Travail et emploi
|La contribution des services à l’emploi en Grande-Bretagne au cours des périodes victorienne et édouardienne
Résumé
This article tries to assess the importance of service sector employment in Victorian and Edwardian Britain. Employment in most services grew considerably over that period. Except in transport and distribution, the main determinant behind that growth was income. Services were highly concentrated in London and the South East. Changes in the distribution of the working population show that Britain was already a mature economy. The contribution of services to the economic development of Britain in Victorian and Edwardian times was much more important than is generally thought and has to be reappraised.
Texte intégral
- 1 Dans la première édition de A New Economic History of Britain since 1700 de Roderick Floud & Donald (...)
- 2 “One cannot set out to increase the national income or expand the economy by increasing the number (...)
1Le rôle des services dans le développement économique du Royaume-Uni, au cours du dix-neuvième siècle, a fait l’objet de très peu d’attention de la part des spécialistes d’histoire économique et cela jusqu’à une période récente1. En effet, la plupart des études qui s’intéressent au développement ou au déclin du Royaume-Uni partent toutes de l’hypothèse implicite que la croissance économique est liée à celle de l’industrie et tout particulièrement à celle du secteur manufacturier. Peter Mathias résume très clairement cette conception : « On ne peut vouloir accroître le revenu national ou la croissance de l’économie en augmentant le nombre d’employés, de juristes et de dockers, même s’il est possible que ces groupes augmentent et prospèrent davantage que ceux du secteur manufacturier grâce à l’expansion industrielle »2.
- 3 Rappelons la distinction établie par A. Smith entre le travail productif, créateur de richesse, et (...)
- 4 Ce n’est que très récemment, avec l’apparition du concept d’économie post-industrielle, que les éco (...)
2Cette vision des historiens s’appuie largement sur celle des économistes qui, d’Adam Smith3 aux concepteurs des modèles de croissance des années 1960-1970, notamment Kaldor [1966] et Baumol [1967], en passant par les économistes marxistes, ont toujours négligé le rôle du secteur des services ou, au mieux, l’ont envisagé comme un facteur de déclin4.
- 5 La reine Victoria règna de 1837 à 1901. Son fils Edouard lui succéda sous le nom d’Edouard VII (190 (...)
3Pourtant, à compter de la seconde partie du dix-neuvième siècle, les services constituaient une part très importante de l’économie britannique. Sur la période 1861-1911, leur part dans le revenu national et dans l’emploi total est passée respectivement de 46,7 % à 53,4 % [Deane & Cole, 1967, p. 166 et p. 175] et de 31,3 % à 41,4 % [Lee, 1984, p. 140]. Au cours de la période victorienne5, leur contribution à la croissance du PIB a dépassé celle du secteur manufacturier [Lee, 1986, p. 11], En fait, ce n’est que durant les trente premières années du dix-neuvième siècle que leur contribution à la croissance de l’économie britannique a été moins importante que celle du secteur manufacturier [Lee, 1986, p. 98]. Autrement dit, ce n’est que durant ces trente années que la croissance de l’économie britannique a été tirée par la production industrielle (industry-led growth).
1. L’emploi dans les services
- 6 “His services generally perish in the very instant of their performance, and seldom leave any trace (...)
4Quand on s’intéresse aux services, la première chose est de savoir de quoi on parle, dans la mesure où ce secteur regroupe des activités très différentes qui ne paraissent pas avoir grand chose en commun. Par exemple, pendant que les médecins, les avocats et les comptables jouissent d’un niveau de formation élevé et de rémunérations importantes, le personnel de maison, à l’autre bout de la chaîne, n’a aucune qualification et des gages très faibles. La catégorie des services a évolué avec le temps. Dans les premières définitions, elle incluait le secteur de la construction qui en fut exclu par la suite. D’autres études prenaient également en compte l’industrie du gaz et celle de l’électricité qui elles aussi furent exclues des classifications qui sont les plus communément utilisées de nos jours. Celles-ci partent du constat que la seule caractéristique commune à toutes les activités de services est de produire quelque chose d’immatériel, qui ne dure pas et ne peut être stocké, et qui n’est pas facilement mesurable. Autrement dit, toutes les tentatives qui ont été faites pour essayer de repérer les traits communs aux différents services en sont revenues à ce qu’avait dit Adam Smith en parlant du travail du domestique : « Ses services périssent généralement à l’instant même où ils existent, et laissent rarement une quelconque trace derrière eux... »6. C’est pour cette raison que la valeur de la production de ce secteur est difficilement quantifiable et sujette à des erreurs.
5Il existe plusieurs typologies des services. L’International Standard Industrial Classification regroupe les services en quatre catégories : (1) commerce de gros et de détail, hôtels et restaurants ; (2) transports, entreposage et communication ; (3) finance, immobilier, assurance et services aux entreprises ; (4) services d’intérêt collectif, services sociaux et services aux personnes. Le British Census of Population présente les services en six catégories : (1) transports et communications ; (2) distribution ; (3) assurance et activité bancaire ; (4) professions libérales (the professions) ; (3) services divers (miscellaneous services), catégorie qui regroupe hôtellerie, restauration, et personnel de maison ; (6) administrations publiques et défense. C’est cette seconde classification qui est en principe utilisée par les spécialistes d’histoire économique, même si elle n’est pas sans poser quelques difficultés, en raison d’un problème de catégorisation qui fait que, par exemple, les catégories du recensement de 1861 ne recouvrent pas exactement la même réalité que celles des recensements ultérieurs. Lee [1984, p. 140] explique qu’avant 1911 les chiffres concernant la distribution ont sans doute été inférieurs à la réalité, dans la mesure où la distinction entre la fabrication et la distribution du produit n’était pas très claire et que souvent les distributeurs étaient inclus dans le secteur manufacturier. On peut également prendre l’exemple de la catégorie des professions libérales et signaler qu’avant 1851, elle incluait les administrations publiques et la défense. En revanche, ce n’est qu’à partir de 1881 que les comptables, les architectes et les géomètres ont été inclus dans cette catégorie, alors qu’auparavant ils étaient comptabilisés dans le secteur manufacturier [Gourvish, 1988a, p. 18]. Il s’ensuit que les statistiques utilisées dans notre recherche comportent des risques d’erreur. De manière générale, elles sous-estiment l’importance de l’emploi dans les services durant la période étudiée et ne permettent d’obtenir que des indicateurs relativement approximatifs.
- 7 Contrairement à l’idée longtemps admise, selon laquelle l’agriculture aurait vu ses effectifs fondr (...)
