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Les petits vignobles

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Stéphane Le Bras

Troisième partie. Temps long et jeux d’échelles

Les « petits terroirs » viticoles de Touraine dans la longue durée (XIXe-XXIe siècles)1

Adrien Lammoglia et Samuel Leturcq

Texte intégral

  • 1  Pour faciliter la lecture nous avons inséré en annexe une carte des communes d’Indre-et-Loire. Nou (...)

1Pour un historien, l’expression « petit terroir » nécessite qu’on la définisse, car elle ne va pas de soi. La catégorie des « petits terroirs » s’oppose irréductiblement à celle des « grands terroirs ». Il s’agit d’une qualification radicale, nécessairement binaire. On ne peut en effet concevoir de terroir moyen, ou médiocre ; tout vignoble considéré comme « médiocre » est rejeté dans la catégorie des « petits ». Cette dichotomie entre grand et petit terroir est donc fondamentalement élitiste ; le petit se réfère au grand, dans une acception très nettement péjorative. Le « petit terroir » renvoie au « petit vignoble », expression à laquelle fait écho presque automatiquement la notion qualitative de « petits vins », c’est-à-dire des vins de qualité médiocre, voire mauvaise par rapport aux « grands vins » qui, eux, bénéficient d’un prestige, d’une réputation, c’est-à-dire d’une reconnaissance largement partagée. En somme, le « petit vin » pourrait être assimilé au vin ordinaire, c’est-à-dire le vin de tous les jours, consommé habituellement, en-dehors des événements extraordinaires. L’expression « petit terroir » est donc clairement liée à la question de l’identité des vignobles et, partant, à celle de leur légitimité. En effet, dans le cadre de sociétés en recherche d’aménagement de leurs espaces ruraux, cherchant à coordonner les activités économiques dans le sens d’une meilleure valorisation, l’existence de vignobles peut être contestée du fait de leur défaut de légitimité au regard de critères qualitatifs et quantitatifs, ou encore d’une inaptitude économique. Dans le cadre des opérations de classement des vignobles menées par l’INAO à partir des années 1930, les territoires viticoles ont été examinés en vue de faire reconnaître officiellement une liste des vignobles jugés les meilleurs au regard d’une série de critères, parmi lesquels figure la réputation. Georges Kuhnholtz-Lordat, pionnier de l’INAO, rédige en 1963, au terme d’une vie consacrée à la reconnaissance des « grands terroirs », un essai dans lequel il énonce la doctrine sur laquelle repose les opérations de classement des vignobles.

2En premier lieu, pour faire partie des grands, un vignoble doit exister de longue date :

  • 2  Kuhnholz-Lordat Georges. La genèse des appellations d’origine des vins, Chaintré, Œnoplurimedia, 1 (...)

[…] il existe une doctrine que, à l’instar d’une loi, nul expert n’est censé ignorer : pour qu’un vin soit digne d’une appellation, il faut qu’il y ait été maintenu constant par l’usage sous le nom de cette appellation ; de sorte qu’il ne doit pas y avoir de « création », mais seulement « consécration ».2

3Mais si le temps et la tradition sont une dimension inhérente à la qualification des grands terroirs, ce critère ne saurait suffire ; pour Georges Kuhnholtz-Lordat, c’est la réputation qui est l’indice le plus sûr pour détecter les grands vignobles appelés « noyaux d’élite » :

  • 3  Ibid., p. 33.

Il est remarquable que les tènements les plus favorisés pour l’élaboration de la qualité aient échappé aux transferts de vignobles. C’est la preuve historique la plus formelle de la stabilité par la qualité et cela devrait faire réfléchir, croyons-nous, les amateurs de nouveautés insuffisamment éprouvées […]. Comment peut-on déceler les noyaux d’élite ? Quand ils sont vraiment d’élite, ils sont reconnus par une touchante unanimité, dépourvue de jalousie, incontestée. Avec un peu de diplomatie, on peut arriver à établir des comparaisons qui mettent le noyau en relief. La tradition orale les concernant se perpétue ; l’expert est vite aiguillée […]. La difficulté n’est donc pas la découverte du noyau d’élite. Elle commence dans la comparaison entre les vins du noyau présumé et ceux qui sont obtenus au fur et à mesure qu’on s’éloigne de lui. Ce n’est certes pas la prospection la moins intéressante : elle aboutit à l’amenuisement centrifuge et progressif de la qualité au-delà de laquelle l’appellation est difficilement accordable.3

4Est grand le vignoble qui a cette réputation au moment de l’enquête des ingénieurs chargés du classement. Vient ensuite une dégradation de vignobles qui, depuis le noyau d’élite vers la périphérie, selon un principe centrifuge, fait advenir progressivement des terroirs de moins en moins reconnus pour aboutir à des territoires viticoles périphériques peu considérés, et finalement totalement déconsidérés dans la démarche de sélection qui les exclut de l’élite. Georges Kuhnholtz-Lordat mentionne toutefois la catégorie des « vignobles-reliques », qu’il définit de la manière suivante :

  • 4  Ibid., p. 32.

Ce sont les vestiges d’un passé prospère. La qualité s’amenuise, dans l’ensemble, lorsqu’on s’éloigne du noyau initial de l’installation du vignoble. Si la viticulture passe par des périodes de déclin, ce noyau se défend mieux.4

5Cette notion de « vignobles-reliques » est fondamentale dans cette réflexion sur la définition des petits et des grands vignobles (noyaux d’élite), car elle historicise les processus de construction des territoires viticoles. Partant, elle interdit toute tentation à essentialiser les vignobles, c’est-à-dire à considérer leur réalité (prospérité ou faiblesse) à un instant T comme une donnée naturelle, évidente et éternelle, qui tient à leur essence-même. Les « vignobles-reliques » relevés par Georges Kuhnholtz-Lordat témoignent qu’un vignoble n’est pas « grand » ou « petit » parce qu’il ne peut pas en être autrement, mais parce qu’il est le fruit d’une évolution dont les facteurs doivent être recherchés dans l’évolution des environnements naturels et sociaux. La définition des « petits terroirs » nécessite donc d’analyser les processus dans la longue durée pour révéler les tendances lourdes, c’est-à-dire de prendre en compte non pas des états (instants), mais des trajectoires (durées). Il faut parler de « durées » au pluriel, plutôt qu’au singulier : l’observation sur la courte durée (quelques décennies) livre des tendances qui peuvent être infirmées ou confirmées par une analyse sur la longue durée des xviiie et xxe siècles articulés autour de la catastrophe du Phylloxéra.

6Cette réflexion sur la définition du « petit terroir » repose sur une étude de l’évolution des superficies viticoles de l’ensemble des 277 communes du département d’Indre-et-Loire depuis le début du xixe siècle. Les sources et la base de données seront présentées dans un premier temps. Il en découlera une analyse globale de la dynamique des surfaces viticoles sur trois dates-clés : 1836, 1910 et 2014. Une troisième partie mettra en évidence une typologie des territoires viticoles en fonction de leurs trajectoires entre 1808 à 2014. C’est sur cette base que nous pourrons définir précisément ce que l’on peut considérer comme « petits terroirs », en considération des dynamiques de longue durée.

Des sources, une base de données

7En 1802 débute la série des enquêtes préfectorales sur les productions agricoles. Regroupées dans la série 6 M des Archives départementales d’Indre-et-Loire sous la cote 6 M 1289 à 1363. Ces archives sont composées de deux types de documents : d’une part les formulaires adressés à chaque commune, renseignés par les maires sur la base d’enquêtes menées par une commission, et corrigés par les agents voyers cantonaux ; d’autre part les tableaux synoptiques par canton réalisés par les agents préfectoraux sur la base des déclarations des maires. Ces statistiques livrent, de 1808 à 1940, une série très complète de données, pour chaque commune du département d’Indre-et-Loire concernant l’état des productions agricoles. Pour la viticulture, nous avons enregistré les superficies viticoles déclarées pour les années 1808, 1804-1808, 1813, 1836, 1853- 1867, 1880, 1882, 1888, 1889, 1890, 1891, 1892, 1893, 1894, 1895, 1897, 1898, 1900, 1901, 1910, 1920, 1932, 1939, 1940. Cette série, si complète soit-elle, présente quelques faiblesses qu’il convient de mentionner. En premier lieu l’information est peu dense jusqu’en 1880 ; ce n’est qu’à partir de cette date que les enquêtes deviennent annuelles. On ne dispose donc pour la période 1808- 1880 que de trois mesures : 1808 (synthèse des données des enquêtes 1808, 1804-1808 et 1813), 1836 et des statistiques éparses et lacunaires, synthétisées en une moyenne pour la période 1853-1867 (lacune pour 112 communes, soit 44 % de l’effectif). À cette faiblesse quantitative, il faut ajouter des incertitudes sur la qualité des données. L’administration napoléonienne fonde en effet, dans les premières années de l’empire, les bases d’un arsenal statistique moderne ; il s’agit alors de créer une méthodologie. La première enquête systématique, utilisant un formulaire normalisé, est lancée en 1808. Les maires des communes d’Indre-et-Loire apportent des réponses plus ou moins complètes, plus ou moins précises et plus ou moins adaptées aux formulaires. On peut se poser la question de la qualité et de l’homogénéité de l’information fournie alors par les maires, comme en témoigne par exemple une lettre du maire d’Autrèche adressée au préfet d’Indre-et-Loire le 23 mai 1808 :

Monsieur le Préfet.
Par notre lettre du 25 may, nous vous avons fait passer un état des vignes où il y a une forte erreur à rectifier, au lieu de 27 arp 92 ch ½, je vous prie de vouloir bien inscrire 51 arp 50 ch. D’après la vérification faite de l’état des sections depuis le départ des tableaux, sur la certitude morale qu’il y avait plus de vignes dans la commune d’Autrèche, nous avons découvert cette erreur provenant de distractions involontaires et détournements au moment du travail. Nous vous prions de vouloir bien nous excuser. Le désir de vous satisfaire promptement ni a pas été un peu la cause, n’ayant pas fait la vérification. C’est une leçon qui ne sera pas perdue. En touttes choses, hâte toy lentement, dit le Sage. Nous ferons en sorte de ne pas l’oublier dorénavant.
Nous avons l’honneur d’être très respectueusement, Monsieur le Préfet, vos très humbles et très obligés serviteur.
Bertrand de la Plaine, adjoint Silvain Joulain, maire

  • 5  Sur ce point, voir par exemple l’article stimulant d’Alain Guerreau concernant la traduction probl (...)

