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Écritures autobiographiques

 | 
Jean-Marie Paul
, 
Anne-Rachel Hermetet

Première partie. Des manières de dire « je »

Georges Gusdorf et l’« écriture de soi » : de la théorie à la pratique

François Genton

Texte intégral

  • 1 Georg Misch, Geschichte der Autobiographie. Band 1 : « Das Altertum », Leipzig, Teutzner, 1907 (3e(...)
  • 2 On peut d’ailleurs penser que l’hommage rendu à Bismarck, qui était mort en 1898, était aussi une (...)

1Deux auteurs de formation philosophique ont marqué au xxe siècle la pensée et l’histoire de l’autobiographie, un genre auquel ils ont consacré la majeure partie de leur vie : Georg Misch (1878-1965), gendre et disciple de l’initiateur de la Geistesgeschichte Wilhelm Dilthey1, et Georges Gusdorf (1912-2000), normalien, agrégé de philosophie. C’est l’Académie des Sciences de Berlin qui forma en 1900 le souhait que l’on composât une « histoire de l’autobiographie au sens le plus strict du mot (à l’exception de tous les mémoires) ». En 1904, Georg Misch fournit quatre volumes manuscrits traitant de l’Antiquité, du Moyen Âge, de la Renaissance et du Baroque et enfin des xviiie et xixe siècles. La publication s’étendit sur plus de six décennies. Le dernier volume parut en 1969, quatre ans après la mort de l’auteur. Il traite de la période qui s’étend de la Renaissance au xixe siècle et reprend le quatrième volume manuscrit de 1904. Ainsi le dernier tome de l’entreprise titanesque de Georg Misch correspond à l’état de rédaction le plus ancien – une constatation que la conclusion de l’ouvrage ne peut que confirmer : l’auteur s’y pose la question de l’avènement d’une nouvelle forme artistique d’autobiographie qui serait à la hauteur de la plus grande œuvre dans le domaine des mémoires, à savoir Pensées et Souvenirs du chancelier Bismarck2. Georg Misch fut décoré pendant la Première guerre mondiale. Les nazis le chassèrent pour raisons « raciales » de la chaire de philosophie qu’il occupait à Göttingen depuis 1919, il partit pour l’Angleterre en 1939 et fut réhabilité et rétabli dans ses droits à son retour en juillet 1946, avant de prendre sa retraite : Georg Misch ne fut en position de former des étudiants et des docteurs que durant 13 années de sa longue vie, entre 1919 et 1933.

  • 3 Georg Misch, « Begriff und Ursprung der Autobiographie » (1907-1949), dans Günter Niggl (dir.), Au (...)
  • 4 Edward Gibbon, dans les premières pages de Memoirs of My Life and Writings (1796) : «. ..it would (...)
  • 5 Lettre de mai 1790, pour servir de préface au recueil de Johann Georg Müller Bekenntnisse merkwürd (...)
  • 6 Johann Wolfgang von Goethe, « Farbenlehre » (1808), Sämtliche Werke, Munich-Zurich, Artemis-dtv, 1 (...)
  • 7 Johann Heinrich Jung, dit Jung-Stilling, notamment Heinrich Stillings Jugend, 1777.
  • 8 Carl Philipp Moritz, Anton Reiser, 1785-1790.
  • 9 Ibidem, p. 785, note 22 : Selbstbiographien berühmter Männer. Ein Pendant zu Johann Georg Müllers S (...)
  • 10 Georg Misch, Geschichte der Autobiographie, Band IV, 2. Hälfte, 1969, p. 954 sq.

2Sa vision du « genre » autobiographique est généreuse : « Presque aucune forme ne lui est étrangère3 », l’autobiographie est une « extériorisation de la vie » (Lebensäußerung) que l’on retrouve partout, de la plaidoirie aux mémoires, de la poésie aux confessions, des ouvrages historiques aux romans, à l’épopée et au drame. Certes, poursuit-il, il a fallu attendre la fin du xviiie siècle pour que de grands esprits comme Edward Gibbon4, Johann Gottfried Herder5 ou Johann Wolfgang von Goethe6 demandent qu’on collecte les autobiographies des temps passés et présents et c’est bien à l’époque des Rousseau, Jung-Stilling7, Moritz8 et Goethe que naît un genre nouveau, plus littéraire. L’Allemagne a d’ailleurs produit en 1796 le terme de Selbstbiographie, qui inspira peut-être le néologisme anglais Auto-Biography, attesté dès 18099. En fidèle disciple de Dilthey, Misch voit dans le xviiie siècle l’aboutissement d’une émancipation de l’esprit humain et d’un intérêt quasi-scientifique de l’homme pour lui-même et note qu’au siècle suivant le développement de l’autobiographie va de pair avec celui des sciences (Wissenschaften) que sont désormais la psychologie et l’histoire. Il n’en reste pas moins que l’autobiographie, en tant qu’elle correspond à un besoin de s’exprimer et de susciter l’intérêt bienveillant (entgegenkommendes Interesse) des autres hommes, a un caractère « protéiforme » (protäisch) qui est de tous les temps historiques. Et l’ouvrage de Misch, sur la base d’une érudition étonnante, suit à la trace l’évolution du « récit de soi » de l’Antiquité égyptienne à la fin du xixe siècle. Dans le dernier volume, qui est aussi d’une certaine manière le premier, Jean-Jacques Rousseau (p. 831-874) et Goethe (p. 917-955) ont droit aux développements les plus longs : Les Confessions sont davantage l’aboutissement d’un processus de sécularisation de l’étude de soi protestante, tandis que Goethe a vraiment, selon Misch, réalisé le projet nouveau de l’autobiographie en tant que description de la formation d’une personnalité, à partir de données congruentes, tirées du réel, mais aussi d’un imaginaire assumé dans le titre même de l’ouvrage (Dichtung und Wahrheit : le mot Dichtung signifie poésie, mais aussi imagination, invention, etc.). Notons que Misch, prudemment, laisse ouverte la possibilité d’un progrès de l’autobiographie après Goethe : il faudrait alors créer une nouvelle forme sur la base d’une nouvelle interprétation du monde et de la vie10.

