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Les noblesses françaises dans l'Europe de la Révolution

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Philippe Bourdin

Troisième partie. Noblesses provinciales

« Pères du peuple » ou « aristocrates calotins » ? La fin des chanoines-comtes de Lyon (1789-1791)

Paul Chopelin

Texte intégral

  • 1 Mémoires du Cardinal de Bernis, Paris, Mercure de France, 1986, p. 160-161.

« Comme je voyais que la faveur ne me donnait que de la considération et de l’agrément et ne me procurait d’ailleurs aucun établissement convenable, je songeai à quitter mon chapitre de Brioude pour entrer dans celui de Lyon : c’était un pis-aller honorable, que je me ménageais dans le cas où la fortune continuerait de m’être contraire. C’était d’ailleurs tenir à un corps illustre dans l’Église de France et m’assurer une retraite dans ma vieillesse. Je m’occupai donc à rassembler les titres nécessaires pour faire la preuve de seize quartiers, que le chapitre exige avant que de nommer à une place vacante […]. Mes preuves furent présentées au chapitre de la Toussaint 1748 et reçues au chapitre de la Saint-Jean de l’année suivante. On remonta même, par une distinction sans exemple, les preuves de ma filiation jusqu’en l’an 1116, ce qui dans la suite sera un beau titre pour ma famille1. »

  • 2 Jean Bart, « Féodalité », in Albert Soboul (dir.), Dictionnaire historique de la Révolution frança (...)
  • 3 Adolphe Vachet, Les anciens chanoines-comtes de Lyon, Lyon, Vitte, 1897 ; Jean Beyssac, Les chanoi (...)

1En évoquant son entrée au chapitre cathédral de Lyon en 1748, le cardinal de Bernis résume bien les deux avantages liés à sa nouvelle situation : il s’assure un revenu confortable et offre à l’ensemble de sa famille un certificat d’ancienne et authentique noblesse, par la preuve des seize quartiers sans tache de roture. Les chanoines-comtes de Lyon forment en effet, à la fin de l’Ancien Régime, un corps ecclésiastico-nobiliaire prestigieux, dans lequel bon nombre de familles aimeraient voir entrer un cadet. Si leur mission originelle reste de célébrer le culte dans la cathédrale, ils exercent également un pouvoir temporel non négligeable sur le Lyonnais. Soumis aux rois de France depuis 1307, les comtes de Lyon continuent d’entretenir tout au long du XVIIIe siècle de puissants liens féodo-vassaliques avec une partie des habitants de Lyon, au grand dam du corps de ville. Bien souvent, les historiens de la Révolution ont limité l’étude de la féodalité aux droits seigneuriaux et à leur contestation2. Cette question a bien entendu été primordiale dans le déclenchement du processus révolutionnaire qu’a connu la France à partir des années 1780, mais elle ne doit pas faire oublier que la féodalité signifie également des relations personnelles entre suzerain et vassaux, par le biais de droits et de devoirs réciproques. À Lyon, les chanoines-comtes se posent ainsi volontiers en défenseurs des habitants de la ville face à l’oligarchie consulaire, à la bourgeoisie marchande, voire à la monarchie. Ce lien synallagmatique entre les Lyonnais et leurs comtes joue un grand rôle dans les premières années de la Révolution, que ce soit, tout d’abord, pour soutenir les réformes politiques et financières entreprises par les députés de l’Assemblée nationale, puis, dans un second temps, pour engager la lutte contre ces mêmes réformes lorsqu’elles prescrivent la suppression de « l’antique Église de Lyon3 ».

Une noblesse ecclésiastique

  • 4 Statuts et reglemens du Chapitre de l’Église primatiale de Lyon, Paris, Simon et Nyon, s. d. [1778 (...)

2Si l’origine de la fondation du chapitre cathédral de Lyon reste incertaine, ses statuts ont été peu à peu mis en place au cours du Moyen Âge. Le dernier règlement en date est celui du 16 mai 1778, qui sera légèrement modifié en 17884. Depuis 1321, le nombre de chanoines est fixé à trente-deux.

3Les 32 chanoines-comtes de Lyon en 1789

  • Jean-Antoine de Castellas, doyen
  • Louis-François de Poix de Marecreux, archidiacre
  • Henri de Cordon, précenteur
  • Gaspard de Pingon, grand chamarier et grand prêtre
  • Jacques de Saint-Aubin de Saligny, grand sacristain
  • Louis de Clugny de Thénissey, grand custode
  • Charles-Marie de Gain, chantre
  • Guillaume Dupac de Bellegarde, prévôt de Fourvière
  • César de Clugny, maître de chœur
  • Annet de Poitiers de Chabans
  • François-Joachim de Pierre de Bernis
  • François-de-Sales-Louis-Augustin Barbier de Lescoët
  • Pierre de Gain de Linars
  • Claude-Gaspard de Lezay de Marnésia
  • Sylvain-Léonard de Chabanne
  • Claude-Hyacinthe de Beaumont de Saint-Quentin
  • Ferdinand-Marie-Agathange Bernard de Montessus de Rully
  • Georges-Henri Bertrand de Pouligny
  • Anne-Hérard-Paul Antoine de La Magdeleine de Ragny
  • Pierre-Antoine de Sartiges
  • Joseph Isaïe de Gourcy
  • Gaspard de Cordon
  • Charles de Sartiges de Sourniac
  • Paul-Joseph de Gourcy de Mainville
  • Toussaint-Joseph-Pierre de Bois-Boissel
  • François-Olivier-Hector de Saint-Georges
  • Jean-Joseph de Turpin
  • Hubert de Lentilhac
  • Jean-François-Jérôme de Hamel-Bellenglise
  • Frédéric d’Andlau
  • Claude-Charles de Mostuejouls
  • Pierre-Marie de Montfaucon

4Depuis au moins le XIVe siècle, le candidat à l’entrée au chapitre doit faire la preuve de sa noblesse depuis quatre générations, tant du côté paternel que du côté maternel, contribuant à faire du canonicat de la cathédrale de Lyon un bénéfice prestigieux et recherché par la noblesse. Un formulaire établi en 1619 avait en effet fixé à peu près définitivement les modalités de présentation des preuves de noblesse pour devenir chanoine-comte de Lyon. Ces preuves de noblesse sont minutieusement étudiées par les chanoines et leurs commissaires feudistes, avant qu’ils ne se prononcent sur la validité de la candidature. Les candidats éligibles doivent ensuite attendre la disponibilité d’un nouveau canonicat, par décès ou démission. L’obtention du canonicat dépend le plus souvent d’une résignation, au profit d’un parent ou d’un allié ; dans le cas contraire, les chanoines procèdent à une élection. Les preuves de noblesse rassemblées par les candidats retenus sont ensuite précieusement conservées par les familles, comme gage de l’ancienneté et de la pureté de leur lignage, comme le rappelait le cardinal de Bernis.

  • 5 Sur le fonctionnement de la justice du comté, Alphonse Sachet, « Exécution d’un parricide de Condr (...)

5Le titre de « comte de Lyon » a fait l’objet d’une contestation juridique de la part du consulat lyonnais, jaloux de son statut de « bonne ville », à partir du milieu du XVIIe siècle. La procédure s’acheva en 1725, sans que le corps municipal puisse obtenir gain de cause et le comté de Lyon existe toujours en 1789. Les chanoines représentent ainsi l’une des principales puissances seigneuriales de la province du Lyonnais, avec leurs trente-deux seigneuries à haute-justice, dont le comté de Lyon, au sein duquel Antoine Guillin de Pougelon exerce la charge de juge général depuis janvier 1788. Le ressort judiciaire du comté recouvre le quartier de la cathédrale, le « cloître Saint-Jean », sur la rive droite de la Saône, au cœur de la ville, où les comtes possèdent leur propre police5.

6D’où viennent les chanoines-comtes de Lyon en 1789 ? Comme le montre la carte ci-dessous, l’aire de recrutement est assez étendue.

7Une grande partie d’entre eux est originaire du Massif Central, principalement dans ses marges occidentales et méridionales, mais la Bourgogne constitue un autre foyer de recrutement important. On dénombre en outre trois Bugistes (Pierre-Marie de Montfaucon et les deux frères Cordon de Belley), trois Lorrains (les deux frères Gourcy et Lezay de Marnézia), deux Bretons (Bois-Boissel et Barbier de Lescoët), un Savoyard (Gaspard de Pingon), un Alsacien (Frédéric d’Andlau) et un Cambrésien (Jean-François du Hamel de Bellenglise). Cette répartition géographique est assez stable pendant tout le XVIIIe siècle. Les familles nobles du Lyonnais n’ont plus accès au chapitre depuis plus d’un siècle, car presque aucune d’entre elles ne peut satisfaire à la preuve des seize quartiers de noblesse. En 1789, les comtes sont des hommes dans la force de l’âge – les trois quarts d’entre eux ont entre 30 et 60 ans –, signe de la constante attractivité du chapitre et du renouvellement régulier des effectifs.

Répartition par âge des chanoines-comtes de Lyon en 1789

Répartition par âge des chanoines-comtes de Lyon en 1789
  • 6 Paul Chopelin, « Le débat sur le mariage des prêtres dans le diocèse de Rhône-et-Loire au début de (...)
  • 7 AN DXXIX bis 28, dossier no 277, interrogatoire de Jean-François Bonjour, maître ouvrier en soie ( (...)
  • 8 Jean Beyssac, Les chanoines de l’Église de Lyon, op. cit., p. 241 et 243.
  • 9 Mémoires du cardinal de Bernis, op. cit., p. 162.

