Version classiqueVersion mobile

Les parlementaires, acteurs de la vie provinciale

 | 
Hervé Leuwers
, 
Serge Dauchy
, 
Sabrina Michel
, 
et al.

Première partie. Les parlementaires et les acteurs de la vie publique : concurrences et complémentarités

Claude Pellot, premier président du Parlement de Rouen ou intendant ?

Virginie Lemonnier-Lesage

Texte intégral

1Une recommandation adressée par Colbert, en 1672, à l’intendant de la généralité de Rouen, Jean du Creil, laisse envisager le rôle particulier joué par Claude Pellot, premier président du parlement de Normandie :

  • 1 Lett., Inst. et mém., t. IV, p. 85, citée par O’Reilly, Mémoires sur la vie publique et privée de C (...)

« Monsieur Pellot étant chef de toute la justice de la généralité en laquelle vous allez servir, il est nécessaire pour le service du roy que vous teniez avec lui une étroite et parfaite correspondance. En outre de cette raison générale, vous me ferez plaisir d’en user ainsy, par la raison de la longue amitié qui est entre luy et moi1... »

2O’Reilly, conseiller à la cour d’appel de Rouen à la fin du XIXe siècle, biographe de Pellot, souligne les liens étroits entre les deux hommes et, commentant la lettre que Colbert adresse à du Creil, affirme :

  • 2 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 171.

« Cette lettre nous est fort précieuse, car elle nous autorise à dire, et tout est là d’ailleurs pour l’attester, que Pellot, pendant sa première présidence, fut à Rouen plus intendant que l’intendant lui-même2. »

3C’est ce que nous voudrions montrer, à notre tour, aujourd’hui. D’une part, c’est un intendant qui arrive au poste de premier président en avril 1670 ; d’autre part, c’est en intendant que, dès lors, Pellot gère la ville de Rouen avec l’appui de Colbert.

  • 3 Les Isles le Bas, Les fleurs de la maison de ville de Rouen présentées aux échevins et autres offi (...)
  • 4 Pellot épouse donc en secondes noces sa belle-sœur par alliance. Les deux femmes étaient par aille (...)
  • 5 Ce deuxième volet, tout particulièrement en ce qui concerne la place accordée par Colbert au comme (...)

4Claude Pellot est effectivement très proche de Colbert, au point qu’on le qualifie parfois d’« homme de Colbert3 ». Il a épousé successivement deux parentes du ministre : Claude le Camus tout d’abord, puis Magdeleine Colbert, veuve d’Étienne-Gérard le Camus qui était le frère de Claude4. Ces liens d’amitié, entretenus par une correspondance quasi quotidienne, la protection et l’appui financier de Colbert, permettront au président Pellot d’entreprendre, à Rouen, des ouvrages comparables à ceux réalisés par l’intendant Pellot. Ces mêmes liens permettront à Colbert de voir sa politique relayée efficacement en Normandie5.

5La vie entière de Claude Pellot fut dévouée à la cause royale, essentiellement en qualité d’intendant. Ce dévouement au roi lui vaut un portrait peu flatteur d’Amable Floquet, l’historien du parlement de Normandie :

  • 6 Floquet A., Histoire du Parlement de Normandie, Rouen, 1840, t. V, p. 578.

« Claude Pellot [fut], nous dit-il, intendant dans le Poitou et dans la Guyenne pendant nombre d’années, rompu, par-delà, à l’obéissance, au zèle, au despotisme par procuration ; un premier président, enfin, tel qu’il les fallait à Louis XIV, résolu de ne plus donner, désormais, d’autre motif de sa volonté que sa volonté même6. »

6Ses lettres de provision à l’office de premier président, en date du 22 novembre 1669, sont l’occasion pour le roi de rappeler le travail mené par l’intendant Pellot au sein des différentes généralités où il a été amené à servir la royauté. Si la charge de premier président lui est accordée pour ses qualités de juriste, elle apparaît aussi comme la récompense de bons et loyaux services,

  • 7 Archives départementales de la Seine-Maritime, (désormais ADSM), C 1324. Il s’agit de l’intendance (...)

« ayant estimé ne pouvoir faire de meilleur choix que de sa personne, tant à cause de sa suffisance, capacité et grande expérience au fait de la justice, que pour reconnoistre les bons et recommandables services qu’il nous a rendus en nos conseils et dans les intendances de justice, police et finances qu’il a exercées en cinq de nos province7 ».

7Le roi, dans cette lettre, salue, entre autres, les entreprises réalisées :

  • 8 ADSM, C 1324.

« Il a, aussy, faict par nos ordres beaucoup d’ouvrages publics et, entre autres, réparé la tour de Cordouan, rendu la rivière du Lot navigable, commencé celle de Bayse, faict faire quantité de ponts et bastiments considérables8... »

  • 9 Le maintien de l’ordre et de la discipline au sein des troupes en Dauphiné, le retour à l’ordre da (...)

8Le roi énumère longuement les interventions de Pellot intendant9 et semble attendre les mêmes actions d’un Pellot premier président :

« Ce qui nous faict espérer que, dans cette charge de premier président audit Parlement de Rouen, nous et le public recevrons de la bonne conduite du sieur Pelot le fruict et l’avantage que nous nous en promettons. »

  • 10 À la suite de la révolte des Nus-Pieds, le parlement de Rouen avait été mis au pas, en 1640, par R (...)
  • 11 À la mort du premier président Jean-Louis de Faucon, en 1663, s’ouvre une période de vacance de se (...)
  • 12 Bibliothèque Municipale de Rouen (désormais BMR), Fonds Martainville, Ms. Bigot (Martainville ms. (...)
  • 13 d’Ormesson O., Journal, t. II, p. 576, cité par O’Reilly, op. cit., t. II, p. 9.

9Pellot, qui est né à Lyon, connaît déjà le parlement de Normandie. Il y avait été conseiller entre 1641 et 1648. Il s’était alors distingué par sa fidélité au roi, lors de l’affaire du semestre10, au sein de ce Parlement bouillonnant opposé au chancelier Séguier. Tout l’opposait alors à Alexandre Bigot, frondeur, qui allait devoir le recevoir, quelques années plus tard, en qualité de premier président, au sein d’un Parlement assagi. Bigot, doyen des présidents à mortier assurait l’intérim de la présidence11. Il indique dans des notes qui nous sont parvenues que Pellot a été « choisi par le roy, dès le mois de novembre 166812 ». Il ne sera pourtant nommé qu’un an plus tard. Le 22 novembre 1669, Pellot est « enfin pourvu de la charge de premier président de Rouen13 », il est reçu au sein de la compagnie le 14 avril 1670.

  • 14 ADSM 1B 198.
  • 15 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 27 : « On remarquera avec quel soin le procès-verbal a omis parmi se (...)

10Le registre secret qui relate la cérémonie fait allusion au premier passage, au sein de la compagnie, de Pellot « cy-devant conseiller en cette cour, et, depuis maistre des requestes ordinaire en son hostel, pourvu par sa majesté de l’estat, office et charge de premier président en ladite cour14 »... Pas d’allusion cette fois-ci au passé d’intendant de Pellot. O’Reilly y voit la manifestation d’une opposition parfois encore vive du Parlement à cette fonction d’intendant qui empiète sur ses prérogatives15.

  • 16 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 29, indique à tort la date du 16 avril 1670. L’auteur fait mention d (...)

11Claude Pellot, le jour même, fait un discours16. Il confesse son « si peu d’expérience du palais et si peu de connaissance des loix du pays », mais rappelle son premier passage décisif au sein de la compagnie :

  • 17 ADSM 1B 198.