  • 11 Georges Gusdorf, Lignes de vie, 2 vol. (« Les écritures du moi », « Auto-Bio-Graphie »), Paris, Od (...)

3Georges Gusdorf (1912-2000) a dédié de 1948 (La Découverte de soi) à 1991 (deux volumes de Lignes de vie : Les écritures du moi et Auto-Bio-Graphie) une grande partie de sa vie de penseur et d’auteur à la pensée de l’autobiographie. Deux ans après sa mort a paru Le Crépuscule des illusions. Mémoires intempestifs, qui, malgré la prudente désignation générique, relève bien d’un genre plutôt introspectif. Avant même de consacrer une grande partie, sinon l’essentiel de ses mémoires, à son devenir intellectuel, l’auteur, non sans un certain humour, avait donné au premier chapitre de Lignes de vie le titre de « Résumé des chapitres précédents ». Il y parle d’une période décisive, les cinq années de captivité passées en Allemagne après « la catastrophe de 1940 », durant lesquelles il a pu écrire La Découverte de soi, qui fut la thèse qu’il soutint au retour sous la bienveillante « direction » post festum de Gaston Bachelard, « le plus irrégulier, le moins doctoral des professeurs, et le plus indulgent11 ». Dès ce premier chapitre, Gusdorf s’en prend à une approche formaliste des « écritures du moi » :

  • 12 Ibidem, p. 9 sq.

Figures fugitives sur le sable et sur l’eau de la vie, les écritures du moi exposent des attestations de la présence humaine sur la terre des vivants, indissociables des cycles et rythmes de la conscience individuelle et de la conscience communautaire qui se prononcent à travers elle. Abstraire la parole écrite de son contexte spirituel, la désincarner pour l’examiner sur le mode de l’absence, afin de parvenir à l’exposé d’un univers du discours axiomatisé selon l’ordre de l’universalité mathématique, c’est lâcher la proie pour l’ombre12.

  • 13 Georges Gusdorf, Le Crépuscule des illusions. Mémoires intempestifs, Paris, La Table Ronde, 2002, (...)
  • 14 Ibidem, p. 16.
  • 15 Ibid., p. 118.
  • 16 Ibid., p. 46.

4Durant les trois dernières décennies de sa vie, Georges Gusdorf a en effet mené une véritable polémique contre le concept de pacte autobiographique proposé par Philippe Lejeune à partir des années soixante-dix du siècle dernier. Il s’est alors souvent référé au modèle fourni par Georg Misch. Normalien, après avoir préparé le concours à Bordeaux, Georges Gusdorf n’a été reçu à l’agrégation de philosophie qu’au troisième essai. Il attribue au professeur Jean Laporte la responsabilité de ses deux échecs, sa faute aurait été d’être un élève de Léon Brunschvicg, dont le « positivisme spiritualiste » avait une plus grande envergure que « l’empirisme au petit point » de Laporte13. Si on suit le mémorialiste, avant la mobilisation, le jeune agrégé partage « l’opinion moyenne dans le marché moyen de la philosophie universitaire », à savoir « un rationalisme bien tempéré, dont l’euphorie se réclamait des progrès du savoir scientifique et de l’efficacité technique14 ». S’ajoutait cependant à cette vague opinio communis une volonté personnelle d’avoir une pensée autonome, libre à l’égard des grands systèmes philosophiques ou des grands maîtres : « À vivre parmi des camarades qui vouaient une dévotion exclusive à Alain, à Kant ou à Fichte, il me semblait que le maître à penser devenait un obstacle à la pensée15. » La guerre constitua donc une rupture, à plusieurs titres : en tant qu’expérience historique de l’effondrement des valeurs représentées par la philosophie de Léon Brunschvicg : les progrès scientifiques et techniques n’ont pas rendu l’humanité plus sage, et même si le vieux philosophe, qui mourut, réfugié à Aix-les-Bains en 1944, « a pu finir ses jours dans la ferme conviction que la justice immanente assurerait le triomphe de la Vérité16 », ceux qui ont vécu les premières explosions atomiques, la révélation de la Shoah et du Goulag, les guerres de décolonisation et tous les massacres du xxe siècle ne peuvent bien entendu partager cette conviction, en tant qu’expérience personnelle d’une sociabilité intellectuelle enrichissante, au cours d’une longue captivité qui apporta à Georges Gusdorf « la découverte de soi ».

  • 17 Ibid.., p. 15-63.
  • 18 Georges Gusdorf, « Conditions et limites de l’autobiographie », dans Formen der Selbstdarstellung. (...)