6Entre 1841 et 1911, la population totale de la Grande-Bretagne est passée de 18,5 millions de personnes à 40, 9 millions [Deane and Cole, 1967, p. 8], Le facteur travail est, lui, passé de 6,9 millions de personnes en 1841 à 10,5 millions en 1861, puis à 12,7 millions en 1881 pour atteindre 18, 3 millions de personnes en 1911 [Lee, 1981, p. 443]. Signalons qu’en 1851, l’agriculture était encore le secteur qui employait le plus grand nombre de personnes (2,1 millions selon les estimations de Deane et Cole [1967, p. 143])7. En se reportant au tableau 1, et en comparant les années 1861, 1881, 1911, il apparaît que la part de l’agriculture dans l’emploi total a diminué régulièrement en nombre de personnes occupées et en pourcentage (8,1 % en 1911 contre 12,5 % en 1881 et 18,8 % en 1861) et que la part du secteur manufacturier en pourcentage dans l’emploi total a atteint son maximum en 1881 (52,6 %) pour décroître ensuite et ne plus atteindre que 50,5 % en 1911. La part des emplois dans les services est passée de 31,3 % en 1861 à 34, 7 % en 1881 et à 41,4 % en 1911. Elle a donc connu une progression sensible de 1861 à 1911. De manière plus détaillée, on constate que le nombre de personnes occupées a augmenté dans toutes les catégories de services : il a plus que triplé dans les transports et la distribution, il a été multiplié par 14 pour les activités bancaires, par 2,5 pour les professions, par 1,7 pour les services divers (miscellaneous services), regroupant essentiellement les employés de maison, le personnel hôtelier et de restauration et les personnes du spectacle, et par 2 pour les administrations publiques. Il est intéressant de remarquer qu’en 1911, c’est toujours la catégorie des services divers qui compte le plus de personnes occupées : 2 888 363 contre 1 618 553 pour les transports et 1 675 261 pour la distribution, même si sa part relative diminua de 17,2 % en 1881 à 15, 8 % en 1911, pendant que celle des autres activités de service augmentait. Ce groupe était largement dominé par le personnel de maison (domestic servants). La très grande majorité étaient des femmes sans formation dont le nombre, pour 1911, a été estimé par Lee [1986, p. 76] à 1,4 millions et par Kennedy [1987, p. 55] à 1, 6 millions. En 1911, le personnel de maison représentait 3,8 % de la population britannique et était supérieur à ce qu’il était en Allemagne (2,7 %), en France (2,4 %) et aux États-Unis (2 %) [Lee, 1986, p. 76].
- 8 Sur les problèmes méthodologiques liés aux estimations faites à partir des Census of Population, il (...)
- 9 Lorsque le taux de croissance pour la période 1881-1901 est supérieur à la moitié du taux de croiss (...)
- 10 Alors que dans tous les pays du continent européen, l’État a joué un rôle considérable dans le déve (...)
- 11 On notera une différence importante entre les estimations de Gourvish (cf. tableau 2) et celles, pl (...)
7La montée en puissance du groupe des professions libérales est une autre caractéristique importante de la période étudiée, leur nombre étant passé de 283 893 en 1861 à 730 740 en 1911. On ne peut se contenter de ces chiffres globaux, compte tenu du caractère très hétéroclite de ce groupe. Mais une analyse plus fine n’est pas sans poser de réels problèmes, la définition de cette catégorie ayant été modifiée au cours des recensements successifs8. Les chiffres reproduits dans le tableau 2 sont donc à manier avec prudence. Ils permettent au moins de constater un ralentissement certain de la croissance de l’emploi dans 11 sous-groupes sur 14 après 1881, sauf pour celui du clergé, celui des médecins/avocats et celui des artistes9. Ils soulignent également des différences considérables entre les taux de croissance des effectifs des différents sous-groupes. En effet, pendant que la croissance des membres du clergé, des médecins et des avocats s’est faite à un rythme allant de 31 % à 57 %, entre 1861 et 1901, d’autres groupes ont connu des taux de croissance supérieurs à 150 % : 235 % pour les dentistes, 467 % pour les acteurs, 378 % pour les auteurs, 181 % pour les architectes, 248 % pour les géomètres, et 151 % pour les ingénieurs des travaux publics. Signalons que la profession de dentiste est devenue une activité reconnue avec le Medical Act de 1858 et le Dentist Act de 1878 [Gourvish, 1988a, p. 21] et que la création de la Royal Academy of Dramatic Art en 1904 et de la Central School of Speech and Drama en 1906 [Gourvish, 1988a, p. 22] a sans doute contribué à ce que le métier d’acteur gagne ses titres de noblesse et poursuive une croissance soutenue même après 1881. La très forte augmentation des géomètres et des ingénieurs des travaux publics est, elle, liée au développement des chemins de fer, tout comme celle des comptables, même si, pour ce dernier groupe, les chiffres du tableau indiquent une baisse importante en 1901, dont une partie au moins est due à une modification de la définition de la catégorie. La construction des chemins de fer a, à partir de 1 840, totalement transformé la profession de géomètre qui a abandonné la mesure des terrains pour se tourner vers l’évaluation et l’arbitrage [Gourvish, 1988b, p. 71]. A la suite des scandales répétés lors de la construction des chemins de fer, celle-ci étant financée par des acteurs privés10, la législation sur les chemins de fer votée à partir du milieu des années 1840 a imposé aux compagnies de tenir des comptes détaillés et de les soumettre à des vérifications. La demande de comptables s’est alors fortement accrue et en juin 1860, il y avait autant de comptables que d’ingénieurs qui travaillaient pour les entreprises de chemins de fer [Gourvish, 1988b, p. 71]. Puis, pour éviter les fraudes, dans un pays où la législation commerciale était très libérale, la fonction d’audit, dans un cadre indépendant, est devenue absolument nécessaire. En 1880, le législateur a imposé aux banques de soumettre leurs comptes à une vérification annuelle. Une dizaine d’années plus tard environ, la loi sur les sociétés de 1900 a imposé la vérification annuelle des comptes à toutes les sociétés à responsabilité limitée, qu’elles soient ou non cotées en bourse. Pour Mathews et alii [1997, p. 409], ces obligations légales expliquent, en grande partie, la très forte augmentation du nombre des comptables sur la période 1882-1911. Selon ces auteurs, elle aurait dépassé, et de loin, celle des médecins, des juristes et des enseignants, en se faisant à un rythme annuel de 7 % à 9 %, alors que depuis les années 1 930 son taux de croissance oscille entre 3 % et 4 %11.
Tableau 2 – Professions libérales, 1861-1901
a Eglise établie seulement. b Barristers et solicitors non séparés en 1901. c Le chiffre de 1901 exclut les prothésistes. d Catégorie très large : inclut les universitaires, mais exclut les professeurs de musique. e Inclut les écrivains, les journalistes, les sténographes. g Peintres, graveurs et sculpteurs. f Acteurs et actrices. h Inclut les professeurs de musique. Joueurs d’orgue de barbarie exclus en 1901. i Ingénieurs des mines non distingués en 1861. j Le chiffre de 1901 n’inclut plus les book-keepers et les clerks. k Les retraités sont inclus dans toutes les catégories en 1861, puis exclus sauf pour le clergé, les médecins et les chirurgiens.
Source : Recensements de 1861, 1881 et 1901 (hommes et femmes en Angleterre et au pays de Galles). D’après Gourvish [1988a] p. 20.
2. Les facteurs explicatifs de la croissance de l’emploi dans les services
- 12 Coefficients de variation et d’asymétrie élevés pour cinq secteurs des services sur six.
8Compte tenu de la très forte croissance de l’emploi dans les services durant les périodes victorienne et édouardienne, il semble naturel d’envisager l’augmentation des emplois dans les différentes catégories de services comme étant, au moins pour partie, le reflet mécanique de la croissance de la population totale. Lee [1984] teste cette hypothèse, à l’aide d’une étude économétrique menée à partir de données relatives aux années de référence référence 1861, 1881 et 1911 pour les six catégories de services étudiées : transports, distribution, activités bancaires et commerciales, professions, services divers, emplois publics/défense. Ses résultats conduisent à la non existence d’une relation entre augmentation de l’emploi total et augmentation de l’emploi dans les services, sauf pour la distribution12.
