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Biodiversité au Sud

 | 
Jean-François Agnèse
, 
Olivier Dangles
, 
Estienne Rodary

La biodiversité pour se nourrir

Les mangroves, un nouvel Eldorado ?

Résumé

Marais mouvants des zones intertropicales connus pour leurs forêts de palétuviers, les mangroves sont désormais des objets de spéculation et de communication.

Texte intégral

Mangrove, Parc national des Galápagos, Équateur.

© naturexpose.com/Olivier Dangles et François Nowicki.

1Longtemps perçues par les Occidentaux comme des fanges boueuses, stériles et infestées de moustiques, les mangroves sont désormais considérées comme des écosystèmes riches et fragiles ; de plus en plus de sites sont ainsi protégés dans le cadre de conventions internationales, comme celle de Ramsar sur les zones humides.

2Malgré ces avancées politiques, entre 1970 et 2000, un tiers de la surface des mangroves disparaît, en raison principalement de l’explosion du nombre de fermes à crevettes. Les chercheurs prennent alors conscience de la multitude des rôles ou services remplis par ces écosystèmes atypiques : ils atténuent l’érosion des côtes, protègent des typhons, purifient les eaux et constituent par ailleurs des zones de reproduction pour les poissons.

3Les zones de mangrove sont en outre habitées par des populations qui vivent de leurs ressources, y pêchent, utilisent le bois de chauffe, extraient les tanins, vendent le sel, cueillent des huîtres ou font pousser du riz. Des civilisations entières y ont prospéré, reflet du potentiel de ces milieux certes mouvants, mais riches en ressources.

4Or, ces usages traditionnels sont aujourd’hui menacés, non pas par le changement climatique mais par les réponses qu’y apporte la société. Sous couvert de compensation, de séquestration du carbone et de reforestation, des États concèdent au secteur privé des mangroves qui jusque-là étaient des biens communs. Des entreprises y plantent une seule espèce de palétuvier, celle qui pousse le plus vite, afin de pouvoir communiquer rapidement sur leurs actions et redorer leur image dans les médias.

5Ainsi, au Sénégal, de vastes campagnes de plantation du palétuvier Rhizophora, conduites par une ONG sénégalaise et financées par des organismes internationaux publics et privés, ont été lancées à partir de 2006 en Casamance et de 2008 dans le Delta du Saloum. Les résultats sont mitigés, tant sur les superficies effectivement reboisées que sur la capacité de ces milieux à séquestrer le carbone et à restaurer la biodiversité. Sans compter les effets pervers sur les femmes, qui ne peuvent plus récolter les huîtres sur les racines des palétuviers ou les coquillages sur les hauts fonds replantés.

••• Des recherches récentes montrent l’évolution de la perception des mangroves à travers les âges et pointent les dérives actuelles •••

Chantier d’huîtres, Casamance, Sénégal.

© ird /M.-C. Cormier-Salem

6Ces actions de reboisement se font ainsi au détriment des populations, qui n’ont plus accès aux zones encloses, et donc aux ressources qu’elles avaient l’habitude d’exploiter. Les chercheurs tirent la sonnette d’alarme et enjoignent les politiciens, comme les gestionnaires, à revoir leur copie afin que les marais à mangroves puissent se maintenir en zones côtières dans toute leur diversité et leur richesse.

Partenaires

Université Assane Seck de Ziguinchor, Sénégal
Can Tho University, Vietnam
National Museums of Kenya, Kenya
Partenariat régional pour la conservation de la zone côtière et marine de l’Afrique de l’Ouest (PRCM)
Instituto Superior d’Agronomia, Portugal

Table des illustrations

Légende Mangrove, Parc national des Galápagos, Équateur.
Crédits © naturexpose.com/Olivier Dangles et François Nowicki.
URL http://books.openedition.org/irdeditions/docannexe/image/43539/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 150k
Légende Chantier d’huîtres, Casamance, Sénégal.
Crédits © ird /M.-C. Cormier-Salem
URL http://books.openedition.org/irdeditions/docannexe/image/43539/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 777k
URL http://books.openedition.org/irdeditions/docannexe/image/43539/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 13k

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