« Je luy dois les premières maximes de la profession..., je me trouve maintenant, par un heureux retour, si glorieusement posté où jay autrefois pris les commencemens dans la robe, ce qui rappele, je vous l’avoue, et fortifie les sentimens d’estime que jay eus pour elle, qui me feront rechercher toute ma vie, avec zèle et attachement, les occasions de luy rendre mes très humbles services et obéissances17. »

  • 18 ADSM 1B 198.
  • 19 BMR, Ms. Y 214, Claude Pellot, Recueil d’extraits de registres secrets et ordonnances du Parlement (...)

12C’est, à son tour, son expérience d’intendant que Pellot met en avant : « Quatorze ans dans les employs des provinces qui n’ont pas tout à faict du rapport avec celle-cy (la compagnie)18. » C’est un intendant qui accède à la charge de premier président. Lorsque Claude Pellot fait réunir les plus grands arrêts de l’Échiquier et du Parlement de Normandie et qu’il fait joindre à ce recueil une notice biographique des premiers présidents, mention est encore faite de ses intendances19.

  • 20 Mélanges Colbert, vol. 157 (MF 8450), fol. 248, lettre du 14 août 1671 : « J’ay receu, Monsieur, vo (...)
  • 21 Mélanges Colbert, vol. 157 (MF 8450), fol. 248, lettre du 14 août 1671 : « L’on m’a mandé de Bordea (...)

13C’est encore à la mémoire de l’intendant Pellot que l’on fait appel en 1671, un an après son installation à la tête du Parlement de Rouen. Colbert le sollicite pour avoir son sentiment sur l’un des conseillers du Parlement de Bordeaux, décédé. Pellot donne une description du caractère et des qualités de l’homme20 et, dans le même temps, profite de sa lettre pour déplorer la qualité douteuse des jurats nouvellement nommés à Bordeaux et en dresser un portrait édifiant21. Peut-être sollicite-t-il encore les notes qu’il a rédigées sur chacun alors qu’il était intendant.

14En 1672 encore, Pellot est consulté sur la réformation des bois et forêts qu’il a faite en qualité d’intendant de Guyenne. Le 10 février 1672, il écrit à Colbert :

  • 22 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 254.

« Pour répondre à la lettre... touchant le mémoire présenté au roy concernant les bois et forests qui sont dans la province de Guyenne... je vous envoie un mémoire contenant l’estat desdites forests (de la généralité de Montauban)... Pour la généralité de Bordeaux, j’ay cherché parmi mes papiers et je n’en ay trouvé aucun mémoire22... »

15Pellot va alors prendre l’initiative de suggérer une autre réformation :

  • 23 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 254.

« Pour les forests du pays de Béarn, Soule, Labourt et Basse Navarre, elles peuvent valoir quelquechose, et nous trouvasmes qu’elles valoient bien la peine qu’on travaillat à leur réformation, j’en eus la commission mais ce fust sur la fin de mon intendance ainsi je neust pas le temps d’en pendre connaissance23. »

16Une note figure sur le verso de la lettre. Elle résume le contenu des propos du premier président et en marge est mentionné :

  • 24 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 253.

« Arrest qui commet monsieur Daguesseau et le sieur de Froidour pour procéder à la réformation des forests de lestendue du païs de Béarn, Basse Navarre, Labour et soule24. »

  • 25 Mélanges Colbert, vol. 166 bis (MF 14400), fol. 604, lettre du 13 déc. 1673.

17L’ancien intendant a été entendu. En décembre 1673, Colbert réclame encore à Pellot la liste des usurpateurs de noblesse établie lorsqu’il était intendant de Guyenne. Pellot a remis toutes les pièces de cette affaire à ses successeurs au moment de son départ. Il a pourtant conservé « un mémoire en gros » qu’il envoie au ministre25.

  • 26 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 628, n. 1.
  • 27 Prévost G. A. (éd.), Notes du premier président Pellot sur la Normandie, Rouen et Paris, 1915.

18Il faut noter une réelle continuité de méthode chez Pellot. On sait, par une notice rédigée à la mort du premier président, qu’alors qu’il était intendant, il avait fait des listes de toutes les personnes importantes des provinces où il servait le roi. Une notice présentait leurs qualités et leurs défauts, leur fortune, leurs amis et leurs ennemis. O’Reilly, à la fin du XIXe siècle déplore ne pas avoir retrouvé « ces “états”, qui seraient aujourd’hui fort précieux26 » ; Prévost a eu plus de bonheur puisqu’il a retrouvé le même type de notes établies pour la généralité de Rouen alors que Pellot était premier président27. Dans une lettre adressée à Colbert le 15 novembre 1671, on devine déjà son projet :

  • 28 Mélanges Colbert, vol. 157 bis (MF 12512), fol. 760, lettre du 15 novembre 1671.

« Je m’applique à prendre une connaissance exacte de la province et des qualitez des principaux officiers, gentilshommes, marchands et tout ce qui me peut servir dans les occasions à bien exécuter les ordres de sa majesté et les vostres quand j’en seray chargé28. »

19Ces notes qui concernent les grands de la province et, entre autres, les gens de justice, mêlent des remarques concernant les qualités humaines et de travail de ses collègues émaillées parfois de réflexions sur leur conduite, leur vie de famille ou leur fidélité au roi. Ainsi à propos du président Poirier qui sera premier président par intérim à la mort de Pellot, ce dernier note :

  • 29 Prévost G. A. (éd.), Notes du premier président Pellot sur la Normandie, p. 62. Pellot lutera cont (...)

« on le croit bien intentionné, néanmoins fort attaché à ceux qu’il veut favoriser ; sait peu vivre ; peu de capacité et peu de bien de son costé ; opposé générallement à touttes les affaires du roy, plus par humeur que pour se donner du crédit, n’en ayant pas beaucoup ; fait le dévot et un des plus entestez de sorciers29. »

20La plume de Pellot est parfois acerbe. On lit dans ses notes sur les président du parlement :

  • 30 Prévost G. A. (éd.), Notes du premier président Pellot sur la Normandie, p. 66-67.

« M. Vernouillet, peu [de] capacité et de sens, fort débauché, plus les manières d’un cavalier que d’un juge ; hardy, peu de biens ; il ne gardera pas longtemps sa charge et l’on n’y perdra pas beaucoup30. »

  • 31 Il s’agit de Jean de Creil, sieur de Soisy (5 août 1672-16 octobre 1675) et de Louis Le Blanc (20 (...)
  • 32 Pour exemple, ADSM, 1B 203, fol. 213 : « Messieurs sont allez en la grande salle des audiences ou (...)

21Il semble que Pellot ait entretenu de bons rapports avec les intendants de la généralité de Rouen, tant avec Jacques Barin de la Galissonnière qu’il trouva à Rouen à son arrivée, qu’avec les successeurs de celui-ci31. Les registres secrets du Parlement de Rouen nous montrent l’intendant siéger régulièrement aux côté du premier président32. Il est vraisemblable que Pellot fera profiter de son expérience les intendants de la généralité. On peut supposer, sinon une véritable substitution, du moins une franche collaboration. C’est ce qui transparaît dans une lettre que le premier président adresse à Colbert le 19 janvier 1672 à propos de l’affectation des revenus de la ville à des travaux qui devront y rétablir le « bon ordre ». Pellot fait part à Colbert du travail de l’intendant :

  • 33 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 130, lettre du 19 janvier 1672, de Pellot à Colbert.

