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Les campagnes du Lauragais à la fin du Moyen Âge

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Marie-CLaude Marandet

Sixième partie : Signes de crise, signes de reconstruction

Texte intégral

  • 1 Ce thème n’est pas très novateur, il a été traité et avec des sources plus riches par, entre autre (...)

1Les sources à but fiscal, plaintes des bénéficiers, listes de subsides et procurations, demandes de révision de feux, suppliques pour échapper à l’impôt, donnent un tableau peu brillant, nous l’avons vu, de l’économie lauragaise, à la fin du Moyen Âge. Ce tableau est-il exact ? A-t-on eu une rétractation des terres cultivées, liée à la baisse démographique, à des fuites de tenanciers ? Comment évolue la campagne entre 1380 et le début du xvie siècle ? Assiste-t-on à une crise permanente et forte ? Une reconstruction précoce ? Des tentatives de reconstruction successives ? Note-t-on des différences selon les terroirs ? Arrive-t-on à un monde de plus en plus plein, une parcellisation des exploitations et à partir de quand1 ?

2Les documents lauragais disponibles ne constituent pas toujours le meilleur endroit pour approcher ces problèmes. Les quelques registres de reconnaissances ne montrent guère de signes traduisant une évolution. Le même nombre de tenanciers et de parcelles, à quelques unités près, réapparaît d’un registre à l’autre, avec les mêmes oblies, arrières-acaptes et droits de justice. On n’y trouve que très peu de nouvelles inféodations de parcelles et aucune inféodation de grande portion de territoire. Le moindre indice a dû être traqué dans les livres d’estimes et, surtout, dans les registres notariés.

I. D’APRÈS LES REGISTRES NOTARIÉS

  • 2 Tous ces indices : défrichements, nouveaux accensements, constructions nouvelles ont déjà été util (...)

3Ont été relevés systématiquement, dans les registres, tous les actes signes de crise : mentions de terres abandonnées (hermes, terres infertiles, malholasses...), déguerpissements de tenanciers, arrérages d’oblies, et tout ce qui pouvait être interprété comme un signe de reprise : essarts, construction de fermes... Les renseignements obtenus concernent surtout les tenures qui ne constituent qu’une partie des biens-fonds ruraux. On voit apparaître, particulièrement, l’action des seigneurs ; ils manifestent le souci de contrôler leurs tenanciers en leur faisant reconnaître leurs tenures, remettent en valeur les terres vacantes en les réaccensant2.

4En Lauragais oriental, nouvelles inféodations et reconnaissances représentent 7,75 % des transactions portant sur des biens-fonds ruraux (sur un total de 877 actes), contre 15,2 % dans le Terrefort occidental (sur un total de 1 315 actes). Nous avons vu que les lauzimes étaient deux fois plus nombreuses en Lauragais occidental qu’en Lauragais oriental, mais que, pourtant, les tenures étaient plus fréquentes dans cette dernière zone. Ces chiffres signifient-ils que les seigneurs directs du Lauragais occidental contrôlent mieux leurs tenanciers que ceux de l’est, ou qu’ils réagissent parce que la situation est pire ?

Nouvelles inféodations et reconnaissances

Nouvelles inféodations et reconnaissances

5Les nouveaux accensements et, dans quelques registres notariaux, les séries de reconnaissances au profit d’un même seigneur, représentent, à certains moments, un fort pourcentage des transactions concernant les biens immobiliers ruraux. Deux périodes sont plus riches en nouvelles inféodations que les autres : 1380-1410 et 1431-1471 (avec un corpus plus réduit que dans les années 1380-1410) ; les reconnaissances sont, elles aussi, plus fréquentes fin xive et, dans une moindre mesure, entre 1451 et 1470. Inféodations et reconnaissances sont contenues dans un petit nombre de registres notariaux dans lesquels un ou des clients constituent une sorte de terrier ; dans le registre 3 E 10159 de Montgiscard, qui couvre la période 1383 à 1391, elles représentent 31,29 % des transactions portant sur des biens ruraux (87/278 actes) ; dans le registre 3 E 10137, toujours de Montgiscard, des années 1458-1461, 29,26 % (24/82 actes). Les nouvelles inféodations du registre 3 E 9470 (1482-1489) de Castelnaudary correspondent à 47,61 % des transactions mais le corpus total des actes concernant des biens ruraux est très réduit. Les véritables registres de reconnaissances conservés ne se situent pas toujours dans ces tranches chronologiques. Ceux de l’archevêque de Toulouse semblent réalisés à peu près tous les 10 ans. Quelques familles nobles suivent régulièrement leurs tenures, Says de Montesquieu et ses descendants tiennent à jour leur registre, des reconnaissances sont faites en 1372, 1386, 1387, 1390, 1391, 1392, 1394, 1397, etc. Chaque changement de tenancier est noté sous forme de lauzime de vente ou d’échange, jusqu’en 1425. Le livre de reconnaissances d’Anglaise de Roqueville débute en 1392, les reconnaissances sont ensuite faites, dans ce même livre, régulièrement, au collège de Mirepoix, entre 1447 et 1480.

  • 3 Wolff (Ph.), Les marchands..., op. cit., pp. 49-50.

6Si le deuxième moment où les seigneurs interviennent, d’après les registres de notaires, se situe après la fin de la guerre de Cent ans, moment logique de reconstruction, le premier, entre 1380 et 1410, se produit alors que la situation est moins favorable. Le Toulousain subit la guerre franco-anglaise, entrecoupée de quelques trêves, la révolte des Tuchins, puis la guerre liée à la succession de Gaston Fébus. Les compagnies de routiers ont été toutefois chassées, pour l’essentiel, entre 1390 et 1392, et emmenées en Lombardie. Philippe Wolff note que « la région connaît, de 1391 à 1415 environ, une vingtaine d’années de relatif répit », bien que « de temps à autre se rallument des querelles féodales »3.

7Si l’on regarde de plus près les biens inféodés, en prenant l’exemple des registres de notaires de Montgiscard qui sont beaucoup plus riches que ceux de Castelnaudary, que donne-t-on en tenure ?

  • 4 148 biens sont inféodés par 127 actes.

Types de biens inféodés4.

Types de biens inféodés4.

8Les biens accensés sont, pour l’essentiel, des biens-fonds ruraux : parcelles de terre, fermes et, sous la rubrique « autres » : un vivier, une « rivaleria », deux aires, une motte de moulin à vent ; douze seulement sont situés en ville (cinq ostals, quatre bordes et trois « locale »). Si l’on considère uniquement les parcelles isolées, elles font majoritairement partie de l’ager, constituées à 48,73 % de terres labourables, à 15,96 % de vignes, à 13,44 % de prés. Saltus et silva sont rarement inféodés, si ce n’est pendant la période 1404-1410 où, pour un faible corpus, ils représentent 28,57 % des parcelles isolées ; ils atteignent même 38,46 % du corpus encore plus réduit de la période 1446-1461. Les tenures-blocs, inféodées sous les appellations de campmas, bories, territoire (un cas) et « toutes les terres » (un cas) (ces deux dernières probablement dépourvues de bâtiments) correspondent à 8,66 % des actes. Quelques-unes semblent découpées sur les réserves et données pour la première fois en tenure. D’autres éléments de la réserve peuvent être concédés en métayage ou fermage, nous l’avons vu.

  • 5 Un emplacement de maison (locatam), quatre emplacements au marché, un four, deux moulins.
  • 6 Les reconnaissances portent sur un pré, deux vignes, un ostal, 19 parcelles de terre, deux territo (...)
  • 7 A.D.A., 3 E 9470.

9Dans l’est du Lauragais, 35 inféodations portent sur des biens ruraux, huit sur des biens urbains5. Les deux tiers des biens ruraux, comme à Montgiscard, font partie de l’ager, seules trois terres en herm sont inféodées en 1409-1410 et deux bosigas, fin xve et début xvie siècle6. Onze territoires, de plusieurs dizaines de sétérées, dépourvus de bâtiments, sont inféodés à la fin du xve siècle7, ils correspondent à des exploitations découpées sur la réserve royale. On trouve aussi, dans les collines de la Piège, le bail à fief d’un village entier, Cumiès (cf. infra).

A. La période 1380-1410, une première reconstruction (?)

  • 8 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., p. 135.

10Il est impossible de savoir si des tentatives de reconstruction se sont produites, en ce qui concerne les censives, entre 1350 et 1380, après les vides causés par la peste. Une seule des maîtrises consacrées au Lauragais aborde la question, celle de Rémi Guimbail : à Pexiora, 40 % des tenures recensées en confronts sont abandonnées à la mi-xive siècle, mais des réaccensements se produisent tout de suite, dans les années 1348-1350, pour les meilleures terres, probablement8.

  • 9 A.D.H.G., 3 E 10159.
  • 10 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 85 r° à 91 v°.
  • 11 Ib., f° 171 v° à 172 r°.
  • 12 Ib., f° 214 v° à 217 v°, les oblies sont signalées, on indique que justice et arrière-accapte sont (...)
  • 13 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 91 v°, même chose f° 117 v°.
  • 14 Ib., f° 135 v° à 136 r°.
  • 15 Outre Etienne et Pons de Meretino, noble Anglaise de Saint-Michel, co-seigneur de Noueilles (cinq (...)
  • 16 A.M.T., Ms. 634 f° 16 r°, 1389.
  • 17 Ib., f° 34 v°, 1434, il avoue, en supplément, par rapport à l’aveu de 1406, un carton de blé de re (...)

11Un registre du notaire de Montgiscard, Arnaud de Morneda, datant des années 1383-13919, contient 47 reconnaissances et 40 actes de « nouvelle inféodation », concernant 45 biens. Huit nouveaux accensements sont consentis par Étienne de Meretino, damoiseau, co-seigneur de Gardouch, entre le 28 décembre 1388 et le 6 février 138910 ; on le voit, pendant la même période, recevoir des reconnaissances, acheter des biens. Il inféode à nouveau plusieurs parcelles en novembre 139011, puis reçoit de nombreuses reconnaissances, le 29 octobre 139112. Un acte passé par Guilhem de Meretino, prieur d’Ayguesvives, comme procurateur de son frère Etienne, se présente non comme une nouvelle inféodation mais comme une vente, celle d’une parcelle de quatre sétérées, située au cœur de réserves seigneuriales puisque les confronts en sont les héritiers de noble Gaillard de Cambello et noble Jean Villèle, vendue 32 £ tr ; des oblies de quatre deniers tolsans, un pour chaque sétérée, des droits de justice et d’arrière-acapte sont mentionnés13. G. de Meretino confond-il droit d’acapte et prix de vente ? On trouve aussi, dans ce registre, des reconnaissances faites à Pons de Meretino, damoiseau, co-seigneur de Gardouch, frère ou oncle d’Étienne14. Neuf seigneurs différents interviennent, en quatre ans (1388-91)15, que ce soit pour inféoder des terres ou recevoir des reconnaissances. Si, dans le cas d’Etienne et Pons de Meretino, il s’agit, peut-être, de remettre en valeur l’héritage qu’ils viennent de recevoir, les autres nouvelles inféodations sont à mettre en relation avec le fait que ces seigneurs viennent de faire leurs aveux et dénombrements au roi ou vont les faire, les aveux répertoriés dans le Ms. 634 datent d’octobre et décembre 1389. On trouve dans le registre Ms. 634 les aveux d’Etienne et de Pons de Meretino, chacun déclarant, pour Gardouch, 1/48 de la justice du lieu et des biens nobles16. Bernard Vignes avoue, pour Noueilles, en 1406, le fort, la juridiction haute et basse, cinq cartons de blé, un demi-carton d’avoine et 12 gélines de rente, deux £ d’oblies annuelles, quatre journées de corvée, 162 arpents de terres nobles et un moulin à vent noble. Il effectue un nouvel aveu en 143417. L’aveu et dénombrement que Guilhem, son père, effectue en 1389, n’a pas été conservé. Ces aveux ont incité les seigneurs à vérifier l’état de leurs possessions, ils rappellent aux tenanciers les charges à payer et réinféodent les tenures vacantes. Les parcelles inféodées dans ce registre 3 E 10159, à part six d’entre elles qui semblent à l’abandon, doivent être libres depuis peu de temps car elles sont toujours qualifiées de malhols ou de terres.

12On retrouve de nombreuses inféodations dans les registres 3 E 10161 (1404-1410) et 3 E 10162 (1407-1410), à mettre, peut-être, en rapport avec les aveux qui se font en 1406.

  • 18 Pour J. Tricard, l’accensement est le point de départ d’une nouvelle exploitation de tenure, il pe (...)
  • 19 A.D.H.G., 3 E 10161, années 1404-1410.
  • 20 A.D.H.G., 3 E 10159, années 1383-1391.

13Le terme de « nouvelle inféodation » ne signifie pas, le plus souvent, qu’il s’agit d’une première inféodation, mais d’une inféodation à un nouveau tenancier. Il est peu probable qu’elle corresponde à l’arrivée d’un nouveau tenancier après une vente, car, dans ce cas, elle accompagnerait une lauzime (on a rarement ce cas de figure), il s’agit plutôt de redonner à nouveau fief une tenure vacante depuis quelques mois ou quelques années par départ ou mort du tenancier, défaut d’héritier ou renonciation de celui-ci, car habitant ailleurs18. Parfois, les actes mentionnent qu’il faut payer les taxes accoutumées ou « comme dans les livres anciens », c’est le cas pour les biens concédés par G. Carrerie19 et Étienne de Meretino20.

  • 21 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 157 r°.
  • 22 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 103 v°.
  • 23 3 E 10163 f° 35 r°, f° 37 r°.
  • 24 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 63 r°.
  • 25 A.D.A., 3 E 9444 f° 137 r°, service 3 d tolsans, 24 novembre 1410.
  • 26 A.D.A., 3 E 9444 f° 154 v°, 1411, deux sétérées, le service est d’une punhère de froment, mesure d (...)
  • 27 A.D.A., 3E 1493, 11 novembre 1417.
  • 28 A.D.A., 3E 1493 f° 56 r°, lieu-dit « ad fontem Vitalis », il existe donc une possibilité d’irrigat (...)

14Pendant toute la période 1380-1410, les accensements portent, essentiellement, sur des parcelles faisant partie de l’ager, en majorité des terres labourables ; les friches pérennes sont rarement concernées. Quelques parcelles de terre labourable sont retournées à la friche, elles sont qualifiées de terre « inutile, infertile, inculte, herm », la nature exacte de certaines d’entre elles est ignorée : « pré ou inculte, pré ou essart infertile, pré ou terre inculte ». Dans le Terrefort de l’Entre -deux-Hers, douze occurrences de ce type apparaissent dans les registres 3 E 10159 (1383-1391) et 3 E 10162 (1407-1410). Une terre « inutilis et infertilis » est ainsi donnée en emphytéose, à Montbrun21, une terre seu boscarassa, à Ville-franche22, une « malholassam ermam sive infertilem », à Montlaur23. Une motte de moulin à vent (signe que le moulin est détruit), située à Deyme, est même inféodée par Bernard de Duroforti, seigneur de Bonac et de Deyme, le 16 mai 1406, à un fabre24. On retrouve ce type de parcelle, à neuf reprises, dans la bailie de Castelnaudary, dans la plaine comme dans les villages de la Montagne Noire ou de la Piège ; toutes sont mentionnées dans le registre 3 E 9444, couvrant les années 1409-1410. Dans cette partie du Lauragais, c’est, le plus souvent, l’Église qui intervient et qui inféode sous cens fixes en nature ou bien sous agrier. Le procurateur de la commanderie de Saint-Jean de Jérusalem de Pexiora, par exemple, accense deux pièces de terre hermes contiguës, de deux sétérées, situées dans les dépendances de Pexiora, lieu-dit « a cantarayna », les confronts sont cultivés25, deux terres en herm à Fendeille, une « a la falgayrola », l’autre « a coma rosant »26. Les obits de la collégiale Saint-Michel donnent en novum feudum une pièce de terre « inculta sive herema », qui fut de feu Guilhem Sicredi « al olm del roc » (près de la voie d’Aquitaine), les parcelles confronts sont cultivées, le service est d’une émine de froment27. Le prieur de Notre-Dame de Pechginestas donne en novum feudum, le 14 septembre 1418, à Arnaud Basconis une pièce de terre de six sétérées qui fut de Pierre Nigri, un macellier, à un demi-agrier. Cette terre est « herema et inculta » depuis 20 ans, le prieur précise qu’il fait nouvelle inféodation pour que la directe ne cesse pas 28.

  • 29 A.D.A., 3 E 1493 f° 1 v°.
  • 30 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 106 r°, mai 1388. Ce déguerpissement figure aussi dans un registre d’étendu (...)