8Dans la mesure où ces informations sont récoltées à des fins fiscales, il est possible, voire probable, que les contribuables aient été peu motivés de collaborer avec les services des contributions directes et qu’ils aient communiqué des informations plus ou moins exactes. À ce problème, il faut ajouter celui de la définition de l’objet même : qu’est-ce qu’une vigne5, à une époque où les conduites culturales sont infiniment plus diversifiées qu’aujourd’hui ? Les formulaires données aux commissions communales chargées d’enquêter ne fournissent aucune directive à ce sujet, ce qui laisse la porte ouverte à des dérives parfois dénoncées par les agents voyers cantonaux, comme en témoigne la note accrochée par des points de cire rouge au formulaire de la commune de Benais, rédigée le 5 avril 1837 :

  • 6  Archives départementales d’Indre-et-Loire (ADIL désormais), 6 M 1295.

La commission appelle l’attention sur la différence qui existe entre le chiffre indiqué en marge pris sur le livre terrier à la direction des contributions directes et celui indiqué par M. le Maire pour les vignes. Elle provient de ce que dans les bureaux de la direction, l’on n’a compris comme vignes que les terres vignes, tandis que M. le Maire aurait compris les vignes plantées en rangées et en très grande quantité dans le canton de Bourgueil. La commission a été d’avis de prendre la moitié de la différence pour l’ajouter aux terres labourables dont la contenance indiquée a été de cette manière modifiée. Cette note s’applique à toutes les communes.6

9Il convient donc de considérer prudemment les données de ces séries statistiques anciennes, c’est-à-dire de les utiliser, mais en pensant qu’elles reflètent imparfaitement la réalité. Elles livrent toutefois une information standardisée et uniforme.

  • 7  Nous tenons à remercier l’INAO, et particulièrement François Garnotel et Jacques Gautier, pour leu (...)

10La dernière enquête préfectorale conservée aux archives départementales remonte à 1940. Après cette date, il faut utiliser les données sur les superficies viticoles des communes d’Indre-et-Loire dans le cadastre viticole et, dans une moindre mesure, dans le RGA (recensement général agricole). Le cadastre viticole, informatisé depuis 2010 (CVI), offre une base de données exhaustive, enregistrée à la parcelle et entièrement administrée par les services douaniers. Tout viticulteur a le devoir de s’immatriculer et de déclarer chaque année les surfaces encépagées qu’il possède, la quantité de raisin récolté, la production de vin… Nous avons pu récupérer, sous forme globalisée et anonymisée, les surfaces viticoles par parcelle pour les années 2000, 2005, 2010 et 2014. Il a aussi été possible de récupérer les données du cadastre viticole de 1958, conservées sous forme d’un cahier de recensement du vignoble d’Indre-et-Loire à l’INAO de Tours7. Ce cahier contient entre autre les surfaces plantées par commune (et non pas à la parcelle). Enfin, pour combler le manque d’information entre 1958 et 2000, nous avons utilisé le RGA qui recense les surfaces viticoles à la commune pour les années 1979, 1988, 2000 et 2010. Toutefois, il convient d’être prudent car la méthode de recensement diffère entre le CVI et le RGA, de sorte qu’il peut exister des écarts entre les deux bases. Les données du CVI sont les plus précises. D’une part, elles relèvent du droit pénal (services douaniers) ; d’autre part, elles sont enregistrées à l’échelle la plus fine, à savoir la parcelle viticole. A contrario, le RGA est déclaratif, mais sans contrainte juridique pour les viticulteurs, et les informations sont à l’échelle communale. Les viticulteurs déclarent leur quantité de vigne (ils peuvent aussi choisir la confidentialité) et l’information est enregistrée pour la commune de résidence du viticulteur. Ainsi, il arrive régulièrement que des parcelles situées à la frontière de deux communes soient enregistrées dans la commune de résidence du viticulteur, mais non dans celle où elles sont effectivement installées. À l’échelle d’un groupe de communes, les données sont relativement proches entre les deux bases. En revanche, lorsqu’on l’on souhaite faire des comparaisons entre communes, il faut être prudent, notamment avec les communes où une part importante du vignoble est installée à proximité des limites communales.

11Au total, il est possible de suivre l’évolution des superficies viticoles des 277 communes du département d’Indre-et-Loire sur deux siècles, à partir des dates suivantes : 1808, 1836, 1870, 1880, 1890,1898, 1900, 1910, 1920, 1932, 1940, 1958, 1979, 1988, 2000, 2005, 2010, 2014.

Une évolution générale, des trajectoires particulières : une approche quantitative des « petits terroirs » (fig. 1)

12En 1880, alors que la Touraine est touchée par le Phylloxéra, le vignoble tourangeau occupe près de 60 000 ha de terres. Mais pendant les ravages du Phylloxéra, les encépagements se poursuivent encore durant une dizaine d’années, de sorte que très paradoxalement, c’est pendant le Phylloxéra, en 1890, que le vignoble tourangeau atteint son acmé, avec 62 419 ha de terres plantées. Ce sommet couronne un xixe siècle de très forte progression du vignoble, puisqu’en 1808, les vignes couvrent en Touraine une superficie de 26 717 ha : entre 1808 et 1890, la croissance est de près de 240 %. Mais cette croissance extraordinaire se fait de manière très irrégulière. À la vingtaine d’années (1808-1830) de progression assez douce des superficies plantées (de 26 717 à 35 771 ha) succède une trentaine d’années (1830-1860) de baisse qui annule quasiment le gain du premier tiers du xixe siècle (de 35 771 à 28 954 ha). En réalité, c’est dans la vingtaine d’années précédant l’arrivée du Phylloxéra en Touraine, alors même que le marasme touche les vignobles méridionaux, que la viticulture tourangelle connaît son âge d’or, les surfaces viticoles passant de 26 717 à 62 419 ha en vingt ans (soit une croissance de 234 %). La hausse des années 1880-1890, en contexte de crise phylloxérique, s’inscrit donc dans l’élan d’une euphorie extraordinaire ; les viticulteurs tourangeaux ont mis du temps à comprendre que cette maladie marquait le coup d’arrêt définitif de l’expansion de leur vignoble et ruinait les espoirs de faire de la Touraine un pôle moteur de la viticulture française. Après 1890, l’histoire de la viticulture tourangelle est celle d’un déclin irrémédiable des surfaces sur un siècle, seulement ralenti à deux reprises, entre 1900 et 1910 et entre 1940 et 1960. De fait, c’est en 1910 que s’amorce le déclin des superficies viticoles. Depuis 1990, le vignoble tourangeau s’est stabilisé, autour de 10 000 ha.

Figure 1. Évolution des superficies viticoles du département d’Indre-et-Loire (1808-2014).

Figure 1. Évolution des superficies viticoles du département d’Indre-et-Loire (1808-2014).

13Cette évolution très heurtée de la viticulture entre 1808 et 2014 est loin d’être uniforme sur l’ensemble du territoire d’Indre-et-Loire, comme le montrent les cartes présentant l’état de la viticulture à trois moments-clés de cette évolution : 1836 (fig. 2) qui marque l’état moyen du vignoble dans la première moitié du xixe siècle, 1910 (fig. 3) qui correspond à l’état du vignoble à la sortie de la crise du Phylloxéra et 2014 (fig. 4) qui marque le jalon final de cette évolution bi-séculaire. Les indicateurs sélectionnés sont, pour chaque commune, la superficie viticole superposée à la densité viticole (rapport de la superficie viticole à la superficie de la commune).

18368 (fig. 2)

  • 8  Les données de 1836 ont été préférées à celles de 1808 car, d’une part, la série est absolument co (...)
  • 9  ADIL, 7 M 191. Tableau intitulé « Aperçu général de la surface des terres cultivées en vignes dans (...)

14Le vignoble d’Indre-et-Loire présente au début du xixe siècle une répartition géographique très déséquilibrée. Ainsi l’arrondissement de Tours regroupe les deux tiers des surfaces plantées, celui de Chinon le quart. De fait, l’arrondissement de Loches apparaît très peu viticole9.

15L’examen des statistiques préfectorales fait ressortir deux types de pôles viticoles en Touraine : les pôles majeurs et les pôles mineurs. On repère six pôles viticoles majeurs :

  • La rive droite de la Loire de Cangey (à la limite avec le département du Loir-et-Cher) à Langeais.

    • 10  Dion Roger, Le Val de Loire. Étude de géographie régionale, Tours, Arrault, 1934.

    Une petite partie seulement de la rive gauche de la Loire, des communes de Mosnes (à la frontière du département du Loir-et-Cher) à Montlouis-sur-Loire. Après Montlouis, dans l’étroit corridor de l’interfluve Loire/ Cher au sein duquel viennent s’enchâsser les communes de La Ville-aux-Dames, Saint-Pierre-des-Corps, Tours, La Riche, Saint-Genouph et Berthenay, la viticulture est quasi absente. Ces deux pôles viticoles majeurs des rives droite et gauche de la Loire s’inscrivent dans le prolongement des vignobles blésois, solognot et orléanais, la vallée de la Loire apparaissant comme un long corridor viticole ininterrompu jusque Langeais sur la rive droite et Montlouis sur la rive gauche10.