« Sur quoy, je vous diray qu’il a fait son travail, après avoir fort examiné la chose, vu les comptes, entendu les échevins et principaux habitants de la ville, et receu les mémoires et éclaircissemens que je luy ai pu donner de mon costé. De sorte que si S. M. a agréable de suivre son avis, je ne doûte point que l’on n’establisse un bon ordre dans cette ville et meilleur qu’il n’a jamais esté33. »

  • 34 Mélanges Colbert, vol. 161 (MF 11289), fol. 245, lettre du 24 août 1672, de Pellot à Colbert.
  • 35 Mélanges Colbert, vol. 172 (MF 8454), fol. 95, lettre du 14 juillet 1673, de Pellot à Colbert : «  (...)

22Quelques mois plus tard, le 24 août 1672, dans une autre lettre adressée à Colbert, Pellot évoque un arrêt du Conseil à venir pour autoriser la ville de Rouen à augmenter ses revenus. Le premier président a examiné les comptes de la ville avec de la Galissonnière, intendant, et Dubasset, trésorier de France de la généralité et l’arrêt envisagé sera le bienvenu « s’il est donné conforme au projet que je vous envoie, écrit Pellot, et suivant à peu prez que nous l’avions arrêté ledit sieur de la Galissonnière et moy34 »... Une lettre de Pellot à Colbert évoque, sur le même sujet, un arrêt du Conseil concernant les dépenses de la ville que le premier président aimerait voir amendées après avoir confronté son avis et celui de l’intendant du Creil35.

23C’est essentiellement dans l’aménagement de la ville de Rouen que l’on a reconnu dans l’œuvre de Pellot les travaux d’un intendant les comparant à ceux qu’il avait été amené à réaliser dans les provinces qu’il avait fréquentées auparavant en cette qualité.

  • 36 Pavyot du Bouillon, Histoire manuscrite du Parlement, t. II, fol. 355 : « C’est à son goust pour l (...)

24Dans son histoire manuscrite du Parlement, Pavyot du Bouillon souligne son « goust pour les ouvrages publics36 »... Lorsqu’il s’est agi, au moment de la célébration du cinquième centenaire du palais du parlement de Normandie, d’évoquer la « police et grande police », c’est encore le premier président Pellot qui a retenu l’attention :

  • 37 Caude E., Le Parlement de Normandie, Paris, 1999.

« À la fin du XVIIe siècle le premier président Pellot mena une action déterminante sur la police de la ville. En véritable intendant, il tint à faire de la cité... une ville aussi “policée” que Paris37. »

  • 38 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 180-183.
  • 39 Il s’agit d’un fascicule de maître Germain l’Honoré, docteur en médecine au collège de Rouen, de 2 (...)

25Nous devons encore à O’Reilly38, le témoignage d’un médecin contemporain de Pellot qui fait du premier président le dédicataire d’un fascicule publié en 167339. L’auteur, Germain l’Honoré, rappelle le passé d’intendant de Pellot avant de saluer les réalisations du même ordre qui améliorent la ville de Rouen :

  • 40 Dans sa lettre de provision, le roi, nous l’avons vu, soulignait déjà cette réalisation.
  • 41 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 183.

« Ce que vous avez fait pour le service et pour les intérêts du roy dans quatre des plus étendues provinces du royaume... ces soins veillans à tout, par lesquels vous avez fait rétablir la Tour de Courdouan40, ce phare célèbre de la Garonne, et tous les autres ouvrages de ces païs là ; cette noble élévation, qui, vous appliquant au bien public, a changé toute la face de cette province depuis que vous y remplissez avec tant d’éclat la première place de la justice, témoin ce grand et spacieux cours ouvert aux portes de sa capitale et qui, malgré la situation de cette ville abymée dans les montagnes, produit à ses habitans la liberté d’un air plus pur et les plaisirs d’une promenade salubre et délicieuse ; cette police qui met en estat une ville qui, par le passé n’estoit signalée que par ses boues, sa négligence et sa confusion, de disputer de netteté et de commodité avec Paris... cette justice exacte par laquelle, sans acception de personnes, vous obligez de restituer au public les Eaux de ses Fontaines qu’on détournoit ou qu’on retenoit avec autant d’injustice que d’incommodité : ce sont là, Monseigneur, les choses que vous faites voir partout où vous avez paru41... »

26Un autre panégyrique adressé à Pellot par Lespeudry, avocat au Parlement de Rouen, trois ans plus tard, fait ce même rapprochement des fonctions successives du président et salue les mêmes travaux :

  • 42 Lespeudry, Panégyrique de monseigneur Pellot, premier président du Parlement de Normandie, Rouen, (...)
  • 43 Lespeudry, op. cit., p. 67.

« L’exercice de ces trois vertus (prudence, intégrité et sagesse) a paru dans les fonctions des trois emplois considérables dans lesquels il a été successivement et où il a monté comme par degré... Ces employs sont ceux de conseiller au Parlement de Rouen, d’intendant en plusieurs provinces et de Premier Président dans le même Parlement de notre ville à qui il a donné une nouvelle face par les biens qu’il lui a apportez42..., dans sa présidence, comme dans son intendance, et sa première magistrature, sa justice a paru ; il y a eu équité partout43. »

  • 44 Lespeudry, op. cit., p. 77-78 : « Monseigneur Pellot a fait ouvrir nos rues qui étoient étroites e (...)

27Comme pour le médecin l’Honoré, c’est l’assainissement de la ville, la restitution des fontaines et l’aménagement du cours qui retiennent l’attention de l’avocat44.

28Le biographe du premier président, O’Reilly, affirme lui aussi que :

  • 45 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 551.

« Les travaux publics étaient une passion chez Pellot... Nous l’avons vu à Montauban et à Agen, mais surtout à Bordeaux, pousser les édiles aux améliorations matérielles... mais comme intendant, il avait pour les travaux publics un droit qu’il n’eut plus au même degré comme premier président ; son rôle à Rouen eût donc pu sur ce point devenir moins actif, sans qu’il eût manqué à sa charge. Mais il n’en fut rien... Pellot absorba en grande partie les attributions administratives de ce dernier (l’intendant)45. »

29La marque du président Pellot se retrouve effectivement dans des travaux parfois ponctuels d’aménagement ou d’assainissement, parfois de plus grande ampleur, tous salués par les panégyristes et dont les archives nous laissent la trace. Le premier président utilisera parfois un outil propre au parlement : l’arrêt de règlement.

30Dès son arrivée à Rouen, Pellot va prendre les mesures nécessaires pour entretenir le pont aux bateaux. Le roi, dans ses lettres de provision, soulignait l’intérêt de l’intendant Pellot pour les ponts. L’auteur anonyme d’un éloge au président Pellot rappelle que celui-ci a obtenu du roi :

  • 46 Éloge anonyme, BMR, fonds Martainville, Manuscrit Bigot, (Martainville ms. Y 24), t. I (fascicule (...)

« Pour l’entretien du pont de bateaux, un des plus beaux ouvrages de l’Europe... une somme de 10 000 livres par an, qui fut imposée avec la taille sur les trois généralités de la province de Normandie pour aider à fournir à cette dépense46. »

  • 47 ADSM, 1 B 5508, arrêt du 6 mai 1670.

31Le président Pellot veille à ce qu’un arrêt de règlement soit rendu pour assurer la solidité du pont aux bateaux. Les charrettes chargées ne pourront passer et « ceux qui désireront passer avec leurs carosses mettront pied à terre en passant sur ledit pont47 ». Les échevins devront faire poser des barrières à chaque extrémité du pont et poster « des gardes pour les tenir ouvertes et fermées quand besoing sera ».