15Certaines tenures sont vacantes par mort du tenancier, les actes d’inféodation l’indiquent : une terre « inculte sive herema », qui fut de feu X est donnée à nouveau fief29 ; d’autres ont été abandonnées : dans le registre 3 E 10162, trois nouvelles inféodations sur dix sont liées à des déguerpissements. Ceux-ci résultent parfois du décès du chef de famille : un jeune homme, mineur de moins de 24 ans, fds d’un laboureur de Grépiac, Jean Cornelh, et son oncle, en tant que tuteur de sa sœur, déguerpissent auprès de P.-R. de Deyme, co-seigneur de Labruyère-Dorsa, toutes les terres sises dans la juridiction de Labruyère, terres qui étaient au sixième. Le même jour, elles sont données à novum feudum au neuvième puis le notaire rature cette mention et indique qu’elles le sont à l’agrier30. P.-R. de Deyme a-t-il réduit ou non les charges pesant sur ces terres ?

  • 31 Au xviiie siècle, le seigneur devait accepter le déguerpissement, la vacance des terres était publ (...)
  • 32 Ainsi que l’a noté J. Tricard, Les campagnes..., op. cit., pp. 52-53.
  • 33 A.D.H.G, 3 E 10162 f° 29 v°.
  • 34 A.D.H.G. 3 E 10162 P 30 r°.
  • 35 Le Mené (M.), Les campagnes ... op. cit., p. 216.

16Les actes de déguerpissement31 sont très rares dans les registres notariaux dépouillés : six, concernant le Lauragais occidental, antérieurs à 1410. Le plus souvent, le tenancier fuit sans rien dire au seigneur, le fait de passer un acte par-devant notaire, à l’amiable, signifie que la situation n’est pas tout à fait catastrophique32. Le déguerpissement traduit vraiment un problème s’il y a subhastation, mise à l’encan de la tenure, signe de la difficulté à trouver un tenancier, une seule occurrence de ce type apparaît dans les registres notariés dépouillés. Le bien est réinféodé rapidement, à moins qu’on ne constate officiellement le déguerpissement qu’au moment où l’on a trouvé un preneur : le curateur des biens vacants de J. de Cripolis déguerpit un « hospicium sive campmas » situé au campmas den Cripols, avec terre et jardin contigu, à Baziège, en janvier 1408 (n. st.)33, suit immédiatement la nouvelle inféodation34. Michel Le Mené note aussi ce phénomène, déguerpissement et réaccensement d’un même bien, exploitation ou parcelle, se succèdent presque simultanément35.

  • 36 A.D.A., 3 E 9444 f° 50 r°.
  • 37 A.D.A., 3 E 9444 f° 66 r°.
  • 38 Le seigneur ne tarde pas à réaccenser les biens sous un cens identique, une réduction du cens est (...)
  • 39 A.D.A., 3 E 10159 f° 142 r°.

17Certains tenanciers fuient, disent-ils, car les charges pesant sur les tenures sont trop lourdes : le 15 décembre 1408, deux frères assurent, devant le juge de Lauragais tenant assises à Pexiora, qu’ils tiennent en emphytéose dans ce consulat, une pièce de terre en malhol, sous un cens d’un setier de froment ; ce service est trop cher pour eux, ils ne peuvent payer les arrérages et déguerpissent36. Le 9 mai 1409, c’est Jacques Magaronis de Pexiora qui déguerpit auprès des Hospitaliers, une terre située dans le décimaire Saint-Saturnin, terre pour laquelle il donnait un quart du fruit, « car le service est trop onéreux et insupportable »37. En Quercy, des tenanciers déguerpissent, eux aussi, car les cens sont trop élevés, les biens sont « déserts, stériles et dévastés par les guerres »38. Des loueurs à court terme, fermiers et métayers, déguerpissent, tel, le 12 avril 1390, un couple, gasailler d’une borie de Saint-Léon, appartenant à Aymeric Beneyci ; les motifs du départ ne sont pas fournis39. Nous avons vu supra que des baux sont cancellés avant le terme fixé et que Bernard Engilbert éprouve beaucoup de difficultés à louer sa ferme.

  • 40 A.D.H.G., 3 E 10161 f° °155 v°.
  • 41 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 245 r°, 28 janvier 1409, deux laboureurs de Montesquieu promettent de payer (...)
  • 42 A.D.A., 3 E 9444 f° 53 v°, 19 janvier 1409.
  • 43 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 r°, janvier 1408.
  • 44 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 77 r° ; au f° 74 r°, ils ont reconnu tenir de lui 24 biens ; au f° 76 r°, i (...)
  • 45 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 152 v°, f° 153 v°, 15 octobre 1407.
  • 46 A.D.A., 4 E 76 CC 54.

18Le déguerpissement permet parfois d’échapper au paiement des arrérages : le 24 octobre 1407, un couple de Corronsac laisse deux pièces de pré, on les tient quittes des arrérages (cinq setiers de froment, un carton d’avoine, deux paires de poules et cinq sous tr)40. Le paiement d’un droit d’entrée par un nouveau tenancier solvable compensera largement ce cadeau. Les arrérages d’oblies (ainsi que de tailles communes41) apparaissent très nombreux, dans les années 1407-1410, années de mauvaises récoltes, comme signalé plus haut. Les tenanciers d’une borie de Cornebarrieu, près de Toulouse, n’ont pas payé, depuis deux ans, un cens d’une carteria de froment42. Pierre Rosandi, du campmas des Rossandorum, doit à Pierre de Mauriaco sept setiers de froment en arrérages d’oblies et quatre setiers en raison d’une gasaille43. Jean et Pierre André, son fils, de Montlaur reconnaissent une dette de 20 £ tr, pour arrérages parsonniers, au même Pierre de Mauriaco44. Quand un seigneur meurt, les héritiers essaient de faire régler les arrérages : on aperçoit ainsi plusieurs quittances de paiement d’arrérages d’oblies établies par le procurateur des héritiers de feu Guilhem Carrerie45. Cette difficulté à payer les impositions (seigneuriales ou municipales) est ancienne, un des registres de comptes du consulat de Castelnaudary, par exemple, fait état, vers 1373, de l’envoi de sergents dans les campmas et ripperias pour récupérer les animaux réquisitionnés ou saisis en raison de tailles non payées46.

  • 47 A.D.H.G., 3 E 10161, par exemple, f° 1 v°, 5 août 1405.
  • 48 A.D.H.G.., 3 E 10161 f° 1 bis r°, nouvelle inféodation à un laboureur d’un arpent de malhol et d’u (...)
  • 49 Les mêmes précautions apparaissent en Bourbonnais, on précise que la censive ne doit pas être dimi (...)
  • 50 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 r°, 14 janvier 1408 (n. st.).

19Les seigneurs manifestent, souvent, dans les inféodations, le désir que le preneur travaille effectivement la terre et se réservent le droit de pratiquer la commise de la tenure, si ce n’est pas le cas. G. Carrerie donne en tenure à son bayle de Pompertuzat, le 5 août 1405, une borde et son pati, un demi-arpent de malhol et un arpent de terre. Des oblies de 8 sous et 9 deniers tolsans pèsent sur la borde et le pati et le tenancier doit livrer un quart du fruit de la vigne et de la terre. G. Carrerie prend d’énormes précautions pour forcer son tenancier à bien travailler : si l’un des travaux de la vigne n’est pas effectué, il reçoit la moitié de la vendange, si aucun travail n’est effectué, toute la vendange et la parcelle, si la terre labourable n’est pas travaillée tous les deux ans, il la récupère : « si defficiebat laborare dictant terram de duobus annis in duobus annis que dominus possit recipere et recuperare dictam terrant »47. Ce type de contrat léonin est la spécialité de G. Carrerie. Il donne plusieurs parcelles en « emphytéose perpétuelle ou nouvelle inféodation » à diverses personnes, avec toujours cette clause de reprise si la terre n’est pas travaillée tous les deux ans ; les parcelles sont données contre une part de fruits importante (un cinquième), avec presque toujours mention d’oblies48. Il ne s’agit pas de métayage à court terme, mais bien de tenure perpétuelle avec agrier et oblies et la parcelle doit être effectivement mise en valeur49. Les bâtiments d’exploitation doivent être entretenus : Bernard Auriolli, de Montlaur, tient un hospicium dans le campmas des Auriols, en censive, de noble Pierre de Mauriaco, celui-ci lui demande de le réparer avant Noël puisque cela lui incombe50.

  • 51 A.D.H.G, 3 E 10161 f° 89 v°.
  • 52 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 2 r°, 5 août 1405, ils doivent aussi verser des oblies ; le bailleur prend (...)

20On retrouve la clause de mise en valeur pour des baux à moyen terme : une terre de trois sétérées est ainsi louée pour 29 ans par Aymeric de Miralhiis, un marchand, à raison d’un setier de froment par an, le bien doit être rendu vide, ne doit pas être loué à quelqu’un d’autre ; s’il n’est pas travaillé de deux ans, il retourne au bailleur51. La coutume de Toulouse prévoit ce retour au bailleur en cas de carence du preneur, mais uniquement pour les locations à court terme. Certaines clauses des baux de location, nous l’avons vu, montrent que les bailleurs tiennent à ce que leurs terres soient bien travaillées, signe de faible motivation ou de fuites de paysans. On se méfie particulièrement des preneurs, les fermiers d’un « territorium » appartenant à un bourgeois de Toulouse, doivent verser le loyer en nature prévu, même s’ils ne travaillent pas les terres52.

  • 53 En Bourbonnais, on trouve des réductions de cens pratiquées quand les terres ont vaqué quelques an (...)
  • 54 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 12 v° (deux seigneurs : le collège des pauvrets et Magna de Morlanis).
  • 55 A.D.A., 3 E 9444 f° 45 v°.
  • 56 A.D.A. 3 E 9444 f° 47 v°. Au F 50 v°, le roi et les seigneurs de Besplas donnent en emphytéose à d (...)
  • 57 A.D.H.G., 1 G 801 f° 1 r°.
  • 58 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 207 v°, 1391.
  • 59 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 19 r°, 2 novembre 1405, etc. Tous les actes comportent hypothèques sur les (...)

21Certains seigneurs apparaissent comme plutôt coercitifs, d’autres essaient d’attirer en diminuant les cens et les loyers53. Ces baisses de charges ne sont pas très fréquentes, elles concernent, probablement, des biens en très mauvais état. Le 2 octobre 1405, un demi-arpent de terre, à Belbéraud, est donné en « novum feudum », le quart du fruit qu’« avait antiquement le seigneur » est remplacé par des oblies de deux deniers tolsans, un droit d’entrée de deux écus d’or est toutefois demandé54. En 1408, les maîtres d’œuvre de l’église Notre-Dame de Besplas lauziment neuf ventes de terres sur lesquelles pèse un agrier et donnent deux parcelles en nouvel accensement. Une de ces parcelles consiste en une terre « herema » le service n’est que d’un demi-agrier55, l’autre servait « retrolapsis temporibus » un agrier entier, qui est réduit à une carteria de froment, petite mesure56. Des réductions de cens apparaissent dans le registre de reconnaissances de l’archevêque de Toulouse de 1447, elles ont été faites à une date indéterminée : Olivier Galles et Jacobe son épouse, fille et héritière de P. Furneri, reconnaissent le capmas qui fut de P. Furneri et des terres. Parmi celles-ci, « une terre et bosigue de cinq cartonnades près du campmas qui était agrière et qui fut affranchie ou réduite aux oblies ci-dessous (soit huit deniers tolsans) au temps de feu l’archevêque », une vigne a été aussi « réduite » à quatre deniers tolsans57. On peut attirer dans le cas de baux à court terme, quand une exploitation nécessite de gros travaux : le loyer d’un campmas, par exemple, est d’un tiers des fruits pour le bailleur la première année puis de la moitié, le bailleur avance les semences à rendre à la fin du contrat et prête un araire et deux bœufs58. Le souci de trouver un nouveau tenancier n’amène pas toujours le seigneur du bien à réduire ses demandes : G. Carrerie, quand il réinféode des biens suite à un déguerpissement, maintient les anciennes redevances59.

  • 60 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 172 r°.

22On a du mal, parfois, à trouver un locataire pour une exploitation puisqu’on voit une borie « avec maisons, vignes, champs, prés, albarèdes, bois et autres terres, tant cultivés qu’incultes », située aux Bastards, louée aux enchères au plus et ultime offrant, par les tuteurs des héritiers de B. de Campellis, le 24 novembre 1390, jusqu’à la Toussaint suivante puis, pour 20 ans, à raison de six francs par an. Le preneur, G. Ayneri, des Bastards, doit payer les tailles, les cens et oblies sont payés par les héritiers60. C’est peut-être dans l’urgence, toutefois, que l’on doit trouver un exploitant après le décès du chef de maison.

  • 61 En Comtat, ces droits d’entrée sont très rares au début du xve siècle et ils sont plutôt modestes, (...)
  • 62 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 11 v° (deux seigneurs, le collège des pauvrets et Magna de Morlanis épouse (...)
  • 63 A.D.H.G, 3 E 10161 f° 150 r°, 7 septembre 1407.
  • 64 A.D.A., 3 E 9444 f° 91v °, les parcelles confronts sont appropriées.
  • 65 A.D.A., 3 E 9445 25 v°, des biens vacants sont confronts.

23Malgré cela, des droits d’entrée apparaissent, parfois, dans les registres de la fin du xive siècle et du début du XVe61, sauf dans le registre 3 E 10154 qui couvre les années 1380-86 ; certains, très faibles, doivent porter sur un bien en mauvais état : le droit d’entrée, pour un petit campmas de trois arpents et deux pugnères, situé à Belbéraud, donné en novum feudum le 2 octobre 1405, est de deux £ tr62 ; d’autres sont plus importants, 50 £ tr pour une borie de la dame de Roqueville, à Montgiscard63. Même l’inféodation d’une friche peut donner lieu au paiement d’un droit d’entrée : un tenancier doit donner au roi 24 gros (1 £ 10 sous), pour une terre « en herm » al regadis, dans les dépendances de Laurac, inféodée le 7 mars 1410 (n. st.), sous un servicium d’un denier tr64. On trouve pourtant des vacants, à cette époque, parmi les confronts de parcelles, dans les zones collinaires de la Piège, là où est situé Laurac65. Même quand Arnaud Basconis prend en tenure six sétérées vacantes depuis 20 ans, un droit d’entrée de 2 £ tr lui est réclamé ; la sétérée de friches vaut de une à deux £, ce droit d’entrée la met à moins de sept sous, un tiers à peu près de sa valeur vénale. Il est probable qu’on ne ferait pas payer de droit d’entrée pour des terres abandonnées depuis longtemps si l’on cherchait désespérément des preneurs.

  • 66 A.D.A., 3 E 9444 P 86 r°.
  • 67 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 46 r°, f° 86 r°, 179 r°, f° 184 r°, 195 v°, 200 r°.
  • 68 Une terre « sive rodorasses », A.D.H.G., 3 E 10159 f° 223 r°, 1392. Un « yssartum », A.D.H.G., 3 E (...)
  • 69 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 11 v°.
  • 70 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 23 r°, 1407.
  • 71 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 189 r°.

24Les seigneurs ne sont pas les seuls à s’intéresser aux terres abandonnées ou aux friches pérennes, pendant les années 1380-1410. Ces parcelles circulent un peu, vendues ou louées, qu’il s’agisse d’alleux ou de tenures. Une terre « heremam » d’une éminée, située à Saint-Martin-Lalande, dans la plaine, « al gorc Sant Peyre », est vendue au recteur du lieu, en 1410, les parcelles confronts sont cultivées66. Toutes les autres occurrences concernent des parcelles du Terrefort occidental : des bosigues, des « terre inculte bosquarasse » y sont vendues, toutes dans les années 1406-141067. On peut les réserver au bétail, mais aussi les défricher : des ventes d’essarts sont signalées68. Des bâtiments en ruine, situés en campagne, sont aussi vendus : « parietes cum orto », dans les dépendances de Villenouvette69, « paretes », dans le campmas des Fabres70. Un acte, passé vers 1428, signale la disparition, non datée, d’une tuilerie, le seigneur de Bonac donne en novum feudum, une bosigue d’un arpent où il y avait une tuilerie, à Baziège, « a las landas »71.

  • 72 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 209 v°, donation le 16 août 1391 puis, f° 210 v°, lauzime.
  • 73 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 4 r°, 9 mai 1380.

25La remise en état s’effectue puisque les seigneurs réinféodent les tenures vacantes ou découpent des lots sur leurs réserves pour les inféoder ou les louer (cf. supra). Ces locations sont consenties pour des durées assez longues puisqu’il faut effectuer des travaux, le preneur doit profiter de son investissement-travail. Des propriétaires d’alleux les louent pour que le preneur les remette en valeur, plante une vigne. On voit même Raymond Guilhem, de Montgiscard, donner une sétérée de terre « sive bosiga » située à Montalbuou, à Jacques Gomberti, un sergent du lieu, qui en est confront. En échange, celui-ci doit entretenir, pendant trois ans, un plantier qui est à côté de la bosiga, il doit le « fodere, terciare » à ses frais et le rendre au bout des trois ans ; pendant ce temps, il garde la totalité de la vendange. Le père de Raymond, Bertrand, lauzime cette donation72. La location, pour 20 ans, d’une vigne, située à Montgiscard, au septième de la vendange (de ce qui reste en fait, après paiement de l’agrier au roi), doit, elle aussi, correspondre à une remise en état73.

