Une thématique historiquement centrale en sciences humaines et sociales du sport

1Depuis les études initiées par Ernest Loisel à l’École Normale d’Éducation Physique en 1935¹, les problématiques relatives à l’éducation et à l’inclusion sont ancrées dans ce domaine de formation et de recherche. Qu’ils relèvent de la didactique et/ou des sciences de l’intervention, de la sociologie, de l’histoire, de l’anthropologie ou de la philosophie, les travaux qui leur sont consacrés ont contribué à renouveler les pratiques, tant du point de vue des mises en œuvre pédagogiques (notamment via leur impact sur la formation des éducateurs et enseignants) que dans les manières de penser les politiques publiques.

2Les études engagées contribuent à une réflexion documentée, lucide et critique en matière d’éducation des corps et par les corps. Elles se montrent attentives aux publics en échec scolaire, fragiles et/ou discriminés, soucieuses de l’analyse des interactions pédagogiques et sensibles aux contextes favorables aux apprentissages. Elles participent, de façon corollaire, au nécessaire travail de déconstruction d’une vision idéalisée de l’éducation par le sport (sans omettre les activités physiques et artistiques) qui vante les aspects éducatifs, socialisants, intégrateurs, égalitaires, citoyens, pensés comme consubstantiels à la pratique ; vision idéalisée qui trouve de puissants relais parmi les médias, les arts et le mouvement olympique2, mais aussi du côté de l’action publique3. Dans le même temps, elles visent à remplacer cette image mythifiée par une réflexion rigoureuse sur le détail des pratiques éducatives, leurs conditions d’effectuation et leurs effets.

Une thématique déployée dans divers espaces et sur des publics variés

3Les recherches produites sur l’éducation dans et par les activités physiques, sportives et artistiques se sont intéressées à divers espaces gérés par différents acteurs privés et ou publics : l’École (du primaire à l’université via l’EPS, l’UNSS, les sections sportives, les structures de formations, etc.), la famille (parents, fratrie), le monde de la jeunesse et du sport dans sa diversité de pratiques allant de la compétition sportive (clubs, associations sportives, culturelles, etc.) au haut niveau, en passant par le loisir non institué, les médias (presse, télévision, réseaux sociaux), la littérature, les arts et le spectacle vivant (productions artistiques, lieux de spectacle, musées, centres chorégraphiques et dramatiques nationaux, etc.). L’éducation par l’activité physique, le sport et le spectacle vivant peut être appréhendée sous l’angle de la socialisation entendue comme l’« ensemble des processus par lesquels l’individu est construit – on dira aussi "formé", "modelé", "façonné", "fabriqué" – par la société globale et locale dans laquelle il vit, processus au cours duquel l’individu acquiert, " apprend ", " intériorise ", " incorpore ", " intègre " des façons de faire, de penser et d’être qui sont socialement situées ».4 Elle révèle dès lors un large panel de discours et de pratiques plus ou moins institutionnalisés renvoyant à une diversité de modalités de diffusion et de réception dans les univers sociaux, ainsi qu’à une grande variété d’usages et d’effets.

4L’inclusion interroge de son côté le rapport des individus aux systèmes sociaux, notamment en déplaçant la responsabilité de l’intégration des individus vers les systèmes, dispositifs ou situations censés créer les conditions de cette intégration de toutes les personnes exclues ou en marge de certaines pratiques du fait de leur handicap, assignation de sexe, expression de genre, origine, classe sociale, sexualité ou culture. L’UNESCO définit ainsi l’éducation inclusive comme « un processus visant à tenir compte de la diversité des besoins de tous les apprenants et à y répondre par une participation croissante à l’apprentissage, aux cultures et aux collectivités, et à réduire l’exclusion qui se manifeste dans l’éducation. Elle suppose la transformation et la modification des contenus, des approches, des structures et des stratégies, avec une vision commune qui englobe tous les enfants de la tranche d’âge concernée, et la conviction qu’il est de la responsabilité du système éducatif général d’éduquer tous les enfants » (UNESCO, Principes directeurs pour l’inclusion, 2005, p. 14). Bien sûr, cette définition trouvera ici des prolongements possibles en direction de tous les âges de la vie.