  • Les rives droite et gauche de la vallée du Cher (à l’exception des communes de l’interfluve Loire/Cher citées précédemment). Ce pôle viticole correspond à un vaste vignoble qui se prolonge dans le département du Loir-et-Cher, avec notamment Montrichard et Chissay.

    • 11  Nous disposons d’une donnée incohérente pour Saint-Nicolas-de-Bourgueil en 1836. C’est la raison p (...)

    Le Bourgueillois, avec principalement les communes de Restigné et Chouzé-sur-Loire, et sans doute Saint-Nicolas-de-Bourgueil11.

  • Les communes du Véron (petite région située à la confluence de la Loire et de la Vienne, juste en face du Bourgueillois), c’est-à-dire Huismes, Avoine, Savigny-en-Véron, Beaumont-en-Véron et Chinon. On peut y ajouter la commune de Candes-Saint-Martin.

  • La rive gauche de la Vienne au-delà de Chinon, à savoir les communes de Rivières, Ligré, Anché, Sazilly, Tavant, L’Île-Bouchard, Theneuil.

16Aux six pôles viticoles majeurs répondent six pôles viticoles secondaires, qui occupent des espaces restreints, dispersés et discontinus :

  • Deux tronçons de la vallée de l’Indre apparaissent comme une zone viticole. Le premier tronçon va d’Azay-le-Rideau, Lignières-de-Touraine et Vallères à Cormery ; ce couloir viticole est momentanément interrompu au niveau des deux communes de Saché et de Druyes, largement recouverte par la forêt de Villandry. Le second tronçon se trouve dans le Lochois, avec les communes de Chambourg-sur-Indre, Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson et Saint-Jean-Saint-Germain.

  • La haute vallée de la Vienne, au sud du département d’Indre-et-Loire (Crouzilles, Parçay-sur-Vienne, Rilly-sur-Vienne, Marcilly-sur-Vienne, Ports, Pussigny, Antogny-le-Tillac, Marigny-Marmande).

  • Les communes du Richelais, en limite du département de la Vienne (Champigny-sur-Veude, Richelieu, Bray-sous-Faye, Faye-la-Vineuse).

Figure 2. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 1836.

Figure 2. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 1836.

Archives départementales d’Indre-et-Loire, 6 M 1295 et 1296 – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 23 juillet 2015

  • Quelques communes dispersées de la moitié méridionale de la Touraine : d’une part Boussay et Preuilly-sur-Claise à l’extrême sud du département ; d’autre part Sainte-Maure-de-Touraine.

  • Un halo de communes s’enfonçant dans le plateau septentrional du département d’Indre-et-Loire au-delà du front des communes surplombant la Loire (Mettray, Saint-Roch, Saint-Antoine-du-Rocher, Rouziers-de-Touraine, Cérelles, Chanceaux-sur-Choisille, Notre-Dame-d’Oé, Parçay-Meslay, Reugny, Neuillé-le-Lierre, Saint-Ouen-les-Vignes, Cangey).

    • 12  Musset Benoît, « Huit siècles de viticulture dans la Sarthe (xiie-xxe siècle) : d’une culture cont (...)

    Les communes de Villebourg et Saint-Christophe-sur-le-Nais, qui s’inscrivent dans la périphérie du vignoble des coteaux du Loir, au contact avec le département de la Sarthe où se trouve un pôle viticole dynamique12.

1910 (fig. 3)

17La crise du Phylloxéra n’a pas bousculé la carte de la viticulture tourangelle. On retrouve en 1910 l’ensemble des pôles majeurs de la viticulture décrits précédemment. La dynamique remarquable entre 1836 et 1910 n’est pas à rechercher dans un rétrécissement du vignoble par renforcement de la polarisation, mais plutôt dans un étalement du vignoble, c’est-à-dire un élargissement des pôles par diffusion de l’activité viticole en direction de communes périphériques jusqu’à présent peu tournées vers la viticulture. On peut décrire le phénomène par secteurs :

  • Renforcement et élargissement du halo des communes surplombant la rive droite de la Loire, en direction de la vallée du Loir (Semblençay, Pernay, Souvigné, Braye-sur-Maulne) et dans la vallée de la Brenne (Monnaie, Villedômer, Auzouer-en-Touraine, Morand).

  • Extension de la périphérie du noyau viticole des coteaux du Loir (dans le département de la Sarthe) sur les communes de Saint-Aubin-le-Dépeint, Bueil-en-Touraine et Saint-Paterne-Racan.

  • Élargissement du halo des communes viticoles depuis la vallée du Cher pour rejoindre la vallée de l’Indrois (Céré-la-Ronde, Orbigny, Le Liège, Genillé, Saint-Quentin-sur-Indrois).

  • Renforcement du pôle viticole du Bourgueillois (Bourgueil, Benais, Ingrandes-de-Touraine, La Chapelle-sur-Loire) qui tend à s’étendre en s’éloignant de la Loire vers le nord (Gizeux).

  • Renforcement important du pôle viticole au sud de la Vienne et du Richelais, avec un élargissement notable (La Tour-Saint-Gelin, Courcoué, Chaveignes, Braslou, Razines, Jaulnay).

18A contrario, deux secteurs connaissent une évolution remarquable de leur vignoble, marquant la précocité d’une tendance au déclin. C’est en premier lieu le vignoble de la vallée de l’Indre qui périclite très nettement à partir d’Esvres, amorçant un déclin irrémédiable dans le Lochois, disparaissant quasiment dans certaines communes (Cormery). En second lieu, le vignoble du Chinonais connaît une restructuration profonde qui oriente son développement jusqu’à nos jours. Les vignes du Véron, qui constituaient avant le Phylloxéra le cœur du vignoble chinonais, amorcent un déclin irrémédiable (Avoine, Huismes), de même que, à l’exception d’Anché, le vignoble de la rive gauche de la Vienne décline (Rivière, Ligré, Sazilly, Tavant, L’Île-Bouchard, Theneuil), et plus loin Marcilly-sur-Vienne, Ports, Pussigny, Antogny-le-Tillac et Marigny-Marmande. En somme, c’est à cette époque que le territoire viticole de Chinon se concentre sur la rive droite de la Vienne.

Figure 3. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 1910.

Figure 3. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 1910.

Archives départementales d’Indre-et-Loire, 6 M 1333 – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 16 juillet 2015

2014 (fig. 4)

19Entre 1936 et 2014, l’évolution est radicale. L’effondrement de la superficie viticole départementale (fig. 1) s’est accompagné d’une forte polarisation autour de trois pôles viticoles majeurs : les vignobles de Vouvray, Bourgueil et Chinon. On constate même une croissance remarquable sur certaines communes : Saint-Nicolas-de-Bourgueil et Restigné dans le Bourgueillois, Cravant-les-Coteaux et Panzoult dans le Chinonais, Noizay et Chançay dans le Vouvray. S’y ajoutent quelques vignobles secondaires : Montlouis, Amboise et, dans une moindre mesure, la vallée du Cher et Azay-le-Rideau.

Figure 4. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 2014.

Figure 4. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 2014.

Cadastre viticole informatisée – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 16 juillet 2015

  • 13  Bertrand Jean-René et Humeau Jean-Baptiste, « Les vignobles de l’Anjou : des campagnes satisfaites (...)
  • 14  Musset B., « Huit siècles de viticulture… », art. cit., p. 12-37.

20En définitive, l’examen du vignoble tourangeau sur deux siècles met en évidence un phénomène de décantation qui isole des pôles viticoles d’une gangue de communes offrant quelques hectares d’un vignoble sans réputation. Cette concentration impressionnante n’est pas un phénomène proprement tourangeau ; on observe le même mouvement dans les départements voisins du Maine-et-Loire13 et de la Sarthe14. Il s’agit d’un mouvement historique de fond. On peut s’interroger sur les processus de dévaluation de certains territoires viticoles (notamment la vallée du Cher) qui n’étaient pas forcément appelés à un sort aussi funeste. A contrario, on peut s’interroger sur les facteurs qui ont pu jouer dans l’ancrage sur les trois pôles de Bourgueil, Chinon et Vouvray.

Typologie des communes. Vers une définition quantitative du petit vignoble

21Au terme de cette analyse quantitative de l’évolution des territoires viticoles tourangeaux de 1808 à 2014, on peut proposer une première définition à l’expression « petit terroir ». Pour cela, il convient d’objectiver ce classement par un examen attentif des trajectoires des 277 vignobles tourangeaux. Trois critères ont été identifiés : la taille en 1836, la dynamique des terroirs sur deux siècles, la situation finale en 2014.

22Le facteur premier, c’est celui de la taille du vignoble de début de période (1836), avec trois classes déterminées de manière empirique :

  • Petit vignoble (197 communes), à moins de 100 ha (fig. 5).

  • Vignoble intermédiaire (45 communes), entre 100 et 300 ha (fig. 6).

  • Gros vignoble (35 communes), à plus de 300 ha de vigne (fig. 7).

23Le deuxième facteur, c’est celui de la dynamique des vignobles sur deux siècles, c’est-à-dire l’intensité des variations des surfaces viticoles avant et après la crise du Phylloxéra. Cette amplitude témoigne de l’investissement en temps, en travail et en capital dont a pu bénéficier un vignoble sur des durées allant de quelques années à deux ou trois décennies, en lien avec les évolutions économiques et sociales. Certains vignobles (106 communes) montrent des profils d’évolution peu accentués (fig. 8), mettant en évidence une faible dynamique de l’investissement, tandis que d’autres profils de courbes (171 communes) présentent des variations fortes et brutales (fig. 9), symptôme d’une activité importante dans un contexte de crise grave.