  • 74 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 27 v°.
  • 75 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 63 r°, 4 deniers d’oblies à la Toussaint.
  • 76 A.D.A., 3 E 9444 f° 5 v°, 30 novembre 1405.
  • 77 Wolff (Ph.), Commerces... op. cit., note 15 p. 173.

26On plante des vignes ou l’on incite ses tenanciers, ses fermiers à le faire, signe de l’intérêt pour les cultures spéculatives. Bertrand Pinelli, de Montlaur, doit, en 1407, six cartons et 10 pugnères de froment, deux cartons et six pugnères de mossole et quatre £ tr à P. de Mauriaco, dont il est probablement le métayer. L’argent lui est prêté pour faire un plantier, il doit être remboursé en fin de contrat, les céréales, à la demande74. Bernard de Durfort, seigneur de Bonac et de Deyme, inféode, le 18 mai 1406, une pugnère de terre inculte « in qua jam inceperat plantare maleolum », située à Baziège, à Arnaud de Lasus, habitant du lieu, originaire du Béarn75. Un contrat de complant permet à Pierre Moyneri de trouver un tenancier qui doit remettre en état un malhol et en planter un autre : il donne à Arnaud Marsani deux sétérées de terre, une sétérée est en malhol, l’autre en herm (le frère d’Arnaud est confront de ce bien, on peut supposer qu’Arnaud possède, lui aussi, des parcelles dans le secteur, ce qui va faciliter son travail), pour quatre ans. Il doit, aux temps opportuns, « laborare et cultivare operibus debitis et necessariis et dicta sestariata que est in heremo plantare sive malholare de de bono plantu », tout cela à ses frais. Il doit donner un tiers du fruit d’une des deux sétérées en malhol. Au bout des quatre ans, les deux sétérées sont divisées en deux, après estimation par de probes hommes, Arnaud Marsani devra payer tous les ans, pour sa part, un denier tr de directe à P. Moyneri76. Philippe Wolff signale ce genre de contrat : des propriétaires de terre herme en abandonnent la moitié au laboureur qui se charge de la mettre en culture77.

  • 78 Marandet (M.-C), Quelques signes de gêne.... op. cit.
  • 79 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 200 r°.
  • 80 Ce qui s’est produit en Quercy, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., pp. 197-198.
  • 81 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 12 v°, 1405.
  • 82 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 210 r°.
  • 83 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 240 v° et f° 241 r°, 26 janvier 1409.
  • 84 Par exemple, 4 £ tr un service de deux pugnères de froment pesant sur une terre, située à Labruyèr (...)
  • 85 A.D.A., 3 E 1493 f° 190 v°.

27Les exploitants, pour certains, connaissent des difficultés, cette période est celle où les signes de gêne sont les plus nombreux dans les registres de notaires, avec, par exemple, des constitutions de rentes sur les biens78 ; pour d’autres, la situation semble meilleure : ils achètent des parcelles, prennent des tenures en payant un droit d’entrée, profitant des terres vacantes pour arrondir leurs propres possessions : un laboureur, par exemple, prend en tenure, en 1408, un arpent de bosiga et un arpent de boscarasse dont il est confront79. D’autres rachètent des cens, totalement ou partiellement. Ces rachats, s’ils traduisent une certaine aisance des tenanciers, montrent aussi que les seigneurs doivent consentir un effort pour garder ceux-ci ou qu’ils ont de gros besoins d’argent80 ; ils datent tous du début du xve siècle. Plusieurs tenanciers achètent des réductions de cens au collège des pauvrets de Toulouse et à Magna de Morlanis : un demi-arpent de terre était inféodé contre un quart du fruit, il l’est contre deux deniers tr, mais la réduction est faite moyennant deux écus d’or pour droit d’entrée ; on considère donc qu’il s’agit d’une nouvelle inféodation81. Dans un acte intitulé « affranchissement », le seigneur de Gardouch, Etienne de Meretino, « sponte affranquavit et de novo infeudavit et ad novum feudum sive in emphiteosim concessit » une terre, située à Gardouch, à un habitant de Vieillevigne. En fait, le feudataire achète une réduction d’oblies, il « solebat facere ab antiquo dicto domicello pro oblias videlicet tres liurallos frumenti et tres liurallos avene » à la Saint-Julien d’août ; en échange de quatre florins d’or, il versera pour oblies, chaque année, à perpétuité, un denier pogès à la Saint Thomas82. Bertrand Arquerii, un laboureur de Montgiscard, achète à Arnaud de Montelauro, bourgeois de Toulouse, une pugnère de froment censuel qu’il fait sur une sétérée de terre à Montgiscard, au prix de deux écus d’or ; à la place, il donnera un denier tolsan en « servicium ». Le même jour, Raymond Montanerii, un forgeron de Montgiscard achète, toujours à A. de Montelauro, une demi-pugnère de froment censuel qu’il fait sur un demi-arpent de pré à Montgiscard, au prix de 11 sous 6 deniers tolsans ; il versera, à la place, un denier tolsan d’oblies83. Le rachat s’effectue à meilleur prix, tout est affaire de rapport de force entre les protagonistes. Le rachat moyen se situe, en Lauragais occidental, aux alentours de 2 £ tr, la pugnère de froment de cens ou de rente84. La pugnère, en année normale, se vendant 2,5 sous dans ce secteur, son rachat correspond à 16 années de paiement. Dans un exemple plus tardif, de 1421, ce rachat, à Castelnaudary, semble moins élevé. Un couple, B. et G. Martini rachète, pour 40 £ tr, un cens de 12 setiers et trois quartières de froment, pesant sur un jardin situé « al prat del rey ». Le setier de blé, à Castelnaudary, coûte en moyenne 8 sous, le rachat représente à peu près huit années de rapport des oblies85.

28On note la coexistence, pendant cette période 1380-1410, de signes de crise et de signes positifs. Une partie de la population des campagnes connaît des problèmes, mais ils semblent conjoncturels, liés à de mauvaises récoltes, des dévastations effectuées par les routiers ; les emprunts de grains, les ventes de récoltes sur pied, les ventes à réméré se multiplient alors. Des tenanciers ont fui ou sont morts, les seigneurs doivent réinféoder des terres abandonnées, parfois, depuis longtemps parce qu’ils s’en sont, peut-être, désintéressés, les parcelles voisines de ces terres étant toutes cultivées. Des droits d’entrée sont demandés, signe qu’il y a des amateurs pour reprendre les terres. Quelques paysans ont suffisamment d’argent pour arrondir leurs possessions, racheter les cens pesant sur leurs tenures.

B. Années 1420-1460, encore quelques problèmes

29À partir des années 1420, les actes d’inféodation se raréfient, la reconstruction est effectuée, pour l’essentiel. Certains indices glanés dans les registres notariés montrent qu’il existe toujours des problèmes, sur les marges montagneuses ou dans le Terrefort, mais les signes de reprise sont de plus en plus nombreux.

  • 86 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 r°, 13 mai 1425.
  • 87 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 56 v°, 16 mai 1439.
  • 88 Stouff, Le mas artésien..., op. cit., p. 168.
  • 89 Luc (P.), La vie rurale..., op. cit., pp. 46-49, le tenancier n’a pas le droit de démonter la mais (...)
  • 90 Aventin (M.), La societat..., op. cit., pp. 144-150.

30Un essart « rodoreriam nemus yssartos » de 10 arpents situé à Corronsac, est inféodé sous oblies de 10 gros et de deux paires de poules, sans droit d’entrée. Il s’agit sûrement d’une sous-inféodation car le seigneur du bien est Pierre de Campodey, un massonier (maçon) de Montbrun86. Des « parretes » de campmas, situées dans la borde den Pezenx à Montlaur, avec tout leur territoire cultivé et inculte, sont inféodées à un couple de laboureurs, en 143987, par F. de Mauriaco. Les oblies sont d’un carton de blé la première année (soit quatre setiers) puis de six setiers, ce qui traduit le piteux état de l’exploitation. Le tenancier doit bâtir une maison « domum sive bordant » sur les « parretes », en deux ans, à compter de la prochaine Toussaint. F. de Mauriaco donnera cinq écus d’or pour acheter 2 000 tuiles pour la couvrir, la moitié à la prochaine Toussaint, le reste à la suivante, et il autorise le feudataire à prendre le bois dans ses propres possessions. Celui-ci promet de faire résidence dans la ferme, de payer les tailles et autres contributions à l’universitas. Il n’y a pas de droit d’entrée. Cet acte est le premier dans lequel on aperçoit une reconstruction de ferme ; dans la région d’Arles, on commence à reconstruire à la même date88. Dans le Terrefort, les contrats où l’on précise que le preneur doit habiter la ferme sont assez fréquents. L’obligation de résidence se retrouve un peu partout ; en Béarn, le censitaire ou son héritier ne pourront quitter la maison sans le consentement du seigneur et ils doivent la tenir « feu vif et toit couvert » ; des obligations de bâtir en un an et un jour sont même indiquées89, en Catalogne, le tenancier doit tenir le mas « poblat i afocat », un des fils doit même prendre la suite90.

  • 91 A.D.H.G., E 618 f° 11 r°, 8 mars 1449 (n.st).

31En 1449, le collège Saint-Nicolas loue une borie à Daugas, vers Auterive, toujours dans le Terrefort haut-garonnais. Le fermage est de 18 setiers de froment par an, la location commence à la Toussaint suivante, pour 10 récoltes ; les dépenses sont partagées entre bailleur et preneurs. Les preneurs doivent réparer la borie, la refaire de neuf, du côté de l’autan « de fustibus et latis et aliis necessariis ligneis ». Le collège promet de faire les paretes nécessaires (il doit donc embaucher un paredièr) et doit donner des tuiles pour couvrir cette partie, le transport des tuiles et le travail des couvreurs sont à la charge des preneurs. Ils doivent, par la suite, tenir couvert à leurs frais91. Il y a encore des ruines à relever, mais bailleurs et preneurs, si nécessaire en s’associant, disposent, désormais, de l’argent pour le faire.

  • 92 Marandet (M.-C), Quelques signes de gêne..., op. cit., pp 9-10. et pp. 15-16.
  • 93 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 172 v°.
  • 94 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 173 r°.
  • 95 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 149 v°.
  • 96 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 149 r°.

32On aperçoit toujours des signes de gêne se traduisant par des arrérages, mais ils sont plus rares que dans les décennies précédentes. Ils résultent de problèmes conjoncturels, mauvaises récoltes successives, accident, maladie. Les mentions en sont nombreuses après les mauvaises récoltes de 1425 et 142692. Un seigneur, Pierre de Mauriaco traite les tenanciers qui lui doivent des arrérages d’oblies de façon particulièrement rigoureuse : au lieu de faire donner ces arrérages en nature, il utilise la fiction d’une vente et compte le blé dû au prix probable de mai 1426, à raison de 7 écus le carton, soit plus de 48 sous le setier. Il semble transformer les arrérages, dans un cas, en droit d’entrée : Guilhem Ferrati, un laboureur de Montlaur, lui doit 6 écus pour arrérages d’oblies d’une terre de deux brassées sur six, située dans le barri de Montlaur, un jardin, étant donné la superficie93. Le tenancier doit payer cette somme en deux ans, P. de Mauriaco lui redonne la terre en novum feudum, les oblies (non précisées) sont à payer à la Toussaint, la justice et l’arrière-accapte sont de six deniers tolsans94. Quand il inféode une parcelle, P. de Mauriaco demande généralement un droit d’entrée élevé, correspondant au prix de celle-ci, trois écus par exemple pour trois pugnères de terre 95 (ce qui met l’arpent à 5,5 £) alors que le nouveau tenancier achète deux arpents de terre, à la même date, pour 10 £ tr96.

  • 97 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 9 r°, oblies : une punhère de blé.
  • 98 A.D.A., 3 E 1494 f° 8 v°, 7 février 1422.
  • 99 A.D.A., 3 E 1494 f° 76 v° ? 10 décembre 1423.
  • 100 A.D.H.G., 3 E 10136 f° 120 r° ; au f° 107 r°, Bernard Linas, laboureur du campmas de la Terassa à (...)
  • 101 A.D.A., 3 E 1493 f° 79 v°.
  • 102 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 36 r°, 8 octobre 1465, à la Saint-Thomas apôtre, à raison de deux £, les tr (...)

33Quelques déguerpissements sont signalés : le 24 avril 1423, une vigne d’un arpent « a cantaloba », à Montgiscard, est donnée en novum feudum à un hôtelier par le procureur d’Aymeric de Cominhano, un des co-seigneurs, « comme la terre décrite devient erme et infertile après déguerpissement (propter desamparado) »97. Des déguerpissements sont faits par les héritiers de biens grevés d’arrérages : Maître Raymond Sabateri, bachelier ès lois, laisse une terre, en tant qu’héritier de Jean Coqui, on le tient quitte des arrérages jusqu’au jour présent98. Il a gardé d’autres terres provenant de cet héritage puisqu’il fait reconnaissance au monastère de Boulbonne pour une terre en malhol et pré, qu’il tient en emphytéose comme héritier de Jean Coqui. Il obtient une réduction de cens (d’un setier de froment à une émine) du recteur de Villespy, procurateur de Boulbonne. Cette parcelle est située dans le même secteur que celle qu’il a déguerpie, à Saint-André de Peyralbe99. Parfois, des proches de l’ancien tenancier pratiquent le retrait lignager : Jean, le frère de feu Guiraud Linas, sergent de Montlaur, héritier de celui-ci sous bénéfice d’inventaire, déguerpit les possessions de Guiraud (trois pogesées de pré et six pugnères de terre) au procurateur de Pierre Ysalguier, seigneur d’Odars, lequel les donne en emphytéose à Bernard Linas, de Toulouse, le 29 août 1436100. Certains obtiennent une modération des tailles sur les biens abandonnés : les consuls de Calhavel, le 18 janvier 1419, font quittance à un notaire de Revel des arrérages des tailles et questes sur les biens qu’il a laissés et déguerpis, moyennant deux £ tr101. Pour quelques tenanciers, la situation reste grave mais pas désespérée, ils essaient de rembourser leurs arrérages : deux hommes de Montesquieu doivent à la veuve de Hugon de Turre 7 £ tr et 4 doubles, en raison d’arrérages d’oblies pour un pré situé à Vieillevigne, ils doivent payer en quatre ans102.

  • 103 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 r°.
  • 104 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 141 r°.
  • 105 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 142 v°.
  • 106 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 168 r°.
  • 107 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 51 v°, 1448.

34Des familles connaissent des difficultés permanentes. En janvier 1408 (n. st.), Pierre Rosandi qui vit dans le campmas des Rossandorum, qu’il tient de noble P. de Mauriaco à Montlaur, reconnaît, comme signalé précédemment, lui devoir sept setiers de froment dont trois en raison d’arrérages d’oblies de l’année précédente et quatre en raison de la gasaille de deux bœufs103 ; il doit rendre les sept setiers de jour en jour. En janvier 1426 (n.st), qualifié de laboureur, il reconnaît tenir de P. de Mauriaco neuf parcelles en emphytéose, promet de les travailler aux temps licites, de donner les redevances en gerbes ou sur l’aire104. Le même jour, P. de Mauriaco lui donne quittance de quatre cartons de froment, 4 francs et 4 gros, une demi-pipe de vin qui devaient correspondre à des arrérages de loyer car il lui redonne, pour dix ans, des biens situés à Montlaur, qu’il doit travailler à compter de la prochaine Toussaint105. En mai de la même année, P. Rosandi reconnaît devoir à P. de Mauriaco 13 écus et 6 gros en raison de l’achat de deux cartons de froment qu’il lui devait de reste d’oblies ; il n’habite plus alors à Montlaur mais à Belbéraud, il a quitté la ferme qu’exploitait depuis longtemps sa famille106. Un couple d’Ayguesvives doit, depuis plusieurs années, du blé, obtenu en prêt amical, et des arrérages d’oblies à noble Raymond de Podiobuscano. Ils ne peuvent payer car, disent-ils, l’homme est malade et ne peut travailler et ils n’ont pas de quoi vivre, aussi déguerpissent-ils « relaxaverunt et desampaverunt » un demi-carton de terre et une vigne. Raymond de Podiobuscano les tient quittes du prêt et des arrérages107 ; les droits d’entrée qu’il va récupérer sur un nouveau feudataire compenseront largement cela. La mort du chef de famille entraîne souvent un déguerpissement.

  • 108 On n’en trouve pas, non plus, en région parisienne, quand se produit un début de reconstruction de (...)
  • 109 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 56 v°, 16 mai 1439.
  • 110 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 35 r°, 15 janvier 1428 (n. st.).

35On n’aperçoit guère, alors, dans les documents de modérations de charges108. Les incitations à prendre un bien inculte sont réduites. François de Mauriaco donne des parretes et territoire en nouvelle emphytéose ; le tenancier doit aussi travailler une vigne, pendant deux ans, il ne paiera rien pour cette dernière, car elle est « erme et infertile », ensuite, il livrera un cinquième de la récolte109. Une pièce de vigne « quasi heremam et infertilem », située « a font salmo » dans les dépendances de Montgiscard est louée pour 20 ans, le preneur ne paiera rien pendant les dix premières années, puis il donnera un cinquième du fruit110.