5Après avoir lancé une œuvre abondante avec sa thèse principale La Découverte de soi, Georges Gusdorf prit ses distances avec la foi en le progrès propre aux maîtres de sa jeunesse, notamment en 1953 dans Mythe et métaphysique17. C’est quasiment un hasard qui le poussa à s’intéresser de plus près au genre de l’autobiographie. Dans le « résumé des chapitres précédents » de 1991 le philosophe français note le tournant que représenta pour sa réflexion la contribution intitulée « Conditions et limites de l’autobiographie » qu’il inséra en 1956, à la demande de son ami Erich Haase, spécialiste du Refuge huguenot, dans un recueil d’hommage au romaniste berlinois Fritz Neubert, qui était pour Gusdorf un parfait inconnu18. On s’intéressait en Allemagne à une réflexion si rare alors en France sur le « récit de soi » ; d’une certaine manière la pensée de Gusdorf, qui puisait à d’autres sources, avait fini par rejoindre l’approche de la Geistesgeschichte, c’est-à-dire la représentation d’un développement continu de l’esprit humain dans l’histoire, les œuvres fixant en quelque sorte un vécu que le savant s’efforcera de comprendre, conscient du fait qu’il ne sera jamais possible de le comprendre tout à fait, les individus et les époques n’étant ni modélisables ni entièrement communicables les uns aux autres. Dans son texte de 1956, Georges Gusdorf distingue deux fonctions dans l’autobiographie : d’un côté le « récit de vie », de l’autre la « théodicée de l’être personnel », la tentative de donner un sens à cette vie. L’autobiographie n’est donc pas seulement tournée vers le passé, par son « arrangement », par les licences qu’elle se permet envers le réel, elle révèle un projet, une façon d’être, un style de vie. Au fond, semble suggérer Georges Gusdorf, l’autobiographie est moins un récit que l’illustration d’une vision de l’individu et de l’humanité à un moment donné.

  • 19 Georges Gusdorf, Lignes de vie, t. 2, « auto-bio-graphie », Paris, Odile Jacob, 1991, p. 9 sq.
  • 20 Ibidem, p. 490.
  • 21 Georges Gusdorf, Lignes de vie, t. 1, « Les écritures du moi », Paris, Odile Jacob, 1991, p. 20 sq
  • 22 Jacques-Louis Ménétra, Journal de ma vie, présenté par Daniel Roche, Paris, Montalba, 1982.
  • 23 Georges Gusdorf, Lignes de vie, t. 1, « Les écritures du moi », Paris, Odile Jacob, 1991, p. 22.

6Philippe Lejeune, auteur de L’Autobiographie en France, a inséré en 1971 ce texte dans l’anthologie par laquelle se termine son ouvrage. Dans la 2e édition, en 1998, « le format de la collection » ne permettant « pas de reprendre » ce texte, il se contente de renvoyer aux deux volumes publiés « en 1990 » (sic), c’est-à-dire aux deux volumes de Lignes de vie. Est-ce à dire que de 1956 à 1991 la pensée de Gusdorf n’a pas évolué ? Un tel jugement (implicite) nous semble injuste. Certes, les deux volumes de Lignes de vie ne sont pas construits de manière systématique : le premier, fait, aux dires mêmes de l’auteur, « d’analyses et de digressions19 », tente un historique de l’autobiographie, qui prolonge, tout en s’y référant, l’étude de Misch jusqu’aux dernières décennies du xxe siècle, mais sur la base d’un corpus français, le second insiste sur « graphein » dans auto-bio-graphie : c’est par l’écriture que l’on vit pour soi : « J’écris, donc je suis20. » Dans le « résumé des chapitres précédents » qui ouvre les deux volumes, Gusdorf insiste précisément sur sa découverte de Georg Misch, de l’école historique allemande dans laquelle il englobe des auteurs aussi différents, comme il le reconnaît, que Dilthey, Cassirer et Groethuysen, déplorant qu’en France leurs « textes n’[aient] jamais été accueillis comme ils le méritent » et que la « science nouvelle » qu’on appelle en France « histoire des mentalités » soit une « antiquité au-delà » du Rhin21… À l’autobiographie de Goethe, pour lui aussi exemplaire que pour Misch, il oppose « l’autobiographie de masse », par exemple tel « cahier rédigé par un artisan du faubourg Saint-Antoine », peut-être une allusion au Journal de ma vie de Jacques Louis Ménétra (1738-1812), édité en 1982 par Daniel Roche22. Les deux volumes ne font en réalité qu’exprimer une longue protestation contre la vision, selon Gusdorf, purement « mathématique » et désincarnée de l’autobiographie que les études et les livres de Philippe Lejeune ont imposée dans les facultés de lettres de France depuis les années 1970. Il serait ici fastidieux de relever toutes les allusions ou attaques ouvertes que l’on rencontre dans les deux volumes et il suffira de noter que l’ouverture des deux volumes parle des « égarements de la critique contemporaine dont je voudrais mettre en évidence les néfastes ignorances23 ».

  • 24 Revue d’Histoire Littéraire de la France, 75e année, n° 6 (nov.-déc. 1975).

7Il s’agit d’une opposition déjà ancienne dont on peut se faire une idée exacte dans les actes du colloque sur l’autobiographie organisé le 25 janvier 1975 à la Sorbonne par la Société d’Histoire Littéraire de la France24. La manifestation s’ouvre sur un exposé de Philippe Lejeune intitulé « Autobiographie et histoire littéraire », dans lequel l’auteur expose sa théorie du « pacte autobiographique » (identité auteur-narrateur-personnage) en discutant les théories critiques en vogue, des formalistes russes et de Northrop Frye à l’esthétique de la réception de Jauss avant d’esquisser deux projets :

8« étudier la constitution de la « littérature personnelle » en France au xixe siècle » ;

  • 25 Ibidem, p. 924 et 926.