5Déployées dans l’espace académique de production des savoirs et parfois au-delà, les publications réalisées par les chercheuses et chercheurs permettent d’aborder l’éducation et l’inclusion selon une acception large qui intègre les mondes scolaire et périscolaire mais également les institutions non scolaires (cadre associatif, socio-éducatif, carcéral, sanitaire). En abordant la multiplicité des sphères dans lesquelles les activités physiques, sportives et artistiques sont discutées et/ou constituent un support d’enseignement, d’intervention ou de création à visée éducative, les différentes sciences humaines et sociales – sciences de l’intervention et travaux sur l’apprentissage compris – apportent des éclairages féconds. Les analyses proposées constituent de nombreux supports utiles à la compréhension des dispositifs d’éducation et d’inclusion – et des politiques qui les sous-tendent – comme la mise en œuvre des visées d’« éducation à… » la santé, l’égalité, la citoyenneté, la culture, l’art, l’écologie, etc. En confirmant que ceux-ci sont historiquement et socialement situés et en étant attentives à la diversité des publics concernés, elles favorisent une appréhension fine de leurs périmètres d’action, des enjeux sous-jacents, des mises en pratiques, ainsi que des effets de discours associés.

6Les usages et effets de l’éducation par les activités physiques sportives et artistiques sont en effet très variables. Ils dépendent de l’origine sociale des individus, de leur assignation de sexe, identité de genre, sexualité, milieu culturel, état de santé, (in)capacité, âge (des plus jeunes aux séniors) et sont indissociables des contextes éducatifs⁵. La réflexion concerne ici celles et ceux qui pratiquent des activités physiques, sportives et artistiques, en sont spectatrices ou spectateurs ou qui les encadrent (enseignants et enseignantes, éducateurs et éducatrices, artistes, techniciens et techniciennes, arbitres ou dirigeants et dirigeantes).

Trois principaux axes d’analyse déployés

7Les travaux sur l’éducation et l’inclusion par le sport ont été envisagés ces vingt dernières années selon des approches historiques, sociologiques, psychosociologiques, anthropologiques, philosophiques, artistiques ou didactiques, qui permettent une analyse selon trois axes ou entrées (pluri)disciplinaires.

8Le premier axe, qui interroge la place du corps, du sport, des activités physiques et artistiques dans les politiques éducatives, s’inscrit dans une lecture de l’action publique attentive « aux phénomènes de co-construction du traitement de problèmes publics à la fois par les autorités gouvernementales et par des acteurs non gouvernementaux »6. Il a été travaillé, aussi bien du point de vue des formes d’organisations, des professions ou des dispositifs constitués, en intégrant la diversité des espaces dans lesquels ces politiques se déploient (à l’école, dans les familles, dans les sports et loisirs, dans les mouvements de jeunesse et/ou d’éducation populaire, dans les médias, dans les arts et le spectacle vivant) et aux différents niveaux d’échelles territoriales (du local au global). Autant de contextes au sein desquels les périmètres et tutelles varient selon les conjonctures politiques, non sans créer des tensions, des jeux de pouvoir et de savoirs, des controverses, ajustements et négociations entre acteurs et usagers bénéficiaires des politiques publiques instaurées.

9Les principales orientations éducatives mises à l’agenda politique ont retenu l’attention tout comme les transformations institutionnelles et les réformes disciplinaires (changements structuraux concernant l’école, le secteur périscolaire, le monde associatif, etc.). L’évolution des structures et des modèles de formation, des profils de professionnalité recherchés, à travers les conceptions et positions des divers acteurs des secteurs concernés (enseignants, syndicats, cadres techniques, élus, formateurs, éducateurs sportifs et artistiques) ont permis de mieux saisir leurs rapports aux réformes, à leurs métiers et à leurs publics. Les débats et controverses sur les savoirs (savoirs académiques versus savoirs professionnels et/ou savoirs techniques et esthétiques) ont pu être décryptés, tout comme les enjeux de légitimité et de pouvoir. Ils éclairent l’évolution de la répartition des prérogatives professionnelles. Ils mettent également en lumière les enjeux de délimitation et les luttes de définition entre les différents acteurs des politiques publiques en matière d’éducation par le sport, ou encore du point de vue des « éducations à… ».