Figure 5. Abilly, un exemple de petit vignoble en 1836.

Figure 5. Abilly, un exemple de petit vignoble en 1836.

Figure 6. Athée-sur-Cher, un exemple de vignoble intermédiaire en 1836.

Figure 6. Athée-sur-Cher, un exemple de vignoble intermédiaire en 1836.

Figure 7. Montlouis-sur-Loire, un exemple de gros vignoble en 1836.

Figure 7. Montlouis-sur-Loire, un exemple de gros vignoble en 1836.

Figure 8. Parcay-Meslay, un exemple de vignoble peu dynamique.

Figure 8. Parcay-Meslay, un exemple de vignoble peu dynamique.

24Le troisième facteur, c’est celui de la pérennité, c’est-à-dire le devenir du vignoble observé au travers de son état sur les 20 dernières années (1994- 2014). Trois classes ont été isolées. La disparition (198 communes) désigne des communes dont le vignoble a soit entièrement disparu (0 ha), soit subsiste sous forme de lambeaux dont l’ensemble ne dépasse pas les 5 ha (fig. 10). La résistance (63 communes) désigne des vignobles d’au moins 6 ha en 2014, mais qui sont en situation de déclin ou qui résistent (fig. 11). La croissance (16 communes) désigne des vignobles en expansion (fig. 12).

Figure 9. Bléré, un exemple de vignoble très dynamique.

Figure 9. Bléré, un exemple de vignoble très dynamique.

Figure 10. Saint-Quentin-sur-Indrois, un exemple de vignoble qui disparaît.

Figure 10. Saint-Quentin-sur-Indrois, un exemple de vignoble qui disparaît.

Figure 11. Savigny-en-Véron, un exemple de vignoble qui résiste.

Figure 11. Savigny-en-Véron, un exemple de vignoble qui résiste.

Figure 12. Saint-Nicolas-de-Bourgueil, un exemple de vignoble en croissance.

Figure 12. Saint-Nicolas-de-Bourgueil, un exemple de vignoble en croissance.

25Finalement, le « petit terroir » se définit à la fois par ce qu’il fut, par ce qu’il est devenu et par ce qu’il est. Cette grille d’analyse construite sous forme d’arbre de classification (fig. 13) donne une profondeur historique à la notion de « petit terroir ».

26Cette classification, opérée exclusivement sur un critère quantitatif, débouche sur une typologie des vignobles qui peut être cartographiée selon les profils synthétiques d’évolution (fig. 14). In fine, l’analyse de cette carte nous permet de définir ce qu’est un « petit terroir », relativement à l’évolution de sa superficie sur une durée de deux siècles.

Figure 13. Arbre de classification des communes d’Indre-et-Loire sur la période (1808-2014).

Figure 13. Arbre de classification des communes d’Indre-et-Loire sur la période (1808-2014).

27Selon ce critère quantitatif de la superficie, sont assurément des petits terroirs viticoles l’ensemble des communes tourangelles qui ne fut jamais, ni dans le passé ni dans le présent, tourné vers la viticulture. En l’occurrence, c’est l’ensemble des communes marquées en nuances de bleu (fig. 14), c’est-à-dire :

  • l’intégralité des communes du plateau septentrional du département d’Indre-et-Loire ;

  • l’ensemble des communes enchâssées dans les interfluves (appelées « varennes ») Loire/Indre-et-Loire/Cher (jusque Montlouis) ;

  • quelques communes de la vallée de l’Indre (Rigny-Ussé, Rivarenne, Cheillé, Lignières-de-Touraine, Savonnières, Druyes, Pont-de-Ruan, Saché, Monts, Veigné, Truyes, Courçay…) ;

  • la majeure partie des communes du plateau méridional ;

  • la majeure partie des communes sises sur et au-dessous de la rive gauche de la Vienne, à l’exception de Candes-Saint-Martin, Rivière, Ligré, Sazilly, Theneuil, Parçay-sur-Vienne et Braye-sous-Faye.

28Les vignobles de ces communes ont majoritairement disparu, à quelques exceptions près, toutes sises dans la moitié sud de la Touraine : Épeigné-les-Bois, Genillé, Chemillé-sur-Indrois, Saint-Hippolyte, Charnizay, Le Petit-Pressigny, Bossay-sur-Claise, Razines, La Tour-Saint-Gelin, Brizay, Tavant, Crouzilles, Avon-les-Roches, Crissay-sur-Manse, Anché, La Roche-Clermaut, Thizay, Lerné, Saint-Germain-sur-Vienne.

29Il convient d’isoler la classe des vignobles intermédiaires caractérisée par une orientation viticole plus ou moins affirmée selon les périodes. Certains de ces vignobles, qui ont pu être importants dans le passé, ont aujourd’hui totalement disparu, à l’instar de Luzillé, Perrusson, Boussay, Braye-sous-Faye, Cormery, Montbazon, Ballan-Miré, La Riche, Larçay, La Membrolle-sur-Choisille et Mettray. D’autres en revanche perdurent dans la périphérie des pôles viticoles importants, actuels ou passés : Parçay-Meslay pour Vouvray ; Saint-Patrice pour Bourgueil ; Savigny-en-Véron, Avoine, Huismes, Rivière et Sazilly pour Chinon ; Lussault entre Amboise et Montlouis ; Cangey, Mosnes, Limeray, Saint-Ouen-les-Vignes et Pocé-sur-Cisse pour Amboise ; Chisseaux, La Croix-en-Touraine, Dierré et Athée-sur-Cher pour la vallée du Cher. Enfin, des vignobles isolés résistent à travers le temps : Sainte-Maure-de-Touraine, Azay-le-Rideau et Vallères, Esvres. Au final, ces vignobles intermédiaires sont classés dans les petits terroirs.

Figure 14. Typologie des communes d’Indre-et-Loire selon leur profil d’évolution (1808-2014).

Figure 14. Typologie des communes d’Indre-et-Loire selon leur profil d’évolution (1808-2014).

Archives départementales d’Indre-et-Loire – Cadastre viticole informatisée – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 21 juillet 2015

30Restent les gros vignobles qui se caractérisent par leur taille importante à un moment de leur histoire. Pour autant, ces gros vignobles peuvent connaître l’anéantissement, de manière spectaculaire, comme en témoignent les vignes des anciennes communes de Sainte-Radegonde et Saint-Symphorien (intégrées à Tours en 1964), Saint-Cyr-sur-Loire et Fondettes, ou encore Joué-lès-Tours et Saint-Avertin, dévorés par l’expansion urbaine de l’agglomération tourangelle. C’est aussi le cas d’Azay-sur-Cher, Loches et Langeais. Lorsqu’ils résistent, les gros vignobles peuvent stagner (c’est particulièrement le cas pour les vignobles de la vallée du Cher) ; certains sont aussi classés parmi les petits. D’autres, en revanche, connaissent une dynamique positive, s’accroissent ; on retrouve ces terroirs actifs et dynamiques dans trois pôles, qui forment actuellement les trois grandes appellations bien connues de Touraine : le Vouvrillon, le Bourgueillois et le Chinonais.

31À partir de cette analyse purement quantitative, il est possible de proposer une cartographie interprétative des terroirs viticoles petits, moyens et gros de Touraine (fig. 15).

32Parmi les petits terroirs viticoles répertoriés dans le tableau 1 (p. 177), on constate des évolutions concernant les communes les plus viticoles. Les noyaux ont pu se déplacer dans le temps, comme par exemple dans le sud de la vallée de l’Indre ; le vignoble de Loches a disparu, et ce pôle n’existe plus guère qu’au travers du modeste vignoble de Saint-Hyppolite. A contrario, dans d’autres secteurs, des petits noyaux ont résisté à l’image d’Azay-le-Rideau dans la partie nord de la vallée de l’Indre, et Sainte-Maure-de-Touraine dans la vallée de la Manse. Pour ces communes, le facteur AOC a pu contribuer à la résistance du vignoble. Ce n’est pas, toutefois, systématique, comme en témoignent les vignobles de Thilouze ou de Draché, placés en AOCTouraine et aujourd’hui totalement éteints.

Figure 15. Représentation schématique des terroirs viticoles d’Indre-et-Loire.

Figure 15. Représentation schématique des terroirs viticoles d’Indre-et-Loire.

BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 23 juillet 2015

Tableau 1. Tableau descriptif des petits terroirs viticoles d’Indre-et-Loire.

Tableau 1. Tableau descriptif des petits terroirs viticoles d’Indre-et-Loire.

Une approche qualitative des « petits terroirs » de Touraine

33Cette approche, qui s’appuie sur des données exclusivement quantitatives (les surfaces encépagées dans chaque commune de Touraine entre le xixe siècle et l’actuel) doit être nuancée. Une appréhension qualitative de la trajectoire de ces mêmes territoires viticoles peut en effet déboucher sur des conclusions passablement différentes. On peut considérer le « petit terroir » comme un vignoble à la production confidentielle, exclusivement dédiée à une consommation très locale, voire une autoconsommation familiale. Mais des vignobles prestigieux peuvent livrer des productions renommées en quantité très limitée, sur des surfaces restreintes ; la confidentialité d’une production peut contribuer au prestige du vignoble. A contrario, on peut « faire pisser la vigne » sur des superficies plus ou moins vastes, c’est-à-dire faire passer la quantité devant la qualité de la récolte, et produire des « petits vins » en quantités considérables, en vue de l’exportation massive d’un produit à faible valeur ajoutée. En réalité, l’articulation entre l’appréhension quantitative et qualitative de ce que pourrait être un « petit terroir » est loin d’être aussi évidente. Il est donc essentiel de décorréler les appréhensions quantitatives et qualitatives pour définir ce que pourrait être un petit vignoble. Il faut rechercher des données qualitatives susceptibles de nuancer, voire de modifier les conclusions issues de l’analyse des dynamiques des superficies viticoles de 1808 à 2014.