9« étudier la structure actuelle de nos horizons d’attente25 ».

10Se posant la question de l’historicité du phénomène, l’auteur conclut vaguement sur une corrélation, qu’il faudrait questionner, entre « développement de la littérature autobiographique » et « montée d’une nouvelle classe dominante », à savoir la bourgeoisie.

11La discussion qui suit s’ouvre sur une longue et polémique réaction de Georges Gusdorf :

  • 26 Ibid, p. 931 sq.

On n’a jamais senti que l’autobiographie, c’était un homme qui mettait sa vie en cause […] Nous avons vu uniquement des genres qui fonctionnaient […] je me suis dit que l’on n’est pas pour rien dans la vieille Sorbonne où la querelle des Universaux avait déjà opposé pas mal de gens, se demandant de quoi ils parlaient26.

  • 27 Ibid, p. 906.
  • 28 Georg Misch. A History of Autobiography in Antiquity, translated by E. W. Dickes, London/ Harvard, (...)
  • 29 Georges Gusdorf, « De l’autobiographie initiatique à l’autobiographie genre littéraire », Revue d’ (...)
  • 30 Georges Gusdorf fut « caïman », c’est-à-dire répétiteur, des étudiants (en philosophie) de l’École (...)
  • 31 Gusdorf attribue à des continuateurs le dernier volume de Misch ! p. 962.
  • 32 Ibidem, p. 908.
  • 33 Ibid.., p. 993.

12Georges Gusdorf reproche ensuite à Philippe Lejeune de limiter l’autobiographie à l’époque qui suit Jean-Jacques Rousseau (« Qui peut permettre de se dire qu’il n’y avait pas d’individu au Moyen Âge ? ») et d’ignorer l’histoire de Georg Misch (à qui Philippe Lejeune reproche dans son exposé d’» envisager des civilisations très éloignées de la nôtre27 »). Philippe Lejeune répond qu’il ressent un intérêt personnel pour l’autobiographie (qui est donc pour lui un genre bien vivant) et avoue qu’il n’a de Misch qu’une connaissance bien imparfaite, puisqu’il n’a pu lire que la traduction anglaise de l’histoire de l’autobiographie dans l’Antiquité28. Dans sa contribution29, Georges Gusdorf s’en prend dès le début à cet intérêt porté à l’autobiographie par une époque qui par ailleurs proclame « la mort de l’homme », allusion transparente à Michel Foucault (et peut-être aussi à Louis Althusser), dont Georges Gusdorf fut le « caïman30 » à l’École Normale Supérieure. Se référant à l’œuvre de Georg Misch, non sans inexactitude31, il conteste la représentation d’un genre qui naît avec Rousseau. Dans son exposé, Philippe Lejeune nuançait lui-même cette thèse, qu’il avait avancée dans son livre de 1971, en établissant la filiation entre Jean-Jacques Rousseau et les protestants observateurs de soi du xviiie siècle32. Les Confessions de Rousseau ont « fait date », mais n’ont pas inventé l’autobiographie qui est de tous les temps historiques, en tant qu’expression d’une conscience de soi qui n’a cessé d’évoluer et de s’affirmer. Gusdorf décrit le processus de « sécularisation » du récit de soi et montre que l’» apologétique religieuse cède la place à une apologétique personnelle33 » et que, parallèlement, l’autobiographie devient un genre littéraire.

  • 34 John Bunyan, Grace Abounding to the Chief of Sinners, 1666.

13Dans la colère qui l’animait, et qui ne cessa de l’animer jusqu’à sa mort, Georges Gusdorf ne voulut et ne put pas voir que la position de Philippe Lejeune restait ouverte. Certes, le concept de « pacte autobiographique » définissait des critères contraignants pour un objet construit a priori et nommé « autobiographie », mais Lejeune, loin de s’interdire toute réflexion historique, l’appelait même de ses vœux. Il n’en reste pas moins que, plus de trente ans après cette polémique, il faut bien constater que l’approche « poétologique » l’a emporté en France sur l’approche historique : la discussion porte sur l’adéquation ou non de concepts formels (autobiographie, autofiction, etc.) et l’approche historique ne semble pas avoir progressé. On serait même tenté de noter une certaine limitation à la sphère nationale, ce qui devrait en soi soulever des problèmes d’ordre théorique : est-il envisageable que l’autobiographie se soit limitée au territoire et à la culture de ceux qui se disent spécialistes de « l’autobiographie » en soi ? Que diraient les spécialistes d’une histoire de l’autobiographie qui mentionnerait rapidement (ou ne mentionnerait pas) Montaigne, Pascal, Jean-Jacques Rousseau pour se concentrer sur John Bunyan34, Johann Heinrich Jung-Stilling ou Karl Philipp Moritz ? Est-il possible de s’intéresser à l’écriture de soi au xxe siècle en se limitant au seul horizon de la littérature française ? Philippe Lejeune, conscient des limites de son étude, intitulait L’Autobiographie en France un livre qui cite très peu d’œuvres étrangères, Jacques Lecarme et Eliane Lecarme-Tabone publient en 1997 L’Autobiographie, une étude de 300 pages où les seuls étrangers qui ont droit un développement, fort court (un total de 4 pages), sont Gertrude Stein, Nietzsche et Goethe. Autrement dit, en l’absence d’une histoire en français de l’autobiographie, il vaudra mieux se tourner vers les livres de Gusdorf ou, si on lit l’allemand, vers la somme de Misch, si l’on veut se faire une idée de l’évolution de « l’écriture de soi » jusqu’au xixe siècle.