9Le deuxième facteur explicatif auquel on peut songer, pour expliquer l’augmentation des services durant la période étudiée, est que celle-ci a été liée à l’augmentation du secteur manufacturier. C’est du reste le seul facteur envisagé par les historiens, lorsque ceux-ci n’ont pas totalement ignoré le rôle des services. Mathias [1969, p. 273], déjà cité, souligne que l’augmentation des transports dans le Lancashire fut fonction de l’augmentation de la demande pour l’industrie du coton. Certes, il est facile de trouver des exemples attestant des liens évidents, au Royaume-Uni, entre le développement du secteur manufacturier et celui des transports. Il n’est qu’à rappeler que, dès le dix-huitième siècle, l’amélioration de la Calder River avait été financée par les marchands de laine de Leeds et les propriétaires des mines de charbon de Wakefield qui souhaitaient garantir, pour leurs produits, un meilleur accès au port de Huit [Lee, 1986, p. 99]. De la même manière, la construction du Trent & Mersey Canal avait été financée par l’industriel Wedgewood pour faciliter le transport du charbon, de l’argile et le Duke de Bridgwater le canal permettant le transport du charbon de sa mine de Worsley à Manchester [Ville, 1994, p. 194]. Cela dit, si on prend l’exemple de la construction des chemins de fer en Ecosse ou en Cornouaille durant la période victorienne, il est clair qu’elle n’a rien à voir avec le développement industriel. On peut même se demander si le développement des chemins de fer en Grande-Bretagne, durant la seconde moitié du dix-neuvième siècle, n’est pas davantage lié aux besoins d’une population de plus en plus urbanisée plutôt qu’à ceux de l’industrie. En effet, le rail a mis longtemps à supplanter le bateau pour le transport des marchandises et l’acheminement du charbon jusqu’à Londres s’est essentiellement fait par voies maritime et fluviale jusqu’en 1855, même si des lignes de chemins de fer reliaient la capitale aux mines du Sud du Yorkshire et de l’Est des Midlands depuis la fin des années 1830 [Mitchell, 1964, p. 319].
10En fait, la relation faisant dépendre le développement des services de celui du secteur manufacturier ne paraît pas validée par les études empiriques. L’étude économétrique de Lee [1984] montre qu’il n’y a aucune relation significative entre le développement du secteur manufacturier et celui des transports, de la distribution et des activités bancaires. Pour les trois autres catégories de services (professions, services divers et emplois publics/défense), la relation est significative mais inverse. Certes, il serait totalement erroné de déduire de cette étude qu’il n’y a eu aucun lien entre le développement du secteur manufacturier et celui des services. Nous avons vu par exemple que le développement de la profession de comptable est liée au développement des entreprises. Il semble également aller de soi que la croissance industrielle ait poussé au développement de certaines activités financières. Mais à l’inverse, on peut également trouver des exemples montrant que certains services préexistaient avant l’industrialisation, le meilleur exemple étant sans doute l’activité bancaire et l’assurance. Il convient donc d’être très prudent dans l’interprétation des liens entre le secteur manufacturier et les services.
- 13 “Despite the Industrial Revolution, the most important element in Britain’s wealth structure during (...)
- 14 Citons Richard Crawshay (1739-1810), Sir Robert Peel (père du Premier Ministre, 1750-1830), ou Rich (...)
11Si certains services se sont développés pour répondre aux besoins de l’industrie, d’autres ont augmenté pour répondre à de nouvelles demandes liées à l’augmentation des revenus. Contrairement à une idée souvent répandue, les grandes fortunes au dix-neuvième siècle ne provenaient pas de l’industrie mais des activités de services. Les recherches de Rubinstein le conduisent à écrire : « En dépit de la révolution industrielle, l’élément le plus important de la structure de la richesse, durant le dix-neuvième siècle, mise à part la richesse de la terre, était les activités commerciales et la finance »13. Certes, il existait bien des millionnaires parmi les industriels14. Mais même dans les grands centres, tels que Manchester et Liverpool, ils étaient minoritaires. Les grandes fortunes se faisaient dans la Cité de Londres où, à côté de la dynastie des Rothschild, de celle des Baring, des Sasson et des Gibbse, pour n’en mentionner que quelques unes, apparurent de nouveaux noms tels que celui du courtier d’assurance Richard Thornton (1776-1865), du banquier James Morrison (1789-1857), qui laissa à sa mort entre 4 et 6 millions de livres et 100 000 acres de terre ; son fils aîné, lui aussi dans la finance, laissa près de 11 millions de livres à celui qui lui succéda [Rubinstein, 1977, p. 610-611]. Les activités commerciales et l’activité d’armateur pouvaient également rendre très riche.
12Si on s’intéresse maintenant aux revenus de la bourgeoisie victorienne, il apparaît que ceux-ci trouvaient également, et pour l’essentiel, leur origine à Londres [Rubinstein, 1977, p. 615]. Ainsi, même si la population de Londres était inférieure à celle des grands centres industriels, Londres était considérablement plus riche que l’ensemble des grandes villes de province réunies [Rubinstein, 1977, p. 618]. D’où l’existence de deux bourgeoisies, celle vivant à Londres, dont les revenus provenaient essentiellement des activités de services (banque, assurance, activités commerciales) et qui avait su établir des liens avec la vieille aristocratie terrienne, et celle localisée dans les villes de province, dont les revenus venaient de l’industrie et qui n’avait pas de lien avec l’aristocratie terrienne [Rubinstein, 1977, p. 620].
13L’accroissement de richesse a permis une forte augmentation des services aux personnes et des transports. Le développement des professions libérales a ensuite entraîné de nouvelles demandes pour les services (transports, distribution et activités de loisir). Les estimations de Feinstein montrent qu’en 1900, 21,2 % des dépenses de consommation allaient aux services (transports, personnel de maison, soins médicaux et loisirs). Les trois quarts de ces dépenses étaient le fait des titulaires de revenus les plus élevés (middle and upper earners) qui consacraient près de 30 % de leurs revenus à la consommation de services [Feinstein, 1991, p. 158]. On notera que l’augmentation des personnels de maison fut très importante et régulière durant les décennies 1850 à 1880. En prenant comme années de référence 1851 et 1891, leur nombre passa de 108 000 à 265 000 pour les hommes et de 870 000 à 1 551 000 pour les femmes [Lee, 1994, p. 124], Fléchissant au cours de la décennie suivante, l’augmentation reprit durant la période édouardienne. Et en 1911, il y avait 295 000 hommes et 1 403 000 femmes employés comme gens de maison. Ce n’est qu’à compter de cette date que leur nombre diminua inexorablement. Beaucoup de ces femmes venaient de zones rurales où elles avaient perdu leur emploi agricole. Elles allaient s’employer comme servantes dans les villes et surtout à Londres, c’est-à-dire là où la demande de personnel de maison était très forte. Car le personnel de maison coûtait cher.
14Les résultats de l’étude économétrique de Lee, pour les trois années de référence : 1861, 1881 et 1911, confirment que le revenu a joué un rôle déterminant dans l’augmentation de l’emploi dans les services, sauf pour les transports pour lesquels la variable explicative essentielle est la concentration de la population [Lee, 1984, p. 143-144].
15Nous pouvons donc conclure que le facteur explicatif le plus significatif pour rendre compte de la très forte augmentation de la demande de services et de l’emploi dans les services durant les périodes victorienne et édouardienne n’est pas la croissance du secteur manufacturier mais l’augmentation du revenu.
3. La répartition géographique des services et le changement structuel
- 15 Sauf indication contraire, toutes les données chiffrées concernant les trois grands types de région (...)
16Concernant le changement structurel à l’œuvre pendant la période étudiée, il est possible de repérer quelques grandes tendances en se reportant à l’étude de Lee [1981, p. 446-451] menée à partir d’une analyse factorielle et d’une analyse en coupes instantanées (cross-sectional analysis). Les résultats permettent de distinguer trois grands types de régions caractérisés par une structure d’emplois différente liée au changement structurel15.