32Le rôle de Pellot dans l’assainissement de la ville est régulièrement salué. Sous sa présidence, le Parlement va prendre un arrêt de règlement interdisant aux bouchers de tuer les bêtes chez eux :

  • 48 ADSM, 1 B 5509, 1672.

« On voit tous les jours les rues et les ruisseaux des quartiers où ils demeurent tous remplis de sang et d’immondices lesquels estant arrestés par l’inégallité du pavé causent de très mauvaises odeurs dans la ville... Cela seroit très préjudiciable à la santé et neteté de la ville48. »

33Par ailleurs, les bouchers ont pour habitude de brûler des pourceaux dans les rues entraînant parfois des incendies. L’arrêt rappelle un incendie déclenché peu de temps auparavant dans la rue de la prison « où le feu auroit causé un grand incendie sy lon ny eust donné promptement du secours ». Les bouchers se verront désigner des lieux « où il ny pourra y avoir de péril pour le feu ».

  • 49 C’est ce que le premier président indique dans une lettre qu’il adresse à Colbert, citée par O’Rei (...)
  • 50 ADSM, 1B 5508, 9 août 1673.

34L’inégalité des pavés, l’arrêt le soulignait, venait aggraver la situation. Pellot s’attache à faire paver les lieux publics49 et à ce que le pavage des rues de la ville soit de bonne qualité. Par un arrêt de règlement du 9 août 1673, « la cour... a faict et faict inhibitions et deffenses à tous marchands de pavé et voituriers d’apporter en cette ville aucun pavé que du lieu d’Herblé ou environs, et qu’il ne soit de leschantillon porté par lesdits arrests et règle50 ». Le pavé qui ne correspondrait pas à l’échantillon sera « employé au pavage des cours des maisons particulières ».

  • 51 ADSM, 1 B 5508, 18 mai 1673.

35Sous la présidence de Claude Pellot, un arrêt de règlement du 18 mai 1673 prévoit encore qu’il est « fait deffenses aux particuliers demeurant sur les remparts de jeter des immondices sur le quay51 ». Le même arrêt permet, à la suite des échevins, aux vendeurs de cidre d’exposer leur marchandise sur le quai « à condition qu’ils ne pourront passer les bornes des ormes » et met à la charge des marchands « de conserver lesdits ormes plantés et d’en remplacer où il en moura ».

  • 52 Pavyot du Bouillon, dans son Histoire manuscrite du Parlement, op. cit., t. II, fol. 393, mentionn (...)

36On a vu les panégyristes saluer la netteté des rues promue par Pellot52. Toutes les occasions, même les moindres, sont bonnes pour améliorer la salubrité de la ville. Ainsi voit-on le président Pellot appuyer auprès de Colbert la demande des religieuses de la Visitation de se voir attribuer une ruelle qui séparait leurs héritages :

  • 53 Mélanges Colbert, vol. 165 (MF 145775), fol. 354, lettre du 12 août 1673.

« Cette grace ne donneroit aucune incommodité au public, au contraire luy sera utile, puisque par ce moyen on ostera cette ruelle qui est remplie d’ordures et d’immondices et ne cause que des mauvaises odeurs dans ces quatiers là53. »

  • 54 ADSM, 1 B 5508, 9 déc. 1671.

37Une autre intervention de Pellot est saluée par ses laudateurs. Le premier président a veillé à ce que les particuliers ne détournent plus l’eau des fontaines de la ville, ces particuliers seraient-ils de hauts personnages. Un premier arrêt de décembre 1671 ordonne aux particuliers qui possèdent une fontaine d’apporter au greffe du Parlement « les tiltres et concessions en vertu desquels ils prétendent debvoir jouir desdites fontaines54 ». Quelques mois plus tard, un arrêt du 13 mars 1673 rappelle l’obligation faite aux particuliers, fait état de descentes sur les lieux et constate :

  • 55 ADSM, 1 B 5508, 13 mars 1673.

« Que la pluspart desdites fontaines sont des entreprises faites sur le public qui souffre beaucoup d’incommodité par la cessation des fontaines publicques dont les eaux sont arrestées et diverties à l’usage des particuliers qui n’ont eu pour ce faire aucun tiltres vallables55. »

38Les fontaines litigieuses devront être « rebouchées, couppées, sondées et estanchées » par le fontainier de la ville. L’arrêt dresse la liste des fontaines concernées : elles appartiennent, entre autres, à un maître des comptes, au greffier de la ville, au concierge de la ville, au vicomte de Rouen ou encore à plusieurs conseillers en la Cour. Pour d’autres particuliers mentionnés par la Cour un sursis est accordé à condition de présenter des titres valables. Parmi eux, « le sieur président Turgot pour la fontaine qu’il a en sa maison ». Désormais, les échevins ne pourront plus accorder de concessions aux particuliers.

  • 56 ADSM, 12 Fi 479.
  • 57 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., fol. 7 r°-8 vo : « Les ouvrages publics quil a (...)

39À côté de ces travaux de petite ou moyenne envergure, l’ouvrage essentiel de Pellot est certainement une promenade. Il s’agit de l’aménagement du cours Saint-Paul, entre la ville et la côte sainte Catherine, qui apparaît sur un plan de la ville de Rouen publié en 170956 sous l’appellation « chemin nouveau ». Le règne de Louis XIV est alors à son apogée. La magnificence de la cour est un modèle que les agents du roi chercheront à propager dans les grandes villes de province57. C’est cette idée qui semble guider Claude Pellot. C’est ce que laisse entendre maître Lespeudry dans son panégyrique :

  • 58 Lespeudry, op. cit., p. 16-17.

« Monseigneur Pellot a fait revivre les plaisirs de notre ville que le temps sembloit vouloir abolir ; il a fait une alliance de la joye et des rys ; il a fait un mariage des graces et des passe-temps ; il est le restaurateur des divertissements publics ; il a remis en honneur les bals, les festins, les régales, les fêtes publiques, les danses, les cercles et les assemblées ; il a fait, même, des dépenses magnifiques pour cet effet58... »

  • 59 Lespeudry, op. cit., p. 81-86 : « Le cours de notre ville est encore un des effets des soins et de (...)
  • 60 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., fol. 8 ro : « Il a soutenu partout avec beauco (...)

40Le cours percé par Pellot est, selon l’avocat, dédié au bien-être des belles rouennaises59. Il s’agit aussi, bien sûr, de relayer la magnificence royale60.

  • 61 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., fol. 7 « Il n’y avoit point de promenades aux (...)
  • 62 ADSM, A/28, un contrat d’échange de biens est passé entre la ville et les révérends pères jésuites (...)
  • 63 Il s’agit du conseil de la ville.
  • 64 ADSM, A/28, 22 mars 1672.

41Les archives confirment la volonté de Pellot d’assurer, par l’aménagement de ce cours, « un des plus beaux et des plus agréables qui soit en France » selon l’auteur de l’éloge anonyme61, l’embellissement de la ville62. C’est cette volonté de magnificence qui dicte les travaux. Les registres de la ville en gardent le témoignage. Lors de l’assemblée des vingt-quatre63 du 22 mars 1672, le premier échevin informe ses confrères que le premier président Pellot sollicite « l’augmentation du cours » et qu’il lui a fait savoir « que sy la ville vouloit faire cette despense elle auroit le plus beau cours de l’Europe64 ». La ville connaît quelques difficultés financières à cette époque et le premier échevin ne manque pas de le faire savoir à Pellot. Ce dernier insiste pourtant, promettant le soutien du roi. Les termes du rapport fait à l’assemblée par le premier échevin sont éloquents quant à la détermination pour ne pas dire l’obstination de Pellot :

  • 65 ADSM, A/28, 22 mars 1672.