8Les chanoines-comtes de Lyon sont des nobles avant d’être des hommes d’Église. Même si, à la fin du XVIIIe siècle, la plupart d’entre eux ont reçu la prêtrise, seule la tonsure est exigée par les statuts, afin de permettre aux moins motivés de renoncer à l’Église sans scandale, comme Charles-Antoine de Clugny, nommé chanoine-comte en 1784, qui se marie le 15 mai 1787, résignant de facto son bénéfice. À cette époque, il n’y a plus de cas de chanoines-comtes mariés toujours en place, comme cela avait pu se produire jusqu’au XVIIe siècle. La motivation sacerdotale n’est pas toujours au premier rang de leurs préoccupations, et certains chanoines à la vocation chancelante s’accommodaient des obligations dues à leurs fonctions, à une époque où le célibat ecclésiastique est loin d’être toujours respecté6. En 1791, les autorités municipales de Lyon considèrent Jean-François Bonjour, maître ouvrier en soie et présenté comme « filleul » du chanoine-comte Gaspard de Pingon, comme étant en réalité son fils naturel7. Il faut ici rappeler que certains chanoines ont connu une autre carrière, et donc un autre mode de vie, avant d’entrer dans le chapitre, notamment dans le domaine militaire propre à la noblesse. Ainsi, Ferdinand-Marie-Agathange de Rully a fait ses débuts comme page du roi en sa petite écurie, puis obtient le grade de sous-lieutenant de dragons et participe à la campagne d’Espagne pendant la guerre de Sept Ans avant d’entrer dans le chapitre. Inversement, Henri de Castellas quitte sa fonction canoniale en 1765 pour se consacrer à une brillante carrière militaire, qu’il achève avec le grade de colonel en 17898. Les chanoines-comtes n’éprouvent ainsi aucune contradiction entre leurs activités ecclésiastiques et le maintien d’un mode de vie propre à la noblesse laïque. Néanmoins, il faut souligner que cette liberté d’existence en dehors de la fonction liturgique ne rime pas avec dissipation ou libertinage, les chanoines-comtes du XVIIIe siècle sachant conserver toute leur dignité et même exiger une certaine discipline – du moins en public –, comme le rappelle avec regret le cardinal de Bernis : « Dès que je fus membre de l’Église de Lyon, je renonçai à la fréquentation des spectacles de la cour et de la ville : ce sacrifice me coûta beaucoup9. »

  • 10 Joseph Buche, L’école mystique de Lyon (1776-1847), Paris, Félix Alcan, 1935 ; Alice Joly, Un myst (...)
  • 11 Jean Audry, « Le mesmérisme à Lyon avant la Révolution », Mémoires de l’Académie des Sciences, Bel (...)

9À l’instar de nombreux nobles de leur temps, les chanoines-comtes de Lyon sont très impliqués dans la franc-maçonnerie. On les retrouve notamment au sein de la loge de la Bienfaisance, présidée par le négociant Jean-Baptiste Willermoz, fondateur dans les années 1770 d’une maçonnerie catholique néo-templière et mystique organisée dans le cadre d’un ordre des Chevaliers bienfaisants de la Cité sainte10. En 1789, sur les vingt-sept ecclésiastiques lyonnais franc-maçons que nous avons pu recenser, dix sont des chanoines-comtes de Lyon et cinq sont des bénéficiers de la cathédrale. Lorsque les théories de Mesmer sur le magnétisme animal se répandent à Lyon à partir de 1784, l’enthousiasme est grand chez Willermoz et ses disciples, notamment auprès de Jean-Antoine de Castellas, doyen du chapitre cathédral, qui se découvre rapidement des qualités de médium. Il devient célèbre pour ses dons magnétiques, multipliant les expériences réussies et les guérisons de malades, mais aussi les visions prémonitoires lui permettant de tout connaître du présent et de l’avenir. Il exerce notamment ses talents auprès de Mlle Rochette, une jeune somnambule qui prétend faire parler les morts par sa bouche et exprime les volontés d’un mystérieux « Agent inconnu », mais qui sera finalement convaincue de supercherie11. Si ces pratiques peuvent sembler extravagantes pour le premier dignitaire de la cathédrale, elles témoignent surtout de l’ambivalence du mode de vie des chanoines-comtes, à la fois défenseurs scrupuleux de la liturgie lyonnaise et acteurs majeurs de la sociabilité nobiliaire locale.

Les « Pères du peuple » : les chanoines-comtes et la grève ouvrière de 1786

  • 12 Jean Beyssac, « La sédition ouvrière de 1786 », Revue d’Histoire de Lyon, 1907, t. VI, p. 427-458. (...)

10Tout au long du XVIIIe siècle, Lyon connaît des tensions sociales qui provoquent des luttes salariales violentes entre les ouvriers du textile et la Fabrique, regroupant les négociants. Ces affrontements débouchent sur plusieurs mouvements de grève, dont certains dégénèrent en confrontations avec la maréchaussée et s’achèvent par la pendaison des meneurs. En 1744, les ouvriers en soie réussissent ainsi à contrôler la ville et à paralyser l’activité du consulat, contraignant l’intendant à demander au pouvoir central la permission de répondre à leurs revendications – principalement la hausse du tarif –, avant que le mouvement ne soit réprimé l’année suivante. Adversaires de longue date du consulat sur le plan du pouvoir temporel et n’ayant aucun intérêt économique dans les manufactures textiles, les chanoines-comtes épousent la cause des révoltés et se posent volontiers en conciliateurs lors des négociations. Cette médiation est avant tout un rappel du pouvoir féodal des comtes de Lyon, qui exercent ainsi leur devoir seigneurial de protection de leurs vassaux. Ils entretiennent de cette façon des relations étroites et paternalistes avec les ouvriers lyonnais, notamment par le moyen d’aumônes régulières lors des périodes de crises. En août 1786, une nouvelle grande grève éclate à Lyon, pour des motivations salariales, comme précédemment12. Les ouvriers en soie se soulèvent et se rassemblent hors de la ville, sur la rive gauche du Rhône, dans la plaine des Charpennes, sous la juridiction du Parlement de Grenoble. Ils sont bientôt imités par les chapeliers, très bien organisés professionnellement, qui se réunissent de leur côté dans le nouveau quartier Perrache. Comme en 1744, les chanoines-comtes entendent bien s’impliquer dans l’affaire, afin de protéger leurs « vassaux » face à l’oligarchie consulaire. Le 8 août, plusieurs chanoines se rendent au-devant des chapeliers à Perrache. César de Clugny se propose même de rédiger les revendications sous la dictée des grévistes, qui acceptent aussitôt. Il va d’ailleurs porter en personne le texte au consulat. Le même jour, deux autres chanoines-comtes accompagnent les ouvriers aux portes des prisons lyonnaises pour vérifier si aucun gréviste n’y est enfermé. Le 10 août suivant, ouvriers et chapeliers se rassemblent tous aux Brotteaux, sur la rive gauche du Rhône, et sollicitent de nouveau l’intervention du chapitre cathédral en leur faveur. Le chanoine-comte Dupac de Bellegarde laissa un récit des événements de cette journée dans une lettre à sa sœur :

  • 13 Archives d’Utrecht, fonds Amersfoort, Port-Royal 2195, lettre de Marie Dupac de Bellegarde à son f (...)

« Quatre de nos Messieurs [César de Clugny, Louis de Clugny, Gaspard de Pingon et Anne de La Magdeleine de Ragny] se déterminèrent à aller aux Brotteaux trouver cette émeute et la catéchiser. Tous ces gens n’eurent pas plutôt aperçu nos Messieurs qu’ils vinrent à eux, les priant de devenir leurs pères, comme nos Messieurs firent en 1744 dans une pareille émeute. Nos Messieurs prirent leurs demandes par écrit et leur dirent qu’ils alloient les porter au prévôt des marchands pour les faire signer […]. Nos Messieurs furent au Consulat qui accorda et signa les demandes vu, dirent-ils, la considération qu’ils avoient pour les médiateurs […]. Nos Messieurs retournèrent aux Brotteaux, munis de la signature du prévôt des marchands qui accordoit les demandes foncièrement justes, passèrent dans les rangs de ce peuple immense en leur lisant la concession de leurs demandes. Dans l’instant, on entendit que les cris redoublés : Vive MM. les comtes, les Pères des opprimés ! Vivat ! Vivat ! Ils vouloient porter en triomphe sur leurs bras nos Messieurs qui ne voulurent pas, mais tous suivirent nos Messieurs à pieds, marchant deux à deux dans le plus grand ordre […]. Tous ces gens arrivèrent dans un bon ordre jusqu’à Bellecour, où ils embrassèrent mille fois nos Messieurs13. »

  • 14 AD Rhône, 10 G 388, registre des actes capitulaires, séances du 14 août et du 1er septembre 1786.