  • 35 Ainsi, Gusdorf s’en prend au pétainisme que Paul Ricoeur, qui fut son collègue à Strasbourg, aurai (...)

14Georges Gusdorf a voulu faire le récit de sa vie. Conscient de ne pas répondre aux exigences de l’autobiographie littéraire, il a donné à son livre Le Crépuscule des illusions le sous-titre de Mémoires intempestifs. Double référence wagnérienne et nietzschéenne, mais grande prudence « générique » : l’auteur ne veut pas être mesuré à l’aune de Rousseau ou de Goethe et insère son écrit dans le vaste domaine des mémoires, que l’Académie des sciences de Berlin excluait déjà en 1900 de l’autobiographie. L’ouvrage n’a pas pu paraître du vivant de l’auteur, sans doute en raison de remarques polémiques qu’il n’a pas voulu nuancer ou écarter : dans l’édition de 2002, le nom du personnage visé n’est pas cité35. L’ouvrage se compose de huit chapitres, dont nous donnons ici un très rapide résumé :

15« Situation spirituelle de notre temps » (p. 15-74) : un hommage aux maîtres de sa jeunesse, Emile Bréhier et surtout Léon Brunschvicg et un adieu à leurs « illusions ». Gusdorf se range dans la génération de son ami Merleau-Ponty et aussi de Jean-Paul Sartre, qui s’inspirèrent davantage de Husserl et de Heidegger que de la philosophie de la Sorbonne. Le progrès n’a pas eu lieu… et Gusdorf de « vitupérer l’époque » : l’Occident a cessé de croire en ses valeurs, sa mauvaise conscience le pousse à admirer tous les despotismes qui l’entourent, du Tiers Monde à la Chine en passant par l’URSS, et à régresser au fur et à mesure qu’il s’installe dans un univers de plus en plus dominé par la technique, la brutalité et la bêtise. Les « docteurs de la Belle Époque » et « mon bon maître » (Léon Brunschvicg) n’ont pas plus prévu ce désastre que Nietzsche et Marx eux-mêmes, philosophes pourtant plus lucides.

  • 36 Georges Gusdorf, Le Crépuscule des illusions (voir note 10), p. 89.
  • 37 Ibidem, p. 90.
  • 38 Ibid., p. 99.

16« Illusions perdues » : c’en est fini de l’» angélisme philosophique36 », la conscience humaine est un « petit domaine fragile aux contours indécis37 » : avant Freud et Nietzsche, les idéologues, à commencer par Maine de Biran, l’ont dit. « La présence constante du corps à ma pensée impose conjointement sa loi à la vie organique et à la vie psychologique38. »

  • 39 Ibid, p. 115.
  • 40 Ibid, p. 115.

17« Formation » : Gusdorf rend hommage à son professeur de khâgne Jean- Raoul Carré, trace un portrait au vitriol de Jean Laporte, qui le fit recaler par deux fois à l’agrégation et empêcha après la guerre que fût décernée « à l’unanimité » la mention « très honorable » à sa thèse : « Il appartenait à la catégorie des apparatchiks, des hommes d’appareil, directeurs de section ou d’instituts, doyens, présidents de jurys, que l’on retrouve postés à tous les points stratégiques de la jungle universitaire39. » Ici, Gusdorf donne « sa » définition philosophique de la vérité : « Nous ne pouvons accéder qu’à une vérité en situation, et la recherche en ce sens ne s’achèvera jamais. Tout individu qui se présente en porte-parole de l’absolu se rend coupable de faux témoignage ; sa prétention expose une contradiction dans les termes40. »

  • 41 Ibid, p. 199 sq.

18« Services militaires » et « Captivité » : enfin reçu à l’agrégation, Gusdorf est mobilisé. Ancien scout dans la région de Bordeaux, il s’adapte parfaitement à l’armée, jusqu’au « désordre sanglant et inutile » de la campagne de 1940. Il est fait prisonnier dans le Loiret et commence ses cinq années de captivité. Ce sont peut-être ici les plus belles pages du livre, on sent que l’auteur a vécu intensément cette époque. Gusdorf contribue à organiser dans les camps d’officiers des activités de résistance culturelle à la double propagande des nazis et de Vichy et fait l’expérience d’une sociabilité intellectuelle que sa carrière universitaire ne lui permettra plus de renouveler. C’est dans le chapitre « Captivité » qu’est rapporté un épisode qui ressemble fort à l’expérience mystique que les piétistes appelaient « percée » (Durchbruch) : « À un moment impossible à préciser […] se produisit une accélération de la vie spirituelle, promue à une intensité plus haute. » La communauté protestante, à laquelle appartient Gusdorf, décide d’organiser « aux environs de Pâques 1944 » des séances de lecture commune de l’Evangile. Ces lectures ont un effet foudroyant : « L’atmosphère avait changé ; tout était neuf, l’impossible devenait possible, comme si le surnaturel devenait naturel, comme si le Ciel visitait la terre. Saison de grâce41. »

  • 42 Ibid., p. 229 sq.
  • 43 Ibid., p. 254 sq.
  • 44 Ibid., p. 272.