« Et quoy qu’ils luy eussent faict connoistre pour s’en excuser les nécessités de la ville et ses grandes debtes qui la mettoient hors destat de faire aucune despence, il (Pellot) n’avoit laissé neantmoins de leur en parler en touttes occasions et de leur promettre de bien faire valloir cette despence auprès du roy et de procurer à la ville bien d’autres avantages. En sorte que pour le satisfaire il avoit esté obligé de commencer à le faire planter d’ormes au niveau de ceux de lantien cours... L’affaire mise en délibéré, il a esté résolu de condescendre aux volontez de mondit seigneur le premier président65... »

42Pour l’augmentation de ce cours, Pellot a le souci de la perspective et de l’alignement « pour tirer une avenue adroitte ligne et au niveau des ormes de l’autre cours ». Un traité avait été passé en 1668 avec les pères jésuites pour permettre d’aménager le premier cours sur des terrains qui appartenaient à leur prieuré de Grammont, mais il n’était pas envisageable de poursuivre le cours sur ces premiers terrains cédés car « on ne le pouvoit continuer qu’il ny eust un coude ». Il fallait donc à nouveau traiter avec les pères jésuites.

  • 66 ADSM, A/28, 12 septembre 1673.
  • 67 ADSM, A/28, 12 septembre 1673.
  • 68 ADSM, A/28, 8 février 1674.
  • 69 ADSM, A/28, 8 février 1674.
  • 70 ADSM, A/28, 7 février 1675.

43Pellot ne se contente pas de susciter l’initiative des travaux, il veille à leur bon déroulement et, en l’espèce, à ce que la négociation se passe bien avec les révérends pères jésuites, au besoin en tenant des conférences à son domicile. Ainsi, un arpenteur a été chargé, en présence des parties – deux échevins et le procureur des pères jésuites – de prendre la mesure des prairies prélevées par la ville. Le père Petit, à cette occasion, remet aux échevins un mémoire selon lequel « les prayries ne sont baillées à louage que sur le pied de soixante onze livres huict sols six deniers l’acre ». L’échevin qui en fait le rapport devant l’assemblée des Vingt-quatre précise « qu’en une conférence tenue en la maison de monsieur le premier président ayant esté estimé sur le pied de quatre vingt livres l’acre, il sembloit que c’estoit une chose règlée66 ». L’estimation des prairies faite, il ne reste aux échevins qu’à délibérer sur les biens à donner en contr’échange en se basant sur l’estimation proposée par Pellot. Le choix se porte sur une maison que possède la ville, nommée la rose blanche, les échevins estimant « que le prix quelle est louée estoit à peu près ce qu’il falloit pour les satisfaire67 ». Pourtant, quelques mois plus tard, en février 1674, Dufour, premier échevin, fait part à l’assemblée des Vingt-quatre du refus des pères jésuites d’accepter la rose blanche en dédommagement « ne l’estimant pas suffisante pour les remplir et ne voulant pas leur remplacement en un seul tènement de maisons par la crainte du feu68 ». C’est encore une fois chez le premier président Pellot que se tient une nouvelle réunion « où il avoit esté jugé raisonnable de leur donner (aux pères jésuites) en autres maisons à leur choix jusques à la somme de six cens livres69 »... La négociation avec les pères jésuites n’est décidément pas facile. Lorsqu’un an plus tard, en 1675, la ville souhaite achever le cours et envisage d’en élargir l’entrée et par conséquent de prendre encore sur les terres du prieuré de Grammont, les conférences se multiplient sans aboutir. Il sera fait appel à des conseillers du Parlement « priez d’avoir agréable de juger dudit dédommagement70 ».

  • 71 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., t. I, fol. 7 v° : « Pour l’entreprise, l’exécu (...)

44Pellot semble consacrer beaucoup de son temps à la surveillance des travaux, n’hésitant pas à multiplier « les assemblées générales et particulières les jours qu’on n’entroit pas au palais71 » ni à se déplacer sur les chantiers pour surveiller l’avancement de ses projets :

  • 72 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., t. I, fol. 7 vo.

« Il alloit luy mesme visiter les travaux, pour examiner s’ils estoient exécutez conformément aux plans et aux devis qui en avoient esté faits ; sa présence les faisoit avancer et animoit les ouvriers qui recevoient souvent des marques de sa libéralité72. »

45Le poète Commire, ami du président chantera ces travaux :

  • 73 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 467 (traduction d’O’Reilly), texte latin, p. 468-469.

« Dirai-je la ville agrandie par tes travaux, améliorée à grands frais ? Une magnifique promenade ; la Seine contrainte de sentir le frein ; ses marais desséchés par une levée de terre sur lesquelles les voitures peuvent passer aujourd’hui ; des rangées d’ormes disposés avec symétrie : voilà Pellot, qui célèbre tes louanges ; voilà qui les célèbrera bien davantage encore : à mesure que ces ormes croîtront, croîtront aussi tes louanges inscrites sur leur jeune écorce73 ! »

46Pellot se préoccupe du financement de tous ces travaux. Là encore, son expérience d’intendant lui servira. Le 24 août 1672, Pellot écrit à Colbert :

  • 74 Mélanges Colbert, vol. 161 (MF 11289), fol. 245.

« Comme vous allez arrester dans peu de temps les commissions des tailles, je vous prie de résoudre la somme que S. M. agréera qu’il soit imposée dans les trois généralités de la province, pour le secours de cette ville, afin que l’on continue a la policer, embelir et y mettre un bon ordre, comme on l’a fort bien et heureusement commencé74 ».

  • 75 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 130.

47Quelques mois auparavant, Pellot sollicitait l’intervention de Colbert auprès du roi pour qu’il restitue à la ville des octrois qu’il lui avait retirés pour les réunir à ses fermes. Selon les calculs de Pellot, la ville aurait pu retirer 35 000 livres de ces octrois qu’elle avait perdus au bénéfice du roi. En contrepartie, ce dernier avait promis à la ville 10 000 livres de fonds par an qu’il versait effectivement, nous l’avons vu, « pour l’entretien de son pont, de son quay et de ses ouvrages publics75 ».

48Pellot propose alors au ministre la restitution des octrois. Le roi serait déchargé de l’entretien du pont et la ville pourrait financer le nettoiement des rues que Pellot veut accroître :

  • 76 Ibid.

« Ce qui doibt encore porter sa Majesté à faire cette grâce à cette ville, c’est que nous l’engageons à de nouvelles despenses, comme au nettoiement des rues qui n’alloit autrefois qu’à 1 900 livres, parce qu’on ne faisoit pas ce qu’il faloit, et laquelle va maintenant à près de 6 000 livres par an, à cause que l’on a bien autrement soin du nêtoiement, et que l’on oblige les tombereaux d’aller tous les jours par les rues76. »

49Avant d’en arriver à cette dernière extrémité – demander au roi la restitution des octrois – Pellot avait réfléchi à une nouvelle taxation mais avait du y renoncer et s’en ouvre à Colbert :

  • 77 Ibid., fol. 131.

« J’ay bien tasché à trouver les moyens pour faire quelque nouvelle imposition sur les denrées qui entrent dans cette ville, afin que l’on ne fut pas à charge à S. M. Mais toutes les denrées sont, ici, quasi toutes plus chargées qu’à Paris, et si fort, qu’on ne doibt plus les augmenter77... »

50Pellot a fait de Rouen la protégée de Colbert et c’est le protecteur qu’il sollicite :

  • 78 Correspondance administrative, t. II, p. 220, lettre du 31 juillet 1672, citée par O’Reilly, op. c (...)