11Au cours de l’après-midi du 10 août, le consulat, débordé par les événements, finit par renoncer à sa juridiction de police au profit du présidial : la répression peut alors commencer, appuyée par plusieurs régiments, dont celui de La Fère, cantonné à Vaise et comptant dans ses rangs le jeune sous-lieutenant Napoléon Bonaparte. Dès que l’ordonnance municipale de transfert de juridiction est connue, dans la soirée du 10 août, les deux chanoines de Clugny se rendent sur la rive gauche du Rhône pour demander aux ouvriers de regagner leur logis au plus vite. Ils organisent même la fuite du principal meneur des chapeliers, Pierre Sauvage, à qui ils donnent de l’argent pour couvrir ses frais de route, ainsi qu’une lettre de recommandation à l’un de leurs frères qui habite Pont-de-Beauvoisin. Ils conseillent aux autres ouvriers de rentrer à Lyon par petits groupes de trois ou quatre personnes, pour éviter les arrestations. Malgré ces recommandations, plusieurs ouvriers sont appréhendés par les autorités, à l’instar de Pierre Sauvage, intercepté par la maréchaussée de Bourgoin. Sauvage et deux autres grévistes, un chapelier et un ouvrier en soie, sont sommairement jugés le 11 août et pendus le lendemain sur la place des Terreaux. Le 14 août, les chanoines-comtes se réunissent capitulairement, sous la présidence de Charles-Marie de Gain, et envoient des suppliques en faveur des autres ouvriers prisonniers, adressées au garde des sceaux et au comte de Vergennes à Versailles. Ce dernier leur répond que le roi souhaite qu’il ne fût plus prononcé de peines capitales dans cette affaire14. Les chanoines-comtes apparaissent ici comme les premiers intermédiaires entre les Lyonnais et le roi, éclipsant l’archevêque. Les chanoines décident d’assurer une pension à la mère de l’un des condamnés, tandis qu’à leur demande, l’archevêque de Lyon se charge de verser une pension de 200 livres à la veuve de Pierre Sauvage et obtient du roi l’amnistie des prisonniers restants.

  • 15 Ibid., séance du 16 février 1788. Dans l’assemblée de Messieurs les souscripteurs, pour l’établiss (...)

12Malgré la répression, les ouvriers en soie ne désarment pas et continuent leurs revendications par la voie du tract et de l’affiche. Au mois de novembre 1786, le consulat fait arrêter Denis Monnet, suspecté d’être le véritable meneur de la sédition, mais il est bientôt relâché, faute de preuves, deux mois après. Les années suivantes, la situation économique ne s’améliore pas à Lyon et le chômage continue de sévir. Parmi les nombreuses initiatives menées en faveur des pauvres de Lyon, les chanoines-comtes sont toujours au premier plan. Le 17 janvier 1788, ils distribuent 6 000 livres aux familles des chômeurs et contribuent en février pour la somme de 20 000 livres à la constitution d’un établissement de bienfaisance pour les ouvriers au chômage sous le parrainage du doyen du chapitre15.

  • 16 Roger Dupuy, La politique du peuple (XVIIIe-XXe siècles). Racines, permanences et ambiguïtés du po (...)

13L’intervention des chanoines-comtes de Lyon lors des grèves de 1744 et de 1786 en fait les protecteurs déclarés des ouvriers de la ville, s’assurant ainsi des fidélités solides au sein de cette population. En 1789, ils sont encore auréolés de leur réputation de « pères du peuple », défenseurs des pauvres ouvriers face à la toute-puissante Fabrique. Ils se démarquent ainsi du pouvoir consulaire et reprennent leurs vieilles prétentions à exercer un pouvoir temporel au sein de la ville, entretenant un rapport de type féodo-vassalique avec les ouvriers. Cette alliance entre un corps ecclésiastico-nobiliaire fortuné, soucieux de préserver l’héritage d’un passé glorieux face à un corps de ville issu de la haute bourgeoisie marchande, et les couches les plus pauvres de la population lyonnaise, est l’un des éléments constitutifs de la « politique du peuple » sous l’Ancien Régime telle que la définit Roger Dupuy16. Non seulement le chapitre primatial conforte sa popularité dans la ville, mais manifeste aussi, à cette occasion, son utilité sociale, en un temps où les chanoines sont généralement vilipendés pour leur « parasitisme ».

1789 ou le temps des concessions

14En dépit des contestations curiales du printemps 1789, le chapitre cathédral de Lyon s’affirme toujours au début de la Révolution comme une autorité religieuse incontournable au sein de la ville, d’autant plus que l’archevêque réside à Versailles et n’est guère pressé de gagner son diocèse. Comme tous leurs confrères, les chanoines-comtes n’imaginent pas un instant que les États généraux, devenus Assemblée nationale constituante, puissent décider la suppression des chapitres.

  • 17 Journal historique des assemblées de l’ordre ecclésiastique pour la députation aux États généraux, (...)
  • 18 Joseph Meuret, Le chapitre de Notre-Dame de Paris, Paris, Picard, 1904, p. 176-214 ; Philippe Loup (...)

15Si les comtes de Lyon sont quelque peu malmenés lors de l’assemblée du clergé de la sénéchaussée de Lyon en mars, ils réussissent à maintenir leur ascendant sur les curés. Le 27 mars 1789, le chanoine-comte Jean-Antoine de Castellas, doyen du chapitre, est ainsi le premier député élu par le clergé de Lyon, face à Henri Reymond, le chef de file de la contestation curiale dans le Sud-Est du royaume17. De même, au cours de ces réunions, les chanoines-comtes tiennent à apparaître comme des médiateurs incontournables, garant de la bonne entente entre les trois ordres, n’hésitant pas à faire, pour l’occasion, le sacrifice de leurs privilèges fiscaux. Parvenant à ce prix à sauvegarder leur autorité morale, ils n’éprouvent nullement le besoin d’adhérer à l’Union des Chapitres de France, initié par le chapitre Notre-Dame de Paris au début de l’année 178918. Ils souhaitent ménager l’avenir en évitant de participer à une entreprise qui pourrait être jugée trop « catégorielle » et conservatrice.

  • 19 Maurice Wahl, Les premières années de la Révolution à Lyon (1788-1792), Paris, Armand Colin, 1894, (...)
  • 20 Procès-verbal de l’assemblée des trois ordres de la ville de Lyon tenue en la grande salle de l’hô (...)
  • 21 BM Lyon, fonds général, ms. 805, notes de l’abbé Duret, fo 155 ro.
  • 22 Mandement de Monseigneur l’Archevêque et Comte de Lyon qui ordonne le Te Deum et des prières publi (...)

16Pendant l’été 1789, le chapitre cathédral ne reste pas inactif et entend bien participer aux grands événements. Lorsque les Lyonnais apprennent le 29 juin la réunion des trois ordres aux États généraux, le consulat décide de faire illuminer les édifices publics pendant trois jours consécutifs. Pour ne pas être en reste, les chanoines-comtes ordonnent eux aussi des illuminations dans la partie de la ville qui dépend de leur justice et chantent un Te Deum dans la cathédrale Saint-Jean19. La nouvelle du renvoi de Necker et de la prise de la Bastille provoque la réunion, le 17 juillet, d’une assemblée des trois ordres de la ville de Lyon pour affirmer l’union des citoyens face aux troubles qui agitent le royaume. Le chapitre cathédral conserve son rôle prépondérant sur le clergé de la ville, puisque trois des cinq députés de cet ordre sont des chanoines-comtes (Clugny, Pingon et Gourcy). L’objectif de l’assemblée consiste notamment à lever les suspicions concernant la tiédeur attribuée au clergé et à la noblesse vis-à-vis des changements politiques20. L’abbé Duret note à cette époque qu’une rumeur fait état du projet d’une attaque populaire contre le chapitre cathédral et du pillage du trésor de Saint-Jean21. En participant à cette assemblée des trois ordres, les chanoines-comtes veulent ainsi donner des gages de bonne volonté à la population, d’autant plus que deux de leurs trois députés sont d’anciens médiateurs de la grève de 1786 (Pingon et Clugny). L’assemblée prononce solennellement sa fidélité à l’Assemblée nationale et réclame le retour de Necker. Un comité des trois ordres de la ville de Lyon est alors constitué afin d’« entretenir la correspondance et suivre les opérations auxquelles les circonstances et les événements subséquents pourroient donner lieu ». Le chanoine-comte de Clugny est élu président de ce comité par les députés des trois ordres, qui manifestent ainsi à nouveau leur confiance et leur respect pour le chapitre. Le 20 juillet suivant, Mgr de Marbeuf finit par publier un mandement approuvant l’union des trois ordres aux États généraux et ordonnant le chant d’un Te Deum dans la cathédrale à l’issue de la messe dominicale. Cette cérémonie se déroule le 26 juillet 1789 en présence du clergé, des corps constitués et des notables de la ville, devant lesquels les chanoines-comtes déploient à nouveau les fastes de leur liturgie22.

  • 23 AD Rhône, 10 G 389, registre des actes capitulaires de l’Église de Lyon, séance du 5 novembre 1789
  • 24 Ibid., séances du 9 novembre et du 23 décembre 1789.
  • 25 Ibid., séance du 6 novembre 1789.

17À la fin de l’année 1789, le chapitre poursuit ses activités patriotiques, notamment en détachant un de ses membres, le chanoine-comte de Gain, pour devenir aumônier de la milice bourgeoise (future garde nationale) de la section de Porte-Froc dont dépend la cathédrale. Il entend également poursuivre ses prodigalités à l’égard des ouvriers, car c’est le moment ou jamais pour les chanoines-comtes de rappeler leur fonction de « pères du peuple ». Le 5 novembre 1789, le chapitre décide en effet de venir en aide aux « pauvres ouvriers réduits à la misère par le manque de travail » en leur versant une aide de 300 livres par mois23. Le lendemain ou le surlendemain de cette décision, le chapitre apprend le décret du 2 novembre 1789 qui nationalise les biens d’Église et instaure le salariat des ecclésiastiques par l’État. Bien que dépouillés de leur patrimoine, les chanoines-comtes de Lyon n’estiment pas encore leur existence menacée et font contre mauvaise fortune bon cœur en poursuivant leur engagement patriotique au sein de l’espace politique local. Il s’agit désormais de sauver ce qui peut encore l’être. Profitant de ce que le décret du 2 novembre ne soit pas encore promulgué à Lyon, ils se séparent de leur plus riche devant d’autel pour une somme de 4 240 livres qui servira à honorer leur engagement auprès des ouvriers lyonnais au chômage, pour lesquels ils achètent, en décembre, soixante-douze balles de riz du Piémont pour la somme de 3 000 livres24. Signe de leur confiance dans l’avenir, ils valident le 6 novembre les preuves de noblesse de Victor-Louis-Joseph de Mostuéjouls, qui pourra postuler à un canonicat dès qu’une place sera vacante25.

