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Le détroit de Gibraltar (Antiquité - Moyen Âge). II

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Gwladys Bernard
, 
Aurélien Montel

Présentation

La série DÉTROIT

Daniel Baloup et Laurent Callegarin

Texte intégral

1Les singularités spatiales du détroit de Gibraltar ont été perçues et affrontées dès la plus haute antiquité. Sans remonter jusqu’aux expériences phéniciennes, l’ambition du programme DÉTROIT. Le détroit de Gibraltar, à la croisée des mers et des continents (époques ancienne et médiévale), financé par l’Agence nationale de la recherche et porté par la Casa de Velázquez, a été de proposer une relecture de ce territoire depuis la deuxième guerre punique jusqu’aux premiers temps de l’expansion européenne sur les rives septentrionales de l’Afrique (xive-xve siècle). Cette entreprise passait nécessairement à la fois par la compilation de nos connaissances sur la zone, très nombreuses mais morcelées, leur traitement scientifique sur la longue durée et un renouvellement de leur approche à travers les acquis récents des sciences sociales en matière d’analyse spatiale. L’équipe pluridisciplinaire et internationale (chercheurs marocains, espagnols, portugais, italiens, canadiens et français) a œuvré dans ce sens.

2Sur un axe nord-sud, l’étroitesse du Détroit lui assure un rôle privilégié, celui de point de passage pour tous les flux qui parcourent la région. Mais si la solution de continuité créée par le débouché de la Méditerranée dans l’océan Atlantique n’est pas un obstacle, elle induit néanmoins des contraintes géographiques que les sociétés autochtones et toutes celles qui sont intervenues dans la région ont dû surmonter, contourner ou fantasmer. Sur un axe est-ouest, le Détroit fonctionne comme une porte, généralement franchie de la mer Méditerranée vers l’espace océanique. L’ambiguïté du cadre spatial est, ici encore, manifeste : la possibilité de naviguer oriente les circuits, mais la difficulté à concevoir ce qui se trouve au-delà du passage, en dépit du caractère très précoce des premières explorations atlantiques, et les difficultés techniques posées par la navigation dans un milieu physique très différent de celui qui était jusqu’alors familier ont compliqué le franchissement de ce seuil.

3Aux contraintes naturelles se mêlent des aspects psychologiques et techniques qui influencent inévitablement les perceptions et représentations des lieux. Les dimensions sociales, qui englobent les pratiques économiques et le gouvernement, révèlent aussi des particularités dignes d’attention : intégrées au même espace politique et administratif à l’époque romaine et à celle des « empires » berbères, les deux rives du Détroit ont aussi été considérées, parfois simultanément, comme les confins de deux mondes affrontés, séparés au Moyen Âge par l’opposition entre Chrétienté et Islam. Cette compétition pour la domination politique de l’espace maritime passe par des infrastructures portuaires et militaires sur les côtes, mais aussi par la mise en place de stratégies de territorialisation de l’espace maritime via le contrôle de la navigation et des points névralgiques.

4Placer le détroit de Gibraltar au centre d’une réflexion sur les circulations et montrer, en faisant varier les échelles d’analyse, son rôle essentiel dans la construction de réseaux d’échanges, avant les découvertes océaniques, était l’un des enjeux majeurs de ce programme. Ces échanges sont d’abord commerciaux, avec l’organisation progressive d’un espace économique intégré qui met en relation, par ce goulet transocéanique, des régions parfois très éloignées. Mais la circulation des hommes ne se limite pas aux marchands, et inclut également les migrations de populations passant par le Détroit et les déplacements de personnes liés à l’unification politique ou culturelle (savants, hommes de religion) des deux rives. Enfin, elle intègre la diffusion des idées, des techniques, des pratiques agricoles, des modèles artistiques, etc. Une telle enquête impose de travailler sur le temps long, à la fois pour repérer les formes de continuité et les évolutions, mais aussi pour comprendre les spécificités propres du Détroit comme point structurant de l’espace habité durant l’Antiquité et le Moyen Âge.

5Les résultats de ce travail de recherche aboutissent à la publication, aux éditions de la Casa de Velázquez, de deux autres ouvrages collectifs thématiques :

Des Boscs, Françoise, Dejugnat, Yann, Haushalter, Arthur (éd.) [2019], Le détroit de Gibraltar (Antiquité – Moyen Âge), t. I : Représentations, perceptions, imaginaires.

Callegarin, Laurent, Valérian, Dominique (éd.), Le détroit de Gibraltar (Antiquité – Moyen Âge), t. III : Circulations, mobilités et réseaux d’échanges.

6En outre, un ouvrage de synthèse rend compte des avancées scientifiques sur cet espace géohistorique :

Lefebvre, Sabine, Picard, Christophe, Callegarin, Laurent, Valérian Dominique (2022), Le détroit de Gibraltar. À la croisée des mers et des continents (Antiquité – Moyen Âge), Toulouse, Presses universitaire du Midi.

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

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