« Je vous diray, Monsieur, que cette ville n’a pas un revenu suffisant pour subsister, et pour subvenir à ses dépenses... Mais s’estant mise sous votre protection, et estant, après Paris, la ville de France qui doit être des plus considérée, il y a lieu d’espérer que S. M. d’une façon ou d’autre, lui donnera moyen de subsister, et que, par vostre crédit, vous la tirerez de ce mauvais pas78... »

51Pellot sait qu’il peut compter sur le ministre. Quelques mois auparavant Colbert écrivait au président Pellot :

  • 79 Correspondance administrative, t. I, p. 845, lettre du 20 novembre 1671, citée par O’Reilly, op. c (...)

« Je ne manqueray pas... de contribuer, autant qu’il pourra dépendre de moy, à ce que S. M. accorde quelques fonds à la ville de Rouen, pour l’employer à sa police79. »

52Le 31 août 1672 Pellot écrit à Colbert :

  • 80 Mélanges Colbert, vol. 161 (MF 11289), fol. 288.

« Cette ville vous est fort obligée, Monsieur, de la protection que vous luy donnez au prez de sa majesté. Elle doit par ce moyen espérer de bons succez dans ses affaires80. »

53Rouen saura profiter du lien particulier qui unit les deux hommes. Nous avons vu le premier président Pellot promettre à la ville bien des avantages si elle acceptait d’embellir ses promenades. Ces avantages, reçus par l’entremise de Colbert, sollicités par Pellot, ont une contrepartie. Outre l’application scrupuleuse, en Normandie, de la politique du ministre, l’appui de Colbert à la politique d’urbanisme de Pellot aura un prix pour la ville. Ainsi, lorsque Colbert souhaite se constituer une prestigieuse bibliothèque, Pellot n’hésite pas à solliciter les échevins. Le premier d’entre eux se fait le porte parole du premier président devant ses collègues :

  • 81 ADSM, A/28, 23 mars 1682.

« Ledit sieur Dufour a remontré à la compagnie que monsieur Pellot premier président au Parlement estoit venu ces jours derniers en lhostel de ville et avoit demandé à entrer dans le chartrier pour voir plusieurs livres qui y estoient... et que la ville ayant tous les jours besoin de sa protection (celle de Colbert) elle ne se pouvoit dispenser de luy envoyer ceux que monsieur le premier président demandoit de sa part81. »

54Les échevins vont effectivement s’exécuter :

  • 82 ADSM, A/28, 23 mars 1682 : « Scavoir, une antienne bible, Bocasse en deux tomes, Valère Maxime, l’ (...)

« L’affaire mise en délibération, il a esté arresté que lon feroit porter à la maison de monsieur le premier président les livres cy après nommez82. »

  • 83 Tout particulièrement en matière de commerce, ce que nous aborderons dans une prochaine étude.

55Rouen connaîtra effectivement « de bons succez dans ses affaires ». En contrepartie, Pellot saura enrichir des précieux livres de la ville la bibliothèque du ministre ; il saura également faire appliquer en Normandie la politique de son ami Colbert83.

Notes

1 Lett., Inst. et mém., t. IV, p. 85, citée par O’Reilly, Mémoires sur la vie publique et privée de Claude Pellot, conseiller, maître des requêtes, intendant et premier président du Parlement de Normandie (1619-1683), t. II, p. 170.

2 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 171.

3 Les Isles le Bas, Les fleurs de la maison de ville de Rouen présentées aux échevins et autres officiers, le 1er janvier 1674, introduction et notes par Prévost G.-A., Rouen, 1921, p. X : « S’inspirant de la pensée de Colbert dont il était l’homme, le premier président du Parlement, Claude Pellot, sollicita et obtint une décision qui supprimait le droit d’élection des bourgeois. »

4 Pellot épouse donc en secondes noces sa belle-sœur par alliance. Les deux femmes étaient par ailleurs cousines germaines ; Magdelaine était la fille de Nicolas Colbert dont la sœur Marie avait épousé Nicolas le Camus, père de Claude. Claude Pellot obtint des dispenses du pape pour pouvoir célébrer cette union. Pour l’étude de la généalogie des Colbert, Le Camus et Pellot, cf. O,Reilly, op. cit., t. II, p. 5 sq.

5 Ce deuxième volet, tout particulièrement en ce qui concerne la place accordée par Colbert au commerce, fera l’objet d’une prochaine étude.

6 Floquet A., Histoire du Parlement de Normandie, Rouen, 1840, t. V, p. 578.

7 Archives départementales de la Seine-Maritime, (désormais ADSM), C 1324. Il s’agit de l’intendance des provinces du Dauphiné, du Poitou et du Limousin, de la généralité de Montauban et de celle de Bordeaux.

8 ADSM, C 1324.

9 Le maintien de l’ordre et de la discipline au sein des troupes en Dauphiné, le retour à l’ordre dans les marais du Poitou, l’apurement des dettes des communautés, l’assainissement des finances dans la généralité de Montauban, l’éradication des faux-monnayeurs en Guyenne, etc.

10 À la suite de la révolte des Nus-Pieds, le parlement de Rouen avait été mis au pas, en 1640, par Richelieu qui l’avait fait « semestre ». Les offices au sein du Parlement avaient été doublés et partagés en deux divisions qui exerçaient chacune un semestre. Les parlementaires voyaient ainsi le rapport et le prestige de leur charge divisés par deux. Mazarin qui ne pouvait envisager de rembourser les charges ne voulut pas supprimer le semestre. Pour une relation des évènements qui agitèrent le Parlement de Normandie, cf. Sainte-Aulaire, Histoire de la Fronde, Paris, 1827, vol 1, p. 30-31 et p. 357-360.

11 À la mort du premier président Jean-Louis de Faucon, en 1663, s’ouvre une période de vacance de sept ans. L’intérim est assuré par le président à mortier Robert de Franquetot de 1663 à 1666, puis par Alexendre Bigot de 1666 à 1670.

12 Bibliothèque Municipale de Rouen (désormais BMR), Fonds Martainville, Ms. Bigot (Martainville ms. Y 24), t. I, fol. 28 ro.

13 d’Ormesson O., Journal, t. II, p. 576, cité par O’Reilly, op. cit., t. II, p. 9.

14 ADSM 1B 198.

15 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 27 : « On remarquera avec quel soin le procès-verbal a omis parmi ses titres, le plus marquant à coup sûr, celui que le roi a mis en première ligne. Mais il semble que ce titre d’intendant fut encore pour les anciens du Parlement non avenu, comme une usurpation sur leurs attributions. Quatorze années de services, ceux-là même qui ont été décisifs pour le roi, ne comptent point pour son Parlement. Bien certainement ce fut le président Bigot qui dicta ce procès-verbal, dernières satisfactions à de vieux préjugés... »

16 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 29, indique à tort la date du 16 avril 1670. L’auteur fait mention d’un seul texte manuscrit contemporain. Les archives départementales en conservent en fait deux qui semblent de la même main malgré quelques petites variantes. ADSM 1 B 5448.

17 ADSM 1B 198.

18 ADSM 1B 198.

19 BMR, Ms. Y 214, Claude Pellot, Recueil d’extraits de registres secrets et ordonnances du Parlement de Rouen, t. I, fol. 279-280.