19« Alma Mater ». Après 1945 le monde n’est plus le même : Gusdorf évoque ici un séjour à Nuremberg, en compagnie de son épouse, dans les années soixante : la ville est méconnaissable, et pourtant ses habitants la jugent « très jolie ». Répétiteur à l’École Normale Supérieure, Gusdorf, qui tenait un journal intime depuis l’adolescence, modifie le texte écrit en captivité, à partir de conférences sur « la connaissance de soi », pour en faire une thèse : « Les grandes œuvres de l’art et de la pensée […] sont des œuvres du moi42. » Il lit « mon maître Kierkegaard », rend hommage à Gaston Bachelard, son directeur de thèse. Nommé en 1948 à l’université de Strasbourg, le professeur observe avec méfiance l’évolution de l’Enseignement supérieur, dénonçant dans les années soixante l’université de masse et surtout les exigences de « l’appareil politico-administratif » : « Je ne me suis jamais remis du désastre de 196843. » Pour Gusdorf, l’enseignement « ne serait donc jamais qu’un second métier44 », le premier étant celui d’écrivain.

  • 45 Ibid., p. 307.

20« Politique » : Gusdorf, patriote français, est d’une grande sévérité envers les intellectuels fourvoyés, qu’il s’agisse des collaborateurs de 1940-1945 ou des thuriféraires du communisme soviétique ou maoïste. Par ailleurs, la place de l’intellectuel n’est pas en politique. Gusdorf cite ici Robert Dubreuilh (= Jean-Paul Sartre), personnage du roman Les Mandarins de Simone de Beauvoir : « Dans un espace courbe, on ne peut tirer de ligne droite45. »

  • 46 Ibid., p. 231 et 326. « Der kürzeste Weg zu sich selbst führt um die Welt herum », la formule est m (...)
  • 47 Ibid., p. 341.
  • 48 Ibid., p. 334 et 336.
  • 49 Ibid., p. 381.
  • 50 Ibid, p. 383 sq.

21« Postface à une œuvre » : tout est parti de la « connaissance de soi ». Et Gusdorf de citer pour la deuxième fois une formule de Keyserling : « Le chemin qui mène de soi à soi fait le tour du monde46. » Gusdorf rapporte comment il construisit « dans la quiétude provinciale47 » une œuvre au centre de laquelle se situent les douze volumes de son ouvrage Les Sciences humaines et la pensée occidentale (1966-1988). Regrettant le succès de librairie d’un Michel Foucault, dont Les Mots et les choses (1966) est un « ouvrage hâtif et médiocrement informé », et des « écrits ésotériques des Lacan, Barthes et autres Lévi-Strauss48 », et le matérialisme étroit de la fin du xxe siècle, l’auteur se souvient avec nostalgie de ses cinq années de captivité comme d’un « temps gagné pour la culture, pour l’édification de soi par tous les moyens à notre disposition, dont le moindre n’était pas la rencontre de l’homme avec l’homme49 ». En conclusion il rend un vibrant hommage aux jeunes romantiques allemands de l’époque révolutionnaire : leur « affirmation fondamentale pourrait se résumer en termes simples dans l’idée que la réalité humaine en sa spécificité possède un droit de priorité sur les réalités matérielles ou sur l’ordre politique ». Et, dernier coup de griffe au formalisme de Philippe Lejeune, aux « antipodes de ce requiem pour le sujet prononcé à notre époque » : « La poésie, l’art, la foi, sont des attestations de l’authenticité humaine, aussi valables, et davantage, que les schémas décharnés de la science de Newton50. »

22Comme le montre ce long résumé analytique, les « mémoires » de Georges Gusdorf sont au fond bien mal nommés : on n’y apprend quasiment rien sur l’homme public et fort peu de chose sur l’homme privé, sur son enfance et sa jeunesse, sur sa famille, son insertion sociale, ses amis, ses étudiants, ses collègues. Notons deux lignes de force : d’un côté une carrière universitaire et d’écrivain prolifique dans un monde hostile, de l’autre un devenir intellectuel au départ sous le signe de maîtres bienveillants encore marqués par les « illusions », c’est-à-dire par la « foi du charbonnier » en les vertus du progrès scientifique et technique et en l’avènement d’une conscience de soi « scientifique », transparente à elle-même. À la bienveillance firent place la malignité et la lâcheté du milieu universitaire, après que Georges Gusdorf eut connu son « illumination », sa « percée » au cours de l’expérience enrichissante de sociabilité intellectuelle et religieuse que représentèrent cinq longues années de captivité.

  • 51 Paris, Pauvert, 1965.
  • 52 Pierre Bourdieu, Homo Academicus, Paris, Minuit, 1984, p. 156.