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34Les archives départementales d’Indre-et-Loire conservent des enquêtes menées au milieu du xviiie siècle sur la production viticole dans les élections de Tours, Chinon, Loches, Amboise, Richelieu, Baugé et Saumur15, soit la majeure partie de la Touraine16. Ces comptes rendus permettent de dresser une cartographie nuancée de la réputation des vins tourangeaux, de la part d’enquêteurs que l’on ne peut guère soupçonner de complaisance si l’on se fie aux jugements sévère qu’ils expriment concernant le caractère de la population des élections d’Amboise17, Richelieu18 et Saumur19. Il en ressort une cartographie très instructive de la réputation des vins tourangeaux au milieu du xviiie siècle (fig. 16), rangés selon trois classes :

  • Les vins estimés comme bons, dont les productions sont très majoritairement exportées en-dehors de la Touraine.

  • Les vins bénéficiant d’une certaine réputation de qualité, sans pour autant apparaître comme exceptionnels dans le jugement exprimés par les enquêteurs. Ces productions sont majoritairement consommées en Touraine, mais peuvent faire l’objet d’exportations lorsque la rareté les rend attractifs.

  • Les productions de médiocre qualité, consommées quasi exclusivement en Touraine.

  • 20  ADIL, C 337, pièce 4. Tableau copié sur une feuille volante.

35Clairement, ce sont dans les élections de Tours et d’Amboise que se concentrent au milieu du xviiie siècle les vins considérés comme les meilleurs de Touraine. La gradation est subtile entre des productions d’élite (Vouvray et Rochecorbon pour les blancs, Joué et Ballan pour les rouges) et des productions de peu de qualité, consommées localement, mais quantitativement importantes, ainsi qu’en témoigne le tableau concernant les vignobles de l’élection de Tours20.

Tableau 2. Les vignobles de l’élection de Tours au milieu du xviiie siècle.

Tableau 2. Les vignobles de l’élection de Tours au milieu du xviiie siècle.

ADIL, C 337, pièce 4

  • 21  ADIL, C 337, pièce 66.
  • 22  ADIL, C 337, pièce 55.
  • 23  ADIL, C 337, pièce 66.
  • 24  ADIL, C 337, pièce 46 : « On ne parle point du vin qui n’a pas de débouché et qui se consomme dans (...)
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  • 26  ADIL, C 337, pièce 62.
  • 27  ADIL, C 337, pièce 62.
  • 28  ADIL, C 337, pièce 58. Paroisses de la basse vallée : « Vin médiocre, plus généralement blanc […]. (...)
  • 29  ADIL, C 337, pièce 55.
  • 30  ADIL, C 337, pièce 62.
  • 31  ADIL, C 337, pièce 28.

36Les vignobles les plus estimés sont ancrés sur les vallées de la Loire et du Cher, où les vignes occupent couramment près des trois quarts des superficies. Pourtant, la qualité n’est pas uniforme, certaines paroisses donnant des vins qualifiés de « bons », voire « très bons », tandis que d’autres livrent des crus considérés comme « médiocres ». Le long de la Loire, Vouvray, Rochecorbon et Vernou-sur-Brenne concentrent le vignoble de qualité dont les vins blancs sont exportés en direction de l’Europe du Nord via la Loire par les marchands hollandais, ou vers Paris. Mais de part et d’autre de ce noyau, la qualité tombe rapidement. Vers l’amont Chançay, Noizay, Nazelles, Limeray et une partie de Saint-Ouen-les-Vignes sont plantés au trois quarts, mais le vin est dit « médiocre » ; vers l’aval Saint-Cyr, Fondettes et Luynes produisent des « vins de peu de qualité », sans que les vignobles de Sainte-Radegonde et Saint-Symphorien ne soient même mentionnés. Sur la rive gauche de la Loire, toutes les paroisses sont abondamment plantées (aux trois quarts de leur superficie), mais l’enquêteur précise que les vins de la vallée du Cher sont meilleurs, en distinguant toutefois les vins de Lussault-sur-Loire dont la qualité est comparable à celle des vins du Cher ; on en déduit le peu de considération dont jouissent généralement les vins de Loire, qui sont d’ailleurs explicitement qualifiés de « médiocres ». De fait, c’est dans la vallée du Cher que se concentrent réellement les crus d’élite tourangeaux au xviiie siècle, « les meilleurs vins du pays » sur la rive droite, des « très bons vins » sur la rive gauche (Bléré, une partie d’Athée, Francueuil et Saint-Georges) ; les vins rouges de Joué, Ballan, et dans une moindre mesure Saint-Avertin jouissent d’une réputation aussi avantageuse que les vins de Vouvray et Rochecorbon. Ces vins s’exportent largement en-dehors de la Touraine, vers Paris21, mais aussi en direction du Berry par l’intermédiaire des marchés et foires d’Écueillé22 (actuellement commune du Loir-et-Cher, en limite avec l’Indre-et-Loire). Dans l’interfluve Loire/ Cher, les paroisses de Souvigny, Saint-Règle, Valières-les-Grandes et Thenay « qui forment une langue au milieu sont les seules qui ne produisent point de vin23 ». À l’exception de Vouvray et Rochecorbon, nulle part ailleurs en Touraine on ne rencontre de vin bénéficiant d’une réputation aussi flatteuse que celle des crus du Cher. Des vignobles se développent autour de Chinon, le long de la rive gauche de la Vienne, mais il s’agit de productions dont les débouchés commerciaux sont locaux, débitées dans les cabarets ou encore brûlées pour faire de l’eau-de-vie24 ; une partie s’exporte parfois en direction de Paris, voire de l’Anjou et de la Bretagne25. Les enquêteurs relèvent la qualité de certaines productions de Chinon, ainsi que de la majeure partie des paroisses de la rive gauche de la Vienne : Ports, Marcilly-sur-Vienne, Ligré, La Roche-Clermault, Seuilly, Lerné, Saint-Germain-sur-Vienne, Candes-Saint-Martin… Le blanc de Theneuil est « très délicat », et le vin de Lémeré est « le meilleur de tous26 ». Ces vins de qualité sont toutefois des productions confidentielles, ne représentant que de très petites quantités, alors que la majeure partie des crus ne bénéficie d’aucune réputation de qualité. Il convient aussi de souligner que les vignobles des paroisses de la rive droite de la Vienne sont totalement méprisés : les vignes produisent du « vin blanc », qui « se consomme dans le pays » ; l’enquêteur précise toutefois que « dans les temps de rareté il se voiture à Paris, dans les temps d’abondance s’en font de l’eau-de-vie, comme à Richelieu et avec même destination27 ». Au milieu du xviiie siècle, les vignobles du Bourgueillois, qui dépendent de l’élection de Saumur, connaissent en effet une situation similaire à celle du Chinonais, avec une production abondante principalement écoulée localement dans les cabarets28. Ces vins sont réputés de qualité médiocre, même si l’enquêteur reconnaît que quelques crus peuvent être « assez bons » ou « de meilleure qualité », particulièrement dans les paroisses de Bourgueil et Saint-Nicolas-de-Bourgueil. Partout ailleurs en Touraine, la production viticole n’a visiblement aucun intérêt pour les enquêteurs, qui n’en parlent pas, ou alors mentionnent seulement la présence de vignobles et d’une production dont le débouché est strictement local. C’est le cas pour l’élection de Loches, dans laquelle la viticulture est totalement ignorée pour les cantons de Ligueil et Écueillé, mentionnée pour mémoire pour les cantons de Preuilly-sur-Claise, Loches et Cormery29. Il en va de même dans le Richelais, où la vigne n’est mentionnée que pour les paroisses du Fagois (Faye-la-Vineuse et Bray-sous-Faye) qui produisent essentiellement des vins blancs dont une partie est consommée « dans le pays », particulièrement à Richelieu, et l’autre convertie en eau-de-vie exportée à Saumur, Orléans et Paris30. Concernant l’ensemble des paroisses tourangelles dépendant de l’élection de Baugé (Maine-et-Loire), aucune activité viticole n’est mentionnée, le seul vignoble de l’élection étant concentré dans une quinzaine de paroisses autour de Baugé, et ne produisant que d’« assé mauvais vins blancs » qui se consomment dans le pays, et peut parfois être envoyé à Laval « quand il est bien rare partout ailleurs31 ».

Figure 16. Qualité des terroirs viticoles de Touraine (milieu du xviiie siècle).

Figure 16. Qualité des terroirs viticoles de Touraine (milieu du xviiie siècle).

Archives départementales d’Indre-et-Loire, C 337 – Cadastre viticole informatisée – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 20 octobre 2015

  • 32  ADIL, 7 M 191.

37Un demi-siècle plus tard, au début du xixe siècle, les enquêtes préfectorales confirment les grands traits de cette cartographie de la qualité des vignobles tourangeaux. Une note de synthèse intitulée Culture de la vigne32 dresse le tableau des spécificités viticoles de chaque canton de l’arrondissement de Tours, selon trois classes : Pays vignoble, Pays de landes et bois, Pays de labourage.