10L’analyse des publics visés-touchés constitue le second axe ayant retenu l’attention des chercheuses et chercheurs. Les facteurs responsables des inégalités éducatives dans les différentes sphères de socialisation (les collectivités territoriales, l’école, la famille, l’offre associative et privée de sports et de loisirs, les médias, les arts et le spectacle vivant) ou les différentes formes de violence sont ainsi mieux connus. Les particularités, socialement construites, des divers publics concernés ont été étudiées sous l’angle des dispositions sociales et autres facteurs orientant les conduites des individus, selon les catégories sociales, de sexe et/ou de sexualités, selon le niveau de pratique, avec les particularités bien documentées pour les sportives et sportifs de haut niveau ; en fonction des pathologies (diabète, obésité, post-AVC, etc.) ; selon diverses formes d’incapacités (motrices, sensorielles, intellectuelles) impliquant des besoins éducatifs particuliers pour réduire, sinon annuler, les situations de handicap ; parmi les jeunes sous-main de justice ; chez les chômeurs ; auprès des réfugiés, etc. Les jeunes ne sont donc pas les seuls à avoir retenu l’attention : les adultes et les personnes avançant en âge ont fait l’objet d’enquêtes.

11Parallèlement à cette connaissance approfondie des publics, le décryptage des dispositifs/adaptations/innovations pédagogiques qui leur sont proposés permet de mieux saisir les formes et enjeux de prise en compte de la diversité des situations individuelles et collectives dans la lutte contre les inégalités. En travaillant par ailleurs sur les représentations sociales des élèves et des familles, mais aussi sur la diversité des engagements familiaux en matière d’éducation (à l’école et en dehors), l’éducation par l’activité physique, sportive et artistique peut être saisie avec les nuances nécessaires au déploiement d’une forme d’action qui ne reproduise pas les inégalités qu’elle cherche à réduire ; ni ne contribue à des processus d’exclusion qu’elle prétend combattre en se voulant inclusive.

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L’intervention à visée éducative et inclusive dans et par l’activité physique, sportive et artistique a également été analysée selon un troisième axe, celui des dispositifs et des activités déployés par les différents acteurs (enseignants, entraîneurs, animateurs, éducateurs, formateurs, élèves, formés, etc.). Ces dispositifs et activités peuvent prendre des formes (leçon, pratique libre, création), des modalités, voire des significations et des enjeux (appropriation culturelle, inclusion, insertion, plaisir) fort différents selon les secteurs de pratique dans lesquels ils se réalisent. Au sein même de ces secteurs (l’école, la famille, les mouvements de jeunesse et/ou d’éducation populaire, les sports de haut niveau et de loisirs, les médias, les arts et le spectacle vivant) existent différents espaces d’intervention comme par exemple à l’école (l’EPS, l’AS, les sections sportives) mais également des classes de l’enseignement dit ordinaire et des classes de Sections d’Enseignement Général et Professionnel Adapté (SEGPA), des Unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS école/collège/lycée), où la place et la nature des savoirs peuvent être elles aussi fort différentes (savoirs technicotactiques, savoirs esthétiques, savoirs transversaux, valeurs, savoir-être, soft skills).

13De nombreux travaux ont ainsi analysé différents dispositifs, à différentes échelles, de la situation concrète d’enseignement/apprentissage à des dispositifs plus larges comme des projets d’action éducative, voire à des dispositifs institutionnels comme les sections sportives ou l’association sportive scolaire ou extrascolaire. L’articulation entre les pratiques sociales de référence, les objectifs éducatifs ou inclusifs relatifs à la mobilisation de ces pratiques, et les contenus réellement enseignés, transmis et appris, de même que le rapport à la technique et à l’esthétique, à l’imaginaire et à la culture sensible (et plus globalement au corps) qui est sous-jacent, ont été largement étudiés dans les différents contextes d’intervention évoqués précédemment.

