les civilistes qui appartiennent à des mondes complètement différents. Donc l’évaluation de la distance disciplinaire varie beaucoup selon que l’on a affaire à un regard interne ou un regard extérieur… ». Cela renvoie d’ailleurs en partie à la différenciation que nous proposons d’opérer entre pluri et interdisciplinarités.
5 TR3, Louise Vandelac a fortement pointé ce problème auquel elle est particulièrement confrontée en tant que Canadienne francophone.
6 Klein, H. S. « The “Historical Turn” in the Social Sciences », Journal of Interdisciplinary History, (48)3, 2017, November, p. 295-312.
7 Galison, P. et Stump, D. J. The Disunity of science : boundaries, contexts, and power, Stanford University Press, 1996, 567 p. Dans sa conclusion, Galison analyse ce qui fait tenir ensemble les diverses sous-cultures de la science. Il le fait avec l'aide d'outils anthropologiques forgés par ceux qui ont étudié les interactions entre des partenaires commerciaux culturellement dissemblables .
8 Pinto, L. « Un humanisme scientifique : Pierre Bourdieu et l’intellectuel collectif », Société et représentations, 202/1, n° 13, p 5-6 ; Article « Intellectuel collectif », Sapiro, G. (dir.), Dictionnaire international Bourdieu, Paris, CNRS Éditions, 2020.
9 Noiriel, G. Dire la vérité au pouvoir. Les intellectuels en question, Paris, Agone, 2010, 316 p.
10 TR3, Louise Vandelac.
Auteur
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