17La première catégorie (1) regroupe la région de Durham, le Northumberland, le Glamorgan et Monmouth, la seconde (2) le Lancashire, le West Riding of Yorkshire et Teeyside, et la troisième (3) Londres et les comtés avoisinant (Home Counties).
18Le changement structurel dans le groupe (1) s’est caractérisé par le développement de l’industrie du charbon. Entre 1841 et 1911, les nouveaux emplois créés dans ce secteur ont atteint 35,5 % dans le Glamorgan et le Monmouth, 32,3 % dans la région de Durham, 23,4 % dans le Northumberland et 35 % dans la région du centre et du Fife. Les autres principales activités étaient les industries manufacturières lourdes. Dans la classification de Chernery et Syrquin [1975, p. 101 et seq.], ces régions se définissent comme des régions d’exploitation minière et de production de matières premières pour l’exportation (export-led mineral and raw material exploiting areas). Même si, dans chacune des régions de ce premier groupe 35 à 44 % des nouveaux emplois ont été créés dans les services, ces régions ont bénéficié de moins de services par habitant que le reste du pays, et cela tout au long de la période prise en compte dans cette étude. Les taux d’activité pour les femmes étaient très faibles.
19Dans le groupe (2), l’industrie dominante était le textile où 82 % des nouveaux emplois furent créés dans le Lancashire et le West Riding of Yorkshire. L’activité industrielle était plus diversifiée dans cette seconde catégorie que dans le groupe précédent. La répartition des nouveaux emplois créés dans le Lancashire s’est faite selon les pourcentages suivants : 21,9 % dans le textile, 5,5 % dans l’habillement, 5,5 % dans les industries mécaniques et 4,5 % dans la métallurgie. La population féminine trouvait de nombreux emplois dans le textile et l’habillement, si bien que les taux d’activité étaient beaucoup plus élevés que dans les régions du groupe précédent. Si les services ont participé à la création de nouveaux emplois, le ratio offre de services par habitant est toutefois resté en dessous de la moyenne nationale dans toutes les régions de ce deuxième groupe. Comme précédemment, ces régions trouvent toutes leur place dans la classification de Chernery et Syrquin, sous la rubrique manufacturing for export. Signalons que le terme export ne doit pas ici s’entendre dans le sens restrictif d’exportation vers l’étranger mais dans le sens d’exportation vers des régions en dehors de la zone de fabrication, même si les textiles et en particulier le coton étaient essentiellement destinés pour les marchés étrangers.
20Quant au groupe (3), il se différencie des deux autres pour au moins deux raisons. D’une part, il est formé de régions similaires du point de vue du développement économique, mais disséminées géographiquement. Par ailleurs, son développement structurel est très différent des deux groupes précédents. Les emplois se sont d’abord créés à Londres et dans le Middlesex, qui ont ensuite attiré de la main-d'œuvre des comtés voisins du Kent, du Surrey, de l’Essex et du Sussex dans les années 1840, puis de comtés encore plus périphériques. Puis, vers la fin de la période édouardienne, le Hampshire, le Berskshire, le Buchinghamshire, la région de Bedford et celle d’Oxford ont adopté le mode de développement de Londres et du Middlessex. Et c’est précisément à Londres et dans le Middlessex que la croissance des emplois a été la plus forte, sur la période 1841-1911, en atteignant 1 303 000 emplois (+302 %), contre 1 060 000 (+221 %) dans le Lancashire et 460 000 (+ 180 %) dans la région de Clyside [Baines, 1994, p. 60]. Les industries de produits de base (staple industries) considérées comme le fleuron de l’économie britannique y étaient très faiblement représentées. La croissance des emplois était au contraire due à celle des services et à celle d’un certain nombre d’industries de consommation (industrie du papier, édition, imprimerie, mobilier, industrie électrique). Dans la création totale des emplois dans les services qui, rappelons-le, a dépassé les 50 % en Grande-Bretagne de 1841 à 1911,20 % d’entre eux ont été créés à Londres et dans le Middlesex et 40 % dans les 12 comtés avoisinants. Les services où les créations d’emplois ont été les plus fortes étaient les transports, les professions, les services divers et les administrations publiques. Le ratio d’offre de service par habitant a été, dans cette région, bien supérieur à la moyenne nationale pendant toute la période. L’analyse factorielle de Lee montre de très faibles liens entre la croissance de ces services et celle de tous les autres secteurs de l’économie, sauf pour l’industrie du papier, l’édition, l’imprimerie, le mobilier, l’industrie électrique. On peut semble-t-il en déduire qu’à Londres et dans le Sud-Est de la Grande-Bretagne le développement des services ne s’est pas fait essentiellement en fonction de la croissance du secteur manufacturier. La demande pour les services était au contraire due, pour sa plus grande part, à l’augmentation des revenus réels à partir de 1870 et à la concentration de la richesse.
- 16 Elles concernent notamment l’utilisation de la lettre de change qui devint transférable et escompta (...)
21Au cœur de cette économie de services se trouvait Londres qui comme un aimant attirait autant de personnes, de richesse et de pouvoir en 1900 qu’elle l’avait fait en 1750 [Cain et al., 1993, p. 115]. Car le développement des activités de services n’était pas une chose nouvelle à Londres. Depuis la fin du dix-septième siècle et la révolution financière des années 1690, qui conduisit à la création de la Banque d’Angleterre en tant que société par actions (joint stock company) et à celle de la dette publique, des innovations financières majeures16, avaient contribué au développement d’autres activités de services, notamment les activités commerciales à partir du port de Londres qui bénéficia de la totalité des échanges avec l’Asie, grâce au monopole de l’East India Company. A côté des grandes compagnies, les marchands indépendants et les négociants armateurs jouèrent un rôle considérable, tout au long du dix-huitième siècle, dans le développement des activités commerciales et financières de Londres. Car ces agents ne se contentèrent pas de vendre des marchandises venues des colonies et d’acheter et de transporter les biens dont les planteurs avaient besoin pour leur exploitation. Ils jouèrent également le rôle de banquier, avant l’apparition des banques en tant que telles, en accordant des crédits à long terme à leurs clients et correspondants à l’étranger, parce qu’ils pouvaient également acheter à crédit auprès de leurs fournisseurs [Price, 1989, p. 278]. Ainsi, la Cité de Londres assura-t-elle progressivement le financement de la commercialisation des produits manufacturés et celui du commerce de réexportation. Ce rôle s’intensifia tout au long du dix-neuvième siècle, grâce à l’activité des banques d’affaires (merchant banks), qui se spécialisèrent dans l’acceptation des effets de commerce internationaux, ces derniers pouvant ensuite être escomptés par les maisons d’escompte. Comme les navires britanniques transportaient également une part importante du fret étranger, « cela signifiait que tous les services financiers et commerciaux associés au fret étaient vendus par la Cité : assurance, crédit, paiement des transactions commerciales » [Guillaume & Esposito, 1993, p. 120].
22Le rôle des investissements à l’étranger a ensuite été primordial pour faire de la Cité de Londres le centre d’une économie internationale de services [Cain et al., 1993, p. 189]. Les revenus tirés de ces investissements, s’ajoutant à la richesse terrienne, permirent le développement rapide de cette économie de services située à Londres et dans les comtés avoisinants. A partir de 1850, les changements dans la composition du commerce extérieur de la Grande-Bretagne donnent une bonne idée de la place grandissante prise par les services au détriment des industries de produits de base (voir tableau 3). A compter de cette date, les revenus tirés des invisibles prennent le pas sur ceux venant des exportations de produits manufacturés. Toutefois, en dépit de leur forte croissance, ils ne parviendront pas à financer le déficit commercial grandissant. Et à partir de 1875, l’excédent de la balance des paiements ne pourra être réalisé que grâce à la très forte progression des revenus provenant des investissements britanniques à l’étranger, l’exportation de capital à l’étranger étant particulièrement forte entre 1870 et 1914.