[Canton d’]Amboise : Pays vignoble. Coteaux sur la Loire. Vins rouges et blancs de qualité médiocre. Vins rouges et blancs.
[Canton de] Bléré : Pays vignoble. Coteaux sur le Cher. Vins rouges de bonne qualité. Principal produit de vins rouges.
[Canton de] Châteaurenault : Pays de landes et bois. Vins médiocres peu recherchés. Vins rouges et blancs.
[Canton de] Montbazon : Pays de labourage mêlés de vignobles dans les parties voisines de l’Indre et du Cher. Vins rouges estimés dans quelques communes comme Ballan. Les vignes sont attachées à des charniers ou échalas, ce qui ajoute 3 autres façons à la culture ordinaire. Principal produit en vins rouges.
[Canton de] Neuillé-Pont-Pierre : Pays de labourage mêlé de landes. Vins rouges et blancs peu recherchés. Quelques particuliers donnent 3 façons de bêche à leurs vignes. Vins rouges et blancs.
[Canton de] Neuvy-la-Loi : Pays de labourage. Vins blancs consommés dans le pays. Principal produit en vins blancs.
[Canton de] Tours nord : Pays vignoble en grande partie. Coteaux sur la Loire. Vins rouges et blancs dont quelques-uns sont estimés. Principal produit en vins rouges.
[Canton de] Tours sud : Pays vignoble en exceptant que quelques communes comme Beaumont-lès-Tours situées entre la Loire et le Cher et faisant partie de ce qu’on appelle les varennes. Vins rouges estimés surtout à Joué et Saint-Avertin. Coteaux sur le Cher. Principal produit en vins rouges.
[Canton de] Vouvray : Pays vignoble en exceptant quelques communes comme Monnoye et Chanceaux où la culture des bleds est dominante.
Vins blancs estimés surtout à Vouvray et Rochecorbon. Principal produit en vins blancs.

38Un brouillon de lettre destinée au ministre de l’agriculture, rédigé en 1808 ou 1809, apporte des précisions utiles à ce tableau des « pays vignobles » en abordant, cette fois-ci, l’ensemble du département d’Indre-et-Loire :

  • 33  ADIL, 7 M 192.

[…] votre Excellence pourra, tout imparfait qu’il est, lui faire connaître les parties de ce département qu’on peut appeler pays vignoble. Ce sont dans l’arrondissement de Tours sur la Loire les cantons d’Amboise, de Vouvray, de Tours-nord (arrondissement de Tours), de Langeais et de Bourgueil (arrondissement de Chinon), sur le Cher ceux de Bléré, de Tours-sud et de Montbazon (arrondissement de Tours) et sur la Vienne celui de Chinon (arrondissement du même nom). On peut y joindre encore quelques communes du canton d’Azay-le-Rideau sur le Cher et sur l’Indre.
Ces vignobles produisent des vins blancs et des vins rouges. Les plus estimés de la première espèce sont ceux de Vouvray et de Rochecorbon (canton de Vouvray).
Ceux de la seconde espèce sont en quantité bien plus considérable et formant le principal produit des vignobles ci-dessus indiqués, en exceptant le canton de Vouvray. On met en tête ceux de Joué et de Saint-Avertin (canton de Tours-sud), de Ballan (canton de Montbazon), de Saint-Cyr (canton de Tours-nord), et de Chisseaux, La Croix, Bléré et autres communes du même canton, riverains du Cher, et surtout de Saint-Nicolas-de-Bourgueil (canton de Bourgueil), la qualité des vins de ce dernier cru a quelque ressemblance avec celle des vins de Bordeaux.33

39Sur la Loire sont distingués les vignobles de Vouvray/Rochecorbon, auxquels sont adjoints nommément Saint-Cyr et Amboise ; la qualité des vins blancs de Vouvray est soulignée. Sur la vallée du Cher, l’auteur relève deux groupes, sans toutefois exprimer aucun jugement de valeur qualitatif : d’une part les vignobles de Ballan, Joué-lès-Tours et Saint-Avertin ; d’autre part ceux de La Croix-en-Touraine, Bléré et Chisseaux. L’auteur distingue ensuite nettement les vignobles du canton de Langeais, les vignes de la vallée de la Vienne dans le canton de Chinon, celles de la vallée de l’Indre au sein des cantons d’Azay-le-Rideau et Montbazon, et celles du canton de Bourgueil avec une mention spéciale pour Saint-Nicolas-de-Bourgueil, dont la qualité des vins rouges est soulignée par une analogie flatteuse avec les vins de Bordeaux. Plus précis, un document présentant un « tableau des produits en vins pendant l’année 1812 » distingue les vins de qualité supérieure : en rouge, les vins d’Azay-sur-Cher, Bléré, La Croix, Joué, Saint-Cyr et Bourgueil ; en blanc, les vins de Vouvray, Rochecorbon et Vernou-sur-Brenne. Les observations inscrites dans ce tableau soulignent le caractère volatile des prix des vins qui s’exportent en dehors de l’Indre-et-Loire, particulièrement les vins du Vouvrillon achetés par les négociants hollandais :

  • 34  ADIL, 7 M 192.

On doit porter hors ligne les vins de Vouvray qui, par le prix, souvent très variable qu’y mettent les marchands de la Flandre, a été porté cette année à 36 et 40 francs l’hectolitre. Les vins de Bourgueil sont aussi très recherchés et payés en conséquence.34

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40Entre les années 1750 et 1810, le tableau général de la viticulture de qualité tourangelle n’a guère varié, à une exception près : l’émergence des vins du Bourgueillois, dont la réputation ne cesse désormais de se renforcer jusqu’à nos jours35. Cette réputation se forge en effet très progressivement à partir de la fin du xviiie-début du xixe siècle36, à la différence des vins de Vouvray et de la vallée du Cher dont la bonne réputation remonte au Moyen Âge, comme l’attestent les mentions explicites des crus de Vouvray, Chissay et Montrichard dans les comptes de la ville de Tours37. L’importance du vignoble bourgueillois est soulignée le 10 juin 1783 par Jouve, directeur de la régie des aides et droits réunis pour la division de Saumur et Baugé dans l’intendance de Tours :

  • 38  Bouloiseau Marc, « Une source peu connue de l’histoire économique et sociale. Les rapports des dir (...)

Les productions du pays consistent en vins, grains de toutes espèces : millet, bled de Turquie et foins. Il s’y recueille encore beaucoup de bois de réglisse dont on fait un assez grand commerce. Les vins les plus estimés sont ceux de Saint-Nicolas, Alonne et Brain ; quand ils sont de bonne qualité, on les enlève pour le Maine, l’Anjou et autres provinces. Ceux de Varenne, Chouzé, La Chapelle, Benaît et Restigné sont moins bons et se tirent néanmoins pour Paris et la direction de Baugé, mais il en reste toujours beaucoup dans le pays et c’est ce qui y fertilise la fraude.38

41Cette description souligne l’hétérogénéité très forte pouvant exister au sein d’une zone viticole. Ainsi, en 1783, le directeur de la régie distingue bien deux types de vignoble dans le Bourgueillois. La meilleure partie, produisant des vins « estimés », se concentre dans trois paroisses jointives dominant la rive droite de la Loire : Saint-Nicolas-de-Bourgueil, Allonnes et Brain (ces deux dernières communes étant aujourd’hui dans le département du Maine-et-Loire) ; les productions de « bonne qualité » sont exportées en direction du Maine, de l’Anjou et autres provinces, c’est-à-dire par la Loire et la Mayenne, sans doute en direction de la Normandie. La partie moins cotée du vignoble bourgueillois regroupe les paroisses des rives de Loire, à savoir Varennes-sur-Loire, Chouzé-sur-Loire, La Chapelle-sur-Loire, Benais et Restigné, dont les vins, jugés « moins bons », sont exportés à Paris et en direction de Baugé, au nord de l’Anjou.

42Mais cette hétérogénéité n’est pas seulement régionale ; elle existe au sein même du territoire viticole de communes possédant une certaine reconnaissance, comme en témoignent ces statistiques récupérées au dos d’un tableau intitulé Évaluation des produits en 1847 et 1848 :

  • 39  ADIL, 7 M 192.

Le département d’Indre-et-Loire produit en moyenne 722 120 hectolitres de vin. Un tiers se consomme dans le pays, le reste est destiné à l’exportation sur Paris et un peu sur la Hollande, la Belgique, les départements voisins, plus particulièrement la Beauce, la Sarthe et la partie plus rapprochée de la Normandie. Depuis deux années les ventes ne se font pas et le vin reste en masse dans les celliers. On évalue les frais à 300 270 fr. par hectare. La vente brute, quand elle se fait, à 500 296 fr. Les propriétaires de vigne sont aujourd’hui avec deux récoltes dans leurs celliers. Pour l’appréciation des vignobles dénommés de l’autre part, il convient de faire les observations suivantes :
– Vouvray : 789 hect. dont 55 hect. en 1re classe, 60 hect. en 2e, le reste très commun.
– Joué : 626 hect. dont 91 hect. en 1re classe, 128 hect en 2e, le reste très commun.
– Bourgueil : 30 hect. dont 5 hect. en 1re classe, 11 hect. en 2e, le reste très commun.
– Saint-Nicolas-de-Bourgueil : 1189 hect. dont 6 hect. en 1re classe, 101 en 2e classe, le reste très commun.39

  • 40  Cette statistique concernant Bourgueil est sujette à caution ; la superficie encépagée (30 ha) ne (...)

43Les vins de qualité (1re et 2e classe), ceux dont la production pourrait marquer des « grands terroirs », sont en réalité issus d’une part très minoritaire des vignobles communaux : 15 % du vignoble de Vouvray, 35 % de celui de Joué-lès-Tours, 53 % de celui de Bourgueil40, 9 % de celui de Saint-Nicolas-de-Bourgueil.