20 Mélanges Colbert, vol. 157 (MF 8450), fol. 248, lettre du 14 août 1671 : « J’ay receu, Monsieur, votre lettre du 12e de ce moys que vous m’avez fait l’honneur de m’escrire pour vous dire mes sentimens sur le suiet de feu monsieur Constantin, conseiller au Parlement de Bordeaux. Il estoit riche, bon justicier, homme d’honneur qui entendoit son mestier et ami de monsieur le P. Président. Je ne sache pas qu’il se soit fait signaller ny pour ny contre le service du roy durant les derniers mouvements quoyque je connoisse tous ceux de cette trempe. Pendant que j’ay esté en Guiennes il a vescu doucement et n’a pas donné suiet de se plaindre de luy. »

21 Mélanges Colbert, vol. 157 (MF 8450), fol. 248, lettre du 14 août 1671 : « L’on m’a mandé de Bordeaux qu’à la dernière nomination des jurats qui a esté faite le premier de ce moys, l’on ny a pas fait un trop bon choix. Ceux que l’on a esleu sont les sieurs Pontalier, Valoux et Sabatier ; le premier qui est ledit Pontalier a esté grand frondeur, ami intime de D ( ?), chef de l’armée qui fut roué à Bordeaux. Valoux est assez bon marchand mais il a une notte, non pas de son costé mais de celuy de son fils, lequel fit il y a quelques années la banqueroutte la plus effrontée que l’on puisse faire. Il enleva en marchandises et en effets près de trois ou quatre cent mille Livres à des marchands de Bordeaux... Le troisième qui est ledit Sabatier est un assez bon négotiant, mais peu de génie... »

22 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 254.

23 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 254.

24 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 253.

25 Mélanges Colbert, vol. 166 bis (MF 14400), fol. 604, lettre du 13 déc. 1673.

26 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 628, n. 1.

27 Prévost G. A. (éd.), Notes du premier président Pellot sur la Normandie, Rouen et Paris, 1915.

28 Mélanges Colbert, vol. 157 bis (MF 12512), fol. 760, lettre du 15 novembre 1671.

29 Prévost G. A. (éd.), Notes du premier président Pellot sur la Normandie, p. 62. Pellot lutera contre la politique du Parlement de Rouen vis-à-vis des sorciers. Cf. O’Reilly, op. cit., t. II, p. 65 et suiv., cf. également la lettre de Pellot à Colbert, Mélanges Colbert, vol. 155 (MF 8448), fol. 106.

30 Prévost G. A. (éd.), Notes du premier président Pellot sur la Normandie, p. 66-67.

31 Il s’agit de Jean de Creil, sieur de Soisy (5 août 1672-16 octobre 1675) et de Louis Le Blanc (20 novembre 1675-26 novembre 1682, révoqué pour cause de propagande janséniste ; Claude Méliand lui succèdera en septembre 1683). Pellot entretient également de bons rapports avec le gouverneur de la province, le duc de Montausier, pour lequel il lui arrive d’intervenir auprès des échevins. Pour un exemple : ADSM, A/28, 19 fév. 1678 : Pellot demande au premier échevin, au nom du gouverneur, que les adjudications et les baux portant sur un petit jardin soient annulés.

32 Pour exemple, ADSM, 1B 203, fol. 213 : « Messieurs sont allez en la grande salle des audiences ou l’audience publique a esté tenue suivant le registre d’icelle, à laquelle lesdits sieurs de Breuvron et de Thorigny et monsieur Le Blanc ont assisté ». Pellot sera encore aux côtés de la Galissonnière pour assurer la sécurité des environs de Rouen : cf. Mélanges Colbert, vol. 155 (MF 8448), fol. 154, lettre du 23 août 1670, de Pellot à Colbert : J’ay receu l’arrest que vous m’avez fait la grace de m’envoyer donnant pouvoir à monsieur de la Galissonnière et à moy de faire marcher les prévosts pour la seureté des environs de cette ville et les purger des voleurs... » Voir également Mélanges Colbert, vol. 171 bis (MF 8452), fol. 438, lettre du 9 juin 1675, de Pellot à Colbert : « Nous nous assemblasmes avant hyer monsieur le marquis de Beuvron, monsieur du Creil et moy pour tascher à régler les différents (sic) qui sont entre l’intéressé au droit nouveau sur le tabac et les marchands en détail du tabac de cette ville, de Dieppe et de quelques autres et les marchands en gros et ceux qui sont des manufactures de tabac. »

33 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 130, lettre du 19 janvier 1672, de Pellot à Colbert.

34 Mélanges Colbert, vol. 161 (MF 11289), fol. 245, lettre du 24 août 1672, de Pellot à Colbert.

35 Mélanges Colbert, vol. 172 (MF 8454), fol. 95, lettre du 14 juillet 1673, de Pellot à Colbert : « J’ay eu l’honneur, Monsieur, de vous parler et de vous écrire pour le règlement qui a été fait des dépenses de cette ville par un arrest du conseil et que quoyqu’il soit très bon et utile et que la ville en tire grands avantages, il y a néanmoins quelque chose à y changer, ainsy il vous plaira, Monsieur, de mander à monsieur de Creil qu’il voye ce règlement de concert avec moy, affinqu’en suite nous nous en mandions nos avis pour ajoûter par un autre arrest ce qui sera à propos... » Voir aussi Mélanges Colbert, vol. 171 bis (MF 8452), fol. 407, lettre du 5 juin 1675, de Pellot à Colbert : « Il y a quelque chose à changer ainsi, Monsieur, que j’ay eu lhonneur de vous le dire à l’arrest du moys d’avril 1674 servant de règlement pour la ville de Rouen de sorte qu’il sera bien à propos que vous preniez la peine d’escrire à monsieur du Creil de voir ce qu’il y aura à augmenter ou diminuer audit arrest et de vous envoyer son advis de concert avec moy. »

36 Pavyot du Bouillon, Histoire manuscrite du Parlement, t. II, fol. 355 : « C’est à son goust pour les ouvrages publics qu’elle (la ville) est redevable du magnifique cours qui règne le long de la rivière de Seine ».

37 Caude E., Le Parlement de Normandie, Paris, 1999.

38 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 180-183.

39 Il s’agit d’un fascicule de maître Germain l’Honoré, docteur en médecine au collège de Rouen, de 22 p. in-4°, imprimé à Rouen, chez A. Maurry, en 1673 « touchant la description d’un monstre dont une femme de la ville de Rouen accoucha le mois d’octobre 1672 ».

40 Dans sa lettre de provision, le roi, nous l’avons vu, soulignait déjà cette réalisation.

41 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 183.

42 Lespeudry, Panégyrique de monseigneur Pellot, premier président du Parlement de Normandie, Rouen, 1676, p. 6-7.

43 Lespeudry, op. cit., p. 67.

44 Lespeudry, op. cit., p. 77-78 : « Monseigneur Pellot a fait ouvrir nos rues qui étoient étroites et serrés ; il a fait abattre les maisons qui en déroboient la lumière ; il a fait retrancher les auvants qui aportoient de l’ombre et une grande incommodité... Ainsi monsieur Pellot a veillé à notre santé et à nos vies ; c’est un bien dont nous lui sommes redevables puisque, depuis cela, on ne voit plus de maladie universelle et contagieuse dépeupler tant de quartiers de la ville, comme auparavant. »

45 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 551.