Tableau 3 – Les invisibles et le solde de la balance des paiements courants britannique, 1851-1913 (en millions de livres)
Balance |
1851-1875 |
1876-1900 |
1901-1913 |
Balance commerciale |
-51 |
-120 |
-153 |
Services aux entreprisesa |
+24 |
+35 |
+49 |
Transport maritime |
+35 |
+58 |
+87 |
Balance des invisiblesb |
+59 |
+93 |
+136 |
Revenus des investissements à l’étranger |
+26 |
+80 |
+151 |
Balance des paiementsc |
+34 |
+53 |
+134 |
a Services aux entreprises incluant l’assurance et nets de quelques dépenses, comme les dépenses du gouvernement à l’étranger. b Services aux entreprises et transport maritime. c Balance commerciale + balance des invisibles + revenus des investissements à l’étranger.
Source : Cain et al. [1993] p. 170.
- 17 “Indeed, London’s growth after 1850, like the growth of the south-east region itself, was a reasser (...)
23Au bout du compte, « La croissance de Londres après 1850, comme celle de la région du Sud-Est, était en fait une réaffirmation d’une domination ancienne plutôt qu’une nouvelle force de la vie britannique [...] Si entre 1750 et 1850, les flux économiques s’étaient dirigés vers les provinces industrielles, ils avaient reflué d’une manière décisive vers le centre traditionnel de la richesse et du pouvoir à l’époque victorienne et édouardienne »17. C’est du reste vers Londres, centre d’une économie de services, que convergèrent les flux migratoires internes à la Grande-Bretagne tout au long de la période étudiée, puisqu’entre 1841 et 1911, l’émigration nette vers Londres atteignit 1,25 millions de personnes, soit 40 % de plus que l’émigration nette vers l’ensemble des six plus grandes villes du Nord et des Midlands [Boyer & Hatton, 1997, p. 706].
4. Les rémunérations dans les services
24Jusqu’à une période très récente, il n’existait que deux séries sur les salaires nominaux (money wages) pour la période allant en gros de la seconde moitié du dix-neuvième siècle à la première guerre mondiale, celle de Wood publiée en 1909 et celle de Bowley publiée en 1937. Celle de Bowley, qui avait le grand avantage d’avoir été estimée une trentaine d’années après celle de Wood, fut considérée, par les chercheurs, comme la plus fiable pour la période 1880-1913 [Feinstein, 1990b, p. 595].
25Les travaux récents de Feinstein portant sur la période 1880-1913 ont abouti à la publication d’une nouvelle série qui a le grand mérite d’inclure des branches du secteur manufacturier qui n’étaient pas présentes dans les deux premières séries, comme l’acier et l’habillement, et surtout de couvrir quatre catégories de services : transports, distribution, personnel de maison, et enfin administrations publiques et forces armées. Les différences entre la série de Bowley et celle de Feinstein tiennent essentiellement à la grandeur du champ couvert.
26D’après les estimations de Feinstein [1990b, p. 608-609], les indices des rémunérations moyennes correspondant à des emplois à plein temps, construits pour la période allant de 1880 à 1913, il apparaît que toutes les catégories de services étudiées ont eu, jusqu’en 1889, des rémunérations moyennes supérieures à la moyenne de tous les secteurs confondus et supérieures à celles du secteur manufacturier. On notera que, pour la catégorie correspondant aux administrations publiques et forces armées, les indices sont très proches de ceux calculés pour le secteur manufacturier. A compter de 1890 et jusqu’en 1900, les indices montrent des changements importants. Ceux du secteur manufacturier et de la catégorie administrations publiques et forces armées sont toujours supérieurs à ceux des transports, des services domestiques et surtout de la distribution qui, en 1890, est devenue le secteur où les rémunérations étaient les moins élevées et cela pour une dizaine d’années. Cette évolution positive pour le secteur manufacturier est sans doute due aux premiers effets de la syndicalisation. En revanche, à partir de 1900 et jusqu’en 1913, il est clair que les différentes catégories de services améliorent nettement leur position relative. On soulignera l’augmentation importante des rémunérations des personnels de maison que l’on peut attribuer à une forte demande, alors que l’offre se raréfiait.
27Ainsi, d’après l’étude de Feinstein, qui ne prend en compte ni les services financiers, ni les professions libérales, ni les salariés, il serait erroné de penser que, durant les périodes victorienne et édouardienne, les activités de services étaient très mal rémunérées et/ou beaucoup plus mal rémunérées que celles du secteur manufacturier, même si des différences existaient.
5. La productivité du travail dans les services
- 18 Toute estimation de productivité met en rapport le volume de production réalisé avec une quantité d (...)
- 19 Ces indices représentent la productivité apparente moyenne du facteur travail qui se calcule en fai (...)
- 20 La première source statistique vient de Feinstein [1972], la seconde de Lewis [1978].
- 21 La productivité du capital correspond à la productivité apparente moyenne du facteur capital. Elle (...)
- 22 Elle se calcule en rapportant le volume de la production à l’ensemble des facteurs utilisés. Elle d (...)
28La productivité18 est une chose difficile à estimer, surtout quand elle doit être calculée à partir de données historiques sur les services. Nous nous réfèrerons essentiellement à l’étude de Gemmell et Wardley [1990]. Ces deux auteurs mènent une comparaison sur l’évolution de la productivité, durant la seconde moitié du dix-neuvième siècle, dans le secteur manufacturier et dans les transports et communications (T&C), la distribution et les activités commerciales (commerce) regroupant l’assurance, la banque et la finance, la restauration, les emplois de maison et les services divers (miscellaneous services). Les autres catégories de services ne sont pas prises en compte, les données statistiques étant trop peu fiables. Les données sont présentées sous forme d’indice, la productivité du secteur manufacturier étant égale à l’indice 100 pour toutes les années de référence. Les indices pour la productivité du facteur travail19 ont été calculés à partir de deux séries statistiques différentes20. L’étude donne également des estimations pour la productivité du capital21 et la productivité totale des facteurs22. Mais les auteurs insistent sur la nécessité de considérer les données sur la productivité du capital avec la plus grande précaution, en raison de la difficulté à estimer le stock de capital.
29Les chiffres reproduits dans le tableau 4 montrent que la productivité du travail a été beaucoup plus importante dans les services étudiés (TC, distribution et activités commerciales) que dans le secteur manufacturier pour les années de référence 1856, 1873 et 1914, et cela quelle que soit la source statistique utilisée. On constate également une diminution de la productivité du travail pour toutes les catégories de service étudiées sur l’ensemble de la période. Signalons que ce résultat est tout à fait conforme à celui de Clark [1937, p. 238-239], qui soulignait que l’industrie en Grande-Bretagne était une des activités les moins productives en 1911, ce qui lui paraissait étrange.