14Durant ces vingt dernières années, les travaux en SHS du sport ont donc amplement investi et approfondi la thématique de l’éducation, de plus en plus articulée à l’objectif d’inclusion. Ils se sont enrichis par des approches théoriques et méthodologiques distinctes et selon des perspectives disciplinaires ou pluridisciplinaires, situées à différentes échelles d’analyse, depuis l’analyse des politiques publiques jusqu’à celle des dispositifs et pratiques et de leurs effets sur les divers publics concernés, eux-mêmes questionnés. Attentifs à la diversité des espaces constitutifs du champ des pratiques corporelles, ces travaux permettent de caractériser et ainsi de mieux analyser la place et le rôle des pratiques physiques, sportives et artistiques dans les dynamiques éducatives et les formes d’interventions qui s’y rattachent. Ils contribuent à mieux comprendre les modes de socialisation par le sport, en fonction des contenus proposés et enseignés, en lien avec la formation des enseignants et éducateurs, et selon la diversité des publics. Se faisant, ils offrent aussi les moyens d’une meilleure compréhension de la complexité des processus d’inclusion et d’exclusion qui s’y jouent.

La problématique du transfert des connaissances en matière de politiques publiques

15Quels usages peut-on faire des connaissances produites par ces travaux de recherche en matière de politiques publiques ? En quoi cette production savante peut-elle servir les politiques publiques ?

16On peut, comme cela est constaté en sciences de l’éducation, considérer qu’il y a une sous-exploitation de ces travaux pour éclairer et étayer les politiques publiques7. Il est vrai qu’en se positionnant différemment des « pédagogues », des « intellectuels » et des « experts », afin d’éviter le mélange des genres, les chercheurs et chercheuses revendiquent une autonomie et indépendance critique à l’égard des politiques publiques. Il apparaît néanmoins que la sous-exploitation de leurs travaux tient parfois à un manque de considération8 ou à un dialogue insuffisant entre les universitaires et les acteurs des politiques publiques. La recherche universitaire est restée à distance quand d’autres ont pu se positionner comme des interlocuteurs privilégiés de l’État, à l’image de l’Agence Nationale de l’Éducation par le Sport, l’Agence Nationale de la performance sociale par le sport (ANPSS), etc. Il n’y a pas lieu d’opposer, ni de mettre en concurrence les « scientifiques », « intellectuels », « experts » ou « pédagogues »⁹ du point de vue de leur apport à la compréhension des dispositifs d’éducation et d’inclusion.

17Il convient cependant d’accorder de l’attention à ce qui fonde la production de leurs discours, connaissances et modalités d’administration de la preuve lorsqu’il s’agit d’étayer et de structurer l’action publique sur des bases tout autant éthiques qu’épistémiques. De fait, « l’expertise est un enjeu de taille pour le scientifique qui est invité à montrer son utilité sociale au-delà de la cité scientifique […] En devenant expertes, elles [les sciences de l’éducation et/ou de l’intervention à visée éducative] se rendent visibles publiquement et donnent à voir toute l’importance qu’elles peuvent avoir dans la construction raisonnée de choix politiques »10. Il apparaît que « les scientifiques ont tout autant que d’autres acteurs sociaux, intellectuels, experts ou encore représentants d’associations ou de personnels, une légitimité » (Ibid., p. 99).

18Les connaissances produites en lien avec l’éducation sont multiples et très spécifiques, liées à des questions et à des objets précis, construits selon une démarche scientifique rigoureuse. Ces connaissances découlent parfois de travaux aux visées très appliquées, susceptibles d’avoir des retombées rapides et directes. C’est le cas pour les recherches collaboratives en éducation qui mettent en relation la recherche et le terrain professionnel dans le but de développer des recherches co-construites (chercheurs, formateurs, enseignants ou intervenants, acteurs de santé) sur le travail des enseignants (et/ou celui des formateurs), sur les savoirs, les dispositifs, les sujets apprenants, les outils et les contextes. Mais, d’une façon générale, ces champs de connaissances (scientifiques et professionnels) sont habituellement distincts et peu mis en synergie.