  • 26 Liste des citoyens éligibles aux places municipales de la ville de Lyon, conformément aux décrets (...)
  • 27 Opinions impartiales des officiers municipaux sortis par la voix du sort, s. l. n. d. [1790], p. 2

18Le chapitre semble aussi s’investir dans les premières élections municipales lyonnaises en mars 1790, jouant à cette occasion de leur influence auprès de la population. Bien qu’éligibles, les chanoines-comtes ne sollicitent pas les suffrages de leurs concitoyens, mais favorisent certainement l’élection de leur protégé, le curé-custode de Sainte-Croix Joseph Courbon, à la fonction d’officier municipal le 26 mars26. Publié après le scrutin, un pamphlet hostile à la nouvelle municipalité, jugée trop conservatrice, dénonce la cabale menée par le chapitre pour permettre l’élection de leur protégé : « Il a servi, pendant ses jeunes ans, de lutrin vivant à MM. les comtes de Lyon. C’est à leur protection qu’il a dû son avancement dans le clergé et c’est par un reste de leur crédit dans la section Porte-Froc qu’ils parvinrent à l’élever au rang de municipe27. » Si l’implication des chanoines-comtes est très probable dans l’élection de Courbon, il faut aussi rappeler que ce dernier a certainement bénéficié de l’appui de l’influente Société philanthropique de Lyon dont il est l’un des membres éminents.

  • 28 Discours à Messieurs les officiers municipaux de Lyon, prononcé dans l’église cathédrale, le jour (...)
  • 29 Procès-verbaux des séances des corps municipaux de la ville de Lyon, publiés par la municipalité d (...)

19Cette première élection municipale est aussi l’occasion pour le chapitre de faire une démonstration de patriotisme et de mettre un terme à plusieurs centaines d’années de relations tendues avec l’autre puissance temporelle de la ville. Chanoines-comtes et officiers municipaux se concertent en effet pour organiser la cérémonie d’installation de la nouvelle municipalité, afin de célébrer la concorde patriotique qui règne désormais entre eux. Le 12 avril 1790, après avoir été proclamés à l’hôtel de ville, le maire et les officiers municipaux se rendent processionnellement à la cathédrale Saint-Jean, suivis des notables de la commune, des officiers de la garde nationale de Lyon, des présidents, scrutateurs et commissaires des trente-deux assemblées électorales d’arrondissements. À leur arrivée, ils sont accueillis par tout le clergé de la cathédrale, chanoines-comtes et habitués, soit une soixantaine de prêtres au total, et des délégations de tous les chapitres de la ville, avant d’aller écouter la grand’messe et de chanter un Te Deum. L’union entre tous les citoyens, fruit de la régénération révolutionnaire, est à nouveau réaffirmée avec force. Le chapitre cathédral déploie tout son faste. Cette cérémonie se présente surtout comme une rupture avec la période précédente où le consulat se cantonnait dans la collégiale de Saint-Nizier lors de la proclamation des échevins, témoignage de la rivalité pluriséculaire qui l’opposait au chapitre de la primatiale. La Révolution a enfin permis de rétablir la concorde entre les citoyens de Lyon28. Le soir, après la cérémonie, la procession retourne à l’hôtel de ville, pendant que des feux d’artifices sont tirés sur les quais de la Saône et du Rhône, que les édifices publics s’illuminent et que les cloches de toutes les églises de la ville sonnent à la volée29.

  • 30 Ibid., p. 145-146 et 148-149. Liste des députés du clergé et de leur vote le 19 juin 1789.
  • 31 Mgr de Marbeuf, qui occupait alors les fonctions de ministre de la Feuille des bénéfices.
  • 32 BM Lyon, fonds général, ms. 5430, lettre de Périsse-Duluc à Jean-Baptiste Willermoz (8 juillet 178 (...)
  • 33 Ibid., lettre du 27 décembre 1789.
  • 34 Ibid., lettre du 12 mai 1790.
  • 35 Ibid., ms. 805, notes de l’abbé Duret, fo 189 vo ; Courier de Lyon, t. V, no 11, 13 mai 1790, p. 9 (...)

20En dépit de ces manifestations unanimistes, le chapitre cathédral s’inquiète de plus en plus de l’évolution politique. Certains membres s’engagent dès lors dans une opposition plus ou moins ouverte à la Révolution. C’est notamment le cas de Jean-Antoine de Castellas, doyen du chapitre et député aux États généraux. Il manifeste très tôt son opposition au processus révolutionnaire qui va transformer les États généraux en Assemblée nationale constituante. Le 19 juin 1789, il vote contre la vérification des pouvoirs des députés en commun, refusant l’union du clergé avec le Tiers état30. Au même moment, Périsse-Duluc, député du Tiers état de Lyon, membre comme Castellas de la loge de la Bienfaisance, entretient une correspondance régulière avec Jean-Baptiste Willermoz dans laquelle il l’informe, entre autres choses, de l’attitude du doyen des chanoines-comtes. Le 8 juillet 1789, il se plaint déjà du comportement hostile de Castellas à son égard, le décrivant comme « tout livré à l’archevêque de la Feuille31 » et « aristocrate opiniâtre sans savoir pourquoi et sans aucune sensibilité pour des calamités publiques qu’il n’a pas même les moyens d’entrevoir32 ». Il confirme ce jugement en décembre, ajoutant que Castellas « hait cordialement les patriotes33 ». Enfin, le 12 mai 1790, il précise que le doyen siège désormais parmi les « Noirs », au côté droit de l’Assemblée34. Castellas fait alors partie des adversaires du décret du 13 avril refusant de reconnaître la religion catholique comme la religion nationale. Le côté droit s’est en effet abstenu de voter ce décret et proteste contre ce qu’il considère comme une marque d’apostasie. Le 19 avril 1790, pour la première fois, l’Assemblée nationale se scinde en deux camps bien distincts : 295 députés, dont 33 évêques, signent la Déclaration d’une partie de l’Assemblée nationale sur le décret rendu le 13 avril concernant la religion et sollicitent des adhésions auprès de leurs commettants. Castellas envoie de multiples exemplaires de cet imprimé à Lyon, provoquant l’indignation de la presse patriote locale, ainsi que des notables de la ville, réunis en assemblée extraordinaire les 9 et 13 mai suivants35. Le clergé de Lyon est obligé de se désolidariser publiquement de cette initiative. L’incident laisse néanmoins apparaître une première fêlure au principe d’union national. À travers l’engagement contre-révolutionnaire de son chef, le chapitre cathédral de Lyon est désormais sur la sellette. Pour les « patriotes », les chanoines incarnent la sclérose de l’Église de France et il est grand temps de s’en débarrasser. Conscients de la méfiance, voire de l’hostilité qu’ils suscitent désormais, les comtes de Lyon n’assistent pas à la grande communion patriotique du Camp fédératif du 30 mai 1790 et à la fête de la Fédération du 14 juillet suivant. Pour eux, le temps de la ferveur révolutionnaire est bien fini.

L’engagement contre-révolutionnaire

  • 36 BM Lyon, fonds général, ms. 805, notes de l’abbé Duret, fo 207 ro.
  • 37 Copie de la lettre de M. Frachon, aide-major général de la Garde nationale de Lyon à MM. du chapit (...)
  • 38 Arrêt bougrement sensé rendu par le Père Duchêne et le Compère Mathevon, juges de la contestation (...)
  • 39 Courier de Lyon, t. VII, no 32, 6 octobre 1790, p. 271-273.
  • 40 Abbé Delarue [et abbé Charles Gros], Mémoire historique et raisonné pour les bénéficiers perpétuel (...)
  • 41 Délibération du directoire du district de Lyon sur la Constitution civile du clergé, Lyon, Aimé de (...)

21Le décret du 12 juillet 1790 établissant la Constitution civile du clergé résonne comme un coup de tonnerre, mettant un terme brutal à l’existence des chapitres : « Les dignités, canonicats, prébendes, demi-prébendes, chapelles, chapellenies, tant des églises cathédrales que des églises collégiales, et tous les chapitres réguliers et séculiers de l’un et l’autre sexe sont, à compter du jour de la publication du présent décret, éteints et supprimés sans qu’il puisse jamais en être rétabli de semblable » (titre I, art. 20). L’instant de surprise passé, les chanoines-comtes décident immédiatement d’entrer en résistance. Ne tenant aucunement compte de la dissolution de leur corps, ils poursuivent leurs activités au grand jour et accumulent les provocations en attendant la promulgation du décret à Lyon (le 2 octobre 1790). Ils continuent notamment de porter leurs décorations et d’afficher leur dignité dans l’habillement. Malgré les campagnes de dons patriotiques, le chanoine-comte Gaspard de Pingon affecte encore de porter des boucles d’argent à ses chaussures et se fait insulter par des patriotes dans la rue36. Lorsque l’aide-major général de la garde nationale de Lyon demande à faire célébrer un office à la mémoire des gardes nationaux tombés à Nancy, suivi d’une oraison funèbre prononcée par un de ses officiers, les chanoines-comtes s’opposent à ce qu’un laïc fasse un discours dans l’enceinte de la cathédrale qu’ils considèrent toujours comme leur propriété. Au début du mois d’octobre 1790, ils font imprimer leur réponse, dans laquelle ils rappellent les droits de l’Église de Lyon37. Il s’attirent aussitôt la réplique d’un pamphlétaire patriote anonyme qui, sous le nom de Père Duchesne, s’en prend violemment aux « jean-foutres » du chapitre : « Ces bougres-là ne finiront donc jamais avec leurs protestations fanatiques38 ? » le Courier de Lyon se fait également l’écho de l’affaire et raille les querelles de préséance surannées entretenues par les comtes39. Certains prêtres bénéficiers de la cathédrale profitent de ces attaques pour réclamer un partage des revenus et la suppression du chapitre, conformément à la Constitution civile du clergé. Dans un volumineux mémoire imprimé afin de porter leurs griefs devant le public, ils soulignent l’inutilité sociale des chanoines-comtes, présentés comme des parasites40. La riposte ne se fait pas attendre. Le 1er novembre 1790, les comtes réunissent bruyamment un chapitre général, auquel sont convoqués tous les clercs dépendant de la cathédrale, tandis qu’est rappelé solennellement le règlement du chapitre, avec les obligations et les prérogatives de chacun de ses membres. Le 7 novembre, ils se rendent en procession jusqu’à l’église d’Ainay, où ils chantent la messe et rappellent la suprématie de leur corps sur les autres chapitres de la ville. Pour le procureur syndic du district de Lyon, c’est la provocation de trop. Le lendemain, 8 novembre, il prononce un violent réquisitoire contre les agissements illégaux du chapitre et demande l’application immédiate de la Constitution civile du clergé à Lyon41.