Tableau 4 – Indices de productivité en 1856, 1873 et 1913
Secteur |
Productivité du travaila |
Productivité du capital |
Productivité totale des facteursb |
|
1856 |
||||
Secteur manufacturier |
100 |
100 |
100 |
|
T & C |
232/288 |
20 |
86[65] |
|
Distribution |
312/297 |
|||
Activités commerciales |
167 |
111 |
141[142] |
|
1873 |
||||
Secteur manufacturier |
100 |
100 |
100 |
|
T & C |
185/396 |
20 |
73[77] |
|
Distribution |
264/233 |
|||
Activités commerciales |
141 |
135 |
138[150] |
|
1914 |
||||
Secteur manufacturier |
100 |
100 |
100 |
|
T & C |
162/189 |
31 |
80[86] |
|
Distribution |
159/144 |
|||
Activités commerciales |
115 |
193 |
144[162] |
a La première valeur donnée est estimée à partir des données de Feinstein [1972], la seconde à partir des données de Lewis [1978], voir note 15.b La première valeur est donnée en utilisant, pour une année donnée, les mêmes parts de facteurs pour tous les secteurs. En revanche, les valeurs entre crochets sont estimées à partir de données pondérées pour les différents secteurs en fonction de taux de croissance de la productivité, voir Feinstein et al. [1981].
Source : d’après Gemmel et al. [1990] p. 306.
30Si on s’intéresse maintenant au taux de croissance de la productivité (tableau 5), et en considérant les deux sous-périodes 1856-1873 et 1873-1913, on constate que l’augmentation de la productivité du travail s’est faite à un rythme moins rapide dans les services étudiés que dans le secteur manufacturier. En revanche, si on considère les deux sous-périodes 1873-1899 et 1899-1913, l’année 1899 se caractérisant par un retournement du cycle économique et une forte baisse du taux de croissance du PIB, il s’avère que le très fort ralentissement de la croissance de la productivité du travail qui a eu lieu dans le secteur manufacturier n’a pas eu lieu dans les services.
Tableau 5 – Taux de croissance de la productivité, 1856-1913
Secteur |
Productivité du travaila |
Productivité du capital |
Productivité totale des facteurs |
|
1856-1873 |
||||
Secteur manufacturier |
1,55 |
-0,58 |
0,86 |
|
T & C |
0,96 |
-0,25 |
0,43 |
|
Distribution |
0,6/0,2 |
1,10 |
0,80 |
|
Activités commerciales |
0,34 |
0,85 |
0,56 |
|
Économie tout entière |
1,25 |
0,06 |
0,79 |
|
1873-1899 |
||||
Secteur manufacturier |
1,42 |
-0,20 |
0,91 |
|
T & C |
0,02 |
0,65 |
0,35 |
|
Distribution |
-0,12/0,05 |
|||
Activités commerciales |
0,84 |
0,19 |
0,58 |
|
Économie tout entière |
1,20 |
0,14 |
0,70 |
|
1873-1913 |
||||
Secteur manufacturier |
1,22 |
-0,46 |
0,66 |
|
T & C |
0,58 |
0,69 |
0,63 |
|
Distribution |
-0,10/-0,20 |
0,4 |
0,10 |
|
Activités commerciales |
0,73 |
0,31 |
0,55 |
|
Économie tout entière |
0,94 |
-0,14 |
0,48 |
|
1899-1913 |
||||
Secteur manufacturier |
0,85 |
-1,20 |
0,18 |
|
T & C |
1,44 |
0,76 |
1,16 |
|
Distribution |
-0,11/-0,10 |
|||
Activités commerciales |
0,51 |
0,53 |
0,50 |
|
Économie tout entière |
0,46 |
-0,55 |
-0,04 |
a La première valeur donnée est estimée à partir des données de Feinstein [1972], la seconde à partir des données de Lewis [1978], voir note 15.
Source : d’après Gemmel et al. [1990] p. 308.
31Le taux de croissance de la productivité totale des facteurs a fortement chuté dans le secteur manufacturier après 1899, puisqu’il est passé de 0,91 % (1873-1899) à 0,18 % (1899-1913). En revanche, il a fortement augmenté dans le secteur des transports et communications en passant de 0,35 % (1873-1899) à 1,16 % (1899-1913).
- 23 Les services retenus sont transports et communications, distribution, finance, services aux personn (...)
32On peut en conclure que sur la période 1856-1913, les transports et communications, la distribution et les activités commerciales ont largement contribué à la croissance de l’économie britannique. La productivité du travail y a été supérieure à celle du secteur manufacturier, mais sa croissance s’est ralentie, alors que celle du secteur manufacturier augmentait. Ce résultat est confirmé par une étude très récente [Broadberry, 1998]. Dans une analyse sectorielle comparant l’évolution de la productivité du travail au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Allemagne sur la période 1870-199023, cet auteur montre que le Royaume-Uni bénéficiait, en 1870, d’une avance en terme de productivité du travail (productivity lead) dans la plupart des services, mais que celle-ci s’est progressivement réduite à partir de cette date, si bien qu’en 1 990 ces secteurs se caractérisaient par une insuffisance importante de la productivité (productivity shortfall) [Broadberry, 1998, p. 379]. Il montre par ailleurs que si les États-Unis et l’Allemagne sont parvenus à rattraper et dépasser le Royaume-Uni, ce n’est pas, contrairement à une idée largement répandue, grâce à une augmentation de la productivité du travail dans leurs secteurs manufacturiers respectifs, mais grâce à une amélioration de la productivité du travail dans les services et en transférant des ressources de l’agriculture vers les autres secteurs de l’économie.
33On se doit d’être extrêmement prudent quand on s’intéresse au changement structurel durant notre période d’étude. Il semble bien que le transfert de population de l’agriculture vers d’autres secteurs se soit fait autant, sinon plus, vers les services que vers le secteur manufacturier. Par ailleurs, la très forte proportion du personnel de maison en 1911 qui, rappelons-le, était supérieure à ce qu’elle était en Allemagne, en France et aux États-Unis, traduit une certaine incapacité de l’économie britannique à transférer des ressources des secteurs à faible productivité vers des secteurs à plus forte productivité, ce qui a sans aucun doute limité le taux de croissance de la productivité globale. Certains auteurs y voient le signe d’un changement structurel très lent et de l’absence d’opportunités dans le reste de l’économie. Kennedy [1987, p. 54] souligne que si les femmes, qui représentaient 80,1 % du personnel de maison en 1911, ont réussi à occuper d’autres emplois pendant la première guerre mondiale, c’est bien qu’il n’existait pas d’autres possibilités avant la guerre. Il reprend l’argument de Hunt [1973, p. 135 et 140] pour qui la croissance de l’emploi dans les services domestiques est en fait le signe d’un sous-emploi. Cette interprétation nous paraît toutefois pouvoir être discutée dans la mesure où la tendance de la rémunération moyenne dans les services domestiques fut relativement élevée au cours de notre période d’étude.
34Au bout du compte, la distribution de la population active de la Grande-Bretagne connut des changements importants durant les périodes victorienne et édouardienne que l’on ne retrouve pas, à la même époque, dans les autres pays européens, ni aux États-Unis. A partir de la seconde moitié du dix-neuvième siècle, la population occupée dans l’agriculture chuta fortement, celle occupée dans le secteur manufacturier resta stable pendant que celle occupée dans les services augmenta. Du côté de la demande, l’urbanisation et l’augmentation des revenus jouèrent un rôle moteur dans la croissance des services. Ceux-ci se concentrèrent dans le Sud-Est de l’Angleterre et tout particulièrement à Londres. La contribution des activités de service au développement économique de la Grande-Bretagne fut si importante qu’au moment où la Première Guerre mondiale éclata l’économie britannique était déjà une économie arrivée à maturité et tertiarisée.
Bibliographie
Références bibliographiques
Aldcroft, Derek H. & Ville, Simon P. (eds), 1994, The European Economy, 1750-1914, Manchester, Manchester University Press.