23Sur le plan intellectuel, il faut noter l’attachement de Georges Gusdorf à une vision lucide de l’homme, qui est conditionné par son corps et le monde dans lequel il vit, mais qui est aussi capable de se détacher de ce déterminisme et de produire des œuvres où se manifeste sa liberté. Ces œuvres ne peuvent être réduites à des schémas formels, elles expriment un être personnel et un univers que l’on ne pourra jamais dévoiler entièrement et qui varient en fonction des individus, mais aussi des époques. On ne peut s’empêcher, en conclusion, de penser que le relatif isolement de Georges Gusdorf, constatable dans la discussion qui suit les contributions du colloque de 1975, est non seulement imputable à une certaine rigidité psychologique, mais aussi à une position intellectuelle spécifique : Gusdorf, c’était d’une certaine façon la présence anachronique du romantisme allemand et de la Geistesgeschichte dans l’univers de la critique universitaire française des années 1960 et 1970, où se combinaient de manière assez superficielle et instable le formalisme, le structuralisme et le marxisme. Ce destin n’était qu’une réplique tardive de la célèbre polémique qui opposa en 1965 le spécialiste de Racine Raymond Picard à Roland Barthes. Malgré un incontestable talent de pamphlétaire et de solides arguments, le professeur à la Sorbonne, auteur de Nouvelle critique, nouvelle imposture51, ne put empêcher le triomphe de ceux qui représentaient, selon l’analyse de Pierre Bourdieu, « les plus intellectuels des journalistes et les plus journalistes des intellectuels52 ». La référence encore obligée de nos jours à la French theory dans le discours des jeunes chercheurs du IIIe millénaire ne donne pas vraiment tort à Gusdorf lorsqu’il mettait en garde contre la naissance d’une nouvelle scolastique. Il faudrait relire Georges Gusdorf avec une certaine distance critique, et tenir compte malgré lui de l’apport de l’histoire sociale et culturelle, notamment de la prise en compte des minores, voire des humbles, dont les témoignages présentent incontestablement un grand intérêt. Il n’en reste pas moins qu’une relecture de Georges Gusdorf, même critique, pourrait bien avoir un impact libérateur et permettrait d’élargir l’horizon théorique et culturel des sciences humaines.

Notes

1 Georg Misch, Geschichte der Autobiographie. Band 1 : « Das Altertum », Leipzig, Teutzner, 1907 (3e éd. augm. 1949) ; Band 2, 1. und 2. Hälfte, « Das Mittelalter », 1. Teil : « Die Frühzeit », Francfort, Schulte-Bulmke, 1955 ; Band 3, 1. Hälfte, « Das Mittelalter », 2. Teil, « Das Hochmittelalter im Anfang », Francfort, Schulte-Bulmke, 1959 ; Band 3, 2. Hälfte, « Das Mittelalter », 2. Teil : « Das Hochmittelalter im Anfang », Francfort, Schulte-Bulmke, 1962 ; Band IV, 1. Hälfte, « Das Mittelalter », 3. Teil, « Das Hochmittelalter in der Vollendung », hrsg. V. Dr Leo Delfoss, Francfort, Schulte-Bulmke, 1967 ; Band IV, 2. Hälfte « Von der Renaissance bis zu den autobiographischen Hauptwerken des 18. und 19. Jahrhunderts », bearbeitet von Bernd Neumann, Francfort, Schulte-Bulmke, 1969. Pour l’histoire de l’autobiographie en Allemagne on consultera utilement Günter NIggl, Geschichte der deutschen Autobiographie im 18. Jahrhundert. Theoretische Grundlegung und literarische Entfaltung, Stuttgart, Metzler, 1977.

2 On peut d’ailleurs penser que l’hommage rendu à Bismarck, qui était mort en 1898, était aussi une critique indirecte du wilhelminisme, le régime autoritaire incarné par Guillaume II. Georg Misch, Geschichte der Autobiographie, Band IV, 2. Hälfte « Von der Renaissance bis zu den autobiographischen Hauptwerken des 18. und 19. Jahrhunderts », bearbeitet von Bernd Neumann, Francfort, Schulte-Bulmke, 1969, p. 979.

3 Georg Misch, « Begriff und Ursprung der Autobiographie » (1907-1949), dans Günter Niggl (dir.), Autobiographie. Zur Form und Geschichte einer Gattung, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1989, p. 33-54. Nous traduisons ou paraphrasons tous les passages en allemand.

4 Edward Gibbon, dans les premières pages de Memoirs of My Life and Writings (1796) : «. ..it would not be difficult to produce a long list of ancients and moderns, who, in various forms, have exhibited their own portraits. Such portraits are often the most interesting, and sometimes the only interesting parts of their writings… »

5 Lettre de mai 1790, pour servir de préface au recueil de Johann Georg Müller Bekenntnisse merkwürdiger Männer von sich selbst, 1791-1810, 6 vol. Cette préface est citée plus longuement par Georg Misch dans Geschichte der Autobiographie, Band IV, 2. Hälfte « Von der Renaissance bis zu den autobiographischen Hauptwerken des 18. und 19. Jahrhunderts », bearbeitet von Bernd Neumann, Francfort, Schulte-Bulmke, 1969, p. 785 sq.

6 Johann Wolfgang von Goethe, « Farbenlehre » (1808), Sämtliche Werke, Munich-Zurich, Artemis-dtv, 1977, t. 16, p. 399, à propos des mémoires de Cardan : « Eine Vergleichung der sogenannten Konfessionen aller Zeiten würde in diesem Sinne gewiß schöne Resultate geben. So scheinen uns die Bekenntnisse, deren wir erwähnten (Cellini et Cardan FG), gewissermaßen auf den Protestantismus hinzudeuten. »

7 Johann Heinrich Jung, dit Jung-Stilling, notamment Heinrich Stillings Jugend, 1777.

8 Carl Philipp Moritz, Anton Reiser, 1785-1790.

9 Ibidem, p. 785, note 22 : Selbstbiographien berühmter Männer. Ein Pendant zu Johann Georg Müllers Selbstbekenntnissen. Gesammelt von David Chr. Seybold, Winterthur, 1796-1799, 2 vol. Le Trésor de la langue française indique que Robert Southey n’a popularisé le mot Autobiography qu’en 1809 dans la Quarterly Review, I, 283. Georg Misch (« Begriff und Ursprung der Autobiographie », p. 38, voir note 2) l’affirmait déjà en 1907.