  • 42 Chapitre extraordinaire de l’Église cathédrale, métropolitaine et primatiale de Lyon, s. l. n. d. (...)
  • 43 De par Messieurs les maire et officiers municipaux de la ville de Lyon. Ordonnance qui supprime un (...)
  • 44 Société des Amis de la Révolution, Adresse aux citoyens ou réponse à différentes calomnies publiée (...)
  • 45 Réponse à la protestation du ci-devant chapitre des ci-devant comtes de Lyon, faite par l’universi (...)
  • 46 Réponse à huit caffards, anciennement comtes de Lyon, par le marguilliers des comtes, s. l. n. d. (...)
  • 47 AN, DXXIX bis 14, registre no 156, pièce no 7, adresse de la Société populaire des Amis de la Cons (...)
  • 48 Henri Hours, « Introduction », in René Lacour (dir.), Archives départementales du Rhône. Répertoir (...)
  • 49 Il s’agit de Joseph-Isaïe de Gourcy, Guillaume Dupac de Bellegarde et Paul-Joseph de Gourcy-Mainvi (...)
  • 50 Extrait des registres du directoire du département de Rhône-et-Loire. Du 8 janvier 1791, Lyon, Aim (...)

22Le chapitre décide alors de jouer son va-tout et d’exprimer publiquement son refus de la Constitution civile du clergé. Le 10 octobre 1790, huit jours après la promulgation du décret à Lyon, huit chanoines-comtes (Charles-Marie de Gain, Gaspard de Pingon, Louis de Clugny de Thénissey, Guillaume Dupac de Bellegarde, Annet de Poitiers de Chabans, Marie-Ferdinand-Agathange Bernard de Rully, Joseph-Isaïe de Gourcy et François-Olivier-Hector de Saint-Georges) s’étaient réunis et avaient pris la délibération de s’opposer à la nouvelle législation religieuse. Cette délibération est imprimée en abondance, avant d’être affichée et distribuée publiquement le 11 novembre 1790. Afin que nul n’ignore la position du chapitre cathédral, toutes les administrations en reçoivent un exemplaire. Le chapitre refuse sa dissolution, car son existence est inhérente au siège épiscopal de Lyon, dont il exerce la juridiction spirituelle en cas de vacance. Il estime également devoir attendre la décision du Saint-Siège sur la Constitution civile du clergé : « En conséquence, il continuera ses fonctions sacrées et canoniales jusqu’à ce que la force physique y mette un obstacle invincible42. » Pour la première fois à Lyon, un corps ecclésiastique marque officiellement sa rupture avec la Révolution. L’impact de cet imprimé, abondamment diffusé dans les rues de Lyon, aux dires de la municipalité, est forcément considérable vu l’importance du réseau clientélaire entretenu par les chanoines-comtes. Les autorités locales s’empressent de condamner la délibération du chapitre et de faire imprimer à leur tour les arrêtés pris en conséquence. Tous associent l’initiative des chanoines-comtes à une ultime et vaine tentative de maintenir la féodalité et de ralentir la vente des biens nationaux43. Pour la municipalité, il est inutile de discuter des droits du chapitre, puisque ce corps a été irrémédiablement dissout, et il faut se contenter de punir des rebelles à la loi : « Il s’agit bien d’examiner aujourd’hui, de discuter sur les droits réels ou chimériques du ci-devant chapitre de Lyon ! Ce chapitre n’est plus. Sa grandeur, sa noblesse, son importance, contraires aux vrais principes évangéliques, se sont évanouies. » La Société des Amis de la Révolution de Lyon publie à son tour une protestation44, tandis que plusieurs pamphlets anonymes sont mis en circulation pour contrer la délibération du chapitre. La violence du ton est à la mesure de l’effroi suscité par cette déclaration contre-révolutionnaire : les chanoines-comtes deviennent des « porcs engraissés des dîmes de Sion », des « rebelles à la nation », des « traîtres » et des « sales bêtes » auxquelles il faut « casser la pipe entre les dents45 ». Pour délégitimer la position des comtes, les auteurs insistent sur la suppression légale du titre comtal : « On ne vous appellera plus Messieurs les Comtes, mais bien M. Gain, M. Pingon, simplement, comme tous les honnêtes gens46. » L’Assemblée nationale est conjointement saisie de l’affaire par la municipalité, le district, le département et la Société populaire des Amis de la Constitution qui demandent un décret contre le chapitre47. Le 13 novembre, le district ordonne une perquisition dans les archives du chapitre afin de trouver l’original du registre de délibérations et de le saisir comme pièce à conviction. Les recherches sont vaines et les archives sont mises sous scellés. C’est vraisemblablement à cette occasion que plusieurs caisses d’archives sont dissimulées par l’abbé Sudan, archiviste du chapitre, dans les combles d’une chapelle de la cathédrale où elles seront retrouvées en 191548. Plusieurs chanoines-comtes résidant hors de Lyon se désolidarisent alors de leurs confrères et envoient des lettres de soumission aux décrets de l’Assemblée nationale49. La lettre patriotique du chanoine-comte Gourcy de Mainville sera d’ailleurs publiée en janvier 1791 aux frais du département, preuve de l’importance prêtée à la position des anciens comtes auprès de l’opinion publique lyonnaise50.

  • 51 Archives parlementaires, t. XVIII, p. 666-668.
  • 52 Amable Audin, La conspiration lyonnaise de 1790 et le drame de Poleymieux, Lyon, Éditions lyonnais (...)

23Un mois après, l’affaire prend une autre tournure : l’opposition religieuse rejoint l’opposition politique. Dans l’été 1790, l’ancien premier échevin de Lyon, Jacques Imbert-Colomès, avait préparé un plan de soulèvement de Lyon contre l’Assemblée nationale. Il prévoyait notamment de faire venir le roi à Lyon d’où il partirait à la reconquête du pays. Mais le complot est mal organisé, et les fuites sont nombreuses. Le 9 septembre, à l’Assemblée nationale, le député Voidel fait lecture d’une lettre saisie dans la correspondance de la marquise de Persan où il est fait mention à demi-mot du prochain dénouement d’une conspiration. Interrogée par le Comité des recherches, la marquise de Persan avoue que son correspondant est Henri de Cordon, chanoine-comte de Lyon. Sur la proposition de Martineau, l’Assemblée dirige une information contre le chanoine qui a alors déjà émigré51. L’affaire en reste là, mais l’engagement contre-révolutionnaire d’un membre du chapitre cathédral de Lyon est ainsi révélé au grand jour. Le 8 décembre, les officiers municipaux de Lyon sont informés de l’existence d’un complot royaliste et, le 10, ses principaux chefs, Terrasse de Tessonnet, Guillin de Pougelon et le marquis d’Escars, sont arrêtés. Ils avaient été dénoncés par Denis Monnet, ancien maître-garde de la corporation des ouvriers en soie, l’un des meneurs de la grève de 1786, très influent auprès de ses confrères et contacté pour cette raison par les conspirateurs52.

24Au cours de l’enquête qui suit, les chanoines-comtes de Lyon apparaissent comme les acteurs centraux de la conspiration. Leur fonction traditionnelle de « pères du peuple » fait d’eux des intermédiaires de choix pour rallier les ouvriers lyonnais à la contre-révolution. Denis Monnet explique ainsi avoir été engagé par le chanoine-comte Gaspard de Pingon dans ce but :

  • 53 Décret sur la conspiration de Lyon, précédé du rapport fait à l’Assemblée nationale, au nom de son (...)