  • 111 A.D.A., 3 E 9456 f° 76 r°.
  • 112 A.D.A., 3 E 9456 f° 89 r°.
  • 113 A.D.A., 3 E 9456 P 142 r°.
  • 114 Cette famille s’est installée au xiiie siècle, à la faveur de la croisade. Jourdain de Saissac don (...)
  • 115 A.D.A., 3 E 9456 f° 142 v°.
  • 116 A.D.A., 3 E 9456 f° 144 r°. Dans ce registre d’étendues, le notaire précise souvent que les biens (...)
  • 117 A.D.A., 3 E 9463 f° 105 v°. Cette ferme est proche de la chapelle Saint-Martin-de-Pébrens, d’après (...)

36Les terres abandonnées semblent rares en Lauragais oriental, sauf sur le piémont de la Montagne Noire où l’on trouve encore des vacants ou des édifices en ruines, dans les années 1440-50, au plus tard. À Labécède, en 1443, des « terres », un malhol, un champ et une « pièce de terre avec tapia contiguë », lieu-dit « a la guarriga », sont vendus à un très faible prix : un écu. La superficie des parcelles n’est pas indiquée, une « guarriga » est confront des biens. Les « droits et dominations » sont à payer à « ceux ou à celui qui les tiennent », on ne sait même pas qui est le seigneur du bien111. L’année suivante, un malhol avec un « herm » contigu se vend, toujours à Labécède, « al carlar » ; des herms ou des vacants sont confronts112. Les seigneurs des villages du piémont réinféodent encore des tenures vacantes. Guilhem Rigaudi, chevalier, seigneur de Vaudreuille et de Tréville et co-seigneur d’Issel, remet en valeur toute une série de biens qu’il détient à Issel et Tréville et même, probablement, un élément de sa réserve. Il donne, en effet, à nouvelle acapte ou en emphytéose perpétuelle, le 24 mars 1446 (n. st.), 26 sétérées de terre situées à Tréville, en deux lots, l’un de 24 sétérées, pour sept deniers tolsans et une obole de « lauzimes, foriscapes, cens » par sétérée, l’autre, de deux sétérées, contre un setier de froment à la Toussaint. Le droit d’entrée est de 24 écus d’or à 30 doubles par écu113. Il inféode à « nouvelle acapte ou emphytéose perpétuelle », le même jour, avec Marie de Pia114, dame de Ferrais et co-seigneur d’Issel, « duo molendina batutas tapias nemora terras prata et omnia alia bona vaccancia existencia », dans les dépendances d’Issel, sur le fleuve Trestet, biens vacants suite aux décès de G. de Collo, recteur d’Issel et de Pons Matineri et de son épouse, à un notaire du lieu, Maître Jean Fanojovis. Ces biens, en mauvais état, sont grevés d’une oblie de 10 deniers tr à Noël, on ne signale pas de droit d’entrée115. Le même jour, G. Rigaudi inféode un jardin vacant d’une quartière (neuf ares), situé à Tréville, sous un cens de sept deniers tr, et des tapias sive locale, toujours à Tréville, sous un cens d’un denier tolsan, les preneurs sont confronts des biens116. Une nouvelle inféodation concerne toutefois la plaine : le 12 octobre 1457, Pierre-Raymond d’Auberardo, pour lui et son frère, Bertrand, co-seigneurs de Lasbordes, donne à Arnaud de Fraxino diverses terres cultivées et incultes à Villepinte, lieu-dit a pebrenx alias a la trapa, « car elles sont vacantes et ils n’en ont aucune utilité ». Le service est d’une émine de froment à la mesure de Saint-Papoul, livrée au 15 août, et de trois sous tolsans, payés à la Toussaint. Arnaud doit édifier, à ses frais, un campmas avant six ans117.

  • 118 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 27 r°, f° 52 r°.
  • 119 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 54 v°.
  • 120 A.D.H.G., 3 E 10136 f° 82 r°.
  • 121 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 58 r°.
  • 122 A.D.A., 3 E 1493 f° 162 r°.

37Des droits d’entrée apparaissent plus fréquemment qu’au début du siècle. Raymond de Podiobuscano, par exemple, donne plusieurs parcelles en emphytéose : un demi-arpent de terre à Baziège, que le preneur doit planter en vigne, en 1447, avec droit d’entrée de 19 gros (soit 1,18 £ contre un prix moyen de 3,94 £), une demi-cartonnée de « terre et vigne » à Ayguesvives, en 1448, avec droit d’entrée de sept écus d’or (soit 9,62 £ contre un prix moyen de 15,78 £)118 ; la même année, il inféode la moitié d’une borie à Mauremont, les droits d’entrée ne sont pas mentionnés mais il est question du versement des « corosti acostumati », de quoi s’agit-il ?119. Un campmas est inféodé par la veuve de Guilhem Azémar de Gavarret, en 1447, avec huit arpents de terre, bosigue et bois contigus, sous des oblies de six deniers tolsans, le droit d’entrée est de 10 écus d’or120. Cela ne semble pas très élevé par rapport au prix de vente d’une ferme, signe, peut-être, du mauvais état de l’exploitation. F. de Mauriaco, nous l’avons vu, quand il inféode une exploitation dont les bâtiments sont en ruine, en 1439, ne demande pas de droit d’entrée ; par contre, quand, associé aux tuteurs des enfants de Pierre de Mauriaco, il inféode, en 1436, une ferme dont les bâtiments doivent seulement être réparés, il demande 10 écus de droit d’entrée ; les preneurs sont toutefois confronts du bien, ce qui doit les motiver particulièrement121. Les petits seigneurs fonciers n’emploient pas toujours les termes exacts, un des maîtres d’œuvre de Saint-Laurent de Laurac, avec consentement des consuls, donne à novum feudum une pièce de terre de deux sétérées environ, au « servicium annuale sive entrata » de 24 bichets d’huile donnés, chaque année, à la Saint Thomas122.

  • 123 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 65 r°.

38Des paysans ont suffisamment d’argent pour payer ces droits d’entrée, de l’argent qu’ils tirent de surplus de blés ou, plus probablement, de cultures spéculatives et des baux à cheptel d’ovins. D’autres peuvent affranchir totalement leur tenure, ainsi, en 1433, un tenancier auquel Jacques de la Roca (de Ruppe) teinturier de Tounis, à Toulouse, avait inféodé un « payssieu sive pradasse » de sept pugnères à Baziège, contre « 8 blancs d’oblies cens et autres », rachète les oblies pour quatre écus, le payssieu étant, reconnaît J. de la Roca : « infertile et de petite valeur »123.

  • 124 Commune, dans l’actuel département du Gers.
  • 125 A.D.H.G., 3E 10164 f° 113 v°.
  • 126 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 v°.
  • 127 A.D.A., 3 E 9461 f° 66 r°.
  • 128 A.D.A., 3 E 9461 f° 104 v°.
  • 129 Mimiague (C.), Le terroir..., op. cit., p. 31 et suiv.
  • 130 Ces migrations ont déjà été signalées pour bien d’autres régions. À Albi, si la population chute d (...)
  • 131 A.D.A., 3 E 9456 f° 189 v°, 301 v°, 219 v°.

39La plaine du Lauragais mais aussi les principales bourgades du Terrefort constituent des zones d’appel, l’artisanat urbain, les domaines offrent des possibilités d’emploi, les productions agricoles peuvent s’écouler sur les marchés de Castelnaudary, Avignonet, Montgiscard. Des paysans viennent de zones à risque, touchées davantage par la guerre franco-anglaise ; certains d’entre eux louent des fermes, d’autres en achètent. Un laboureur de Saint-Romain d’Astarac124 loue, en 1425 une ferme de Montgiscard en métayage à un quart125 ; un autre laboureur, venu du diocèse d’Agen, achète une borie à Montgiscard, toujours en 1425126. Certains viennent de régions éloignées, Olivier Gales, par exemple, un des tenanciers du campmas des Fourniers, à Montgiscard, de Britaniae. Ces migrations continuent après 1450, quand la guerre ne sévit plus, elles sont alors le fait de paysans venant de zones pauvres, assez proches, les confins de la Piège, par exemple, qui sont attirés par les riches terres de la plaine. Tous ne sont pas démunis : un campmasier du chapitre Saint-Michel vient de Gaja, dans le diocèse de Mirepoix, il vend l’héritage qu’il a dans ce lieu (deux maisons, une locata, une vigne, 11 champs, une condamine, deux prés, deux bois, un jardin, une aire), pour 89 écus, en mai 1455, pour, probablement, acheter des biens à Castelnaudary127. D’autres viennent de plus loin, du sud du Massif central : un couple originaire de Cambous, dans le diocèse de Castres, a loué la borie des Burlatz à Soupex, il y vit en 1455128. Les migrations concernent toutes les catégories de population, des marchands, des artisans viennent s’établir en Lauragais (y compris d’ailleurs deux marchands italiens, dont l’un qui s’installe à Castelnaudary). Elles persistent alors que la reconstruction est achevée ; F. Mimiague l’a noté à partir des patronymes de deux terriers de Pexiora, de 1438-59 et 1530-33. Le taux d’usure est de 58,38 %, soit 7,3 % par décennie ; 68,58 % de nouveaux noms apparaissent dans les registres de 1530-33, par rapport au registre de 1490129. On peut noter aussi ce renouvellement des patronymes dans les estimes de Castelnaudary et de Montesquieu130. Des migrations saisonnières se produisent, prélude à des migrations définitives, de jeunes hommes et femmes s’embauchent sur les domaines au moment des moissons ; on trouve dans les registres notariés, comme signalé supra, des contrats de mariage de paysans du Lauragais avec des filles originaires du Massif Central (Saint-Flour, Clermont,) qu’ils ont dû rencontrer à cette occasion131.

C. Achèvement de la reconstruction dans les zones marginales

  • 132 A.D.A. ; 3 E 1497 f° 30 r°.
  • 133 A.D.A., 3E 9468 f° 110 v°.
  • 134 A.D.A., 3 E 9468 f° 78 r°, 1462.
  • 135 A.D.A., 3E 9468 f° 92 v°, échange de terres, 1463 ; en cf. à l’autan, d’autres bosigues.
  • 136 A.D.A., 3 E 1497 f° 8 v°, f° 58 v°.
  • 137 A.D.A., 3 E 9466 f° 73 r°, 1470.
  • 138 A.D.A., 3 E 1497 f° 18 r°.

40Une fois passées les années 1450-60, les mentions de terres retournées à la friche se raréfient dans les registres. Quelques-unes, situées à Castelnaudary, doivent correspondre à des biens tombés en déshérence ou délaissés par leurs héritiers. On inféode en 1466, deux terres « heremas et malleolatas », lieu-dit « al femadis »132, un malhol et une « bosiga sive terra herema » de cinq carterias, toujours « alfemadis »133. Le plus souvent, ces parcelles sont situées aux confins du finage, à Saint-Michel de Cogurone134, à Pech Ginestas135, à Peyralbe136. Deux bâtiments en ruine sont mentionnés : un moulin à pastel, situé à Lasbordes, sous la directe de Bertrand d’Auberardo, le seigneur du lieu, dont le propriétaire, G. de Vesino, est décédé137, une ferme « quasdam tapias ubi antiquitus erat campmasium vulgariter nuncupatum den Veryas » avec 100 sétérées de terre, lieu-dit a lepalop, près du ruisseau du Tréboul, dans une zone fertile, vendue par Raymond Jean, un laboureur du Mas-Saintes-Puelles138.

  • 139 Par exemple, cinq arpents de bosigue qui furent à X (on signale en confront des parcelles appropri (...)
  • 140 Huit sétérées de terre barte pradale et nemore sont vendues à Saint-Michel-de-Lanès, al domerc ali (...)
  • 141 A.D.A., 3E 9462 f° 134 r°, 1466, novum feudum par Jean de Bar à Arnaud Vasas, du Mas Saintes-Puell (...)
  • 142 A.D.A., 3 E 1501f° 152 r°, 18 octobre 1508, vente d’une sétérée de terre, « herm et brogua » au Ma (...)
  • 143 A.D.A., 3E 9468 f° 114 v°.
  • 144 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 37 v°, 1459.
  • 145 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 72 r°.
  • 146 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 125 v°, 166 r°.

41La majorité des terres vacantes ou en friches est située dans les zones collinaires du Terrefort ; ces parcelles sont vendues, réinféodées, avec, parfois, droit d’entrée139. On en trouve beaucoup dans la Piège, à Saint-Michel-de-Lanès140, au Mas-Saintes-Puelles141 où elles sont sur le marché jusqu’au début du xvie siècle, le défrichement étant toujours en cours142. On vend même l’usufruit d’un essart, une terre « gayratate seu cultivate », de sept carterias, située à Salles-sur-l’Hers, lieu-dit « al moli del vent »143. On inféode encore, dans le Terrefort occidental, des terres retournées à la friche, par exemple, deux parcelles de terre, « als molis de vent », à Montgiscard, qui furent des jardins (« in qua solebat esse ortum »)144. On aperçoit quelques bâtiments en ruine, situés en campagne mais aussi dans les villages ; les deux co-seigneurs de Pompertuzat inféodent, en 1459, un demi « localia in quo solebat esse domus »145. Toutes les terres ne semblent pas remises en valeur ou l’on craint l’incurie des preneurs puisque, dans certains baux de location de fermes, on précise que ceux-ci doivent débroussailler « disbosigare », faire des fossés146.

  • 147 A.D.A., 3 E 9462 f° 171 r°.

42Quelques nouvelles inféodations se produisent dans la plaine de Castelnaudary, mais sur les sols les plus ingrats, dans l’interfluve Tréboul-Fresquel, par exemple. Bertrand de Fontaynis, fils de Raymond, seigneur de Belflou, donne en novum feudum, le 31 mars 1461, à un homme d’Airoux, une « locatam seu paretz in quibus solebat esse domus » avec trois éminées de terre, « al mercadeil », juridiction de Montferrand et Labastide d’Anjou, sous le service d’un setier de froment, une des parcelles confront est vacante. Il lui inféode, aussi, deux sétérées et trois émines de terre, contre le service d’une poule, et six sétérées de terre herme « alpla », contre un service de six deniers tolsans. Ces faibles cens traduisent l’état d’abandon des parcelles, que le tenancier doit « travailler et améliorer »147.

  • 148 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 121 r°.
  • 149 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 34 r°. Ce système des enchères existe ailleurs : en Bourbonnais, par exempl (...)
  • 150 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 122 v°, f° 123 r°, etc.
  • 151 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 125 v°, cf. supra.

43Les signes de reprise sont, toutefois, plus nombreux que ceux traduisant une crise. La terre s’est raréfiée puisqu’on vend, dans le Terrefort, assez cher, de plus en plus de friches pérennes, terres qu’on peut défricher mais qu’on peut aussi utiliser comme terrains de parcours pour un bétail plus nombreux. Ces éléments du saltus sont, très souvent, des tenures, le seigneur en lauzime la vente, les réinféode. En 1460, un brassier prend en tenure trois arpents de bosigue à Montgiscard148. Des tenures de friches pérennes, devenues vacantes, sont mises aux enchères : les bayles de l’hôpital Saint-Jacques de Montgiscard donnent en nouvelle inféodation, en 1459, à un forgeron, trois pugnères de bosigue, situées à Montgiscard, « en tant que dernier et plus offrant », les oblies sont de cinq deniers tr149. Jean de Saxis reçoit, en 1460, beaucoup de reconnaissances de ses tenanciers de Baziège pour des parcelles de friches150. Nous avons vu qu’il donne une portion de sa réserve en emphytéose : un « territorium » franc et libre « ab omnium onere obliali », situé à Saint-Martin-des-Champs, à Baziège151. Le preneur doit labourer, « disbosigare », édifier une maison ou borde pour les siens, avant six ans. Il doit donner des oblies du même montant que le loyer demandé par Jean de Saxis pour sa borie dels martis. Jean de Saxis met en valeur des biens qu’il vient, peut-être, d’hériter.

  • 152 Ils sont variables aussi par rapport au montant du cens, ce qu’on retrouve ailleurs, en Catalogne (...)
  • 153 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 41 v°.
  • 154 A.D.H.G., 3 E 10137 164 v°.
  • 155 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 152 r°.
  • 156 Berthe (M.), Le droit d’entrée..., op. cit., p. 272.
  • 157 Lorcin (M.-Th.), Les campagnes de la région lyonnaise aux xive et xve siècles..., op. cit., p. 97 (...)

