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Nouvelles énergies pour la ville du futur

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Eva Boxenbaum
, 
Brice Laurent
, 
Annalivia Lacoste

Partie II - Réorganiser la production et la distribution d’énergie ?

Introduction

Eva Boxenbaum et Brice Laurent

Texte intégral

  • 13 Hughes, T. P. (1993). Networks of power: electrification in Western society, 1880-1930. Johns Hopki (...)
  • 14 Voir la thèse en cours de Guillaume Yon : Formuler l’intérêt général. La construction de des tarifs (...)

1L’organisation de la production et de la distribution d’énergie est une tâche complexe, dont les principes sont remis en question par l’objectif de transition vers les énergies renouvelables. De nombreux travaux ont montré que l’innovation technologique dans le secteur de l’énergie met en forme des marchés et des modes d’organisation politique. La construction du réseau électrique américain suite aux travaux de Thomas Edison est devenu un exemple classique de ces processus13. Plus récemment, le développement en France de la tarification de l’électricité au coût marginal met en forme un système technique inséparable d’un modèle économique et d’une définition de l’intérêt général associant libéralisme économique et intervention publique14.

  • 15 Cf. Jasanoff, S. (2004). States of Knowledge. The Coproduction of Science and the Social Order. Lon (...)

2Ces deux exemples mettent en évidence des processus de « coproduction » des systèmes techniques et des ordres économiques et politiques15. Autrement dit, il n’est pas possible d’examiner la construction du système technique permettant de produire et de distribuer l’énergie sans en même temps s’interroger sur l’organisation des marchés de l’énergie et sur les modalités de la décision collective. Ce faisant, ce sont les comportements individuels eux-mêmes (ceux du consommateur ou du vendeur d’énergie, ceux du citoyen exerçant un contrôle démocratique sur les choix techniques) qui sont en jeu.

3Le développement des énergies renouvelables conduit à rendre visible les processus de coproduction, du fait des interrogations nombreuses sur la mise en place des systèmes de production, sur l’évolution des modes de consommation, et sur les décisions politiques à entreprendre. Les trois chapitres de cette partie s’attachent à identifier des dynamiques de coproduction directement liées à la transition vers les énergies renouvelables. Les trois auteurs sont d’origines différentes. Peter Karnøe est professeur à Université d’Aalborg à Copenhague et spécialiste de l’organisation des marchés de l’énergie au Danemark. Jessica Crivelli, chercheur en sciences politiques à l’Université de Zurich, s’intéresse à l’organisation des marchés de l’énergie à travers des frontières nationales. Marc Jedliczka est directeur de l’association Hespul qui s’est investie dans le développement des nouvelles énergies.

4Peter Karnøe commente l’exemple de la politique énergétique danoise, telle qu’elle a évolué dans les 40 dernières années, afin de mettre en évidence le lien organique entre l’organisation matérielle du réseau national de distribution d’énergie et la définition d’un consensus politique sur les choix énergétiques du pays. Le choix explicite du développement des énergies renouvelables (au détriment, notamment, du nucléaire) conduit alors à organiser le réseau de manière décentralisé, et à faire de chaque citoyen un acheteur et/ou producteur potentiel d’énergie.

5En analysant dans le détail un projet d’usine hydroélectrique à la frontière entre l’Argentine et le Brésil, Jessica Crivelli montre que les incertitudes techniques et politiques du projet (qui sont d’autant plus manifestes que la durée du projet dépasse celle des gouvernements) imposent aux acteurs concernés de négocier simultanément la matérialité technique de la production d’énergie et les modalités de la coopération internationale.

6Le dernier texte de cette section est un entretien avec Marc Jedliczka, directeur de l’association Hespul spécialisée dans l’efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables. Marc Jedliczka s’appuie sur l’expérience de son association ainsi que sur des initiatives voisines pour proposer un modèle alternatif de production, de distribution et de consommation d’énergie, fondé notamment sur la sortie du nucléaire.

7Les trois textes adoptent des perspectives différentes sur le problème épineux de l’introduction à grande échelle des nouvelles énergies dans la ville du futur. L’entretien avec Marc Jedliczka propose explicitement un modèle alternatif de production et de consommation d’énergie. Les deux autres textes de la section, ceux de Peter Karnøe et Jessica Crivelli, n’ont pas de visées normatives. Ils permettent néanmoins de mettre en évidence l’importance des choix de développement futur dans l’organisation technique, politique et économique. Ils exposent notamment quelques conséquences, positives comme négatives, qui découlent des choix faits au nord de l’Europe et en Amérique du Sud pour réorganiser le système de distribution d’énergie. L’ensemble des textes de cette partie nous invite à réfléchir sur les multiples enjeux auxquels une éventuelle réorganisation de la distribution de l’énergie dans la ville du futur devra faire face.

Notes

13 Hughes, T. P. (1993). Networks of power: electrification in Western society, 1880-1930. Johns Hopkins University Press.

14 Voir la thèse en cours de Guillaume Yon : Formuler l’intérêt général. La construction de des tarifs d’Électricité de France, CSI, Mines ParisTech.

15 Cf. Jasanoff, S. (2004). States of Knowledge. The Coproduction of Science and the Social Order. London. Routledge.

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