« Il y a trois mois environ […] que le sieur Pingon, ci-devant comte de Lyon, par l’entremise du nommé Bonjour, son fils naturel, m’engagea à me rendre chez lui. Il me combla de caresses, me parla de la confiance que les ouvriers avoient en moi et du pouvoir que j’avois sur les esprits. Il me vanta les services que les ci-devant chanoines avoient rendus au peuple, les bienfaits qu’ils avoient répandus sur les ouvriers. Ils peuvent en attendre encore, me dit-il, s’ils se prêtent à nos vues dans un moment où la Révolution anéantit le commerce de Lyon. Ces vues n’ont rien de criminel. Il s’agit seulement d’arrêter les progrès des enragés de l’Assemblée nationale qui ne respectent rien. Sans doute le peuple de Lyon ne verra pas de sang froid vendre les biens du clergé et surtout ceux des comtes de Lyon. Je fis confidence de cette ouverture au sieur Privat et, d’après son conseil, je parus me prêter aux vues du sieur Pingon. Celui-ci me fit venir chez lui plusieurs fois. Après quelques conférences, sans doute il me jugea digne de sa confiance et me présenta au sieur d’Escars, capitaine à la suite dans le régiment d’Artois, dragons53. »

  • 54 AN, DXXIX bis 28, registre no 177, interrogatoire de Jean-François Bonjour (12 janvier 1791) ; déc (...)
  • 55 AN, DXXIX bis 27 B, registre no 273, pièce no 4, lettre de la municipalité de Lyon à l’Assemblée n (...)
  • 56 Léopold Niepce, « Les archives de la Primatiale de Lyon », Revue lyonnaise, 1885, t. X, p. 422-443

25Les trois chanoines-comtes engagés dans le complot – Rully, Cordon et Pingon – n’avaient pas été choisis au hasard. Ils étaient des amis de longue date des chefs de la conspiration, dont certains étaient d’anciens condisciples de la loge de la Bienfaisance. Un frère de Cordon était ambassadeur du roi de Sardaigne à Paris, tandis que Guillin de Pougelon est l’ancien juge seigneurial du chapitre cathédral. Au fil de l’enquête, les dépositions se succèdent et accablent Gaspard de Pingon, notamment celle de son « filleul », Jean-François Bonjour, maître-ouvrier en soie54. Plus qu’un intermédiaire, Pingon fait figure de véritable agent recruteur de la conspiration. Quant à Rully, il avait été désigné par les conjurés pour convaincre Louis XVI de venir à Lyon. Il avait même été reçu en audience par le roi le 12 novembre, jour de l’envoi aux administrations lyonnaises de la protestation du chapitre contre la Constitution civile du clergé, mais n’avait pu convaincre Louis XVI de gagner Lyon. Pour échapper aux arrestations, les trois chanoines-comtes impliqués prennent la fuite. Gaspard de Pingon quitte la ville à la mi-décembre en compagnie de son confrère Rully. Déguisés en bourgeois et se faisant passer pour des marchands drapiers, ils espèrent passer la frontière, mais sont arrêtés à Belley le 21 décembre 1790. Pingon, aumônier du roi de Sardaigne depuis 1769, présente un passeport en bonne et due forme. Il est autorisé à repartir, mais son compagnon, titulaire d’un faux passeport, est contraint de rester à Belley plusieurs jours avant d’être autorisé à quitter la France55. Les quelques chanoines-comtes restés à Lyon décident alors de se faire oublier. La saisie des archives du chapitre, en mars 1791, tire un trait définitif, aux yeux des autorités, sur l’histoire pluriséculaire d’un corps désormais voué aux gémonies56.

26La découverte de la conspiration de Lyon marque une étape importante dans l’histoire religieuse de la ville pendant la Révolution : auprès de l’opinion publique, les chanoines-comtes ont lié le combat spirituel contre la Constitution civile du clergé avec le combat temporel contre l’Assemblée nationale. Les chanoines-comtes ont ainsi volontairement fourni à leurs adversaires un argument promis à un bel avenir.

  • 57 AN, C 183, dossier 108, lettre de l’archevêque et des comtes de Lyon au roi (20 février 1791).

27Le 20 février 1791, les chanoines-comtes, de concert avec l’archevêque de Lyon, écrivent au roi pour lui demander de renoncer à faire appliquer la Constitution civile du clergé dans le comté de Lyon. Se référant au traité de rattachement du Lyonnais au royaume de France, passé entre Philippe le Bel et les comtes de Lyon en 1307, ils rappellent que le roi s’était engagé à respecter les droits et les propriétés de l’Église de Lyon en échange de la soumission vassalique de l’archevêque et des chanoines. En autorisant l’application de la Constitution civile du clergé à Lyon, Louis XVI rompt le traité conclu entre le suzerain et ses vassaux. Les comtes de Lyon somment le roi de s’expliquer, sans quoi ils s’estimeraient dégagés de leur devoir de fidélité57. Mais la menace n’est que de pure forme. Les chanoines-comtes sont bien conscients de la vacuité de leur pouvoir féodal : il serait inimaginable, dans les conditions politiques de 1791, de proclamer l’indépendance du Lyonnais, pour non-respect du traité de 1307 par la monarchie ! Aussi dérisoire soit-elle, cette ultime tentative de résistance à la Constitution civile du clergé prouve l’attachement des chanoines-comtes à leurs droits et prérogatives seigneuriales, tout en marquant leur effacement définitif de la scène politique lyonnaise.

  • 58 Roger Devos, « Les tribulations d’un gentilhomme savoyard sous la Révolution : Aimé-Vincent-Gaspar (...)
  • 59 Jean Beyssac, Les chanoines de l’Église de Lyon, op. cit., p. 243.
  • 60 AM Lyon, 2 I 6, registre des passeports de la municipalité de Lyon (1791-1793).
  • 61 Augustin Theiner (éd.), Documents inédits relatifs aux affaires religieuses de la France (1790 à 1 (...)
  • 62 Ibid., p. 239.
  • 63 Procès-verbaux des séances des corps municipaux de la ville de Lyon, op. cit., vol. III, p. 357 (s (...)
  • 64 AN, DXXIX bis 22, dossier 238, affaire Bois-Boissel (mars-avril 1791).
  • 65 AM Lyon, 306 WP 6, liasse no 4, liste des prêtres abdicataires de Commune-Affranchie (1793-1794) ; (...)

28La découverte de la conspiration de 1790 marque la fin de l’influence politique des chanoines-comtes dans la ville. Ils bénéficient théoriquement d’une pension confortable indexée sur leurs revenus, mais les retards de paiement s’accumulent et ils éprouvent la plus grande difficulté à récupérer une avance sur leur traitement. De toute façon, plusieurs d’entre eux ont déjà opté pour l’exil hors de France. Gaspard de Pingon part se réfugier chez son frère, dans le château de Marlioz, d’où il est chassé en septembre 1792 lors de l’invasion de la Savoie58. Arrêté à Belley en compagnie de son collègue Cordon, Ferdinand-Marie-Agathange de Rully est mis en liberté le 27 décembre 1790, date à laquelle il passe en Savoie, puis en Suisse où il fixe sa résidence à Solleure59. Le décret du 26 août 1792 obligeant les prêtres réfractaires à quitter le territoire de la République provoque l’émigration de deux autres chanoines-comtes encore présents à Lyon : Saint-Georges quitte la ville le 7 septembre 1792, suivi par Louis de Poix le 11 septembre suivant60. Depuis Paris, le doyen Jean-Antoine de Castellas parvient à gagner l’Angleterre. Certains réussissent à entrer dans l’État pontifical, comme Louis de Clugny ou Joseph-Isaïe de Gourcy de Mainville qui trouve refuge chez les dominicains de Pérouse en 1793-179461. D’autres chanoines-comtes choisissent un exil intérieur, dans leur famille ou chez des amis. C’est le cas de Guillaume Dupac de Bellegarde qui se retire à Toulouse au milieu de l’année 1791, avant d’y mourir le 9 mars 179362. Certains de leurs confrères restent malgré tout à Lyon, soit en se cachant, soit en manifestant leur patriotisme pour échapper à la suspicion. Cette dernière option est suivie par le comte Barbier de Lescoët qui fait publiquement don de ses croix pectorales à la patrie en novembre 179263. En revanche, Toussaint de Bois-Boissel, vicaire général de Mgr de Marbeuf, devient l’un des principaux chefs du clergé réfractaire lyonnais, organisant la diffusion de pamphlets contre la Constitution civile du clergé dans la ville au début de l’année 1791. Cette activité lui vaut d’être enfermé pendant quelques semaines dans l’ancienne maison des lazaristes, puis dans la forteresse de Pierre-Scize, avant qu’il ne parte en émigration à la fin de 179164. Pendant la Terreur, les chanoines-comtes encore présents à Lyon se cachent. Aucun d’entre eux n’est arrêté, car ils bénéficient sans doute de solides protections au sein d’une partie de la population, qui reste attachée aux « pères du peuple ». Un seul d’entre eux, Pierre de Gain de Linars, abdique ses fonctions ecclésiastiques le 21 frimaire an II (11 décembre 1793). En août 1794, il obtient un certificat de civisme du comité révolutionnaire du canton de la Raison, qui nous indique que le « citoyen Pierre Gain, ex-chanoine » n’a pas quitté les environs de la cathédrale, puisqu’il demeure « place du Temple de la Raison, no 3065 ». Cette abdication ne lui sera d’ailleurs jamais pardonnée, ses confrères cessant dès lors tout rapport avec lui. En 1799-1800, alors que le chapitre essaie de se réorganiser pour gérer le diocèse après la mort de Mgr de Marbeuf, un avis de recherches est lancé par les chanoines-comtes encore présents à Lyon pour connaître la résidence de leurs confrères. À cette époque, Marie-Ferdinand-Agathange de Rully, Gaspard de Cordon, Anne de La Magdeleine de Ragny et Louis de Clugny résident à Lyon. En avril 1800, Charles de Sartiges, qui a élu domicile à Paris, faubourg Saint-Germain, écrit à son collègue Rully pour donner des nouvelles des autres comtes :

  • 66 Archives diocésaines de Lyon, 1 II 11, lettre du chanoine-comte Charles de Sartiges à Ferdinand de (...)