Allen, Robert, 1994, “Agriculture during the Industrial Revolution”, in Floud Roderick & McCloskey D.N. (eds), The Economic History of Britain Since 1700, vol. 1, 2e éd.., Cambridge, Cambridge University Press, p. 96-122.
Baines, Dudley, 1994, “Population, Migration and Regional Development, 1870-1939, in Floud Roderick & McCloskey Donald (eds), The Economic History of Britain since 1700, vol. 2: 1860-1939, 2e éd., Cambridge, Cambridge University Press, p. 29-61.
Baumol, William, 1967, “Macroeconomics of Unbalanced Growth”, American Economic Review, 37, p. 415-426.
Boyer, George R. & Hatton, Timothy J., 1997, “Migration and Labour Market Integration in Late Nineteenth Century England and Wales”, Economic History Review, L, 4, p. 697-734.
Broadberry, Stephen N., 1997, “Forging Ahead, Falling Behind, and Catching-Up: A Sectoral Analysis of Anglo-American Productivity Differences, 1870-1990”, Research in Economic History, vol. 17, p. 1-37.
Broadberry, Stephen N., 1998, “How Did the United States and Germany Overtake Britain? A Sectoral Analysis of Comparative Productivity Levels, 1870-1990”, The Journal of Economic History, vol. 58, no 2, juin, p. 375-407.
Cain, P.J. & Hopkins, A.G., 1993, British Imperialism: Innovation and Expansion 1688-1914, Londres, Longman.
Chenery, H.B. & Syrquin, M., 1959, Patterns of Development 1950-1970, Oxford, Oxford University Press.
Clark, Colin, 1937, National Income and Outlay, Londres, Macmillan.
Deane, P. & Cole, W.A., 1962, British Economic Growth, 1688-1959, 2e éd. 1967, Cambridge, Cambridge University Press.
Feinstein, Charles H., 1972, National Income, Expenditure and Output of the United Kingdom, 1855-1964, Cambridge, Cambridge University Press.
Feinstein, Charles H., 1990a, “What Really Happened to Real Wages? Trends in Wages, Prices, and Productivity in the United Kingdom, 1880-1913”, Economic History Review, XLIII, 3, p. 329-355.
Feinstein, Charles H., 1990b, “New Estimates of Average Earnings in the United Kingdom, 1880-1913”, Economic History Review, XLIII, 4, p. 595-632.
Feinstein, Charles H, 1991, “A New Look at the Cost of Living 1870-1914”, in Foreman-Peck J.S. (ed.), New Perspectives on the Late Victorian Economy: Essays in Quantitative Economic Elistory 1860-1914, Cambridge, Cambridge University Press.
Fisher, Frederick Jack, 1990, London and the English Economy, 1500-1700, Londres, The Hambledon Press.
Floud, Roderick & McCloskey, Donald (eds), 1994, The Economic History of Britain since 1700, vol. 2: 1860-1939, 2e éd., Cambridge, Cambridge University Press.
Freeman, Michael J. & Aldcroft, Derek. B. (eds), 1988, Transport in Victorian Britain, Manchester, Manchester University Press.
Gemmell, Norman, 1986, Structural Change and Economic Development: The Role of the Service Sector, New York, St Martin Press.
Gemmell, Norman & Wardley, Peter, 1990, “The Contribution of Services to British Economic Growth, 1856-1913”, Explorations in Economic History, 27, p. 299-321.
Gourvish, T.R., 1988a, “The Rise of the Professions”, in Gourvish T.R. & O’Day Alan (eds), Later Victorian Britain, 1867-1900, Londres, Macmillan, p. 13-36.
Gourvish, T.R., 1988b, “Railways 1830-70: the Formative Years”, in Freeman Michael J. & Aldcroft Derek H., Transport in Victorian Britain, Manchester, Manchester University Press, p. 57-91.
Guillaume, André & Esposito, 1993, Marie-Claude, Londres : Histoire d’une place financière, Paris, Presses Universitaires de France.
Hartwell, R. M., 1973, “The Service Revolution: The Growth of Services in Modem Economy”, in Carlo M. Cipolla (ed.), The Fontana Economic History of Europe, vol. 3, The Industrial Revolution, Londres, Fontana Collins, p. 359-396.
Hunt, E.H., 1973, Regional Wage Variations in Britain 1850-1914, Oxford, Oxford University Press.
Imlah, Albert H., 1958, Economic Elements in the Pax Britannica, Cambridge (Massachussets), Harvard University Press.
Kaldor, Nicholas, 1966, Causes of Slow Rate of Economic Growth of the United Kingdom, Cambridge, Cambridge University Press.
Kennedy, William P., 1987, Industrial Structure, Capital Markets and the Origins of British Economic Decline, Cambridge, Cambridge University Press.
Lee, Clive H., 1971, Regional Economic Growth in the United Kingdom since the 1880s, Londres, McGraw Hill.
Lee, Clive H., 1981, “Regional Growth and Structural Change in Victorian Britain”, Economic History Review, vol. 34, no 3, août 1981, p. 438-452.
Lee, Clive H., 1984, “The Service Sector, Regional Specialization, and Economic Growth in the Victorian Economy”, Journal of Historical Geography, 10, 2, p. 139-155.
Lee, Clive H., 1986, The British Economy since 1700: A Macroeconomic Perspective, Cambridge, Cambridge University Press.
Lee, Clive H., 1994, “The Service Industries”, in Floud Roderick & McCloskey Donald (eds), The Economic History of Britain since 1700, vol. 2: 1860-1939, 2e éd., Cambridge, Cambridge University Press, p. 117-144.
Lewis, W.A., 1978, Growth and Fluctuations, 1870-1913, Londres, Allen and Unwin.
MacKinnon, Mary, 1994, “Living Standards, 1870-1914”, in Floud Roderick & McCloskey Donald (eds), The Economic History of Britain since 1700, vol. 2: 1860-1939, 2e éd., Cambridge, Cambridge University Press, p. 265-290.
Mathews, R.C.O., Feinstein, C.H. & Odling-Smee, J.C., 1982, British Economic Growth, 1856-1973, Stanford, Stanford University Press.
Mathews, Derek, Anderson, Malcom & Edwards, John R., 1997, “The Rise of the Professional Accountant in British Management”, Economic History Review, L, 3, p. 407-429.
Mathias, Peter, 1969, The First Industrial Nation: An Economic History of Britain, 1700-1914, Londres, Methuen.
Mitchell, Brian R., 1964, “The Corning of the Railway and United Kingdom Economic Growth”, Journal of Economic History, vol. XXIV, no 3, septembre, p. 315-336.
Mitchell, Brian R. & Deane, Phyllis, 1971, Abstract of British Historical Statistics, Cambridge, Cambridge University Press.
O’Brien, Patrick & Keyder, Caglar, Economic Growth in Britain and France, 1780-1914, Londres, Allen & Unwin, 1978.
Perkin, Harold, 1996, The Third Revolution: Professional Elites in the Modem World, Londres, Routledge.
Price, Jacob M., 1989, “What Did Merchants Do? Reflections on British Overseas Trade, 1660-1790”, The Journal of Economic History, vol. XLIX, no 2, juin, p. 267-284.
Rubinstein, W.D., 1977, “The Victorian Middle Classes: Wealth, Occupation, and Geography”, Economic History Review, vol. 30, no 4, p. 602-623.
Rubinstein, W. D., 1981, Men of Property: The Very Wealthy in Britain since the Industrial Revolution, Londres, Croom Helm.
Rubinstein, W. D., 1993, Capitalism, Culture, and Decline in Britain, 1750-1990, Londres, Routledge.
Smith, Adam, 1776, An Inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations, Indianapolis, Liberty Fund, 1981.