19Les démarches collaboratives ou interventionnelles, malgré un essor notable ces dernières années, sont encore rares et dépendent, de toute façon (y compris dans les effets produits), de cadres ou de modèles théoriques qu’il s’agit d’éprouver. Les connaissances les plus diffusées dans l’espace académique s’appuient donc sur l’avancée de travaux de recherche ayant des visées plus fondamentales. Ainsi, les résultats de ces recherches permettent de penser et de mieux comprendre les processus en lien avec l’action publique en matière d’éducation et d’inclusion par le sport, mais ils n’ont pas forcément de traduction simple et directe, ni d’effet automatique et magique du point de vue des préconisations à suivre. Pour produire des effets en la matière, ces connaissances doivent être transférées, c’est-à-dire appropriées ou réappropriées, traduites, transcrites, etc., par les acteurs des secteurs concernés.

20Dans ce cadre, il est important de ne pas confondre la production d’un discours d’expertise sans lien avec la recherche (1), la production d’un discours d’expertise et de conseil adossé à la recherche (2) et les dispositifs et processus de transferts des connaissances entre la recherche, le monde professionnel et les instances décisionnelles (3). Plusieurs types de transfert sont ici repérables. Tout d’abord, le transfert de connaissances peut se réaliser par la formation et par la recherche à l’université, à partir de mémoires et de thèses réalisées par des jeunes chercheuses et chercheurs qui deviennent ensuite des professionnels de l’éducation ou à partir de thèses soutenues par des acteurs et actrices de l’éducation qui travaillent parallèlement dans leurs établissements. En outre, le transfert des connaissances peut s’effectuer dans le cadre même des structures de recherche, en suscitant l’implication des membres des différents secteurs éducatifs concernés. Cette implication s’étend de la co-construction des objets dans le cadre de recherches collaboratives (pour la plus significative), à la simple participation à la restitution/traduction des résultats de la recherche, en passant par une contribution active à la production ou à l’analyse des données produites dans des cas intermédiaires.

21Le transfert de connaissances peut également se faire à travers une littérature à visée de « vulgarisation » s’adressant aux professionnels des secteurs concernés (écrits dans des ouvrages, écrits dans des revues professionnelles, etc.). De même, il peut se déployer par des collaborations entre chercheurs et chercheuses, entre collectifs de chercheurs et chercheuses ou sociétés savantes dans le cadre de « comités de suivi » d’une politique publique, d’une lettre de mission (inter)ministérielle, ou encore par l’implication active d’auteurs et d’autrices et de chercheurs et chercheuses dans le domaine de la création artistique ou dans d’autres dispositifs. Enfin, il ne faut pas oublier les transferts de type « evidence based vs science based » qui vont des pratiques vers la connaissance.

Une distinction fondamentale précieuse pour les politiques publiques

22Sensibilisés à la problématique du transfert de connaissances, de nombreux travaux de recherche proposent une distinction fondamentale entre activités et pratiques. Ils soulignent que ce qui est communément appelé Activités Physiques, Sportives et Artistiques (APSA) dans le champ scolaire et périscolaire désigne en réalité un ensemble de pratiques qui relèvent d’usages sociaux11 et se distinguent ainsi de la seule activité physique perçue dans sa dimension corporelle. Dans la mesure où les pratiques sociales constituent des productions de groupes humains, identifiables et institutionnalisées, pouvant prendre des formes diverses, inscrites dans des usages eux aussi divers, l’activité physique envisagée à des fins éducatives et inclusives doit être réinterprétée dans toute sa complexité. Elle renvoie, dans une perspective psychologique, aux motifs à partir desquels les individus se mobilisent, aux buts conscients qu’ils se fixent, aux opérations qu’ils mettent en œuvre pour atteindre ces buts12.

23Comme le souligne Daniel Bouthier, « il serait plus judicieux de dire, à l’inverse des habitudes professionnelles que " les élèves activent (au sens de donnent vie ici et maintenant) une pratique " (qui existe par ailleurs en dehors d’eux), plutôt qu’ils pratiquent une activité. En tout état de cause, c’est bien la prise en compte de ces deux plans, et ce double jeu de transmission / appropriation de modèles culturels inscrits dans les pratiques et d’individualisation de ces modèles culturels (re)créés par les individus en activité, qu’il est important de prendre en compte »13. C’est certainement en travaillant davantage sur ces articulations entre activités et pratiques que les politiques publiques d’éducation par les activités physiques parviendront à mieux concrétiser leurs ambitions d’inclusion et de réduction des inégalités.