Préambule

1L’ouvrage que vous allez découvrir est à la fois un bel hommage aux Maisons des Sciences de l’Homme mettant en lumière la richesse et l’originalité de ce dispositif, et une réflexion sur leur inscription et leur devenir dans le panorama des évolutions de la recherche en sciences humaines et sociales. Il arrive à point nommé alors que s’achève un cycle de transformations des Maisons des Sciences de l’Homme, impulsé par l’Institut des Sciences Humaines et Sociales du CNRS. Sa parution vient, en effet, marquer l’aboutissement d’un chantier que nous avons ouvert à l’automne 2018 et qui a vu la révision des textes fondamentaux des MSH : la Charte des missions des MSH ; la convention du Groupement d’Intérêt Scientifique (GIS) du Réseau des MSH ; ainsi que le modèle de convention des MSH.

2Cette réflexion a été menée sous l’égide du CNRS et de la Conférence des Présidents d’Université (CPU), ainsi que de l’Alliance Athéna, dans le cadre d’un groupe de travail réunissant douze personnalités : représentants du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, de la CPU, du CNRS, et de l’Alliance ATHENA, quatre directeurs ou directrices de MSH, un(e) secrétaire général(e) de MSH, le président du conseil scientifique du réseau national des MSH, et trois personnalités extérieures.

3La volonté de repenser et de retravailler les textes fondamentaux des MSH est née de la convergence de deux réalités. La première est liée aux évolutions du paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche qui ont donné lieu à de nouvelles dynamiques et de nouvelles exigences auxquelles les MSH se doivent de répondre dans le cadre des missions confiées par leurs tutelles. La seconde est celle de la diversité des profils et des modèles de fonctionnement des MSH, née des différents contextes dans lesquelles sont apparues ou se sont redéfinies les MSH. On peut ainsi identifier trois générations successives dans l’histoire des MSH. La toute première génération, qu’a représenté la Fondation Maison des Sciences de l’Homme (FMSH), avait pour rôle essentiel d’œuvrer à la mise en place de réseaux nationaux et internationaux de coopération à l’échelle nationale. La deuxième génération est celle des MSH abritant des équipes pour créer des espaces nouveaux, favorisant les échanges et les transversalités, et que représentent, par exemple, la MMSH (Maison Méditerranéenne des Sciences de l'Homme) ou la MAE (Maison Archéologie et Ethnologie, René-Ginouvès), devenue, en 2020, la MSH Mondes. La troisième génération est celle des MSH conçues comme des hôtels à projets, c’est-à-dire des MSH pensées comme des lieux d’incubation de projets interdisciplinaires, qu’illustrent, par exemple, la MESHS (Maison Européenne des Sciences de l’Homme et de la Société, Lille), la MSH Ange-Guépin (Maison des Sciences de l’Homme Ange Guépin, Nantes), ou encore la MSHS (Maison des Sciences de l’Homme et de la Société de Poitiers). A ces trois générations historiques s’ajoutent les créations ou recréations récentes, comme celle de la MSH LSE, qui intègrent, dès l’origine, les nouvelles compétences que doivent à présent porter les MSH, partout sur le territoire national. Nous pensons en particulier à l’organisation d’actions de valorisation ou encore à leur mission de déploiement-relais pour les Très Grandes Infrastructures de Recherche (TGIR PROGEDO et TGIR HUMANUM).

4Les MSH tendent donc partout à évoluer vers un modèle commun, fondé sur l’articulation d’un programme scientifique, souvent interdisciplinaire, et de missions transversales, sans pour autant perdre les spécificités locales qui font leur richesse. Cette évolution est d’autant plus importante que, dans le contexte des reconfigurations du paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche, l’action des MSH ne peut plus se déployer au niveau d’un groupe d’unités ni même d’un seul établissement. Elle doit intervenir à une échelle plus ample, qui est celle des sites dans lesquels les MSH sont implantées et dont la délimitation peut considérablement varier selon les contextes locaux.

5Ce tournant dans les missions des MSH est inscrit dès 2014 dans un Rapport de l’Alliance Athéna intitulé Les Maisons des Sciences de l’Homme et leur réseau. Un instrument politique et technique à adapter à la politique de site, rapport qui s’ouvrait avec ces mots : « Lieux de coordination entre les universités, les organismes et les collectivités territoriales, les MSH doivent répondre à de nouvelles exigences dans le cadre de leurs missions et de leur positionnement. » Les MSH, en tant que lieux centraux d’interdisciplinarité et d’incubation de projets, avec leur très fort ancrage territorial, et les missions/compétences qu’elles portent dans le déploiement-relais des TGIRs et de la valorisation, ont, en effet, les atouts nécessaires pour jouer à l’échelle des sites, un rôle structurant d’animation de la communauté scientifique SHS. La réflexion conduite par le groupe de travail réuni par le CNRS a permis d’acter ce tournant, d’en cerner les implications et les conditions de succès sur le terrain, en repensant le rôle et les missions des MSH et de leur réseau rational (RnMSH) dans le cadre d’une nouvelle Charte 2019, qui fait suite à celle promulguée en 2006, et en redéfinissant les instances du RnMSH énoncées dans la convention du GIS RnMSH. Ce travail s’est ensuite poursuivi jusqu’à l’automne 2020 par l’élaboration d’un modèle de convention MSH régissant les instances de gouvernance et de pilotage des MSH, sur la base de la nouvelle Charte.

6Pour clore ce bref préambule, nous souhaitons rendre hommage à tous les directeurs et directrices de MSH, ainsi qu’à leur secrétaires général(e)s, pour leur engagement au service des SHS sur leurs sites. Nous voulons souligner les défis que représentent les missions qu’il leur incombe d’assurer, puisqu’il leur faut à la fois travailler dans une perspective « bottom up » avec les directeurs et directrices d’équipes couvrant tous les champs des SHS pour dégager des synergies interdisciplinaires, et aussi dans une perspective « top down », avec les responsables des politiques de recherche des établissements, des organismes, et des collectivités territoriales. Ce sont eux et elles, qui, en lien avec les personnels affectés par toutes les tutelles dans les MSH, en font des outils profondément partenariaux et propres à porter au cœur des communautés scientifiques les innovations nécessaires pour que les SHS françaises évoluent favorablement. Ils et elles en assurent donc la réussite ce dont nous leur sommes très reconnaissants.