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Dans l’atelier de Michel Pastoureau

 | 
Claudia Rabel
, 
François Jacquesson
, 
Laurent Hablot

Héraldique

Marc de Vulson de la Colombière

Dernier héraut et premier héraldiste

Texte intégral

Marc de Vulson de La Colombière, Le vray théatre de l’honneur et de la chevalerie…, Paris, chez Augustin Courbé, 1648, frontispice du tome II. Gravure par Nicolas Regnesson, d’après les dessins de Robert Nanteuil (portrait de Vulson de La Colombière) et de François Chauveau (composition d’ensemble).

Marc de Vulson de La Colombière, Le vray théatre de l’honneur et de la chevalerie…, Paris, chez Augustin Courbé, 1648, frontispice du tome II. Gravure par Nicolas Regnesson, d’après les dessins de Robert Nanteuil (portrait de Vulson de La Colombière) et de François Chauveau (composition d’ensemble).

1Michel Pastoureau, à partir de son Traité d’héraldique publié en 1979, a remis la science des armoiries au premier plan de la recherche historique, non seulement pour elle-même mais aussi pour le portrait qu’elle peint des sociétés médiévale et moderne. Parmi les matériaux d’étude qui permettent de connaître l’histoire de cette science se trouve l’œuvre à la fois tardive et fondamentale de Marc Vulson de La Colombière, décédé en 1658.

2Ma première rencontre avec La Colombière remonte à une époque où j’avais le désir d’écrire un livre doté d’une approche symbolique de l’héraldique. Ma démarche était de lire entre les lignes et de voir derrière les images. Je pensais que le système héraldique, dans sa complexité et sa rigueur, n’était pas uniquement une façon de se montrer et de s’identifier, mais aussi un code qui permettait de conserver et transmettre des secrets difficilement dicibles par les mots de notre langue. C’est ainsi que grâce à Michel Pastoureau qui était alors conservateur au Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale, rue de Richelieu, me fut « présenté » Vulson de La Colombière, chevalier de Saint-Michel et gentilhomme de la Maison de Sa Majesté. Je pus consulter La Science héroïque, livre édité par Sébastien Cramoisy à Paris en 1644. Toujours guidé par Michel Pastoureau, je pris en main les livres du Père Ménétrier ou encore les ouvrages de Louvain Géliot, de Palliot ou du Père de Varenne. Mais avec le temps se maintint une proximité plus intime avec La Colombière. Mon lien affectif avec cet auteur me donna l’envie de mieux le connaître à travers les catalogues des bibliothèques de recherche. Ainsi, je découvrais plusieurs notices parues dans des revues savantes donnant quelques indications généalogiques sur l’auteur, peu développées, et des pistes d’analyse, quelquefois désobligeantes, sur son travail.

3Un tournant intervint avec la découverte, toujours aiguillée par Michel Pastoureau, au Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque nationale, du Liber Amicorum de Vulson de La Colombière contenant les armoiries et les dédicaces de tous les personnages qu’il avait rencontrés et qui lui avaient témoigné quelques égards amicaux (ms. NAF 1741). Ce recueil me permit d’enquêter sur l’entourage de l’auteur, porte ouverte sur le caractère d’un personnage que l’on peut considérer tout à la fois comme le dernier héraut « chevaleresque » de la lignée du héraut Sicile, de Clément Prinsault et de quelques autres, et comme le premier véritable héraldiste au sens contemporain, compilateur et fixateur d’un ensemble de connaissances auxquelles il adjoint des vues plus personnelles, parfois originales.

4Un deuxième ouvrage de Vulson de la Colombière, Le Théâtre d’honneur (1648), vint me conforter dans mon intérêt pour lui. Il y aborde l’histoire de la chevalerie, de la noblesse, des tournois et des autres rituels de cette caste. Il y cite et parle des personnes figurant dans le Liber Amicorum avec une certaine fierté et montre par là son attachement à tout ce qui touche à la noblesse. En lisant cet ouvrage en deux gros volumes in-folio, je compris un peu mieux le personnage et eus la confirmation que Vulson de La Colombière, au milieu du xviie siècle, était avant tout un nostalgique d’une époque révolue, idéalisant les périodes médiévale et Renaissance, et qu’il voulait sincèrement démontrer leur supériorité spirituelle sur la seconde modernité émergeante. C’est pour cela que lorsqu’il reçut le collier de l’ordre de Saint-Michel, il se sentit honoré à un degré que l’on ne peut imaginer, bien que cet ordre fût depuis longtemps tombé en désuétude, supplanté par l’ordre du Saint-Esprit. Il y a là quelque chose de touchant qui ne peut laisser indifférent et qui illustre son désir de faire perdurer ne serait-ce qu’en symbole, l’esprit de la chevalerie d’antan.

5Vulson de La Colombière écrivit aussi d’autres ouvrages, dont un excellent livre sur les hérauts d’armes et un autre sur quelques pièces peu usitées dans la grammaire héraldique. Il fit aussi publier de petits ouvrages, sorte de livres de patience et de distraction qui permettaient, en s’amusant en société, de partir en quête de prédictions ou de révélations. On y trouve d’ailleurs, disséminés discrètement, des éléments qui bien identifiés donnent des clefs de compréhension de ses traités d’héraldique plus conventionnels, et ce sur un mode volontairement sibyllin, en phase avec le goût des mystères alors en vogue dans une partie de l’aristocratie.

6Avec ces caractéristiques propres à son époque, La Colombière fut le dernier à avoir fait vivre l’héraldique d’une manière aussi totale, dans l’optique de la sauvegarder et, ce faisant, à lui attacher une dimension symbolique qui en dit surtout long sur sa propre personnalité et sur son temps, mais en captant peut-être aussi par là une part essentielle de ce que fut cette science aux yeux de ses prédécesseurs.

Table des illustrations

Titre Marc de Vulson de La Colombière, Le vray théatre de l’honneur et de la chevalerie…, Paris, chez Augustin Courbé, 1648, frontispice du tome II. Gravure par Nicolas Regnesson, d’après les dessins de Robert Nanteuil (portrait de Vulson de La Colombière) et de François Chauveau (composition d’ensemble).
URL http://books.openedition.org/pufr/docannexe/image/29292/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 127k

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