46 Éloge anonyme, BMR, fonds Martainville, Manuscrit Bigot, (Martainville ms. Y 24), t. I (fascicule inséré au début du manuscrit Bigot), fol. 6 vo : « L’entretien du pont de batteaux, un des plus beaux ouvrages de l’Europe, coustoit beaucoup tous les ans à la ville, à cause du flus et reflus de la mer, des glaces et du passage continuel des charettes et autres voitures. Monsieur Pellot obtint de sa maiesté une somme de dix mil livres par an, qui fut imposée avec la taille sur les trois généralitez de la province de Normandie, pour ayder à fournir cette dépence. »

47 ADSM, 1 B 5508, arrêt du 6 mai 1670.

48 ADSM, 1 B 5509, 1672.

49 C’est ce que le premier président indique dans une lettre qu’il adresse à Colbert, citée par O’Reilly, op. cit., p. 569-570 : « Nous engageons... cette ville à une nouvelle despense pour les pavés des lieux publics, comme le quay, les halles, et autres places de la ville, puisque les bourgeois ne sont obligés qu’à la dépense des pavés qui sont devant leur logis ».

50 ADSM, 1B 5508, 9 août 1673.

51 ADSM, 1 B 5508, 18 mai 1673.

52 Pavyot du Bouillon, dans son Histoire manuscrite du Parlement, op. cit., t. II, fol. 393, mentionne, pour l’année 1671 : « enfin le Parlement finit ses séances par un règlement de la police généralle fort étendu pour y procurer la netteté des ruës, négligée depuis long-temps, non par faute de règlement, mais faute d’exécution ». L’auteur de l’éloge anonyme, BMR, fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., fol. 6 r°-v° : « Les rues de la ville estoient mal pavées, fort salles et puantes par les ordures qu’on y jettoit. Les avancés des bancs des boutiques, et des hauts vents, les rendoient plus étroites et embarrassantes. Il les fit repaver, et alligner tout le reste comme on les voit à présent ; on fit des cloaques publics dans plusieurs quartiers pour empescher les ordures et la puanteur qui les infectoient, et lon établit l’usage des banneaux comme à Paris pour enlever les boues des rües et des places ; par cette bonne police, la ville a esté délivrée des maladies populaires dont elle estoit souvent affligée. »

53 Mélanges Colbert, vol. 165 (MF 145775), fol. 354, lettre du 12 août 1673.

54 ADSM, 1 B 5508, 9 déc. 1671.

55 ADSM, 1 B 5508, 13 mars 1673.

56 ADSM, 12 Fi 479.

57 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., fol. 7 r°-8 vo : « Les ouvrages publics quil a fait faire par les ordres du roy, dans diverses provinces, le rétablissement de tant d’églises et d’hôpitaux, la construction de plusieurs ponts, chaussées et réparations de grands chemins, les inscriptions qu’on y voit sur le marbre en lettres d’or, sont des monuments authentiques des graces, des bienfaits de sa maiesté et des services de Monsieur Pellot. »

58 Lespeudry, op. cit., p. 16-17.

59 Lespeudry, op. cit., p. 81-86 : « Le cours de notre ville est encore un des effets des soins et de l’application de notre premier président ; il luy en revient une gloire immortelle. Cette gloire, comme ses soins,... les dames semblent luy en avoir plus d’obligation... c’est pour l’amour d’elles que le cours est fait ; c’est pour les délivrer des insultes du soleil dont les rayons semblent vouloir obscurcir leur teint et noircir leur visage à la promenade... Monseigneur Pellot a voulu élever des arbres pour opposer de l’ombre entre le soleil et elles,... c’est sous cet ombrage qu’elles jouissent paisiblement de la veue d’une vaste campagne, de prés semés de fleurs, que la nature, sans l’art, a fait croître,... en cet endroit où elles entendent un concert innocent de mille petits oiseaux qui semblent disputer à qui scaura mieux louer leur beauté. C’est encore sous ces charmants ombrages que les dames en repos conversent tranquillement, et respirent un air salutaire, en regardant le large canal de la Seine qui porte ses eaux à leurs pieds avec tant de gravité et de respect qu’elle semble leur venir rendre des hommages et des aveux, comme à leurs reines... »

60 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., fol. 8 ro : « Il a soutenu partout avec beaucoup d’honneur et de magnificence la grandeur et la dignité de ses emplois ; la dépence extraordinaire quil faisoit particullièrement dans les festes de réiouissances publiques montroit combien il estoit sensible à la gloire de sa maiesté. »

61 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., fol. 7 « Il n’y avoit point de promenades aux environs de cette grande ville pour le plaisir et la commodité du public. Il fit planter le cours qui est au bout du pont, le long de la rivière, un des plus beaux et des plus agréables qui soit en France. »

62 ADSM, A/28, un contrat d’échange de biens est passé entre la ville et les révérends pères jésuites en mai 1674 « pour avoir moyen d’agrandir et augmenter le cours de ladite ville sur le territoire dudit prieuré (de Grammont) pour l’ornement de la ville et commodité du public ». C’est encore l’embellissement de la ville qui dicte en partie les travaux d’élargissement de la porte cauchoise en 1675 ; cf. ADSM, 1 B 200, fol. 83vo, arrêt du 9 février 1675 : « On pourrait par ces moyens augmenter l’entrée de ladite porte de quatre pieds et la rue de six qui en a desjà douse ce qui seroit d’une grande commodité et décoration pour la ville et de peu de despence. »

63 Il s’agit du conseil de la ville.

64 ADSM, A/28, 22 mars 1672.

65 ADSM, A/28, 22 mars 1672.

66 ADSM, A/28, 12 septembre 1673.

67 ADSM, A/28, 12 septembre 1673.

68 ADSM, A/28, 8 février 1674.

69 ADSM, A/28, 8 février 1674.

70 ADSM, A/28, 7 février 1675.

71 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., t. I, fol. 7 v° : « Pour l’entreprise, l’exécution et l’entretien de tous ces ouvrages, aussy commodes qu’ils sont utiles au public, il tenoit des assemblées générales et particulières les jours qu’on n’entroit pas au palais. » Voir aussi Lespeudry, panégyrique, op. cit., p. 12 : « Monseigneur Pellot plus infatigable, ne se plaint point de ses travaux, de ses veilles, et de ses soins, encore qu’ils soient extrémement différens et étendus. »

72 BMR, Fonds Martainville, manuscrit Bigot, op. cit., t. I, fol. 7 vo.

73 O’Reilly, op. cit., t. II, p. 467 (traduction d’O’Reilly), texte latin, p. 468-469.

74 Mélanges Colbert, vol. 161 (MF 11289), fol. 245.

75 Mélanges Colbert, vol. 158 (MF 12513), fol. 130.

76 Ibid.

77 Ibid., fol. 131.

78 Correspondance administrative, t. II, p. 220, lettre du 31 juillet 1672, citée par O’Reilly, op. cit., t. II, p. 571.

79 Correspondance administrative, t. I, p. 845, lettre du 20 novembre 1671, citée par O’Reilly, op. cit., t. II, p. 567.

80 Mélanges Colbert, vol. 161 (MF 11289), fol. 288.

81 ADSM, A/28, 23 mars 1682.

82 ADSM, A/28, 23 mars 1682 : « Scavoir, une antienne bible, Bocasse en deux tomes, Valère Maxime, l’histoire grecque dite beau car Chardine ( ?), saint Augustin sur le traitté de la cité de Dieu, l’histoire romaine par Saluste, le régime des princes, la conqueste de Jérusalem, deux antiennes histoires de France, et une autre histoire de Charles sixième, lesquels livres seront présentez à monsieur Colbert au nom de la ville. »

83 Tout particulièrement en matière de commerce, ce que nous aborderons dans une prochaine étude.

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search