Thompson, F.M.L., 1988, The Rise of Respectable Society: A Social History of Victorian Britain, 1830-1900, Londres, Fontana.
Ville, Simon P., 1994, “Transport and Communications”, in Aldcroft Derek H. & Ville Simon P. (eds), 1994, The European Economy, 1750-1914, Manchester, Manchester University Press, p. 184-215.
Notes
1 Dans la première édition de A New Economic History of Britain since 1700 de Roderick Floud & Donald McCloskey (eds), parue en 1981, ouvrage qui fait autorité en la matière et remplace la célèbre Economic History of Modern Britain de J.H. Clapham, il n’y avait aucun article sur les services. Notons l’article de Clive Lee, intitulé The Service Industries”, dans la seconde édition de cet ouvrage parue en 1994.
2 “One cannot set out to increase the national income or expand the economy by increasing the number of clerks and lawyers and dock workers, even though as a result of industrial expansion these groups may rise and profit more than manufacturing groups” [Mathias, 1969, p. 273].
3 Rappelons la distinction établie par A. Smith entre le travail productif, créateur de richesse, et le travail improductif du serviteur [Smith, 1776, II.iii.1], Tous les économistes de l’école classique ont défendu la même position.
4 Ce n’est que très récemment, avec l’apparition du concept d’économie post-industrielle, que les économistes ont manifesté un intérêt certain pour les services.
5 La reine Victoria règna de 1837 à 1901. Son fils Edouard lui succéda sous le nom d’Edouard VII (1901-1910).
6 “His services generally perish in the very instant of their performance, and seldom leave any trace or value behind them....” [Smith, 1776, II.iii.1].
7 Contrairement à l’idée longtemps admise, selon laquelle l’agriculture aurait vu ses effectifs fondre tout au long de la révolution industrielle, le nombre de personnes employées dans l’agriculture aurait augmenté en Grande-Bretagne pendant toute la première moitié du dix-neuvième siècle. Selon Deane et Cole, il serait passé de 1,7 millions en 1801 à 2,1 millions en 1851, même si ces deux auteurs pensent que leur estimation pour 1801, faite à partir des chiffres du recensement, est loin d’être fiable. Les estimations les plus récentes, à partir de méthodes de calcul indirectes, confirment l’analyse de Deane et Cole. Voir Allen [1994, p. 105-108].
8 Sur les problèmes méthodologiques liés aux estimations faites à partir des Census of Population, il paraît utile de se reporter aux références bibliographiques données par T.R. Gourvish [1988a] dans les notes 9, 10 et 11 de son article.
9 Lorsque le taux de croissance pour la période 1881-1901 est supérieur à la moitié du taux de croissance pour la période 1861-1901, on peut conclure à une accélération de la croissance. A contrario, lorsque le taux de croissance pour la période 1881-1901 est inférieur à la moitié du taux de croissance pour la période 1861-1901, on peut conclure à une décélération de la croissance.
10 Alors que dans tous les pays du continent européen, l’État a joué un rôle considérable dans le développement et le financement des différents moyens de transport, il a joué un rôle minimal en Grande-Bretagne, au moins jusqu’à la deuxième partie du dix-neuvième siècle. Dans ce pays, la construction de canaux, de routes et des chemins de fer a été laissée à l’initiative privée.
11 On notera une différence importante entre les estimations de Gourvish (cf. tableau 2) et celles, plus récentes, de Mathews et alii. Les chiffres représentatifs du nombre de comptables en Grande-Bretagne, avancés par ces auteurs sont 1486 (1882), 2707 (1891), 5154 (1901), 9048 (1911) [Mathews et alii, 1997, p. 409].
12 Coefficients de variation et d’asymétrie élevés pour cinq secteurs des services sur six.
13 “Despite the Industrial Revolution, the most important element in Britain’s wealth structure during the nineteenth century, apart from landed wealth, was commerce and finance” [Rubinstein, 1977, p. 602].
14 Citons Richard Crawshay (1739-1810), Sir Robert Peel (père du Premier Ministre, 1750-1830), ou Richard Arkwright (1755-1843) [Rubinstein, 1977, p. 606].
15 Sauf indication contraire, toutes les données chiffrées concernant les trois grands types de régions sont tirées de Lee [1981, p. 446-451].
16 Elles concernent notamment l’utilisation de la lettre de change qui devint transférable et escomptable, c’est-à-dire un instrument financier négociable, le développement de l’assurance maritime et de l’assurance contre l’incendie, le développement du marché boursier.
17 “Indeed, London’s growth after 1850, like the growth of the south-east region itself, was a reassertion of an ancient dominance rather than a novel force in British life [...] If, between 1750 and 1850, the economic tide had run in favour of the industrial provinces it swung decisively back again, to the traditional centre of wealth and power, in the Victorian and Edwardian epoch” [Cain et al., 1993, p. 116].
18 Toute estimation de productivité met en rapport le volume de production réalisé avec une quantité de facteur de production utilisée.
19 Ces indices représentent la productivité apparente moyenne du facteur travail qui se calcule en faisant le rapport entre la production en volume et la quantité de travail. Elle représente l’efficacité du facteur travail dans la combinaison productive. Il est important de souligner que l’augmentation de la productivité du facteur travail peut être due soit à une augmentation de l’efficacité du travail soit à une utilisation plus importante ou plus efficace de l’autre facteur de production, c’est-à-dire le capital. C’est ce qui explique l’utilisation de l’adjectif “apparente”. Ainsi, on constate très souvent que l’augmentation de la productivité du facteur travail est en fait le résultat d’une augmentation du ratio capital par tête.
20 La première source statistique vient de Feinstein [1972], la seconde de Lewis [1978].
21 La productivité du capital correspond à la productivité apparente moyenne du facteur capital. Elle se calcule en faisant le rapport entre la production et le capital exprimés en volume. Comme dans le cas de la productivité du travail, une augmentation de la productivité du capital peut être due soit à une plus grande efficacité de ce facteur, soit à une utilisation plus importante ou plus efficace de l’autre facteur.
22 Elle se calcule en rapportant le volume de la production à l’ensemble des facteurs utilisés. Elle donne une idée de l’efficacité de la combinaison productive. Son calcul soulève de nombreux problèmes.
23 Les services retenus sont transports et communications, distribution, finance, services aux personnes, services aux entreprises, administrations publiques.
Table des illustrations
Titre | Tableau 1 – Emplois par secteur d’activité, 1861-1911 |
---|---|
Légende | Source : d’après Lee [1984] p. 140. |
URL | http://books.openedition.org/psn/docannexe/image/5443/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 204k |
Titre | Tableau 2 – Professions libérales, 1861-1901 |
Légende | a Eglise établie seulement. b Barristers et solicitors non séparés en 1901. c Le chiffre de 1901 exclut les prothésistes. d Catégorie très large : inclut les universitaires, mais exclut les professeurs de musique. e Inclut les écrivains, les journalistes, les sténographes. g Peintres, graveurs et sculpteurs. f Acteurs et actrices. h Inclut les professeurs de musique. Joueurs d’orgue de barbarie exclus en 1901. i Ingénieurs des mines non distingués en 1861. j Le chiffre de 1901 n’inclut plus les book-keepers et les clerks. k Les retraités sont inclus dans toutes les catégories en 1861, puis exclus sauf pour le clergé, les médecins et les chirurgiens.Source : Recensements de 1861, 1881 et 1901 (hommes et femmes en Angleterre et au pays de Galles). D’après Gourvish [1988a] p. 20. |
URL | http://books.openedition.org/psn/docannexe/image/5443/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 212k |
Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.