« J’ai ouï dire que Linars et Gourcy n’avoient point quitté Lyon. Je présume que leur conduite vous a empêché de les convoquer. Mettez-moi au fait de leur conduite, elle ne m’étonnera pas. Donnez-moi des nouvelles du bon Lescoët. Où est-il ? De Poix et Pouligny sont dans leur famille en Berry. Vous pouvez leur écrire. Je suis bien aise que vous ayez reçu du doyen une réponse satisfaisante. Turpin arrive à Paris sous peu de jours. Je ne doute pas qu’il vous fasse passer sa procuration. Qu’est devenu le pieux Beaumont et tous les Cordon66 ? »

  • 67 AD Rhône, 4 M 275, dossier Saint-Georges, lettre du ministre de la Police au préfet du Rhône (5 fr (...)
  • 68 Archives diocésaines de Lyon, 1 II 11 : copie d’une lettre de l’abbé Verdollin (22 novembre 1800).
  • 69 Jean Beyssac, Les chanoines de l’Eglise de Lyon, op. cit., p. 238.

29Olivier-Hector de Saint-Georges rentre d’émigration en juillet-août 1800 et obtient de Fouché la permission de s’installer à Lyon où il reste sous la surveillance du commissaire général de police67. En septembre 1800, Toussaint de Bois-Boissel regagne Lyon à son tour, depuis son exil munichois, suivi par Henri de Cordon le mois suivant68. Jean-Antoine de Castellas, doyen du chapitre, ne parviendra jamais à les rejoindre, car il tombe accidentellement de la passerelle du bateau qui devait le ramener en France et trouve ainsi la mort à Douvres le 10 décembre 180269.

30Le chapitre comtal de Lyon ne fut jamais reconstitué, laissant la place à un chapitre concordataire à la fonction purement liturgique. En 1815, les derniers comtes de Lyon encore vivants envoyèrent une pétition au comte d’Artois pour obtenir le rétablissement du comté de Lyon, mais leur demande n’aboutit jamais, face à l’opposition résolue des autorités civiles et religieuses locales. Le temps des seigneuries ecclésiastiques était bien fini.

Notes

1 Mémoires du Cardinal de Bernis, Paris, Mercure de France, 1986, p. 160-161.

2 Jean Bart, « Féodalité », in Albert Soboul (dir.), Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris, PUF, 1989, p. 442-446.

3 Adolphe Vachet, Les anciens chanoines-comtes de Lyon, Lyon, Vitte, 1897 ; Jean Beyssac, Les chanoines de l’Église de Lyon, Lyon, Grange, 1914 ; Alphonse Sachet, Le pardon annuel de la Saint-Jean et de la Saint-Pierre à Saint-Jean de Lyon (1392-1790), t. II, Lyon, Chez l’auteur, 1918 ; Arthur Jeannin, Le chapitre de la Primatiale de Lyon. Sa Constitution intime avant 1789. Notes historiques (1789-1933), Lyon, Imprimerie des Missions africaines, 1933 ; Paul Chopelin, « Le chapitre primatial et la cathédrale de Lyon pendant la Révolution », Bulletin de la Société historique, archéologique et littéraire de Lyon, 2004-2005, t. XXXIV, p. 273-329.

4 Statuts et reglemens du Chapitre de l’Église primatiale de Lyon, Paris, Simon et Nyon, s. d. [1778], 30 p.

5 Sur le fonctionnement de la justice du comté, Alphonse Sachet, « Exécution d’un parricide de Condrieu dans le cloître de Saint-Jean au XVIIIe siècle », Bulletin de la Diana, 1924-1926, t. XXII, p. 169-194.

6 Paul Chopelin, « Le débat sur le mariage des prêtres dans le diocèse de Rhône-et-Loire au début de la Révolution (1789-1792) », in Chrétiens et Sociétés (XVIe-XXe siècles), no 10, 2003, p. 69-94.

7 AN DXXIX bis 28, dossier no 277, interrogatoire de Jean-François Bonjour, maître ouvrier en soie (12 janvier 1791).

8 Jean Beyssac, Les chanoines de l’Église de Lyon, op. cit., p. 241 et 243.

9 Mémoires du cardinal de Bernis, op. cit., p. 162.

10 Joseph Buche, L’école mystique de Lyon (1776-1847), Paris, Félix Alcan, 1935 ; Alice Joly, Un mystique lyonnais et les secrets de la franc-maçonnerie (1730-1824), Mâcon, Protat, 1938 ; Albert Ladret, Le Grand Siècle de la Franc-Maçonnerie. La Franc-Maçonnerie lyonnaise au XVIIIe siècle, Paris, Dervy-Livres, 1976.

11 Jean Audry, « Le mesmérisme à Lyon avant la Révolution », Mémoires de l’Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Lyon, 1924, t. XVIII, p. 57-101 ; Émile Dermenghem (éd.), Jean-Baptiste Willermoz. Les sommeils. Journal des premiers sommeils écrits de demoiselle Jeanne-Gilberte-Rosalie Rochette, du 29 mars au 4 mai 1785. Correspondance inédite, Paris, La Connaissance, « Les documents ésotériques », 1926 ; Christine Bergé, L’au-delà et les Lyonnais. Mages, médiums et francsmaçons du XVIIIe au XXe siècle, Lyon, LUGD, 1995.

12 Jean Beyssac, « La sédition ouvrière de 1786 », Revue d’Histoire de Lyon, 1907, t. VI, p. 427-458. Sauf mention contraire, tous les faits mentionnés sont extraits de cet article très bien documenté.

13 Archives d’Utrecht, fonds Amersfoort, Port-Royal 2195, lettre de Marie Dupac de Bellegarde à son frère Gabriel, comportant une copie d’une lettre de Guillaume Dupac de Bellegarde, chanoine-comte de Lyon, à sa sœur (11 août 1786).

14 AD Rhône, 10 G 388, registre des actes capitulaires, séances du 14 août et du 1er septembre 1786.

15 Ibid., séance du 16 février 1788. Dans l’assemblée de Messieurs les souscripteurs, pour l’établissement de la Caisse philanthropique, tenue le 18 du courant mois d’avril, chez M. le doyen des Comtes de Lyon, Lyon, Imprimerie de la Ville, 1788, 4 p.

16 Roger Dupuy, La politique du peuple (XVIIIe-XXe siècles). Racines, permanences et ambiguïtés du populisme, Paris, Albin Michel, 2002, p. 100-105.

17 Journal historique des assemblées de l’ordre ecclésiastique pour la députation aux États généraux, Lyon, Imprimerie du Confalon, 1789, 120 p. ; Tableau des noms de Messieurs de l’ordre du clergé de la ville et ressort de la sénéchaussée de Lyon qui ont comparu à l’assemblée générale des trois ordres de ladite sénéchaussée, tenue et présidée par M. le lieutenant général, dans l’église des Cordeliers de Saint-Bonaventure de ladite ville, Lyon, Aimé de La Roche, 1789, 11 p. Détail des événements dans Paul Chopelin, Ville patriote et ville martyre. Une histoire religieuse de Lyon pendant la Révolution (1788-1805), thèse de doctorat en histoire moderne (dir. Bernard Hours), 2006, vol. 1, p. 129-151.

18 Joseph Meuret, Le chapitre de Notre-Dame de Paris, Paris, Picard, 1904, p. 176-214 ; Philippe Loupès, Chapitres et chanoines de Guyenne aux XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Éditions de l’EHESS, 1985, p. 403-408.

19 Maurice Wahl, Les premières années de la Révolution à Lyon (1788-1792), Paris, Armand Colin, 1894, p. 90-133.

20 Procès-verbal de l’assemblée des trois ordres de la ville de Lyon tenue en la grande salle de l’hôtel commun de ladite ville, présidée par Messieurs les Prévôt des marchands et échevins de la ville, y commandant, à laquelle ont assisté un très grand nombre de citoyens de tout état, Lyon, Imprimerie de la Ville, 1789, 23 p.

21 BM Lyon, fonds général, ms. 805, notes de l’abbé Duret, fo 155 ro.

22 Mandement de Monseigneur l’Archevêque et Comte de Lyon qui ordonne le Te Deum et des prières publiques pour les États Généraux du royaume, Lyon, Aimé de La Roche, 1789, 4 p.

23 AD Rhône, 10 G 389, registre des actes capitulaires de l’Église de Lyon, séance du 5 novembre 1789.

24 Ibid., séances du 9 novembre et du 23 décembre 1789.

25 Ibid., séance du 6 novembre 1789.

26 Liste des citoyens éligibles aux places municipales de la ville de Lyon, conformément aux décrets de l’Assemblée nationale, acceptés par le roi, Lyon, Aimé de La Roche, 1790, VIII-96 p. ; Pierre Belda, « L’installation de la première municipalité lyonnaise sous la Révolution », Cahiers d’Histoire, 2000, t. XLV, no 3, p. 415-440.

27 Opinions impartiales des officiers municipaux sortis par la voix du sort, s. l. n. d. [1790], p. 2.

28 Discours à Messieurs les officiers municipaux de Lyon, prononcé dans l’église cathédrale, le jour de leur inauguration, par M. l’abbé de Poix, comte de Lyon, archidiacre de la même église, Lyon, Aimé de La Roche, 1790, 8 p.

29 Procès-verbaux des séances des corps municipaux de la ville de Lyon, publiés par la municipalité d’après les manuscrits originaux (1787-an VIII). Deuxième partie. Administration municipale de 1790 et 1791, Lyon, Imprimerie nouvelle lyonnaise, 1901, p. 1-4.