44Il reste qu’in fine, ces vignobles de Vouvray, du Bourgueillois, de Joué, sont tout-à-fait exceptionnels. En effet, au xixe siècle, l’immense majorité des vignobles communaux d’Indre-et-Loire produisent, sans aucune ambiguïté, des petits vins qualifiés d’ordinaire, c’est-à-dire peu coûteux, destinés à une clientèle locale ou supra-locale, comme en témoignent par exemple des observations consignées dans un tableau daté du 25 juin 1813 :

  • Thilouze : le maire observe qu’il n’existe qu’une très petite quantité de vigne dans sa commune, qui ne donne que des vins très ordinaires et qui ne suffit pas à sa consommation.

  • Channay : le vin est d’une très petite qualité, et les vignes sont de peu de rapport. On tire les vins pour la consommation de la commune de Restigné et Langeais.

  • Chinon : il n’y a pas de qualité supérieure dans la commune. On peut regarder qu’il en a un tiers consommé par les étrangers dans les auberges et cabarets, les distillateurs n’en consommant que dans les années d’abondance ou lorsqu’il s’en trouve de gâté.

  • Chezelles : beaucoup de propriétaires récoltent dans les communes voisines et consomment dans celle-ci.

  • Crouzilles : on ne récolte que des vins blancs propres à faire de l’eau-de-vie.

  • Parçay-sur-Vienne : les vins de cette commune sont de qualité ordinaire. La récolte a été médiocre en 1812 et a eu peu de qualité. C’est ce qui a empêché d’en distiller. Année commune il se cueille de 8 à
    900 hectolitres, et il s’en distille 400, le surplus se consomme ou se vend aux cabaretiers des villes voisines.

  • Cinq-Mars : la moitié des vignes est presque sans produit, et le terrain n’est pas même bon à produire du grain.

  • Continvoir : la commune ne cueille pas de vin pour sa suffisance.

  • Gizeux : l’excédent est vendu dans les communes voisines.

  • Sainte-Maure : le produit des vignes de la commune est insuffisant pour la consommation. L’importation est plus du double. Elle vient des communes qui avoisinent.
    […]

  • Champigny : cette quantité n’est pas suffisante pour la consommation des habitants.

  • Chaveignes : la commune ne peut pas être regardée comme vignoble soit par la quantité ou par la qualité des vins.

    • 41  ADIL, 7 M 192.

    Jaulnay : il n’existe dans cette commune que des vins à peu près pour la consommation de la commune.41

Conclusion

45Un vignoble n’est pas naturellement, par essence, petit ou grand ; il peut le (re)devenir. Les territoires viticoles connaissent des dynamiques spatiales complexes passées et à venir, de sorte qu’il est illusoire de les penser comme advenus définitivement petits ou grands. Il en résulte que la viticulture doit être considérée comme une trajectoire, c’est-à-dire un processus dans le temps long, multiséculaire. C’est à cette échelle de la longue durée que peuvent émerger les tendances lourdes ; c’est à ce niveau d’analyse des trajectoires que l’on perçoit une différenciation spatiale entre des territoires clairement propices ou défavorables au développement d’une activité viticole, quelle que soit la qualité des vins produits. Ainsi, s’il convient de repousser absolument l’appréhension déterministe des territoires dans la mesure où nous sommes dans une ignorance totale des transformations à venir (climatiques, technologiques, sociales, culturelles…), il est toutefois possible de faire ressortir, à l’issue d’une analyse de leur histoire dans une durée relativement longue (250 ans), des secteurs géographiques où l’activité viticole apparaît structurellement faible : ce sont des terroirs fondamentalement petits. On peut définir trois classes de vignobles :

461 – Les trois quarts des communes tourangelles se caractérisent par une perpétuelle faiblesse de leur production viticole, quantitativement (vignoble peu étendu) et qualitativement (production de vins ordinaires, de qualité dite « médiocre », consommés sur place ou dans les communes voisines). Ces territoires sont, de très longue date, des « petits terroirs » ; leurs vignobles n’ont jamais connu d’ampleur ou de reconnaissance autre que strictement locale, pas plus dans un passé lointain ou proche que dans le présent. Si les superficies viticoles de ces communes ont parfois pu connaître une hausse importante dans les décennies qui précèdent la crise phylloxérique (1860-1880), cet épisode singulier s’est déroulé sur un court laps de temps, en lien avec une conjoncture économique très particulière. Aujourd’hui, lorsqu’un vignoble subsiste dans ces communes, ce sont des « reliques » (pour reprendre la terminologie de Georges Kuhnholtz-Lordat), c’est-à-dire des vestiges qui occupent des superficies très faibles.

472 – Quelques territoires offrent des productions viticoles bénéficiant d’une réputation solide et très ancienne. Abondamment plantés depuis des siècles, réputés de longue date pour la qualité de certains de leurs crus recherchés, ils demeurent « grands » jusqu’à aujourd’hui : le Vouvrillon et le Bourgueillois sont dans cette catégorie. Il convient toutefois de noter que d’une part la réputation des vins de Bourgueil est beaucoup plus récente que celle de Vouvray, et que d’autre part ces deux gros pôles viticoles ne sont pas homogènes. À Vouvray, trois communes forment incontestablement le noyau d’élite : Rochecorbon, Vouvray et Vernou-sur-Brenne ; s’y agrègent de manière épisodique les vignobles périphériques des communes de Noizay, Chançay, Reugny et Parçay-Meslay. Dans le Bourgueillois, les communes qui forment le noyau stable de plus forte concentration de la vigne sont Saint-Nicolas-de-Bourgueil, Bourgueil et, dans une moindre mesure, Restigné ; les vignobles périphériques, sensibles aux conjonctures, sont installés dans les communes de Benais, Ingrandes-de-Touraine et, secondairement, Saint-Patrice, Chouzé-sur-Loire et La Chapelle-sur-Loire.

483 – Des territoires montrent des trajectoires de transformation, qu’elles soient montantes (promotion) ou descendantes (déclassement) :

  • Considéré comme « petit » dans le passé, reconnu comme « grand » aujourd’hui, le Chinonais a connu une spectaculaire promotion de la qualité de ses vins dans le courant du xxe siècle. Il convient toutefois de noter que le vignoble chinonais couvre des superficies importantes de très longue date. En revanche, la réussite des vins de Chinon s’est accompagnée d’un redéploiement territorial, délaissant le pôle viticole du Véron et de la rive gauche de la Vienne pour glisser le long de la rive droite de la Vienne dans les communes de Panzoult et Cravant-les-Coteaux.

  • À l’inverse, spectaculaire est la déchéance du vignoble de la vallée du Cher. Possédant une belle réputation de très longue date, les vignobles de la vallée du Cher, autrefois abondamment plantés, connaissent un déclassement sévère dans le courant du xxe siècle.

Annexes

Annexe

Figure 17. Les communes d’Indre-Loire.

Figure 17. Les communes d’Indre-Loire.

BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 24 juillet 2015

Notes

1  Pour faciliter la lecture nous avons inséré en annexe une carte des communes d’Indre-et-Loire. Nous remercions Benoît Musset et Xavier Rodier pour leur relecture et leur aide dans l’élaboration de ce travail.

2  Kuhnholz-Lordat Georges. La genèse des appellations d’origine des vins, Chaintré, Œnoplurimedia, 1991 (1re éd. 1963), p. 19.

3  Ibid., p. 33.

4  Ibid., p. 32.

5  Sur ce point, voir par exemple l’article stimulant d’Alain Guerreau concernant la traduction problématique du mot vinea dans les sources latines médiévales. Guerreau Alain, « Vinea », dans Goulet Monique et Parisse Michel (dir.), Les historiens et le latin médiéval, Paris, Publications de la Sorbonne, 2001, p. 67-73.

6  Archives départementales d’Indre-et-Loire (ADIL désormais), 6 M 1295.

7  Nous tenons à remercier l’INAO, et particulièrement François Garnotel et Jacques Gautier, pour leur aide précieuse dans la réalisation de ce travail. L’INAO participe activement aux travaux du programme régional VitiTerroir (http://vititerroi.hypotheses.org/).

8  Les données de 1836 ont été préférées à celles de 1808 car, d’une part, la série est absolument complète (à la différence de l’enquête de 1808 qui souffre de nombreuses lacunes, notamment dans le Chinonais) et, d’autre part, les données semblent plus fiables.

9  ADIL, 7 M 191. Tableau intitulé « Aperçu général de la surface des terres cultivées en vignes dans le département d’Indre-et-Loire et de leur produit en vins ».

10  Dion Roger, Le Val de Loire. Étude de géographie régionale, Tours, Arrault, 1934.

11  Nous disposons d’une donnée incohérente pour Saint-Nicolas-de-Bourgueil en 1836. C’est la raison pour laquelle la commune est neutralisée sur la carte (fig. 2 et 12).

12  Musset Benoît, « Huit siècles de viticulture dans la Sarthe (xiie-xxe siècle) : d’une culture contrainte à une culture choisie », dans Foucher-Lefebvre Emmanuelle, Guênerie Chantal, Despert René et Gibiat Samuel (dir.), Des vignes, des vins, des hommes. La viticulture en Sarthe, du xiiie au xxe siècle, Le Mans, Conseil général de la Sarthe, 2012, p. 23.

13  Bertrand Jean-René et Humeau Jean-Baptiste, « Les vignobles de l’Anjou : des campagnes satisfaites ? », dans Legars Claudine et Roudié Philippe (dir.), Des vignobles et des vins à travers le monde. Hommage à Alain Huetz de Lemps, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 1996, p. 169-182.