10 Georg Misch, Geschichte der Autobiographie, Band IV, 2. Hälfte, 1969, p. 954 sq.

11 Georges Gusdorf, Lignes de vie, 2 vol. (« Les écritures du moi », « Auto-Bio-Graphie »), Paris, Odile Jacob, 1991, p. 9.

12 Ibidem, p. 9 sq.

13 Georges Gusdorf, Le Crépuscule des illusions. Mémoires intempestifs, Paris, La Table Ronde, 2002, p. 23 et p. 114.

14 Ibidem, p. 16.

15 Ibid., p. 118.

16 Ibid., p. 46.

17 Ibid.., p. 15-63.

18 Georges Gusdorf, « Conditions et limites de l’autobiographie », dans Formen der Selbstdarstellung. Analekten zu einer Geschichte des Selbstportraits. (Festgabe für Fritz Neubert), hrsg. v. Erich Haase und Günter Reichenkron. Berlin, 1956, p. 105-123. (Aussi dans Philippe Lejeune, L’Autobiographie en France, Paris, 1971, p. 217-236).

19 Georges Gusdorf, Lignes de vie, t. 2, « auto-bio-graphie », Paris, Odile Jacob, 1991, p. 9 sq.

20 Ibidem, p. 490.

21 Georges Gusdorf, Lignes de vie, t. 1, « Les écritures du moi », Paris, Odile Jacob, 1991, p. 20 sq.

22 Jacques-Louis Ménétra, Journal de ma vie, présenté par Daniel Roche, Paris, Montalba, 1982.

23 Georges Gusdorf, Lignes de vie, t. 1, « Les écritures du moi », Paris, Odile Jacob, 1991, p. 22.

24 Revue d’Histoire Littéraire de la France, 75e année, n° 6 (nov.-déc. 1975).

25 Ibidem, p. 924 et 926.

26 Ibid, p. 931 sq.

27 Ibid, p. 906.

28 Georg Misch. A History of Autobiography in Antiquity, translated by E. W. Dickes, London/ Harvard, Routledge and Kegan, 1951.

29 Georges Gusdorf, « De l’autobiographie initiatique à l’autobiographie genre littéraire », Revue d’Histoire Littéraire de la France, 75e année, n° 6 (nov.-déc. 1975), p. 957-994.

30 Georges Gusdorf fut « caïman », c’est-à-dire répétiteur, des étudiants (en philosophie) de l’École Normale Supérieure de 1939 à 1948, en réalité de 1945 à 1948, puisqu’il fut prisonnier de guerre jusqu’en 1945. Son successeur fut Louis Althusser qui occupa cette fonction de 1948 à 1980.

31 Gusdorf attribue à des continuateurs le dernier volume de Misch ! p. 962.

32 Ibidem, p. 908.

33 Ibid.., p. 993.

34 John Bunyan, Grace Abounding to the Chief of Sinners, 1666.

35 Ainsi, Gusdorf s’en prend au pétainisme que Paul Ricoeur, qui fut son collègue à Strasbourg, aurait manifesté durant ses années de captivité en Allemagne, « non loin de Stettin » : Le crépuscule des illusions (voir note 12), p. 207 sq. Si Ricoeur a bien animé les « Cercles Pétain », la discussion porte sur la durée de son engagement. Paul Ricoeur lui-même aurait changé d’opinion, selon sa correspondance, au moment où la situation militaire du Reich s’est détériorée, à la fin de l’année 1942. Voir ces liens :[http://www.sens-puplic.org/spip.php?page=forum & id_articles = 537] (discussion sur l’engagement pétainiste de Ricoeur) et [http://www.fondsricoeur.fr/ photo/Bio % 20Chap % 20 % 208.pdf] (extraits de sa correspondance et de la biographie écrite par François Dosse, 2008, éd. rev. et augm.).

36 Georges Gusdorf, Le Crépuscule des illusions (voir note 10), p. 89.

37 Ibidem, p. 90.

38 Ibid., p. 99.

39 Ibid, p. 115.

40 Ibid, p. 115.

41 Ibid, p. 199 sq.

42 Ibid., p. 229 sq.

43 Ibid., p. 254 sq.

44 Ibid., p. 272.

45 Ibid., p. 307.

46 Ibid., p. 231 et 326. « Der kürzeste Weg zu sich selbst führt um die Welt herum », la formule est mise en exergue à Graf Keyserling, Das Reisetagebuch eines Philosophen, 2 vol, Darmstadt, Reichl, 1919. Notre traduction : « Pour aller jusqu’à soi, le chemin le plus court consiste à faire le tour du monde ».

47 Ibid., p. 341.

48 Ibid., p. 334 et 336.

49 Ibid., p. 381.

50 Ibid, p. 383 sq.

51 Paris, Pauvert, 1965.

52 Pierre Bourdieu, Homo Academicus, Paris, Minuit, 1984, p. 156.

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