44La multiplication des droits d’entrée, dans la deuxième moitié du xve siècle, constitue aussi un signe de raréfaction des terres. Ces droits peuvent correspondre à la valeur vénale du bien ou à peu près ; ils peuvent être beaucoup plus faibles que celle-ci, indice probable d’un mauvais état152. Des différences sont perceptibles, d’un village à l’autre, selon la situation, bien sûr, du marché de la terre, mais aussi, à l’intérieur d’un même village. Les deux exemples d’inféodation de bosigues à Montgiscard cités plus haut le montrent, le droit d’entrée des trois arpents est de 6 écus (à 27 sous 6 deniers tr), à payer en deux ans, soit 2,75 £ l’arpent, supérieur à la valeur vénale moyenne de l’arpent de friche qui est, nous l’avons vu, de 2,43 £. Le droit d’entrée pour les trois pugnères est de 11 sous 8 deniers, il est très inférieur à la valeur vénale de la parcelle qui serait de 36,4 sous, mais l’inféodation n’est réalisée qu’après enchères, les amateurs ont été rares ou l’hôpital Saint-Jacques a un besoin urgent de liquidités. Les droits d’entrée portant sur deux « hospicia sive patis » inféodés par ce même hôpital sont de deux écus d’or153, les prix de ces emplacements sont alors très variables mais toujours supérieurs à cette somme, 8 £, 24 £. Le tenancier les obtient, là aussi, à la suite de mise aux enchères et il doit bâtir sur ces ruines. D’autres entrées sont très faibles : pour cinq arpents de bosigue situés à Pompertuzat, l’entrée est de trois écus (82,5 sous contre un prix moyen, pour la même superficie, de 243 sous), les oblies sont de quatre deniers tolsans154 ; pour deux arpents de terre toujours à Pompertuzat, l’entrée est de trois écus d’or (82,5 sous contre un prix moyen de 315,6 sous), les oblies sont, là aussi, de quatre deniers tolsans155. Maurice Berthe formule l’hypothèse de cycles avec des périodes où les entrées sont symboliques, d’un prix modique, quand il y a dépopulation et terres vacantes et des périodes où les prix d’entrée sont proches de la valeur marchande quand la reconstruction s’effectue. Le montant de l’acapte serait un baromètre de l’occupation du sol et du marché de la terre, ainsi, au xiiie siècle, le prix moyen des entrées était à Pexiora de 44 sous, mais avec une moyenne de 9 sous 3 deniers entre 1200-1220 et de 57 sous 6 deniers pour 1280-1300, l’acapte augmente quand la terre se raréfie156. Cette augmentation des entrées qui se rapprochent de la valeur vénale des biens apparaît un peu partout, en Lyonnais, en Auvergne, en Bourbonnais, en Quercy157. En Lauragais des acaptes élevées existent, courant xve siècle, mais elles ne sont pas généralisées, il faut rajouter sûrement à la conjoncture amenant le tenancier à accepter une entrée élevée, les motivations plus personnelles, un tenancier confront d’un bien est particulièrement intéressé et va payer le prix fort pour l’obtenir.

  • 158 A.D.A., 3 E 9468 f° 79 r°.
  • 159 Elle disparaîtra en tant que telle au xviiie siècle, le site est parfaitement fossilisé aujourd’hu (...)

45Trois exemples, tous de la fin du siècle, montrent que certains seigneurs ont encore de grandes superficies de terres à remettre en valeur, qu’il s’agisse d’exploitations données en tenure anciennement et devenues vacantes ou d’éléments de la réserve et, même, de villages. Jean de Solagiis, un forgeron de Castelnaudary, vend, en octobre 1470, une locatam dans le village de Pechbusque et 200 sétérées de terre (prés, terres cultivées, ermes), qui furent à noble Pierre de Ruppeforti, situées dans les dépendances du lieu, l’acheteur est Jacques Dostenx, de Toulouse158. Ces terres, localisables, sont dans un secteur alors assez humide, situé en limite du consulat de Castelnaudary. Le prix est dérisoire : 9 écus et 25 s tr, le service n’est que d’un double ; il existe, semble-t-il, des arrérages de tailles et d’albergues. Pechbusque est alors une communauté en décadence159.

  • 160 La ferme actuelle de Planoles (Coordonnées Lambert 565,5-3102,6) pérennise ce bien, les confronts (...)
  • 161 A.D.A., 3 E 9462 f° 151 v°, l’acte figure aussi dans un autre registre A.D.A., 3 E 1496 f° 56 v°, (...)
  • 162 Saint-Julien-du-Puy, près de Lautrec (Tarn).

46Deux exemples concernent la Piège et émanent d’un même seigneur. Le 9 novembre 1467, noble Guilhem-Arnaud de Castroverduno, chevalier, seigneur de Sainte-Camelle et co-seigneur de Saint-Amans, seigneur direct des biens, donne « ad novum feudum seu ad novum acapitum et in emphiteosam perpetuant » à Raymond de Bossenac et Guilhem Cavaleri, de Mireval, un bois (nemus sive bartas et brogas) de 200 sétérées in terminio de Fonters, lieu-dit an planhola, avec, en confronts à l’autan, le ruisseau, au cers, la route, au midi, la juridiction de Saint-Amans, au nord, Raymond André de Fonters160. Les tenanciers promettent d’améliorer le bien (cf. infra « le faire-valoir »). Le cens est de trois doubles, les lods et ventes sont d’un denier par sou, en cas de vente ou d’engagement. Il n’est pas fait mention de droit d’entrée161. Le 28 février 1477 (n. st.), le même Guilhem-Arnaud de Castroverduno, seigneur de Sainte-Camelle et de Cumiès, dans le diocèse de Mirepoix (dont il vient peut-être d’hériter), le lieu (dans le titre de l’acte, boria et loco) de Cumiès étant vacant et sans habitants, « ...et multo tempore retroacto solitarius et inhabitabilis fuit et remansit », « comme il y a dans ce lieu, plusieurs et diverses terres tant cultivées qu’incultes et plusieurs et divers bois, vignes, prés, pascuas, barthes et autres qui ne produisent rien, pour que cela lui soit plus utile ainsi qu’à ses successeurs », le donne, avec ses terres et possessions « ad novum feudum seu ad novum acapitum et ad le novam emphiteosim perpetuam sub aliquo censuo et servicio annuali et perpetuo tradatur », à Antoine de Fontvielha (Fonteveteri) de Saint-Julien del Pueg162, diocèse de Castres et à ses héritiers et successeurs pour trois quarts et à Jean Sabateri junior, du même village, pour un quart. L’acte rappelle à plusieurs reprises tout ce qui est concédé : « solo fundamentis parietibus clausieris tectis istillicidiis aqueriis aquariesis et aliis suis bastimentis et edificiis et clausuris introytibusque exitibus viis et aliis juribus et pertinentis suis universis passegiis, carreriis, erbisque mortuis erbagiis, patuis, localis », sauf les bois, terres et barthes déja inféodés à d’autres personnes. G.-A. de Castronovo se réserve la tour du lieu avec une pièce de terre contiguë et une locata. Les limites du bien sont indiquées, elles sont celles du village actuel de Cumiès. Un droit d’entrée de 120 écus (165 £ tr) est demandé (et a été payé), lauzimes, foriscapes et cens sont à payer. Le cens consiste en 28 setiers de froment, « bon, beau et purgé avec deux cribles », 10 setiers d’avoine à la mesure rase, six écus à 27 s 6 d tr et 12 poules. Le droit d’entrée correspond au prix d’une ferme de deux trains de labour, 24 ha, alors que les terres du village font actuellement, à peu près, 350 ha, dont la moitié dans la plaine du ruisseau de la Ganguise ; une partie du lieu, toutefois, de superficie inconnue, a été inféodée à d’autres individus.

  • 163 A.D.A., 3 E 9463 f° 137 r°, le même acte apparaît dans le registre 3 E 9462, au f° 151 v°.

47Des clauses concernent la pâture des animaux et le droit de chasse. Le bétail des étrangers ne peut pas pâturer sur les terres du « lieu », celui du seigneur le peut ; les preneurs et leurs héritiers peuvent, cependant, mettre en défens 10 sétérées de pré sur lesquelles les animaux du seigneur ne peuvent entrer. Ils peuvent « chasser et faire chasser les bêtes grosses et petites qu’il est habituel de chasser et prendre sur le territoire, y compris les lapins ». A. G. de Castroverduno peut, lui aussi, « chasser et prendre les animaux gros et petits ». Il détient haute, moyenne, basse justice et mère, mixte, impère. Une aide est prévue si ses enfants, garçons et filles, se marient ou entrent au couvent, les deux tenanciers et les habitants de Cumies doivent donner à chaque fois trois écus (à 27 sous 6 deniers tr). G. A. de Castroverduno prévoit donc un retour de la population dans le village ; les preneurs ne sont tout de même pas mandatés pour effectuer le repeuplement163. Chaque année, deux journées de corvées de bœufs sont dues, une pour semer et une pour dépiquer le blé d’A.-G. de Castroverduno, à Cumiès ou à Sainte-Camelle ; les habitants qui possèdent des chevaux doivent participer eux-mêmes à ces corvées et non leurs animaux. Il est interdit aux tenanciers d’aliéner à des clercs et autres personnes de mainmorte.

  • 164 A.M.T., EE 2 f° 129, signalé par Nicephor (M.), Les châteaux du Lauragais du xvie siècle jusqu’au (...)
  • 165 Ramière de Fortanier (J.), Les droits seigneuriaux..., op. cit., p. 167.
  • 166 Duffaut, Monographie de Roqueville..., op. cit., p. 121 et Ramière de Fortanier (J.), Les droits s (...)

48La famille de Castroverduno n’avoue, en 1389, que des biens situés à Montesquieu et à Lanta, Cumiès n’est pas mentionné. Le village, d’après les listes de procurations (cf. supra), ne paraît pas connaître des difficultés particulières à la fin du xive siècle, la baisse de population a dû s’effectuer courant xve siècle, au profit, peut-être, des lieux fortifiés proches, comme le Mas-Saintes-Puelles. Cumiès est vendu, droit de justice et directe, en 1528, par Jean de Castroverduno, pour 2 100 £, à Sicard et Arnaud de Garaud. Un dénombrement de S. et A. de Garaud, datant de 1541, mentionne un « vieux petit edifice »164, la tour signalée dans l’acte de 1477 ? Ils construisent un « beau château », mentionné dans un dénombrement de 1558 ; les revenus des censives se montent alors à 30 setiers de blé, 13 setiers d’avoine, 11 poules et 11 £165. Si l’on compare le montant du cens des deux tenanciers de 1477 à ce revenu, on s’aperçoit qu’ils avaient eu l’essentiel des terres de Cumiès. En 1689, Antoine d’Advisard, fils d’un nouvel acheteur, fait aveu et dénombrement, la justice rapporte alors 20 sous de revenu, les censives 9 £, 24 setiers de blé et 12 setiers d’avoine ; il n’existe pas de terres nobles. Au xviiie siècle, un nouvel acheteur essaie de récupérer les aides qui apparaissent dans l’inféodation de 1476, soit, dit-il, trois écus à 27 sous 6 deniers tournois pour le mariage du seigneur, l’entrée de ses enfants en religion ou autre établissement166.

  • 167 Tricard (J-), Les campagnes..., op. cit. p. 193 et L’habitat dispersé..., op. cit. pp. 143-154.
  • 168 Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., p. 65 et suiv. et p. 189 et suiv.

49Nous avons donc deux exemples de très grosses inféodations, avec même une mention de « locus », terme employé en Limousin pour qualifier parfois la tenure-bloc et, le plus souvent le hameau ou le village167. On n’a pas à Cumiès un véritable accensement collectif comme on en trouve en Quercy, où le seigneur accense ce qui correspond à une commune actuelle, sous l’appellation de boria, affar, tenementum, à plusieurs chefs de famille, les biens étant accensés aux tenanciers, « comuniter et pro indiviso ». Les biens y sont dits hermes, stériles, inhabités, les redevances sont rarement exigibles dans leur totalité dès la 1ère année168. À Cumiès, on ne note pas d’aménagements favorables aux colons, il n’est pas question de délai de paiement de cens et un droit d’entrée est demandé.

  • 169 Les reconnaissances sont effectuées du 18 février 1489 (n. st.) à la fin mars 1490 (n. st.), les i (...)
  • 170 A.D.A., 3 E 9470 f° 76 r°, 77 v°, 73 v°.
  • 171 A.D.A., 3 E 9470 f° 74 v°.
  • 172 La ferme Rustan existe toujours (Coordonnées Lambert 560,7-3110,8), à proximité de la ferme de Gan (...)
  • 173 A.D.A., 3 E 9470 f° 82 v°.
  • 174 A.D.H.G., 3 E 15439 f° 70 r°. Aujourd’hui, la ferme de Boucenac (Coordonnées Lambert 566,2-3106) e (...)

50La Piège est alors remise (ou pour certaines zones, mise pour la première fois) en valeur, les seigneurs locaux interviennent, mais aussi le roi. Un registre contient des reconnaissances en sa faveur et toute une série de nouvelles inféodations effectuées au Mas-Saintes-Puelles, en 1489-90, par le substitut du procurateur royal de la judicature de Lauragais169. Il inféode des lots de terres dont la nature n’est pas précisée : « une certaine quantité de terres contenant tant de sétérées ou environ », à Quiries, à Saint-Jean de Cartels (où se trouvent deux chapelles rurales, vestiges d’un habitat antérieur à l’incastellament), à la Morga170. Ces lots de terre font entre 24 et 140 sétérées (50 ha), une borde est bâtie sur le plus important171. Toutes ces terres sont situées dans le même secteur, dans la partie la plus élevée du finage du Mas-Saintes-Puelles (300 mètres), en limite du territoire de Cumiès. Deux fermes, celles d’Abram et de Ganguise, existent déjà dans cette zone. La majorité des sols y est de qualité médiocre, les pentes sont fortes, mais l’approvisionnement en eau est assuré par le ruisseau de Ganguise. Ces inféodations correspondent à un découpage de la réserve royale, probablement inexploitée jusque-là, puisqu’un seul bâtiment est signalé sur un total de 300 sétérées inféodées (plus de 100 ha). Les tenanciers sont tous du Mas-Saintes-Puelles ; l’un d’entre eux va laisser son nom à une ferme : Etienne Rustanh qui prend 30 sétérées de terre « a la plana », « a ganguisa »172. Toutes ces inféodations ou reconnaissances suivent le même schéma : interdiction de vendre ou d’engager auprès de chevaliers, clercs, monastères, léproseries, lods et ventes d’un denier par sou pour une vente, d’une obole par sou pour un engagement. Le cens est généralement d’un denier tournois par sétérée, les paiements s’effectuent pour le 15 août ou la Toussaint ; le tenancier d’une exploitation de 20 sétérées, doit donner une quartière de blé, mesure du Mas, et, pour chaque sétérée, un denier tournois au 15 août173. Certains profitent de ces inféodations pour agrandir leur exploitation : Jean Chanardi devient tenancier de 24 sétérées à Quiries, le 2 avril 1489 ; il avait acheté, le 18 février, cinq quartières de terre ou bosigue, pour 20 sous tr, dans ce même secteur, où il possédait déjà des biens. De nouvelles installations se produisent dans des secteurs de la Piège déjà mis en valeur : le 6 février 1489, Guilhem et Jean Valete, de la borie de Boussenac, vendent à Bernard Salamonis, un quart de tout le territoire de la borie pour 20 écus à 27 s 6 d tr, B. Salamonis va construire des bâtiments sur ces terres174.

51Les zones les plus élevées de la Piège, aux pentes fortes, situées en limite des finages villageois, apparaissent comme les seuls secteurs, pratiquement, du Lauragais, où la mise en valeur n’est pas achevée à la fin du xve siècle. Ailleurs, même dans le Terrefort de l’Entre-Deux-Hers, la remise en état, au niveau de la seigneurie, s’est effectuée, les tenures sont réaccensées, les bâtiments ruraux réparés ; de nouvelles exploitations, découpées sur les réserves, sont inféodées ou louées à court terme. L’exploitation directe de la réserve se poursuit (par des salariés, des corvées). Quelques seigneurs rachètent, nous l’avons vu, des tenures-blocs qu’ils avaient autrefois concédées ou des exploitations voisines de leurs fiefs (les trois frères de Roqueville, en 1459).

II. LES ESTIMES CONFIRMENT-ELLES OU INFIRMENT-ELLES CES RÉSULTATS ?

52Les sources notariales nous font voir, surtout, la façon dont les nobles gèrent leurs réserves et les tenures devenues vacantes ; les alleux sont bien moins documentés, on les aperçoit seulement à l’occasion de baux de location à court terme et de ventes. Les estimes, par contre, permettent de voir tous les biens taillables, quel que soit leur statut juridique, mais surtout dans la deuxième moitié du xve siècle. Confirment-elles ce qui apparaît dans les registres notariés ?

  • 175 F. Mistral, Lou trésor.., op. cit., deserta : désert, inculte, herm.