14  Musset B., « Huit siècles de viticulture… », art. cit., p. 12-37.

15  ADIL, C 337. Ce document a été exploité par Brigitte Maillard (Les campagnes de Touraine au xviiie siècle. Étude d’histoire économique et sociale, thèse d’État en histoire, Université de Rennes, 5 vol., 1992, p. 713 sq. ; Les campagnes de Touraine au xviiie siècle. Structures agraires et économie rurale, Rennes, Presses universitaires de Rennes, p. 200 sq.). Il a aussi été utilisé par Benoît Musset pour étudier la consommation des vins d’Anjou (« La consommation des vins d’Anjou, des années 1600 aux années 1820 », Archives d’Anjou, numéro spécial « L’Anjou à table ! », no 16, 2013, p. 131-141).

16  Gorry Jean-Michel, « L’administration générale et fiscale d’Ancien Régime : la généralité et les élections », dans Zadora-Rio Élisabeth (dir.), Atlas archéologique de Touraine, supplément à la Revue archéologique du Centre de la France, no 53, 2014, http://a2t.univ-tours.fr/notice.php?id=27, 2014, consulté le 19 octobre 2015.

17  ADIL, C 337, pièce 66 : « En général paresseux et molx. Pour cette raison bien des cantons demeurent sans culture. Sont adonnés au vin dans les parties qui en produisent. Méchans, de mauvaise foy et pillard, singulièrement le menu peuple d’Amboise. »

18  ADIL, C 337, pièce 63 : « Ceux du l’Îlebouchardois, en général gens lâches, grossiers, fainéants […] qui ont beaucoup d’ouverture, principalement pour la chicane. Les habitants du Richelais plus voisins de la ville se ressentent de la […] qui règne dans Richelieu. Les autres sont assez laborieux. Ceux du Mirebalois sont grossiers et pauvres. Ceux du Montcontourois sont grossiers, mais laborieux et nombreux. »

19  ADIL, C 337, pièce 58 : « Les habitants de la basse valée sont paresseux, libertins et insolents. Ceux de la haute vallée sont plus laborieux mais ivrognes. »

20  ADIL, C 337, pièce 4. Tableau copié sur une feuille volante.

21  ADIL, C 337, pièce 66.

22  ADIL, C 337, pièce 55.

23  ADIL, C 337, pièce 66.

24  ADIL, C 337, pièce 46 : « On ne parle point du vin qui n’a pas de débouché et qui se consomme dans le pays par le débit des cabarettiers et les chaudières à eau-de-vie. »

25  ADIL, C 337, pièce 47 : « Les vins de l’élection sont de différentes quallités. Les rouges aux environs de Chinon sont assé estimés, mais en petite quantité. On en tire quelquefois pour Paris et Orléans, et pour l’Anjou et la Bretagne. Les blancs, il y en a de goua des paroisses de Ports, Marsilly, Ligré, La Roche, Suilly, Lerné, Saint-Germain, Candes, Saint-Patrice, Saint-Michel. Mais dans le reste de l’élection ils sont médiocres et de peu de valleur et si consomment. On fait quelquefois de ces vins des bons crus pour Paris et Orléans, mais cela est rare et on est obligé de les consommer au pays et faire de l’eau de vie de partie. Si les droits pour passer la Bretagne n’étaient pas si gros, on y en envoiroit. »

26  ADIL, C 337, pièce 62.

27  ADIL, C 337, pièce 62.

28  ADIL, C 337, pièce 58. Paroisses de la basse vallée : « Vin médiocre, plus généralement blanc […]. Pour les paysans, il en croit de rouge assez bon pour les cabarets dans les paroisses de la Chapelle-Blanche, Restigné et Benais. On en brûle aussi pour faire de l’eau-de-vie qui s’envoye à Orléans. Paroisses de la haute vallée : vins médiocres […]. Les rouges sont de meilleure qualité, croissent principalement dans Saint-Germain et Saint-Nicolas de Bourgueil, Brain et Alone […] pour les cabarets. Le blanc se brûle pour eau-de-vie. »

29  ADIL, C 337, pièce 55.

30  ADIL, C 337, pièce 62.

31  ADIL, C 337, pièce 28.

32  ADIL, 7 M 191.

33  ADIL, 7 M 192.

34  ADIL, 7 M 192.

35  Caslot Laurie, L’évolution du vignoble bourgueillois entre 1850 et 1950 : permanences et mutations, mémoire de master 2, Université François-Rabelais de Tours, 2011.

36  Delugré Cécile, Vins, vignes et vignerons à Bourgueil au xviiie siècle, mémoire de maîtrise, Université François-Rabelais de Tours, 1994, p. 20-22. En 1790, dans le cadre d’un classement des vins d’Anjou en trois classes (bibliothèque municipales d’Angers, ms. 1742), le « Bourgueil » est mentionné comme un vin de 2e classe. Cf. Lebrun François. Les hommes et la mort en Anjou aux 17e et 18e siècles, Paris/La Haye, Maloine/Mouton, 1971, p. 65.

37  Montrichard est mentionné comme un cru prestigieux dans la Bataille des vins d’Henri d’Andeli (environ 1230) au vers 137 (Les dits d’Henri d’Andeli, éd. par A. Corbellari. Paris, Honoré Champion, 2003, p. 55), mais aussi dans les comptes de la ville de Tours en décembre 1480, lorsque la ville offre aux seigneurs et officiers de la maison du roi des pipes de vin vieux de Montrichard et de Chissay « parce que les nouveaux ne sont pas trouvéz bons » (archives municipales de Tours, CC 45, fo 28vo ). Les vins de Chissay sont aussi mentionnés précocement dans les comptes de la ville de Tours, apparaissant comme des vins de qualité. En octobre 1370, Jean de Bueil livre à John Knoll et ses troupes deux pipes de vin vieux de Chissay (AM Tours, CC 6, fo 72). Quatre pipes de vin de Chissay, élu dans la cave de Colas de Montbason « pour le meilleur », sont encore offertes par la ville de Tours au capitaine du château de Tours pour sa prise de fonction dans le courant de l’année 1416-1417 (AM Tours, CC 16, fo 94vo). Les vins de Vouvray sont aussi mentionnés dans les comptes de la ville de Tours comme présents à des hôtes prestigieux ; en avril 1416, il s’agit d’une pipe de vin (AM Tours, CC 16, fo 61vo) et en décembre 1480 de deux traversiers de vin clairet vieux (AM Tours, CC 45, fo 28vo). Concernant la qualité du vin offert par la ville de Tours au xve siècle, voir Leturcq Samuel, « La qualité des pots de vin tourangeaux au xve siècle », dans Lavaud Sandrine, Chevet Jean-Michel et Hinnewinkel Jean-Claude (dir.), Vins et vignobles. Les itinéraires de la qualité (Antiquité-xxie siècle), Villenave-d’Ornon, Vigne et Vin Publications internationales, 2014, p. 49-69.

38  Bouloiseau Marc, « Une source peu connue de l’histoire économique et sociale. Les rapports des directeurs de la régie des aides et droits réunis. L’exemple du Saumurois (1783) », Bulletin d’histoire économique et sociale de la Révolution française, a. 1969, 1970, p. 146-147.

39  ADIL, 7 M 192.

40  Cette statistique concernant Bourgueil est sujette à caution ; la superficie encépagée (30 ha) ne paraît pas crédible au regard des statistiques départementales.

41  ADIL, 7 M 192.

Table des illustrations

Titre Figure 1. Évolution des superficies viticoles du département d’Indre-et-Loire (1808-2014).
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Titre Figure 2. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 1836.
Crédits Archives départementales d’Indre-et-Loire, 6 M 1295 et 1296 – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 23 juillet 2015
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Titre Figure 3. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 1910.
Crédits Archives départementales d’Indre-et-Loire, 6 M 1333 – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 16 juillet 2015
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Titre Figure 4. Surfaces et densités viticoles par commune en Indre-et-Loire en 2014.
Crédits Cadastre viticole informatisée – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 16 juillet 2015
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Titre Figure 5. Abilly, un exemple de petit vignoble en 1836.
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Titre Figure 6. Athée-sur-Cher, un exemple de vignoble intermédiaire en 1836.
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Titre Figure 7. Montlouis-sur-Loire, un exemple de gros vignoble en 1836.
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Titre Figure 8. Parcay-Meslay, un exemple de vignoble peu dynamique.
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Titre Figure 9. Bléré, un exemple de vignoble très dynamique.
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Titre Figure 10. Saint-Quentin-sur-Indrois, un exemple de vignoble qui disparaît.
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Titre Figure 11. Savigny-en-Véron, un exemple de vignoble qui résiste.
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Titre Figure 12. Saint-Nicolas-de-Bourgueil, un exemple de vignoble en croissance.
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Titre Figure 13. Arbre de classification des communes d’Indre-et-Loire sur la période (1808-2014).
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Titre Figure 14. Typologie des communes d’Indre-et-Loire selon leur profil d’évolution (1808-2014).
Crédits Archives départementales d’Indre-et-Loire – Cadastre viticole informatisée – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 21 juillet 2015
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Titre Figure 15. Représentation schématique des terroirs viticoles d’Indre-et-Loire.
Crédits BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 23 juillet 2015
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Titre Tableau 1. Tableau descriptif des petits terroirs viticoles d’Indre-et-Loire.
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Titre Tableau 2. Les vignobles de l’élection de Tours au milieu du xviiie siècle.
Crédits ADIL, C 337, pièce 4
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Titre Figure 16. Qualité des terroirs viticoles de Touraine (milieu du xviiie siècle).
Crédits Archives départementales d’Indre-et-Loire, C 337 – Cadastre viticole informatisée – BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 20 octobre 2015
URL http://books.openedition.org/pufr/docannexe/image/26080/img-19.jpg
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Titre Figure 17. Les communes d’Indre-Loire.
Crédits BD Carto 2013. Carte réalisée par Adrien Lammoglia le 24 juillet 2015
URL http://books.openedition.org/pufr/docannexe/image/26080/img-20.jpg
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