30 Ibid., p. 145-146 et 148-149. Liste des députés du clergé et de leur vote le 19 juin 1789.

31 Mgr de Marbeuf, qui occupait alors les fonctions de ministre de la Feuille des bénéfices.

32 BM Lyon, fonds général, ms. 5430, lettre de Périsse-Duluc à Jean-Baptiste Willermoz (8 juillet 1789).

33 Ibid., lettre du 27 décembre 1789.

34 Ibid., lettre du 12 mai 1790.

35 Ibid., ms. 805, notes de l’abbé Duret, fo 189 vo ; Courier de Lyon, t. V, no 11, 13 mai 1790, p. 94 et no 16, 19 mai 1790, p. 138-140.

36 BM Lyon, fonds général, ms. 805, notes de l’abbé Duret, fo 207 ro.

37 Copie de la lettre de M. Frachon, aide-major général de la Garde nationale de Lyon à MM. du chapitre, adressée à M. de Pingon, chamarier-président, s. l. n. d. [1790], 3 p. Cet imprimé contient surtout la réponse argumentée du chapitre à la requête de la garde nationale de Lyon.

38 Arrêt bougrement sensé rendu par le Père Duchêne et le Compère Mathevon, juges de la contestation pendante par devant le tribunal de l’opinion, entre M. Frachon, aide-major, demandeur, et les abbés de Saint-Jean, ci-devant comtes de Lyon, défendeurs, s. l. n. d. [1790], 7 p.

39 Courier de Lyon, t. VII, no 32, 6 octobre 1790, p. 271-273.

40 Abbé Delarue [et abbé Charles Gros], Mémoire historique et raisonné pour les bénéficiers perpétuels de l’Église de Lyon, s. l., 1790, 238 p.

41 Délibération du directoire du district de Lyon sur la Constitution civile du clergé, Lyon, Aimé de La Roche, 1790, 8 p.

42 Chapitre extraordinaire de l’Église cathédrale, métropolitaine et primatiale de Lyon, s. l. n. d. [1790], 8 p. Cette délibération est accompagnée d’une Lettre de l’Église cathédrale, métropolitaine et primatiale de Lyon adressée à MM. les administrateurs du département, des districts de la ville et de la campagne, et des municipalités, Lyon, 1790, 1 f.

43 De par Messieurs les maire et officiers municipaux de la ville de Lyon. Ordonnance qui supprime un écrit ayant pour titre Chapitre extraordinaire de l’Église cathédrale, métropolitaine et primatiale de Lyon, contenant cinq pages d’impression, précédé d’une lettre signée De Gain et suivi d’un formulaire d’un serment en latin, comme attentatoire au respect et à la soumission due aux décrets de l’Assemblée nationale, sanctionnés par le roi. Du 12 novembre 1790, Lyon, Aimé de La Roche, 1790, 6 p. ; De par Messieurs les maire et officiers municipaux de Lyon, juges de police de ladite ville. Ordonnance concernant l’exécution de celle du 12 de ce mois qui a supprimé un écrit ayant pour titre Chapitre extraordinaire de l’Église cathédrale, métropolitaine et primatiale de Lyon. Du lundi 15 novembre 1790, Lyon, Aimé de La Roche, 1790, 3 p. ; Arrêté du Conseil général du département de Rhône-et-Loire, concernant une délibération du ci-devant chapitre de l’Église cathédrale de Lyon, Lyon, Bruyset, 1790, 4 p. ; Georges Guigue (éd.), Procès-verbaux des séances du Conseil général du département de Rhône-et-Loire (1790-1793), Trévoux, 1895, vol. 1, séance du 12 novembre 1790, p. 39-40, 13 novembre 1790, p. 42, 15 novembre 1790, p. 44-47.

44 Société des Amis de la Révolution, Adresse aux citoyens ou réponse à différentes calomnies publiées dans des libelles contre l’Assemblée nationale, suivie de quelques observations sur la protestation du ci-devant chapitre de Lyon, s. l. n. d. [1790], 22 p.

45 Réponse à la protestation du ci-devant chapitre des ci-devant comtes de Lyon, faite par l’université de Saint-Maurice-en-Bresse, associée et digne émule de la Sorbonne, s. l. n. d. [1790], 16 p. ; Lettre du fils aîné du père Duchêne sur les Sociétés des Amis de la Constitution, s. l. n. d. [1790], 7 p., texte reproduit in Pierre-Marie Gonon, Bibliographie historique de la ville de Lyon pendant la Révolution française, Lyon, Storck, 1844, p. 521.

46 Réponse à huit caffards, anciennement comtes de Lyon, par le marguilliers des comtes, s. l. n. d. [1790], texte reproduit in Albert Metzger et Joseph Vaesen (éd.), Lyon en 1790, Lyon, George, 1882, p. 183-186

47 AN, DXXIX bis 14, registre no 156, pièce no 7, adresse de la Société populaire des Amis de la Constitution de Lyon à l’Assemblée nationale (12 novembre 1790) ; pièce no 8, lettre de la municipalité de Lyon à l’Assemblée nationale (13 novembre 1790) ; pièce no 10, lettre du directoire du district de Lyon à l’Assemblée nationale (15 novembre 1790) ; AD Rhône, 1 L 258, lettre des députés de Lyon au directoire du département de Rhône-et-Loire (17 novembre 1790) ; Georges Guigue (éd.), Procès-verbaux des séances du Conseil général du département de Rhône-et-Loire, op. cit., vol. 1, séance du 22 novembre 1790, p. 67, 1er décembre 1790, p. 100.

48 Henri Hours, « Introduction », in René Lacour (dir.), Archives départementales du Rhône. Répertoire numérique détail des sous-séries 1 G à 10 G, Lyon, Imprimerie nouvelle lyonnaise, 1959, p. IX-X.

49 Il s’agit de Joseph-Isaïe de Gourcy, Guillaume Dupac de Bellegarde et Paul-Joseph de Gourcy-Mainville. Georges Guigue (éd.), Procès-verbaux des séances du Conseil général du département de Rhône-et-Loire, op. cit., vol. 1, séance du 16 novembre 1790, p. 48-49, 19 novembre 1790, p. 57-58 et 11 décembre 1790, p. 143.

50 Extrait des registres du directoire du département de Rhône-et-Loire. Du 8 janvier 1791, Lyon, Aimé de La Roche, 1791, 4 p.

51 Archives parlementaires, t. XVIII, p. 666-668.

52 Amable Audin, La conspiration lyonnaise de 1790 et le drame de Poleymieux, Lyon, Éditions lyonnaises d’art et d’histoire, 1984 ; Emmanuel Vingtrinier, La Contre-Révolution. Première période 1789-1791, Paris, Émile-Paul, 1924.

53 Décret sur la conspiration de Lyon, précédé du rapport fait à l’Assemblée nationale, au nom de son Comité de Recherches, par Charles Voidel, membre de ce comité. Séance du 18 décembre au soir, Paris, Imprimerie nationale, 1790, p. 5.

54 AN, DXXIX bis 28, registre no 177, interrogatoire de Jean-François Bonjour (12 janvier 1791) ; déclaration de Philibert-Auguste Delormas (17 janvier 1791).

55 AN, DXXIX bis 27 B, registre no 273, pièce no 4, lettre de la municipalité de Lyon à l’Assemblée nationale (26 décembre 1790) ; AM Lyon, 2 I 28, copie d’une lettre de la municipalité de Lyon à celle de Belley (26 décembre 1790) ; BM Lyon, fonds général, ms. 805, notes de l’abbé Duret, fo 243 ro ; Lettre écrite de Belley sur l’arrestation de MM. de Pingon et de Rully, ci-devant comtes de Lyon, en date du 22 décembre 1790, s. l. n. d. [1791], 4 p.

56 Léopold Niepce, « Les archives de la Primatiale de Lyon », Revue lyonnaise, 1885, t. X, p. 422-443.

57 AN, C 183, dossier 108, lettre de l’archevêque et des comtes de Lyon au roi (20 février 1791).

58 Roger Devos, « Les tribulations d’un gentilhomme savoyard sous la Révolution : Aimé-Vincent-Gaspard de Pingon (1748-1819) », Revue savoisienne, 1994, p. 75-86.

59 Jean Beyssac, Les chanoines de l’Église de Lyon, op. cit., p. 243.

60 AM Lyon, 2 I 6, registre des passeports de la municipalité de Lyon (1791-1793).

61 Augustin Theiner (éd.), Documents inédits relatifs aux affaires religieuses de la France (1790 à 1800) extraits des archives secrètes du Vatican, Paris, Firmin Didot, 1858, vol. II, p. 637-655 ; Jean Beyssac, Les chanoines de l’Église de Lyon, op. cit., p. 240.

62 Ibid., p. 239.

63 Procès-verbaux des séances des corps municipaux de la ville de Lyon, op. cit., vol. III, p. 357 (séance du 7 novembre 1792).

64 AN, DXXIX bis 22, dossier 238, affaire Bois-Boissel (mars-avril 1791).

65 AM Lyon, 306 WP 6, liasse no 4, liste des prêtres abdicataires de Commune-Affranchie (1793-1794) ; certificat de civisme en faveur du citoyen Pierre Gain (7 fructidor an II- 24 août 1794).

66 Archives diocésaines de Lyon, 1 II 11, lettre du chanoine-comte Charles de Sartiges à Ferdinand de Rully (26 avril 1800).

67 AD Rhône, 4 M 275, dossier Saint-Georges, lettre du ministre de la Police au préfet du Rhône (5 fructidor an VIII- 23 août 1800).

68 Archives diocésaines de Lyon, 1 II 11 : copie d’une lettre de l’abbé Verdollin (22 novembre 1800).

69 Jean Beyssac, Les chanoines de l’Eglise de Lyon, op. cit., p. 238.

Table des illustrations

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Titre Répartition par âge des chanoines-comtes de Lyon en 1789
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