53Quelques déclarants possèdent « terra deserta175 », « terra erme ». Si ces expressions sont employées, cela signifie que la parcelle a été cultivée autrefois, sinon, on aurait le vocabulaire habituel des friches. Parfois, on précise qu’une friche avait, antérieurement, une autre destination. Ces mentions n’existent pas en Lauragais oriental, même à Fendeille, située en partie dans les collines de la Piège, elles sont très rares en Lauragais occidental : trois parcelles sont « herme » à Montesquieu en 1485 sur 1359 parcelles non bâties, soit 0,22 %, quatre parcelles de « terre herme » et trois « bosiga » qui furent des vignes sont signalées à Mont-giscard, en 1489, sur 589 parcelles, soit 1,18 %, une terre herme et une « bosiga que solia estre vinha » apparaissent aux Bastards. A Ayguesvives, les mentions sont un petit peu plus fréquentes, elles concernent 10 parcelles sur 332 soit 3,01 % du corpus. Deux parcelles étaient auparavant des vignes, un patu de borde est déclaré avec une terre « que solia estre vergie ». Quelques parcelles de brogues et ginebres payent des oblies, d’après les registres, peut-être s’agit-il de terres anciennement cultivées et retournées à la friche. Les confronts n’étant pas fournis dans les localités du Terrefort occidental, on ne peut voir si les parcelles vacantes sont très nombreuses. A Castelnaudary, on en aperçoit très peu, elles sont plus fréquentes à Fendeille, même en 1495 ; certaines se trouvent dans la partie la plus riche du finage du village, sur le piémont de la Piège.

54Des bâtiments ruinés sont signalés, situés dans les noyaux urbains ou en campagne, les registres les qualifient de « paretz », « paredasses » (péjoratif), « tapias ». Ces ruines sont plus ou moins fréquentes selon les localités. Des espaces vacants, localia, logada, logar, plassa, sont déclarés à l’intérieur des murailles, il s’agit de parcelles qui étaient autrefois bâties et qui peuvent, encore, porter des murs en ruine, ce qu’indiquent quelques actes notariés (cf. supra). Il est, en effet, peu probable, étant donné les frais de réalisation des murailles, construites, pour la plupart, dès le début de la guerre de Cent ans, qu’on ait englobé dans le périmètre de protection des terrains inoccupés.

Les mentions de ruines dans les estimes :

Les mentions de ruines dans les estimes :

55Dans le registre CC 9 de Castelnaudary, le plus ancien, deux des biens ruinés sont des fermes : tapias de campmas près du Tréboul, avec 40 sétérées de terres et prés, appartenant à J. Jaime de Saint-Martin-Lalande et paredasses de campmas à Cogurone, appartenant à G. Lobat. Les autres tapias correspondent à deux bordes et à un ostal. Vingt et un logar ou logada d’ostal et dix logar ou logada de bordes sont mentionnés, ils sont situés, soit à l’intérieur des murailles, mais tout près de celles-ci, soit à l’extérieur. En ne prenant en compte que les ostals et fermes, 24 bâtiments sont en ruine sur un total de 313, soit 7,66 %. Dans le registre CC 8, on n’aperçoit pas de ruine, mais ce registre ne contient que les manifestes des gens d’Église qui ont les moyens d’entretenir leur patrimoine. Dans le registre de Montesquieu de la mi-xve, incomplet, une des logada concerne un ostal, les autres correspondent à des habitats ruraux. Quelques toponymes montrent l’existence d’un habitat intercalaire, abandonné à une date inconnue : « villa del bosc », « sala vielha », « am salas ».

  • 176 Alors que cela semble fréquent en Provence, dans la deuxième moitié du xive siècle et au début du (...)

56Les occurrences de biens en mauvais état sont très rares dans les estimes de la fin du xve siècle. À Montgiscard, deux fermes et trois bordes, au sens de petit bâtiment, sont en ruine. A Ayguesvives, les ruines déclarées correspondent à trois bordes situées dans le barri et à deux habitats de campagne : une borde de défrichement et une tuilerie. A Montesquieu, en 1485, on déclare six logars d’ostal, trois de bordes et deux de campmas, ils sont plus nombreux que dans le registre précédent, mais il est peu probable que la situation se soit dégradée depuis une trentaine d’années, ceci doit tenir au fait que le registre le plus ancien est incomplet. A Castelnaudary, les ruines mentionnées dans le registre de 1496 correspondent à trois ostals et deux fermes : le chapitre Saint-Michel possède tapias de campmas de 20 sétérées qui furent à Vidal Lobinhac, vers le Tréboul, James Domerc possède un demi-campmas deruyt, situé à Coumba grassa, un secteur de bonnes terres, ainsi que l’indique le toponyme, à un kilomètre à peu près de l’entrée de la ville médiévale. Les logada consistent en une logada de moulin à vent, deux de bordes et 15 d’ostals. Les ostals ou fermes ruinés représentent 4,37 % du total des bâtiments. Dans le registre de 1516, on n’aperçoit plus de logada, une seule ferme en ruine (campmas sive tapias de campmas), est mentionnée. Pour l’ensemble des registres d’estimes, on arrive à 11 mentions de campmas détruits ou en ruine (sur 300 occurrences), soit 3,66 %176, les biens-fonds ruraux ne sont pas en plus mauvais état que l’ensemble du bâti urbain.

  • 177 25 pati d’ostal et trois pati de borde ; on trouve aussi dans la localité deux bâtiments de très f (...)

57Les pati ou patu dont il a été question dans la partie « sources »n’ont pas été inclus dans le tableau puisqu’une incertitude plane sur ces espaces. Ils peuvent constituer des espaces de circulation, correspondre à des emplacements à bâtir ou à des emplacements autrefois bâtis ; dans ce cas, ils traduiraient une gêne économique empêchant d’effectuer des travaux de réfection. On en signale surtout à Montgiscard177.

58À Castelnaudary et Fendeille où l’on dispose d’estimes du début du xve siècle, on peut noter que les occurrences de ruines et d’emplacements vacants sont plus fréquentes au début du siècle qu’à la fin, cela corrobore les indices aperçus dans les registres notariés. Ces signes de crise sont toutefois très limités et ne traduisent pas un très grand appauvrissement. On reconstruit alors des bâtiments, en tout ou partie, des augmentations d’allivrement pour ces motifs sont indiquées dans les marges du registre CC 9, qui a peut-être servi une dizaine d’années, les travaux seraient effectués dans les années 1420-1430, au plus tard. Nous ne disposons pas, pour cette période, de registre d’estimes pour le Terrefort occidental où la situation, d’après les actes notariés, semble plus difficile que dans le reste du Lauragais.

  • 178 A.D.H.G., 5 E 73 f° 9 v°.
  • 179 A.D.H.G., 5 E 73 f° 135 v°.
  • 180 A.D.A., 4 E 076/CC 10 P 38 r°.
  • 181 A.D.H.G. 5 E 73, jardins et bordes als barris f° 88 v°, 90 v°, ostals als barris P 85 v°, 87 r°, 8 (...)
  • 182 A.D.H.G., 5 E 73 f° 105 r°.
  • 183 A.D.H.G., 5 E 67 f° 17 r°.
  • 184 A.D.H.G., 5 E 66, f° 133 v°.
  • 185 A.D.H.G., 5 E 66 f° 134 r°.
  • 186 A.D.H.G., 5 E 66 f° 2, f° 134 r°.

59Les estimes de la seconde moitié du siècle mentionnent encore quelques parcelles abandonnées, quelques bâtiments en mauvais état mais recèlent, surtout, toute une série d’informations traduisant l’enrichissement de certains et une nouvelle orientation agricole. Quelques rajouts sur les manifestes ou des corrections portées dans la marge des livres montrent de plus en plus d’« améliorations » apportées aux biens, constructions d’ostals, de bordes sur des parcelles de terre ou en ville, de moulins, ce qui se traduit par des « creys » d’estimes. À Montesquieu, dans le registre le plus ancien, un « vieil ostal » est signalé dans une parcelle de terre labourable, son propriétaire a fait bâtir une nouvelle maison un peu plus loin178, un moulin a été édifié par B. Dalby, etc.179. A Castelnaudary, le campmas de Pratfenares est dit « bastit de novel »180. Les rajouts concernent surtout des constructions faites dans la ville : des ostals « que a bastit de novel » sont parfois signalés sur ce qui était jusque-là allivré comme une simple logada. Dans le registre de Montesquieu de 1485, 18 rajouts concernent des constructions, dans le village ou en campagne, et trois des essarts. Des barris existent dans toutes les localités, hors des murailles. A Montgiscard, deux barris sont signalés : un au nord-ouest, en direction de Toulouse, dit barri de Toulouse ou inférieur, l’autre « de porta vielha », dit aussi barri supérieur ou d’auta, au sud-est, on y trouve bordes et jardins. La bourgade d’Ayguesvives a aussi son barri où sont établis jardins et bordes, mais aussi quelques ostals181 ; Ramon de Pechbusque y possède sept bordes dont une avec verger, pesquies et four182. À Montesquieu, en 1485, le barri est établi entre les « fossés de la ville », qui entourent le fort et les fossés batallers ou vieux fossés, un ostal est même situé dans ces derniers183. Dans le registre 5 E 66 (dit de 1409), la ville débordait déjà des murailles, deux ostals étaient bâtis dans le barri, celui de Jean Dites184 et un de ceux de Duran Thomas185, deux ostals se trouvaient aussi dans les fossés vieux186 (ce qui laisse supposer que la guerre était terminée et confirme que le registre date bien des années 1450-1460 et non de 1409).

  • 187 A.D.H.G., 5 E 73 f° 84 v°.
  • 188 A.D.H.G., 5 E 73 f° 100 r°.
  • 189 A.D.H.G., 5 E 66 f° 144 r°.

60Les estimes nous montrent un espace totalement cultivé dans la plaine de Castelnaudary, si ce n’est dans quelques fermes des confins du finage où subsistent des friches destinées au bétail. Les friches, sur le Terrefort, ne résultent pas d’une rétractation de l’espace cultivé suite à la peste de 1348, elles sont un moyen de profiter au mieux des conditions naturelles, faible qualité du sol sur les sommets des collines, fortes pentes. On en tire de multiples ressources (bois, baies, ajoncs...) et elles servent de terrain de parcours pour le bétail. L’inculte est parfois soumis à un agrier, c’est le cas de 33 arpents de bosigas187 et de 15 arpents de bois et brugas, situés à Ayguesvives188. Une réduction, en quelques décennies, de la superficie du saltus, est observable à Montesquieu, si l’on considère les terres dont on connaît l’utilisation exacte (parcelles mixtes mêlant terres cultivées et incultes exclues), il passe de 28,12 % du finage à 22,73 %. Dans toutes les localités du Terrefort haut-garonnais, les terres mixtes montrent une très progressive mise en culture des friches. Quelques mentions claires d’essarts (detrayt, yssart), de terres desbosigadas apparaissent dans les registres de cette zone (alors qu’on en trouve une seule à Fendeille dans le registre de 1428). Les parcelles défrichées sont de très faible superficie et sont déclarées, le plus souvent, par des individus qui sont en train de constituer des domaines. Quatre essarts sont mentionnés dans le registre le plus ancien de Montesquieu, les héritiers de Bertrand Fournié, par exemple, possèdent, à Bosc barrat, 35 sétérées de bosc et brogas où se trouvent trois pugnères de trayta189 et des barthes « am un bon pauc de terras laboradissas ». Cinq essarts apparaissent dans le registre de 1485 (trois « trayta » pour un total de 138 ares, un plantier situé dans des anols, une terre mixte « cultivée et inculte » où se trouve une pugnère de « laboradis »), un lieu-dit « als yssars » est mentionné. A Montgiscard, trois detrayt ou yssart sont déclarés, un detrayt d’une pugnère est réalisé sur quatre arpents de bosiga, les deux autres font chacun un demi-arpent, soit 74 ares ; on en déclare deux à Ayguesvives.

  • 190 A.D.H.G., 5 E 73 f° 98 v°.
  • 191 A.D.H.G., 5 E 73 f° 92 r°.
  • 192 A.D.H.G., 5 E 73 f° 103 v°.
  • 193 A.D.H.G., 5 E 67 f° 62 v°.
  • 194 A.D.H.G., 5 E 67 f° 1 r°.

61Des exploitations sont en cours de création aux Bastards ; on peut en repérer dans les autres localités du Terrefort haut-garonnais. À Ayguesvives, Jean del Sol possède une borie, mais aussi huit arpents de « terra brogassas », où il y a cinq arpents de « laboradis » et deux arpents de « terra et brugas », où se trouvent cinq pugnères de detrayt190. Les frères Jacques et Jean Alboy déclarent une borde, quatre arpents de terre, où il y a un arpent de detrayt, et 13 arpents de bosigas, situés à Montalbuou191. Un autre déclarant détient une cabana, un jardin, un arpent de vigne, sept arpents de terre et huit arpents de bosigas « an brau »192, il n’a pas d’ostal, on peut supposer qu’il est en train de défricher un territoire à partir d’un bâtiment en matériaux légers. A Montesquieu, en 1485, J. Mario déclare une émine de trayta et six pugnères de brogas et d’anols estimées 3 £ 5 sous, et, au même endroit, une cartonnade de brogas où se trouvent trois pugnères de trayta, estimée quatre £. Cet homme possède aussi un malhol dans un autre lieu, il n’a pas d’ostal. Plus tard, un rajout est fait sur son manifeste : « creys » pour le bâtiment « de la bordeta », 10 sous193. Il est donc en train de défricher, en 1485, et il va construire des bâtiments sur son exploitation. Dans ce registre de 1485, des rajouts sont effectués sur le manifeste de Jean Alboy, il déclare une borie « a san Roma », en limite de la forêt de Saint-Rome, borie de 12 sétérées de terres labourables, dont trois pugnères de malhol (les charges sont seulement de deux pugnères de froment et trois d’avoine). Cette borie est allivrée 44 £, un croît d’estime est effectué pour une sétérée de terre qu’il a défrichée (desbosigada)194. Cette « colonisation » du saltus peut signifier que la terre disponible ne suffit plus, étant donnée la croissance démographique. Les rares « séries » de registres d’estimes montrent parfois, comme déjà indiqué, une tendance à la réduction de la superficie moyenne des propriétés à Montesquieu, une diminution du nombre moyen de parcelles à Fendeille, signe d’un entassement. À Castelnaudary, quelques campmas sont partagés entre deux ou trois héritiers.

  • 195 Coulet (N.), Aix-en-Provence..., op. cit., p. 144, alors qu’Emmanuel Le Roy Ladurie dit que s’étab (...)

62On assiste, à partir des estimes, à un développement des activités les plus rentables, avec une augmentation de la part du finage consacrée à la vigne, aux prés et ferragines. À Castelnaudary, on note une progression des prés et des ferragines, celles-ci correspondent, en 1496, à 0,07 % de la superficie recensée, contre 0,02 % au début du siècle. Les superficies consacrées aux vignes ont aussi progressé, puisque les parcelles de « terres mixtes » qui correspondent à plus de 20 % du finage sont composées de « terre et malhol ». A Montesquieu, dans le registre le plus ancien, la vigne occupe 5,81 % du finage des propriétés des résidents, les prés 6,81 %, les « terres mixtes » qui comprennent, entre autres, des vignes 6,12 %. En 1485, ce sont respectivement 7,99 %, 5,82 % et 19,07 %. Les prés n’ont pas progressé, mais, dans cette localité, le bétail peut profiter des nombreuses friches. La part des terres des résidants consacrées aux terres labourables passe de 56,99 % à 54,31 %. Dans la région aixoise, la reconquête agricole, amorcée fin XIVe, s’accélère à partir de 1430 et se traduit par moins de surfaces emblavées, des moulins en ruine, des vignes et cultures maraîchères qui gagnent du terrain195. En Lauragais, les moulins bladiers ne tombent pas en ruine, les céréales continuent d’être cultivées mais les superficies emblavées se réduisent, au profit des vignes et du pastel. Le saltus reste important dans tout le Terrefort mais sa part dans le finage commence à décliner lentement, des secteurs sont en cours de défrichement, en particulier aux Bastards, ce qui laisse augurer d’un changement d’orientation, d’une réduction de l’élevage, au profit, surtout, du pastel. Ce dernier gagne peu à peu les pentes bien exposées des collines du Terrefort qu’il occupera totalement au siècle suivant. Il est de plus en plus présent dans les registres notariés, mentionné dans les baux de fermage et de métayage, vendu sous la forme de coques ou d’agranat.

63Quel bilan peut-on tirer de tous ces indices ?

64Des éléments contradictoires apparaissent, les terres retournées à la friche sont présentes et pourtant, des droits d’entrée, parfois élevés, sont perçus, les prix des terres sont du même ordre au début et à la fin du xve siècle, alors que, logiquement, ils devraient être plus faibles au début du siècle, la pression démographique étant moindre. On peut trouver, à une même date, parfois dans le même village, des signes de rétractation de l’espace cultivé et des signes de reprise.

  • 196 Ce que pense aussi J. Tricard, Les campagnes limousines op. cit., p. 49.

65Pendant la période 1380-1410, des signes de gêne apparaissent, marqués par les emprunts, les achats à crédit, les ventes à réméré, les déguerpissements, les constitutions de rentes, quelques terres sont vacantes sur le Terrefort. C’est aussi un moment où les seigneurs interviennent, ils rappellent les tenanciers à leurs devoirs, récupèrent les droits de mutation, réinféodent les tenures vacantes. Peut-être veulent-ils restaurer leur autorité196, peut-être n’y songent-ils que parce qu’ils viennent de faire aveu et dénombrement au roi, il y a souvent concomitance entre ceux-ci et les révisions de terriers. Pour attirer ou retenir les tenanciers, ils utilisent parfois réduction des taxes et remise des arrérages. Les tenures trouvent des preneurs, signe qu’il n’existe pas un marasme démographique. La reconstruction, pour les nobles, quant à leurs tenures et réserves, est achevée, dans la plaine, vers 1450, seuls les secteurs situés en limite des finages villageois, dans les zones collinaires peu favorables, comportent des friches et sont l’objet de nouvelles inféodations. Pourtant, d’après les aveux et dénombrements du Ms. 634, les friches abonderaient encore dans les réserves et les tenures ne rapporteraient pas toujours, mais on peut soupçonner une fraude de la part des vassaux. Dans la deuxième moitié du xve siècle, seule la Piège, un des secteurs les plus répulsifs quant aux conditions naturelles et où la population a fortement diminué courant xive siècle et même au xve siècle (cf. les textes concernant Le Py et Cumiès), fait l’objet de tentatives de reconstruction par les seigneurs. Dans cette petite région, les habitats antérieurs à l’incastellament qui devaient péricliter depuis longtemps ont dû recevoir, alors, le coup de grâce ; certains, tels Quiriès, Saint-Jean de Cartels, doivent, déjà, être réduits à une ou deux fermes, d’autres subsistent, mais ont perdu leur consulat, par exemple, Laval-des-Rousses (réuni à Fendeille dans les estimes), Salles (près de Laurabuc), Boucenac (près de Fendeille), Payranel (près de Payra), Saint-Sauveur (près de Gaja-la-Selve), Cailhavel (près de Moleville), Terre-Clapade (près de Villasavary).

  • 197 Comme cela se produit en Quercy, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., p. 189 et suiv.

66Les réserves ne sont pas découpées en tenures parcellaires mais en tenures-blocs, correspondant, au moins, à une douzaine d’ha, avec, souvent, pour le tenancier, une obligation de bâtir. Des lots de terre de la réserve sont aussi confiés en fermage ou métayage, dès les années 1380-1410, mais surtout pendant la deuxième moitié du xve siècle. On ne peut voir si les seigneurs ont profité des vacants (rares d’après les sources) et des tenures déguerpies pour reconstituer des réserves, s’ils ont acheté des parcelles197. Quand la superficie d’une réserve est indiquée sur deux aveux successifs, elle est toujours la même, une seule occurrence d’achat de tenure-bloc a été repérée, celle effectuée par Pierre de Mauriaco.

  • 198 La première phase de reconstruction se situe en 1379-1405, la deuxième se produit en 1444-1450, la (...)
  • 199 Michel Le Mené note plusieurs cas de révision des censiers en 1377, 1380, 1398 ; les tenanciers pa (...)
  • 200 Elle est terminée au milieu du xve siècle, dans les Montagnes Occidentales, les mas désertés étant (...)
  • 201 En Bourbonnais, la reprise ne se fera vraiment qu’après 1532, Germain (R.), Les campagnes..., op. (...)
  • 202 Les deux premières phases de reconstruction sont à peu près les mêmes qu’en Lauragais : 1365-1410, (...)
  • 203 Moriceau (J.-M.), Les fermiers..., op. cit., pp. 79-105.

67La reconstruction, en Lauragais, au niveau de la seigneurie, est relativement précoce, comme cela a été observé dans plusieurs régions, par exemple, en Bordelais198, en Anjou199, en Auvergne200. D’autres régions connaissent une reconstruction beaucoup plus tardive : le Bourbonnais201, mais aussi bien des secteurs de l’Île-de-France où la restauration des censives s’achève vers 1520202, vers 1530 pour le Hurepoix, la Brie203. Si cette reconstruction est aussi précoce, et si, même dans les années 1380-1410, la situation ne semble pas désespérée, au moins pour les catégories qui apparaissent dans les documents, c’est que le Lauragais n’a pas dû beaucoup souffrir de la guerre et de la baisse démographique. On peut penser que les destructions n’ont pas été très importantes ; le brigandage des routiers était ponctuel, ne gênait guère la mise en culture. Quelques moments ont été particulièrement durs (chevauchée du Prince Noir en 1355) mais la reconstruction s’est effectuée rapidement, avec l’aide des souverains (concession de privilèges fiscaux) ; on insiste dans l’autorisation d’ampliation de Castelnaudary de 1366 sur la grande activité commerciale et artisanale de la ville. Les registres de reconnaissances de Montgiscard et de Montesquieu ne signalent pas de présence particulière de friches ou de destructions, même à la fin du xive siècle. L’habitat dispersé est toujours là, les tenanciers aussi, ils ne déclarent que très peu de terres incultes, aucun bâtiment ruiné. Les tenanciers d’Anglaise de Roqueville, par exemple, en 1392, ne reconnaissent pas de friches à Roqueville et à Montgiscard, si ce n’est une parcelle de terres abosigadas, située dans une ferme. Le registre de reconnaissances de Says de Montesquieu montre même qu’en 1371, le bâti, à Montesquieu, a la même allure qu’en 1485 : un faubourg (barri) où sont bâties des bordes, se trouve à côté de la partie fortifiée, des jardins occupent les fossés extérieurs, cela ne traduit pas, a priori, une grande récession démographique et économique. Les vides liés à la peste ont dû être comblés, dès la deuxième moitié du xive siècle, par l’arrivée de migrants provenant en majorité de zones à sols pauvres et peu ouvertes aux courants d’échanges (Piège, Massif Central), les villes drapantes offrant des possibilités d’embauche et une plus grande sécurité pendant les périodes de conflit.

  • 204 Marandet (M .-C.), La gestion de l’impôt direct..., op. cit., pp. 133-144.

68On peut noter, encore une fois, que les diverses sources ne donnent pas la même vision de l’état économique de la région. Celles qui donnent une vision plutôt négative (ruines et désolation) -et même pour tout le xve siècle- sont les sources à but fiscal, ce qui est habituel, et les aveux et dénombrements qui insistent, parfois, sur la présence d’énormes portions de « friches stériles et de lieux inhabités » ; eux aussi, toutefois, nous l’avons vu, peuvent être mensongers. Les estimes, elles, même au début du xve siècle, ne permettent pas de conclure à une particulière désolation de la région. Les registres notariés montrent, surtout, une économie florissante (vente de laine, de pastel). Les foires de Castelnaudary, d’Avignonet attirent des marchands venus de régions éloignées et même de l’étranger (Catalogne, Italie). Les campagnes sont dynamisées par ces activités : la draperie entraîne le développement de l’élevage ovin (vente de la laine, des agneaux, des fromages), le succès du pastel permet un profit important pour les producteurs et transformateurs. Ces deux secteurs emploient une main d’œuvre abondante dans toutes les petites villes drapantes et dans les campagnes (pour le filage, tissage, l’apprêt des draps, pour les sarclages, la cueillette du pastel et la préparation de l’agranat). Le marché toulousain constitue un débouché pour tous les produits issus des activités agricoles, mais il n’est pas le seul, des exportations se font à longue distance, les négociants du Lauragais se rendent régulièrement en Catalogne pour écouler le pastel ; enrichis, ils investissent dans les biens-fonds ruraux et orientent la production. Le Lauragais, dans quelques documents fiscaux, apparaît plus riche que les régions voisines et la population paye, même si c’est de mauvais gré, les impôts réclamés, le taux de recouvrement des tailles, à la fin du xve siècle, est de 75 % à Castelnaudary et 89 % à Fendeille204.

Notes

1 Ce thème n’est pas très novateur, il a été traité et avec des sources plus riches par, entre autres, Robert Boutruche, La crise d’une société..., op. cit. et La dévastation des campagnes pendant la guerre de Cent ans et la reconstruction agricole de la France, Paris, 1947, Guy Fourquin, Les campagnes de la région parisienne.., op. cit. et, beaucoup plus récemment, Jean Tricard, Les campagnes limousines.., op. cit.

2 Tous ces indices : défrichements, nouveaux accensements, constructions nouvelles ont déjà été utilisés par René Germain, Les campagnes bourbonnaises..., op. cit., p. 77.

3 Wolff (Ph.), Les marchands..., op. cit., pp. 49-50.

4 148 biens sont inféodés par 127 actes.

5 Un emplacement de maison (locatam), quatre emplacements au marché, un four, deux moulins.

6 Les reconnaissances portent sur un pré, deux vignes, un ostal, 19 parcelles de terre, deux territoires.

7 A.D.A., 3 E 9470.

8 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., p. 135.

9 A.D.H.G., 3 E 10159.

10 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 85 r° à 91 v°.

11 Ib., f° 171 v° à 172 r°.

12 Ib., f° 214 v° à 217 v°, les oblies sont signalées, on indique que justice et arrière-accapte sont comme « in instrumentis antiquis feudi continetur ».

13 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 91 v°, même chose f° 117 v°.

14 Ib., f° 135 v° à 136 r°.

15 Outre Etienne et Pons de Meretino, noble Anglaise de Saint-Michel, co-seigneur de Noueilles (cinq actes d’inféodation, en 1389), noble G Vinhas, damoiseau, co-seigneur de Noueilles (cinq actes en 1388-1389), noble Arnaud Sobirani (sept reconnaissances, f° 121 v° à 122 v°, six reconnaissances, f° 123 v°, 1389), le couvent des minorettes Sainte-Claire de Toulouse (une inféodation en 1389), noble Ysarn de Baraigne, damoiseau, co-seigneur de Gardouch (deux inféodations en 1391), les maîtres d’oeuvre de l’église Saint-André de Montgiscard (une inféodation, des lauzimes, en 1389), le prieur de Saint-Pierre de Venerque (une inféodation, en 1389).

16 A.M.T., Ms. 634 f° 16 r°, 1389.

17 Ib., f° 34 v°, 1434, il avoue, en supplément, par rapport à l’aveu de 1406, un carton de blé de rente, 3 £ d’oblies, quatre jours de corvée et 38 arpents de terre noble ; le moulin, par contre, n’apparaît plus.

18 Pour J. Tricard, l’accensement est le point de départ d’une nouvelle exploitation de tenure, il pense que si les charges sont précisées, c’est qu’il s’agit plutôt de conditions nouvelles, probablement plus favorables, Les campagnes..., op. cit., pp. 47-48.

19 A.D.H.G., 3 E 10161, années 1404-1410.

20 A.D.H.G., 3 E 10159, années 1383-1391.

21 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 157 r°.

22 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 103 v°.

23 3 E 10163 f° 35 r°, f° 37 r°.

24 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 63 r°.

25 A.D.A., 3 E 9444 f° 137 r°, service 3 d tolsans, 24 novembre 1410.

26 A.D.A., 3 E 9444 f° 154 v°, 1411, deux sétérées, le service est d’une punhère de froment, mesure de Laurac, pour l’une, d’un denier tolsan pour l’autre.

27 A.D.A., 3E 1493, 11 novembre 1417.

28 A.D.A., 3E 1493 f° 56 r°, lieu-dit « ad fontem Vitalis », il existe donc une possibilité d’irrigation.

29 A.D.A., 3 E 1493 f° 1 v°.

30 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 106 r°, mai 1388. Ce déguerpissement figure aussi dans un registre d’étendues, A.D.H.G., 3 E 10160 f° 61 v°.

31 Au xviiie siècle, le seigneur devait accepter le déguerpissement, la vacance des terres était publiée lors du prône pendant quatre dimanches successifs, les terres revenaient au seigneur, dans leur état de noblesse primitive, si personne ne les reprenait, Ramière de Fortanier (J.), Les droits..., op. cit., p. 47. L’usage était probablement le même, à la fin du Moyen Âge.

32 Ainsi que l’a noté J. Tricard, Les campagnes..., op. cit., pp. 52-53.

33 A.D.H.G, 3 E 10162 f° 29 v°.

34 A.D.H.G. 3 E 10162 P 30 r°.

35 Le Mené (M.), Les campagnes ... op. cit., p. 216.

36 A.D.A., 3 E 9444 f° 50 r°.

37 A.D.A., 3 E 9444 f° 66 r°.

38 Le seigneur ne tarde pas à réaccenser les biens sous un cens identique, une réduction du cens est parfois consentie, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., p. 162.

39 A.D.A., 3 E 10159 f° 142 r°.

40 A.D.H.G., 3 E 10161 f° °155 v°.

41 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 245 r°, 28 janvier 1409, deux laboureurs de Montesquieu promettent de payer un écu d’or aux consuls d’Ayguesvives et Montgiscard, pour arrérages d’anciennes tailles.

42 A.D.A., 3 E 9444 f° 53 v°, 19 janvier 1409.

43 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 r°, janvier 1408.

44 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 77 r° ; au f° 74 r°, ils ont reconnu tenir de lui 24 biens ; au f° 76 r°, ils achètent une terre, au f° 76 v°, ils en vendent une.

45 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 152 v°, f° 153 v°, 15 octobre 1407.

46 A.D.A., 4 E 76 CC 54.

47 A.D.H.G., 3 E 10161, par exemple, f° 1 v°, 5 août 1405.

48 A.D.H.G.., 3 E 10161 f° 1 bis r°, nouvelle inféodation à un laboureur d’un arpent de malhol et d’un arpent de terre, avec mêmes oblies et mêmes conditions que pour le bayle ; la même chose au P 1 bis v°, au P 2 r°, au f° 2 v°, au f° 3 r°.

49 Les mêmes précautions apparaissent en Bourbonnais, on précise que la censive ne doit pas être diminuée par un mauvais entretien, un abandon ; quand il s’agit de tenures à champart, le seigneur reprend la terre si elle n’est pas travaillée pendant plus de trois ans, la coutume le permet. Le non versement du cens à la date fixée permet au seigneur de pouruivre le tenancier pour obtenir le paiement du cens ou des arrérages et d’exercer son droit de saisine, Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit., p. 301.

50 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 r°, 14 janvier 1408 (n. st.).

51 A.D.H.G, 3 E 10161 f° 89 v°.

52 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 2 r°, 5 août 1405, ils doivent aussi verser des oblies ; le bailleur prend une hypothèque sur un hospicium dans lequel ils demeurent sis in ripperia de Corronsac et sur un casai de sept pugnères contigu.

53 En Bourbonnais, on trouve des réductions de cens pratiquées quand les terres ont vaqué quelques années et même sur des héritages occupés, Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit., p. 287. Des modérations de grains versés apparaissent en Anjou, Le Mené (M.), Les campagnes angevines..., op. cit., p. 219.

54 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 12 v° (deux seigneurs : le collège des pauvrets et Magna de Morlanis).

55 A.D.A., 3 E 9444 f° 45 v°.

56 A.D.A. 3 E 9444 f° 47 v°. Au F 50 v°, le roi et les seigneurs de Besplas donnent en emphytéose à demi -agrier, 15 décembre 1408.

57 A.D.H.G., 1 G 801 f° 1 r°.

58 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 207 v°, 1391.

59 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 19 r°, 2 novembre 1405, etc. Tous les actes comportent hypothèques sur les biens des preneurs. Les baisses de charges sont aussi très rares en Auvergne. Dans cette région, le principe du maintien des redevances a triomphé, les diminutions sont exceptionnelles ; dans certains cas, les seigneurs demandent, comme en Lauragais, l’ « entrage » ou « vestison » qui était exigé au début du xive siècle, Charbonnier, (P.), Une autre France..., op. cit., p. 516 et suiv. Le même phénomène est noté dans la région parisienne. Guy Fourquin conclut, pour la fin du xive siècle et le début du xve à « une détresse rurale ». Champs et vignes sont décrits comme « en buissons et déserts », le rapport des censives baisse et, malgré tout, les réaccensements se font dans les mêmes conditions qu’avant la peste et la guerre, Fourquin (G.), Les campagnes..., op. cit., p. 260 et suiv.

60 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 172 r°.

61 En Comtat, ces droits d’entrée sont très rares au début du xve siècle et ils sont plutôt modestes, quelques sous, deux poules ; un seul exemple d’acapte élevée, 17 florins, concerne une vigne plantée d’oliviers, Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., pp. 469-472 et pp. 563-568.

62 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 11 v° (deux seigneurs, le collège des pauvrets et Magna de Morlanis épouse de Baronis de Baranezio, damoiseau).

63 A.D.H.G, 3 E 10161 f° 150 r°, 7 septembre 1407.

64 A.D.A., 3 E 9444 f° 91v °, les parcelles confronts sont appropriées.

65 A.D.A., 3 E 9445 25 v°, des biens vacants sont confronts.

66 A.D.A., 3 E 9444 P 86 r°.

67 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 46 r°, f° 86 r°, 179 r°, f° 184 r°, 195 v°, 200 r°.

68 Une terre « sive rodorasses », A.D.H.G., 3 E 10159 f° 223 r°, 1392. Un « yssartum », A.D.H.G., 3 E 10159 f° 155 r°, lauzime dans le même acte, oblies de 4 s tolsans à payer en deux termes.

69 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 11 v°.

70 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 23 r°, 1407.

71 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 189 r°.

72 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 209 v°, donation le 16 août 1391 puis, f° 210 v°, lauzime.

73 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 4 r°, 9 mai 1380.

74 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 27 v°.

75 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 63 r°, 4 deniers d’oblies à la Toussaint.

76 A.D.A., 3 E 9444 f° 5 v°, 30 novembre 1405.

77 Wolff (Ph.), Commerces... op. cit., note 15 p. 173.

78 Marandet (M.-C), Quelques signes de gêne.... op. cit.

79 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 200 r°.

80 Ce qui s’est produit en Quercy, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., pp. 197-198.

81 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 12 v°, 1405.

82 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 210 r°.

83 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 240 v° et f° 241 r°, 26 janvier 1409.

84 Par exemple, 4 £ tr un service de deux pugnères de froment pesant sur une terre, située à Labruyère-Dorsa, A.D.H.G. 3 E 10159 f° 105 v°.

85 A.D.A., 3 E 1493 f° 190 v°.

86 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 r°, 13 mai 1425.

87 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 56 v°, 16 mai 1439.

88 Stouff, Le mas artésien..., op. cit., p. 168.

89 Luc (P.), La vie rurale..., op. cit., pp. 46-49, le tenancier n’a pas le droit de démonter la maison et de la transporter ailleurs ; des procès sont faits à d’anciens questaux qui veulent déménagerr celle-ci.

90 Aventin (M.), La societat..., op. cit., pp. 144-150.

91 A.D.H.G., E 618 f° 11 r°, 8 mars 1449 (n.st).

92 Marandet (M.-C), Quelques signes de gêne..., op. cit., pp 9-10. et pp. 15-16.

93 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 172 v°.

94 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 173 r°.

95 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 149 v°.

96 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 149 r°.

97 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 9 r°, oblies : une punhère de blé.

98 A.D.A., 3 E 1494 f° 8 v°, 7 février 1422.

99 A.D.A., 3 E 1494 f° 76 v° ? 10 décembre 1423.

100 A.D.H.G., 3 E 10136 f° 120 r° ; au f° 107 r°, Bernard Linas, laboureur du campmas de la Terassa à Baziège achète cinq arpents de terre nemoris et boscarasse dans les dépendances du campmas pour 2 écus d’or, 3 février 1450 (n. st).

101 A.D.A., 3 E 1493 f° 79 v°.

102 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 36 r°, 8 octobre 1465, à la Saint-Thomas apôtre, à raison de deux £, les trois premières années, puis d’une £ quatre doubles.

103 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 r°.

104 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 141 r°.

105 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 142 v°.

106 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 168 r°.

107 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 51 v°, 1448.

108 On n’en trouve pas, non plus, en région parisienne, quand se produit un début de reconstruction des censives, dans les années 1442-1465, Fourquin (G.), Les campagnes..., op. cit., p. 438. En Limousin, les modérations se raréfient, à compter de 1425, et ne représentent plus que 14 à 18 % des accensements. La disparition quasi-complète des réductions de redevances ne se fait que tardivement, à partir des années 1475 et c’est seulement à ce moment là qu’on trouve dans les actes d’accensements des clauses d’annulation du contrat si le tenancier ne laboure pas convenablement, Tricard (J.), Les campagnes..., op. cit., p. 34, p. 60-62 et p. 66 et suiv. Dans cette région, les seigneurs ne sont en position de force que tardivement, par rapport au Lauragais.

109 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 56 v°, 16 mai 1439.

110 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 35 r°, 15 janvier 1428 (n. st.).

111 A.D.A., 3 E 9456 f° 76 r°.

112 A.D.A., 3 E 9456 f° 89 r°.

113 A.D.A., 3 E 9456 P 142 r°.

114 Cette famille s’est installée au xiiie siècle, à la faveur de la croisade. Jourdain de Saissac donne, en 1252, à Guillaume de Pia, sénéchal de Carcassonne, tous les droits qu’il pouvait avoir sur la terre du Puy-Saint-Pierre puis lui vend, en 1260, un quart de la terre de Verdun, Guillaume de Pia achète en 1252 la terre de Ferrais à l’abbé de Saint-Papoul. Guy de Pia, son fils, tient aussi le fief du Puget en 1279.

115 A.D.A., 3 E 9456 f° 142 v°.

116 A.D.A., 3 E 9456 f° 144 r°. Dans ce registre d’étendues, le notaire précise souvent que les biens sont donnés « pour une plus grande utilité », on interdit la vente ou l’engagement aux gens de mainmorte, même, curieusement, quand le bien est dit franc. Les tenanciers jurent d’observer toutes les prescriptions, main droite posée sur les Évangiles.

117 A.D.A., 3 E 9463 f° 105 v°. Cette ferme est proche de la chapelle Saint-Martin-de-Pébrens, d’après la carte de Cassini, à l’emplacement du château de Lagoual (Coordonnées Lambert 578,2-3111,2).

118 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 27 r°, f° 52 r°.

119 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 54 v°.

120 A.D.H.G., 3 E 10136 f° 82 r°.

121 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 58 r°.

122 A.D.A., 3 E 1493 f° 162 r°.

123 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 65 r°.

124 Commune, dans l’actuel département du Gers.

125 A.D.H.G., 3E 10164 f° 113 v°.

126 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 v°.

127 A.D.A., 3 E 9461 f° 66 r°.

128 A.D.A., 3 E 9461 f° 104 v°.

129 Mimiague (C.), Le terroir..., op. cit., p. 31 et suiv.

130 Ces migrations ont déjà été signalées pour bien d’autres régions. À Albi, si la population chute de 57 % entre 1343 et 1357, on s’aperçoit que 73 % des Albigeois ont disparu d’un registre à l’autre, la reconstitution tient à une forte immigration : en 1357, la moitié des chef de feux sont des immigrés récents, 60 % en 1368, Biget (J.-L.), Histoire d’Albi, op. cit. p. 94. Des migrations de Béarnais, de Périgourdins, de gens de langue d’oïl, se produisent en Bordelais, dans l’Entre-Deux-Mers, Boutruche (R.), Les courants de peuplement dans l’Entre-Deux-Mers, étude sur le brassage de la population rurale, Annales d’Histoire Économique et Sociale, tome VII, 1935, pp. 13-37.

131 A.D.A., 3 E 9456 f° 189 v°, 301 v°, 219 v°.

132 A.D.A. ; 3 E 1497 f° 30 r°.

133 A.D.A., 3E 9468 f° 110 v°.

134 A.D.A., 3 E 9468 f° 78 r°, 1462.

135 A.D.A., 3E 9468 f° 92 v°, échange de terres, 1463 ; en cf. à l’autan, d’autres bosigues.

136 A.D.A., 3 E 1497 f° 8 v°, f° 58 v°.

137 A.D.A., 3 E 9466 f° 73 r°, 1470.

138 A.D.A., 3 E 1497 f° 18 r°.

139 Par exemple, cinq arpents de bosigue qui furent à X (on signale en confront des parcelles appropriées et des parcelles vacantes) sont inféodées à Pompertuzat, avec un droit d’entrée de 3 écus, les oblies sont de 4 deniers tolsans, ADHG, 3 E 10137 f°164 v°.

140 Huit sétérées de terre barte pradale et nemore sont vendues à Saint-Michel-de-Lanès, al domerc alias a la mirapeyssa, en cf., au nord, des vacants, A.D.A. 3E 9462 f° 92 r°, 1466.

141 A.D.A., 3E 9462 f° 134 r°, 1466, novum feudum par Jean de Bar à Arnaud Vasas, du Mas Saintes-Puelles, d’une borie, décimaires Saint-Jean de Cartels et Saint-Martin de Molleville (des vacants à l’autan), de deux bois et d’une bosigue (des vacants au midi et à l’autan).

142 A.D.A., 3 E 1501f° 152 r°, 18 octobre 1508, vente d’une sétérée de terre, « herm et brogua » au Mas-Saintes-Puelles, sous directe du roi, au prix de 3 écus 15 doubles tr ; P 257 v°, vente de terre sive bosiga au Mas-Saintes-Puelles ; f° 264 v°, vente d’une terre « nemorata » au Mas-Saintes-Puelles, au prix d’un écu, etc.

143 A.D.A., 3E 9468 f° 114 v°.

144 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 37 v°, 1459.

145 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 72 r°.

146 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 125 v°, 166 r°.

147 A.D.A., 3 E 9462 f° 171 r°.

148 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 121 r°.

149 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 34 r°. Ce système des enchères existe ailleurs : en Bourbonnais, par exemple, les terres mises en accense sont criées aux assises seigneuriales ou dans l’église du lieu, par trois fois, puis les enchères ont lieu, Germain (R.), Les campagnes..., op. cit., pp. 286-287.

150 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 122 v°, f° 123 r°, etc.

151 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 125 v°, cf. supra.

152 Ils sont variables aussi par rapport au montant du cens, ce qu’on retrouve ailleurs, en Catalogne par exemple, Viader (R.), Les contrats..., op. cit., p. 82, le droit d’entrée peut aller de 66 % d’un versement annuel à 20 fois ce prélèvement. En Lauragais, au xiiie siècle, l’acapte pouvait, pour un local ou un jardin, représenter de 12 à 24 fois le montant du cens, Partak (J.), La seigneurie..., op. cit., p. 139 et suiv.

153 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 41 v°.

154 A.D.H.G., 3 E 10137 164 v°.

155 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 152 r°.

156 Berthe (M.), Le droit d’entrée..., op. cit., p. 272.

157 Lorcin (M.-Th.), Les campagnes de la région lyonnaise aux xive et xve siècles..., op. cit., p. 97 et p. 281 ; Charbonnier (P.), La seigneurie rurale..., op. cit., p. 292 ; Germain (R.), Les campagnes..., op. cit., pp. 295-296. Dans cette région, le droit d’intrage à payer par le nouveau tenancier, quand la vente est effectuée, avant d’entrer en possession du bien, peut être un tiers du prix ou devant les protestations, un dixième. En Quercy, lors de la reconstruction, après la fin de la guerre de Cent ans, l’acapte atteint la valeur marchande du bien, Lartigaut (J.), Les campagnes du Quercy..., op. cit., pp. 164-167.

158 A.D.A., 3 E 9468 f° 79 r°.

159 Elle disparaîtra en tant que telle au xviiie siècle, le site est parfaitement fossilisé aujourd’hui dans le parcellaire, lieu-dit Les Caves, commune de Ricaud, en limite de Castelnaudary (Coordonnées Lambert 565-3116).

160 La ferme actuelle de Planoles (Coordonnées Lambert 565,5-3102,6) pérennise ce bien, les confronts signalés dans l’acte : route, ruisseau et limites de Saint-Amans, permettent de le situer très facilement.

161 A.D.A., 3 E 9462 f° 151 v°, l’acte figure aussi dans un autre registre A.D.A., 3 E 1496 f° 56 v°, il s’intitule alors ratification du novum feudum de R. Bossenaco et G. Cavalerii (ou Canalerii) de Mireval, 22 mars 1468 (n.st.).

162 Saint-Julien-du-Puy, près de Lautrec (Tarn).

163 A.D.A., 3 E 9463 f° 137 r°, le même acte apparaît dans le registre 3 E 9462, au f° 151 v°.

164 A.M.T., EE 2 f° 129, signalé par Nicephor (M.), Les châteaux du Lauragais du xvie siècle jusqu’au début du xxe siècle, Thèse d’histoire de l’art, Toulouse-Le Mirail, 1998.

165 Ramière de Fortanier (J.), Les droits seigneuriaux..., op. cit., p. 167.

166 Duffaut, Monographie de Roqueville..., op. cit., p. 121 et Ramière de Fortanier (J.), Les droits seigneuriaux..., op. cit., p. 167.

167 Tricard (J-), Les campagnes..., op. cit. p. 193 et L’habitat dispersé..., op. cit. pp. 143-154.

168 Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., p. 65 et suiv. et p. 189 et suiv.

169 Les reconnaissances sont effectuées du 18 février 1489 (n. st.) à la fin mars 1490 (n. st.), les inféodations sont faites en six jours, trois, le 30 mars, trois, le 1er avril, une, le 4 avril 1489, A.D.A., 3 E 9470.

170 A.D.A., 3 E 9470 f° 76 r°, 77 v°, 73 v°.

171 A.D.A., 3 E 9470 f° 74 v°.

172 La ferme Rustan existe toujours (Coordonnées Lambert 560,7-3110,8), à proximité de la ferme de Ganguise (Coordonnées Lambert 561,3-3110,4).

173 A.D.A., 3 E 9470 f° 82 v°.

174 A.D.H.G., 3 E 15439 f° 70 r°. Aujourd’hui, la ferme de Boucenac (Coordonnées Lambert 566,2-3106) est située à 600 m de celle de Salamon Haut (Coordonnées Lambert 565,9-3106,5) et à 900 m de celle de Salamon Bas (Coordonnées Lambert 565,4-3106,1). La superficie délimitée par les anciens chemins autour de Boucenac est d’à peu près 150 ha. Boucenac est mentionné dans le Saisimentum, ce probable village ecclésial compte alors deux consuls.

175 F. Mistral, Lou trésor.., op. cit., deserta : désert, inculte, herm.

176 Alors que cela semble fréquent en Provence, dans la deuxième moitié du xive siècle et au début du xve, Stouff (L.), Le mas..., op. cit., p. 168.

177 25 pati d’ostal et trois pati de borde ; on trouve aussi dans la localité deux bâtiments de très faible valeur : une bordeta, une casuda. À Ayguesvives, apparaissent deux pati d’ostal et sept pati de bordes (qui appartiennent au même individu). À Montesquieu, on en déclare 21 dans le registre de 1485.

178 A.D.H.G., 5 E 73 f° 9 v°.

179 A.D.H.G., 5 E 73 f° 135 v°.

180 A.D.A., 4 E 076/CC 10 P 38 r°.

181 A.D.H.G. 5 E 73, jardins et bordes als barris f° 88 v°, 90 v°, ostals als barris P 85 v°, 87 r°, 89 r°, moulin pastelier devant la vila, f° 82 r°.

182 A.D.H.G., 5 E 73 f° 105 r°.

183 A.D.H.G., 5 E 67 f° 17 r°.

184 A.D.H.G., 5 E 66, f° 133 v°.

185 A.D.H.G., 5 E 66 f° 134 r°.

186 A.D.H.G., 5 E 66 f° 2, f° 134 r°.

187 A.D.H.G., 5 E 73 f° 84 v°.

188 A.D.H.G., 5 E 73 f° 100 r°.

189 A.D.H.G., 5 E 66 f° 144 r°.

190 A.D.H.G., 5 E 73 f° 98 v°.

191 A.D.H.G., 5 E 73 f° 92 r°.

192 A.D.H.G., 5 E 73 f° 103 v°.

193 A.D.H.G., 5 E 67 f° 62 v°.

194 A.D.H.G., 5 E 67 f° 1 r°.

195 Coulet (N.), Aix-en-Provence..., op. cit., p. 144, alors qu’Emmanuel Le Roy Ladurie dit que s’établit une « grande régression viticole » entre 1350 et 1500 dans tout le Midi, Les paysans..., op. cit.

196 Ce que pense aussi J. Tricard, Les campagnes limousines op. cit., p. 49.

197 Comme cela se produit en Quercy, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., p. 189 et suiv.

198 La première phase de reconstruction se situe en 1379-1405, la deuxième se produit en 1444-1450, la troisième après la guerre, Boutruche (R.), La crise..., op. cit.

199 Michel Le Mené note plusieurs cas de révision des censiers en 1377, 1380, 1398 ; les tenanciers paient leurs dettes, les terres vacantes sont baillées, Le Mené (M.), Les campagnes..., op. cit., p. 221.

200 Elle est terminée au milieu du xve siècle, dans les Montagnes Occidentales, les mas désertés étant alors réoccupés il y a toutefois des disparitions définitives de mas (en haute altitude ou en site défensif), mais le finage des mas disparus est réoccupé par les mas voisins, les terres cultivées sont probablement remplacées en partie par des pacages ou des bois, Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 530 et suiv. En Limousin, Jean Tricard note des tentatives timides et limitées de 1344 à 1380, suivies d’une authentique politique de reconstruction rurale entre 1395-1425 et d’une restauration seigneuriale, dans la 2e moitié du xve siècle, Tricard (J.), Les limites d’une reconstruction rurale en pays pauvre à la fin du Moyen Âge : le cas du Limousin, Études rurales, 1975, tome 60, pp. 5-39.

201 En Bourbonnais, la reprise ne se fera vraiment qu’après 1532, Germain (R.), Les campagnes..., op. cit., pp. 83-86.

202 Les deux premières phases de reconstruction sont à peu près les mêmes qu’en Lauragais : 1365-1410, et, surtout, 1442-1465, Fourquin (G), Les campagnes..., op. cit., pp. 260 et suiv, p. 387 et suiv p. 433 et suiv.

203 Moriceau (J.-M.), Les fermiers..., op. cit., pp. 79-105.

204 Marandet (M .-C.), La gestion de l’impôt direct..., op. cit., pp. 133-144.

Table des illustrations

Titre Nouvelles inféodations et reconnaissances
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Titre Types de biens inféodés4.
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Titre Les mentions de ruines dans les estimes :
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